« Bernard de Ventadour » : différence entre les versions
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'''Bernard de Ventadour''' (''Bernat de Ventadorn'' en [[ancien occitan]]), né vers 1125 à [[Moustier-Ventadour|Ventadour]] (aujourd’hui dans le département de la [[Corrèze (département)|Corrèze]]) et mort vers 1200 à l'[[abbaye de Dalon]], en [[Périgord]], est l'un des plus célèbres [[troubadour]]s [[occitan]]s. |
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== Biographie == |
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Bernard de Ventadour est né de parents appartenant à la Seigneurie du {{s-|XII}}. Son père est soldat et sa mère servante, fille de cuisine. La famille des vicomtes développe et sait transmettre l'art littéraire et artistique. Une école a été fondée par le vicomte Ebles {{Ier}}, Seigneur du [[Château de Ventadour (Corrèze)|château de Ventadour]]. Le jeune Bernard, doué en chant et féru de poésie depuis sa tendre enfance, est bientôt remarqué, puis formé par le vicomte Ebles {{II}}, surnommé ''Lo Cantador'' (le chanteur). |
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Après 1150, une troisième génération de troubadours débute avec Bernard de Ventadour. Sa formation de compositeur poète terminée, le chansonnier |
Après 1150, une troisième génération de troubadours débute avec Bernard de Ventadour. Sa formation de compositeur poète terminée, le chansonnier entame une carrière de troubadour, déjà fort apprécié lors des fêtes mondaines. Il évolue de cour en cour : on le retrouve, en 1154, en Angleterre pour le couronnement du roi [[Henri II (roi d'Angleterre)|Henri {{II}}]] et de son épouse [[Aliénor d'Aquitaine]], puis, entre autres pied-à-terre, à la cour du [[Liste des comtes de Toulouse|comte de Toulouse]] {{noble|Raymond V}}. Le poète écrit des œuvres à la demande, qui rendent hommage spécialement à des dames, notamment la comtesse [[Ermengarde de Narbonne]], protectrice des troubadours. |
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Virtuose reconnu des chansons ([[Canso (chanson)|cansos]]) d'amour courtoises, il s'associe au groupe de troubadours les plus |
Virtuose reconnu des chansons ([[Canso (chanson)|''cansos'']]) d'amour courtoises, il s'associe au groupe de troubadours les plus célèbres de son époque : [[Giraut de Bornelh]], troubadour moraliste austère à la cour du vicomte [[Adémar V de Limoges|Adémar {{V}}]], [[Peire Rogier]], l'Auvergnat poète officiel de la vicomtesse Ermengarde de Narbonne, le comte [[Raimbaut d'Orange]], bienfaiteur, Peire Raimon, fils d'un bourgeois toulousain, [[Peire Vidal]], poète à la cour de {{noble|Raymond V}} puis poète attitré d' [[Alphonse II (roi d'Aragon)|Alphonse {{II}}]] roi d'Aragon (1162-1196) et le riche marchand [[Folquet de Marseille]]. Ensemble ils créent des musiques de forme nouvelle, élevant le langage des chansons profanes au rang d'art musical. Il suit le mouvement de composition et perfectionne la mélodie appelée [[polyphonie]] existant depuis le {{s-|IX}} mérovingien. La musique est improvisée beaucoup plus en harmonie avec la voix et les paroles des chansons, les notes de musique représentées sur les partitions par des points carrés<ref>{{Ouvrage|auteur1=Paule Druilhe|titre=Histoire de la musique classe de 5ème|passage=page 32|lieu=Paris|éditeur=Librairie Hachette|année=1949}}.</ref>. Bernard de Ventadour a sûrement joué de tous les instruments à cordes utilisés au [[Moyen Âge]] : l'[[orgue portatif]] très courant aux évènements festifs, la [[harpe]] surtout employée par les jeunes seigneurs, le [[psaltérion]] sorte de harpe miniature, le [[tympanon]] ancêtre du piano, le [[luth]] d'origine arabe et la [[vielle à roue]] apparue au {{s-|XII}}<ref>{{Lien web |auteur=Direction de S. Gebelin |titre=Musique du Moyen Âge. Bernard de Ventadour, ''quan vei la lauzet a mover''|auteur/responsable intellectuel= |url=Source Gallica/.bnf.fr/BnF |accès url=inscription |site=bnf.fr |date=1948 |consulté le=25 mars 2022 |nature document=Disque sonore instrumental des archives}}</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |auteur=Direction de R. Hans |titre=Musique du moyen âge Bernard de Ventadour auteur-compositeur |url=Source Gallica/.bnf.fr/BnF |accès url=inscription |site=BnF.fr |date=1954 |consulté le=25 mars 2022 |nature document=Sur disque sonore instrumental archivé}}</ref>. |
