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« Obligation de quitter le territoire français » : différence entre les versions

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rapport cour des Comptes 2024
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[[File:Durée maximale de la rétention administrative en France.png|thumb|Évolution de la durée maximale de la [[Centre de rétention administrative en France|rétention administrative]] en France<ref name=":8" />{{,}}<ref>{{Article|langue=fr|titre=La loi « immigration », dernier texte d’une longue série de 118 depuis 1945|périodique=Le Monde|date=2024-02-25|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/02/25/la-loi-immigration-dernier-texte-d-une-longue-serie-de-118-depuis-1945_6218454_4355770.html|consulté le=2024-10-01}}</ref>.]]
[[File:Durée maximale de la rétention administrative en France.png|thumb|Évolution de la durée maximale de la [[Centre de rétention administrative en France|rétention administrative]] en France<ref name=":8" />{{,}}<ref>{{Article|langue=fr|titre=La loi « immigration », dernier texte d’une longue série de 118 depuis 1945|périodique=Le Monde|date=2024-02-25|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/02/25/la-loi-immigration-dernier-texte-d-une-longue-serie-de-118-depuis-1945_6218454_4355770.html|consulté le=2024-10-01}}</ref>.]]
La décision d'OQTF peut être accompagnée d'une mesure de privation de liberté, telle qu'une [[Assignation à résidence en France|assignation à résidence]] ou un enfermement en [[Centre de rétention administrative en France|centre de rétention administrative]], prévu par la loi du {{date|29 octobre 1981}}. Les gouvernements français ont régulièrement allongé le temps pendant lequel un étranger peut être retenu le temps d'organiser son éloignement : dix jours selon la [[Lois Pasqua-Debré|loi Pasqua]], en 1993, douze jours avec la [[Loi du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile|loi Chevènement en 1998]], trente-deux avec la [[Loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité|loi Sarkozy de 2003]], quarante-cinq jours avec la [[Loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité|loi Besson en 2011]], et quatre-vingt-dix jours avec la [[Loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie|loi Collomb de 2018]]<ref name=":1" />. En 2024, [[Bruno Retailleau]] envisage de porter cette durée à 210 jours<ref>{{Article|langue=fr|titre=Bruno Retailleau souhaite prolonger la durée en centre de rétention administrative jusqu’à 210 jours pour certains migrants en situation irrégulière|périodique=Le Monde|date=2024-10-02|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/10/02/bruno-retailleau-souhaite-prolonger-la-duree-en-centre-de-retention-administrative-jusqu-a-210-jours-pour-certains-migrants-en-situation-irreguliere_6341984_3224.html|consulté le=2024-10-08}}</ref>. Il s'agit invariablement d'éviter que les personnes sans papiers n’aient purgé la durée maximale de rétention avant d’avoir pu être reconduites à la frontière, mais la durée de rétention n’a en fait pas d’impact sur le taux d’éloignement, l'immense majorité d'entre eux ayant lieu dans les 45 premiers jours de la rétention<ref name=":8" />{{,}}<ref>{{Lien web |langue=fr |prénom=Marie |nom=Turcan |titre=Bruno Retailleau veut prolonger la rétention administrative : une idée populiste contredite par les chiffres |url=https://www.mediapart.fr/journal/france/031024/bruno-retailleau-veut-prolonger-la-retention-administrative-une-idee-populiste-contredite-par-les-chiffres |site=Mediapart |date=2024-10-03 |consulté le=2024-10-04}}</ref>.
La décision d'OQTF peut être accompagnée d'une mesure de privation de liberté, telle qu'une [[Assignation à résidence en France|assignation à résidence]] ou un enfermement en [[Centre de rétention administrative en France|centre de rétention administrative]], prévu par la loi du {{date|29 octobre 1981}}. Le maintien des étrangers en [[centre de rétention]] n'est justifié que si l’éloignement est possible à court terme<ref name=":0">{{Article|langue=fr|titre=Immigration : la France durcit « drastiquement » l’octroi de visas aux Algériens, Marocains et Tunisiens|périodique=Le Monde|date=2021-09-28|lire en ligne=https://www.[[Le Monde]]/politique/article/2021/09/28/la-france-durcit-drastiquement-l-octroi-de-visas-aux-algeriens-marocains-et-tunisiens_6096278_823448.html|consulté le=2024-09-29}}</ref>. Les gouvernements français ont régulièrement allongé le temps pendant lequel un étranger peut être retenu le temps d'organiser son éloignement : dix jours selon la [[Lois Pasqua-Debré|loi Pasqua]], en 1993, douze jours avec la [[Loi du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile|loi Chevènement en 1998]], trente-deux avec la [[Loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité|loi Sarkozy de 2003]], quarante-cinq jours avec la [[Loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité|loi Besson en 2011]], et quatre-vingt-dix jours avec la [[Loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie|loi Collomb de 2018]]<ref name=":1" />. En 2024, [[Bruno Retailleau]] envisage de porter cette durée à 210 jours<ref>{{Article|langue=fr|titre=Bruno Retailleau souhaite prolonger la durée en centre de rétention administrative jusqu’à 210 jours pour certains migrants en situation irrégulière|périodique=Le Monde|date=2024-10-02|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/10/02/bruno-retailleau-souhaite-prolonger-la-duree-en-centre-de-retention-administrative-jusqu-a-210-jours-pour-certains-migrants-en-situation-irreguliere_6341984_3224.html|consulté le=2024-10-08}}</ref>. Il s'agit invariablement d'éviter que les personnes sans papiers n’aient purgé la durée maximale de rétention avant d’avoir pu être reconduites à la frontière, mais la durée de rétention n’a en fait pas d’impact sur le taux d’éloignement, l'immense majorité d'entre eux ayant lieu dans les 45 premiers jours de la rétention<ref name=":8" />{{,}}<ref>{{Lien web |langue=fr |prénom=Marie |nom=Turcan |titre=Bruno Retailleau veut prolonger la rétention administrative : une idée populiste contredite par les chiffres |url=https://www.mediapart.fr/journal/france/031024/bruno-retailleau-veut-prolonger-la-retention-administrative-une-idee-populiste-contredite-par-les-chiffres |site=Mediapart |date=2024-10-03 |consulté le=2024-10-04}}</ref>.


