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== Louis Dherse ==

'''Louis Charles Albert Dherse''' est un ancien dirigeant d'entreprise, qui a dirigé la réorganisation de la sidérurgie lorraine pendant les [[Trente Glorieuses]], en pilotant la création de la [[Sollac]], de [[Sacilor]] et de la [[Solmer]], des usines sidérurgiques modernes construites en impliquant les différents acteurs historiques du secteur.

Polytechnicien,

=== Biographie ===

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Il débute sa carrière dans la construction des moyens de communication dans le sud marocain. Il travaille ensuite au [[Grand port maritime du Havre|Port Autonome du Havre]]. En 1933, il rejoint la [[Compagnie des chemins de fer de l'Ouest]], qui devient un élément de la [[Société nationale des chemins de fer français|SNCF]] en 1937. En 1940, il est directeur général de [[Groupe Poliet|Poliet et Chausson]]. Il rejoint ensuite l'Union des producteurs d'électricité des Pyrénées occidentales, qui devient, après sa nationalisation, un élément de l'[[Électricité de France|EDF]]<ref name=annales/>.

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== Sidérurgie ==
=== La Sollac ===
{{article détaillé|Sollac}}

Au lendemain de la [[Seconde Guerre mondiale]], la sidérurgie française bénéficie d'opportunités exceptionnelles :
* l'invention du [[Laminage#Laminoirs à chaud|laminage à chaud]] en continu aux [[États-Unis]] pendant la guerre est une rupture technologique qui permet de faire un bond sur les productivités et les qualités métallurgiques ;
* le plan Marshall donne les moyens de moderniser ;
* la [[Reconstruction en France après la Seconde Guerre mondiale]] pousse la demande en acier ;
* le marché bascule vers les produits plats, qui sont promis à un bel avenir, alors que les produits longs sont condamnés à stagner.

Par contre les défis sont nombreux. Le premier est le morcellement de l'industrie sidérurgique, incompatible avec les volumes et les investissements nécessaires à l'adoption laminage à chaud en continu. L'obtention des crédits Marshall imposent aussi de convaincre l'État français de la pertinence de la stratégie industrielle. En Lorraine, Louis Dherse est un « homme nouveau », sans passif, qui parvient à séduire les principaux acteurs età leur faire dépasser leurs rivalités.

Fondée ''ex nihilo'' en 1948 sous la forme d'une coopérative, la [[Sollac]] devient un succès industriel exceptionnel, alliant modernité et rentabilité. Louis Dherse parvient à fédérer les industriels et à séduire les talents<<ref name=annales/>.

=== Sacilor ===
{{article détaillé|Usine sidérurgique de Gandrange-Rombas}}

Le succès de la Sollac amène les industriels lorrains à reconduire l'expérience avec les produits longs. En effet, la situation de la sidérurgie des produits longs est gravement compromise par l'obsolescence et la fragmentation des usines. C'est la fondation de Sacilor, une coopérative présidée par Louis Dherse, qui est vue comme le nouvel élan de la sidérurgie. Positionnée stratégiquement dans la vallée de l'[[Orne (rivière)|Orne]], la nouvelle [[usine sidérurgique de Gandrange-Rombas]] est un ensemble alliant, lui aussi, gigantisme et procédés innovants.

Mais Louis Dherse va réaliser là, sous la pression de ses actionnaires {{citation|ce qui est sans doute sa seule erreur stratégique : construire une grande usine consommant de la [[Fonte brute|fonte]] et donc du minerai, alors que, pour ces produits, l'acier électrique produit dans de petites unités va prendre la plus grande partie du marché.}} Quinze ans après son démarrage, le pari est unanimement considéré comme perdu<ref name=annales/>.

Une autre conséquence fâcheuse de cette décision est la suspension du projet d'une grande usine sidérurgique maritime. Le projet de la [[Solmer]], auquel Louis Dherse n'a jamais cessé de croire, est reporté alors que le marché est encore capable de justifier ce type d'investissement<ref name=annales/>.

=== La Solmer ===
{{article détaillé|Solmer}}

Le projet de la Solmer est, pour Louis Dherse, un impératif pour la sauvegarde de la sidérurgie lorraine. Il va, {{citation|contre vents et marées, et un peu à contre-courant, la concevoir et construire à Fos ce qui est encore aujourd'hui l'une des meilleures usines mondiales. C'est après Sollac, l'aventure de Solmer avec le même enthousiasme}}<ref name=annales/>.

=== Démission ===
{{article général|Crise de la sidérurgie dans le bassin lorrain}}

Depuis 1971, Louis Dherse est le président du [[Directoire (entreprise)|directoire]] de Wendel-Sidélor, et le [[président du conseil d'administration]] des sociétés Sollac et Solmer. Mais le {{date|1 juillet 1973}}, il quitte ses fonctions pour devenir président du [[conseil de surveillance]] de ''Sacilor-Aciéries et laminoirs de Lorraine'', nouvelle société créée par la fusion de 4 sociétés contrôlée par la [[famille de Wendel]], ''Wendel-Sidélor'', ''Sidélor mosellanne'', ''Sacilor'' et ''de Wendel S.A.''<ref name=LeMonde>{{article
|titre= M. Louis Dherse quitte la direction du groupe Wendel-Sidélor
|périodique= [[Le Monde]]
|date= 26-05-1973
|auteur= Jean-Charles Bourdier
|url= https://www.lemonde.fr/archives/article/1973/05/26/m-louis-dherse-quitte-la-direction-du-groupe-wendel-sidelor_2571331_1819218.html
|consulté le 12-10-2024}}</ref>.

Louis Dherse succède ainsi à Henri de Wendel qui, lui, n'occupe plus aucun poste dirigeant dans le groupe. L'un comme l'autre cèdent la place à une nouvelle génération de dirigeants. La portée politique de cette réorganisation n'échappe à personne, et portant, les structurations énergiques de Louis Dherse sont bien reconnues comme des moments aussi douloureux que nécessaires<ref name=LeMonde/> :

{{début citation}}Le retrait de M. Louis Dherse, à l'âge de soixante-sept ans, prend à bien des égards l'allure d'une mise à l'écart. On lui reprochait de n'être guère favorable à un rapprochement avec le groupe [[Usinor]]. Dans les milieux proches du gouvernement, certaines de ses décisions ont été peu appréciées. Ainsi l'annonce, en {{date|novembre 1971}}, avec une certaine publicité, du plan de restructuration du groupe (suppression de mille deux cents emplois). Ce plan serait pour certains en partie à l'origine du recul de la majorité en [[Moselle (département)|Moselle]] lors des dernières élections.

