La Perennisation Des TPE
La Perennisation Des TPE
La Perennisation Des TPE
SOMMAIRE
Pages
INTRODUCTION ...............................................................................................3
CHAPITRE I - UNE APPROCHE STATUTAIRE, STATISTIQUE ET
ÉCONOMIQUE DE LA TPE .................................................5
I - UNE DÉFINITION POSSIBLE ........................................................5
A - RÔLE ET EFFET DES SEUILS .........................................................7
1. Les seuils en droit du travail.............................................................7
2. Les seuils en matière fiscale .............................................................8
B - L’IMPORTANCE DE LA FORME JURIDIQUE RETENUE ET
SES INCIDENCES ..............................................................................8
1. Plusieurs statuts juridiques sont possibles ........................................8
2. Plusieurs régimes fiscaux .................................................................9
II - QUELQUES DONNÉES STATISTIQUES ....................................10
A - APPROCHE STATISTIQUE ............................................................10
B - LA DYNAMIQUE DE LA CRÉATION D’ENTREPRISES ............14
C - LE PROFIL DES CRÉATEURS .......................................................18
1. Quelques éléments d’ordre général ................................................18
2. Les femmes créatrices d’entreprises ..............................................19
3. Les jeunes créateurs........................................................................21
4. Les artisans .....................................................................................22
5. Les « chômeurs créateurs » ............................................................23
D - LA PÉRENNITÉ DES ENTREPRISES ............................................25
E - UNE APPROCHE GÉOGRAPHIQUE DE LA CRÉATION ............27
III - UNE TYPOLOGIE DE LA TPE .....................................................29
A - UN ÉVENTAIL SECTORIEL TRÈS LARGE : DU
« TRADITIONNEL » À LA « JEUNE POUSSE » LA PLUS
INNOVANTE ....................................................................................30
1. Le « traditionnel » ..........................................................................30
2. Les entreprises en croissance rapide...............................................31
B - L’APPROCHE TRADITIONNELLE EST CEPENDANT
QUELQUE PEU BROUILLÉE PAR DES PHÉNOMÈNES
RÉCENTS OU RENOUVELÉS ET EN PERPÉTUELLE
ÉVOLUTION.....................................................................................33
1. Les solos .........................................................................................33
2. Les salariés/entrepreneurs : problème des zones grises..................35
3. Les réseaux informels ou non qui se créent....................................37
IV
*
* *
2
3
INTRODUCTION
CHAPITRE I
Alors qu’elles n’ont pas de forme juridique unique en tant que telle, les très
petites entreprises (TPE) constituent une réalité essentielle du paysage
économique français et européen.
En définir les contours revient à prendre en compte plusieurs critères de
nature différente, parmi lesquels l’effectif, le chiffre d’affaires, le statut, les
garanties susceptibles d’être offertes par les actionnaires ou porteurs de parts au
regard de l’importance de l’entreprise, le type de management, les « croiser » et
distinguer selon les secteurs d’activités.
L’étude envisagera l’ensemble des secteurs de l’activité, qu’il s’agisse des
secteurs primaires, secondaires ou tertiaires. Il serait, en effet, par trop restrictif
de limiter le champ de l’observation aux deux derniers secteurs et ignorer ainsi
qu’un tiers des TPE recensées sur le territoire français sont des entreprises
agricoles et donc que toute statistique sur la question doit être majorée d’un tiers
pour tenter d’approcher la réalité du chiffre.
La diversité dont on sait qu’elle est grande quant au statut juridique, se
double donc d’une incertitude en matière de statistique.
cinquante salariés dont le chiffre d’affaires n’excède pas 7 millions d’euros (45,9
millions de francs) et le total du bilan 5 millions (32,8 millions de francs). Enfin,
la micro entreprise, au sens de cette recommandation, est définie comme
employant moins de dix salariés.
Hors cette définition européenne, la direction des entreprises commerciales,
artisanales et de services retient la notion de TPE pour les entreprises employant
moins de vingt salariés, seuil correspondant à celui utilisé pour définir les très
petites entreprises de l’industrie1 et pour la définition économique des entreprises
artisanales ainsi que des entreprises libérales appartenant à des professions non
réglementées.
La notion de la micro entreprise existe dans notre pays, au-delà
naturellement de la réalité économique sur laquelle nous reviendrons plus loin.
Il ne s’agit cependant pas d’une structure juridique particulière, mais d’un
régime fiscal très, voire « ultra » simplifié, de déclaration et de détermination des
bénéfices d’entreprises individuelles « à part entière », immatriculées soit au
registre du commerce, soit au répertoire des métiers ou à l’URSSAF.
Reste, enfin, à évoquer pour la détermination du critère dimensionnel,
l’inscription dans le secteur artisanal ou non.
La première définition de l’artisanat par la loi du 26 juillet 1925 n’a posé
aucune limite dimensionnelle. Moins de dix ans plus tard, à la demande des
professions, un premier seuil fut fixé à dix salariés (loi du 27 mars 1934) puis en
1938 à cinq. Des assouplissements furent décidés et appliqués pour certains
métiers. Un décret du 21 septembre 1976 permettait de relever le seuil à dix
salariés (quinze pour les entreprises dont le responsable est « qualifié » ou
compte 6 ans d’inscription au répertoire). Un décret de 1995 a institué ce qu’on a
appelé un « droit de suite » permettant à des entreprises employant plus de dix
salariés de demeurer inscrites au répertoire des métiers. Comme le relevait une
récente étude de notre assemblée « le critère dimensionnel n’a plus qu’une
importance relative » dans l’artisanat2.
Cependant, au titre de la loi du 5 juillet 1996 « doivent être immatriculées
au répertoire des métiers ou au registre des entreprises (pour les départements
d’Alsace Moselle) les personnes physiques et les personnes morales qui
n’emploient pas plus de dix salariés et qui exercent, à titre principal ou
secondaire une activité… relevant de l’artisanat et figurant sur une liste établie
par décret en Conseil d’Etat... ».
« Cette immatriculation ne dispense pas, le cas échéant, de
l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés ».
1
Assez régulièrement l’INSEE étudie le champ de la « petite entreprise industrielle ». Il s’agit alors
des entreprises dont la catégorie juridique ne relève pas des personnes morales ou organismes
soumis au droit administratif ou des coopératives d’utilisation de matériel agricole ou commun
(sic), employant de 0 à 19 salariés dont le chiffre d’affaires (HT) est inférieur à 35 millions de
francs (5 335 715,60 €) et dont l’activité principale relève de l’industrie extractive et
manufacturière, y compris les industries agricoles et alimentaires. Dans le cas de figure de la
« petite entreprise industrielle », la TPE serait celle employant au plus deux salariés.
2
« L’artisanat : enjeux et conditions de son développement ». Etude présentée sur le rapport de
M. Jean-Yves Rossi le 14 octobre 1997 - J0 avis et rapports du Conseil économique et social n° 19
- 15/11/1997.
7
1
Enfin, et pour mémoire, le seuil de cinquante salariés fait obligation notamment, et
particulièrement, de constituer un comité d’entreprise, un comité d’hygiène et de sécurité et des
conditions de travail (CHSCT) (respectivement art. L. 431-1 et L. 236-1 du code du travail), sans
compter l’obligation d’élaborer un certain nombre de rapports sur la situation dans et de
l’entreprise qu’il s’agisse du domaine économique ou social.
Pour sa part, la constitution d’une section syndicale n’est subordonnée à aucune condition
d’effectif. Elle peut donc être créée dans n’importe quelle entreprise dans laquelle l’exercice du
droit syndical est possible.
8
1
Sans exclure la possibilité de fonder une société anonyme à participation ouvrière (SAPO).
2
Rapport sur la simplification de la création d’entreprise, de la vie des créateurs et de la gestion de
leurs entreprises, remis par MM. J-M. Bockel, P. Rouvillois et L. Degroote au Premier ministre le
23 janvier 2001.
10
A - APPROCHE STATISTIQUE
Hors entreprises agricoles et financières, l’INSEE recensait au 1er janvier
2000, 2 378 000 entreprises industrielles, commerciales et de services (ICS)
81 000 d’entre elles comptaient des effectifs salariés supérieurs à vingt. Le total
des entreprises de moins de vingt salariés se situait à près de 2 300 000.
Le tableau suivant permettra de juger de la répartition selon les effectifs
employés et selon les grands secteurs d’activité regroupés.
11
Tableau 1 : Nombre d’entreprises par taille et effectifs salariés au 1er janvier 2000 (hors entreprises agricoles et financières)
(France entière)
Tranche d’effectifs salarié Ensemble
Secteur d’activité 0 sal. 1 sal. 2 sal. 3 sal. 4 sal. 5 sal. 6à9 10 à 19 Total - de 20 et +
20 sal.
Entreprises ICS 1 191 989 415 408 193 491 124 970 86 052 62 504 137 879 84 122 2 296 415 80 828 2 377 243
dont: IAA.................. 17 014 12 229 8 634 7 045 5 091 3 786 7 626 3 796 65 221 3 620 68 841
Autres industries ....... 68 118 25 454 13 585 9 974 7 609 6 215 17 570 16 008 164 533 22 993 187 526
Construction ............. 129 648 65 190 29 575 18 991 12 733 9 009 20 752 12 899 298 797 9 043 307 840
Commerce ................ 283 751 111093 55 924 37 700 27 467 20 019 41 179 22 349 599 482 19 350 618 832
Transports................. 51 497 12 029 4 923 3 419 2 508 1 934 5 455 4 370 86 135 5 791 91 926
Hôtellerie .................. 80 125 48 463 22 590 13 892 9 238 6 453 12 958 6 081 199 800 3 681 203 481
Services aux
entreprises................. 240 133 62 732 27 777 18 433 12 924 9 646 21 602 13 174 406 421 11 956 418 377
Services aux
particuliers ................ 321 703 78 218 30 483 15 516 8 482 5 442 10 737 5 445 476 026 4 394 480 420
Source : INSEE - Répertoire SIRENE
12
Plus d’une entreprise sur deux n’a pas de salarié et trois entreprises sur
quatre ayant des salariés en comptent de un à cinq.
Au total, 87 % des entreprises françaises de l’industrie, du commerce et
des services n’emploient pas de salarié ou bien n’en emploient que jusqu’à cinq.
Plus de quatre millions d’actifs seraient occupés dans ces entreprises (dont
près de deux millions de salariés), pour une population active de 26 millions
d’habitants1.
Plus de la moitié des entreprises n’ayant pas de salarié ressortissent aux
secteurs des services aux particuliers et au commerce, puis aux services aux
entreprises. Ces trois secteurs comptent pour 71 % des entreprises sans salarié.
Le commerce représente, à lui seul, 27 % des entreprises occupant un seul
salarié. Il devance très largement le secteur des services aux particuliers (18,5 %)
et la construction (15,7 %).
Dans la tranche des « un à cinq » salariés, le commerce domine très
largement puisque presque un tiers des quelque 825 000 entreprises de cette
catégorie ressortissent à ce secteur, devançant les services aux entreprises et la
construction.