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Le poète professionnel raconte sa vie dans ses chansons, ce qui est exceptionnel car les troubadours de niveau social pauvre et même modeste de cette ère médiévale n'ont pas de vidas-mémoires. Quelques strophes qu'il a écrites ont été mal interprétées lors de leur |
Le poète professionnel raconte sa vie dans ses chansons, ce qui est exceptionnel car les troubadours de niveau social pauvre et même modeste de cette ère médiévale n'ont pas de {{quoi|vidas-mémoires}}. Quelques strophes qu'il a écrites ont été mal interprétées lors de leur traduction, déformées au cours des siècles. Certains ont confondu les amies qu'il chantait, telles que Bel Vezer-Bel aspect et la comtesse de Ventadour<ref>{{Ouvrage|auteur1=Ernest Hoepffner|titre=Les Troubadours|passage=page 59|lieu=Paris|éditeur=Collection Armand Colin|année=1955|numéro édition=295}}</ref>. D'autres vers ont été transposés par l'imaginaire des successeurs littéraires, tel [[Uc de Saint-Circ]], pour faire de sa vie une intrigue romanesque. L'auteur a recueilli une description d'une partie de sa vie auprès du Vicomte Ebles {{IV}} de Ventadour, descendant d'Ebles {{II}}, poète protecteur de Bernard<ref>{{Ouvrage|auteur1=Joseph Anglade|titre=Les troubadours, vies, œuvres influence en Limousin|année=1919|lire en ligne=source Gallica/.bnf.fr/BnF}}</ref>. Son épouse, Agnès de Montluçon, et Bernard ont peut-être eu une liaison poétique qui aurait duré longtemps, si les médisants n'avaient perdu le poète dans l'esprit de son Seigneur. Ebles {{II}}, exaspéré par ses frasques, restreignit son affection envers Bernard par de la froideur. Ebles {{III}} lui demanda de s'exiler quelques mois. Il n'est jamais revenu dans le Limousin, préférant exercer son métier librement au-dehors des terres de la vicomté. Bernard de Ventadour ne fut pas trop marqué par cette aventure mais il se plaignit toute sa vie des exagérations provocantes de ses rivaux. |
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''La [[Satire]] du troubadour'', écrit de [[Peire d'Alvernha|Pierre d'Auvergne]] - Bernard était son aîné - sous-entend dans des vers moqueurs qu'il n'était peut-être pas issu de serviteurs, mais le bâtard du seigneur Ebles {{II}} de Ventadour ou de Guillaume {{IX}} d'Aquitaine. |
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L'auteur de sa vida imagine que |
L'auteur de {{laquelle|sa ''[[Vida (biographie)|vida]]''}} imagine que Bernard a commis une erreur de jeunesse qui ne lui sera jamais pardonnée, il aimait en secret la jeune vicomtesse de Ventadour, épouse d'Ebles {{III}}. Tous les deux furent disgraciés du château par le vicomte Ebles {{III}}, jaloux. Ses pas le mènent à [[Montluçon]] puis à [[Toulouse]]. Auparavant, il a été reçu et hébergé à la cour d'{{Noble|Henri II (roi d'Angleterre)}} et d'[[Aliénor d'Aquitaine]]<ref>{{Ouvrage|auteur1=Jean Flori|titre=Aliénor d'Aquitaine, La reine insoumise|lieu=Paris|éditeur=Payot|année=2004|pages totales=544|passage=410-411|isbn=2-228-89829-5}}</ref>, dont il fut obligé de partir, un départ imposé par une vie mouvementée à la recherche de seigneurs, de château en château<ref>{{Ouvrage|auteur1=Ernest Hoepffner|titre=Les troubadours|passage=48|lieu=Paris|éditeur=Collection Armand Colin|numéro dans collection=295|année=1955|pages totales=224}}</ref>. Aliénor, [[Liste des ducs d'Aquitaine|duchesse d'Aquitaine]] et reine d'Angleterre, était la petite-fille du duc d'Aquitaine et [[Liste des comtes de Poitiers|comte de Poitiers]] (1071-1126), {{Noble|Guillaume IX d'Aquitaine}} surnommé le troubadour{{Sfn|Flori|2004|p=38}}, auteur de plusieurs poèmes chantés en [[Occitan|langue d'oc]]. Protectrice, d'un caractère gai et enjoué, Aliénor avait hérité de son grand-père un grand savoir pour la poésie, de la