La "France moche", méprisant ou pas ?

Zone commerciale ©AFP - Jc Milhet / Hans Lucas
Zone commerciale ©AFP - Jc Milhet / Hans Lucas
Zone commerciale ©AFP - Jc Milhet / Hans Lucas
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Le gouvernement a présenté hier son plan d’attaque contre ce qu’il appelle la « France moche ».

C’est la France des zones commerciales d’entrée de ville, où sont alignés des commerces qui ont parfois la forme de boîtes à chaussures en parpaings et en tôle.

Pour l’anecdote, l’expression a été popularisée en 2010 par Télérama dans un article titré « Comment la France est devenue moche », et le hashtag La France moche a (si j’ose dire) un joli succès sur les réseaux sociaux.

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On peut résumer l’ambition des maires, des experts et du gouvernement en une phrase : il s’agit de moderniser tout çà et de mettre des logements et des arbres sur les parkings puisque la règle de la non-artificialisation des sols interdit désormais de mettre des villes à la campagne.

Une fois l’ambition décrite, il faut tout de même rappeler le point de départ. Ces zones commerciales ont été inventées il y a 50 ans pour organiser la consommation de masse à petits prix – au détriment des commerces de centre-ville.

Disons-le aussi : des maires en ont tiré profit pour leur ville (avec des recettes fiscales en plus), ou parfois (comment dire ?) un profit personnel (un droit de péage), avant les lois anti-corruption.

Mais ce plan, c’est une bonne idée ?

Bien sûr, mais faire croire que les choses vont changer parce que l’Etat met sur la table 24 millions d’euros pour quelques études et des magnifiques dessins colorés du genre « avant » « après » la transformation, faire croire cela est une aimable plaisanterie.

Cela va prendre du temps, cela va coûter cher (des milliards d’euros) et ce n’est pas l’Etat qui est le pilote. Ce sont les maires – et en partie la Caisse des dépôts. Certes, le moment est opportun parce que le prix du foncier baisse en raison de la (relative) désaffection pour ces zones commerciales et que les sociétés foncières sont intéressées.

Mais il faudra sans doute exproprier des commerçants et des propriétaires et cela ne va se faire en un claquement de doigt. Sans oublier un point absolument déterminant : des Français ne voudront venir habiter sur les ex-parkings de ces zones commerciales en périphérie que s’il y a des transports publics, par exemple des tramways, puisque si on enlève les parkings, le but est aussi bien de faire reculer la voiture. Or le plus souvent, sur place, il n’y a que des ronds-points !

Et l’objectif politique ?

C’est de s’adresser aux habitants des périphéries. Mais attention à ne pas donner l’impression que les habitants des cœurs de ville et des métropoles regardent d’un peu haut cette France qu’ils qualifient de « moche » parce qu’elle aligne des centres commerciaux, des lotissements et des pavillons. C’est un peu plus que vaguement méprisant.

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