Options 3
Options 3
Options 3
Les stratégies rendues possibles par les options sont nombreuses ; on se contentera
d’en citer quelques-unes que l’on peut mener grâce à la combinaison de plusieurs
options, ou encore avec un mélange de produits dérivés et de produits primaires. En
ce qui concerne les stratégies financières fondées sur des anticipations, il faut garder
à l’esprit que les gains qui vont être décrits sont pertinents seulement si le marché
dans son ensemble ne converge pas vers les mêmes opinions, car sinon le prix des
instruments financiers mis en œuvre refléterait intégralement les prévisions et ne
permettent pas de faire beaucoup de bénéfices. Comme pour les produits financiers
primaires, une anticipation n’est intéressante que si elle est innovante, si les options
n’ont pas encore pris en compte les mouvements futurs de prix.
Rappelons qu’avec une seule option, call ou put, les gains dépendent de ce que
deviendra le prix du sous-jacent à l’échéance comme indiqué par les schémas suivants :
Ce sont les quatre briques élémentaires pour construire les stratégies présentées
maintenant. Dans ce chapitre, pour alléger les notations on négligera le facteur
temps en approximant le facteur de capitalisation b à 1.
Section 1
Cette stratégie est aussi appelée « bull spread » ou « spread haussier ». Il s’agit de
mettre à profit un certain type d’optimisme sur l’évolution du prix du sous-jacent,
en anticipant une hausse de prix qui devrait être assez limitée ; autrement dit la
prévision est celle d’une hausse seulement modérée du prix.
Certes, l’achat d’un call permet de bénéficier de cette anticipation si elle s’avère
exacte, mais le call fait plus que cela puisqu’il fait bénéficier aussi l’acheteur d’une
forte hausse du prix, alors que cette hypothèse n’est pas considérée comme plausible.
Une meilleure stratégie peut être élaborée pour correspondre plus finement à l’anti-
cipation, car il s’avère possible de ne pas subir le coût intégral du prix du call.
La courbe de gain attendue est celle du graphique ci-contre, où l’on pose que
le prix actuel du sous-jacent,
par exemple une action, est de
100 € (trait pointillé vertical) : les
gains croissent jusqu’à un maxi-
mum pour un prix de l’action à
l’échéance de 140 €, puis restent
élevés mais sans s’accroître par
la suite. En contrepartie de cette
limite aux gains, la stratégie sera
moins coûteuse en cas d’erreur
complète d’anticipation, lorsque
les prix baissent au lieu de croître.
La stratégie d’écart haussier
consiste à prendre position sur
deux options. Avec un prix du
sous-jacent S0 aujourd’hui de
100 €, si l’anticipation est une
hausse probable du prix ne dépassant pas 140 €, la stratégie à mettre en œuvre
consiste à acheter un call à la monnaie (on choisit donc une option de prix d’exercice
égal à 100 €) et simultanément à vendre un call de prix d’exercice de 140 € et de
même échéance. La vente de cette dernière option est l’élément qui permet de
réduire les coûts, puisqu’une prime est perçue dans tous les cas, sachant que les
632 Chapitre 23.
pertes éventuelles de ce dernier call sont compensées par les gains du premier call
à la monnaie.
Le graphique ci-contre
décompose la courbe de
gain à l’échéance pour un
acheteur d’écart de call, en
tant qu’addition de deux
produits.
Pour connaître le gain
du portefeuille, on addi-
tionne les courbes de gains
de chaque produit.
À gauche du point cor-
respondant au prix d’exer-
cice 100 on additionne
deux constantes : la prime
positive que l’on reçoit par
la vente du call 140, et en
négatif la prime que l’on a
payée pour l’achat du call
100. Dans la deuxième par-
tie de la courbe, lorsque le prix du sous-jacent à l’échéance est compris entre 100 et
140, on additionne sur l’axe des ordonnées un segment de droite de pente + 1 (le
call 100) et une constante – de pente 0 – (le call 140 vendu et qui n’est pas exercé
dans cette zone), ce qui donne un segment de droite de pente + 1. À droite du
prix d’exercice 140, on additionne un segment de droite de pente + 1 (le call 100
acheté) à une droite de pente –1 (le call 140 vendu), ce qui donne un segment de
droite de pente 0.