L’observation de la part des TPE par secteur est aussi illustrative. Les
entreprises du secteur des services aux particuliers n’employant pas de salarié
comptent pour 67 %, celles employant un salarié compteraient pour 16,3 %. Sur
les 619 000 entreprises du secteur du commerce, recensées par l’INSEE, 45,9 %
n’ont aucun salarié. De la même manière, les entreprises du secteur des services
rendus aux entreprises n’occupant aucun salarié sont 57,4 % du total et 56 % des
entreprises de transport n’ont aucun salarié. Dans ce dernier secteur, 29,7 % des
entreprises employant des salariés n’en occupent qu’un…
On pourrait à loisir multiplier les exemples démontrant le foisonnement de
la TPE dans l’activité économique de notre pays.
Le secteur de l’artisanat, au 1er janvier 2000, était fort de
795 000 entreprises inscrites au répertoire des métiers (RIM) devenu registre
statistique de l’artisanat (RSA), en métropole, au titre d’une activité artisanale
principale ou secondaire : c’est-à-dire que le secteur représente environ un tiers
des entreprises française (hors agriculture).
L’évolution du nombre d’inscrits au RIM/RSA a suivi le rythme de la
croissance économique. Sur la période la plus récente, diminuant à partir de
1996/97, pour atteindre le point le plus bas en 1998, elle se stabilise ensuite pour
reprendre sa croissance à partir de 1999/2000.
Si les entreprises artisanales sont majoritairement des entreprises
individuelles, le fait marquant de la période la plus récente est la croissance des
formes sociétaires au dépend de la forme « propriétaire exploitant ». Au début de
la décennie 1990, 23 % des entreprises étaient en forme sociétaires, en fin de
décennie, on en comptait 36 %. Début 2000, la part des entreprises artisanales
1
La population active occupée était, en mars 2000, de 23,5 millions. Les salariés étaient au nombre
de 20,8 millions, les salariés du secteur « privé » étaient plus de 15,3 millions (dont 13,5 millions
sous contrat à durée indéterminée). Enquête emploi de Mars 2000.
13
n’ayant pas de salarié est de 40 %. 9 % des entreprises occupent entre six et dix
salariés ; 4 % des entreprises emploient dix salariés et plus.
Les entreprises inscrites au RIM/RSA ayant des salariés en occupent, en
moyenne, 4,2 ; le travail des métaux en emploie, en moyenne, 6,9 ; les services
et le bâtiment n’en emploient que 3,7.
Les professions libérales constituent aussi un monde de TPE. Il est certes
difficile d’en tracer le contour. Cependant, « métier par métier, ceux qu’on
appelle les professionnels libéraux se reconnaissent et savent se compter »1.
476 000 entreprises libérales étaient recensées en France métropolitaine (au
1er janvier 1999), soit 20 % du total des entreprises du pays. Les professionnels
de la santé représentaient 61 %, tandis que les « services rendus aux entreprises »
participaient pour 25 % de l’ensemble, suivis des « intermédiaires du
commerce » (6 %), puis des « auxiliaires d’assurances » (3 %) et, enfin, de
l’enseignement (2 %). L’emploi total du secteur représentait 1,3 million d’actifs,
dont près de la moitié dans le secteur de la santé et 40 % dans celui des
« services rendus aux entreprises ».
75,4 % des entreprises libérales ont pour forme juridique « l’entreprise
individuelle », 16 % celle de la SARL.
63 % des entreprises ne comptaient aucun salarié. 35 % en employaient de
un à neuf.
Dans le vaste secteur de la santé, 67,7 % de l’activité s’exerçait sans salarié
et 31,5 % avec moins de dix salariés. Dans celui des services rendus aux
entreprises le rapport est un peu plus équilibré (54 % des activités sont sans
salarié, 41,5 % avec de un à neuf salariés). Une analyse plus détaillée montrerait
que les auxiliaires médicaux travaillent à 92 % sans salarié ce qui serait le cas de
près de 70 % des praticiens médicaux, mais aussi de 65 % des architectes. A
l’inverse, mais cela n’a rien d’étonnant, 93 % des pharmaciens emploient de un à
neuf salariés.
Il a été évoqué, plus haut, la place des exploitations agricoles dans les
TPE.
Dès lors que l’on définirait la TPE par son statut juridique d’entreprise
unipersonnelle ou en nom personnel, la part des exploitations agricoles ayant ce
statut est très largement majoritaire. Ainsi, à titre d’exemple, en 19972, 84 % des
exploitations agricoles relevaient de la forme d’une « exploitation à
son compte », soit pour cette année, plus de 570 000 entreprises.
Parmi les 110 000 autres exploitations, plus de 42 000 revêtaient la forme
d’une entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL). A titre informatif, on
relèvera que la superficie moyenne des exploitations gérées directement par un
exploitant à son compte était largement inférieure à celle des entreprises
exploitées sous forme sociétaire ou autre : 31 hectares pour les premiers,
1
Les chiffres clefs des activités libérales – DEcas volume à paraître. Il n’existe pas de définition
« universellement » admise des professions libérales. Il sera entendu ici que « l’entreprise
libérale » est une personne physique ou morale, disposant d’une comptabilité propre, et qui exerce
en toute indépendance avec une responsabilité civile professionnelle. L’UNAPL, pour sa part,
recense 650 000 professionnels libéraux.
2
L’agriculteur, la forêt et les industries agroalimentaires 2000 - Agreste GraphAgri
14
1
Le rapport remis au Premier ministre par Mme B. Marre et Jean Cahuzac sur les adaptations à
apporter à la fiscalité et au mode de calcul des cotisations sociales agricoles, fournit des données
très illustratives sur la répartition des exploitants agricoles selon le régime d’impositions et
donc…. sur la taille des exploitations. Selon les données du ministère de l’économie on compterait
745 000 exploitants dont 491 000 (66 %) seraient au « forfait », régime qui s’applique de plein
droit aux agriculteurs dont la moyenne annuelle de recettes n’excède pas 500 000 F,
123 000 (16,5 %) exploitants étaient concernés par le « réel simplifié ». 129 000, enfin, étaient au
« réel normal ». Il s’agit de ceux dont les recettes excèdent 1,8 million de francs.
2
La création ex nihilo correspond à la création d’une unité économique jusqu’alors inexistante et
par ailleurs autonome juridiquement.
La réactivation correspond à une création nouvelle ou à une reprise, en nom propre dont le
nouveau chef d’entreprise a déjà été créateur ou repreneur d’une entreprise individuelle.
La reprise correspond à la poursuite de l’activité d’une entreprise juridiquement autonome rachat,
donation, héritage, reprise au conjoint, location-gérance… (sources : APCE)
15
A bon droit, on peut s’interroger sur les causes de cette légère remontée.
Ne faut-il y voir qu’un coup d’arrêt dans un processus de lente dégradation ou le
signe d’un retournement durable, comme le souligne le dernier rapport annuel de
l’agence pour la création d’entreprises (APCE) - tout au moins tant que la
croissance économique sera là - encore que la relation entre le rythme de cette
croissance et les créations d’entreprises n’apparaisse pas particulièrement
évidente, si l’on en juge par les données présentées ci-dessous.
Tableau 3 : Croissance économique et création d’entreprises
Années Taux de croissance Taux de création
d’entreprises
89/88 .......................... + 4,2 + 1,2
90/89 .......................... + 2,6 - 0,4
91/90 .......................... + 1,0 -9,8
92/91 .......................... + 1,5 - 2,1
93/92 .......................... - 0,9 0
94/93 .......................... + 2,1 + 7,3
95/94 .......................... + 1,7 - 3,1
96/95 .......................... + 1,1 - 3,1
97/96 .......................... + 1,9 - 1,6
98/97 .......................... + 3,4 - 1,7
99/98 .......................... + 2,9 + 0,9
00/99 .......................... + 3,1 + 1,2
Source : APCE - rapports annuels.
Les seules créations « ex nihilo » ont été jusqu’à l’année 2000 d’abord le
fait du commerce, puis des services aux entreprises. 2000 marque une étape : les
services aux entreprises dépassent le commerce. Les deux secteurs devancent,
très largement, les services aux particuliers (29 000) et la construction (plus de
28 000).
Les réactivations sont d’abord à rechercher dans le commerce (environ
16 000), les services aux particuliers et la construction (près de 9 000), le secteur
« hôtels-cafés-restaurants » (près de 8 000), les services aux entreprises (près de
7 500).
Pour leur part, les reprises sont d’abord le fait des « hôtels-cafés-
restaurants » (environ 15 000), des commerces (près de 13 000), des services aux
particuliers (plus de 4 000)… Au total, près des trois quarts des reprises
concernent des fonds de commerce. Elles sont plus rares dans les activités de
services aux entreprises (sur plus de 41 500 reprises, moins de
2 000 ressortissent à ce secteur).
En conclusion, comme le souligne l’APCE, certaines activités sont surtout
(et de plus en plus) le fait de créations « ex nihilo », notamment les services aux
entreprises (83 %), les transports (72 %), l’industrie, hors industries
agroalimentaires (IAA) (70 %).
80 % des créations « ex nihilo » n’ont pas de salarié « au démarrage » et
4,6 % en ont au moins trois ; 85 % des « réactivations » se font, au démarrage,
sans salarié, 3 % en ont au moins trois ; 48 % des « reprises » n’ont pas de
salarié, 29 % de un à deux salariés, 13 % de trois à cinq salariés ; 8 % ont au
moins six salariés au démarrage.
Le statut juridique des entreprises créées ou reprises pour 2000 est, enfin, le
plus fréquemment le suivant.
52 % des « créations/reprises » le sont en nom propre (personnes
physiques). 52,4 % des créations « ex nihilo » sont en nom propre et les reprises
le sont à plus de 48 %. Les « réactivations » le sont par nature en quasi-totalité.
85 % des créations/reprises en société le sont sous la forme d’une SARL. Par
secteur, la très grande majorité des créations d’entreprises de services aux
particuliers se fait en nom propre. Ce « tropisme » est beaucoup moins marqué
dans les autres secteurs.
Il reste à évoquer les montants financiers mobilisés pour ces créations. Ils
sont, en moyenne, assez modestes. Selon l’APCE, le « mode » se situerait dans
la tranche de 50 000 à 100 000 F c’est-à-dire 7 622,45 € et 15 244,90 € (32 % en
1998, 20 % en 1994). Les apports initiaux de moins de 10 000 F représenteraient
(en 1998) 16,9 % des cas. Au total, près de 40 % des « créations » se seraient
opérées avec un apport initial inférieur ou égal à 50 000 F. Assez
paradoxalement, la part respective des « tranches » supérieures à 100 000 F
aurait tendu à décroître entre 1994 et 1998.
18
1
Eloïse Demoly Les créateurs d’entreprise en 1998 – moins de chômeurs, plus de diplômés
« INSEE Première » n° 743 – octobre 2000.
2
Une étude récente sur le financement des plus petites créations d’entreprises réalisée
conjointement par l’APCE, la banque de développement des PME et la caisse des dépôts conclut
aussi qu’en dépit des mesures diverses qui se sont accumulées au fil des ans, les moyens financiers
dont disposent les « petits » créateurs restent notoirement insuffisants : sept créations sur dix
d’entreprises individuelles dans l’échantillon de 8 500 entreprises enquêtées, se sont faites avec un
apport initial inférieur à 75 000 F (11 433,68 €). En moyenne le créateur d’une TPE « démarre »
avec une cagnotte de 61 803 F (9 421,81 €). La situation serait légèrement plus favorable pour les
créateurs d’une société : un peu plus de la moitié d’entre eux disposerait de moins de 75 000 F et
près de un sur trois dépasserait 100 000 F (15 244,90 €). On verra plus loin ce qu’il en est des
aides auxquelles il est fait appel, qu’elles soient « institutionnelles » ou « personnelles ».