sympathie en faveur des poètes, ainsi chantée par les ménestrels et les troubadours. En 1152, devenue l'épouse du futur roi d'Angleterre, [[Henri II (roi d'Angleterre)|Henri II]] Plantagenêt, duc de Normandie et comte d'Anjou, la duchesse d'Aquitaine suit son mari en Angleterre où Bernard de Ventadour a œuvré lors du couronnement du roi d'Angleterre en 1154{{Refnec|date=décembre 2024}}. Il revient dans le [[Comté de Toulouse]] au service de [[Raymond V de Toulouse|Raymond {{V}} de Toulouse]] puis il séjourne à Narbonne et, selon sa ''[[Vida (biographie)|vida]]'', il finit par rejoindre l'ordre de l'abbaye de Dalon après la mort du comte de Toulouse en 1194. Il y termine sa vie en retraite ayant abandonné la création de chansons et renoncé aux plaisirs du siècle. |
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Bernard de Ventadour cultive et partage la musique en composant des chansons essentiellement inspirées de sentiments |
Bernard de Ventadour cultive et partage la musique en composant des chansons essentiellement inspirées de sentiments réellement vécus au long de ses voyages à travers les chemins du [[midi de la France]], jusqu'aux Pyrénées et le Rhône, dans un style toujours sincère, sensible et délicat, à la tonalité parfois triste, mélancolique, travaillant dans une forme à strophes courtes de huit vers brefs huit syllabes par décasyllabes<ref>{{Ouvrage|titre=les Troubadours|passage=page 50|lieu=Paris|éditeur=Collection Armand Colin}}</ref>. Son style poétique est simple, clair, d'une rare musicalité sonore, agrémentée d'images sublimées et vertueuses. Les poésies qu'il chantait lui-même sont riches, idéalistes, variées et d'une harmonie gracieuse. |
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Troubadour précurseur de la chanson française, Bernard de Ventadour |
Troubadour précurseur de la [[chanson française]], Bernard de Ventadour fut le créateur incontesté de la poésie lyrique. Son talent, approuvé par ses pairs, lui permit de poser les bases du genre de la chanson. Il retranscrit dans ses chants le contenu de son existence, riche d'expériences sentimentales personnelles (notamment ses conquêtes amoureuses, transposées derrière d'autres noms). Lui-même se qualifiait avec humour comme le grand chantre de l'amour. Le poète et écrivain italien [[Giosuè Carducci]] (1835-1907) lui a consacré une étude, intitulée ''Bernard de Ventadour un poète de l'amour'', démontrant qu'il n'existe que l'amour qui puisse lui donner de l'inspiration pour écrire ses poèmes. Dans un répertoire d'œuvres achevées, on peut compter les strophes appelées (par les historiens et érudits) ''La Chanson de l'Alouette'', la plus célèbre de toutes<ref>{{Ouvrage|auteur1=Carl Appel|titre=Bernart von Ventadorn|éditeur=Halle, Niemeyer Source Gallica/.bnf.fr/BnF|année=1915|pages totales=401 pages}}</ref>. |
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Ses quarante-cinq chansons dont vingt écrites en occitan, riches et limpides, nourries de sentiments personnels, font allusion aux personnages historiques : le Reis Engles, le roi d'Angleterre, le seigneur de Beaucaire ou Raynard {{V}}, le comte de Toulouse. On le considère comme l'un des meilleurs musiciens de son temps et parmi les plus grands poètes de l'amour en langue d'oc. |
Ses quarante-cinq chansons dont vingt écrites en occitan, riches et limpides, nourries de sentiments personnels, font allusion aux personnages historiques : le ''Reis Engles'', le roi d'Angleterre, le seigneur de Beaucaire ou Raynard {{V}}, le comte de Toulouse. On le considère comme l'un des meilleurs musiciens de son temps et parmi les plus grands poètes de l'amour en langue d'oc. |
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== Postérité == |
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[[Francis Cabrel]] l'évoque, dans la chanson ''Rockstars du Moyen Âge'' (album ''À l'aube revenant'') sortie en 2020. |
* [[Francis Cabrel]] l'évoque, dans la chanson ''[[Rockstars du Moyen Âge]]'' (album ''À l'aube revenant'') sortie en 2020. |
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:Can vei la lauzeta mover, |