Vingt et une lois ont été votées entre 1990 et 2024 sur l’immigration et l’asile, sans réussir à diminuer le taux de non-exécution des mesures d'éloignement, parce que l'obstacle principal est en fait diplomatique<ref name=":5" />.
Vingt et une lois ont été votées entre 1990 et 2024 sur l’immigration et l’asile, sans réussir à diminuer le taux de non-exécution des mesures d'éloignement, parce que l'obstacle principal est en fait diplomatique<ref name=":5" />.
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En 2018, le ministère de l'Intérieur a prononcé {{nb|132978|mesures}} d'obligation de quitter le territoire français. {{nb|30276|départs}} ont été dénombrés cette année-là, dont {{nb|19957}} sous l'effet d’une mesure administrative. [[Emmanuel Macron]] avait, au début de sa [[première présidence d'Emmanuel Macron|première présidence]], évoqué un objectif de 100 % du taux d'exécution des reconduites à la frontière (censées être appliquées à la fin du délai de {{nb|30 jours}} pour les OQTF qui ne font pas l'objet d'un recours<ref>[https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/emmanuel-macron-demande-a-expulser-davantage-d-etrangers-irreguliers_4658109.html Emmanuel Macron demande à expulser davantage d'étrangers en situation irrégulière], francetvinfo.fr, 10 juin 2021</ref>) ; mais le taux d'exécution des mesures d'OQTF s'établissait à environ 15 % en 2018, démontrant que les mesures d'éloignement prises n'étaient que très rarement exécutées<ref>{{Ouvrage|auteur1=Cour des Comptes|titre=Synthèse du rapport public sur "L'entrée, le séjour et le premier accueil des personnes étrangères"|passage=21|date=avril 2020|lire en ligne=https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-05/20200505-synthese-entree-sejour-premier-accueil-personnes-etrangeres_0.pdf}}.</ref>. Le taux d'exécution de ces mesures d'éloignement ne cesse de diminuer ces dernières années (13,5 % en 2017, 12 % en 2019, puis, avec la [[Pandémie de Covid-19|crise du Covid-19]], seulement 6,9 % en 2020 et 5,6 % au premier semestre 2021)<ref name=":senat20230407">{{Lien web |titre=Projet de loi de finances pour 2022 : Immigration, asile et intégration |url=https://www.senat.fr/rap/a21-169-2/a21-169-2.html |éditeur=[[Sénat (France)|Sénat]] |date=7 avril 2023 |consulté le=25 février 2024}}.</ref>{{,}}<ref>Gérald Roux, [https://www.francetvinfo.fr/politique/est-il-vrai-de-dire-que-88-des-expulsions-ne-sont-pas-appliquees-en-france-comme-laffirme-le-depute-lr-pierre-cordier_5427616.html Est-il vrai de dire que "88% des expulsions ne sont pas appliquées en France", comme l’affirme le député LR Pierre Cordier ?], francetvinfo.fr, 19 octobre 2022</ref>. Il est de 30% au niveau européen<ref name=":9">{{Lien web |langue=fr-FR |prénom=Camille Le |nom=Coz |titre=Migrations : une nouvelle boussole pour la politique de retour |url=https://www.lagrandeconversation.com/politique/migrations-une-nouvelle-boussole-pour-la-politique-de-retour/ |site=La Grande Conversation |date=2024-09-04 |consulté le=2024-10-08}}</ref>.
En 2018, le ministère de l'Intérieur a prononcé {{nb|132978|mesures}} d'obligation de quitter le territoire français. {{nb|30276|départs}} ont été dénombrés cette année-là, dont {{nb|19957}} sous l'effet d’une mesure administrative. [[Emmanuel Macron]] avait, au début de sa [[première présidence d'Emmanuel Macron|première présidence]], évoqué un objectif de 100 % du taux d'exécution des reconduites à la frontière (censées être appliquées à la fin du délai de {{nb|30 jours}} pour les OQTF qui ne font pas l'objet d'un recours<ref>[https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/emmanuel-macron-demande-a-expulser-davantage-d-etrangers-irreguliers_4658109.html Emmanuel Macron demande à expulser davantage d'étrangers en situation irrégulière], francetvinfo.fr, 10 juin 2021</ref>) ; mais le taux d'exécution des mesures d'OQTF s'établissait à environ 15 % en 2018, démontrant que les mesures d'éloignement prises n'étaient que très rarement exécutées<ref>{{Ouvrage|auteur1=Cour des Comptes|titre=Synthèse du rapport public sur "L'entrée, le séjour et le premier accueil des personnes étrangères"|passage=21|date=avril 2020|lire en ligne=https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-05/20200505-synthese-entree-sejour-premier-accueil-personnes-etrangeres_0.pdf}}.</ref>. Le taux d'exécution de ces mesures d'éloignement ne cesse de diminuer ces dernières années (13,5 % en 2017, 12 % en 2019, puis, avec la [[Pandémie de Covid-19|crise du Covid-19]], seulement 6,9 % en 2020 et 5,6 % au premier semestre 2021)<ref name=":senat20230407">{{Lien web |titre=Projet de loi de finances pour 2022 : Immigration, asile et intégration |url=https://www.senat.fr/rap/a21-169-2/a21-169-2.html |éditeur=[[Sénat (France)|Sénat]] |date=7 avril 2023 |consulté le=25 février 2024}}.</ref>{{,}}<ref>Gérald Roux, [https://www.francetvinfo.fr/politique/est-il-vrai-de-dire-que-88-des-expulsions-ne-sont-pas-appliquees-en-france-comme-laffirme-le-depute-lr-pierre-cordier_5427616.html Est-il vrai de dire que "88% des expulsions ne sont pas appliquées en France", comme l’affirme le député LR Pierre Cordier ?], francetvinfo.fr, 19 octobre 2022</ref>. Il est de 30% au niveau européen<ref name=":9">{{Lien web |langue=fr-FR |prénom=Camille Le |nom=Coz |titre=Migrations : une nouvelle boussole pour la politique de retour |url=https://www.lagrandeconversation.com/politique/migrations-une-nouvelle-boussole-pour-la-politique-de-retour/ |site=La Grande Conversation |date=2024-09-04 |consulté le=2024-10-08}}</ref>.