3
cf. l’étude IFOP de janvier 2000 réalisée dans le cadre du salon des entrepreneurs 2000, en
partenariat avec l’APCE et le cabinet Arthur Andersen.
4
Approche que l’APCE envisage comme l’opposition entre une logique entrepreneuriale et une
logique d’insertion sociale.
19
Sept créateurs sur dix sont des hommes. Majoritairement les créateurs
(hommes ou femmes) ont une expérience professionnelle dans le même secteur
(ou un secteur proche) que celui dans lequel ils créent leur entreprise.
L’examen « longitudinal » du profil des créateurs (sur une courte période,
il est vrai), tend à démontrer qu’ils sont plus qualifiés en 1998 qu’en 1994, qu’ils
sont davantage « actifs » que chômeurs. Ainsi, si en 1994 un créateur sur deux
était issu du chômage, en 1998 c’était un créateur sur trois. L’étude à laquelle
nous empruntons ces informations1 conclut en ces termes : « Cette évolution est
de nature à modifier sensiblement la qualité d’ensemble de la création
d’entreprises… puisque le taux de survie des actifs (occupés) est supérieur de 10
à 15 points à celui des chômeurs de courte et de longue durée ».
De manière symptomatique la répartition des créateurs selon les motifs de
création évolue entre les deux dates au bénéfice du « goût d’entreprendre » et au
dépend de l’idée de « saisir une occasion ». Cela étant, la relation entre chômage
et création d’entreprises n’est pas aussi nette qu’on pourrait le penser.
En effet, l’examen de la catégorie socioprofessionnelle (CSP) d’origine du
créateur montre une stabilité de la part de certaines catégories
socioprofessionnelles d’actifs (employés, ouvriers, …) entre 1994 et 1998. Le
pourcentage des CSP « chefs d’entreprises », « cadres » et « agents de maîtrise »
parmi les créateurs baisse entre les deux dates, particulièrement la CSP
« cadres ». En revanche, la CSP « artisans » croît, tout comme celle des
« étudiants ».
On constate un accroissement de la part des titulaires d’un diplôme
supérieur au bac. En outre, le nombre des créateurs possédant une
« qualification » leur permettant d’assurer la pérennité de leur entreprise croît,
quelle que soit cette qualification, ce qui serait un gage favorable. En effet, tous
les autres critères égaux, le niveau de « connaissances » du créateur s’avère être
le critère le plus déterminant pour le succès ou l’échec du projet.
1
Rapport annuel 1999 de l’APCE - L’évolution du profil des créateurs et des entreprises créées.
2
On se reportera à l’ouvrage stimulant de B. Duchéneaut et de M. Orhan « les femmes
entrepreneurs en France » - Seli Arslan 2000 dont le sous-titre indique assez la teneur « percée
des femmes dans un monde construit au masculin ».
20
1
André Letowski : Les entreprises créées ou reprises par les femmes : situation au démarrage,
poursuite et développement. Note d’analyse de l’APCE - mars 1999.
2
Cf. infra D. la pérennité de l’entreprise.
21
l’étude de la situation trois ans et demi après montre que 71 % des femmes chefs
d’entreprises n’ont pas embauché contre 59 % pour les hommes. On peut donc
en conclure qu’une forte proportion de femmes créatrices d’entreprises créent
des TPE et surtout créent « leur activité ».
Cela étant, divers signes tendent à démontrer un rapprochement entre
créateurs et créatrices. Ainsi, parmi les conclusions d’une étude récente de
l’APCE sur le profil des créatrices d’entreprises1 on notera que « … en quelques
années, la proportion de femmes qui prennent l’initiative de créer une entreprise
sans que leur environnement social les y incite est en forte progression :
l’hypothèse selon laquelle la création d’entreprise par les femmes résulterait
d’un acte volontaire, en quelque sorte d’une initiative plus économique que
sociale se trouve plutôt renforcée ».
1
Les femmes et la création d’entreprise – APCE rapport annuel 2000.
22
Tableau 6 : Taux de « survie » à cinq ans selon l’âge du chef d’entreprise pour
les entreprises créées ou reprises au 1er semestre 1994
4. Les artisans
L’examen de la typologie des créateurs permet de définir certaines
caractéristiques propres à l’artisanat.
Une étude de l’APCE, une fois rappelés certains caractères communs, qu’il
s’agisse des motivations et dans un ordre « objectif », le montant des capitaux
mobilisés, notamment, met en relief un profil particulier du créateur artisan.
« La qualification, l’expérience antérieure, la formation, la façon de
préparer leur projet apparaissent comme des éléments de forte spécificité des
futurs artisans »1. En effet, les futurs artisans sont, davantage que les autres
créateurs, issus de la CSP « ouvriers » (31 % contre 8 %). A l’inverse, ils sont
beaucoup moins issus de la CSP « cadres » (8 % contre 18 %). Ils ont exercé
antérieurement des fonctions de production (45 %, contre 14 % pour les autres
créateurs). A l’inverse, ils sont moins nombreux à avoir occupé des fonctions
« commerciales » (22 % contre 40 % pour les autres créateurs).
Enfin, près de sept porteurs de projets sur dix ont une expérience
professionnelle dans la même activité que celle dans laquelle ils s’engagent (un
sur deux dans le cas des autres créateurs). Six fois sur dix cette expérience a été
acquise dans une entreprise de petite taille, voir dans une TPE.
Les créateurs de l’artisanat présentent un profil particulier quant aux
diplômes. Le tableau suivant permettra de mieux l’observer.
1
Les artisans et les autres créateurs en 1995 – APCE rapport annuel 1999.
23
Parmi les autres spécificités, il apparaît que les futurs artisans tirent un plus
grand bénéfice que les autres du système des aides directes ou indirectes mis en
place. L’APCE relève qu’en moyenne ils sont deux fois plus nombreux à
bénéficier du système des aides, notamment de l’aide aux chômeurs créateurs-
repreneurs d’entreprises (ACCRE).
1
Ibid.
24
Les entreprises créées par un chômeur sont « plus petites » : les chômeurs-
créateurs ont, en moyenne, 0,5 salarié (pour 1 pour les créateurs non chômeurs),
les chômeurs « repreneurs » comptent, en moyenne, 0,8 salarié (pour 2,6 pour les
créateurs non chômeurs). Le tableau ci-après permettra d’apprécier la répartition
selon la taille des effectifs pour la création ex nihilo.
Tableau 9 : Répartition des entreprises créées par taille
0 1-2 sal 3 à 5 sal 6 à 9 sal 10 et plus total
Chômeurs 79 15 4 1,5 0,5 100
Non-chômeurs 66 24 7 2 1 100
Source : les chômeurs-créateurs - APCE 2000.
1
C’est-à-dire qu’elles existaient toujours, avec le même statut, initialement choisi, ce qui relativise
à la fois le concept de pérennité et de mortalité, lorsqu’on sait, par exemple, que 10 % des
entreprises nouvelles sont, en moyenne, cédées dans les cinq ans.
27
1
E. Lamontagne, B. Thirion – Création d’entreprises : les facteurs de survie « INSEE Première »
n° 703 – mars 2000.
28
L’étude sur longue durée de la création par région figure dans le tableau ci-
après.
Tableau 12 : Evolution 1999, comparée à la moyenne 1993/1998 par région
Régions Nombre de création Taux de création ∆ 1999/93-98
en 1999 pour 10 000 hab.
Alsace......................................... 5 766 33 -2
Aquitaine.................................... 14 260 49 -5
Auvergne.................................... 4 357 33 -7
Bourgogne.................................. 4 888 30 -9
Bretagne ..................................... 10 984 38 +3
Centre......................................... 7 585 31 -5
Champagne Ardennes ................ 3 641 27 -7
Corse .......................................... 2 211 85 +8
Franche Comté ........................... 3 482 31 -1
Ile de France............................... 62 866 57 -5
Languedoc Roussillon ................ 15 732 69 -3
Limousin .................................... 2 255 32 -4
Lorraine...................................... 6 498 28 -5
Midi Pyrénées ............................ 12 230 48 0
Nord Pas de Calais ..................... 10 272 26 -3
Basse Normandie ....................... 4 724 33 -6
Haute Normandie ....................... 5292 30 -5
Pays de Loire.............................. 11 512 36 +3
Picardie ...................................... 5 026 27 -7
Poitou-Charentes ........................ 5 999 37 -5
Provence Alpes Côte d’Azur ...... 30 855 68 -2
Rhône Alpes ............................... 26 158 46 -4
France métropolitaine................. 256 593 44 -3
Source : APCE, avril 2000.
1
Observatoire APCE « Quelle est et comment évolue la création dans les départements ? » - août
2000.
29
1
M. Jacques Barthélémy, propos tenus au cours d’un entretien privé avec le rapporteur.
30
1. Le « traditionnel »
« Les PME et l’artisanat forment véritablement l’assise économique et
sociale de l’Union européenne ». Ainsi s’exprime, après d’autres, un avis du
Comité économique et social européen sur l’artisanat et les petites et moyennes
1
entreprises . Sans adhérer totalement à cette assertion qui fait abstraction du rôle
économique assez déterminant de la grande entreprise, ne serait-ce que dans la
compétition internationale, le rôle de la TPE dans le maillage entrepreneurial
local est assez fondamental.
Parmi les activités « traditionnelles », rendant un service économique et au-
delà, se comptent les métiers de l’artisanat.
2
Un arrêté a recensé (de manière indicative, précisera le Conseil d’Etat )
256 métiers de l’artisanat, qui se répartissent en quatre grandes catégories :
- métiers du bâtiment (maçon, peintre, charpentier, carreleur,
électricien…) ;
- métiers de service (coiffure, esthétique, taxi, cordonnier, tailleur,
prothésiste dentaire…) ;
- métiers de l’alimentation de détail (boulanger, pâtissier, charcutier,
boucher, glacier…) ;
- métiers de production (mécanique, ébénisterie, joaillerie,
coutellerie…).3
Tant ces très petites entreprises que l’artisan isolé (ou l’entreprise artisanale
qui, en application du droit de suite, peut compter jusqu’à vingt personnes), sont
très facilement identifiables, par leur qualification spécifique et par « l’image »
de leur métier, conservée très présente dans l’esprit du public utilisateur.
Quels que soient les progrès foudroyants de la science, on ne voit guère que
l’on puisse se passer du coiffeur. Tout le monde sait ce que fait un électricien, un
carreleur, un cordonnier, un ébéniste etc. même si, alors que les activités sont
pérennes, les techniques ont pu très largement évoluer.
Chacun est rassuré, à l’heure de la mondialisation, de savoir que ces
métiers traditionnels, requérant compétence et savoir-faire, mais, en même
temps, très proches de la vie de tous les jours, existent toujours, sous des
appellations qui, pour certaines, sont quasiment « historiques ». De même,
chacun y trouve plus que son compte de pouvoir recourir aux « services » des
professionnels de la santé qui assurent autant des prestations de plus en plus
techniques qu’un rôle social toujours évident, qu’il s’agisse du praticien médical
ou des « paramédicaux ».
1
Comité économique et social des Communautés européennes : PME et artisanat dans l’Union
européenne - CES-97-013-FR.