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:De joi sas alas contra.l rai, |
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:Que s'oblid'es laissa chazer, |
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:Per la doussour c'al cor li vai, |
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:Ai! Tan grans enveia m'en ve, |
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:De cui qu'eu veia jauzion, |
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:Meravilhas ai, car desse, |
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:Lo cors de dezirer no.n fon. |
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Dame, si mes yeux ne vous voient, sachez que mon cœur vous voit ; |
Dame, si mes yeux ne vous voient, sachez que mon cœur vous voit ; |
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Ne vous affligez pas plus que je ne m'afflige, car je sais qu'on vous surveille à cause de moi. |
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Et si le mari vous bat, gardez bien qu'il ne vous batte pas le cœur. |
Et si le mari vous bat, gardez bien qu'il ne vous batte pas le cœur. |
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S'il vous cause du chagrin, causez lui en aussi. |
S'il vous cause du chagrin, causez lui en aussi. |
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La dernière strophe de la ''Chanson de l'Alouette'' utilise le prénom Tristan - peut-être est-ce pour une dame aimée, on ne sait pas - et se conclut en un adieu mélancolique : |
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:Tristan, ges no.n auretz de me, |
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:Qu'eu m'en vau, chaitius, no sai on, |
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:De chantar me gic e.m recre, |
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:E de joi e d'amor m'escon. |
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=== Extrait d'un poème === |
=== Extrait d'un poème === |
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Mieux que nul autre chanteur, |
Mieux que nul autre chanteur, |
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Car je tourne davantage mon cœur à l'amour |
Car je tourne davantage mon cœur à l'amour |
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Et suis mieux fait à son commandement. |
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Corps et cœur, et savoir et esprit, |
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Et force et pouvoir j'y ai mis ; |
Et force et pouvoir j'y ai mis ; |
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== Bibliographie == |
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* Moshé Lazar, ''Chansons d'amour de Bernart de Ventadorn'', Carrefour Ventadour, 2001 {{ISBN|2-9516848-0-0}} |
* Moshé Lazar, ''Chansons d'amour de Bernart de Ventadorn'', Carrefour Ventadour, 2001 {{ISBN|2-9516848-0-0}} |
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[[Catégorie:Écrivain médiéval de langue d'oc]] |
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[[Catégorie:Troubadour]] |
[[Catégorie:Troubadour du XIIe siècle]] |
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[[Catégorie:Littérature occitane]] |
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[[Catégorie:Poète occitan du XIIe siècle]] |
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[[Catégorie:Décès en 1195]] |
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[[Catégorie:Naissance en Corrèze]] |
Dernière version du 14 décembre 2024 à 10:15
Nom de naissance | Bernard de Ventadour (Bernart de Ventadorn) |
---|---|
Naissance |
v. 1120 Ventadour |
Décès |
v. 1195 Abbaye de Dalon |
Activité principale |
Troubadour puis moine |
Langue d’écriture | occitan |
---|---|
Genres |
Tenson, canso, partimen, descort, alba, sirventès, lyrisme |
Bernard de Ventadour (Bernat de Ventadorn en ancien occitan), né vers 1125 à Ventadour (aujourd’hui dans le département de la Corrèze) et mort vers 1200 à l'abbaye de Dalon, en Périgord, est l'un des plus célèbres troubadours occitans.