Ce faible taux d'exécution s'explique par le fait que de les mesures d'éloignement sont très nombreuses, et souvent prononcées à l'encontre de personnes impossibles à expulser, car elles ont, par exemple, des enfants potentiellement français ou sont ressortissantes de pays en guerre, parce que ces mesures sont abusives et déclarées illégales par les juridictions, ou parce que les pays d'origine ne coopèrent pas (l'éloignement échoue alors en raison de l'absence de laisser-passer consulaire, normalement délivré par le pays dont est issue la personne concernée)<ref name=":8" />{{,}}<ref>{{Article|langue=fr|titre=Faible taux d’éloignement des étrangers : pourquoi les OQTF sont difficiles à exécuter|périodique=[[Le Monde]]|date=2022-10-20|lire en ligne=https://www.[[Le Monde]]/societe/article/2022/10/20/faible-taux-d-eloignement-des-etrangers-pourquoi-les-oqtf-sont-difficiles-a-executer_6146664_3224.html|consulté le=2022-11-27}}.</ref>{{,}}<ref name=":10">{{Lien web |langue=fr |prénom=Cédric |nom=Mathiot |titre=Pourquoi les étrangers en situation irrégulière ne sont pas tous expulsés |url=https://www.liberation.fr/desintox/2017/10/18/pourquoi-les-etrangers-en-situation-irreguliere-ne-sont-pas-tous-expulses_1603737/ |site=Libération |consulté le=2022-11-27}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |auteur=Elsa de La Roche Saint-André |titre=Pourquoi la promesse d’Emmanuel Macron d’exécuter 100 % des obligations de quitter le territoire est intenable |url=https://www.liberation.fr/checknews/pourquoi-la-promesse-demmanuel-macron-dexecuter-100-des-obligations-de-quitter-le-territoire-est-intenable-20221022_633KF4T24ZCGRH23UYHVWY3MBY/ |site=[[Libération (journal)|Libération]] |consulté le=2022-11-27}}.</ref>. Le maintien des étrangers en [[centre de rétention]] n'est justifié que si l’éloignement est possible à court terme<ref name=":0">{{Article|langue=fr|titre=Immigration : la France durcit « drastiquement » l’octroi de visas aux Algériens, Marocains et Tunisiens|périodique=Le Monde|date=2021-09-28|lire en ligne=https://www.[[Le Monde]]/politique/article/2021/09/28/la-france-durcit-drastiquement-l-octroi-de-visas-aux-algeriens-marocains-et-tunisiens_6096278_823448.html|consulté le=2024-09-29}}</ref>.
Ce faible taux d'exécution s'explique par le fait que de les mesures d'éloignement sont très nombreuses, et souvent prononcées à l'encontre de personnes impossibles à expulser, car elles ont, par exemple, des enfants potentiellement français ou sont ressortissantes de pays en guerre, parce que ces mesures sont abusives et déclarées illégales par les juridictions, ou parce que les pays d'origine ne coopèrent pas<ref name=":8" />{{,}}<ref>{{Article|langue=fr|titre=Faible taux d’éloignement des étrangers : pourquoi les OQTF sont difficiles à exécuter|périodique=[[Le Monde]]|date=2022-10-20|lire en ligne=https://www.[[Le Monde]]/societe/article/2022/10/20/faible-taux-d-eloignement-des-etrangers-pourquoi-les-oqtf-sont-difficiles-a-executer_6146664_3224.html|consulté le=2022-11-27}}.</ref>{{,}}<ref name=":10">{{Lien web |langue=fr |prénom=Cédric |nom=Mathiot |titre=Pourquoi les étrangers en situation irrégulière ne sont pas tous expulsés |url=https://www.liberation.fr/desintox/2017/10/18/pourquoi-les-etrangers-en-situation-irreguliere-ne-sont-pas-tous-expulses_1603737/ |site=Libération |consulté le=2022-11-27}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |auteur=Elsa de La Roche Saint-André |titre=Pourquoi la promesse d’Emmanuel Macron d’exécuter 100 % des obligations de quitter le territoire est intenable |url=https://www.liberation.fr/checknews/pourquoi-la-promesse-demmanuel-macron-dexecuter-100-des-obligations-de-quitter-le-territoire-est-intenable-20221022_633KF4T24ZCGRH23UYHVWY3MBY/ |site=[[Libération (journal)|Libération]] |consulté le=2022-11-27}}.</ref>. L’échec des mesures d'éloignement augmente le nombre d'étrangers en situation irrégulière et qui se maintiennent sur le territoire{{Sfn|Cour des Comptes|2024|p=102}}.