2
Arrêt du 30 juin 1967
3
Etude présentée par la section des activités productives de la recherche et de la technologie, sur le
rapport de M. Jean-Yves ROSSI, le 14 octobre 1997 op. cit.
31
1
P. Rivière – Le dynamisme des petites entreprises internautes « INSEE Première » - n° 668 juillet
1999.
33
1. Les solos
Les solos ou « free-lance » si l’on tient à la référence anglo-saxonne
laquelle évoque aussi le terme de « soho » (small office, home office), sont des
travailleurs indépendants, de toutes catégories d’activités, qui travaillent seuls et
n’ont donc aucun salarié.
L’entreprise individuelle1 n’est certainement pas un phénomène nouveau.
Depuis longtemps existe l’artisan ou le professionnel libéral réglementé
(médecin, avocat), bien connus et facilement identifiés dans le paysage social.
Ces « solos » ont été décriés (à cause du risque de précarité) ou bien
considérés comme quantité négligeable (du strict point de vue économique).
Participent de cette population : le professionnel dont l’identification est
traditionnelle, revendiquant depuis toujours, malgré les difficultés et les aléas, le
sens de l’initiative et de la responsabilité ; puis ensuite d’anciens salariés,
choisissant cette nouvelle voie délibérément ou encore parce qu’ils y sont
contraints, après une période plus ou moins longue de chômage ; mais encore des
« inventeurs » de nouveaux métiers ou de métiers anciens que l’on croyait
disparus (conseil en informatique, médiateur pénal, écrivain public etc.).
Cette forme d’activité tend à se développer toujours davantage. Elle est à
mettre aussi en relation avec le phénomène du recentrage sur le cœur du métier
de nombreuses entreprises grandes ou moyennes, qui, de ce fait, font appel, de
plus en plus, à des prestataires de services à forte expertise et donc à forte valeur
ajoutée, pour des missions particulièrement ciblées. Selon un récent baromètre
(« outsourcing 2000 » d’Arthur Andersen - TN Sofres) 47 % des grandes
entreprises envisageraient d’augmenter la part des fonctions externalisées.
Une des meilleures preuves de l’importance qui leur est maintenant
reconnue, est la floraison des vecteurs de communication dont ils sont la cible, ce
qui signifie clairement que les médias ont, à leur égard, identifié un marché.2
Un ouvrage des « Cahiers de générations » (n° 6 - 1999) revue de réflexion
sur les générations et la transmission, réalisé avec l’aide de la caisse
interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse des experts et
ingénieurs (CIPAV) - une des caisses de retraite des professions libérales -
évoque le profil de ces nouveaux entrepreneurs indépendants : « Les Robinson
de l’emploi ».
Les « solos » répertoriés à la CIPAV (caisse, cela est à noter, qui a le plus
important taux de progression de ses effectifs depuis cinq ans), représentent une
population ayant dépassé 45 ans - entamant très souvent une seconde carrière -
qui a majoritairement choisi un travail de « conseil ».
1
L’entreprise individuelle, avis présenté au nom du Conseil économique et social par M. Jacques
Barthélémy - 28 avril 1993. JO Avis et rapport du Conseil économique et social n°5 -14 mai 1993
2
Sur cette même cible des TPE : « Défis », « Entreprendre », « le Nouvel Entrepreneur »,
« l’Entreprise en solo » (groupe Expansion.) Sites Internet : « Business Village » etc..
Création d’un Salon (juin 1999), à La Défense, intitulé « Solo connexions » etc..
34
1
Ces « divorcés du salariat » estiment que leur changement de statut et d’activité a été une bonne
solution (90 %) même si 52 % déclarent travailler beaucoup plus qu’auparavant.
2
Les solos - phénomène médiatique ou nouvelle génération d’entreprises ? Entreprises en bref -
n° 3 septembre 2000.
35
1
Ibid.
2
Signataires de ce manifeste : Marie-Noëlle Auberger, rédactrice en chef de la revue « Cadres
CFDT » - Guy Aznar, sociologue - Jacques Chaize, Président du MEDEF Bourgogne -
Michel Godet, Professeur de prospective industrielle au CNAM - Béatrice Majnoni d’Intignano,
Economiste - Joël Palix, Président de Clust.com - Annick Renaud-Coulon, Economiste - Hervé
Serieyx, Economiste - Jean-Pierre Worms, sociologue, Président de France Initiative Réseau.
3
Au-delà de l’emploi. Transformations du travail et devenir du droit du Travail en Europe -
Rapport pour la Commission européenne - 1999 - Flammarion - sous la direction d’Alain Supiot.
36
Pour ces salariés d’un type nouveau, dont on dit qu’ils vont se multiplier, le
droit social français est-il encore adapté ? Ne devra-t-on pas inventer de
nouvelles orientations, adaptées à la mutation du travail et à la nouvelle
autonomie du travailleur.
Pour certains spécialistes1 un nouveau droit devra nécessairement émerger,
plus vaste que le droit social actuel : un droit de « l’activité professionnelle »
prenant en compte ce nouveau statut et réglant de façon moderne les éventuels
conflits.
Un récent rapport pour la Commission européenne, élaboré sous la
direction de M. Alain Supiot, évoquant la notion de subordination, relève une
évolution de l’organisation du travail ou de l’activité selon trois tendances. La
première serait caractérisée par un relâchement des pratiques hiérarchiques et
donc une plus grande autonomie opérationnelle du travailleur, tandis qu’on
assisterait au « recul » de présomption du salariat au profit du travail
indépendant. La deuxième tendance consisterait en l’exercice de pressions
informelles sur certaines catégories de travailleurs salariés, du fait de la situation
économique (chômage de masse, précarisation du travail) et de nouvelles
pratiques managériales. La troisième tendance serait la « complexification » des
rapports entre employeurs et salariés du fait de l’introduction d’un « tiers » sous
forme notamment de sous-traitance ou d’intérim.
Une autre analyse2 note une transformation des modes de production se
traduisant « par l’apparition de formes de mobilisation du travail qui ne sont ni
du travail salarié, ni du travail indépendant… mais des combinaisons complexes
et protéiformes des deux ». Il en résulterait une tendance à l’atténuation des
frontières entre les deux formes : au contrat de travail se substituerait le contrat
de service.
Ces évolutions conduiraient, entre autres choses, à l’extension d’une zone
grise entre travail formellement dépendant et indépendant. Dès lors, la question
des « faux indépendants » mais aussi des « faux dépendants » se trouve posée :
n’évoque-t-on pas des notions comme celles de « subordonnés autonomes » ou
« d’indépendants associés »3, ne parle-t-on pas de « pratiques du quasi-salariat »4
avec des formes telles que la franchise (contrats à long terme avec le
fournisseur), la régie et la sous-traitance (contrats avec le client).
Pour se prémunir, - à la fois parce que le droit social que nous connaissons
est très protecteur et parce qu’il n’existe pas de passerelles institutionnelles
réglant la protection sociale et une liaison entre les différents systèmes de
retraite - la naissance du « portage salarial » est apparue comme une nouvelle
solution.
1
Jacques Barthélémy – op. cit. Alain Supiot op. cit.
2
Y. Dupuis, F. Larré - Entre salariat et travail indépendant, les formes hybrides de mobilisation du
travail - Travail et emploi n° 77 - 4/1998.
3
M. Paysant, F. Batty Travail salarié - travail indépendant - Flammarion 1995.
4
M.A. Estrade, N. Missegue - Se mettre à son compte ou rester indépendants - Economie et
statistique n° 337-338 - 7/8 2000.
37
1
Alain Supiot, op. cit.
2
Ce qui est parfois défini comme la « protection passive »
38
CHAPITRE II
1
Le rapport de 1 à 10 peut s’expliquer aisément, dès lors qu’on croise types d’aides et situation
personnelle du porteur du projet… Ajoutons que l’étude a fait le choix de ne pas présenter les
dispositifs d’incitations fiscales destinées à favoriser l’orientation de l’épargne des particuliers vers
les nouvelles entreprises. Un rapport complet y suffirait à peine. Il apparaît qu’un travail de
recollement des diverses « aides » est en cours.
40
blâmer outre mesure la multiplication des structures, gage que chacun peut être
conseillé ou aidé selon son projet, encore faut-il que le créateur puisse s’orienter
dans ce qui apparaît bien souvent comme un dédale.
Trois mille structures, plus d’une centaine de types d’aides. On ne peut
s’empêcher de mettre en regard de ces données, l’évolution du nombre de
créations dont on a vu qu’elle était, globalement, peu satisfaisante sur la longue
durée. Il y a, probablement, voire certainement, une inadéquation qui justifie la
somme des rapports rédigés depuis des décennies, sur la nécessaire
simplification de la création d’entreprises en France et singulièrement de la
création des plus petites structures.
De plus, si le système des aides prend en compte - pour partie - « l’amont »
de la création, l’essentiel, sinon la totalité, du dispositif est centré sur le moment
de la création, et ce sous des formes plus au moins sophistiquées. Il ne prend, par
contre, que trop rarement en compte le temps « post création » pendant lequel
l’entreprise créée s’avère la plus fragile. De multiples analyses ont mis en avant
cette absence relative d’accompagnement « des jeunes années ».
1
Cf. notamment « Evaluation des aides à la création d’entreprise » rapport de la commission
présidée par M. B. Larrera de Morel - CGP 1996.
2
APCE : étude sur le financement des plus petites créations d’entreprises - novembre 2000.
3
« L’entreprise en création ou en croissance et l’évolution de ses relations avec les institutions
financières » - avis adopté sur le rapport de M. J-M. Robert le 11 février 1989 - Avis et rapport du
Conseil économique et social n° 2 février 1989. Cf. également « la maîtrise de la croissance des
entreprises nouvellement créées » avis adopté sur le rapport de J. Menu le 14 mars 1984 – avis et
rapport du Conseil économique et social n° 5 avril 1984.
42
1
ADIE – rapport d’activité 2000, ainsi qu’une étude d’évaluation 2000 et une étude sur l’intégration
des exclus par le travail indépendant et le micro-crédit en Europe réalisée par l’association.
2
« Les bénéficiaires de France initiative réseau » - APCE étude 1999 – résultats d’une enquête
auprès des créateurs d’entreprises bénéficiaires de l’aide d’une plate-forme d’initiative locale
(PFIL). Etude réalisée par le groupe CSA/TMO.
44
1
Il est indispensable qu’un décret en Conseil d’Etat autorise la possibilité pour une collectivité
territoriale d’abonder un fonds de capital risque de proximité. La couverture du risque est en partie
assurée par un fonds de garantie comme Sofaris ou le fonds France active.
46
1
Exceptés les grandes et moyennes surfaces employant plus de dix salariés, les activités
immobilières, une partie du monde « agricole », l’enseignement général et toute activité créée
autour d’un pôle de conversion.
2
Luc Matray - Le prêt à la création d’entreprise. « Banque magazine » nov. 2000.
3
« La création d’entreprise » - BDPME 2000 et « Spécificité des créateurs d’entreprises garantis
par Sofaris/BDPME » - APCE mai 2000.
47
80 % « sociétaire ». Enfin, neuf fois sur dix, l’entreprise emploie, dès sa création
un (ou des) salarié(s). L’analyse de la vie de plus de 3 000 créations garanties
permet d’observer que les entreprises « pérennes » ont, sur une période de cinq
ans (depuis 1995 jusqu’à 2000), multiplié leurs effectifs par 3,5.
