chapitre 1

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REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET

‫الجمهورية الجزائرية الديمقراطية الشعبية‬


POPULAIRE
MINISTERE DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ‫وزارة التعليم العالي و البحث العلمي‬
ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE ‫جامعة حسيبة بن بوعلي الشلف‬
UNIVERSITE HASSIBA BEN BOUALI CHLEF ‫كلية العلوم‬
FACULTE DES SCIENCES DE LA NATURE ET DE LA VIE ‫قسم التغذية وعلوم التغذية‬
DEPARTEMENT DE NUTRITION ET SCIENCES DES
ALIMENTS

Intitulé du cours :

Microbiologie alimentaire

Chapitre 1 : introduction- paramètres de croissance des microorganismes dans les aliments

Public ciblé : 3ème Licence – ANP Alimentation- Nutrition et Pathologie

Assuré par : MEDJAHDI Khadidja

2019-2020

1
Introduction
Si l'on considère les types de micro-organismes associés aux aliments d'origine végétale et
animale dans leur état naturel, on peut alors prédire les types généraux de micro-organismes
auxquels on peut s'attendre sur ce produit alimentaire particulier à un stade ultérieur de son
histoire. Les résultats de nombreux laboratoires montrent que l'on peut s'attendre à ce que les
aliments non traités contiennent un nombre variable de bactéries, de moisissures ou de levures,
et la question de l'innocuité d'un produit alimentaire donné se pose souvent en fonction du
nombre total microbiens.

La question devrait être double : quel est le nombre total de micro-organismes présents par
gramme ou millilitre et quels types d'organismes sont représentés dans ce nombre ? Il est
nécessaire de savoir quels organismes sont associés à un aliment particulier dans son état naturel
et lesquels ne sont pas normaux pour cet aliment. Il est donc utile de connaître la répartition
générale des bactéries dans la nature et les types généraux d’organismes normalement présents
dans des conditions données, dans lesquelles les aliments sont cultivés et manipulés.

2
Taxonomie bactérienne
De nombreux changements ont eu lieu dans la classification ou la taxonomie des bactéries au
cours des deux dernières décennies.

De nombreux nouveaux taxons ont été créés à la suite de l’utilisation de méthodes de génétique
moléculaire, seul ou en combinaison avec certaines des méthodes plus traditionnelles :

1. Homologie de l'ADN et teneur en% molaire en G + C de l'ADN

2. Similitudes des séquences d’ARNr 23S, 16S et 5S

3. Catalogage des oligonucléotides

4. Analyse taxonomique numérique de protéines totales solubles ou d’une batterie de données


morphologiques et caractéristiques biochimiques

5. Analyse de la paroi cellulaire

6. Profils sérologiques

7. Profils des acides gras cellulaire

Figure 1 L’arbre phylogénique universel. Ces relations évolutionnaires sont basées sur des comparaisons de séquences d’ARNr.
L’homme (Homo) est mis en évidence en rouge (

3
Sources principales de microorganismes trouvées dans
les aliments

Chaque genre bactérien a ses propres besoins nutritionnels et


chacun est affecté de manière prévisible manière par les
paramètres de son environnement. On va citer des sources
environnementales d’organismes entrant dans la composition
des aliments.

De tout temps, l’homme a cherché à lutter contre l’altération des aliments :


• D’abord pour des raisons vitales : nécessité de conserver le plus longtemps possible
des denrées périssables.
• Puis sociologiques : urbanisation,
• Puis psychologiques : nécessité de consommer des aliments de plus en plus variés, le
plus longtemps sur l’année,
• Enfin est apparue la nécessité de conserver des plats préparés à l’avance.
Les altérations surviennent depuis la production des denrées jusqu’à leur consommation : que
ce soit pendant le stockage des matières premières vivantes ou le stockage des produits finis,
on peut observer un certain nombre d’altérations :
• altérations physiques : les chocs, les blessures, les modifications d’état, la variation de la
teneur en eau, changement de couleur…
• altérations chimiques : oxydation (rancissement)
• altérations biochimiques : par les enzymes (brunissement enzymatique, lyses, destruction
des vitamines, de certains nutriments)
• altérations microbiologiques : fermentations, développement des microorganismes
pathogènes, production de toxines et enzymes (putréfaction, toxicité).
Ces altérations sont plus ou moins importantes en fonction, principalement :
• de la protection physique des produits contre les chocs, la lumière, le contact de l’air… C’est
une des fonctions de l’emballage
• de la température (réfrigération, congélation, température ambiante)
• de la teneur en eau des produits (Activité de l’eau)
• de la qualité de l’air et de la ventilation des lieux de stockage
• et bien évidemment de la durée du stockage.
La durée de conservation possible est inversement proportionnelle à la vitesse des réactions
d’altération. Ce qui fait varier le plus cette vitesse est la température de stockage.
1- Origines des contaminations

