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Éridan (mythologie)

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Éridan
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Biographie
Nom dans la langue maternelle
ἨριδανόςVoir et modifier les données sur Wikidata
Père
Mère
Enfant

Dans la mythologie grecque, l’Éridan (en grec ancien Ἠριδανός / Ēridanós) est un dieu fleuve dans lequel meurt le soleil.

Les versions du mythe

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Statue du dieu Eridan au British Museum. Les noms grecs de fleuves divinisés évoquaient originellement les fonctions jouées par ces divinités au sein d'un mythe

L'Éridan est mentionné par Hésiode dans sa Théogonie[1] : fils d'Océan et de Téthys, il coule à l'occident du monde. Ἠριον / ērion signifie « sépulcre, tombeau », vraisemblablement au sens de « lieu sacré » (ἱερόν / hierón), et δανός / danós, « don, présent, offrande » mais ήρι a tardivement été compris comme signifiant « du matin » comme dans ήριγένεια / ērigéneia, « qui nait du matin »[note 1].

Allégorie du soleil couchant qui sera reprise par Ovide[2], selon Apollonios de Rhodes, Zeus y précipite par la foudre l'orgueilleux Phaéton emporté sur un char du soleil incendiaire qu'il ne maîtrise plus[3]. Le bruissement des feuilles de peupliers noirs[note 2] qui le bordent est comparé aux pleurs des sœurs de la divinité déchue, les Héliades, et leurs larmes à l'ambre[4] qu'il charrie. C'est dans ses marais que la tradition hésiodique fait naître le cygne, oiseau fuyant les cieux, par transfiguration du demi-frère de Phaéton et roi de Ligurie, Cycnos, homonyme d'un fils de Pyrène, blanchi par le chagrin[5].

Diodore, tout en rappelant les légendes grecques[6], se fait le rapporteur de traditions propres aux Atlantes, habitants de l'Atlas[7], selon lesquelles, reprenant le thème du feu solaire se couchant dans une eau courante, les Titans jaloux de l'amour incestueux de leur sœur Basilée[note 3] pour leur frère Hypérion avaient fait noyer dans ce fleuve le fils de celui-ci, Hélios, « Soleil », dont le nom fut désormais consacré[8] à l'astre auparavant appelé Elector[9], Ήλέκτωρ c'est-à-dire « Brillant, Étincelant »[10].

Les différentes identifications

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Le fleuve mythique a reçu maintes localisations. Ici, l'Éridan à Athènes en 2009

À la suite de Virgile[11] qui compare l'Éridan à un taureau aux cornes d'or[12], Pline l'Ancien rapporte la tradition hellénophile des Romains reprise à Phérécyde[5] consistant à l'identifier au [13]. Hygin fait de la naïade Zeuxippe la fille du fleuve[14].

Confondu par Eschyle avec le Rhône[9], aux bouches duquel fut installée la colonie phocéenne alors la plus occidentale, il a été tout aussi bien décrit comme un de ses affluents[15] ou de ses embranchements[16]. En tant que constellation du Fleuve[17], il a été également identifié au Nil[18], pays du dieu solaire . Hérodote, qui le distinguait de ce dernier, récusait déjà, à cause du nom grec du fleuve, son identification, apparemment populaire au Ve siècle av. J.-C., au Rhin « qui se jette dans la mer du Nord » ou à la Vistule « par lequel, dit on, l'ambre est importé »[19],[note 4].

Pour les Athéniens, le nom du fleuve mythique a servi à désigner un affluent de l'Ilissos[20] coulant à l'ouest de la cité attique, près du Lycée[21].

« Ny les Phaëthontides sœurs
Nous peuvent egaler és pleurs
Qu'ils versent pour leur frere
Tombé dans le fleuve Eridan. »

— Robert Garnier, Marc Antoine (1578), II, 357-360.

  1. Dans le premier cas, on peut supposer une évocation des trésors sacrifiés aux fleuves, ce que reprennent les mythes qui y voient précitées un certain nombre de figures allégoriques évoquées par ces mêmes mythes. L'évocation des trésors enfouis dans les fleuves est renforcée dans ces mythes par l'association des idées de soleil, d'or, d'ambre et d'électrum, thème repris dans de nombreuses légendes comme celle de L'Or du Rhin de la Chanson des Nibelungen. Dans le second cas, on peut imaginer que le fleuve est poétiquement figuré comme étant celui qui conduit, durant la nuit, le soleil devenu invisible de l'ouest à l'est où celui-ci rejaillit au matin.
  2. Virgile (Énéide [détail des éditions] [lire en ligne], VI, 62) dit « aulnes » mais ce n'est peut être qu'une licence poétique puisqu'ailleurs il parle bien de peupliers (Énéide, X, 190).
  3. L'île nordique de Basilée, que Pythéas a reconnue (Pline l'Ancien, Histoire naturelle [détail des éditions] [lire en ligne], IV, 27) en ce que le controversé pasteur Jürgen Spanuth a identifié, à cause du nom principalement, à Heligoland ((en) M. Cary et E. H. Warmington, The Ancient Explorers, Penguin Books, 1963, p. 53 et suiv. ; Pierre Vidal-Naquet, L'Atlantide : petite histoire d'un mythe platonicien, Belles Lettres, 2005, p. 127.), était réputée, selon Diodore (V, 23), produire sinon exporter l'ambre.
  4. Pline (XXXVII, 11) note que la route de l'ambre aboutissait aux bouches du Pô d'où il était embarqué pour la Grèce.

Références

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  1. Hésiode, Théogonie [détail des éditions] [lire en ligne], 338.
  2. Ovide, Métamorphoses [détail des éditions] [lire en ligne], II, 19, 324-380.
  3. Apollonios de Rhodes, Argonautiques [détail des éditions] [lire en ligne], IV, 6, 595-626.
  4. Euripide, Hippolyte [détail des éditions] [lire en ligne], 735 et suiv.
  5. a et b Hygin, Fables [détail des éditions] [(la) lire en ligne], CLIV.
  6. Diodore de Sicile, Bibliothèque historique [détail des éditions] [lire en ligne], V, 23.
  7. Diodore, III, 53.
  8. Diodore, III, 59.
  9. a et b Pline, XXXVII, 11.
  10. E. Pessonneaux, Dictionnaire grec-français, p. 678, Eugène Belin, Saint-Cloud, 1935.
  11. Virgile, Géorgiques [détail des éditions] [lire en ligne], I, 482.
  12. Géorgiques, IV, 371.
  13. Pline, III, 16.
  14. Hygin, Fables, XIV.
  15. Apollonios de Rhodes, IV, 7, 627-28.
  16. Philostéphane de Cyrène (élève de Callimaque) cité par une scholie à Denys le Périégète, Voyage autour du monde, 289.
  17. Aratos, Phénomènes, 359-360 et 634.
  18. Hygin, Astronomie [détail des éditions] [(la) lire en ligne], II, 32.
  19. Hérodote, Histoires [détail des éditions] [lire en ligne], III, 115.
  20. E. Mentelle, Encyclopédie méthodique : géographie ancienne, t. 1, II, Stoupe, Paris, 1788, p. 640.
  21. Strabon, Géographie [détail des éditions] [lire en ligne], IX, 1, 19.