Aux côtés de la BDPME/Sofaris, le fonds « France active », créé en 1988
par la fondation de France et la CDC, intervient principalement, sinon
uniquement, en faveur des créateurs qui n’ont pas (ou plus) accès au circuit
bancaire traditionnel. Le fonds intervient dans le cautionnement. La garantie peut
atteindre 65 % du montant du prêt.
De même, l’institut de développement de l’économie sociale gère deux
fonds intervenant dans la création d’entreprises relevant du secteur de
l’économie sociale : le fonds de garantie pour la création, la reprise ou le
développement à l’initiative des femmes et le fonds de garantie pour les
structures d’insertion par l’économique.
Le premier apporte une garantie jusqu’à 70 % sur le montant d’un emprunt
compris entre 33 000 (5 030 €) et 145 000 F (22 110 €), le second une garantie
jusqu’à 50 % du montant d’un emprunt compris entre 100 000 F (15 240 €) et
800 000 F (120 000 €) pour les financements de fonds de roulement et entre
50 000 F (7 620 €) et 400 000 F (60 980 €) pour les investissements.
Depuis de nombreuses années, un dispositif spécifique existe en faveur du
financement des entreprises artisanales, lesquelles du fait de leur taille pouvaient
difficilement obtenir des prêts à des taux compétitifs auprès des banques.
Réformé en 1996, il repose aujourd’hui sur des prêts bonifiés, conventionnés et
des prêts sur ressources CODEVI.
L’obtention des prêts bonifiés est subordonnée à un certain nombre de
conditions, liées à l’entreprise, à la qualification professionnelle reconnue du
chef d’entreprise, à la situation de l’entreprise (phase d’installation notamment).
Le montant maximum du prêt est de 300 000 F (45 730 €) (au taux de 3,5 %) et
d’une durée variant de deux à quinze ans.
Le prêt conventionné, pour sa part, est ouvert aux entreprises immatriculées
au répertoire des métiers. Il n’est pas plafonné. Il est destiné à financer tous les
projets d’investissements, les besoins en fonds de roulement qui leur sont liés,
ainsi que les valeurs incorporelles (fonds de commerce, droits de bail…).
Enfin, les prêts sur ressources CODEVI (étendus par la loi du 14 mars 1996
aux entreprises artisanales), peuvent être affectés aux besoins de trésorerie et
d’investissement des entreprises immatriculées au Répertoire des métiers qui
réalisent un chiffre d’affaires inférieur à 50 MF (762 000 €) et qui ne sont pas
détenues à plus de 50 % par une entreprise réalisant un chiffre d’affaires
supérieur.
2.2. Les sociétés de cautionnement mutuel (SCM)
Instituées par une loi de mars 1917, établissements auxquels la
réglementation bancaire s’applique pleinement (cf. loi bancaire du 24 janvier
1984), les sociétés de cautionnement mutuel ont pour objet de « faciliter l’accès
48
1
D. Foissaud – « les sociétés de caution mutuelles et le financement des PME » - Ministère de
l’industrie – Commissariat général du Plan – juin 1988 et « les garanties et le crédit aux
entreprises » Conseil national du crédit – septembre 1993.
2
Tel est le cas de la société de caution mutuelle artisanale (SOCAMA) pour le premier type, et de la
société interprofessionnelle artisanale de garantie immobilière (SIAGI) créée par leur organisme
professionnel – les chambres de métiers – pour le deuxième type. Précisons que les artisans qui
bénéficient de la garantie de la SIAGI ne sont pas sociétaires, ce sont les chambres des métiers qui
le sont, mais ne peuvent, elles, bénéficier de la garantie.
49
1
Jusqu’en décembre 1996, l’ACCRE consistait en une subvention et une exonération de charges
sociales. A partir de 1997, la « partie » subvention pour les bénéficiaires potentiels a été
supprimée.
2
Circulaire DGEFP n° 99-18 du 6 avril 1999 relative au dispositif de soutien à la création ou à la
reprise d’entreprise
50
1
L’action des FRAC a pour objet d’inciter les PMI à avoir recours aux conseils extérieurs et de
susciter une offre régionale de conseil. Une prise en charge partielle du coût des diagnostics et
audits réalisés par un conseil du secteur concurrentiel est imputée sur le budget du ministère ayant
en charge l’industrie.
51
1
« L’accompagnement des créateurs d’entreprise en France… ». APCE novembre 2000 op.cit.
54
1
« L’avenir des chambres de commerce et d’industrie » - Avis adopté par le Conseil économique et
social sur le rapport de M. André Sappa le 4 avril 2001 – JO. Avis du Conseil économique et
social n° 6 du 9 avril 2001.
55
1
Premier rapport annuel des CCI de France - juin 2000.
56
droit à l’initiative économique, pour les porteurs de projets n’ayant pas l’accès au
crédit bancaire, naturellement avec l’ANPE dès lors que des démarches sont
envisagées pour l’embauche de salariés, l’APEC laquelle oriente vers
« Entreprendre » les porteurs de projets structurés) et bien sûr la DDTEFP qui
détermine les aides à destination des chômeurs créateurs ou repreneurs.
(Rappelons que la Haute Garonne comprend, en 2000, environ
30 000 entreprises, employant 215 000 salariés et que 90 % de ces entreprises
sont des « TPE/PME » puisqu’elles occupent, en moyenne, moins de dix
salariés).
De la même manière, la CCI de Nice, compte tenu de l’environnement
économique et par exemple, de la proximité du pôle de Sophia-Antipolis s’est
lancée dans l’accompagnement des « start-up » dans le cadre d’un programme dit
« Entreprendre les hautes technologies ».
Enfin, dans le vaste domaine des professions libérales, la création, en 1998,
des offices régionaux d’information, de formation et de formalités (ORIFF) a
comblé une lacune. Ces offices ont reçu mission à la fois d’accueillir, d’aider les
futurs professionnels. Le champ des aides est vaste : il va de l’information
générale à l’assistance à la création de l’entreprise. A ce jour quatre offices
régionaux ont été créés.
A - LES ETATS-UNIS
On commencera par les Etats-Unis, dans la mesure où l’engagement et
l’ampleur du soutien aux petites entreprises sont très importants, datent de
longtemps et sont constants.
L’engagement est à ce point « stratégique » qu’une loi fédérale a été votée
et qu’une agence gouvernementale a été créée, ce qui n’est pas aussi fréquent
dans un pays où le principe de subsidiarité administrative et politique est
quasiment « absolu ».
C’est en 1953 que le Congrès des Etats-Unis a adopté le « small business
act », loi cadre en faveur des petites entreprises. Cette loi est basée sur un
principe : l’essence du système économique américain de l’entreprise privée
réside dans la libre concurrence. Le Congrès déclare dans le « small business
act » que « le gouvernement doit aider, conseiller et protéger dans toute la
mesure du possible les intérêts de la petite entreprise afin de préserver l’esprit
de libre concurrence, d’assurer qu’une proportion équitable des marchés
publics soit passée avec la petite entreprise et de maintenir en la renforçant
l’économie de la Nation dans son ensemble » (SBAct 1953 - section 202).
Pour l’exécution du « small business act », la « US Small business
administration » a été créée le 30 juillet 1953, comme agence gouvernementale
indépendante chargée d’aider les entrepreneurs américains à créer et développer
des petites entreprises, c’est-à-dire des entreprises occupant moins de cinq cents
personnes (mais dans la pratique moins de cent).
Aux Etats-Unis le recours au capital-risque permet de favoriser la création
de jeunes pousses de haute technologie ou très innovantes. Ces entreprises à
visées industrielle et/ou de services développent des produits généralement
protégés par des brevets. Elles s’appuient sur les résultats de la recherche et du
développement obtenus grâce aux financements apportés par les fondations
privées qui alimentent la recherche académique. Ces modalités en faveur de la
recherche et plus généralement de la création d’entreprises sont une voie à
explorer dans le cadre de l’évolution du statut des fondations en France.
La même incertitude règne aux Etats-Unis comme en France pour définir la
petite entreprise. Ainsi la « small business administration » utilise-t-elle des
critères de taille et de chiffres d’affaires différents selon le secteur d’activité des
entreprises. En outre, l’importance du « home business » (entreprise
unipersonnelle) est telle dans le secteur des services aux Etats-Unis que la
« SBA » s’intéresse de plus en plus aux très petites unités. Cette approche
particulièrement adaptée fait preuve d’un pragmatisme très « anglo-saxon » : il
59
B - LE CANADA
Le Canada est doublement, géographiquement et administrativement,
proche des Etats-Unis, chacun le sait. On ne sera pas étonné qu’il y ait donc
similitude entre les deux pays. Cependant, quelques spécificités valent plus que
d’être mentionnées.
1
Aider les PME : l’exemple américain. F. Grignon. Les rapport du Sénat n° 374 - 26 juin 1997 et
également la « Small business administration – SBA » et « le dispositif de soutien aux PME
américaines – aides fédérales, subfédérales et locales » - Ambassade de France aux Etats-Unis,
service de l’expansion économique – septembre 1998.
61
Certes, des systèmes d’aides financières sont prévus, institués par la banque
fédérale de développement du Canada ou par la société de développement
industriel du Québec. Le capital risque existe dont un programme « micro
entreprises » courant pendant la phase de développement… Des aides
traditionnelles au conseil, à la gestion comptable, ou plus généralement
économique, existent naturellement tant au niveau fédéral que dans les Etats
formant la Fédération, par exemple, les « services d’aide aux jeunes
entrepreneurs (SAJE) » au Québec…
On évoquera ici une spécificité canadienne, en fait québécoise ; le
financement de projets par le biais de l’épargne de proximité, forme originale de
« capitalisme ».
En 1983, dans un contexte de récession, un fonds dit « fonds de solidarité
des travailleurs du Québec » a été créé. Lors de son audition devant la section,
M. François Hurel rappelait que ce fonds a été créé à l’initiative de la fédération
des travailleurs du Québec, avec l’idée d’associer solidarité et avantages fiscaux
et d’orienter ainsi l’épargne de proximité pour répondre aux besoins de
financement d’entreprises en difficultés, en expansion ou en projet de création.
L’achat d’actions donne droit à deux crédits d’impôts. Comme le note une
étude sur le sujet1, aujourd’hui la souscription peut s’effectuer par des retenues
sur le salaire, une fois l’an. La contribution maximale annuelle pour la
déclaration fiscale est de 5 000 dollars canadiens et le crédit d’impôt est de 30 %.
Le placement est visiblement bon puisque l’action a doublé de valeur
pendant les quinze dernières années et on compte plus de 380 000 actionnaires,
pour trois millions de ménages québécois et l’investissement global du fonds
s’élève à plus de deux milliards de dollars canadiens dans l’économie
québécoise : en fait dans plus de 1 200 entreprises, contribuant à créer plus de
78 000 emplois. Ajoutons que le fonds investit dans la création et non dans la
« pérennisation ».
La loi a attribué le contrôle de la composition du conseil d’administration
du fonds au syndicat qui est à l’origine de sa constitution. La province est
maillée par un réseau de fonds régionaux, gestionnaires des sociétés de
commandites chargées d’investir dans les projets.