4
Le diagramme d’Hishikawa (5M ou causes à effets permet de recenser les origines des
contaminations des aliments

Biote originel :
Les aliments bruts ne sont pas stériles : ils portent des microorganismes divers et adaptés
appelés germes spécifiques.
Contaminations secondaires :
Ce sont les contaminations qui surviennent par diffusion des germes du milieu ambiant ou
d’agents externes vers l’aliment. Les agents sont :
1- Le milieu :
• le sol et les plantes apportent presque tous des microbes, en quantité très importante : on estime
que la masse de bactéries représente 10 t/ha ; celle des moisissures, 1 t/ha. Seules les levures
sont en très faible quantité dans le sol.
• l’eau naturelle, non traitée, de source ou de rivière, apporte également de très nombreux
germes, qui proviennent souvent du sol. Mais, on peut aussi trouver des germes de pollution,
issus des ruissellements : entérobactéries (issues des fèces des animaux), Clostridium, dont
certains germes pathogènes comme Salmonella typhi.
• l’air et la poussière sont surtout des agents de transport. Ils sont essentiellement vecteurs de
spores et de bactéries exogènes gram -h (Microcoques, Bacillus, Staphylocoques).
• les déchets fécaux (fèces) des animaux apportent de nombreuses bactéries spécifiques qui sont
souvent pathogènes (E.Coli, Klebsiella, Streptocoques fécaux…).
• les petits nuisibles apportent divers microbes spécifiques, dont des virus de contamination.
2- les matériels & instruments : ils véhiculent des germes des eaux souillées ou d’autres
aliments en cas de mauvaises pratiques de nettoyage et de désinfection.
3- l’homme est un agent très contaminant par :
ses mains : la peau contient des germes permanents, comme certains Staphylocoques, et des
germes de transition. Si les premiers ne peuvent pas être totalement éliminés par le nettoyage
ou la désinfection (un lavage des mains, même très bien fait, n’a pas une efficacité de 100 %),
les second présentent souvent de réels risques sur le plan de la santé, car sont souvent

5
pathogènes (Staphylococcus aureus, Streptococcus pyogenes, Pseudomonas…). Les mains
peuvent apporter des entérobactéries d’origine fécale
ses sécrétions nasales ou buccales : Staphyloccoccus aureus.
ses vêtements porteurs de poussières et donc de moisissures et de spores.
Tout ceci montre la vulnérabilité de tous les aliments au contact du milieu ambiant. D’où
l’importance de respecter une hygiène rigoureuse en fabrication, au plan de l’ambiance, du
matériel et du personnel.
Source : genie-alimentaire.com consulté le 15-02-2019.

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Paramètres Intrinsèque et Extrinsèque des aliments qui affectent la
croissance microbienne
Nos aliments étant d'origine végétale et / ou animale, il est utile de prendre en compte les
caractéristiques des tissus végétaux et animaux qui affectent la croissance des microorganismes.
Les plantes et les animaux qui servent de sources de nourriture ont tous mis au point des
mécanismes de défense contre l’invasion et la prolifération de micro-organismes, dont certains
restent en vigueur dans les aliments frais. En prenant ces phénomènes naturels en compte, on
peut utiliser efficacement chacun d’eux pour prévenir ou retarder la croissance d’organismes
pathogènes et de produits de détérioration dans les produits qui en sont dérivés.

Paramètres intrinsèques

Les paramètres des tissus végétaux et animaux qui font partie intégrante des tissus sont appelés
paramètres intrinsèques. Ces paramètres sont les suivants :

1. pH

2. teneur en humidité

3. Potentiel d'oxydo-réduction (Eh)

4. teneur en éléments nutritifs

5. constituants antimicrobiens

6. Structures biologiques

Chacun de ces facteurs limitant le substrat est discuté ci-dessous, en mettant l'accent sur leurs
effets sur les micro-organismes dans les aliments.

1) pH

Il a été bien établi que la plupart des micro-organismes se développent mieux à des valeurs de
pH voisines de 7,0 (6,6–7,5), alors que peu poussent en dessous de 4,0 (figure 2). Les bactéries
ont tendance à être plus fastidieuses dans leurs relations au pH que les moisissures et les levures.
En ce qui concerne les minimas et les maximas de pH pour les micro-organismes, ceux indiqués
à la Figure 2 ne doivent pas être considérés comme des limites précises, car les valeurs réelles
sont connues pour dépendre d'autres paramètres de croissance.