=== Des OQTF en trop grand nombre ===
=== Des OQTF en trop grand nombre ===
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La France prononce beaucoup plus d'OQT que ses voisins<ref name=":9" /> : {{Nbr|31 195}} au deuxième trimestre 2024, contre {{Nbr|12 885}} en Allemagne ou {{Nbr|6 380}} en Italie<ref name=":4">{{Lien web |langue=fr |prénom=Lénaïg Bredoux, Margaux Houcine, Youmni Kezzouf, Ilyes |nom=Ramdani |titre=Meurtre de Philippine : Retailleau et l’extrême droite multirécidivistes de l’instrumentalisation des drames |url=https://www.mediapart.fr/journal/france/290924/meurtre-de-philippine-retailleau-et-l-extreme-droite-multirecidivistes-de-l-instrumentalisation-des-drames |site=Mediapart |date=2024-09-29 |consulté le=2024-09-29}}</ref>. Elle a doublé le nombre d'OQTF prononcées entre 2015 et 2024, sans arriver à faire varier le nombre de celles qui sont exécutées<ref name=":8" />{{,}}<ref name=":9" />{{,}}<ref name=":10" />.
La France prononce beaucoup plus d'OQT que ses voisins<ref name=":9" /> : {{Nbr|31 195}} au deuxième trimestre 2024, contre {{Nbr|12 885}} en Allemagne ou {{Nbr|6 380}} en Italie<ref name=":4">{{Lien web |langue=fr |prénom=Lénaïg Bredoux, Margaux Houcine, Youmni Kezzouf, Ilyes |nom=Ramdani |titre=Meurtre de Philippine : Retailleau et l’extrême droite multirécidivistes de l’instrumentalisation des drames |url=https://www.mediapart.fr/journal/france/290924/meurtre-de-philippine-retailleau-et-l-extreme-droite-multirecidivistes-de-l-instrumentalisation-des-drames |site=Mediapart |date=2024-09-29 |consulté le=2024-09-29}}</ref>. Elle a doublé le nombre d'OQTF prononcées entre 2015 et 2024, sans arriver à faire varier le nombre de celles qui sont exécutées<ref name=":8" />{{,}}<ref name=":9" />{{,}}<ref name=":10" />.


Leur nombre est tel qu'il aurait fallu procéder à {{Nbr|11000|retours}} par mois en 2023 pour exécuter toutes celles émises cette année là. Chaque éloignement est une opération lourde, impliquant de nombreux personnels et ayant un coût élevé (estimé en incluant la rétention administrative à {{Nbr|20000|€}} par personne)<ref name=":9" />.
Leur nombre est tel qu'il aurait fallu procéder à {{Nbr|11000|retours}} par mois en 2023 pour exécuter toutes celles émises cette année là. Chaque éloignement est une opération lourde, impliquant de nombreux personnels et ayant un coût élevé (estimé en incluant la rétention administrative à {{Nbr|20000|€}} par personne)<ref name=":9" />. Le scompagnies aériennes peuvent refuser les éloignements{{Sfn|Cour des Comptes|2024|p=95}}.


De nombreuses OQTF sont délivrées en préfecture sans étude sérieuse des dossiers. Les recours engorgent les tribunaux administratifs{{Sfn|Cour des Comptes|2024}}. En 2022, ceux-ci ont déclaré illégales et annulé 18 % des OQTF contestées<ref name=":8" />.
De nombreuses OQTF sont délivrées en préfecture sans étude sérieuse des dossiers, y compris à des personnes qui sont porutant insérées dans la société{{Sfn|Cour des Comptes|2024|p=101}}. Les recours engorgent les tribunaux administratifs{{Sfn|Cour des Comptes|2024}}. En 2022, ceux-ci ont déclaré illégales et annulé 18 % des OQTF contestées<ref name=":8" />.

Le Ministère de l'Intérieur estime que l'éloignement {{"|joue un rôle dissuasif non négligeable vis-à-vis d’émigrants potentiels et constitue donc un frein, en amont de nos frontières, à l’immigration illégale}}<ref>{{Chapitre|prénom1=Chowra|nom1=Makaremi|titre chapitre=Violence et refoulement dans la zone d’attente de Roissy|titre ouvrage=Enfermés dehors|éditeur=Terra-HN|date=2009-03-12|pages totales=41–62|isbn=978-2-914968-55-3|doi=10.3917/tehn.kobel.2009.01.0041|lire en ligne=https://shs.cairn.info/enfermes-dehors--9782914968553-page-41?site_lang=fr|consulté le=2024-10-08}}</ref>, mais la [[Cour des comptes (France)|Cour des Comptes]] écrit au contraire qu'il {{"|est difficile de prouver que des éloignements plus nombreux conduiraient à réduire le flux entrant d’immigration}}{{Sfn|Cour des Comptes|2024|p=99}}.


=== Retours impossibles pour des raisons humanitaires ===
=== Retours impossibles pour des raisons humanitaires ===
Certaines OQTF son inapliquables parce qu'on ne peut pas organiser de retour vers les pays de destination désignés. En 2023, près de 10% des OQTF concernaient des pays tels que l’Afghanistan, le Soudan ou la Syrie<ref name=":9" />{{,}}<ref>{{Article|titre=Plusieurs ONG dénoncent des tentatives d'expulsions « scandaleuses et illégales » de la France vers la Syrie|périodique=[[Le Monde]]|date=2023-01-06|lire en ligne=https://www.[[Le Monde]]/societe/article/2023/01/06/immigration-plusieurs-ong-denoncent-des-tentatives-d-expulsions-scandaleuses-et-illegales-vers-la-syrie_6156851_3224.html|consulté le=2023-01-06}}.</ref>.
Certaines OQTF son inapliquables parce qu'on ne peut pas organiser de retour vers les pays de destination désignés. En 2023, près de 10% des OQTF concernaient des pays tels que l’Afghanistan, le Soudan ou la Syrie{{Sfn|Cour des Comptes|2024|p=101}}{{,}}<ref name=":9" />{{,}}<ref>{{Article|titre=Plusieurs ONG dénoncent des tentatives d'expulsions « scandaleuses et illégales » de la France vers la Syrie|périodique=[[Le Monde]]|date=2023-01-06|lire en ligne=https://www.[[Le Monde]]/societe/article/2023/01/06/immigration-plusieurs-ong-denoncent-des-tentatives-d-expulsions-scandaleuses-et-illegales-vers-la-syrie_6156851_3224.html|consulté le=2023-01-06}}.</ref>.