Le fonds de solidarité des travailleurs québécois est à l’origine aussi, en
partenariat avec l’union des municipalités régionales, de la création des comités
des sociétés locales d’investissement dans le développement de l’emploi
(SOLIDE) qui peuvent investir jusqu’à 50 000 $ canadiens sous forme de prêts
participatifs.
III - L’EUROPE
Il serait assez vain de prétendre, ici aussi, à l’exhaustivité. La situation,
l’organisation administrative des pays étant différentes, il serait assez normal que
les dispositifs d’aides aux petites entreprises soient eux-mêmes différents. Il
s’avère cependant que, peu ou prou, les mêmes techniques sont employées.
1
Création d’entreprise : étude internationale - APCE mai 1999. Cf aussi l’intervention de M.C.
Godbout dans « la Revue de la CFDT » n° spécial de décembre 1999 intitulé « nouveau
capitalisme et notion syndicale » (cf. infra chapitre III).
62
L’aide aux TPE, et plus généralement aux PME, existe dans tous les pays
de l’Union européenne, ceux-ci ayant mis en œuvre des dispositifs, depuis
quelquefois fort longtemps. Comme pour la France, il existe des aides ciblées sur
des « types » de population créatrice (ou repreneuse) et des aides générales. Très
souvent, elles prennent la forme d’exonérations de charges, de garanties
d’emprunts. Il existe à peu près partout aussi des aides au conseil, des
formations… De même, à peu près tous les pays ont mis en œuvre des dispositifs
d’aide à la création d’entreprises innovantes ; les « jeunes pousses » sont une
réalité dans de nombreux pays développés. Pareillement, ainsi qu’on le verra, le
système des « pépinières d’entreprises » est d’usage fréquent.
L’organisation administrative des Etats étant ce qu’elle est, selon le degré
de « décentralisation », la part qui revient à l’Etat « central » et celle qui revient
aux collectivités locales diffèrent, on le verra, dans les quelques exemples
présentés ci-après.
1. Aperçu d’ensemble
Le tissu entrepreunarial de l’Union européenne est naturellement dominé
par les plus petites entreprises.
Parmi les dix huit millions d’entreprises du secteur marchand (hors
agriculture) que compte l’Union, 99 % sont des PME. Une autre statistique
portant sur l’année 1997 présentée dans le dernier rapport de la commission,
intitulé « Construire une Europe entrepreunariale », en date du 1er mars 2001,
permet de conclure que 49 % d’entreprises n’avaient pas de salarié et que 41,1 %
des entreprises européennes comptaient de 1 à 9 salariés ; au total 90 % des
entreprises européennes étaient des TPE ou des « micro-entreprises »1.
Chaque pays a mis en place des dispositifs d’aides à la création
d’entreprises, plus ou moins centralisés, selon le mode d’organisation politique
et administratif qui prévaut.
Une étude de l’APCE2 permet d’appréhender l’ensemble des actions des
divers Etats membres. Les outils sont finalement assez proches les uns des
autres : la « panoplie » étant, par définition limitée, ce qui varie est plutôt
l’inclination pour tel ou tel d’entre eux. Ainsi l’Allemagne s’est dotée d’une
capacité d’intervention en matière de financement (essentiellement concentrée
sur le renforcement des fonds propres, l’investissement en recherche et
développement ou encore en matériel) et appuie manifestement la création
d’entreprises technologiquement innovantes. Pour sa part l’Italie a mis en place
un dispositif législatif de grande ampleur d’appui à la création d’entreprises,
notamment en faveur des jeunes créateurs. Tel est le sens d’une loi adoptée en
1986 qui vise à aider les jeunes à créer leur entreprise, principalement dans les
zones à fort taux de chômage. Pour leur part les Etats du Benelux (Belgique,
Pays-Bas, essentiellement) ont mis en place des organismes indépendants
1
Voir notamment le sixième rapport de l’observatoire européen des PME - juillet 2000
2
« Création d’entreprise : étude internationale » - APCE 1999. Voir également l’étude, déjà
évoquée, menée par l’ADIE sur quatre pays européens, à la demande de la DG XII/G de la
Commission.
63
1
Voir à ce sujet un article de M. Philippe Albert - Consultant Algoe - Espèces d’incubateurs - Les
Echos - 13 décembre 2000, qui distingue quatre familles d’incubateurs : ceux de développement
local, les incubateurs entrepreneuriaux, les incubateurs stratégiques, les incubateurs financiers,
chacun développant une stratégie propre.
2
« Les pépinières d’entreprises à travers le monde » OCDE 1999
64
1
ibid
2
« La France face au défi des biotechnologies : quels enjeux pour l’avenir ? » - avis adopté le
7 juillet 1999 sur le rapport de MM. Philippe Rouvillois et Guy Le Fur - Avis et rapport du Conseil
économique et social n° 13 - Année 1999
3
« Les pépinières ... » OCDE op cit.
65
1
« Le revenu » n° 616 - 13 avril 2001
2
ibid
66
1
Obstacles à la création des très petites entreprises dans l’Union européenne – commission
européenne 1999 -
67
1
Précisons que Leader II est une initiative consacrée au développement rural.
2
Conférences européennes sur l’investissement et les petites entreprises en 1990 (Avignon), 1994
(Berlin) et 1997 (Milan).
70
1
On trouvera en annexe le texte de cette charte.
72
D’autres axes, enfin, visent dans la mesure où ils trouveront une (ou des)
application(s) « concrète(s) », à favoriser les petites entreprises par le
développement du recours aux instruments existants en en facilitant l’utilisation.
Ceci est particulièrement vrai dans le domaine financier ou dans celui, très
vaste, du renforcement des capacités technologiques. Enfin, la charte se propose
de renforcer et de rendre plus efficace la représentation des intérêts des petites
entreprises tant au niveau de l’Union qu’à celui des Etats membres.
73
CHAPITRE III
I - LA CRÉATION
Les types de créateurs sont loin d’être uniformes et suivent évidemment
l’activité considérée, les diplômes requis ou la formation/expérience
professionnelle.
La première installation intervient à tout moment de la carrière
professionnelle. Les artisans et commerçants s’installent largement avant 30 ans
et après une expérience professionnelle salariée d’une douzaine d’années. Les
professionnels libéraux («supérieurs » ou « intermédiaires ») s’installent peu
avant 30 ans et après des études longues et des stages professionnels.
Les uns bénéficient d’une entreprise transmise par la famille ou financée
par celle-ci. D’autres rachètent un fonds de commerce ou exercent en location-
gérance (hôtels, cafés, restaurants). Les professions libérales s’installent plus tard
mais leur activité est conditionnée par la détention d’un diplôme (ce qui n’exclut
pas la nécessité de gros investissements comme pour les pharmaciens).
Les professions libérales supérieures (médecins, pharmaciens, professions
du droit, etc..) et les professions libérales intermédiaires (infirmiers, sages-
femmes, etc…) ne sont pas les seules à être soumises à « conditions de
diplômes » (élevés pour les premières à bac + 5 ou plus). Certaines professions
de l’artisanat (coiffure, boulangerie, boucherie et charcuterie) requièrent des
74
1
« Se mettre à son compte et rester indépendant. Des logiques différentes pour les artisans et les
indépendants des services ». Marc-Antoine Estrade et Nathalie Missegue op.cit.
Place de la première installation dans la carrière professionnelle des indépendants :
Age moyen Age moyen Proportion de Durée de
au 1er emploi de la 1ère ceux dont l’expérience
installation l’installation est salariée par les
le 1er emploi (en autres
%) (en années)
Artisans (diplôme de droit) ................ 16,8 27,3 6 11,1
Artisans (diplôme de fait) .................. 17,0 28,0 17 13,3
Autres artisans ................................... 17,5 29,5 16 14,2
Commerçants..................................... 19,3 29,8 20 13,1
Prestataires de services ...................... 19,6 29,8 12 11,6
Hôtel-café-restaurant (HCR).............. 17,3 29,7 12 14,0
Libéraux supérieurs ........................... 26,1 29,4 43 5,8
Libéraux intermédiaires ..................... 20,2 26,2 30 8,5
Ensemble 19 29,2 18 12,4
Lecture : en moyenne, les personnes qui se sont installées au moins une fois comme commerçant ont
commencé à travailler à 19,3 ans et se sont mises à leur compte à 29,8 ans. Pour 20 % d’entre elles,
leur premier emploi était un emploi indépendant. Celles qui se sont installées plus tard, ont eu une
expérience salariée d’une durée moyenne de 13,1 ans.
Champ : ensemble des indépendants.
Source : enquête FQP 1993, INSEE.
2
Ouvrage cité.
3
Ce qui veut dire un diplôme obligatoire
4
On trouvera en annexe à cette étude le parcours qui attend un porteur de projet aidé. On verra qu’il
faut beaucoup de courage et d’obstination pour atteindre le but recherché.
75
de certains sénateurs, de développer une série d’aides (au sens large du terme)
dans un cadre territorial1.
L’ensemble de ces propositions mériterait un examen approfondi. De
même on ne peut qu’approuver la proposition - souvent réitérée - d’établir un
recensement des aides, structures de tous niveaux et d’y associer tous les
partenaires de la création. On peut penser qu’il s’agira d’une des tâches assignées
à la future agence des PME dont la création a été annoncée par le ministre de
l’économie le 16 mai dernier.
1
Proposition de loi présentée par un groupe de sénateurs et initiée par M. J-P. Raffarin, tendant à
favoriser la création et le développement des entreprises sur les territoires cf. doc Sénat n°
254 annexe au procès-verbal de la séance du 9 mars 1999.
2
Avis du Conseil économique et social régional Nord-Pas-de-Calais « développer l’esprit
entrepreneurial dans le Nord-Pas-de-Calais » sur le rapport de M. J-M. Pottier – séance du
24 novembre 2000.
76
B - LA STRATÉGIE DE LA CRÉATION
Il n’y a plus guère de créateur de très petite entreprise (ou de plus
grande…) - qu’il soit conseillé par un professionnel libéral (avocat, notaire ou
encore membre de la profession comptable) ou par l’une des multiples
associations existantes ou par le réseau consulaire ou les collectivités locales -
78
financiers des époux : il est vrai que s’ajoutent à cette ignorance, des
conséquences à terme pouvant pénaliser l’épouse (en général) surtout si cette
dernière ne dispose pas de ressources propres.
Personne non plus ne semble connaître les dispositions de l’article L 215-1
du code de l’action sociale et des familles, disposant que : « il peut être constitué
au profit de toute famille, dans les conditions prévues par la loi du 12 juillet
1909 sur la constitution d’un bien de famille insaisissable et les textes qui l’ont
modifiée, un bien insaisissable qui porte le nom de bien de famille ».
Ce texte acte le principe d’une fraction insaisissable du patrimoine dans
notre droit positif (lequel a, de surcroît prévu le principe d’une fraction
insaisissable du salaire). Cette notion d’insaisissabilité d’une fraction du
patrimoine correspond à celle du patrimoine d’affectation sur laquelle nous
reviendrons1.
La loi de 1909 avait été signalée par Monsieur François Hurel, lors de son
audition2 par la section des Activités productives, de la recherche et de la
technologie du Conseil économique et social. Elle a été intégrée dans le code de
l’action sociale et des familles. Elle n’est, soulignons-le, quasiment pas
utilisée…
1
Le principe de l’unicité du patrimoine connaît des « tempéraments », comme la loi sur les rapatriés,
de décembre 1961, complétée par plusieurs textes dont la loi du 2 juillet 1998 et un décret du 4 juin
1999 (relatif au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée), prévoit
des dispositions suspendant tout acte de disposition des biens du débiteur en cas de procédure
collective (redressement ou liquidation judiciaire), c’est-à-dire qu’elle apporte plus qu’une nuance
à la théorie de l’unicité du patrimoine.
