cours sur la poèsie_080819

Télécharger au format doc, pdf ou txt
Télécharger au format doc, pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 18

LA POÉSIE

Etymologiquement, le verbe grec poiein signifie créer,


elle est ainsi invention. Son rôle est d’évoquer la réalité
de façon créatrice, d’interpréter le réel, ou de faire naître
un univers qui lui est propre, à travers le langage. Il
dispose pour cela de formes diverses.

I LE RÔLE DE LA POÉSIE

1 LA TRANSCRIPTION DU RÉEL
La poésie peut transcrire le réel en décrivant à la
manière d’un tableau, selon la conception d’Horace, le
poète latin qui définit la poésie comme une peinture.
(sensible chez la Fontaine)
La réalité devient « poétique » à travers un langage
particulier. La réalité est plus suggérée que décrite. La
poésie met alors en jeu la sensibilité, l’imagination pour
révéler les réalités cachées (poésie symboliste).
A partir de l’évocation du réel, la poésie peut aussi
chercher à émouvoir la sensibilité du lecteur. Ainsi, elle
présente et déchiffre la réalité sous une forme inattendue
et s’adresse plus à la sensibilité qu’a la réflexion.
La poésie a aussi pour mission la transcription du
monde intérieur. Elle permet en effet au poète de mettre
en forme les sentiments qu’il éprouve : lyrisme,
l’amour, la nature, la fuite du temps. En traduisant
poétiquement ses propres sentiments, le poète
développe des émotions où chacun se retrouve.

2 LA POÉSIE CRÉATION

La poésie peut également créer un univers qui lui est


propre. Cette création nous mène dans un univers
inconnu et le poète devient mage, prophète, devin.
La poésie peut se présenter comme jeu sur le langage.
Le poète se forge des contraintes, s’obligeant à inscrire
son poème dans un cadre formel vigoureux. Il rejette du
coup les conventions de l’écriture : abandon de la
ponctuation (Apollinaire) bouleversement de la syntaxe
et mélange des registres de langue. Le poète est
quelqu’un qui « refuge le langage » pou parler comme
Sartre.
Souffle inspirateur et création, la poésie se donne la
double vocation de transcrire et de créer. C’est grâce au
langage que s’opère cette transmutation.

II LA FONCTION DU POÈTE

Accepté ou rejeté par la société à la quelle il appartient,


le poète joue différents rôles. Mage inspiré par un
souffle divin, déchiffreur de symboles ou prophète
conducteur de peuples, le poète apparaît tant comme
une sorte de prêtre, tantôt comme un être maudit.
Traducteur d’une réalité cachée, le poète et aussi celui
qui se préoccupe de ses semblables car il déteint le
pouvoir du langage. Cet instrument de révélation ou de
création est arme de délibération.

1. LE POÈTE MESSAGER DIVIN

Si l’on se réfère à la tradition platonicienne, le poète est


un être inspiré, doté d’un pouvoir de divination. Il voit
ce qui reste invisible aux autres hommes. Cette
conception reprise par la pléiade, confère au poète un
rôle quasi religieux. Ronsard par les devins, augures et
prophètes. C’est aussi l’idée qui parcourt le XIXe siècle.
Visionnaire selon Hugo, « voyant » selon Rimbaud, le
poète est celui qui passe à travers une forêt de symboles,
établit une relation avec les choses secrètes dont la
réalité n’est que l’apparence. L’affirmation de
Baudelaire : « j’ai périe de la boue et j’en ai fait de
l’or », symbolise ce rôle de magicien et d’alchimiste.
C’est aussi l’orientation du surréalisme qui va plus loin
encore dans l’exploration de l’inconscient.