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Champignons

Levures

Figure 2 Plages approximatives de croissance du pH pour certains organismes d’origine alimentaire. Les plages de pH de L.
monocytogenes et de S. aureus sont similaires.

Par exemple, il a été démontré que le pH minimum de certains lactobacilles dépend du type
d'acide utilisé, les acides citrique, chlorhydrique, phosphorique et tartrique permettant une
croissance à un pH inférieur à celui des acides acétique ou lactique.

Lorsque les micro-organismes se développent de part et d'autre de leur plage de pH optimale,


il en résulte une phase de latence accrue. L’augmentation du retard devrait être de plus longue
durée si le substrat est un matériau fortement tamponné.

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Optimum

Minimum Maximum

Figure 3. Effet du pH sur le taux de croissance de L. monocytogenes. Le Marc et al. (2002). Le pH minimum est de 4,2, le pH optimum
est de 7,3 et le pH maximum de croissance est de 10,1 approximativement

pH des aliments

Sur la base du pH, les aliments peuvent être regroupés en aliments riches en acide (pH inférieur
à 4,6) et en aliments peu acides (pH ≥4,6). Ces aliments sont dits à risque microbiologique
faible car la majorité des microorganismes pathogènes ne peuvent pas s’y développer
(microorganisme de référence : clostridium botulinum dont le pH>4,6). L’excellente qualité de
conservation de ces produits est due en grande partie au pH.

La plupart des fruits, des jus de fruits, des aliments fermentés (issus des fruits, des légumes,
de la viande et du lait) et des vinaigrettes sont des aliments très acides (pH bas), tandis que la
plupart des légumes, de la viande, du poisson, du lait et des soupes sont peu acides. (pH élevé) :
à risque microbiologique modéré.

La limite de pH plus élevée de la plupart des aliments peu acides reste inférieure à 7,0; ce n'est
que dans quelques aliments, comme les palourdes (pH 7,1) et l'albumine d'œuf (pH 8,5), que le
pH dépasse 7,0 (Ray, 2003).

Il est courant de constater que les fruits subissent généralement une altération des moisissures
et des levures, en raison de la capacité de ces organismes à se développer à des valeurs de pH
<3,5, ce qui est considérablement inférieur aux minima pour la plupart des bactéries.

En ce qui concerne la qualité de conservation des viandes, il est bien établi que la viande des
animaux fatigués s’altère plus rapidement que celle des animaux au repos et que cela est une
conséquence directe du pH final atteint à la fin de la rigor mortis. À la mort d'un animal à

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viande bien reposé, le glycogène habituel à 1% est converti en acide lactique, ce qui entraîne
directement une diminution du pH d'environ 7,4 à environ 5,6, selon le type d'animal.

Certains aliments sont caractérisés par une acidité inhérente, d'autres doivent leur acidité ou
leur pH aux actions de certains microorganismes. Ce dernier type est appelé acidité biologique
et se manifeste par des produits tels que les laits fermentés, la choucroute et les cornichons.
Quelle que soit la source de l’acidité, l’effet sur le maintien de la qualité semble être le même
(Batt and Tortorello, 2014)

Tableau 1. pH approximatif de certains aliments (Cotton et Leguérinel, 2014)

Aliment pH min
Produits laitiers
Beurre 6,1-6,4
Crème 6,5
Lait 6,3-6,5
Yaourt 3,8-4,2
Viande et volaille
Bœuf (haché) 5,1-6,2
Poulet 6,2-6,4
Blanc d’Œufs 7,6-,9,5
Jaune d’œuf 6,0-6,3
Poissons et crustacées
Saumons 6,1-6,3
Crabe 7,0
Thon 5,2-6,1
Poissons blancs 5,5
Fruits et légumes
Pommes 2,9-3,3
Haricots 4,6-6,5
Banane 4,5-4,7
Brocoli 6,5
Carottes 4,9-5,2
Concombre 3,8
Onions rouges 5,3-5,8
Olives vertes 3,6-3,8
Pomme de terre 5,3-5,6

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Effets de pH

Un pH défavorable affecte au moins deux aspects d'une cellule microbienne en respiration : le


fonctionnement de ses enzymes (métabolisme) et le transport des nutriments dans la cellule
(perméabilité membranaire).

La membrane cytoplasmique des micro-organismes est relativement imperméable aux ions H


+ et OH−. Leur concentration dans le cytoplasme reste donc raisonnablement constante en dépit
des variations importantes du pH du milieu environnant.

