Anne de Bavière (1648-1723)

princesse de Condé (1648-1723)

Anne Henriette Julie de Bavière-Palatinat (Anna Henrietta Julia von der Pfalz), née à Paris le et morte dans la même ville le , est une princesse du Palatinat, devenue princesse de Condé par mariage, et princesse d'Arches par héritage.

Biographie

modifier

Naissance et origine

modifier

Seconde fille d’Édouard de Bavière-Palatinat, titré comte Palatin du Rhin, et d'Anne de Gonzague de Clèves, fille du duc de Mantoue, la princesse Anne-Henriette est issue de deux familles souveraines de très haut lignage mais désargentées.

Son père est un fils cadet de l'électeur Frédéric V, premier électeur de l'Empire et calviniste. Ce dernier, gendre du roi d'Angleterre dont il a épousé la fille Élisabeth Stuart, osa défier l'empereur en acceptant en 1619 la couronne de Bohême que lui offrirent les Tchèques révoltés. Vaincu en 1620, chassé de son électorat, déchu de sa dignité d'électeur, le jeune « roi d'un hiver » trouva refuge dans les Provinces-Unies calvinistes où il engendra de nombreux enfants et trouva une mort prématurée.

Septième des douze enfants du couple anciennement royal, né en exil, le prince Édouard se convertit au catholicisme et épousa à 19 ans en 1645 la princesse de Gonzague qui en avait 29. Ils ont eu trois filles. Époux effacé, il meurt dès 1663 à l'âge de 38 ans, laissant le champ libre aux intrigues matrimoniales de sa femme.

La mère de la princesse, Anne de Gonzague de Clèves-Nevers, est au contraire une femme intelligente, énergique et très ambitieuse dont la vie tient du roman. Elle est la fille cadette de Charles de Gonzague, duc de Nevers, de Rethel et de Mantoue, et de Catherine de Lorraine qui était issue d'une branche cadette de la Maison de Lorraine, les Guise (rameau de Mayenne), princes ultra-catholiques qui mirent à mal la monarchie française pendant les Guerres de religion. Le duc et la duchesse de Mantoue portèrent toute leur ambition sur leur fille aînée, Louise-Marie de Gonzague (1611-1667) qu'ils réussirent à marier au roi de Pologne de la Maison Vasa, Ladislas IV. Très tôt veuve et sans enfant mais ambitieuse et énergique, elle épousa derechef son beau-frère Jean II Casimir V. Le duc et la duchesse de Mantoue ne réservaient à leurs cadettes que l'espoir d'un canonicat dans un chapitre de Dames Nobles ce qui ne convenait guère à l'entreprenante Anne.

Dite depuis son mariage « Princesse Palatine », Anne de Gonzague de Clèves est une de ces « amazones » qui se distinguèrent notamment pendant la Fronde. Ambitieuse, elle mariera brillamment ses filles y compris l'aînée - pourtant légèrement handicapée - qui deviendra princesse de Salm. La benjamine sera mariée à 18 ans au prince de Brunswick-Lunebourg-Calenberg, plus âgé, et sera la mère de l'impératrice Wilhelmine-Amélie, nièce du prince de Salm Charles-Théodore. Anne de Gonzague atteindra le sommet de son art de marieuse en unissant contre leur gré, Monsieur, frère unique du roi Louis XIV et duc d'Orléans, pourtant homosexuel notoire et catholique, avec une nièce protestante de son mari, Élisabeth-Charlotte de Bavière, la fameuse « Palatine » qui sera la mère du Régent et de la duchesse de Lorraine, et par là l'ancêtre de la Maison de Habsbourg-Lorraine.

Mariage

modifier

Le premier mariage dont s'occupa avec succès Anne de Gonzague et qui permit sans doute les suivants, fut celui de sa fille cadette, Anne de Bavière. L'ancienne frondeuse, sans fortune, parvint à faire entrer celle-ci dans la famille royale. En effet, l'entregent de sa mère - qui avait fait miroiter au futur époux la possibilité d'accéder au trône de Pologne, permit cette union brillante mais monstrueuse. En effet, à peine âgée de 15 ans, Anne épouse le Henri Jules de Bourbon-Condé, duc d'Enghien fils unique du prince de Condé, dit « Le Grand Condé », premier prince du sang, âgé de 20 ans surnommé « le Fol » à cause de son comportement ou « le singe vert » à cause de son physique disgracieux. Selon l'usage, la cour la nomme par déférence Madame la Duchesse (sans ajouter de nom de terre).