On ne saurait cependant oublier que M. Dherse a évité à la sidérurgie lorraine une véritable catastrophe. En un peu plus de deux ans, il est en effet parvenu à faire entrer dans les faits les principes d'une fusion et du regroupement décidés en 1968 et restés lettre morte jusqu'à son arrivée<ref name=LeMonde/>.{{fin citation|[[Le Monde]], article du {{date|26 mai 1973}}|M. Louis Dherse quitte la direction du groupe Wendel-Sidélor}}

Malgré la rigeur des retructurations conduites par Louis Dherse, la sidérurgie est toujours fragile. Il prends sa retraite à au moment où elle entre dans une de ses crises les plus graves<ref name=annales/> : une année après son départ la [[crise de la sidérurgie dans le bassin lorrain]] atteint son paroxysme, frappée par les conséquences du [[premier choc pétrolier]]<ref name=AN1240>{{lien web |format électronique= pdf
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|prénom1= Jean |nom1= Grellier
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|titre= Rapport de l'Assemblée Nationale
|date= 10-07-2013
|passage= 15-18}}</ref>.

== Notes et références ==
== Notes et références ==
=== Notes ===
=== Notes ===

Version du 12 octobre 2024 à 21:14

Louis Dherse

Louis Charles Albert Dherse est un ancien dirigeant d'entreprise, qui a dirigé la réorganisation de la sidérurgie lorraine pendant les Trente Glorieuses, en pilotant la création de la Sollac, de Sacilor et de la Solmer, des usines sidérurgiques modernes construites en impliquant les différents acteurs historiques du secteur.

Polytechnicien,

Biographie

Louis Charles Albert Dherse nait le aux Andelys, dans Eure[1]. Il est le fils d'Auguste Dherse, intendant général, et de Mariette Flamard[2].

Il entre à l'École polytechnique en 1924, comme major de promotion. Il fait partie du Corps des ponts et chaussées, dont il sort premier classé. Il obtient également une licence ès sciences[2].

Le , il épouse Évelyne Colonna-Ceccaldi (1908-1997)[1]. Le couple a deux enfants : Jean-Loup Marie Dherse (1933-2010) qui est également polytechnicien (promotion 1952) et membre du corps des mines. Il est ensuite directeur à Pechiney et vice-président de la Banque mondiale. Quant à sa fille Camille, elle épouse Bruno de Vitry d'Avaucourt[2], polytechnicien (promotion 1995), membre du corps des mines, employé à la société sidérurgique Wendel en 1966[3].

Il débute sa carrière dans la construction des moyens de communication dans le sud marocain. Il travaille ensuite au Port Autonome du Havre. En 1933, il rejoint la Compagnie des chemins de fer de l'Ouest, qui devient un élément de la SNCF en 1937. En 1940, il est directeur général de Poliet et Chausson. Il rejoint ensuite l'Union des producteurs d'électricité des Pyrénées occidentales, qui devient, après sa nationalisation, un élément de l'EDF[2].

Il rentre à la Sollac qu'il développe grace au Plan Marshall. Il en est le directeur général de 1959 à 1973 et devient président de Wendel-Sidelor en 1971, succédant à Henri de Wendel. Pour moderniser la production de produits plats (tôles), il préside la fondation de la Sollac, le grand succès industriel de la sidérurgie lorraine. Puis il réorganise la production des produits sidérurgiques longs de Moselle (rails, fils, poutrelles, profilés, etc.) en créant Sidélor et l'usine sidérurgique de Gandrange-Rombas. Il comprend cependant bien l'intéret de la « sidérurgie sur l’eau » et pousse le projet de la Solmer à Fos-sur-Mer[2].

Il meurt à Paris, dans le 16e arrondissement, le , à l'âge de 88 ans[1].

Sidérurgie

La Sollac

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la sidérurgie française bénéficie d'opportunités exceptionnelles :

  • l'invention du laminage à chaud en continu aux États-Unis pendant la guerre est une rupture technologique qui permet de faire un bond sur les productivités et les qualités métallurgiques ;
  • le plan Marshall donne les moyens de moderniser ;
  • la Reconstruction en France après la Seconde Guerre mondiale pousse la demande en acier ;
  • le marché bascule vers les produits plats, qui sont promis à un bel avenir, alors que les produits longs sont condamnés à stagner.

Par contre les défis sont nombreux. Le premier est le morcellement de l'industrie sidérurgique, incompatible avec les volumes et les investissements nécessaires à l'adoption laminage à chaud en continu. L'obtention des crédits Marshall imposent aussi de convaincre l'État français de la pertinence de la stratégie industrielle. En Lorraine, Louis Dherse est un « homme nouveau », sans passif, qui parvient à séduire les principaux acteurs età leur faire dépasser leurs rivalités.

Fondée ex nihilo en 1948 sous la forme d'une coopérative, la Sollac devient un succès industriel exceptionnel, alliant modernité et rentabilité. Louis Dherse parvient à fédérer les industriels et à séduire les talents<[2].

Sacilor

Le succès de la Sollac amène les industriels lorrains à reconduire l'expérience avec les produits longs. En effet, la situation de la sidérurgie des produits longs est gravement compromise par l'obsolescence et la fragmentation des usines. C'est la fondation de Sacilor, une coopérative présidée par Louis Dherse, qui est vue comme le nouvel élan de la sidérurgie. Positionnée stratégiquement dans la vallée de l'Orne, la nouvelle usine sidérurgique de Gandrange-Rombas est un ensemble alliant, lui aussi, gigantisme et procédés innovants.

Mais Louis Dherse va réaliser là, sous la pression de ses actionnaires « ce qui est sans doute sa seule erreur stratégique : construire une grande usine consommant de la fonte et donc du minerai, alors que, pour ces produits, l'acier électrique produit dans de petites unités va prendre la plus grande partie du marché. » Quinze ans après son démarrage, le pari est unanimement considéré comme perdu[2].

Une autre conséquence fâcheuse de cette décision est la suspension du projet d'une grande usine sidérurgique maritime. Le projet de la Solmer, auquel Louis Dherse n'a jamais cessé de croire, est reporté alors que le marché est encore capable de justifier ce type d'investissement[2].