Le pH intracellulaire des cellules de levure de boulanger au repos est de 5,8.

Lorsqu'elles sont placées dans des environnements acides, les cellules doivent empêcher les H+
d'entrer ou expulser les ions H + aussi rapidement qu'elles y entrent (homéostasie).

Des composés cellulaires clés tels que l'ADN et l'ATP nécessitent une neutralité. Lorsque la
plupart des microorganismes se développent dans des milieux acides, leur activité métabolique
fait en sorte que le milieu ou le substrat devient moins acide, alors que ceux qui se développent
dans des environnements à pH élevé tendent à réduire le pH. (adaptation au pH de l’aliment).

Figure 4. Mécanismes d'adaptation d'E. coli au pH (homéostasie) Cotton et Leguérinel, 2014

Les décarboxylases d'acides aminés qui ont une activité optimale aux environs de pH 4,0 et
presque aucune activité à pH 5,5 provoquent un ajustement spontané du pH vers la neutralité

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lorsque les cellules sont cultivées dans la plage d'acide. Des bactéries telles que Clostridium
acetobutylicum élèvent le pH du substrat en réduisant l'acide butyrique en butanol, tandis
qu'Enterobacter aerogenes produit de l'acétoïne à partir de l'acide pyruvique afin d'augmenter
le pH de son environnement de croissance.

Lorsque les acides aminés sont décarboxylés, l'augmentation du pH se produit à partir des
amines résultantes.

Lorsqu'ils sont cultivés dans la plage alcaline, un groupe d'aminoacides désaminases ayant une
activité optimale à un pH d'environ 8,0 et provoquant l'ajustement spontané du pH à la neutralité
du fait de l'accumulation d'acides organiques.

En ce qui concerne le transport des nutriments, la cellule bactérienne a tendance à avoir une
charge négative résiduelle. Par conséquent, les composés non ionisés peuvent pénétrer dans les
cellules, contrairement aux composés ionisés.

À pH neutre ou alcalin, les acides organiques n'entrent pas, tandis qu'à pH acide, ces
composés sont non ionisés et peuvent pénétrer dans les cellules chargées négativement. De plus,
le caractère ionique des groupes ionisables à chaîne latérale est affecté des deux côtés de la
neutralité, ce qui entraîne une dénaturation croissante des enzymes membranaires et de
transport.

2) Teneur en humidité

• L’eau libre
C’est l’eau retenue par effet capillaire dans les pores des aliments, l’eau liée par effet osmotique,
l’eau d’hydratation des macromolécules et l’eau utilisée pour dissoudre les solutés (sels
minéraux).

L’eau libre est mobile et conserve toutes les propriétés de l’eau pure. C’est l’eau disponible.
• L’eau liée
Elle forme une couche mono-moléculaire étroitement associée par divers types de liaisons aux
protéines et aux glucides. Cette eau est fixe, elle échappe à la congélation parce que les
interactions eau-macromolécules sont plus fortes que celles des molécules d’eau cristallisées
entre elles. Cette eau n’est pas disponible.
La teneur en eau (ou humidité ou titre en eau) est la quantité d’eau perdue par l’aliment
lorsqu’on le place en équilibre avec une pression de vapeur d’eau nulle. On exprime la mesure
en g d’eau par 100g d’aliment sec. Il s’agit, sur le plan chimique, de l’eau constituée par des
molécules associées par liaisons hydrogène comme dans l’eau pure à l’état liquide.

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L’eau des aliments présente des propriétés physicochimiques différentes selon ses états de
liaison avec les macromolécules de l’aliment et avec les molécules d’eau entre elles.
Il est maintenant généralement admis que les besoins en eau des microorganismes devraient
être décrits en termes d'activité de l'eau (aw) dans l'environnement.

Tableau 2 Exemples de valeurs de l’humidité relative et de la teneur en eau.

Aliment HR Teneur en eau


Pain 90% 35%
Pain d’épices 45% 14 à 18%
Biscuits secs 30% 6%
Lait déshydraté 20 3
Légumes déshydratés 20 4%

L'activité de l'eau (aw) est une mesure de la disponibilité de l'eau pour des fonctions biologiques
et se rapporte à l'eau présente dans un aliment sous forme libre.

On quantifie la notion de disponibilité de l’eau par


𝑃
𝑎𝑤 =
𝑝0
P : pression partielle de vapeur d’eau de l’aliment à la température T
P0 : pression partielle de vapeur d’eau saturante à la température T
Elle varie entre 0 et 1 où l'eau pure a un aw de 1,00.

Ce concept est lié à l'humidité relative (HR) de la manière suivante : HR = 100 × aw.

