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Frédéric Bastiat

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Frédéric Bastiat.

Frédéric Bastiat, né le à Bayonne et mort le à Rome, est un économiste, magistrat et homme politique libéral français.

Citations

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Ce qu'on voit et ce qu'on ne voit pas, 1850

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Dans la sphère économique, un acte, une habitude, une institution, une loi n'engendrent pas seulement un effet, mais une série d'effets. De ces effets, le premier seul est immédiat ; il se manifeste simultanément avec sa cause, on le voit. Les autres ne se déroulent que successivement, on ne les voit pas ; heureux si on les prévoit.

Entre un mauvais et un bon Économiste, voici toute la différence : l’un s’en tient à l'effet visible ; l'autre tient compte et de l'effet qu'on voit et de ceux qu'il faut prévoir.

Mais cette différence est énorme, car il arrive presque toujours que, lorsque la conséquence immédiate est favorable, les conséquences ultérieures sont funestes, et vice versa. - D'où il suit que le mauvais Économiste poursuit un petit bien actuel qui sera suivi d'un grand mal à venir, tandis que le vrai économiste poursuit un grand bien à venir, au risque d'un petit mal actuel.
  • Incipit


Quand Jacques Bonhomme donne cent sous à un fonctionnaire contre un service réellement utile, c'est exactement comme quand il donne cent sous à un cordonnier contre une paire de souliers. Donnan donnant, partant quittes. Mais, quand Jacques Bonhomme livre cent sous à un fonctionnaire pour n'en recevoir aucun service ou même pour en recevoir des vexations, c'est comme s'il les livrait à un voleur. Il ne sert de rien de dire que le fonctionnaire dépensera ces cent sous au grand profit du travail national ; autant en eût fait le voleur ; autant en ferait Jacques Bonhomme s'il n'eût rencontré sur son chemin ni le parasite extra-légal ni le parasite légal.


Ensuite, est-il certain que les subventions favorisent le progrès de l'art ? C'est une question qui est loin d'être résolue et nous voyons de nos yeux que les théâtres qui prospèrent sont ceux qui vivent de leur propre vie. Enfin, s'élevant à des considérations plus hautes, on peut faire observer que les besoins et les désirs naissent les uns des autres et s'élèvent dans des régions de plus en plus épurées, à mesure que la richesse publique permet de les satisfaire ; que le gouvernement n'a point à se mêler de cette correspondance, puisque, dans un état donné de la fortune actuelle, il ne saurait stimuler, par l'impôts, les industries de luxe sans froisser les industries de nécessité, intervertissant ainsi la marche naturelle de la civilisation. On peut faire observer que ces déplacements artificiels des besoins, des goûts, du travail et de la population, placent les peuples dans une situation précaire et dangereuse, qui n'a plus de base solide.


Je suis de ceux, je l'avoue, qui pensent que le choix, l'impulsion doit venir d'en bas, non d'en haut, des citoyens, non du législateur ; et la doctrine contraire me semble conduire à l'anéantissement de la liberté et de la dignité humaines.


Mais, par une déduction si fausse qu'injuste, sait-on de quoi on accuse les économistes ? C’est, quand nous repoussons la subvention, de repousser la chose même qu'il s'agit de subventionner, et d'être les ennemis de tous les genres d'activité, parce que nous voulons que ces activités, d'une part soient libres, et de l'autre cherchent en elles-mêmes leur propre récompense. Ainsi, demandons-nous que l'État n'intervienne pas, par l'impôt, dans les matières religieuses ? nous sommes des athées. Demandons-nous que l'État n'intervienne pas, par l'impôt, dans l'éducation ? nous haïssons les lumières. Disons-nous que l'État ne doit pas donner, par l'impôt, une valeur factice au sol, à tel ordre d'industrie ? nous sommes les ennemis de la propriété et du travail. Pensons-nous que l'État ne doit pas subventionner les artistes ? nous sommes des barbares qui jugeons les arts inutiles.
Je proteste ici de toutes mes forces contre ces déductions.


Loin que nous entretenions l'absurde pensée d'anéantir la religion, l'éducation, la propriété, le travail et les arts quand nous demandons que l'État protège le libre développement de tous ces ordres d'activité humaine, sans les soudoyer au dépens les uns des autres, nous croyons au contraire que toutes ces forces vives de la société se développeraient harmonieusement sous l'influence de la liberté, qu'aucune d'elles ne deviendrait, comme nous le voyons aujourd'hui, une source de troubles, d'abus, de tyrannie et de désordre.
Nos adversaires croient qu'une activité qui n'est ni soudoyée ni réglementée est une activité anéantie. Nous croyons le contraire. Leur foi est dans le législateur, non dans l'humanité. La nôtre est dans l'humanité, non dans le législateur.


