La justice tunisienne a condamné les organisateurs d'une traversée clandestine de la Méditerranée. L'embarcation avait coulé en septembre 2022. Crédit : Reuters
La justice tunisienne a condamné les organisateurs d'une traversée clandestine de la Méditerranée. L'embarcation avait coulé en septembre 2022. Crédit : Reuters

Cinq Tunisiens, soupçonnés d'avoir organisé une traversée de la Méditerranée, ont été condamnés dans leur pays à des peines de quatre à dix ans de prison. L'embarcation avait sombré en septembre 2022 avec 18 passagers à bord. Tous étaient tunisiens et aucun n'avait survécu.

La sentence est lourde. Jeudi 13 juin dans la soirée, le tribunal de première instance de Médenine a condamné cinq Tunisiens à des peines de quatre à dix ans de prison, pour avoir organisé une traversée de la Méditerranée. Celle-ci s'était terminée par le naufrage de l'embarcation dans la nuit du 20 au 21 septembre 2022, au large de Zarzis, dans le sud-est du pays.

À son bord : 18 candidats à l'émigration, tous tunisiens. Aucun n'avait survécu, et seule une dizaine de corps avaient été retrouvés.

Le tribunal de Médenine a jugé les cinq accusés "coupables de l'organisation d'opérations d'immigration illégale depuis la Tunisie", a précisé le porte-parole du tribunal Lassad Horr, qui a ajouté qu'une embarcation, deux voitures et un appareil GPS avaient été saisis pendant l'enquête.

Les peines ont été prononcées avec "exécution immédiate", a-t-il précisé à l'AFP, bien que deux des accusés soient toujours en fuite.

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Ce naufrage avait provoqué beaucoup d’émoi en Tunisie. Le 18 octobre 2022, près de 4 000 personnes étaient descendues dans les rues et une grève générale avait été observée à Zarzis pour réclamer de nouvelles recherches. Les manifestants avaient également dénoncé l'enterrement par erreur de quatre migrants tunisiens dans un cimetière privé, habituellement réservé aux migrants d'Afrique subsaharienne repêchés dans la région.

Après ces protestations, le président tunisien Kaïs Saïed avait ordonné au ministère de la Justice d'ouvrir une enquête, "afin que les Tunisiens connaissent toute la vérité et que les responsables de ces drames affrontent les conséquences de leur négligence".

Des migrants tunisiens disparus

La Tunisie est, avec la Libye, l'un des principaux points de départ des migrants qui risquent la périlleuse traversée de la Méditerranée dans l'espoir de rejoindre l'Europe. Si la grande majorité des migrants qui s’engagent sur cette route sont originaires d’Afrique subsaharienne, de nombreux Tunisiens cherchent aussi à gagner l'UE.

L’an dernier, les Tunisiens représentaient la deuxième nationalité parmi les 150 000 migrants arrivés de manière irrégulière en Italie, juste derrière les Guinéens. Jusqu'à présent cette année, plus de 3 135 Tunisiens sont arrivés dans le pays par la mer, derrière les Bangladais et les Syriens, d'après les derniers chiffres du ministère de l'Intérieur italien.


Les embarcations partant de Tunisie cherchent à gagner Lampedusa, en Italie.
Les embarcations partant de Tunisie cherchent à gagner Lampedusa, en Italie.


Nombre d'entre eux n'arrivent jamais à destination. Depuis le 27 mai, quatre ressortissants tunisiens sont portés disparus après le naufrage de leur canot près de Chebba, à l’est de la Tunisie. Le 19 mai encore, la Garde nationale avait annoncé la disparition en mer de 23 migrants tunisiens partis deux semaines plus tôt de Nabeul, dans le nord-est de la Tunisie.

En janvier dernier, la disparition d’une quarantaine de citoyens tunisiens a provoqué l’ire de leurs familles. Le tribunal de Sfax avait ouvert une enquête, mais les recherches de corps en mer n’ont rien donné.

En 2023, plus de 1 300 migrants – subsahariens et tunisiens - sont morts ou ont été portés disparus dans des naufrages près des côtes tunisiennes, selon l'ONG Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES).

 

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