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L’activité de l’eau permet de prévoir et d’éviter les déteriorations physicochimiques, les
activités enzymatiques et la prolifération des micro-organismes.
Ces derniers ne se développent bien que pour des aw de :
aw>0,91 (HR>91%) pour les bactéries,
aw>0,65 (HR>65%) pour les levures et les moisissures.

En général, les bactéries exigent des valeurs de aw plus élevées pour la croissance que les
champignons, les bactéries à Gram négatif ayant des exigences plus élevées que les Gram
positives.

L'activité de l'eau (aw) de la plupart des aliments frais est supérieure à 0,99.

Tableau 3. Activité d'eau typique de certains aliments Ross and DS Nichols, 2014

Aliment Activité d’eau moyenne (aw)


Lait, fruits et légumes 0,995 – 0,998
Viande fraiche, poissons 0,990 – 0,995
Pain 0,90 – 0,95
Miel 0,75
Fruits secs 0,6 – 0,75
Céréales 0,70 -0,80
Lait déshydraté 0,20 – 0,60

L'une des méthodes les plus anciennes de conservation des aliments est le séchage ou la
dessiccation. La conservation des aliments par séchage est une conséquence directe de
l'élimination ou de la fixation de l'humidité, sans laquelle les microorganismes ne se
développent pas.

En ce qui concerne les bactéries intoxicantes aux aliments, Staphylococcus aureus peut
atteindre une valeur aussi basse que 0,86, alors que Clostridium botulinum ne se développe pas
en dessous de 0,94.

La valeur déclarée pour les bactéries d’origine alimentaire est de 0,75 pour les halophiles
(littéralement épris de sel ou 'qui aime le sel’), tandis que les moisissures sont xérophiles (épris
de la sécheresse) et les levures osmophiles (préférant les pressions osmotiques élevées) ont été
signalées comme se développant à des valeurs aw de 0,65 et 0,61, respectivement.

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Lorsque le sel est utilisé pour contrôler aw, un taux extrêmement élevé est nécessaire pour
obtenir des valeurs de aw inférieures à 0,80.

Isotherme d’adsorption et de désorption de l’eau


On peut représenter graphiquement la courbe appelée isotherme d’adsorption -désorption obtenue en
portant :
- En ordonnée : - la teneur en eau du produit exprimée en g d’eau pour 100g de substance sèche
(%SS)
- En abscisse : soit l’activité de l’eau Aw, soit l’humidité relative HR

• L’isotherme d’adsorption met en évidence 2 zones :


a) 0<aw<0,3 : l’eau est fortement liée à l’aliment. Il s’agit de l’eau d’hydratation
directement en contact avec les groupements fonctionnels des molécules : ˗NH3+ et
˗COO- des protéines, ˗OH des glucides et de l’eau de cristallisation des sels et des
sucres. Cette eau représente 3 à 10g pour 100g de poids sec. Elle n’est pas congelable
et elle subsiste dans les aliments déshydratés.

Exemples de la quantité d’eau liée de quelques aliments déshydratés


En g d’eau/100g de poids sec :
- Pommes de terre déshydratées …..5 à 8
- Haricots verts déshydratés……….4 à 6
- Viande de bœuf déshydratés …….4 à 6
- Biscuits salés …………………….4
- Lait en poudre ……………………2
- Lait écrémé en poudre ……………3 à 6

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b) Aw>0,3
Autour de la couche monomoléculaire s’empilent des couches d’eau de moins en moins liées
aux constituants minéraux et organiques de l’aliments. L’eau est de plus en plus disponible.
Elle est retenue dans l’aliment par capillarité (dans les pores des aliments Aw˷0,9), par pression
osmotique (liée à la présence de sels et de sucres) par formation de gels protéiques (gélatine,
myofibrilles) ou glucidiques (empois d’amidon).

Effets de faible aw

L’abaissement de aw sous l’optimum a généralement pour effet d’allonger la phase de latence


de la croissance et de diminuer le taux de croissance et la taille de la population finale.

On peut s’attendre à ce que cet effet résulte des effets néfastes d’une diminution de la teneur en
eau sur toutes les activités métaboliques, car toutes les réactions chimiques des cellules
nécessitent un environnement aqueux. Il faut toutefois garder à l'esprit que aw est influencé par
d'autres paramètres environnementaux tels que le pH, la température de croissance et Eh.

3) Potentiel d'oxydation-réduction
On sait depuis des décennies que les microorganismes présentent des degrés de sensibilité
variables au potentiel d’oxydo-réduction (O / R, Eh) de leur milieu de croissance.