La Solmer

Le projet de la Solmer est, pour Louis Dherse, un impératif pour la sauvegarde de la sidérurgie lorraine. Il va, « contre vents et marées, et un peu à contre-courant, la concevoir et construire à Fos ce qui est encore aujourd'hui l'une des meilleures usines mondiales. C'est après Sollac, l'aventure de Solmer avec le même enthousiasme »[2].

Démission

Depuis 1971, Louis Dherse est le président du directoire de Wendel-Sidélor, et le président du conseil d'administration des sociétés Sollac et Solmer. Mais le , il quitte ses fonctions pour devenir président du conseil de surveillance de Sacilor-Aciéries et laminoirs de Lorraine, nouvelle société créée par la fusion de 4 sociétés contrôlée par la famille de Wendel, Wendel-Sidélor, Sidélor mosellanne, Sacilor et de Wendel S.A.[4].

Louis Dherse succède ainsi à Henri de Wendel qui, lui, n'occupe plus aucun poste dirigeant dans le groupe. L'un comme l'autre cèdent la place à une nouvelle génération de dirigeants. La portée politique de cette réorganisation n'échappe à personne, et portant, les structurations énergiques de Louis Dherse sont bien reconnues comme des moments aussi douloureux que nécessaires[4] :

« Le retrait de M. Louis Dherse, à l'âge de soixante-sept ans, prend à bien des égards l'allure d'une mise à l'écart. On lui reprochait de n'être guère favorable à un rapprochement avec le groupe Usinor. Dans les milieux proches du gouvernement, certaines de ses décisions ont été peu appréciées. Ainsi l'annonce, en , avec une certaine publicité, du plan de restructuration du groupe (suppression de mille deux cents emplois). Ce plan serait pour certains en partie à l'origine du recul de la majorité en Moselle lors des dernières élections.

On ne saurait cependant oublier que M. Dherse a évité à la sidérurgie lorraine une véritable catastrophe. En un peu plus de deux ans, il est en effet parvenu à faire entrer dans les faits les principes d'une fusion et du regroupement décidés en 1968 et restés lettre morte jusqu'à son arrivée[4]. »

— Le Monde, article du , M. Louis Dherse quitte la direction du groupe Wendel-Sidélor

Malgré la rigeur des retructurations conduites par Louis Dherse, la sidérurgie est toujours fragile. Il prends sa retraite à au moment où elle entre dans une de ses crises les plus graves[2] : une année après son départ la crise de la sidérurgie dans le bassin lorrain atteint son paroxysme, frappée par les conséquences du premier choc pétrolier[5].

Notes et références

Notes

Références

  1. a b et c « Louis Dherse », sur geneanet.org (consulté le )
  2. a b c d e f g h i et j « Louis Charles Albert Dherse (1906-1994) » (consulté le )
  3. « Joseph-Marie-Raoul de Vitry d'Avaucourt (1895-1977) » (consulté le )
  4. a b et c Jean-Charles Bourdier, « M. Louis Dherse quitte la direction du groupe Wendel-Sidélor », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  5. Jean Grellier et Alain Bocquet, « Rapport de l'Assemblée Nationale » [PDF], , p. 15-18

Hayange

La sidérurgie du procédé Thomas (1881 - 1914)

L'essort des aciéries

Productions annuelles
Thomas (t) Martin (t)
1886 70 000[1] 0
1888 110 000[1] 0
1896 200 000[1] 0
1908 260 000[1] 48 245[2]
1909 290 000[1] 62 045[2]
1910 310 000[1]
1913 400 000[1]

En 1879, commence la construction de l'aciérie Thomas de Saint-Jacques. Elle démarre en . C'est la première des 5 grandes aciéries Thomas construites en Lorraine occupée[3],[note 1]. Elle comporte alors 4 convertisseurs de 10 t, 2 cubilots à spiegel et 2 à fonte. En 1885-86, 2 convertisseurs supplémentaires sont installés. De 1887 à 1890, les 4 premiers convertisseurs sont remplacés[note 2]. Puis 2 mélangeurs[note 3], de chacun 100 t, sont mis en service en 1892. En 1893 et en 1897-1899 sont construits 2 nouveaux cubilots à fonte. Dans la même période, les soufflantes des convertisseurs sont modernisées, les grues remplacées, etc.[6]

En 1905, un mélangeur de 250 t est mis en service[7], l'aciérie a atteint sa maturité. Les lingots produits pèsent au minimum 2 500 kg[7]. En 1907, les usines de Hayange emploient 4 886 salariés[8]. La production progresse continuellement jusqu'à dépasser — de peu — 400 000 t. Il s'agit là du maximum : les outils surexploités subissent de nombreuses casses et la construction d'une nouvelle aciérie, capable de produire 1 000 000 t, apparait incontournable[6].

Le procédé Martin-Siemens, plus coûteux mais produisant un acier de qualité, s'avère plus apte la la production de produits plats. Pour alimenter la fenderie, un premier four est construit en 1900 et mis à feu le . Un deuxième est construit en 1902, un troisième en 1906 et un quatrième en 1913 (un cinquième sera mis à feu en 1923)[1].

Après les aciéries : les laminoirs de Saint-Jacques et la division de Patural

À côté des aciéries, d'autres ateliers se développent. La fonderie d'acier est une annexe de l'aciérie Martin. Contrainte par l'exigüité des installations, elle ne produit guère que de 900 à 2 600 t/an. La fenderie est dotée d'un laminoir à tôles forte (train 2) vers 1902, en même temps que les fours martin commencent à produire. La production de profilés y est abandonnée en 1892, celle de rails en 1905. Destinée au laminage des tôles, elle met en œuvre , en 1914 un blooming et 5 trains de laminage [note 4]. La platinerie, destinée à la production de fer-blanc et de fers noirs fait travailler une soixantaine d'ouvriers en 1911. Vieillissante, elle est rénovée à partir de cette date. Deux trains y sont en service : un train datant de 1880 est arrêté en 1909, et un train de 650 mm dont la production baisse continuellement, de 300 t/an en 1902 à 1 600 t/an en 1910[9]. En 1894, les moulins à scories d'Ébange sont construits. Leurs 3 groupes (chaque groupe consiste en 3 ou 4 moulins dégrossisseurs et 1 moulin finisseur) valorisent les laitiers des aciéries de Hayange, Jœuf et Moyeuvre. La production est d'environ 270 000 t/an de scories Thomas à 14-20 % d'acide phosphorique[1]. D'autres unités complètent le dispositif industriel d'Hayange : décaperies, fours à recuire, dresseries, étamerie, atelier de maintenance, briquerie, matériel de voie ferrée (42 locomotives en 1912), etc. mais aussi un hôpital de 70 lits[10].