Biographie
[modifier | modifier le code]Bernard de Ventadour est né de parents appartenant à la Seigneurie du XIIe siècle. Son père est soldat et sa mère servante, fille de cuisine. La famille des vicomtes développe et sait transmettre l'art littéraire et artistique. Une école a été fondée par le vicomte Ebles Ier, Seigneur du château de Ventadour. Le jeune Bernard, doué en chant et féru de poésie depuis sa tendre enfance, est bientôt remarqué, puis formé par le vicomte Ebles II, surnommé Lo Cantador (le chanteur).
Après 1150, une troisième génération de troubadours débute avec Bernard de Ventadour. Sa formation de compositeur poète terminée, le chansonnier entame une carrière de troubadour, déjà fort apprécié lors des fêtes mondaines. Il évolue de cour en cour : on le retrouve, en 1154, en Angleterre pour le couronnement du roi Henri II et de son épouse Aliénor d'Aquitaine, puis, entre autres pied-à-terre, à la cour du comte de Toulouse Raymond V. Le poète écrit des œuvres à la demande, qui rendent hommage spécialement à des dames, notamment la comtesse Ermengarde de Narbonne, protectrice des troubadours.
Virtuose reconnu des chansons (cansos) d'amour courtoises, il s'associe au groupe de troubadours les plus célèbres de son époque : Giraut de Bornelh, troubadour moraliste austère à la cour du vicomte Adémar V, Peire Rogier, l'Auvergnat poète officiel de la vicomtesse Ermengarde de Narbonne, le comte Raimbaut d'Orange, bienfaiteur, Peire Raimon, fils d'un bourgeois toulousain, Peire Vidal, poète à la cour de Raymond V puis poète attitré d' Alphonse II roi d'Aragon (1162-1196) et le riche marchand Folquet de Marseille. Ensemble ils créent des musiques de forme nouvelle, élevant le langage des chansons profanes au rang d'art musical. Il suit le mouvement de composition et perfectionne la mélodie appelée polyphonie existant depuis le IXe siècle mérovingien. La musique est improvisée beaucoup plus en harmonie avec la voix et les paroles des chansons, les notes de musique représentées sur les partitions par des points carrés[1]. Bernard de Ventadour a sûrement joué de tous les instruments à cordes utilisés au Moyen Âge : l'orgue portatif très courant aux évènements festifs, la harpe surtout employée par les jeunes seigneurs, le psaltérion sorte de harpe miniature, le tympanon ancêtre du piano, le luth d'origine arabe et la vielle à roue apparue au XIIe siècle[2],[3].
Le poète professionnel raconte sa vie dans ses chansons, ce qui est exceptionnel car les troubadours de niveau social pauvre et même modeste de cette ère médiévale n'ont pas de vidas-mémoires[Quoi ?]. Quelques strophes qu'il a écrites ont été mal interprétées lors de leur traduction, déformées au cours des siècles. Certains ont confondu les amies qu'il chantait, telles que Bel Vezer-Bel aspect et la comtesse de Ventadour[4]. D'autres vers ont été transposés par l'imaginaire des successeurs littéraires, tel Uc de Saint-Circ, pour faire de sa vie une intrigue romanesque. L'auteur a recueilli une description d'une partie de sa vie auprès du Vicomte Ebles IV de Ventadour, descendant d'Ebles II, poète protecteur de Bernard[5]. Son épouse, Agnès de Montluçon, et Bernard ont peut-être eu une liaison poétique qui aurait duré longtemps, si les médisants n'avaient perdu le poète dans l'esprit de son Seigneur. Ebles II, exaspéré par ses frasques, restreignit son affection envers Bernard par de la froideur. Ebles III lui demanda de s'exiler quelques mois. Il n'est jamais revenu dans le Limousin, préférant exercer son métier librement au-dehors des terres de la vicomté. Bernard de Ventadour ne fut pas trop marqué par cette aventure mais il se plaignit toute sa vie des exagérations provocantes de ses rivaux.
La Satire du troubadour, écrit de Pierre d'Auvergne - Bernard était son aîné - sous-entend dans des vers moqueurs qu'il n'était peut-être pas issu de serviteurs, mais le bâtard du seigneur Ebles II de Ventadour ou de Guillaume IX d'Aquitaine.