Un graphique donne en général une bonne intuition, mais peut ne pas tout
repérer ; il est nécessaire de vérifier analytiquement le raisonnement définissant les
gains et les pertes. Il faut prendre soin de séparer les cas en fonction de la position
du prix du sous-jacent – au moment de l’échéance commune aux deux produits
– par rapport aux prix d’exercice des différentes options, ici on a 2 prix d’exercice qui
séparent en 3 cas le prix du sous-jacent à l’échéance. La dernière ligne du tableau 2
indique le résultat total de la stratégie.
Les stratégies sur options 633
On a ainsi vérifié que la dernière ligne qui décrit les gains du portefeuille présente
trois segments de droite, le premier ne fait pas apparaître le prix du sous-jacent, c’est
une constante de pente 0 par rapport à la variable S ; le deuxième de pente + 1 ;
et le dernier de pente 0. De plus, on montre que ces segments se raccordent sans
discontinuité. Au prix frontière de 100, la colonne de gauche est au même niveau
que la colonne centrale du tableau. Et au prix frontière de 140, la colonne centrale
atteint le même niveau que la colonne de droite du tableau.
Section 3
– PP100 + PP60
portefeuille – PP100 + PP60 + 40 – PP100 + PP60
– (S – 100)
Section 4
Le combo
Pour ne faire exactement aucune perte dans la zone centrale, on doit avoir
PC140 – PP100 = 0. Cela est réalisé soit en fixant la partie gauche de la zone centrale
(ici 100) et en éloignant suffisamment le prix d’exercice du call de manière à rendre
la prime de cet instrument suffisamment grande, soit en fixant la partie droite de
la zone centrale (ici 140) et en éloignant suffisamment le prix d’exercice du put.
Section 5
Prenons un exemple pour décrire l’objectif recherché par cette stratégie. Supposons
que soit envisagé un procès à Google et que vous ayez cette information de façon
personnelle. L’information particulière en votre possession est que le procès va avoir
lieu ; en revanche vous n’avez aucune information sur l’issue du jugement qui sera
prononcé : la seule chose que vous sachiez est que si Google gagne le procès, sa
position sur le marché sera confortée et le cours des actions va croître ; en revanche
si Google perd le procès, la société devra verser des amendes ou indemnités et donc
les concurrents seront en meilleure position et le cours de l’action Google
baissera.
Il est possible de tirer profit de cette
seule information avec la stratégie de stel-
lage. En fait, l’acheteur d’un stellage
anticipe une forte volatilité du prix du
sous-jacent, c’est-à‑dire qu’il pense que
ce prix va augmenter ou diminuer forte-
ment, mais qu’il est peu probable que le
prix reste stable. La courbe de gain recher-
chée correspond par exemple à la forme
décrite par le graphique.
Un stellage résulte de l’achat simultané
d’un call et d’un put de même échéance,
tous deux à la monnaie. Sur le graphique
ci-contre sont tracées les courbes de gains
nets à l’échéance du call et du put, ainsi
que celle du stellage.
Analytiquement, on doit séparer deux
cas en fonction de la position du prix du
sous-jacent – au moment de l’échéance
commune aux deux produits – par rap-
port au prix d’exercice. Les gains sont les
suivants :
640 Chapitre 23.
1) achat de call – PC – PC + S – E
2) achat de put – PP – S + E – PP
portefeuille (– PC – PP + E) – S (– PC – PP – E) + S
Un procès est anticipé avec des enjeux moins importants que précédemment
en termes de sanctions possibles. Par exemple, on a l’impression qu’en France les
fabricants de meubles se sont entendus pour ne pas proposer au public des articles
contenant des matières premières aux normes plus saines pour la santé. Si les autorités
de la concurrence se saisissent de la question, peut-être des amendes limitées seront
infligées aux participants à cette entente qui va à l’encontre de la libre concurrence.