La construction des laminoirs de Saint-Jacques, vers le coté amont de la vallée est, avec les aciéries, l’autre réalisation marquante précédant la guerre. Leur construction scelle la fin de l'aventure métallurgique à Stiring-Wendel et la centralisation des activités à Hayange. Inaugurés en , les laminoirs « passent pour les plus importants de l'Allemagne, sinon de l'Europe ». Destinés à la construction de rails, ils produisent en complément du matériel de voie traverses métalliques, des poutrelles et des profilés. Ils sont alimentés par 2 bloomings et combinent une grande variétés de cages de laminage, dont beaucoup viennent de l'usine sidérurgique de Stiring-Wendel[11].

Les investissements très lourds consentis pour le passage au procédé Thomas se sont faits au détriment des hauts fourneaux. La situation devient telle qu'il apparait plus opportun de construire deux hauts fourneaux neufs. L'usine historique, gênée par la production existante et les multiples modifications apportées depuis 150 ans, ne convient plus. Ces nouveaux hauts fourneaux sont donc édifiés sur un vierge, le « Patural ». Les premiers hauts fourneaux, le P1 et le P2, d'une conception traditionnelle, sont mis à feu en 1907, les 4 suivants (P4 à P6) sont de conception américaine. Mis à feu de 1910 à 1913, ils sont construits en ligne et équipés ce qui se fait de mieux à l'époque (cowpers, granulation du laitier, épuration des gaz, parcs à matières, soufflantes, etc.)[12]. La fenderie s'équipe d'un blooming et d'un train finisseur pour traiter l'acier produit[13].

La production de la mine de Hayange passe de 348 682 t en 1880, à 1 462 273 t en 1912. L'utilisation généralisée de l'abattage à l'explosif, de la traction électrique et des perforatrices permet ces chiffres alors que la main d'œuvre se raréfie[14].

En 1907, les usines de Hayange emploient 4 886 salariés[8].

D'une guerre à l'autre (1914 - 1945)

L'usine arrête à la déclaration de guerre, puis redémarre lentement. La main d'œuvre, quand elle n’est pas mobilisée, est peu compétente et sous-alimentée. De mi-juillet 1914 à mi-juillet 1915, l'effectif des mines de Hayange chute de 70 %, de 1 225 à 336 mineurs, et l'extraction de 80 % pour atteindre 237 371 t, au lieu de 1 377 532 t un an auparavant[15].

Située en territoire allemand, l'usine subit quelques bombardements aériens à partir du . Ceux-ci sont sporadiques et ne provoquent, jusqu'à la fin de la guerre, que des dégâts insignifiants. À l'inverse, les appétits des industriels de la Ruhr, qui font pression pour démanteler l'empire de la famille de Wendel, supposée francophile, inquiètent les propriétaires. La procédure de liquidation, au profit des industriels allemands, commence en 1917. La maison va user de tous les recours possibles pour retarder l'échéance. Le , l'adjudication est prononcée… décision totalement incongrue au vu de la situation militaire de l'Allemagne[16].

À l'Armistice les de Wendel peuvent reprendre la gestion de leur usine. Mais le monde ouvrier, durement exploité pendant la guerre, entend revenir à une certaine prospérité : les spartakistes et la CGT multiplient les grèves. La journée de huit heures est accordée rapidement, dans le but de désamorcer le mouvement. L'usine de Hayange fait alors figure de pionnière, mais l'agitation reste palpable jusqu'en 1920[17]. Puis une brève crise de surproduction stabilise la situation, pendant qu'un nouvel encadrement se constitue afin de remplacer les Allemands qui émigrent en masse[18].

Ce n'est qu'après la fin de l'occupation de la Ruhr, avec ses désastreuses conséquences sur les approvisionnements de coke et les taux de change, que la situation économique se normalise. Une reprise commence en 1924, qui va durer jusqu'en 1929. L'usine, surexploitée pendant la guerre, doit être modernisée. Les haut fourneaux de la division de Fourneau sont entièrement reconstruits : 4 hauts fourneaux neufs et leurs annexes remplacent les 8 précédents. L'usine de fenderie est dotée d'un nouveau train de laminoirs mus à l'électricité, qui démarre en . Précédé d'un blooming neuf et conçut pour pouvoir produire 200 000 t/an, cet outil est « l'un des plus moderne en son genre » et surclasse les 6 vieux trains mus à la vapeur[19].

Productions annuelles
Fonte (t) Acier (t)
1929 673 763[20]
1930 534 000[20]
1931 502 759[20] 407 000[20]
1932 331 000[20]

Mais la crise de 1929 vient stopper cet élan. Les hauts fourneaux sont arrêtés les uns après les autres, tandis que le personnel subit les mesures d'économies. En attendant des jours meilleurs, la société vends des actions, lance la construction d'un mélangeur de 800 t pour occuper ses ateliers, etc. Après l'été 1932, la situation se redresse[20].

En 1936, l'usine de Hayange compte[21] :

  • 10 hauts fourneaux répartis dans 2 divisions ;
  • l'aciérie Thomas de Saint-Jacques d'une capacité de 600 000 t/an ;
  • les laminoirs de Saint-Jacques (2 bloomings, 2 trains duos et 2 trains trios)
  • l'aciérie Martin de Fenderie d'une capacité de 500 000 t/an (5 fours Martin de 70 t, un four électrique de 15 t, une fonderie) alimentée en gaz par une conduite de 11 km la connectant à l'usine de Moyeuvre ;
  • les laminoirs de Fenderie (1 blooming électrique d'une capacité de 800 000 t/an, 1 train à billettes, 1 train à largets de 1 200 mm et à tôles fortes de 2 400 mm, 1 trio de 2 000 mm et 2 pour tôles moyennes et 1 train à tôles fines)
  • les laminoirs de la platinerie d'une capacité de 60 000 t/an (3 train à tôles fines, 1 train à polir et des lignes de traitement).

