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Né en 1952 à Pointe-aux-Trembles, dans la banlieue de Montréal en compagnie de sa jumelle Marie-Claire, Richard Séguin se consacre très tôt à la musique. Artiste précoce, c'est à quatorze ans qu'il débute sa carrière en compagnie de sa soeur, musicienne et chanteuse elle-même. Mais ses premières expériences se font au sein de deux groupes plutôt orientés folk, les Nochers, puis Nouvelle Frontière, une formation à laquelle appartient également Marie-Claire Séguin. Après quelques années de tournées aux quatre coins du Canada, Richard Séguin se voit proposer un premier projet artistique par le journaliste Benoît L'Herbier: la rédaction d'un conte musical à l'attention des tout-petits, Blancheville.
En familleAprès la séparation de Nouvelle Frontière, Séguin continue de tourner, mais en famille cette fois, en compagnie de sa jumelle dans un duo nommé fort opportunément Les Séguin. Un premier album, en 1973 vient consacrer les débuts de carrière de cette formation hétérozygote. En tout, ce sont quatre disques qui sortent sous les auspices de cette PME familiale en 1973 et 1976.
Deux cent nuits à l'heureL'année suivante, Richard Séguin se lie d'amitié avec Serge Fiori, leader du groupe Harmonium et lui propose un projet à deux voix, Deux Cent Nuits à L'heure. Si l'investissement de départ est extrêmement coûteux, l'album s'avère être l'un des « coups » les plus lucratifs de toute l'histoire de CBS Canada, consacrant Séguin comme un grand de la chanson québécoise et surtout, l'un des interprètes les plus prisés de l'industrie du disque de la Belle Province. Plusieurs récompenses viennent saluer la performance des deux artistes qui souhaitent cependant en rester là, chacun décidant de repartir de son côté, vers ses propres ambitions artistiques.
En soloEn 1978, Richard Séguin est le premier album solo de l'artiste et ne rencontre qu'un succès en demi-teinte. Moins marqué par le rock que dans Deux Cent Nuits à L'heure, le chanteur-compositeur s'épanouit désormais dans un registre néo-réaliste, touchant parfois du doigt le folk, mais force est de constater qu'il est loin d'être seul sur ce créneau en dépit de disques salués par la critique, mais boudés par le public. Nul n'étant prophète en son pays, Richard Séguin accumule les sorties d'albums tout au long de la décennie 1980, mais ce n'est qu'en 1985 avec Double Vie qu'il renoue réellement avec le succès car l'homme s'est adapté à son temps et a utilisé le procédé, alors relativement nouveau, du clip diffusé à la télévision pour assurer la promotion de l'album.
Sur les traces de KerouacSéguin est de retour, bien décidé à ne pas redescendre de son piédestal. Journée d'Amérique, en 1988 le voit renouer avec le rock sans que cela ne nuise à la qualité artistique de ses textes. Modeste, l'homme sait également laisser de la place à ses musiciens, au premier rang desquels l'organiste Hélène Dalair. La sortie de Journée d'Amérique est l'occasion pour lui d'entamer une grande tournée à travers tout le monde francophone, qu'il soit américain, européen ou africain. Aux Portes du Matin, en 1991 (un album unplugged) puis Vagabondages (un live) en 1993 viennent successivement confirmer le très réel succès populaire de Richard Séguin et de son groupe.
D'instinct socialLe passage des années aidant, Richard Séguin puise de plus en plus son inspiration dans l'actualité sociale, pas forcément rose, de son pays. D'instinct, en 1995 est probablement l'un des albums les plus noirs de son auteur à ce jour, évoquant une société sans repères où règnent chômage et misère sociale, sans toutefois tomber dans le misérabilisme. Conscient de ses sources d'inspiration, Séguin en profite même pour rendre un hommage à Woody Guthrie, l'un des chanteurs de folks les plus engagés de l'Amérique populaire de l'entre-deux-guerres.
MicroclimatLoin de la frénésie de composition de ses débuts à l'époque des Séguin ou de Nouvelle Frontière, Richard prend désormais le temps de vivre et s'il se consacre occasionnellement à une carrière de producteur ou d'artiste plasticien, il ne revient dans les bacs qu'en 2000 avec l'album Microclimat, plus détendu et souriant que D'instinct. Le public, lui, est toujours là et sa tournée Canadienne est un franc succès, d'autant que son statut de « vieux de la vieille » de la chanson québécoise lui vaut plusieurs sollicitations, du parrainage de festivals à la présidence d'honneur de cérémonies liées à la chanson francophone (encore que lui-même, occasionnellement, puisse chanter en Anglais).
Le vagabond du NetS'il avait séduit le public en 1985 en utilisant la promotion technologique de l'époque (le vidéo-clip), il réitère l'expérience dix-huit ans plus tard avec Solo, un album live enregistré à l'occasion d'un concert et diffusé sur son site Internet. Une nouvelle approche du rapport entre auteur et spectateur qui correspond davantage à ses aspirations, loin des majors du disque avec lesquelles il est ouvertement en bisbille.
Toujours inspiré, il s'attelle à l'écriture d'un nouvel album, beaucoup plus conceptuel celui-là, Lettres Ouvertes. Écrits à la première personne, les textes se veulent une correspondance imaginaire entre plusieurs personnalités du monde des lettres ou des arts au premier rang desquelles on retrouve l'un de ses inspirateurs majeurs, Jack Kerouac, dont l'œuvre planait déjà sur la composition de Journée d'Amérique.
Ami infatigable des mots et baroudeur de la chanson, Richard Séguin est véritablement l'un des derniers artistes hobos fidèles à une certaine tradition de la chanson populaire nord-américaine.