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Né le 15 février 1980 à Omaha, Nebraska, Conor Oberst est issu de la classe moyenne (son père est cadre dans une compagnie d'assurances, sa mère est enseignante). D'une précocité incroyable, il touche à son premier instrument de musique à trois ans et compose des bouts de chansons à dix ans sur une guitare sèche. Un album semi-artisanal, Water, est même enregistré et publié à compte d'auteur, en 1993, circulant surtout sous forme de cassette, comme les deux autres œuvres qu'il fera sous son nom. Sa démarche fait alors beaucoup penser à celle d'un Daniel Johnston, dont il est très fan, ainsi que, plus généralement, de tous les songwriters américains dignes de ce nom – il avoue cependant avoir eu son premier coup de foudre musical avec The Cure. Un an plus tard, il fonde le groupe Commander Venus, avec qui il joue sur deux albums et fait des tournées. Encore mineur, il met sur pied (à la dissolution de Commander Venus) le label Saddle Creek, qui dépend de Sony Music pour la distribution et sert de support à tous ses projets.
Conor le prolixeAyant l'intention de créer une nouvelle formation, il a l’idée du nom Bright Eyes en regardant à la télévision un film dans lequel un des personnages s’adresse à une femme en lui parlant de ses « yeux brillants ». En fait, ce Bright Eyes (qui accueillera au fil des ans un nombre considérable de membres ou seulement d'invités, mais de talent) se résumera toujours à Conor Oberst et à Mike Mogis, son producteur, même si le trompettiste et pianiste Nate Walcott acquiert une place de membre permanent – il est toutefois arrivé à Oberst de donner tout seul des concerts sous le nom Bright Eyes, à tel point qu'il est parfois difficile de faire la différence.
En 1997, il se jette à l'eau et utilise pour lui une vingtaine de chansons qu'il avait écrites au sein de Commander Venus sans les destiner à ce groupe : il en fait le premier disque de Bright Eyes, A Collection of Songs Written and Recorded 1995-1997, une sorte de vraie-fausse compilation, avec des plages de qualité sonore parfois très approximative mais où son talent de chanteur et d'auteur éclate de bout en bout. La critique s'enthousiasme pour le disque et, dès lors, la prolixité d'Oberst, véritable bâton d'énergie, n'aura pas de limites, le bonhomme enregistrant un nombre incalculable de chansons en dehors de ses albums pour Bright Eyes, aussi bien au sein d'autres projets (The Faint, The Magnetas, Desparecidos, Park Ave., Conor Oberst and the Mystic Valley Band) que sur des disques-hommages, des singles ou des EPs, certains titres n'existant aussi que sur la toile. Il peut même également sacrifier à une tradition anglo-saxonne pourtant aussi désuète que celle l'album de Noël, exercice dont il raffole, sans être la proie du ridicule, et il écume toutes les salles de concert, en groupe ou seul.
Chanteur engagé à gauche, il glisse parfois dans ses textes des allusions à la politique étrangère de son pays (surtout après le retour au pouvoir des Républicains en 2001), mais il aborde le plus souvent des thèmes très personnels et introspectifs, n'hésitant pas à évoquer notamment ses flirts plus que prononcés avec la drogue ou ses déboires sentimentaux. Avec ses disques (Letting Off the Happiness, Fevers and Mirrors, Lifted or The Story Is in the Soil...), il bâtit une oeuvre, ni plus ni moins, et se constitue un fan-club solide, ses concerts étant toujours très appréciés.
Troubadour acoustiqueC'est en 2002, avec Lifted or The Story Is in the Soil..., qu'il fait l'objet d'un traitement médiatique de faveur et entre presque dans les foyers américains. En octobre 2004, reconnaissance suprême pour lui : Bruce Springsteen (dont il fait la première partie lors d’un concert à Philadelphie) et Neil Young, autres personnes auxquelles on a pu le comparer, se déclarent fans de son travail, même Lou Reed lui adressant des compliments. Il se rapproche du « Boss » à un point tel qu'il accepte de le suivre avec R.E.M. sur la tournée Vote for Change mise sur pied en faveur du candidat démocrate John Kerry – en 2008, fidèle à ses convictions, il soutient désormais Barack Obama dans sa course à la magistrature suprême. Ses concerts lors de cette tournée Vote for Change et ses apparitions parfois controversées dans des émissions de télévision à fort taux d'écoute (The Tonight Show with Jay Leno, The Late Show with David Letterman, The Late Show with Craig Kilborn) lui permettent d'être découvert à une bien plus grande échelle.
Ayant assez d’inspiration et de culot, il frappe alors un grand coup en publiant l'année suivante deux albums simultanément, Digital Ash In a Digital Urn (résolument électro) et I’m Wide Awake, It’s Morning, plus dans la lignée de ses prédécents disques. Une chanson, « Lua », est même un succès en single. Sa notoriété lui permet alors d'entrer dans la « haute » et de faire la conquête de l'actrice Winona Ryder. Bien que toujours publiés par Saddle Creek, sa petite compagnie (relativement) indépendante, ses disques parviennent à se loger dans les premières places du classement américain et son personnage décalé de troubadour-poète à guitare acoustique, apparemment égaré dans le monde du digital, de l'Internet et du .mp3, séduit les masses, d'autant qu'il n'a pas la langue dans sa poche.
En même pas dix ans de carrière, Oberst, toujours débordant de projets, a déjà pu se permettre de mettre sur un CD, Noise Floor, ses fonds de tiroir et, en 2007, il progresse encore d'un cran en publiant Cassadaga, sans doute son album le plus marquant. Infatigable, il publie en août 2008 son premier vrai album solo sous le nom de Conor Oberst et compte évidemment partir le défendre sur la route.