« Je n’ai pas eu peur de la page blanche, je m’y suis confronté. Au bout de plusieurs années, ça me posait problème de me raconter de façon concise et brève sur un seul support. J’avais tellement de choses à dire que l’exercice me paraissait insupportable, j’avais besoin de place. C’est pour cela que j’ai écrit un livre, pour pallier à cette situation. Me forcer à noircir cette page blanche aurait été contre-productif… »
Heureusement, l’inspiration est revenue. Après plusieurs années de silence marquées par une autobiographie Là où le soleil disparaît (XO), une deuxième paternité, sa fille Mila est née en 2015, un album de reprises sorti début 2018, Love & Soul, CORNEILLE revient donc à ce qu’il sait faire de mieux. Des chansons. Ou plutôt des mélodies, immédiatement engageantes, car portées par une voix de velours. Agrémentées de textes, dans lesquels il se raconte et nous raconte.
C’est le propre d’un artiste, savoir canaliser nos attentes et nos envies, concentrer nos espoirs et nos tristesses.
« L’art à son état le plus pur serait l’expression de soi sans compromis. Mais à partir du moment où il se professionnalise, il faut trouver un équilibre, être à l’écoute de son temps et de son époque. La musique que j’aime me semble aujourd’hui plus familière, alors qu’à mes débuts, il fallait que je m’impose. Les gens n’avaient pas cette culture afro-américaine qui est mienne, surtout dans les pays francophones… »
Il est vrai que seize ans après ses débuts sur la scène des Francofolies, où il a été découvert, le R&B qui a bercé l’adolescence de CORNEILLE est devenu un courant majeur des musiques actuelle. Et puisqu’il a grandi, mûri même, 40 ans le 24 mars 2017, il a abordé cette nouvelle étape de sa carrière de manière totalement décomplexée.
Aucune pression, juste du plaisir, partagé, sur des rythmes immédiatement convaincants portés par des habillages finement ciselés. "Parce qu’on vient de loin", son premier tube, avait beau être un guitare voix, l’album dont il était extrait était un petit bijou de production. Ce savant mélange du home made artisanal et de la concision ultra ouvragée est devenu sa carte de visite.
« PARCE QU’ON AIME » son huitième album manie tous ces arcanes avec habileté. Et si le disque a bien été préparé à la maison, de façon intime, il se révèle un trésor d’arrangements. Une production soignée qui met en avant une voix chaude et immédiatement reconnaissable, celle d’un homme vulnérable mais puisant dans sa force intérieure une infinie volonté d’aller de l’avant.
Ecrivant ses chansons avec sa moitié, Sofia, c’est elle qui le pousse à mettre sa voix bien en avant. Une dynamique qui fonctionne quel que soit l’accompagnement choisi, acoustique ou électronique.
La thématique du disque est cette communication entre les hommes qui, malgré les progrès et les facilités, se complique chaque jour un peu plus. Dialogue envolé, qu’il soit amoureux, intergénérationnel ou politique... On l’a dit, les artistes ont ce don inné, pour le réparer. Par exemple, lorsqu’ils saisissent en quelques mots seulement ce quotidien dans lequel nous évoluons. CORNEILLE est une parfaite illustration.