Le potentiel O / R d’un substrat peut être généralement défini comme la facilité avec laquelle
le substrat perd ou gagne des électrons.

Lorsqu'un élément ou un composé perd des électrons, le substrat est oxydé, alors qu'un substrat
qui gagne des électrons est réduit.

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L'oxydation peut également être réalisée par l'addition d'oxygène, comme illustré dans la
réaction suivante :

2Cu + O2 → 2CuO

Par conséquent, une substance qui cède facilement des électrons est un bon agent réducteur, et
une substance qui absorbe facilement des électrons est un bon agent oxydant.

Lorsque des électrons sont transférés d'un composé à un autre, une différence de potentiel est
créée entre les deux composés. Cette différence peut être mesurée à l'aide d'un instrument
approprié et exprimée en millivolts (mV).

Plus une substance est fortement oxydée, plus son potentiel électrique est positif;

Plus une substance est fortement réduite, plus son potentiel électrique est négatif.

Lorsque la concentration en oxydant et en réducteur est égale, il existe un potentiel électrique


nul. Le potentiel O / R d'un système est exprimé par le symbole Eh.

Les microorganismes aérobies ont besoin de valeurs positives de Eh (oxydé) pour leur
croissance, alors que les anaérobies exigent des valeurs négatives de Eh (réduites) (Figure 5).

Figure 5 Représentation schématique des potentiels d’oxydo-réduction par rapport à la croissance de certains micro-
organismes.

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Parmi les substances présentes dans les aliments qui contribuent au maintien de conditions
réductrices figurent les groupes –SH présents dans les viandes et l'acide ascorbique, ainsi que
les sucres réducteurs dans les fruits et les légumes.

Le potentiel O / R d'un aliment est déterminé par la tension d'oxygène de l'atmosphère autour
de la nourriture.

En ce qui concerne les besoins en micro-organismes dus à Eh, certaines bactéries nécessitent
des conditions réduites pour l'initiation de la croissance (environ -200 mV), sont les bactéries
anaérobies telles que le genre Clostridium

Tandis que d'autres exigent un facteur positif pour la croissance, les bactéries aérobies telles
que certains membres du genre Bacillus.

Certaines bactéries aérobies se développent mieux dans des conditions légèrement réduites, et
ces organismes sont appelés microaérophiles. Des exemples de bactéries microaérophiles sont
les lactobacilles et Campylobacter.

Certaines bactéries ont la capacité de se développer dans des conditions aérobies ou anaérobies.
Ces types sont appelés anaérobies facultatifs.

La plupart des moisissures et des levures rencontrées dans et sur les aliments sont aérobies,
mais quelques-unes ont tendance à être anaérobies facultatives.

En ce qui concerne l'Eh des aliments, les aliments d'origine végétale, en particulier les jus de
plantes, ont tendance à avoir des valeurs d'EH comprises entre +300 et 400 mV. Il n’est pas
surprenant de constater que les bactéries et moisissures aérobies sont la cause habituelle de la
détérioration des produits de ce type.

Les viandes solides ont des valeurs Eh d'environ -200 mV; dans les viandes hachées, l'Eh se
situe généralement autour de 200 mV. Il a été rapporté que les fromages de différents types
avaient des valeurs Eh négatives, allant de -20 à environ -200 mV (Prevost et Brillet-Viel,
2014).

18
Tableau 4. potentiel redox de quelques aliments (Prevost et Brillet-Viel, 2014)

Aliments Eh (mV)
Lait +100 à +400
Camembert -350 à -259
Yaourt -150 à +410
Viande +200 à +270
Poisson +210 à +250

4) Contenu nutritif

Pour se développer et fonctionner normalement, les microorganismes importants dans les


aliments nécessitent les éléments suivants :

1. l'eau
2. source d'énergie
3. source d'azote
4. vitamines et facteurs de croissance associés
5. minéraux
L'importance de l'eau pour la croissance et le bien-être des micro-organismes est primordiale.
En ce qui concerne les quatre autres groupes de substances, ce sont les moisissures qui ont le
moins besoin, suivies des bactéries à Gram négatif, des levures et des bactéries à Gram positif.

En tant que sources d'énergie, les micro-organismes d'origine alimentaire peuvent utiliser des
sucres, des alcools et des acides aminés.

Certains micro-organismes peuvent utiliser des glucides complexes tels que les amidons et la
cellulose comme sources d'énergie en dégradant d'abord ces composés en sucres simples. Les
micro-organismes utilisent également les graisses comme source d'énergie, mais ces composés
sont attaqués par un nombre relativement réduit de microbes présents dans les aliments.