=== Raisons diplomatiques ===
=== Raisons diplomatiques ===
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Le magazine [[Marianne (magazine)|''Marianne'']] explique que dans leur narration des faits divers, certains médias de type ''[[CNews]]'' mentionnent systématiquement l'OQTF si elle existe, parce que « au-delà de l’intérêt public d’une telle information, se joue aussi une bataille politique – et une droitisation du champ médiatique »<ref>{{Lien web |langue=fr |prénom=Emilien |nom=Hertement |titre=Comment l’OQTF est devenue une info incontournable à la rubrique "fait divers" |url=https://www.marianne.net/societe/medias/comment-loqtf-est-devenue-une-info-incontournable-a-la-rubrique-fait-divers |site=[[Marianne (magazine)|Marianne]] |date=2024-01-29 |consulté le=2024-09-29}}</ref>. Cela alimente ce que ''Le Monde'' décrit comme une {{"|confusion entre sécurité, identité et immigration}}<ref name=":1" />.
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== Retour volontaire, plutôt que forcé ==
== Retour aidé, plutôt que forcé ==
L'expulsion vers le pays d'origine est traumatisante : elle stigmatise les personnes qui se sont exilées, et les rend plus vulnérables<ref name=":9" />{{,}}<ref>{{Article|prénom1=Arjen|nom1=Leerkes|prénom2=Mieke|nom2=Kox|titre=Pressured into a Preference to Leave? A Study on the "Specific" Deterrent Effects and Perceived Legitimacy of Immigration Detention|périodique=Law & Society Review|volume=51|numéro=4|pages=895–929|date=2017|issn=0023-9216|lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/45093879|consulté le=2024-10-08}}</ref>. La [[Cour des comptes (France)|Cour des Comptes]] encourageait en 2020 une {{"|approche « pragmatique » (obtenir le départ des personnes susceptibles de le faire volontairement et trouver des solutions pour les autres)}}{{Sfn|Cour des Comptes|2020|p=24}}. Tisser des liens avec les personnes sans papiers et les mettre à l'abri est indispensable si l'ont veut ensuite proposer toutes les options possibles: [[Titre de séjour en France|régularisation]], [[Droit d'asile|demande d’asile]] ou aide au retour<ref name=":9" />. Le retour volontaire est proposé par l'[[Office français de l'immigration et de l'intégration|Ofii]]<ref>{{Lien web |langue=Fr |titre=Qu'est-ce que l'aide au retour et à la réinsertion ? |url=https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F33974 |site=www.service-public.fr |consulté le=2024-10-08}}</ref>, et peu coûteux, mais rarement utilisé<ref name=":9" />. Il permet aux personnes exilées de se réintégrer plus facilement dans leur pays d'origine<ref>{{Article|prénom1=Stefan|nom1=Le Courant|prénom2=Michel|nom2=Agier|titre=Vivre sous la menace: les sans-papiers et l'État|périodique=Le Seuil|éditeur=Éditions du Seuil|date=2022|isbn=9782021364972|consulté le=2024-10-08}}</ref>, mais ne peut être efficace que si il résout une situation individuelle<ref>{{Lien web |titre=Agent du « retour volontaire » [Pascaline Chappart] ⋅ GISTI |url=https://www.gisti.org/spip.php?article4509 |site=www.gisti.org |consulté le=2024-10-08}}</ref>{{,}}<ref>{{Article|prénom1=Pascaline|nom1=Chappart|titre=Agent du « retour volontaire »:|périodique=Plein droit|volume=n° 91|numéro=4|pages=16–19|date=2011-12-01|issn=0987-3260|doi=10.3917/pld.091.0016|lire en ligne=https://www.cairn.info/revue-plein-droit-2011-4-page-16.htm?ref=doi|consulté le=2024-10-08}}</ref> . La Cour des Comptes l'a encouragé en 2020 et 2024.
L'expulsion vers le pays d'origine est traumatisante : elle stigmatise les personnes qui se sont exilées, et les rend plus vulnérables<ref name=":9" />{{,}}<ref>{{Article|prénom1=Arjen|nom1=Leerkes|prénom2=Mieke|nom2=Kox|titre=Pressured into a Preference to Leave? A Study on the "Specific" Deterrent Effects and Perceived Legitimacy of Immigration Detention|périodique=Law & Society Review|volume=51|numéro=4|pages=895–929|date=2017|issn=0023-9216|lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/45093879|consulté le=2024-10-08}}</ref>. La [[Cour des comptes (France)|Cour des Comptes]] encourageait en 2020 une {{"|approche « pragmatique » (obtenir le départ des personnes susceptibles de le faire volontairement et trouver des solutions pour les autres)}}{{Sfn|Cour des Comptes|2020|p=24}}. Tisser des liens avec les personnes sans papiers et les mettre à l'abri est indispensable si l'ont veut ensuite proposer toutes les options possibles: [[Titre de séjour en France|régularisation]] par l'obtention d'un titre de séjour, [[Droit d'asile|protection]] ou aide au retour<ref name=":9" />.
Le retour aidé est un départ en échange du versement d'une allocation{{Sfn|Cour des Comptes|2024|p=77}}. Il est proposé par l'[[Office français de l'immigration et de l'intégration|Ofii]]<ref>{{Lien web |langue=Fr |titre=Qu'est-ce que l'aide au retour et à la réinsertion ? |url=https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F33974 |site=www.service-public.fr |consulté le=2024-10-08}}</ref>, peu coûteux{{Sfn|Cour des Comptes|2024|p=108}}, mais rarement utilisé (il a concerné moins de 5000 personnesn en 2022{{Sfn|Cour des Comptes|2024|p=77}})<ref name=":9" />. Il permet aux personnes exilées de se réintégrer plus facilement dans leur pays d'origine<ref>{{Article|prénom1=Stefan|nom1=Le Courant|prénom2=Michel|nom2=Agier|titre=Vivre sous la menace: les sans-papiers et l'État|périodique=Le Seuil|éditeur=Éditions du Seuil|date=2022|isbn=9782021364972|consulté le=2024-10-08}}</ref>, mais ne peut être efficace que si il résout une situation individuelle<ref>{{Lien web |titre=Agent du « retour volontaire » [Pascaline Chappart] ⋅ GISTI |url=https://www.gisti.org/spip.php?article4509 |site=www.gisti.org |consulté le=2024-10-08}}</ref>{{,}}<ref>{{Article|prénom1=Pascaline|nom1=Chappart|titre=Agent du « retour volontaire »:|périodique=Plein droit|volume=n° 91|numéro=4|pages=16–19|date=2011-12-01|issn=0987-3260|doi=10.3917/pld.091.0016|lire en ligne=https://www.cairn.info/revue-plein-droit-2011-4-page-16.htm?ref=doi|consulté le=2024-10-08}}</ref> . La Cour des Comptes l'a encouragé en 2020 et 2024{{Sfn|Cour des Comptes|2024|p=104}}.