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Moselle se voit immédiatement imposée une politique de germanisation qui évince les managers français. La famille de Wendel est écartée de toute gestion. L'occupant expérimente de nouvelles méthodes d'exploitation des mines. Si les chantiers « Streb » donnent donnent de piètres résultats, la généralisation du chargement mécanique s'avère prometteuse. Bien que les rendements obtenus n'atteignent pas ceux d'avant-guerre, le minerai extrait mécaniquement à Hayange passe de 3,5 % en 1914 à 44,6 % en 1944 : même pour les Français, cette mécanisation représente l’avenir. Quant à l'usine, elle est épargnée mais elle se retrouve à la libération dans un piètre état :

« Les administrations allemandes ont exploité Hayange et Moyeuvre dans des conditions désastreuses. Elles laissent les usines dans un état lamentable et dans un indescriptible encombrement. Interrompus une première fois en 1914, les travaux de modernisation ou d'extension ont de nouveau subi des retards lors de la crise des années 30. Ils sont entièrement suspendus pendant les cinq années d'occupation, période pendant laquelle la technique évolue de façon importante[22]. »

— Jean Thomas Casarotto, La sidérurgie des Wendel entre Orne et Fensch 1704-1978

Nouveau départ avec les procédés américains (1945 - 1961)

Le laminage en continu

À la Libération, outre le désordre général, tout manque : électricité, charbon, minerai, etc. La priorité reste d'assurer la subsistance des employés[23]. Pour la Reconstruction du pays, le rôle de l'État devient prépondérant. Plus personne ne songe à ressusciter le Comité des forges, dissous en 1940. Un plan national à 12 Mt est envisagé. Mais si le tonnage est atteignable, les coûts de production sont inacceptables. La modernisation va consister à spécialiser l'usine dans les tôles[24].

En effet, juste avant la Seconde Guerre mondiale, les américains ont réalisé les premiers trains de laminage en continu. Supprimant les manipulations et les réchauffage entre les différentes cages de laminage, l'installation est nettement plus performante que les procédés traditionnels : « c'est une révolution technologique. Ce sera une révolution économique quand on aura examiné toutes les répercussions économiques qu'aura cette invention pendant plus d'un demi-siècle à travers le monde[25]. »

Pour la sidérurgie européenne, qui a accumulé un retard technologique avant et pendant la guerre, l'investissement est devenu urgent. Mais les quantité produites sont à l'image des montants à investir : les deux trains continus à chaud qui doivent équiper la France sont décidés au niveau national par la « commission de modernisation de la sidérurgie ». Si le laminoir prévu au nord est vite décidé, celui de l'est s'avère plus difficile à implanter. Évaluant soigneusement les avantages et inconvénients respectif d'une installation aux usines d'Hagondange, de Thionville et de Hayange, la commission conclu que seule l'implantation à Hayange permet d'orienter la sidérurgie lorraine vers la meilleure efficience industrielle. Non seulement l'usine est vaste et approvisionnée en minerai de qualité, mais le train continu à chaud remplacera pertinemment des unités obsolètes et complètera d'autres plus modernes[4].

La France exsangue, accueille avec soulagement le Plan Marshall en 1947 : cet argent financera pour moitié la construction du train[26]. Le montant consenti est faramineux : l'investissement de 11 MdF prévu en Moselle en 1946 a beau être de loin le plus ambitieux de toutes les usines françaises[24], il sera largement dépassé[note 5]. Il faut également alimenter l'installation en acier et écouler les produits laminés. C'est alors que nait l'idée originale de la Sollac, une coopérative de neuf sociétés qui s'associent pour construire et exploiter le train[29].

Les laminoirs à rails de Saint-Jacques, qui sont l'autre pôle d'excellence du site, doivent aussi être urgemment modernisés. 50 ans après leur construction, l'outil industriel est puissant grâce à ses 2 bloomings, et surtout flexible grâce aux 6 trains finisseurs. Mais l'ensemble a été modernisé de manière désordonnée : le vieux blooming de 1 100 mm est resté à commande hydraulique, et le nouveau de 950 mm est mal intégré à son aval. Seul le train finisseur 5-6, dit aussi train de 650 mm, est électrifié, les autres trains sont restés à la vapeur. En 1957, la décision est prise de doter Saint-Jacques d'un train universel[31] qui entre en service le [30].

L'édification de la Sollac, une usine intégrée qui succède à l'usine de Hayange

La Sollac va édifier un ensemble cohérent consistant en 3 grandes unités mises simultanément en service autour de 1953[SF 1] :

  • l'usine à chaud de Serémange, alimentant le train à chaud, avec une cokerie et une aciérie ;
  • l'usine à froid d'Ébange, avec deux trains continus à froid et deux lignes d’étamage électrolytique ;
  • l'usine à froid de Florange, avec un train continu à froid et une ligne d’étamage électrolytique[32].

La première cokerie de Serémange-Erzange, composée de deux batteries de respectivement 80 et 40 fours[note 6], est mise en service entre 1952 et 1954. Elle est destinée à l'alimentation en coke des hauts fourneaux d'Hayange[34]. Dans le même temps, l'aciérie à Serémange-Erzange, constituée de deux groupes de convertisseurs : 4 convertisseurs Thomas de 55 tonnes et 4 fours Martin de 140 et 200 tonnes. Elle est renforcée en 1960 par un convertisseur Kaldo d'une capacité de 110 tonnes, à l'époque le plus gros convertisseur à l'oxygène pur de la sidérurgie lorraine[35],[25].

plan de l'aciérie, coupe transversale Nord-Sud
Coupe transversale de l’aciérie Kaldo de Florange, en service de 1960 à 1980.

En aval de l'usine et de la vallée de la Fensch, à Ébange, est progressivement construite une usine à froid essentiellement destinée au marché de l'emballage métallique. Elle est dotée de 2 trains de laminoirs à froid, de 5 cages et 3 cages (qui passera à 5 cages vers 1964[36]), 3 lignes d'étamage électrolytique[note 7] (mises en service en 1954, 1958 et 1964) et de 2 recuits base[38],[36].

L'autre usine à froidest située sur le ban de la commune de Florange. C'est alors la « petite sœur » de celle d'Ébange. Construite 10 ans après, elle consiste essentiellement en un laminoir en continu à 5 cages et une ligne d'étamage démarrée en 1964[32],[38].