Quand il s'agit d'impôts, messieurs, prouvez en l'utilité par des raisons tirées du fond, mais non point par cette malencontreuse assertion : « Les dépenses publiques font vivre la classe ouvrière. » Elle a le tort de dissimuler un fait essentiel, à savoir que les dépenses publiques se substituent toujours à des dépenses privées, et que, par conséquent, elles font bien vivre un ouvrier au lieu d'un autre, mais n'ajoute rien au lot de la classe ouvrière prise en masse. Votre argumentation est fort de mode, mais elle est trop absurde pour que la raison n'en ait pas raison.


Cela ne doit pas nous surprendre. Dans une fausse voie on est toujours inconséquent, sans quoi on tuerait l'humanité. Jamais on n'a vu ni on ne verra un principe faux poussé jusqu'au bout. J'ai dit ailleurs : l'inconséquence est la limite de l'absurdité. J'aurais pu ajouter : elle en est en même temps la preuve.


Ainsi les industries sont solidaires. Elles forment un vaste ensemble dont toutes les parties communiquent par des canaux secrets. Ce qui est économisé sur l'une profite à toutes. Ce qui importe, c'est de bien comprendre que jamais, au grand jamais, les économies n'ont lieu aux dépens du travail et des salaires.


Quelle que soit la somme de numéraire et de papier qui circule, l'ensemble des emprunteurs ne peut recevoir plus de charrues, de maisons, d'outils, d'approvisionnements, de matières premières, que l'ensemble des prêteurs n'en peut fournir.


De ce que les dépenses publiques déplacent le travail sans l’accroître, il en résulte contre elles une seconde et grave présomption. Déplacer le travail, c'est déplacer les travailleurs, c'est troubler les lois naturelles qui président à la distribution de la population sur le territoire. Quand 50 millions sont laissés au contribuable, comme le contribuable est partout, ils alimentent du travail dans les quarante mille communes de France ; ils agissent dans le sens d'un lien qui retient chacun sur sa terre natale ; ils se répartissent sur tous les travailleurs possibles et sur toutes les industries imaginables.


Que si l'état, soutirant ces 50 millions aux citoyens, les accumule et les dépense sur un point donné, il attire sur ce point une quantité proportionnelle de travail déplacé, un nombre correspondant de travailleurs dépaysés, population flottante, déclassée, et j'ose dire dangereuse quand le fonds est épuisé ! - Mais il arrive ceci (et je rentre par-là dans mon sujet) : cette activité fiévreuse, et pour ainsi dire soufflée sur un étroit espace, frappe tous les regards, c'est ce qu'on voit ; le peuple applaudit, s’émerveille sur la beauté et la facilité du procédé, on réclame le renouvellement et l'extension. Ce qu'il ne voit pas, c'est qu'une quantité égale de travail, probablement plus judicieux, a été frappé d'inertie dans tout le reste de la France.


Dans la sphère économique, un acte, une habitude, une institution, une loi n'engendrent pas seulement un effet, mais une série d'effets. De ces effets, le premier seul est immédiat ; il se manifeste simultanément avec sa cause, on le voit. Les autres ne se déroulent que successivement, on ne les voit pas; heureux si on les prévoit. Entre un mauvais et un bon économiste, voici toute la différence: l'un s'en tient à l'effet visible ; l'autre tient compte et de l'effet qu'on voit et de ceux qu'il faut prévoir.


Œuvres complètes, 1870

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Bon Dieu! que de peine à prouver, en économie politique, que deux et deux font quatre; et, si vous y parvenez, on s'écrie : « c'est si clair, que c'en est ennuyeux. » — Puis on vote comme si vous n'aviez rien prouvé du tout.


Lorsque la Spoliation est devenue le moyen d’existence d’une agglomération d’hommes unis entre eux par le lien social, ils se font bientôt une loi qui la sanctionne, une morale qui la glorifie.
  • Œuvres complètes (1848), Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1863, t. 4, partie Sophismes économiques, deuxième série, chap. 1, p. 128 (texte intégral sur Wikisource)


