Derrière ce titre surprenant, surtout en France où la séparation entre l’Église et l’État fait partie des principes fondateurs de la République, se cache une courte synthèse de la pensée du philosophe Hartmut Rosa sur l’état présent des sociétés occidentales. Ces dernières seraient prises, selon lui, dans une « stabilisation dynamique » ou une « immobilité fulgurante » qui les conduisent à ne pouvoir maintenir leur niveau de vie qu’en croissant à un rythme toujours plus rapide. Ainsi, les entreprises doivent chercher toujours plus de clients et de marchés potentiels, pas nécessairement pour accroître leurs marges, mais au moins pour tenter de les maintenir. Aujourd’hui, les parents travaillent dans l’espoir, non pas de préparer une société meilleure pour leurs enfants, mais dans l’espoir de pouvoir maintenir leur niveau de vie. La conséquence immédiate pour chacun est une sensation d’accélération du temps et de l’existence, avec pour corollaire la multiplication des burn-out, dépressions et autres maladies modernes de l’esprit.
Face à cette situation, H. Rosa invite depuis plusieurs années à trouver la « résonance », cet état dans lequel les choses prennent du sens, des liens s’établissent entre l’environnement et nous. Nous entrons en quelque sorte en communion avec ce qui nous entoure. Le philosophe revient sur ce concept de résonance : il présente quatre grandes caractéristiques, qui sont le moment où on est affecté par quelque chose (un fait ou une situation nous interpelle, nous fait lever la tête du guidon et sortir de notre quotidien) ; l’entrée en relation avec ce qui nous a atteints (nous réagissons) ; la transformation (ce qui nous atteint fait changer notre attitude, notre pensée) ; dernière caractéristique, le fait qu’on ne puisse pas forcer cette expérience, elle s’impose à nous malgré nous. H. Rosa en conclut que la croyance religieuse s’apparente à une forme de résonance. Et c’est pourquoi elle lui paraît utile, de nos jours encore, à nos démocraties, pour redonner du sens à notre vie accélérée et prendre le temps de retrouver le sens des choses.