== Documents ==
== Documents ==

Version du 8 octobre 2024 à 17:54

L'obligation de quitter le territoire français (OQTF) est une mesure administrative d'éloignement des étrangers prévue en droit français par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La décision peut être accompagnée d'un délai de départ volontaire, d'une interdiction de retour sur le territoire français (IRTF), ou d'une mesure de privation de liberté (assignation à résidence ou placement en centre de rétention).

Les gouvernements français n'ont eu de cesse d'augmenter la durée pendant laquelle la personne peut être enfermée dans un centre de rétention le temps de l'exécution de la mesure, mais les éloignements sont d'autant plus rares que les OQTF prononcées sont de plus en plus nombreuses et souvent impossibles à mettre en œuvre, notamment pour des raisons humanitaires ou diplomatiques.

OQTF, IRTF et ITF

À la décision d'OQTF peut s'ajouter une interdiction de retour sur le territoire français (IRTF), car il s’agit de deux décisions administratives distinctes et cumulatives. Ces deux décisions administratives ne doivent pas être confondues avec la peine d'interdiction de territoire français (ITF)[1],[2].

La peine d'ITF est prononcée à titre principal ou à titre complémentaire à une peine d’emprisonnement ou d’amende par le tribunal pénal à l’encontre d’une personne étrangère condamnée pour un crime ou un délit. Elle peut être temporaire (jusqu'à 10 ans) ou définitive. En cas d’incarcération, elle démarre à compter du jour de la libération. L'ITF entraîne le prononcé de trois mesures administratives: l’OQTF ; le cas échéant, la rétention administrative ou l’assignation à résidence ; la désignation d’un pays d’éloignement[3].

Nature et effets de la mesure

L'article L. 611 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA)[L 1] prévoit qu'un étranger de plus de dix-huit ans sans titre de séjour ni visa, ou dont la demande d'asile a été définitivement refusée, ou un étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois et dont le comportement constitue une menace pour l'ordre public, peut faire l'objet d'une décision d'obligation de quitter le territoire français.

Cette décision mentionne le pays à destination duquel la personne sera renvoyée d'office si elle ne quitte pas le territoire et ce, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'OQTF. Cette mesure n'a pas à faire l'objet d'une motivation particulière car elle découle de la décision du refus de séjour.

L'interdiction de retour (IRTF) peut avoir une durée de jusqu'à cinq ans. Elle bannit de tout l'espace Schengen[3],[4].

Recours

En 2022, un étranger obligé de quitter le territoire dispose de deux recours contentieux cumulatifs au tribunal administratif, dont l’un seulement (le recours pour excès de pouvoir) est suspensif ; et d’un recours devant le juge judiciaire (le juge des libertés et de la détention) dans le cas où l'OQTF s'accompagne d'un placement en rétention administrative. Des recours administratifs, gracieux (demande à l’administration de reconsidérer sa position) ou hiérarchique (courrier au ministre pour lui demander de réformer la décision qui a été prise par son administration), sont possibles mais peu courants ; ils ne sont pas cumulables, ils sont non suspensifs et ils ont de faibles chances d’aboutir[5],[4],[6]. Il est donc faux de dire, comme le prétend Gérald Darmanin en 2022 pendant les premiers débats sur sa loi l'immigration, qu'un étranger peut former « jusqu’à 12 recours » contre une OQTF[7],[8].

Évolution

Sur la période 1994-2004, la juriste Danièle Lochak a recensé onze circulaires visant à améliorer le taux d’exécution des mesures d’éloignement[9],[10].

L'OQTF est créée par la loi no 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration[11],[12]. Cette loi visait à rendre plus efficace la procédure d'éloignement et à soulager des tribunaux déjà surchargés par le contentieux de dossiers d'étrangers. Mais l'effet est inverse : la loi supprime la possibilité d'un recours gracieux auprès de la préfecture ; et la décision préfectorale de refus de séjour assortie d'une OQTF ne peut plus être attaquée devant le tribunal administratif que dans le délai d'un mois. Ces recours contre les mesures d'expulsion d'illégaux engorgent donc davantage les tribunaux administratifs[13].

L'interdiction de retour (IRTF) est créée par la loi du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité (loi Besson Hortefeux Guéant)[3],[4].

L'OQTF évolue en à l'occasion de la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie[14]: le gouvernement alors cherche à augmenter le taux d'éloignement des demandeurs d'asile dont la demande a été rejetée[15],[16] par une meilleure communication entre la CNDA et les préfectures, qui délivrent une obligation de quitter le territoire[17].

La loi Darmanin légalise en 2024 les OQTF visant toutes les catégories d’étrangers jusqu’ici protégés par l'Article L611-3[18],[L 2], sauf les mineurs, qui restent protégés[L 3], systématise les OQTF pour les étrangers à qui on a refusé l’asile[L 4],[19], et simplifie le contentieux relatif à l'entrée, au séjour et à l'éloignement des étrangers (Articles 72 à 79). Le nombre de procédures contentieuses types est réduit de 12 à 3[20]. Cette simplification s'inspire d'un rapport du Conseil d'État sur le sujet en 2020[21].

Évolution de la durée maximale de la rétention administrative en France[1],[22].

