C’étaient encore l’intendant, l’aumônier, parfois le maître veneur.
Au manoir du Roz, il n’y avait point d’hommes d’armes à demeure. Toute la maison, fors dom Sidoine, le chapelain, pienait, à l’occasion, l’épieu ou l’épée. Jeannin faisait office d’écuyer. Il y avait un petit farfadet nommé Marcou de Saint-Laurent, qui était page. L’intendant avait nom maître Bellamy ; il cumulait cet omce avec celui de majordone.
Ces divers officiers, avec Jeannine, fille de l’écuyer qui était en même temps chargé de l’éducation militaire du jeune Aubry avaient seuls le droit de s’asseoir à table.
Dom Sidoine servait de précepteurà Aubry.
Fier-à-Bras avait sa petite table particulière auprès de Mme Reine, qui conciliait ainsi sa gravité un peu vaniteuse et le faible qu’elle avait pour le nain.
On prit place.
Marcou de Saint-Laurent le page, laid petit coquin, fort peu semblable à ces enfants ennuyeux et langoureux qui lèvent leurs yeux blancs vers le ciel sur la couverture de nos romances, Marcou trouva moyen de frotter les cheveux rouges à Fier-à-Bras. Il avait quinze ans, ce Marcou ; il tirait la langue à Jeannine et ne se doutait pas que le XIXe siècle ferait sur lui soixante mille couplets idiots, mais romantiques, avec accompagnement de piano.
Il n’aimait guère que le brelan, le vin nantais, qui n’est pourtant pas nectar, et le noble jeu de la grenouille, dont il sera parlé plus tard.
Fier-à-Bras lui rendit sa politesse en lui pinçant le mollet, qu’il avait maigre, jusqu’au sang.
Sur ces entrefaites, chacun se recueillit, et dom Sidoine prononça le Benedicite.
— Amen ! dit Fier-à-Bras, qui pinça le mollet du page Marcou de Saint-Laurent, pour la seconde fois. Le page voulut lui rendre son espièglerie, mais Mme Reine toussa sec et dit à Jeannine :