Si l’anticipation s’avérait bonne, on souhaite une courbe de gain similaire à celle
du stellage, mais si le procès n’a pas lieu on veut perdre moins d’argent qu’avec le
stellage, quitte à limiter les gains en cas de procès. L’incertitude provient de l’exis-
tence ou non du procès, ou encore peut résulter du délai du verdict, car si l’échéance
des options tombe avant le procès, il n’y aura pas encore de mouvement de prix.
Une différence avec le stellage est que l’on anticipe un mouvement de prix mais
sans croire à des mouvements d’une amplitude extrême.
Le papillon résulte donc
d’une stratégie analogue à celle
du stellage, si ce n’est qu’en cas
d’erreur d’anticipation, c’est-
à‑dire si la volatilité se trouve
être faible, la perte sera plus
faible.
Comme il n’existe que peu
de repas gratuits en finance, cet
avantage est compensé par un
inconvénient : le gain sera plus
faible en cas de volatilité très
forte. Le papillon présente la
courbe de gain décrite par le
graphique ci-contre.
Un papillon est un stellage assorti de deux options supplémentaires : une vente de
put de même échéance et de prix d’exercice 60 € plus faible que le prix du sous-jacent
(100 €), et une vente de call de même échéance mais de prix d’exercice 140 € plus
élevé que les 100 €. Le graphique ci-contre indique la décomposition de la stratégie
642 Chapitre 23.
– PC100 + – PC100 +
1) achat de call 100 – PC100 – PC100
(S – 100) (S – 100)
+ PP60 +
2) vente de put 60 + PP60 + PP60 + PP60
(S – 60)
– PP100 – – PP100 –
3) achat de put 100 – PP100 – PP100
(S – 100) (S – 100)
+ PC140 –
4) vente de call 140 + PC140 + PC140 + PC140
(S – 140)
Le « long butterfly » est la stratégie symétrique : elle est gagnante quand le prix
sous-jacent évolue peu. Elle est construite en inversant achat/vente de la stratégie
« short ».
Section 7
Le strangle
Tableau 7 : Solde financier à l’échéance de l’achat d’un put 60 et d’un call 140
Le split-strike (« collar »)
Remarque : le même collar pourrait être construit sans achat du sous-jacent, mais
avec deux call, comme indiqué dans le tableau 9.
Tableau 9 : Solde financier à l’échéance de l’achat d’un call 80, vente d’un call 120
Sous-jacent et call
On s’intéresse à un portefeuille
composé du sous-jacent et d’une vente
de call à la monnaie (le prix du sous-
jacent est égal à 100 €) ; la courbe de
gain d’un tel portefeuille est tracée
dans le graphique ci-dessous.
Ce portefeuille présente une courbe
de gain analogue à celle de la vente
d’un put à la monnaie. Autrement dit,
il est possible de synthétiser une vente
de put, même si ce produit financier n’existait pas, à partir du sous-jacent et d’un
call. Le tableau ci-dessous confirme analytiquement cette propriété.
Les deux types d’options sont donc liés. On a l’intuition que les prix d’un call ou
d’un put ne peuvent être indépendants, ce que l’on démontrera dans le chapitre
suivant.
Section 10
L’assurance de portefeuille
Indice boursier
Le portefeuille doit évoluer de façon positive avec une référence (le « sous-jacent »,
par exemple un indice boursier), et fournir une rentabilité minimum positive dans
tous les cas, même lorsque la rentabilité de la référence devient négative, en cas de
baisse de la bourse.
La mise en place de cette stratégie implique des calls et des obligations (ou
alternativement des actions, des obligations et des puts).