Faire intervenir l’État, lui donner pour mission de pondérer les profits et d’équilibrer les fortunes, en prenant aux uns, sans consentement, pour donner aux autres, sans rétribution, le charger de réaliser l’œuvre du nivellement par voie de spoliation, assurément c’est bien là du Communisme. Les procédés employés par l’État, dans ce but, non plus que les beaux noms dont on décore cette pensée, n’y font rien. Qu’il en poursuive la réalisation par des moyens directs ou indirects, par la restriction ou par l’impôt, par les tarifs ou par le Droit au travail ; qu’il la place sous invocation de l’égalité, de la solidarité, de la fraternité, cela ne change pas la nature des choses ; le pillage des propriétés n’en est pas moins du pillage parce qu’il s’accomplit avec régularité, avec ordre, systématiquement et par l’action de la loi.
  • Œuvres complètes (1849), Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1863, t. 4, partie Protectionisme et communisme, p. 515 (texte intégral sur Wikisource)


Autres

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L'État, c'est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s’efforce de vivre aux dépens de tout le monde.
  • Repris dans l'édition intégrale Guillaumin 1863, sous le titre L'État.


Il faut le dire : il y a trop de grands hommes dans le monde ; il y a trop de législateurs, organisateurs, instituteurs de sociétés, conducteurs de peuples, pères des nations, etc. Trop de gens se placent au dessus de l'humanité pour la régenter, trop de gens font métier de s'occuper d'elle.


Si j’avais le malheur de ne voir dans le capital que l’avantage de capitalistes, et de ne saisir ainsi qu’un côté, et, assurément, le côté le plus étroit et le moins consolant de la science économique, je me ferais Socialiste ; car de manière ou d’autre, il faut que l’inégalité s’efface progressivement, et si la liberté ne renfermait pas cette solution, comme les socialistes je la demanderais à la loi, à l’État, à la contrainte, à l’art, à l’utopie.


En vérité, réformateurs modernes, quand vous voulez remplacer cet ordre admirable par un arrangement de votre invention, il y a deux choses (et elles n’en font qu’une) qui me confondent : votre manque de foi en la Providence et votre foi en vous-mêmes ; votre ignorance et votre orgueil.
  • Œuvres complètes, Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1870, t. 6, partie Harmonies Économiques, chap. Capital, p. 246 (texte intégral sur Wikisource)


Eh quoi ! est-il donc si difficile de laisser les hommes essayer, tâtonner, choisir, se tromper, se rectifier, apprendre, se concerter, gouverner leurs propriétés et leurs intérêts, agir pour eux-mêmes, à leurs périls et risques, sous leur propre responsabilité ; et ne voit-on pas que c’est ce qui les fait hommes  ? Partira-t-on toujours de cette fatale hypothèse, que tous les gouvernants sont des tuteurs et tous les gouvernés des pupilles ?
  • Œuvres complètes, Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1870, t. 6, partie Harmonies Économiques, chap. Des Salaires, p. 462 (texte intégral sur Wikisource)


Sous ce régime le peuple doit nécessairement souffrir : la raison en est que le système des services publics, outre qu’il trouble le nivellement des valeurs, ce qui est injustice, amène aussi une déperdition fatale de richesse, ce qui est ruine ; ruine et injustice, c’est souffrance et mécontentement — quatre funestes ferments dans la société, lesquels, combinés avec le déplacement de la responsabilité, ne peuvent manquer d’amener ces convulsions politiques dont nous sommes, depuis plus d’un demi-siècle, les malheureux témoins.
  • Œuvres complètes, Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1870, t. 6, partie Harmonies Économiques, chap. Services privés, service public, p. 547 (texte intégral sur Wikisource)


La communauté seule doit décider de tout, régler tout : éducation, nourriture, salaires, plaisirs, locomotion, affections, familles, etc., etc. — Or la société s’exprime par la loi, la loi c’est le législateur. Donc voilà un troupeau et un berger, — moins que cela encore, une matière inerte et un ouvrier. On voit où mène la suppression de la Responsabilité et de l’individualisme.
  • Œuvres complètes, Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1870, t. 6, partie Harmonies Économiques, chap. Responsabilité, p. 614 (texte intégral sur Wikisource)


À l’intelligence il faut un guide, une lumière, et ce ne peut être qu’un principe. Au cœur humain il faut un mobile qui détermine l’action, le dévouement, et au besoin le sacrifice ; et l’on ne se dévoue pas à l’expédient, mais au principe. Consultez l’histoire, Messieurs, voyez quels sont les noms chers à l’humanité, et vous reconnaîtrez qu’ils appartiennent à des hommes animés d’une foi vive. Je gémis pour mon siècle et pour mon pays de voir l’expédient en honneur, la dérision et le ridicule réservés au principe ; car jamais rien de grand et de beau ne s’accomplit dans le monde que par le dévouement à un principe.
  • Œuvres complètes, Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1847, t. 2, chap. Troisième discours, à Paris, p. 258 (texte intégral sur Wikisource)


Liens externes

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