L'usine à fonte

L'originalité de la Sollac est que les adhérents la fournissent en fonte. C'est ainsi que les hauts fourneaux d'Hayange lui achètent leur coke, et lui revendent, tout comme ceux de Dilling, la fonte en fusion[34].

Les hauts fourneaux, qui datent du début du XXe siècle, sont également agrandis. En particulier, les hauts fourneaux P3 à P6, dont la conception s'inspire des standards américains, doublent de volume. Vers 1956, le P4 devient même, avec un creuset de 7,5 m de diamètre, une cuve de volume utile 900 m3[SF 2] et une capacité de production de 1 000 tfonte/j, le plus gros et le plus productif d'Europe. Il ne sera supplanté par le J1 de l'usine sidérurgique de Jœuf qu'en 1961[SF 3].

En démarre la première chaîne de l'usine d'agglomération de minerai de fer lorrain, installée à Suzange. En 1962, la deuxième chaîne, parallèle à la chaîne no 1, est démarrée. L'usine est alors capable de traiter la totalité des fines de minerai issue des usines de Jœuf et de Hayange. En 1970, la chaîne no 1 est agrandie de 99 à 104,5 , la deuxième passe de 132,5 à 141,2  en 1971. L'ensemble est alimenté par un parc d'homogénéisation, renforcé en 1968 par une installation de broyage[SF 4].

La fin de la minette (1961 - 1981)

Premiers chocs : optimiser les outils existants

Le réseau lorrain des gazoducs de gaz de haut fourneau dans les années 1960. En bleu, le réseau géré par la centrale thermique de Richemont, en violet, les réseaux internes des usines. On relève l'importance du réseau interne de l'usine de Florange, qui désert la cokerie et l'usine d'agglomération.

Dans les années 1960, la minette lorraine comment à décliner. Bien que abondante et peu coûteuse à extraire, elle présente le grave inconvénient d'être pauvre en fer (de 28 à 34 %[39] contre 60 % pour des minerais importés), ce qui impose une forte consommation de coke et des hauts fourneaux nombreux. Elle contient aussi du phosphore, que le procédé LD, bien plus compétitif que les procédés Thomas et Martin, est incapable de retirer de manière satisfaisante[40].

En 1961, une première crise secoue le secteur, avec un ralentissement de la demande et un effondrement des prix[41]. Le premier réflexe va consister à restructurer l'extraction du minerai local, et de faire appel aux minerais importés. De 1960 à 1967, les effectifs des mines de fer lorraines passent de 23 694 à 13 058 mineurs[MF 1]. Quant à la mine de Hayange, équipée d'un atelier de traitement mécanique du minerai, elle produit, en 1966, 13 000 t/j de minerai[42].

Pour autant, la situation ne semble pas désespérée, surtout pour les sidérurgistes : « Les grandes restructurations des années 1960-1970 ont, tout d'abord, été effectuées dans un contexte d'adaptation à la nouvelle donne du marché de l'acier : à proprement parler, il ne s'agit pas encore de désindustrialisation. Les entreprises sidérurgiques cherchent à améliorer leurs performances en rationalisant leurs productions »[43].

Wendel et Cie réagit en lançant la construction d'un 7e haut fourneau à la division de Patural, le P7, dans l'alignement des 6 premiers. Mais seule la batterie de copwers, finie en 1962, est construite, la construction du four étant abandonnée. En 1964, ces 3 cowpers sont alors connectés au P6, en remplacement de la batterie d'origine[SF 2]. En 1962, la deuxième chaîne d'agglomération de Suzange est mise en service[SF 4],[note 8].

La Sollac va intensifier les choix stratégiques qui ont assuré sa réussite :

  • d'une part réduisant ses coûts. Les Grands Bureaux de Florange construits en 1964[SF 5],[note 9], le train à chaud est entièrement modernisé en 1966, la cokerie est reconstruite en 1966-1967[38] ;
  • d'autre part en développant ses capacités de production de tôles à haute valeur ajoutée. De 1962 à 1964, à Ébange, le laminoir à 3 cages est équipé de 2 cages supplémentaires, le recuit en bobine expansée et une 3e ligne d'étamage sont démarrés. L'usine à froid de Florange (un train de 5 cages et une ligne d'étamage) est fondée au même moment[36].

Le grand ménage des produits longs

Si les produits plats se portent bien, les produits longs s'enfoncent dans le marasme. Un nouveau mouvement de concentration est exigé par l'État. En 1967, Wendel-Sidélor est fondée. Toutes les principales usines sidérurgiques de Moselle produisant des produits longs sont intégrées dans un ensemble produisant 7 Mt d'acier. L'ensemble est cependant excessivement fragmenté. Par exemple, les hauts fourneaux sont dispersés dans 7 usines distinctes et situées — à l'exception de ceux de Micheville — dans un rayon de moins de 10 km[44].

Bien qu'en 1969 et 1970, une embellie succède à la crise qui frappe le secteur depuis 1961, Louis Dherse, administrateur du nouvel ensemble, maintient un plan de restructuration énergique[45]. De 1968 jusqu'au milieu de 1971, sont fermés 18 hauts fourneaux sur 49, 2 aciéries Thomas sur 8, 2 aciéries Martin sur 5 et 21 laminoirs sur 64. Les usines de la vallée de l'Orne sont particulièrement touchées, mais rien n'est fermé à Hayange et Florange. Pour autant, la fermeture de l'aciérie Thomas de Saint-Jacques est prévue dès le démarrage de la grande aciérie de Gandrange[46].

La situation économique se dégrade brutalement après le (annonce de l'inconvertibilité du dollar en or). Il faut encore rationaliser : le « plan Dherse » est annoncé en [45].

À cette époque, le marché des rails est aussi en déclin. Or, en 1964, les métallurgistes lorrains, sous l'égide de Raymond Stammbach, ont breveté une amélioration du train universel qui permet d'améliorer significativement la qualité des rails et poutrelles. Enfin, l'usine de Micheville vient de rejoindre le Groupe de Wendel : spécialisée dans les rails et obsolète, elle doit être repensée. Au début des années 1970, le train universel de Saint-Jacques est alors modernisé pour laminer efficacement les rails, sacrifiant ainsi Micheville[30]. L'aciérie Thomas de Saint-Jacques et le blooming ferment le [47] (les blooms venant dorénavant de l'usine de Gandrange), les fours à blooms sont reconstruits, toutes les productions annexes de Saint-Jacques sont réparties dans les autres usines du groupe[30].