La décision d'OQTF peut être accompagnée d'une mesure de privation de liberté, telle qu'une assignation à résidence ou un enfermement en centre de rétention administrative, prévu par la loi du . Le maintien des étrangers en centre de rétention n'est justifié que si l’éloignement est possible à court terme[23]. Les gouvernements français ont régulièrement allongé le temps pendant lequel un étranger peut être retenu le temps d'organiser son éloignement : dix jours selon la loi Pasqua, en 1993, douze jours avec la loi Chevènement en 1998, trente-deux avec la loi Sarkozy de 2003, quarante-cinq jours avec la loi Besson en 2011, et quatre-vingt-dix jours avec la loi Collomb de 2018[24]. En 2024, Bruno Retailleau envisage de porter cette durée à 210 jours[25]. Il s'agit invariablement d'éviter que les personnes sans papiers n’aient purgé la durée maximale de rétention avant d’avoir pu être reconduites à la frontière, mais la durée de rétention n’a en fait pas d’impact sur le taux d’éloignement, l'immense majorité d'entre eux ayant lieu dans les 45 premiers jours de la rétention[1],[26].

Vingt et une lois ont été votées entre 1990 et 2024 sur l’immigration et l’asile, sans réussir à diminuer le taux de non-exécution des mesures d'éloignement, parce que l'obstacle principal est en fait diplomatique[9].

Mise en oeuvre

Statistique d'exécution des OQTF en France. Nombre d'OQT par an sur la période 2011-2022[27],[28].

En 2018, le ministère de l'Intérieur a prononcé 132 978 mesures d'obligation de quitter le territoire français. 30 276 départs ont été dénombrés cette année-là, dont 19 957 sous l'effet d’une mesure administrative. Emmanuel Macron avait, au début de sa première présidence, évoqué un objectif de 100 % du taux d'exécution des reconduites à la frontière (censées être appliquées à la fin du délai de 30 jours pour les OQTF qui ne font pas l'objet d'un recours[29]) ; mais le taux d'exécution des mesures d'OQTF s'établissait à environ 15 % en 2018, démontrant que les mesures d'éloignement prises n'étaient que très rarement exécutées[30]. Le taux d'exécution de ces mesures d'éloignement ne cesse de diminuer ces dernières années (13,5 % en 2017, 12 % en 2019, puis, avec la crise du Covid-19, seulement 6,9 % en 2020 et 5,6 % au premier semestre 2021)[27],[31]. Il est de 30% au niveau européen[32].

Ce faible taux d'exécution s'explique par le fait que de les mesures d'éloignement sont très nombreuses, et souvent prononcées à l'encontre de personnes impossibles à expulser, car elles ont, par exemple, des enfants potentiellement français ou sont ressortissantes de pays en guerre, parce que ces mesures sont abusives et déclarées illégales par les juridictions, ou parce que les pays d'origine ne coopèrent pas[1],[33],[34],[35]. L’échec des mesures d'éloignement augmente le nombre d'étrangers en situation irrégulière et qui se maintiennent sur le territoire[36].

Des OQTF en trop grand nombre

Statistiques des obligations de quitter le territoire prononcées dans quelques pays d'Europe. Nombre d'OQT par trimestre. Données Eurostat[37].

La France prononce beaucoup plus d'OQT que ses voisins[32] : 31 195 au deuxième trimestre 2024, contre 12 885 en Allemagne ou 6 380 en Italie[38]. Elle a doublé le nombre d'OQTF prononcées entre 2015 et 2024, sans arriver à faire varier le nombre de celles qui sont exécutées[1],[32],[34].

Leur nombre est tel qu'il aurait fallu procéder à 11 000 retours par mois en 2023 pour exécuter toutes celles émises cette année là. Chaque éloignement est une opération lourde, impliquant de nombreux personnels et ayant un coût élevé (estimé en incluant la rétention administrative à 20 000  par personne)[32]. Le scompagnies aériennes peuvent refuser les éloignements[39].

De nombreuses OQTF sont délivrées en préfecture sans étude sérieuse des dossiers, y compris à des personnes qui sont porutant insérées dans la société[40]. Les recours engorgent les tribunaux administratifs[41]. En 2022, ceux-ci ont déclaré illégales et annulé 18 % des OQTF contestées[1].

Le Ministère de l'Intérieur estime que l'éloignement « joue un rôle dissuasif non négligeable vis-à-vis d’émigrants potentiels et constitue donc un frein, en amont de nos frontières, à l’immigration illégale »[42], mais la Cour des Comptes écrit au contraire qu'il « est difficile de prouver que des éloignements plus nombreux conduiraient à réduire le flux entrant d’immigration »[43].

Retours impossibles pour des raisons humanitaires

Certaines OQTF son inapliquables parce qu'on ne peut pas organiser de retour vers les pays de destination désignés. En 2023, près de 10% des OQTF concernaient des pays tels que l’Afghanistan, le Soudan ou la Syrie[40],[32],[44].

Raisons diplomatiques

La coopération des pays d’origine est nécessaire pour mettre en oeuvre les expulsions, parce que les personnes sous OQTF n’ont souvent pas les documents nécessaires pour voyager. Les pays de destination doivent vérifier leur identité des migrants et produire un laissez-passer consulaire (LPC)[32]. Le refus de délivrer ces LPC est un moyen de pression des pays d'émigration sur les pays d’accueil, comme la France, et c'est la principale raison d'échec de la mise en œuvre de la procédure d'éloignement[10].

En 2021, dans un contexte de relations diplomatiques tendues avec l'Algérie[45], Jean Castex annonce un gel des visas aux pays du Maghreb en réponse à leur refus de délivrer ces laissez-passer[23]. Gérald Darmanin exagère alors largement le nombre de demandes de LPC refusés par l'Algérie en confondant le nombre d’OQTF prononcées et le nombre de demandes adressées à l’Algérie[46]. En 2023, Alger freine l'émission de LPC en réaction à l'accueil par la France d'Amira Bouraoui, la gynécologue militante du Hirak opposée à Bouteflika[47],[48]. En retour, la France a réduit le nombre de visas accordés aux ressortissants algériens, marocains et tunisiens, une technique peu efficace, selon la Cour des comptes[1].