A l’image du « trust » anglo-saxon, la fiducie pourrait être, si elle était introduite dans le droit
français, un procédé légal apportant avantages et souplesse pour un transfert des biens et droits
séparés du patrimoine personnel. Un avant projet de loi consacré à la fiducie existe dans les cartons
de la Chancellerie. Il serait opportun qu’il connaisse un autre sort, pour répondre à la concurrence
des anglo-saxons qui disposent d’instruments juridiques supérieurs aux nôtres sur ce plan.
2
Audition du 4 janvier 2001.
80
1
B. Paranque - Besoins de financement et accès au crédit des PME – « Le monde des entreprises
commerciales, artisanales et de services » n° 13 – septembre/octobre 2000 – Ministère de
l’économie, des finances et de l’industrie.
2
Ce que rappelle le rapport sur la simplification de la création d’entreprises – op. cit.
81
1
« Du créateur d’entreprise au créateur d’emplois – la dynamique du succès » - APCE collection
entreprendre - Janvier 1998.
82
l’avons déjà évoqué, le capital amorçage est apporté par le créateur lui-même ou
son entourage proche, beaucoup plus rarement par des investisseurs privés.
L’étude de l’APCE/Arthur Andersen note à cet égard que les « business
angels », même si leur nombre augmente de façon significative, sont encore trop
peu nombreux dans notre pays. Or « considérés comme de vrais spécialistes, ils
apportent un véritable soutien à la jeune entreprise et leur participation au capital
constitue une garantie pour les investisseurs plus importants. Ils jouent un rôle
considérable dans la création d’entreprises »1.
Le « palier » du « capital d’amorçage » nécessite un investissement dans le
temps d’étude de chaque dossier et donc une « forte spécialisation » technique et
économique au sens large du terme. Il s’agit, au-delà du financement, d’une
activité qui s’assimile à un véritable accompagnement économique qui, dès lors,
doit être rémunéré à sa juste valeur.
Le capital risque connaît un renouveau dans notre pays essentiellement
depuis la création des nouveaux marchés boursiers (nouveau marché, Easdaq…).
Les montants investis ont été multipliés par dix depuis 1995. Les sociétés de
capital risque qui prennent différentes formes dont les fonds communs de
placement à risque (FCPR) ou les fonds communs de placement dans
l’innovation (FCPI), peuvent intervenir au démarrage du projet, mais aussi pour
son développement, voire lors d’une transmission d’entreprise.
L’analyse du capital risque montre que les fonds sont soit très spécialisés
dans les secteurs à la fois les plus porteurs mais aussi les plus risqués :
biotechnologies, nouvelles technologies de l’information et de la
communication, soit généralistes.
Dans le cas des fonds très spécialisés, ils participent activement à monter le
projet et s’apparentent à un « accompagnateur » total (sous la forme de conseil
multiple) autant qu’à un « financeur ». Il en irait différemment des fonds
généralistes.
Dans tous les cas, l’étude de l’APCE/Arthur Andersen relève que la
sélection est forte, sur la base d’un certain nombre de critères parmi lesquels
prédominent ceux à caractère économique ce qui apparaît logique, compte tenu
du type de projet portés.
1.4. Pour un développement de l’épargne de proximité à destination de la
création d’entreprise
On admettra aisément, qu’il s’agisse d’amorçage ou du capital risque, que
les « structures » existantes sont trop peu nombreuses et probablement trop axées
sur un certain type de création et laissent de côté des pans entiers de l’activité
économique.
Aussi est-il nécessaire de réfléchir sur les deux exemples nord américains
évoqués au chapitre II, qu’il s’agisse du recours aux Etats-Unis à l’épargne de
proximité en faveur de la création d’entreprise (moyennant un avantage fiscal
faible consenti aux particuliers plaçant des fonds dans une nouvelle entreprise)
ou dans des fonds communs de proximité ; le dispositif s’est transformé,
1
« Du créateur d’entreprise…». op. cit. et D. de Lapparent et Y. Dupuis. « La création
d’entreprises technologiques » CDC mai 1999.
83
2. Du projet à la réalisation
Une réflexion sur le statut entrepreneurial est à nouveau nécessaire.
Cette question nous renvoie à l’interrogation sur le relatif insuccès de la
formule de l’EURL, issue de la loi du 11 juillet 1985, qui se double du
développement, parfois ambigu, de la forme de la SARL pour des raisons
d’opportunité (essentiellement une meilleure protection sociale).
Pour porter remède à une situation jusque là très insatisfaisante, deux voies
étaient offertes au législateur : soit la forme sociétaire unipersonnelle, soit le
système du patrimoine affecté ; c’est-à-dire la dissociation du patrimoine
personnel d’avec le patrimoine professionnel de l’entrepreneur - et par là
apporter une réponse aux difficultés que suscite le statut juridique et fiscal de
l’entrepreneur individuel.
Avant d’entrer dans plus de détails, il faut rappeler que l’EURL ne connaît
pas un franc succès, probablement à cause du formalisme de sa constitution et du
manque d’attrait du régime fiscal du gérant, même si le statut social est plus
avantageux depuis l’adoption de la loi « Madelin ».
Le dispositif institué par la loi relative à l’initiative et à l’entreprise
individuelle dite loi « Madelin » du 11 février 1994 qui introduit une protection
du patrimoine individuel (cf. art. 47 de la loi) a marqué une avancée puisqu’il
conduit à une amorce de statut de l’entrepreneur et de l’entreprise individuelle.
L’idée de « patrimoine d’affectation » est en débat depuis longtemps :
depuis, en fait, le rapport de la commission « Champaud » en 1978, jusqu’à, par
exemple, la parution du livre blanc de la création d’entreprise en octobre 1998
1
Clément Godbout– Un fonds d’épargne syndical pour l’emploi – « La revue de la CFDT »
n° spécial décembre 1999.
84
1
« L’entreprise individuelle » avis adopté par le Conseil économique et social sur le rapport de
M. Jacques Barthélémy – op. cit.
2
J. Barthélémy « les caractéristiques du patrimoine d’affectation – essai sur un fonds de garantie
économique et de définition juridique de l’entreprise ». s. d.
3
J. Barthélémy op. cit.
85
II - LA PERENNISATION
La pérennisation de l’entreprise, notamment des plus petites d’entre elles,
est d’autant mieux assurée que la formation et/ou l’expérience professionnelle du
créateur est importante. Il s’agit d’une évidence. La pérennisation dépend
également de la localisation de l’activité. On comprendra aisément qu’un
foisonnement d’entreprises concurrentes dans un espace géographique donné
n’est pas un gage de pérennisation. La pérennisation est aussi fonction du statut
juridique choisi (personne physique ou morale).
Cependant, pour autant que la pérennisation soit acquise, rien ne permet de
penser que le développement suivra 1.
On évoquera deux autres points, moins abordés dans le débat sur la
pérennisation de la petite entreprise mais tout aussi importants.
1
APCE – rapport annuel 1998.
86
Cela peut paraître surprenant, car le créateur d’entreprise part d’un projet,
qu’il a finalisé, ce qui lui a permis d’obtenir prêts ou aides. De surcroît, le rôle du
« business plan » est bien de définir une stratégie pour l’entreprise.
Alors que la concurrence est par nature agressive - pour les TPE, elle est
très peu internationale2 - alors que l’entrepreneur doit « se battre » au jour le
jour, sans trouver même le temps d’établir une étude de marché, alors surtout
qu’il se sent cerné par l’évolution, parfois rapide, de l’environnement
économique comme par les changements encore plus rapides des comportements
des consommateurs, il faut regretter qu’il n’ait pas recours aux conseils
nécessaires.
Cela est particulièrement vérifié dans les TPE : plus l’entreprise grandit,
mieux elle sait s’adresser aux conseils privés, considérant, avec justesse, qu’elle
prend aussi une « assurance contre le risque ».
Si, par extraordinaire, le chef d’entreprise prend conseil (finance, gestion,
audit juridique etc…), l’aide demandée concernera un, voire, quelques éléments
propres à la seule entreprise et sa bonne marche (ce qui est évidemment
primordial).
Rien ne le visera lui même (changement de régime matrimonial3,
préservation de biens de famille, engagements de caution personnelle).
Il ne semble pas non plus que les structures qui ont aidé à la création,
continuent à le faire ensuite, ce qui est, après tout, normal.
On a pu évoquer la relative solitude de l’entrepreneur, dès lors qu’il est
lancé « en régime de croisière », alors qu’il aura été aidé (ou du moins qu’il aura
pu l’être) dans la phase de création. A cet égard, le partenariat qui bien souvent
existait ne se manifeste plus, laissant l’entrepreneur à sa solitude.
Il y aurait tout lieu de sensibiliser le créateur/chef d’entreprise à l’intérêt de
ne pas rester isolé à la fois pour mutualiser des coûts qui pourraient s’avérer
excessifs en étant à la charge d’une seule entreprise (conseil, communication,…)
mais aussi pour optimiser certaines actions (achats, logistique, livraisons,…) ou
enfin, pour échanger et partager certaines informations (conjoncture,
marchés,…).
En outre, à un moment plus ou moins proche de la phase de création
l’entrepreneur peut-être appelé à s’entourer d’un ou plusieurs collaborateurs,
selon la vocation de l’entreprise à se développer. Ce moment de la vie de
l’entreprise est crucial. L’entrepreneur se doit de franchir cette étape avec succès
au risque de mettre en péril la vie même de l’entreprise. Le conseil en
recrutement et management s’avère primordial. L’entrepreneur individuel, le
créateur devient employeur et donc gestionnaire de personnel. Dès lors, s’ouvre
un autre champ d’action pour le « conseil » : celui du droit du travail qui s’avère
peu adapté, voire totalement inadapté, aux plus petites structures.
1
O. Chaillot « La stratégie en TPE-PME-PMI » Revue Française du Marketing n° 155,1995-5. cité
par Bertrand Duchéneaut et Muriel Orhan « Les Femmes Entrepreneurs en FRANCE » Editions
Seli Arslan 2000.
2
93 % des TPE ne réalisent aucune vente à l’exportation .
3
Rappelons qu’aucun changement de régime matrimonial ne peut être demandé avant deux années
d’application dudit régime.
87
1
Cf. sur l’accessibilité des PME américaines aux marchés publics, notamment. F. Grignon « Aider
les PME : l’exemple américain » – rapport du Sénat n° 374 – 1996-1997.
88
La première des constatations à faire est que les plus petites entreprises
accédent trop peu aux marchés publics, d’abord, voire essentiellement, par
manque d’information, beaucoup plus que par des difficultés techniques à
répondre à un appel d’offres.
Rien ne permet, en droit, de privilégier telle ou telle « taille » d’entreprise,
alors que, par exemple, un système de préférence - à offre équivalente - existe en
faveur des sociétés coopératives de production, et que de nombreuses circulaires
ministérielles incitent à favoriser l’accès des PME aux marchés publics.