2. LE MESSAGER OU HÉRAUT

En tant que messager, le poète a une mission. Il


déchiffre l’invisible, voit plus loin et peut guider les
hommes vers le progrès spirituel et social comme
naguère les poètes de la négritude. Le poète est aussi un
guide et un porte-parole qui sait donner formes aux
préoccupations, aux soucis et aux espoirs des hommes.
Il met son art aux services de leur cause.
La Fontaine dans ses fables, Boileau dans ses Satires
mettent en scène avec fantaisie ou ironie une humanité
aussi se corriger en se reconnaissant dans l’image qui
lui est offerte.
Lorsque les événements historiques se chargent de
violence et de haine, il incombe au poète de s’engager.
Témoigner, rassembler, dénoncer, tels sont les devoirs
que s’imposent les poètes engagés. Au péril leur vie, ils
bravent les interdits et les menaces. Ce fut le cas de
Ronsard et d’Agrippa d’Aubigné lors des guerres de
religions. Hugo, au nom du peuple opprimé, essaie
d’abattre, seul contre tous, Napoléon III. Lors de le 2ème
guerre mondiale, les poètes de la résistance (Aragon,
Desnos, Eluard) ont joué ce rôle dangereux en faisant de
leur plume une arme, de leur inspiration un message
unificateur. Le combat de la négritude verra Senghor,
Césaire, Damas jouer un rôle de guide pour les peuples
opprimés, humiliés. Le martiniquais déclare : « Ma
bouche sera la bouche des malheurs qui n’ont point de
bouche, ma voix la liberté de celles qui s’affaissent au
cachot du désespoir. »
Le poète est ainsi celui qui plus que quiconque détient
la maîtrise des mots qu’il utilise pour charmer ou pour
combattre.

3. LE POÈTE MAÎTRE DU LANGAGE

Magicien des mots, le poète déteint l’art de la


composition musicale et des images. I crée cette
sorcellerie évocatrice dont parle Baudelaire. Il fait alors
du langage plus qu’un moyen d’expression mais un
instrument de révélation du monde ou des sentiments.
Ainsi la puissance des mots donne au langage tout son
poids. Il devient dés lors verbe créateur.
La parole est verbe et revêt une dimension mystique.
Cette conception caractérise toute la poésie africaine
surtout celle de la littérature orale.

CONCLUSION

Au delà de son rôle de description, la poésie traduit les


sentiments et les émotions (lyrisme) Il recrée le monde
ou crée un nouveau monde. Egalement, on se sert de la
poésie pour défendre des idées politiques ou sociales.
Avec cette dernière conception, le poète apparaît
comme guide, messager mais aussi créateur. Vu ces
différentes fonctions, deux grands tendances se
dégagent en poésie, celle de « l’art pour l’art » et celle
de la poésie engagée.
LES GRANDES TENDANCES POETIQUES
DEPUIS LE MOYEN-AGE

 Du Moyen-Age au XVIII e siècle

La période qui précède le XVIe siècle est


caractérisée par une poésie qu’on peut appelée orale. Du
XI au XVe Troubadours (Sud) et Trouvères (Nord)
allaient de châteaux en châteaux pour dire leurs poèmes.
Ils exaltaient dans « les chansons de geste » les exploits
de guerriers ou les amours chevaleresques.
A la fin du Moyen Age, apparaissent des formes
fixes : lais1, rondeau2, ballade3.
On doit à F. Villon (1431-1463) les premières
expressions d’un lyrisme moderne, une poésie inspirée
par les sentiments personnels.
Au XVIe siècle, les humanistes de la Renaissance,
ceux de la Pléiade, luttent contre l’appauvrissement de
la langue. Ils renouvellent la poésie en empruntant aux
anciens leur modèle.

