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2024 07:31
Théologiques
Comprendre la superstition
Jean-Claude Breton
Éditeur(s)
Faculté de théologie de l'Université de Montréal
ISSN
1188-7109 (imprimé)
1492-1413 (numérique)
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Comprendre la superstition
Jean-Claude BRETON
Faculté de théologie
Université de Montréal
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18. Texe MARRS, Project L.U.C.I.D. The Beast 666 Universal Human
Control System, Austin Texas, Living Truth Publishers, 1996, 224 p.
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Oui, mais...
Ceci dit, la question se profile alors de savoir si l’on n’est pas en
train de verser dans une nouvelle superstition. Abandonner toute
démarche critique à l’égard de la superstition n’équivaut-il pas à
emprunter un chemin en tout semblable à celui traditionnellement
appelé superstitieux? Si le discours officiel enlève à la superstition,
surtout religieuse, son caractère négatif, ne faut-il pas anticiper la
naissance éventuelle d’un nouveau discours superstitieux, sorte de
nouveau « reste », qui vient interroger cette attitude? En mots clairs :
est-ce rationnel et acceptable de ne plus se méfier de la superstition ou
s’agit-il là d’une nouvelle superstition, d’un produit, adapté à la
modernité, du comportement superstitieux le plus ancien?
Car si la superstition constitue un reste, un témoin, d’une époque
passée, il est légitime de penser que le déplacement qui l’a produite
était favorisé et porté par une certaine légitimité. Les déplacements
dans les manières de croire aussi bien que ceux imposés par le déve-
loppement des sciences ont leurs raisons d’être. Si on ne croit plus de
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Enjeux de la recherche
Dès lors que cesse d’exister une opposition convenue, qui servait
à démoniser toute superstition, la question de son existence et de son
sens s’impose avec encore plus d’acuité. Pourquoi la superstition
existe-t-elle, à quoi sert-elle, quel est son rôle dans la vie sociale et
individuelle? Ultimement, mais peut-être aussi en raison de ses rela-
tions originales avec la religion et la science, la question resurgit de
l’apport de la superstition à la recherche du vrai. Dans l’état actuel des
réflexions théologiques et épistémologiques, tenant compte surtout de
la place que ces réflexions ont été amenées à faire aux mythes, aussi
bien en religion qu’en science, l’heure n’est-elle pas venue de se
demander quel est le sens des mythes engendrés par la superstition?
Si la religion et la science semblent parfois être parvenues à rendre
compte, au moins en partie, des fondements de leur discours respectif,
il n’en reste pas moins que le vertige envahit parfois aussi les esprits
tant des théologiens que des scientifiques. Le paradoxe n’en ressort
que plus grand et plus fort. Comment se fait-il que notre âge du savoir
scientifique absolu parvenu à une telle vision critique qu’il consent
parfois à reconnaître la fragilité de certains de ses points d’appui tra-
ditionnels, s’avère fermé et intolérant aux propos du discours qu’il
qualifie de superstitieux? Peut-être est-ce justement en raison du
ferme propos du discours superstitieux de ne pas se livrer à un examen
critique de lui-même et de ses fondements? À la limite la difficulté,
sinon l’impossibilité, du dialogue entre la superstion et la religion ou
la science ne vient-il pas du refus de celles-ci de se soumettre à une
remise en cause radicale? Mais faut-il que tous les discours aient subit
l’épreuve de la critique? N’est-il plus possible dans notre monde de
parler simplement pour exprimer ses émotions, ses sensations et
même ses désirs sans autre souci que de les dire?
S’il est impossible de disqualifier la superstition au nom de
l’absolu du savoir religieux ou scientifique communément accepté,
sauf à commettre une sorte d’abus de pouvoir, ne s’impose-t-il pas de
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RÉSUMÉ
La superstition a acquis une nouvelle signification dans le monde
interreligieux dans lequel nous vivons, un monde qui est passablement
différent de celui de l’ère chrétienne homogène. Elle est aussi étudiée de
manière différente. Plutôt que d’être représentée seulement comme une voie
religieuse déviante, elle est comprise de plus en plus comme un monde de
sens que la science, pas plus que la religion, ne peut atteindre par elle-même.
Cette approche positive de la superstition n’est pas sans poser de nouvelles
questions, l’une étant la difficulté de faire cohabiter sympathie, ouverture et
approche critique. Ce bref article essaie de présenter un survol de la
situation présente.
ABSTRACT
Superstition has gained a new signification in the interreligious world we
live in, which is quite different from the one it had during the homogeneous
christian era. It is also studied differently. Rather than being sketched
mainly as a devious religious way, it is understood more and more as a
world of meaning which science, as well as religion, is not always able to
reach by itself. This positive approach to superstition is however not
without opening new questions, one being the difficulty to mix sympathy
and openness with a critical appraisal. This paper tries to offer an overview
of the present situation.