A défaut d’étendre légalement les dispositions en faveur des SCOP aux
plus petites entreprises (une fois celles-ci définies par un certain nombre de
critères), il semble tout à fait possible, comme le souligne le rapport sur « la
simplification », dans le cadre rénové (décret 2001-210 du 7 mars 2001) du code
des marchés publics, d’en faciliter l’accès aux TPE, notamment parce que le
seuil en deçà duquel le « gré à gré » est admis a été relevé et est passé ainsi à
90 000 € (580 000 F)1.
La réflexion du rapport « Bockel » apparaît alors particulièrement
pertinente : « C’est, en réalité, en sensibilisant les acheteurs publics à
l’importance que l’obtention d’un marché peut avoir pour une petite entreprise
en démarrage, qu’il convient d’agir. D’abord, pour éviter que le créateur
d’entreprise, qui - par définition - a peu de références et souvent une situation
financière encore fragile, ne fasse l’objet d’une discrimination négative
systématique, au profit de fournisseurs « établis » et connus du donneur d’ordre.
Ensuite, pour tenter d’obtenir qu’une attention particulière soit portée à leurs
offres, par exemple lorsque le créateur est porteur d’innovations technologiques
intéressantes (on pense notamment aux offres des « start up » d’internet ou de
biotechnologie), ou lorsqu’il propose des services de proximité pour lesquels il
est possible, à une collectivité locale proche, de le mettre à l’essai dans un cadre
limité, sans compromettre l’impératif global de gestion de ses dépenses aux
meilleures conditions ».
D - AMÉLIORER LA TRANSMISSION
Chaque année, plusieurs dizaines de milliers d’entreprises « changent de
main ».
Très souvent ce changement est dû simplement à l’âge de l’entrepreneur. A
cet égard, la pyramide des âges des entrepreneurs de notre pays devrait conduire
à des mouvements très importants dans la décennie qui vient. Rappelons que près
de 700 000 chefs d’entreprises en exercice ont plus de 50 ans, dont 120 000 plus
de 60 ans.
Ces données expliquent à elles seules que la transmission d’entreprises ait
été au cœur des débats du dernier salon des entrepreneurs de février 2001. Il
s’agit donc d’un phénomène assez crucial d’autant que selon les spécialistes une
partie seulement, de ces entreprises serait économiquement reprenable.
1
Le nouveau code des marchés publics entrera en vigueur en septembre 2001.
89
III - LA DISPARITION
A l’encontre de la création d’entreprise, qui a donné lieu, non seulement à
de très nombreuses études et rapports mais encore à une multitude d’actions
ciblées, et notamment par les collectivités locales, qui ont pu ainsi adapter au
mieux les aides et conseils à la demande environnante - l’étude de la survie et
des moyens d’éviter, du mieux possible, les disparitions d’entreprises
commerciales, n’a pas suscité autant d’intérêt.
C’est sans doute parce que, historiquement, les difficultés des entreprises
commerciales (puis agricoles puis artisanales) n’ont été réglées que par la loi.
C’est sous la pression des avocats (forcément, très demandeurs pour leurs
clients), des administrateurs judiciaires (dont c’est le métier) et à la seule
initiative des tribunaux consulaires (et en premier le tribunal de commerce de
Paris) que s’est mise en place la prévention, c’est-à-dire la détection des
difficultés des entreprises, permettant l’usage du mandat ad hoc (création
prétorienne du tribunal de commerce de Paris datant d’avant la seconde guerre
mondiale mais maintenant visée dans la loi de 1994), ou la conciliation.
La loi du 10 juin 1994 et son décret d’application consacrent la renaissance
du règlement amiable et permettent la convocation (confidentielle) du dirigeant
d’entreprise par le Président du tribunal de commerce afin d’envisager les
mesures propres à redresser (à temps…) la situation économique et financière de
l’entreprise.1
Sans entrer dans le détail des procédures, il suffit d’examiner les chiffres
qui ont ainsi permis le sauvetage des entreprises, sans avoir à appliquer la
« grande procédure » de la loi du 25 janvier 1985 (récemment codifiée) laquelle
aboutit à une liquidation judiciaire dans 90 % des dépôts de bilan (déclarations
de cessation des paiements)2.
1
Audition de Monsieur le Président Gilbert Costes, Président du Tribunal de Commerce de Paris,
devant la section des Activités Productives, de la recherche et de la technologie, le 8 février 2001.
2
O. Chaillot « La stratégie en TPE-PME-PMI », Revue Française du Marketing n° 155, 1995-5 cité
par Bertrand Duchéneaut et Muriel Orhan « Les Femmes Entrepreneurs en France » Editions Seli
Arslan 2000.
91
1
La Lettre de l’Observatoire consulaire des entreprises en difficulté – Mairie de Paris – Affec-
chambre de commerce et d’industrie de Paris – décembre 2000.
92
Seuls les comptes des sociétés (de tous types) sont déposés au greffe du
tribunal de commerce - et non les comptes des entreprises en nom personnel.
Or, les TPE exercent, très souvent des activités commerciales et artisanales
en nom personnel et non sous forme sociétaire (pas même sous forme d’EURL).
Cela tient à ce que les artisans, les commerçants privilégient l’exercice de
leur profession, tenant pour contraignantes toutes formes sociétaires.
Il est donc difficile de leur imposer une contrainte supplémentaire, en leur
demandant de déposer leurs comptes aux greffes des tribunaux.
Ce qui fait qu’il est impossible aux tribunaux consulaires d’exercer et
d’organiser une prévention des difficultés pour ces TPE.
De surcroît, ces TPE ne consultent pas ou très peu dès l’apparition des
premières difficultés : à peine leur comptable, en tout cas jamais leur avocat,
même s’ils voient celui-ci pour d’autres problèmes précis.
La seule solution possible paraît être soit une incitation fiscale soit une aide
pécuniaire spécifique des régions ou des villes (exemple des Barreaux de la
Somme), leur permettant de pouvoir consulter un avocat, pour établir un audit
juridique simplifié et d’évaluer au vu des comptes, des dettes à terme ou
exigibles, des poursuites annoncées ou en cours, les solutions adaptées aux
difficultés rencontrées.
Une des remarques les plus surprenantes émise par le rapport des deux
inspections Bercy-Vendôme déposé fin août 1998 (à la suite du rapport
parlementaire) est celle qui s’étonne que l’activité de prévention et de traitement
amiable des difficultés des entreprises relève de l’autorité judiciaire…
C’est un point de vue tout à fait réducteur, voire rétrograde, du bon
fonctionnement souhaité de nos juridictions.
Il faut enfin souligner (à nouveau) que le chef d’entreprise,
particulièrement des TPE, est isolé, et ne prend pas conseil ou cache à son avocat
qu’il éprouve des difficultés : même si nous ne sommes plus sous la législation
que décrit Balzac, demeure la « honte » de l’échec et subsiste l’effondrement
psychologique du dirigeant.
Il est assailli de toutes parts : son personnel lorsqu’il n’a plus confiance en
lui, ses fournisseurs exigent le paiement des marchandises « au cul du camion »
(c’est l’expression en usage), le banquier refuse toute facilité de trésorerie etc.
Cerné de toutes parts, le dirigeant n’est absolument plus à même de trouver
une solution quelconque : c’est là que les solutions du mandat ad hoc ou de la
conciliation, qui demeurent l’affaire de spécialistes, lui apportent l’appui
nécessaire, à un moment donné sur des problèmes précis, appui décisif qui
sauvera l’entreprise.
94
CONCLUSION
ANNEXES
100
101
Principes
En soulignant ces recommandations, nous :
- reconnaissons le dynamisme des petites entreprises et leur aptitude à
répondre aux nouveaux besoins du marché et à fournir des emplois ;
- mettons l’accent sur l’importance du rôle que jouent les petites
entreprises dans la promotion du développement social et régional,
tout en constituant un exemple d’initiative et d’engagement ;
- reconnaissons que l’esprit d’entreprise constitue une disposition
précieuse, productive et utile pour la vie, à tous les niveaux de
responsabilité ;
- rendons hommage à la réussite dans l’entreprise, qui mérite d’être
justement récompensée ;
- estimons qu’un certain degré d’échec est compatible avec l’initiative
responsable et la prise de risques et qu’il doit être considéré
essentiellement comme une possibilité d’apprendre ;
- reconnaissons les valeurs que constituent la connaissance,
l’engagement et la flexibilité dans la nouvelle économie.
102
Lignes d’action
En approuvant la présente Charte, nous nous engageons à agir en nous
inspirant des lignes d’action ci-après en tenant dûment compte des besoins des
petites entreprises.
1.Éducation et formation à l’esprit d’entreprise
L’Europe cultivera l’esprit d’entreprise et les nouvelles aptitudes dès le
plus jeune âge. Des connaissances générales relatives à l’entreprise et à l’esprit
d’entreprise doivent être dispensées à tous les niveaux scolaires. Des modules
spécifiques, consacrés à l’entreprise, devraient devenir une composante
essentielle des programmes pédagogiques au niveau secondaire ainsi que dans
les écoles supérieures et universités.
Nous encouragerons et favoriserons les initiatives entrepreneuriales chez
les jeunes élèves et nous mettrons au point des programmes appropriés de
formation pour les chefs de petites entreprises.
103
1 - Prévenir son employeur social (au CCAS) qu’il veut prendre un registre afin que celui-ci prépare
un contrat d’insertion et le fasse valider par une commission locale d’insertion (CLI). C’est
seulement deux mois après, au retour de son contrat d’insertion par la CLI, qu’il saura si sa
démarche est validée par le dispositif RMI.
2 - Aller retirer des chéquiers-conseils à la Direction du Travail, de l’Emploi et de la Formation
Professionnelle (DDTEFP) pour pouvoir bénéficier d’heures de conseil à prix réduit. Rédiger son
projet avec un organisme de conseil agréé par la DDTEFP (une boutique de gestion par
exemple). Cette démarche est indispensable si la personne veut obtenir l’exonération de
cotisation et ce, même si le projet est prêt à démarrer, car la DDTEFP a une approche très
formelle des dossiers.
3 - Demander à la Mairie un emplacement de vente.
4 – Faire agréer son véhicule par les services vétérinaires en Préfecture. L’agrément du véhicule est
une démarche lourde car le degré d’exigence des services vétérinaires est élevé.
5 – Aller s’inscrire à la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI)
6 – Opter pour un régime fiscal et un mode d’assujettissement à la TVA (Centre des Impôts)
7 – Apporter une attestation d’inscription en Préfecture pour obtenir l’autorisation définitive
d’exercice du commerce ambulant.
8 – Envoyer une attestation d’inscription à la DDTEFP en accord de l’aide pour pouvoir recevoir les
volets d’exonération qui lui permettront d’être exonéré de cotisations sociales au démarrage.
9, 10, 11 - Renvoyer un volet d’exonération à chaque caisse de cotisation (URSSAF, ORGANIC,
CANAM).
Source : ADIE - Etude sur » l’intégration des exclus par le travail indépendant et le micro crédit »
novembre 1999.
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Agriculture : M. BROS
Artisanat : M. GILLES
CFDT : Mme PAULET, M. VANDEWEEGHE
CFTC : M. NAULIN
CGT : M. MANJON
CGT-FO : M. BOUCHET
Entreprises privées : MM. SIMOND, TARDY
Entreprises publiques : M. AILLERET, Mme BOUZITAT
Personnalités qualifiées : MM. FITERMAN, POMPIDOU