1
Les lais narratifs sont des poèmes abrégés, en octosyllabes suivis, à rimes plates, prenant pour sujet une
aventure merveilleuse, qui se rattache en général aux légendes arthuriennes ou au cycle de la Table
Ronde. On les disait en s’accompagnant de la harpe ou de la rote.
2
Le rondeau est un poème à forme fixe ancien comportant trois strophes isométriques construites sur deux rimes,
avec des répétitions obligées et se fermant sur lui-même. Ce qui est à l’origine de son nom. Lié à l’origine à la
chanson et à la musique, le rondeau est léger et souvent badin. C’est une forme souple et virtuose qui utilise
surtout l’octosyllabe et parfois le décasyllabe en tercet, quatrain ou quintil, et qui présente diverses dispositions
aux dénominations pas toujours éclairantes. Apparu au XIII ème siècle et modifié au XV et XVI siècle, il est
rejeté par la Pléiade et ne perdure guère au-delà du XVII ème siècle.
3
Petit poème de forme régulière, composé de trois couplets ou plus, avec un refrain et un envoi. « La
Ballade des Pendus » (de Villon). Poème de forme libre, d’un genre familier ou légendaire.
Le XVIIe siècle, voit la poésie baroque privilégiant le
lyrisme. C’est une poésie diverse qui mêle préciosité et
réalisme.
Au XVIIIe siècle, le culte de la raison des Lumières
entraîne, une désaffection pour la poésie, elle est alors
peu pratiquée.
 Le XIXe siècle : Innovations et ruptures
 La révolution romantique
Au lendemain de la révolution industrielle, toute
une génération de jeunes artistes révoltés rejette le
modèle de société qu’on lui propose.
Ils ont le sentiment « d’être venus trop tard dans un
monde trop vieux ». Pour échapper à ce « mal du
siècle », ils s’évadent dans le rêve. Leur poésie porte la
marque profonde de leurs relations difficiles avec le
monde : obsédés par la fuite du temps, ils se réfugient
dans la nature. L’amour (heureux ou malheureux) est
aussi un des thèmes de leur lyrisme.
Alfred de Musset (1810-1857) en véritable « enfant du
siècle » brûle sa vie par les deux bouts. Il jette un regard
pessimiste sur le monde. La souffrance est la véritable
source de sa poésie.
L’inspiration d’Alphonse de Lamartine (1790-
1869) est aussi personnelle : fuite du temps, inquiétude
religieuse… L’évolution de sa poésie reflète celle de ses
engagements sociaux et humanitaires. Dans Jocelyn
(1836), il propose comme modèle un héros attentif à la
misère du peuple.
Le jeune chef de l’école romantique est Victor Hugo
(1802-1885). Il impose une idée nouvelle de la poésie,
une poésie de la liberté : libération des formes. La
poésie devient un engagement au service de l’humanité.
Le poète a une « fonction », une mission : guider les
hommes.
Une réaction anti- romantique : le Parnasse
Quand le romantisme se perd dans les nuages du rêve et
se dégrade en sentimentalisme outrancier, Théophile
Gautier (1811-1872), se déclare énergiquement pour
« la Beauté, rien que la beauté », sans considération de
morale ou d’utilité. Sa recherche d’une poésie à la
forme parfaite annonce les poètes parnassiens. Leur
poésie est fondée sur le minutieux travail du poète
artisan : « sculpte, lime, cisèle » (l’Art, Gautier).
Leur chef, Leconte de Lisle (1818-1894), méprise le