Préalablement à la construction de ce portefeuille, remarquons que l’achat de call
sans obligations ne suffirait pas : en situation de non-exercice, la prime serait payée
de toute façon et produirait une rentabilité du portefeuille négative. Inversement,
l’achat d’obligation sans achat de call garantirait bien un rendement minimum
constant, mais ne permettrait pas de suivre les plus-values du sous-jacent dans
650 Chapitre 23.
Indice boursier
Application
a) Position du problème
Vous voulez proposer à la clientèle de votre banque : un fonds de placements
d’une durée fixe 8 ans qui garantit à cette échéance une rémunération minimale du
capital initial de 1,0 % l’an, plus un certain pourcentage de l’évolution du marché
Les stratégies sur options 651
boursier (mesurée par l’évolution d’un indice boursier) si cette évolution est positive,
sans subir une éventuelle baisse de la bourse.
L’environnement financier est le suivant : les coûts de transactions sont négli-
geables et on ne tient pas compte des frais de gestion.
• Le taux de rentabilité interne des obligations d’État zéro-coupon de maturité
8 ans est de 4,00 %.
• L’option d’achat (call) à l’européenne à la monnaie dont le sous-jacent est
l’indice boursier, d’échéance 8 ans, à une prime aujourd’hui égale à 38,77 %
de l’indice ; dans ce contrat la valeur d’un point d’indice est de 1 €. Ce call
permet donc en tant qu’acheteur d’avoir en cas d’exercice à l’échéance I8.1€
(I8 est le niveau l’indice boursier dans 8 ans) en payant I0.1€. La côte de l’indice
boursier aujourd’hui est I0 = 100 points.
Il s’agit de déterminer le pourcentage maximum de l’évolution de l’indice boursier
qu’il est possible de proposer.
b) Solution
Le portefeuille d’un montant initial W0 de 10 000 € est composé d’obligations
zéro-coupon et d’achat de calls sur indice boursier.
La première étape de l’ingénierie financière consiste à trouver la proportion α du
capital initial qui doit être investie en obligations, ce minimum sera la rémunération
effective du fonds si les calls ne sont pas exercés.
Les obligations doivent être achetées dans une proportion telle que la valeur
finale du portefeuille corresponde à la rémunération garantie de 1,0 % l’an, sachant
la partie complémentaire de la richesse initiale est utilisée pour l’achat des calls qui
peuvent n’entraîner éventuellement aucun gain. Compte-tenu de la rémunération
des obligations, on doit avoir une proportion investie en obligations égale à la valeur
finale de ce qui est promis comme minimum :
α ⋅ W0 ⋅ (1 + 4,00 %)8 = W0 ⋅ (1 + 1,0 %)8
d’où : α = (1 + 1,0 %)8/(1 + 4,00 %)8 = 79,12 %
La valeur en euros des calls que l’on peut acheter résulte de la somme non utilisée
pour l’achat de ces obligations, soit 20,88 % . W 0.
Le nombre nc de calls achetés est ce montant disponible divisé par le prix unitaire
du call :
20,88%×W0 W0
nc = = 53,8%×
38,77%×I0 ×1€ I0 ×1€
Finalement, la valeur du portefeuille à l’échéance est égale à la somme de la
valeur finale des obligations et des gains éventuels procurés par les calls :
W8 = 79,12 % ⋅ W0 ⋅ (1 + 4,00 %)8 + 53,8 % ⋅ W 0/I0 ⋅ 1 € ⋅ Max {0, I8 ⋅ 1 € – I0 ⋅ 1 €}
652 Chapitre 23.
Un fonds de placements garanti est donc une stratégie possible. Avec les hypo-
thèses numériques que l’on a posées, le fonds offre une rémunération fixe de 1,0 %
l’an avec éventuellement un gain supplémentaire de 53,8 % de la progression de
la bourse appliquée au placement initial total, si cette progression est positive (ou
un peu moins si le gérant se réserve une marge commerciale). Le pourcentage de
participation à l’évolution positive de la bourse dépend de l’ensemble des para-
mètres : durée avant la sortie du fonds, taux des obligations, prime du call et du
choix commercial du niveau de rémunération minimum proposé.
Conclusion du chapitre