L'auteur de sa vida[Laquelle ?] imagine que Bernard a commis une erreur de jeunesse qui ne lui sera jamais pardonnée, il aimait en secret la jeune vicomtesse de Ventadour, épouse d'Ebles III. Tous les deux furent disgraciés du château par le vicomte Ebles III, jaloux. Ses pas le mènent à Montluçon puis à Toulouse. Auparavant, il a été reçu et hébergé à la cour d'Henri II et d'Aliénor d'Aquitaine[6], dont il fut obligé de partir, un départ imposé par une vie mouvementée à la recherche de seigneurs, de château en château[7]. Aliénor, duchesse d'Aquitaine et reine d'Angleterre, était la petite-fille du duc d'Aquitaine et comte de Poitiers (1071-1126), Guillaume IX d'Aquitaine surnommé le troubadour[8], auteur de plusieurs poèmes chantés en langue d'oc. Protectrice, d'un caractère gai et enjoué, Aliénor avait hérité de son grand-père un grand savoir pour la poésie, de la sympathie en faveur des poètes, ainsi chantée par les ménestrels et les troubadours. En 1152, devenue l'épouse du futur roi d'Angleterre, Henri II Plantagenêt, duc de Normandie et comte d'Anjou, la duchesse d'Aquitaine suit son mari en Angleterre où Bernard de Ventadour a œuvré lors du couronnement du roi d'Angleterre en 1154[réf. nécessaire]. Il revient dans le Comté de Toulouse au service de Raymond V de Toulouse puis il séjourne à Narbonne et, selon sa vida, il finit par rejoindre l'ordre de l'abbaye de Dalon après la mort du comte de Toulouse en 1194. Il y termine sa vie en retraite ayant abandonné la création de chansons et renoncé aux plaisirs du siècle.
Bernard de Ventadour cultive et partage la musique en composant des chansons essentiellement inspirées de sentiments réellement vécus au long de ses voyages à travers les chemins du midi de la France, jusqu'aux Pyrénées et le Rhône, dans un style toujours sincère, sensible et délicat, à la tonalité parfois triste, mélancolique, travaillant dans une forme à strophes courtes de huit vers brefs huit syllabes par décasyllabes[9]. Son style poétique est simple, clair, d'une rare musicalité sonore, agrémentée d'images sublimées et vertueuses. Les poésies qu'il chantait lui-même sont riches, idéalistes, variées et d'une harmonie gracieuse.
Troubadour précurseur de la chanson française, Bernard de Ventadour fut le créateur incontesté de la poésie lyrique. Son talent, approuvé par ses pairs, lui permit de poser les bases du genre de la chanson. Il retranscrit dans ses chants le contenu de son existence, riche d'expériences sentimentales personnelles (notamment ses conquêtes amoureuses, transposées derrière d'autres noms). Lui-même se qualifiait avec humour comme le grand chantre de l'amour. Le poète et écrivain italien Giosuè Carducci (1835-1907) lui a consacré une étude, intitulée Bernard de Ventadour un poète de l'amour, démontrant qu'il n'existe que l'amour qui puisse lui donner de l'inspiration pour écrire ses poèmes. Dans un répertoire d'œuvres achevées, on peut compter les strophes appelées (par les historiens et érudits) La Chanson de l'Alouette, la plus célèbre de toutes[10].
Ses quarante-cinq chansons dont vingt écrites en occitan, riches et limpides, nourries de sentiments personnels, font allusion aux personnages historiques : le Reis Engles, le roi d'Angleterre, le seigneur de Beaucaire ou Raynard V, le comte de Toulouse. On le considère comme l'un des meilleurs musiciens de son temps et parmi les plus grands poètes de l'amour en langue d'oc.
Postérité
[modifier | modifier le code]- Francis Cabrel l'évoque, dans la chanson Rockstars du Moyen Âge (album À l'aube revenant) sortie en 2020.
Œuvres
[modifier | modifier le code]Chanson de l'Alouette (traduite de l'ancien occitan)
[modifier | modifier le code]Première strophe :
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Voici une strophe très mystérieuse, provenant d'un autre poème :
Dame, si mes yeux ne vous voient, sachez que mon cœur vous voit ;
Ne vous affligez pas plus que je ne m'afflige, car je sais qu'on vous surveille à cause de moi.
Et si le mari vous bat, gardez bien qu'il ne vous batte pas le cœur.