Ces fermetures, ainsi que celles d'autres concernant les produits plats (à Fenderie, le train à tôles fines n°7 de 1949 ferme en 1970[48], le four Martin n°3 ferme le [47]), entraînent aussi l'arrêt de hauts fourneaux : les F3, F4, P1 et P2 sont arrêtés de 1968 à 1971[SF 2].

Le sursaut

Les 3 plus gros hauts fourneaux de la division de Patural (P3, P4 et P6) sont complètement reconstruits entre 1973 et 1978. Leur modernisation entraîne l'arrêt des hauts fourneaux voisins de Knutange (un arrêté en 1973, l'autre en 1975), ainsi que des deux hauts fourneaux de Hayange -division de Fourneau- (éteints en 1977). La capacité de production de l'ensemble rénové reste stable : en 1973, les 8 hauts fourneaux de la Fensch avaient produits 1 996 000 tonnes de fonte brute, en 1979, les 4 hauts fourneaux de Patural produisent 1 812 000 tonnes de fonte[note 10]. Cette modernisation entraîne aussi la fermeture des deux derniers hauts fourneaux de l'usine de Knutange (en 1973 et 1975) et des deux hauts fourneaux de la division de Fourneau (en 1977)[34].

Le , l'aciérie Martin de Fenderie ferme[49], suivie de son slabbing en [34]. En 1975, les quatre convertisseurs Thomas sont transformés en convertisseurs LWS à soufflage d'oxygène par le fond, d'une capacité de 65 tonnes chacun[34],[50]. L'aciérie Martin de Sérémange construite par la Sollac en 1953 ferme vers 1976[note 11].


En 1974, les deux convertisseurs Martin de 140 tonnes ont une capacité de 180 tonnes[53]. Depuis deux ans, ce sont les derniers de ce type opérationnels en Lorraine, ils ferment à leur tour[54].

En 1978, les convertisseurs LWS ayant vérifié tous les espoirs, alors que les contreperformances des convertisseurs Kaldo de l'aciérie de Gandrange ont condamné le convertisseur rotatif, une nouvelle aciérie est construite autour de deux gros convertisseurs LWS de 240 tonnes. Cette nouvelle aciérie alimente deux machines de coulée continue de brames, qui démarrent un an après les convertisseurs. Le convertisseur Kaldo est arrêté quelques mois la mise en service de l'aciérie LWS. La vieille aciérie Thomas-LWS est arrêtée prématurément en [note 12] à cause de la mauvaise conjoncture économique, ainsi que la coulée en lingot et le slabbing associé. La capacité de production théorique est de 3 millions de tonnes annuelles de brames[34] (mais elle ne dépassera jamais 2,5 millions de tonnes).

En 1980, deux usines d'agglomération de minerai, à Fontoy et Suzange, louées à Sacilor, peuvent produire 4,1 millions de tonnes d'agglomérés, permettant une marche des hauts fourneaux à 100 % d'aggloméré[34].

Durée de vie des outils des aciéries[34]
ArcelorMittalArcelorUsinorSollac

Les fours de la cokerie de Serémange arrivant en fin de vie au milieu des années 1970, une nouvelle cokerie est mise en chantier en 1975 et démarrée en 1978, dans le prolongement de la batterie de fours utilisée alors. Ses 64 fours assurent une production identique à celle des 120 anciens fours : 600 000 tonnes/an de coke et 300 m3/tonne de gaz de houille par tonne de charbon enfournée. Située quasiment en plein centre ville, cette nouvelle cokerie a bénéficié d'un effort particulier au niveau de la pollution, la construction d'installations de dépoussiérage et de traitement des eaux ayant constitué près de 20 % du coût d'investissement[34].

Ainsi, en 1978, avec des hauts fourneaux rénovés, une cokerie et une aciérie neuve, la filière à chaud de Florange est totalement modernisée. Elle forme un ensemble cohérent et moderne[34], avec des choix technologiques audacieux (gueulard Paul Wurth aux hauts fourneaux, procédé LWS, etc.). 30 ans après, la physionomie générale de l'usine n'aura presque pas changé, confirmant la justesse de choix techniques de l'époque… mais aussi l'absence de volonté de maintenir l'avance technologique de l'usine.

L'aciérie Thomas-Martin construite entre 1952 et 1954 est équipée d'un slabbing, c'est-à-dire un laminoir dégrossisseur transformant les lingots en brames. La masse maximum des brames, initialement 14 tonnes, est portée rapidement à 17 tonnes[34]. Le slabbing et les fours pits associés arrêtent dès la mise en service des deux coulées continues[SF 1].

Le crépuscule des géants (depuis 1981)

La fin de l'usine à chaud

En 1983, un four à brames est couplé au train pour l'alimenter en continu[56]. Un an après, le train est complètement rénové[SF 1].

En 1988, l'usine d'agglomération de Suzange est arrêtée[SF 4]. C'est une conséquence de la fusion d'Usinor et Sacilor en 1987 et de leur plan de rationalisation de leur outil industriel (disparition de 17 000 emplois et de 1 Mt de capacité de production de fonte)[57].

En 1998, un deuxième four à brames est construit en parallèle du premier. Ce four permet de consommer des brames froides, libérant l'aciérie de la nécessité d'une production en juste à temps. Mais il permet aussi au laminoir de fonctionner avec des brames issues d'autres usines[56]

En , la pandémie de Covid-19 amène à l'anticipation de la fermeture de la cokerie. L'outil est en bon état et pérenne jusqu'en 2032, mais le site de Dunkerque, unique client du coke depuis l'extinction des hauts fourneaux de Patural, ne sait plus absorber l'excédent de coke produit. Le coke florangeois, pénalisé par des surcoûts logistiques, est condamné[58]. Le , la cokerie de Florange produit la dernière tonne de coke, la batterie de 64 fours agée de plus de 40 ans est définitivement arrêtée[59].