lyrisme romantique. Il évoque les civilisations barbares
du passé, ou des pays exotiques.
Baudelaire (1821-1867) se sent d’abord proche des
parnassiens et recherche une beauté idéale à travers la
perfection formelle. Mais sa conception de l’art est plus
ambitieuse. Pour lui, la poésie est la clef de la
connaissance du monde. Elle permet de pénétrer le sens
caché des choses. Par l’imagination, le poète dépasse la
réalité immédiate, fugitive, pour atteindre la
« surnature ».
Le symbolisme contre le parnasse
Les poètes symbolistes réagissent à la fois contre les
exigences formelles des parnassiens et les excès du
naturalisme d’Emile Zola. Il s’agit de dépasser les
apparences naturelles des choses et de faire apparaître
l’Idée derrière les objets.
C’est au moyen de « correspondances », par des images
concrètes, des sonorités expressives, des rythmes qu’on
suggère plus qu’on ne décrit.
C’est par le jeu des correspondances entre le visible et
l’invisible, les symboles, que l’on peut passer de notre
monde imparfait à la révélation des beautés d’un monde
supérieur.
Stéphane Mallarmé (1842-1898) rêve de donner au
langage toute sa puissance et cultive l’hermétisme.
Paul Verlaine (1844-1896) recherche la nuance dans
une poésie en demi-teinte. Il réussit à rendre le décalage
entre rêve et réalité.
Quand Rimbaud (1854-1891) effectue sa révolution
poétique, il considère la poésie comme un moyen de
dénoncer le monde grâce au pouvoir des visions. Il
juxtapose des images insolites pour détourner,
renouveler la langue par « une alchimie du verbe ». Il
abandonne la rime et les vers réguliers et invente le vers
libre (Les Illuminations, 1873-1875)
Puis le symbolisme décline, victime de ses excès. Les
poètes veulent désormais faire entrer dans leurs poèmes
la modernité du XXe siècle avec ses progrès
technologiques et la mondialisation des échanges.
 XX e
siècle :
Recherches, révoltes, résistances
 « L’esprit nouveau »
En 1913, Apollinaire (1880-1918) écrit : « A la fin,
tu es las de ce monde ancien » (Zone, Alcools, 1913).
Les références au monde moderne sont nombreuses :
« la tour Eiffel, l’aviation … ». La forme est aussi
moderne : Abandon de la ponctuation, irrégularité des
vers. Les Calligrammes, à la fois poèmes et dessins,
marquent la variété et la fantaisie de l’imaginaire
poétique.
Inventé par Tristan Tzara (1896-1963), le
mouvement Dada rejette une civilisation dont les
valeurs ont permis les horreurs de la Grande guerre.
Il refuse toutes les références traditionnelles, normes
sociales esthétiques, culturelles, religieuses (l’église) :
« Je détruis les tiroirs du cerveau et ceux de
l’organisation sociale » Manifeste Dada 1918.
Dada ouvre la voie au surréalisme dont le chef de file
est André Breton (1896-1966). Les surréalistes veulent
instaurer de nouvelles valeurs. Ils se révoltent contre la
condition de l’homme qu’ils prétendent libérer de la
dictature de la raison. Influencés par Freud et la
psychanalyse, ils explorent les forces de l’inconscient,
la pratique de l’écriture automatique. Il s’agit de libérer
le langage poétique pour libérer l’esprit.
Aragon, Desnos, Eluard mettent leur poésie au service
de la Résistance.