Les microorganismes peuvent nécessiter de faibles quantités de vitamines B, et presque tous


les aliments naturels en contiennent une quantité abondante pour les organismes incapables de
synthétiser leurs besoins essentiels.

En général, les bactéries à Gram positif sont les moins synthétiques et doivent donc être
alimentées avec les vitamines B avant qu'elles ne se développent.

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Les moisissures et les bactéries à Gram négatif sont capables de synthétiser la plupart ou la
totalité de leurs besoins. Par conséquent, ces deux groupes d’organismes peuvent se développer
sur des aliments pauvres en vitamines B.

Les fruits ont tendance à être moins riches en vitamines B que les viandes, et ce fait, associé
au pH bas et à l’Eh positif des fruits, contribue à expliquer la détérioration habituelle de ces
produits par les moisissures plutôt que par les bactéries.

5) Constituants antimicrobiens

La stabilité de certains aliments contre les microorganismes est due à la présence de certaines
substances naturelles possédant et exprimant une activité antimicrobienne.

On sait que certaines espèces de plantes contiennent des huiles essentielles possédant une
activité antimicrobienne.

Parmi ceux-ci figurent l'eugénol dans les clous de girofle, l'allicine dans l'ail, l'aldéhyde
cinnamique et l'eugénol dans la cannelle.

Le lait de vache contient plusieurs substances antimicrobiennes, notamment la lactoferrine, la


conglutinine et le système lactoperoxydase.

Il a été rapporté que le lait cru contient un inhibiteur de rotavirus pouvant inhiber jusqu'à 106
pfu (unités formant une plaque) / ml. Il est détruit par la pasteurisation.

Les œufs contiennent du lysozyme, tout comme le lait, et cette enzyme, ainsi que la
conalbumine, fournit aux œufs frais un système antimicrobien assez efficace.

Les dérivés de l'acide hydroxycinnamique (acides p-coumariques, féruliques, caféiques et


chlorogéniques) présents dans les fruits, les légumes, le thé et d'autres sources végétales
présentent tous une activité antibactérienne et antifongique.

L'ovotransferrine semble être la substance inhibitrice du blanc d'œuf cru qui inhibe Salmonella
enteritidis.

6) Structures biologiques

L'enveloppe naturelle de certains aliments offre une excellente protection contre l'entrée et les
dommages ultérieurs causés par les organismes nuisibles.

Dans cette catégorie figurent des structures telles que la testa de graines, l'enveloppe extérieure
de fruits, la coque de noix, la peau d'animaux et la coque d'œufs.

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Dans le cas des noix, l'enveloppe est suffisante pour empêcher l'entrée de tous les organismes.
La coquille externe et les membranes des œufs, si elles sont intactes, empêchent l’entrée de
presque tous les microorganismes lorsqu’elles sont stockées dans les conditions appropriées
d’humidité et température.

Les fruits et les légumes dont l'enveloppe est endommagée subissent une détérioration
beaucoup plus rapide que ceux qui ne sont pas endommagés.

La peau des poissons et des viandes, comme le bœuf et le porc, empêche la contamination et la
détérioration de ces aliments, en partie parce qu'elle a tendance à se dessécher plus rapidement
que les surfaces fraîchement coupées.

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Paramètres extrinsèques
Les paramètres extrinsèques des aliments ne dépendent pas du substrat. Ce sont les propriétés
de l'environnement de stockage qui affectent à la fois les aliments et leurs microorganismes.
Les plus importants pour le bien-être des organismes d’origine alimentaire sont les suivants :

1. température de stockage

2. humidité relative de l'environnement

3. présence et concentration de gaz

4. présence et activités d'autres microorganismes

1) Température de stockage

Les micro-organismes, individuellement et en groupe, se développent dans une très large plage
de températures. Par conséquent, il est bon de considérer à ce stade les plages de croissance de
la température pour les organismes importants dans les aliments afin de vous aider à choisir la
température appropriée pour le stockage de différents types d’aliments.

La température la plus basse à laquelle on a signalé la croissance d'un microorganisme est de -


34°C ; le plus élevé dépasse 100°C. Il est habituel de classer les microorganismes en trois
groupes en fonction de leurs exigences de température pour la croissance.

Les organismes qui se développent bien à une température inférieure ou égale à 7°C et dont
l’optimum se situe entre 20°C et 30°C sont appelés psychrotolérantes.

Ceux qui poussent bien entre 20°C et 45°C avec des optima compris entre 30°C et 40°C sont
appelés mésophiles,

Tandis que ceux qui se développent bien à 45°C ou plus avec des optima entre 55°C et 65°C
appelé thermophiles (Ray, 2003).

