Théâtre du peuple Lady First, une farce politique
2016, année shakespearienne pour le Théâtre du peuple de Bussang, 400e anniversaire de la mort du dramaturge anglais oblige. En juillet, l’hommage a débuté avec Le Songe d’une nuit d’été ( L’Alsace du 17 juillet) ; il se complète en août par Lady First , une pièce de Seder Ecef, mise en scène par le directeur de la maison, Vincent Goethals.
En 2012, l’auteur turque Seder Ecef faisait son entrée au Théâtre du peuple. Elle y présentait une pièce courte où était racontée la fuite en grande urgence de la première dame d’une dictature non nommée, même si la référence à l’épouse de Ben Ali était assumée.
« C’était très drôle, très acide. Je me suis souvenu de cette pièce qui m’avait fait penser à Lady Macbeth. Comme je tiens aux commandes d’écritures, j’ai appelé Seder et lui ai demandé une pièce de deux heures trente avec quatre ou cinq comédiens. Je souhaitais aussi qu’elle amène plus de poids , que le propos politique soit plus assumé », raconte Vincent Goethals. L’écriture a duré 18 mois, période d’un dialogue permanent entre l’auteure et le metteur en scène.
« L’air de rien, beaucoup de choses sont dites »
« Elle a continué à tirer le fil de la pièce courte de 2012, d’ailleurs cette scène de la fuite est dans le spectacle de cet été », précise Vincent Goethals.
Seder Ecef a composé une farce avec quatre personnages : la femme d’un dictateur qui donne le titre à la pièce, sa dame de compagnie transsexuelle, le chef de cabinet (interprété par le Mulhousien Bernard Bloch) et une journaliste. Elle a situé l’action en Mésopotamie, dans un monde imaginaire. Un lieu où la révolte gronde, prête à éclater. L’idée fuse de réaliser une interview télévisée de la première dame pour tenter de calmer le peuple…
La dramaturge a mis en place « une forme très hybride », indique Vincent Goethals. « Ça commence presque comme une histoire policière, puis l’émission de télé fait vriller la pièce dans la farce, puis dans la farce tragique avant de terminer dans la tragédie. » Aucun pays ou dictateur n’est identifié, mais le propos politique est bien là, entre les lignes, avec une visée universelle. « Ça montre des monstres, une dictature grotesque mais dangereuse. On évoque aussi la tentation du moins pire : plutôt une dictature que l’hiver islamique, un discours qui me semble très dangereux. »
Une dénonciation politique nourrie à l’humour acide : derrière, on peut y voir Ben Ali, le couple El Assad ou les Ceausescu, voire Marie-Antoinette. « C’est une parabole de toutes les dictatures. L’air de rien, beaucoup de choses sont dites. » Les ventes d’armes, les rapports Orient/Occident, etc.
Vidéo
Vincent Goethals a fait le choix d’une forte théâtralisation, d’un univers « baroque », almodovarien avec le personnage de transsexuelle. Il a aussi installé sa mise en scène autour de la vidéo. « Je l’ai déclinée à l’envi. Parfois, el le constitue le décor, parfois pour les monologues intérieurs, elle devient onirique, parfois, c’est l’expression du peuple comme ces défilés de tweets, l’arme de guerre contemporaine. On filme aussi en direct pour la fuite de la première dame. » C’est aussi en vidéo qu’interviennent les comédiens amateurs associés au projet, lors d’un Skype avec les ministres de la dictature…
« Cela contribue à faire avancer l’histoire, c’est très esthétique et cela prend une dimension de tragédie finalement très shakespearienne. »
Lady first est donnée à 20 h 30 les 10, 11, 12, 13, 17, 18,19, 20, 24, 25, 26 et 27 août (1 h 40 sans entracte). Avec Anne-Claire, Angèle Baux Godard, Sinan Bertrand et Bernard Bloch.
Le Songe d’une nuit d’été , mis en scène par Guy Pierre Couleau se poursuit à 15 h les 7, 10, 11, 12, 13, 14, 17, 18, 19, 20, 21, 24, 25, 26 et 27 (2 h 30 avec entracte).
L’entrée pour chacun de ces deux spectacles est de 24 à 8 € selon la réduction et la catégorie.
Dans la petite salle (8 € l’entrée) : William’s slam, les samedis et dimanches à midi (1 h 10) ; Mon cœur pour un sonnet , une forme théâtrale et dansée autour des sonnets de Shakespeare les mercredis, jeudis et vendredis à midi (durée : 1 h) ; Macbêtes , les nuits tragiques, théâtre d’objets les mercredis, jeudis, vendredis et samedis à 18 h 30 (durée : 45 mn).
La saison se clôturera dimanche 28 août à 15 h et 18 h par un concert avec Carmina Burana, de Carl Orff, présenté par l’Opéra-Théâtre de Metz-Métropole.