Conclusion

Les différentes tendances ont apporté de grands


changements en poésie. La grande mutation se note à
partir du XIXe siècle. Sans doute l’apport des avancées
techniques et scientifiques y est pour quelque chose.
C’est d’ailleurs pourquoi, le XX e siècle marquera
également une tendance liée à l’esprit de la modernité
LA POÉSIE NEGRO-AFRICAINE
D’EXPRESSION FRANÇAISE

L’esclavage et la colonisation, véritables entreprises


mercantiles et civilisatrices, ont laissé des conséquences
considérables en Afrique et dans le monde Noir. Les
premiers intellectuels noirs, parce que plus avertis, vont
élever la voix pour sortir leurs frères de la situation
désastreuse dans laquelle les confinait l’occident. Ainsi,
partie de la diaspora, la poésie nègre connaîtra un écho
retentissant en Afrique et infléchira sur la marche des
peuples noirs asservis vers la libération.

I LES ETAPES

Les ravages causés par l’assimilation cultuelle


amènent les noirs américains à réagir. La négro-
renaissance de Harlem regroupait Langston Hughes,
Claude Mac Kay, Countee Cullen. Ce mouvement
luttait pour l’amélioration de la condition des noirs aux
Etats-Unis. Mais le mouvement va rapidement connaître
un échec.
Aux Antilles, les premiers poètes se sont difficilement
départis du modèle des maîtres. Cette imitation des
écrivains du XIXe siècle sera éphémère.
Avec Etienne Léro, l’impulsion était donnée et son cri
allait être repris plus tard par Aimé Césaire, Léopold
Sédar Senghor, Léon Gontran Damas, Ousmane Socé
Diop regroupés autour de L’Etudiant Noir. Senghor et
ses amis s’efforcent de redécouvrir la singularité du
monde noir à travers le souffle poétique.
Le premier à emboucher la trompette fût le
guyanais, Léon Damas qui chante dans Pigments, 1937,
sa nostalgie du passé avant de clamer sa révolte
d’assimilé et de « blanchi ».
En 1939, Cahier d’un retour au pays natal faisait écho
au cri de Damas. Après avoir démystifié le côté
pittoresque des îles, le poète antillais procède à une
prisse de conscience du Noir, humilié, submergé dans
une culture qui nie sa personnalité. Il se révolte contre
les fausses valeurs de l’occident et exalte les valeurs
nouvelles de la Négritude.
Suite au répit imposé par la guerre, en 1945 L. S.
Senghor fait entendre sa voix avec Chants d’ombre,
suivi d’Hosties noires, trois ans après. Senghor
entreprend dans ses œuvres un pèlerinage au Royaume
d’enfance. Enracinée dans le passé, cette poésie ne
passe pas sous silence la souffrance de l’exil, de la
solitude et de la haine. Pourtant le poète veut pardonner
les offenses de cette France et réaliser la symbiose des
différences.
A la même époque, le poète malgache, Jacques
Rabemananjara achève Ansta en prison, hymne
patriotique dédié à la liberté.
En 1948, l’Anthologie de Senghor propulse
devant le grand public les poètes noirs. La préface de
Jean Paul Sartre, Orphée Noir, finit de consacrer le
mouvement de la négritude et le caractère vivant de
cette réalité.
La décennie qui mène aux indépendances a été
moins féconde pour les poètes. La deuxième génération
de poètes noirs de langue française ne tardera pas à se
faire voir. René Depestre, Tchicaya U’Tansi témoignent
du recours de la poésie pour dire leur espoir et leur
angoisse.
II THÈMES

L’exploration du passé

La poésie nègre sera un voyage aux sources


ancestrales. Le maître blanc en conquérant exalte les
valeurs de l’occident ; les noirs vont à la redécouverte
de leur passé. Au-delà de ce passé revisité, ils vont
surtout tenter de se libérer par la poésie.

La révolte

Lorsque le passé n’arrive pas à compenser les


souffrances du présent, alors la poésie devient cri et
arme de combat. L. S. Senghor s’écrie : « /…/je
déchirerai les rires banania sur tous les mûrs de
France. » dans Hosties Noires.
Le cri est d’abord refus de l’assimilation qui conduit à la
revendication passionnée de la Négritude. Pour
Senghor, elle est à la fois enracinement dans les valeurs
du passé et contribution au monde de l’universel.
Plus coriace et plus amer, Césaire dénonce la
situation désastreuse des Antilles et décide d’être la voix
de son peuple opprimé : « Ma bouche sera la bouche des
malheurs qui n’ont point de bouche, ma voix la liberté
de celles qui s’affaissent au cachot du désespoir. »

La promesse de l’avenir
Avec les indépendances, le silence des grands est à
peu près complet. Une nouvelle génération prend le
flambeau sur une note d’angoisse et d’espoir. Le groupe
de René Depestre, dans un discours violent par moment,
se sent résolument tourné vers l’avenir à bâtir. Ils ne
manqueront pas aussi de dénoncer les injustices mais
leur appel à une unité de l’Afrique est pressent.