Son mari, prince intelligent mais cynique, se sachant protégé par son rang, est atteint de démence, hurlant à la lune tel un loup et capable d'accès de violences et de cruautés, véritable sadique avant la lettre, ne craignant pas de s'en prendre à sa maisonnée. Épouse et enfants, serviteurs et servantes durent supporter un régime de terreur. C'est dans un tel climat de violence, la duchesse de Bourbon mena à terme dix grossesses.

En 1686, la mort de son beau-père la fait princesse de Condé, épouse du « premier prince du sang » et la cour l'appelle Madame la princesse. Une princesse qui cache ses ecchymoses sous ses coiffes. En effet, bonne et charitable, pieuse et effacée, la princesse de Condé supporta avec dignité les exubérances et la cruauté de son époux mais ce n'est peut-être pas sans soulagement qu'elle devient veuve en 1710. Elle survécut 13 ans à son mari.

  •  : Son Altesse Sérénissime la princesse Anne du Palatinat, comtesse palatine du Rhin,
  •  : Son Altesse Sérénissime Madame la duchesse d'Enghien : « Madame la duchesse »,
  •  : Son Altesse Sérénissime Madame la princesse de Condé : « Madame la princesse »,
  •  : Son Altesse Sérénissime Madame la princesse de Condé douairière : « Madame la princesse ».

Patrimoine

modifier

Elle hérite de la principauté d'Arches (dont la capitale est Charleville, actuel département des Ardennes) en 1708 à la mort de son petit-cousin Charles III Ferdinand, dernier duc de Mantoue. Elle hérite également du comté de Dreux, à la mort de sa fille Marie-Anne († 1718), elle-même héritière de son mari.

À la mort de sa cousine Marie de Lorraine-Guise, en 1688, elle est, avec sa sœur, l'une de ses héritières, par leur grand-mère maternelle Catherine de Lorraine-Mayenne. Dans sa succession, elle recueille le duché de Guise, qu'elle transmet aux Condés (puis aux Orléans au XIXe siècle). Elle recueille aussi avec sa sœur l'hôtel de Guise, à Paris, qu'elles vendent aux Rohan, et le domaine de Marchais, qu'elles vendent en 1719.

Elle posséda également le château du Raincy, hérité de sa mère.

C'est d'après cette princesse qu'est nommée la rue Palatine du 6e arrondissement de Paris, car elle résidait tout à côté, au Petit Luxembourg, qu'elle fit aménager par l'architecte Germain Boffrand.

En 1712, elle lance la mode de l'ombrelle, mode dite des « Parisiennes »[1].

Elle meurt à Paris le , âgée de 74 ans, et est enterrée au couvent des Carmélites du faubourg Saint-Jacques.

Jacques Champion de Chambonnières lui dédia son premier livre de Pièces de Clavessin, publié à Paris en 1670. Une rue du Viè arrondissement de Paris longeant l'église Saint-Sulpice lui rend hommage : rue Palatine.

Descendance

modifier
 
Anne de Bavière, Princesse Palatine.

Anne de Bavière et Henri-Jules de Bourbon-Condé ont dix enfants :

  1. Marie-Thérèse, dite Mademoiselle de Bourbon, née à Paris le et morte en 1732, qui épouse à Versailles le , François-Louis de Bourbon, prince de Conti (1664-1709), cousin germain de son père d'où postérité ;
  2. Henri, duc de Bourbon, né à Paris le et mort le  ;
  3. Louis, duc d'Enghien, puis prince de Condé, né en 1668 et mort en 1710, qui épouse en 1685 Louise-Françoise de Bourbon, dite Mademoiselle de Nantes (1673-1743), fille légitimée du roi, d'où postérité ;
  4. Anne, dite Mademoiselle d’Enghien, née à Paris le et morte le  ;
  5. Henri, comte de Clermont, né à Saint-Germain-en-Laye le , mort le  ;
  6. Louis-Henri, comte de la Marche, né le , mort à Paris le  ;
  7. Anne-Marie, dite Mademoiselle d’Enghien puis Mademoiselle de Condé, née le à Paris, baptisée à Versailles le et morte à Paris le  ;
  8. Louise-Bénédicte, dite Mademoiselle d’Enghien, puis Mademoiselle de Charolais, née le et morte le , qui épousa à Versailles le Louis Auguste de Bourbon, duc du Maine (1670-1736), fils légitimé du roi, d'où postérité ;
  9. Marie-Anne de Bourbon-Condé, dite Mademoiselle de Montmorency puis Mademoiselle d’Enghien, née le et morte à Paris le , qui épousa en 1710 Louis Joseph de Bourbon, duc de Vendôme, comte de Dreux (1654-1712) ;
  10. N., Mademoiselle de Clermont, née à Paris le et morte le .

Notes et références

modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

  1. Scavini, « Le parapluie français », Le Figaro Magazine, semaine du 19 mai 2017, page 111.

Liens externes

modifier