S'il vous cause du chagrin, causez lui en aussi.
La dernière strophe de la Chanson de l'Alouette utilise le prénom Tristan - peut-être est-ce pour une dame aimée, on ne sait pas - et se conclut en un adieu mélancolique :
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Extrait d'un poème
[modifier | modifier le code]Lo tems vai e ven e vire
Per jorns, per mes e per ans,
Et eu, las no.n sai que dire,
C'ades es us mos talans.
Ades es us e no.s muda,
C'una.n volh e.n ai volguda,
Don anc non aic jauzimen.
Pois ela no.n pert lo rire,
E me.n ven e dols e dans,
C'a tal joc m'a faih assire
Don ai lo peyor dos tans,
- C'aitals amors es perduda
Qu'es d'una part mantenguda -
Tro que fai acordamen…
Extrait d'un autre poème[11], traduit
[modifier | modifier le code]Ce n'est pas merveille si je chante
Mieux que nul autre chanteur,
Car je tourne davantage mon cœur à l'amour
Et suis mieux fait à son commandement.
Corps et cœur, et savoir et esprit,
Et force et pouvoir j'y ai mis ;
Le frein me tire tellement vers l'amour
Que vers nulle autre part je me dirige.
Bien et mort qui d'amour se sent
Au cœur quelque douce saveur.
Et à quoi bon vivre sans amour
Sinon à être ennuyeux à tout le monde,
Que jamais Dieu ne me haïsse assez
Pour que par la suite je vive un jour ou un mois,
Après qu'on m'aura reproché de donner de l'ennui
Et que je n'aurai plus désir d'amour.
En bonne foi et sans tromperie
J'aime la plus belle et la meilleure.
Du cœur je soupire et des yeux je pleure.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Paule Druilhe, Histoire de la musique classe de 5ème, Paris, Librairie Hachette, , page 32.
- Direction de S. Gebelin, « Musique du Moyen Âge. Bernard de Ventadour, quan vei la lauzet a mover » (Disque sonore instrumental des archives), sur bnf.fr, (consulté le )
- Direction de R. Hans, « Musique du moyen âge Bernard de Ventadour auteur-compositeur » (Sur disque sonore instrumental archivé), sur BnF.fr, (consulté le )
- Ernest Hoepffner, Les Troubadours, Paris, Collection Armand Colin, , 295e éd., page 59
- Joseph Anglade, Les troubadours, vies, œuvres influence en Limousin, (source Gallica/.bnf.fr/BnF)
- Jean Flori, Aliénor d'Aquitaine, La reine insoumise, Paris, Payot, , 544 p. (ISBN 2-228-89829-5), p. 410-411
- Ernest Hoepffner, Les troubadours, Paris, Collection Armand Colin (no 295), , 224 p., p. 48
- Flori 2004, p. 38.
- les Troubadours, Paris, Collection Armand Colin, page 50
- Carl Appel, Bernart von Ventadorn, Halle, Niemeyer Source Gallica/.bnf.fr/BnF, , 401 pages
- Bayle, Antoine, Poésies choisies des troubadours du Xe au XVe siècle, avec la traduction littéraire en regard : anthologie provençale ; précédées d'un Abrégé de grammaire provençale / par l'abbé A. Bayle ; avec une notice sur l'auteur par J.-B. Sardou, Aix, A. Makaire, , 320 p. (lire en ligne)
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Moshé Lazar, Chansons d'amour de Bernart de Ventadorn, Carrefour Ventadour, 2001 (ISBN 2-9516848-0-0)
- Carl Appel, Introduction à Bernart de Ventadorn, Carrefour Ventadour, 1990, (ISBN 2-9516848-3-5)
- Léon Billet, Bernard de Ventadour, troubadour du XIIe siècle : promoteur de l'amour courtois : sa vie, ses chansons d'amour, Tulle, Orfeuil, 1974
- Marguerite-Marie Ippolito, Bernard de Ventadour : troubadour limousin du XIIe siècle : prince de l’amour et de la poésie romane, Paris, L’Harmattan, 2001 (ISBN 2-7475-0017-9)
- Luc de Goustine, Fou d'amour, chansons de Bernard de Ventadour, Gardonne, éditions fédérop, 2016, (ISBN 978-2-85792-229-2)