Les poètes de la cité

Victor Hugo se prenait pour « l’écho sonore » et


le guide du peuple ; en Afrique et dans la diaspora, la
poésie entreprend de chanter la beauté, les luttes du
peuple. La démarche du poète ne se sépare pas donc de
sa mission politique et sociale. Porte-parole et éducateur
du peuple, il assume une fonction déterminante dans la
cité car il est engagé dans un combat pour les jours
meilleurs.
Mais face aux enjeux politiques, le poète doit
maintenir l’exigence du langage. Sans cette disposition
son engagement risque de nuire à la qualité de sa poésie.

Négritude et surréalisme

Le rejet de l’occident et de ses valeurs surannées,


amène les chantres de la négritude à chercher un style
qui leur est propre, exprimant la spontanéité et la liberté
nègre. Ces dernières rappellent à bien des égards
l’automatisme surréaliste. Ainsi, beaucoup de critiques
comme Claude Roy considèrent les nègres comme les
descendants authentiques des Parisiens Villon, Voltaire,
Hugo…Lorsque Sartre écrit dans Orphée noir : « Le
surréalisme, mouvement poétique européen, est dérobé
aux européens par le Noir qui le détourne contre eux et
lui assigne une fonction rigoureusement définie. », il ne
nie pas l’influence que les écrivains africains ont subie.
Mais à y regarder de près, cette similitude dans
l’écriture n’est que coïncidence de l’histoire.
La position de Césaire

Aimé Césaire rencontre André Breton bien après


Cahier en 1941. mais il connut le mouvement surréaliste
à travers la revue Légitime défense en 1932. il
préconisait l’adoption sans réserve de ce mouvement.
Bien qu’il ait lu avant et pendant la rédaction de Cahier
les œuvres surréalistes, il faut attendre la rencontre
d’André Breton pour qu’il se livre à l’automatisme
verbal. Cette rencontre est plutôt une occasion qu’une
véritable influence même s’il y a des traces certaines
d’écriture automatique : entier abandon aux mots, à leur
enchaînement hasardeux.
Césaire récuse cette accusation avec force : « Je n’ai
pas voulu être disciple. J’ai spécialement apprécié
Breton et Eluard. Ma grande découverte a été
Lautréamont et Rimbaud. Autrement dit les surréalistes
n’ont pas été mes pères, j’étais plutôt leur compagnon
attardé [...] J’ai plutôt trouvé une confirmation, des
précisions de ce que je pensais. »

La position d Senghor

Dans la postface de Ethiopiques, L. S. Senghor,


d’entrée de jeu, se veut précis : « si j’écris ces lignes,
c’est là une suggestion de certains critiques, de mes
amis. Pour répondre à leurs interrogations et aux
reproches de quelques autres qui somment les poètes
nègres, pace qu’ils écrivent en français, de sentir
« français », quand ils ne les accusent pas d’imiter les
grands poètes nationaux. Tel me reproche d’imiter
Saint John Perse et je ne l’avais pas lu avant d’avoir
écrit les Chants d’ombres et Hosties noires. » il
poursuit : « Tel reproche à Césaire de le lasser par son
rythme de tam-tam, comme si le propre du zèbre n’était
pas de porter des zébrures. En vérité, nous sommes
comme les lamantins, qui, selon le mythe africain, vont
boire à la source ». L’enfant de Joal ne nie pas
l’influence mais quand il s’agit de trouver des maîtres
c’est loin d’Europe qu’il faut chercher. « Si l’on veut
nous trouver des maîtres, il serait plus sage de les
chercher du côté de l’Afrique. »

Conclusion

La révolution du groupe de la négritude a diffusé


des paroles africaines en langues européennes mais dans
un style nègre. Même si la poésie nègre porte en elle des
tendances qui rappellent l’occident, elles ne sont, peut-
être, que l’expression d’une universalité. Ainsi, la
révolte des noirs trouve un écho chez les surréalistes.
D’ailleurs ils se dressent contre le même ennemi :
l’occident impérialiste.

Vous aimerez peut-être aussi