La société civile Malienne s'est fortement opposée à la signature d'accords de réadmission entre la France et le Mali, parce que les envois de fonds par les personnes émigrées ont un rôle économique essentiel[32],[49].

Enfin, certains gouvernements n'ont pas les moyens administratifs nécessaires pour identifier leurs ressortissants émigrés dans des délais impartis[41],[32].

Pour toutes ces raisons, la pression exercée par la France sur les pays d’origine peut être sans effet, ou contre productive[32], et mettre en difficulté des équilibres diplomatiques fragiles[50].

Économie

Certaines OQTF sont prononcées contre des jeunes formés sur des métiers en tension[51].

Opinion publique

Selon un sondage CSA réalisé pour Europe 1, CNews et Le Journal du dimanche en septembre 2024, peu après le meurtre à Paris d'une jeune femme, vraisemblablement par un homme marocain sous le coup d'une OQTF[24],[52], 78 % des Français se disent favorables à l’emprisonnement des individus sous OQTF[53]. Des associations féministes et le Syndicat de la magistrature appellent à penser ce crime sous le prisme des féminicides et de la récidive, non sous celui de l’immigration[54],[38].

Traitement médiatique

Le magazine Marianne explique que dans leur narration des faits divers, certains médias de type CNews mentionnent systématiquement l'OQTF si elle existe, parce que « au-delà de l’intérêt public d’une telle information, se joue aussi une bataille politique – et une droitisation du champ médiatique »[55]. Cela alimente ce que Le Monde décrit comme une « confusion entre sécurité, identité et immigration »[24].

Retour aidé, plutôt que forcé

L'expulsion vers le pays d'origine est traumatisante : elle stigmatise les personnes qui se sont exilées, et les rend plus vulnérables[32],[56]. La Cour des Comptes encourageait en 2020 une « approche « pragmatique » (obtenir le départ des personnes susceptibles de le faire volontairement et trouver des solutions pour les autres) »[57]. Tisser des liens avec les personnes sans papiers et les mettre à l'abri est indispensable si l'ont veut ensuite proposer toutes les options possibles: régularisation par l'obtention d'un titre de séjour, protection ou aide au retour[32].

Le retour aidé est un départ en échange du versement d'une allocation[58]. Il est proposé par l'Ofii[59], peu coûteux[60], mais rarement utilisé (il a concerné moins de 5000 personnesn en 2022[58])[32]. Il permet aux personnes exilées de se réintégrer plus facilement dans leur pays d'origine[61], mais ne peut être efficace que si il résout une situation individuelle[62],[63] . La Cour des Comptes l'a encouragé en 2020 et 2024[64].

Documents

Notes et références

Articles de loi

  1. « Article L611-1 - Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Légifrance », sur www.legifrance.gouv.fr (consulté le )
  2. « Article L611-3 du CESEDA »
  3. « Article 37 »
  4. « Article 64 »

Références

  1. a b c d e f et g « OQTF : comprendre le débat sur les mesures d’éloignement des étrangers sans papiers en France », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  2. Elsa de La Roche Saint-André, « Pourquoi l’Ofii a-t-il supprimé un tweet sur les possibilités de revenir après une «obligation de quitter» la France ? », sur Libération (consulté le ).
  3. a b et c Thomas Ribémont, Introduction au droit des étrangers en France, De Boeck, coll. « Le point sur », (ISBN 978-2-8041-6688-5), « Les mesures d'éloignement, de contrôles et de sanctions des étrangers »
  4. a b et c GISTI, « Chapitre 4. Les recours contre les OQTF », dans : , Le guide des étrangers face à l'administration. Droits, démarches, recours, sous la direction de GISTI », Guides,‎ 2022 (obsolète, modifié par la loi 2024, voir le document du syndicat de la juridiction administrative 2024) (lire en ligne).
  5. « Que faire après une obligation de quitter le territoire français ou une interdiction d’y revenir ? : 3e édition ⋅ GISTI », sur www.gisti.org, 2019 (obsolète, modifié par la loi 2024, voir le document du syndicat de la juridiction administrative 2024) (consulté le ).
  6. Elsa de La Roche Saint-André, « Meurtre de Lola : comment fonctionne une «obligation de quitter le territoire français» ? », sur Libération (consulté le ).
  7. Joyce Zablit, « Selon Gérald Darmanin, un étranger en situation irrégulière peut former jusqu’à 12 recours contre une décision d’expulsion », sur defacto-observatoire.fr (consulté le ).
  8. Elsa de La Roche Saint-André, « Existe-t-il 12 recours contre les «obligations de quitter le territoire», comme le répète Gérald Darmanin ? », sur Libération (consulté le )
  9. a et b « François Héran, professeur au Collège de France : « Le débat public sur l’immigration en France est en décalage complet par rapport aux réalités de base » », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  10. a et b Danièle Lochak, « Eloigner, une tâche comme une autre: », Plein droit, vol. n° 62, no 3,‎ , p. 3–9 (ISSN 0987-3260, DOI 10.3917/pld.062.0003, lire en ligne, consulté le )
  11. « Article 52 - LOI n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration (1) - Légifrance », sur www.legifrance.gouv.fr (consulté le )
  12. Décret no 2006-1708 du 23 décembre 2006 modifiant la partie réglementaire du code de justice administrative, J.O no 301 du 29 décembre 2006 p. 19845 ; recours en annulation rejeté par CE, 11 juillet 2007, no 302040
  13. « Les recours contre les mesures d'expulsion d'illégaux engorgent les tribunaux administratifs », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  14. Droit des étrangers en France, ce que change la loi du 10 septembre 2018, GISTI, coll. « Les cahiers juridiques », (ISBN 979-10-91800-51-8)
  15. « Les députés appelés à examiner un projet de loi asile centré sur la répression », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
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  19. Décret n° 2024-812 du 8 juillet 2024
  20. « Projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration », sur Portail de la Vie Publique,
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