L'usine à froid

Puis les investissements basculent sur le nouveau site de Ste Agathe, sur le ban de Florange, de l'autre côté de la route D18 :

  • 1969 : Ligne de refendage de fer-blanc et de tôles minces[SF 1] ;
  • 1983 : Mise en service de la ligne d'électrozingage ELSA (ÉLectrozingage de Ste Agate), selon le procédé CAROSEL[SF 1] ;
  • 1985-1986 : tandem décapage-train à froid 4 cages[60] ;
  • 1988 : Mise en service de la ligne de recuit continu RCM (Recuit Continu Mixte)[61] ;
  • 1989 : ligne de vernissage (à Ébange)[60] ;
  • 1991 : ligne de galvanisation et ligne de revêtement organique[60] ;
  • 1997 : ligne d'inspection LISA (Ligne d'Inspection de Ste Agate)[60] ;
  • 2020 : conversion de la ligne électrozingage ELSA en ligne de galvanisation à chaud, nommée GALSA 2 (GALvanisation Sainte-Agathe n°2)[62].

En 1980, le site dispose de deux laminoirs à froid à Ébange et de un à Florange. Ces trains alimentent deux lignes d'étamage électrolytique à Ébange. Florange dispose en outre de la ligne d'électrozingage ELSA, destinée essentiellement à la construction automobile[34].

Site d'Ébange en 2005.





En 1857, les 8 hauts fourneaux de la division sont implantés selon deux alignements perpendiculaires, le haut fourneau 4 (ou B en 1847) en étant l'angle. Un axe est parallèle à la vallée de la Fensch, avec les hauts fourneau 4 (ou B), 5 (ou C), 6, 7 et 8 (ou D). L'autre axe concerne les petits hauts fourneaux 1 et 2 au charbon de bois et les hauts fourneaux 3 (ou A) et 4 (ou B). Les hauts fourneaux au coke produisent de la fonte en gueuses pour le puddlage et la fonderie[SF 2]. En 1865, Charles II de Wendel renomme encore ces hauts fourneaux[63], le 1, appelé F1a[note 13], correspondant vraisemblablement au haut fourneau nommé 4 en 1857[SF 2], les renommages des autres hauts fourneaux n'étant pas documentés.

L'usine est directement connectée à la sortie du tunnel de la mine[SF 6].

  1. a b c d e f g h et i Casarotto 2023, p. 291
  2. a et b Casarotto 2023, p. 292
  3. a et b Casarotto 2023, p. 262
  4. a b et c Casarotto 2023, p. 458-459
  5. Casarotto 2023, p. 287-289
  6. a et b Casarotto 2023, p. 288-290
  7. a et b Casarotto 2023, p. 288-289
  8. a et b Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées Casarotto220-223
  9. a et b Casarotto 2023, p. 292-297
  10. Casarotto 2023, p. 297-306
  11. Casarotto 2023, p. 300-302
  12. Casarotto 2023, p. 277
  13. Casarotto 2023, p. 287
  14. Casarotto 2023, p. 267-273
  15. Casarotto 2023, p. 333
  16. Casarotto 2023, p. 355-361
  17. Casarotto 2023, p. 374-379
  18. Casarotto 2023, p. 379-385
  19. Casarotto 2023, p. 399-401
  20. a b c d e et f Casarotto 2023, p. 408-411
  21. Casarotto 2023, p. 415-419
  22. Casarotto 2023, p. 437-446
  23. Casarotto 2023, p. 454
  24. a et b Casarotto 2023, p. 457-458
  25. a et b Jean-Yves Debost et Bernard Réal, Les rapports des industries de la manutention avec l'évolution des processus de production et des moyens de transport dans le cours de l'internationalisation du capital, Université des Sciences Sociales de Grenoble, Institut de Recherche Economique et de Planification, (lire en ligne [PDF]), partie 2, p. 47-64
  26. Casarotto 2023, p. 460
  27. Françoise Berger, La France, l'Allemagne et l'acier (1932-1952). De la stratégie des cartels à l'élaboration de la CECA, Université Panthéon-Sorbonne, (lire en ligne), p. 679
  28. Casarotto 2023, p. 491
  29. Thouvenin 1981, p. 41
  30. a b c et d Casarotto 2023, p. 480-483
  31. Le principe du train universel est originaire des États-Unis. Il a été mis au point avant la Seconde Guerre mondiale pour résoudre les problèmes liés au laminage des poutrelles à ailes parallèles (IPE), plus économiques d'emploi que les poutrelles à faces intérieures inclinées de type IPN[30].
  32. a et b Casarotto 2023, p. 495
  33. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées Casarotto493
  34. a b c d e f g h i j k l m et n Monique Thouvenin, « De WENDEL-SIDÉLOR à SACILOR-SOLLAC : 1968-1980. 13 années de mutations difficiles en Lorraine. », Revue Géographique de l'Est, vol. 21, no 1,‎ , p. 53-56 (lire en ligne)
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  36. a b et c Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées Corbion
  37. (en) L. Nahai, Mineral yearbook : The mineral industry of France, USGS, (lire en ligne [PDF]), p. 260
  38. a b et c Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées Casarotto498-514
  39. Marc Leroy, Cécile Le Carlier et Paul Merluzzo, Entre bas et haut fourneau. L’utilisation de la minette de Lorraine au Moyen Age : une parfaite adéquation avec la technique du bas fourneau, Laboratoire de Métallurgies et Cultures, IRAMAT – UMR 5060, (lire en ligne [PDF])
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  43. Pascal Raggi, « Industrialisation, désindustrialisation, ré-industrialisation en Europe : Le cas de la sidérurgie lorraine (1966-2006) », Rives méditerranéennes, , § 4
  44. Casarotto 2023, p. 544-545
  45. a et b Casarotto 2023, p. 552
  46. Casarotto 2023, p. 549
  47. a et b Casarotto 2023, p. 553
  48. Casarotto 2023, p. 561
  49. Casarotto 2023, p. 519
  50. « Sollac », sur industrie.lu,
  51. « Note pour MM. les Membres de la Commission Procédure écrite E/1671/77 Objet : ARTICLE 54 CECA - avis de la Commission sur une déclaration d'investissement au titre de la décision 22/66 de la Haute Autorité Proposition de OROTLI, en accord avec M. DAVIGNON », CECA, (consulté le )
  52. « Note pour MM. les Membres de la Commission Procédure écrite E/215/79 Objet : ARTICLE 54 CECA - déclaration d'investissement au titre de la décision 22/66 de la Haute Autorité, modifiée par la décision 2237/73 CECA Proposition de M. ORTOLI », CECA, (consulté le )
  53. (en) Harry George Cordero, Iron and Steel Works of the World, , p. 144
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