En ce qui concerne les bactéries, les espèces et souches psychrotolérantes font partie des
genres suivants : Alcaligenes, Shewanella, Brochothrix, Corynebacterium,
Flavobacterium, Lactobacillus, Micrococcus, Pectobacterium, Pseudomonas,
Psychrobacter, Enterrococcus, etc.

Les psychrotolérantes que l'on trouve le plus souvent dans les aliments sont ceux appartenant
aux genres Pseudomonas et Enterococcus. Ces organismes se développent bien à la

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température du réfrigérateur et causent la détérioration de la viande, du poisson, de la
volaille, des œufs et d’autres aliments normalement conservés à cette température.

Les espèces et souches mésophiles peuvent être trouvées sur des aliments conservés à la
température du réfrigérateur. Apparemment, ils ne poussent pas à cette température.

La plupart des bactéries thermophiles importantes dans les aliments appartiennent aux genres
Bacillus, Paenibacillus, Clostridium, Geobacillus, Alicyclobacillus et
Thermoanaerobacter. Bien que toutes les espèces de ces genres ne soient pas thermophiles,
elles présentent un grand intérêt pour le microbiologiste et le technologue en alimentation dans
l’industrie de la conserve.

De nombreuses moisissures peuvent se développer aux températures de réfrigération,


notamment certaines souches d’Aspergillus, Cladosporium et Thamnidium, que l’on peut
trouver sur des œufs, des côtes de bœuf et des fruits. Les levures se développent dans les plages
de températures psychrotolérantes et mésophiles, mais généralement pas dans la plage
thermophile.

La qualité du produit alimentaire doit également être prise en compte lors du choix de la
température de stockage.

2) Présence et activités d'autres microorganismes

Certains organismes d'origine alimentaire produisent des substances inhibitrices ou mortelles


pour d'autres ; Ceux-ci incluent des antibiotiques, des bactériocines, du peroxyde d'hydrogène
et des acides organiques.

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3) Humidité relative de l'environnement

L'humidité relative de l'environnement de stockage est importante à la fois du point de vue de


l'aw dans les aliments et de la croissance des micro-organismes à la surface. Lorsque la valeur
aw d’un aliment est définie à 0,60, il est important que cet aliment soit stocké dans des
conditions d’humidité relative qui ne lui permettent pas de capter l’humidité de l’air et
d’augmenter ainsi sa propre surface et sa subsurface jusqu’à ce que les microbes la croissance
peut se produire.

Lorsque les aliments à faible aw sont placés dans des environnements à humidité relative
élevée, ils absorbent l'humidité jusqu'à ce que l'équilibre soit établi.

Les aliments altérés en surface par les moisissures, les levures et certaines bactéries doivent être
stockés dans des conditions d'humidité relative réduite.

4) Présence et concentration de gaz dans l'environnement

Le dioxyde de carbone (CO2) est le gaz atmosphérique le plus important utilisé pour contrôler
les microorganismes dans les aliments. Avec l'O2, ce sont les deux gaz les plus importants dans
les aliments emballés dans une atmosphère modifiée (AM),

L'ozone (O3) est l'autre gaz atmosphérique ayant des propriétés antimicrobiennes. Depuis
plusieurs décennies, il est utilisé comme agent pour prolonger la durée de conservation de
certains aliments.

Il a été démontré que l’ozone était efficace contre divers micro-organismes, mais comme il
s’agissait d’un puissant agent oxydant, il ne devrait pas être utilisé sur des aliments riches en
lipides car il provoquerait une augmentation de la rancidité.

Croissance de la succession ou diauxie

Les micro-organismes capables de métaboliser deux ou plusieurs nutriments dans un aliment,


l'un préféré à l'autre et présent à des concentrations limites, présentent une croissance par étapes
séparées par une courte phase de décalage. Initialement, une souche bactérienne se développe
en utilisant le nutriment préféré et après un bref délai d’adaptation croît en utilisant l’autre
nutriment.

À chaque étape, la courbe de croissance a des phases exponentielles et stationnaires avec une
phase de latence intermédiaire. Un exemple est la croissance de certaines souches bactériennes
(telles que certaines bactéries lactiques et bactéries Gram négatives) dans la viande fraîche. Une

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souche croît initialement en utilisant les concentrations limites d'hydrates de carbone présents,
suivie de l'utilisation de substances azotées non protéiques (NPN; telles que les acides aminés).

Figure 6 phénomène de diauxie, utilisation du glucose en premier lieu suivie par une phase de latence pour préparer les
enzymes nécessaires à l’utilisation du lactose

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