Finclusion To Fintech FR
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et nouvelles technologies
L’Institut Helix a lancé le projet en 2013 et a réalisé depuis lors plus de 31 500 entretiens avec des agents dans divers pays,
fournissant des évaluations à plus de 40 réseaux d'agents de premier plan. Bien que nos études visent principalement à
fournir des informations de marché aux fournisseurs de services financiers digitaux à titre confidentiel, nous avons
également pour objectif de fournir au secteur des données quantitatives rigoureuses qui permettent une connaissance plus
précise des bonnes pratiques et des benchmarks relatifs à l’établissement et à la gestion des réseaux d’agents.
Pour chaque pays dans lequel nous menons des recherches, nous publions un rapport national, qui contient des
informations essentielles sur les performances des agents et des fournisseurs qui les gèrent. Nous tenons également un
blog, sur lequel nous diffusons des informations stratégiques et opérationnelles pour le secteur. Nous contribuons à
favoriser un leadership éclairé par le biais de nos publications :
»» Repenser les modèles de services financiers digitaux pour relever le défi des big data : ce document propose des stratégies
que les fournisseurs de services financiers digitaux (opérateurs de réseaux mobiles, banques et tiers) peuvent adopter
pour répondre à l’afflux des fintechs (entreprises technologiques) dans le monde en développement. Nous sommes
convaincus que pour concurrencer les fintechs ou collaborer avec elles, les fournisseurs doivent accroître leurs données
clients.
»» Designing Successful Distribution Strategies for Digital Money : ce document aide les fournisseurs qui souhaitent créer
un réseau d’agents à bien définir leurs objectifs, puis à réfléchir au modèle de structuration du réseau qui répond le
mieux à leurs besoins.
»» Les réseaux d’agents performants part du constat que les canaux offerts par les réseaux permettent de fournir différentes
propositions de valeur à différents groupes de clients cible et présente un cadre analytique complet pour analyser la
réussite des réseaux d’agents selon plusieurs dimensions clés.
»» Les agents comptent : La véritable ampleur des réseaux d’agents dans les pays chefs de file de la finance digitale : ce
document présente un cadre pour mesurer la taille des réseaux d'agents, en faisant la distinction entre les caisses et les
points de service d'agents. Il traite également des taux d'activité des agents et du niveau du ratio clients/points de service
d’agents, fournissant des benchmarks actualisés pour le secteur.
»» OTC: A Digital Stepping Stone or a Dead End Path? traite des avantages et des inconvénients des transactions par agents
(OTC) et explique qu'elles devraient être considérées comme un tremplin vers l'adoption et l'utilisation des comptes de
transactions mobiles.
Nos recherches alimentent le programme de formation d’envergure internationale offert par l'Institut Helix. Ce programme
de formation, qui couvre un large éventail de sujets, est soutenu par la Fondation Bill et Melinda Gates, le Fonds
d'équipement des Nations Unies (FENU), la Société financière internationale (SFI) et Financial Sector Deepening Trust
(Afrique). Nos travaux éclairent également le travail d'autres équipes de MSC travaillant sur les services financiers digitaux
à travers le monde.
Les recherches et les ateliers de formation de l’Institut Helix combinent des enseignements classiques en salle avec des
visites pratiques sur le terrain, des études de cas et des entretiens avec des opérateurs ayant réalisé les déploiements parmi
les plus importants au monde. Ces cours sont adaptés aux marchés locaux et sont proposés en français ou en anglais.
Notre connaissance profonde du secteur et nos partenariats étroits avec certains de ses acteurs nous ont permis d'apporter
de nouvelles perspectives et de réfléchir de manière créative aux défis opérationnels auxquels sont confrontés la plupart
des fournisseurs sur le marché. Au-delà de la formation, MSC fournit également des conseils et une assistance technique in
situ à un large éventail d'acteurs desservant le marché de masse et cherchant à promouvoir l'inclusion financière et sociale.
Nous les aidons à appliquer les leçons tirées de l’expérience et à surmonter les contraintes internes et externes pour offrir
des services de qualité dans plus de 40 pays.
FINCLUSION TO FINTECH
2 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Résumé
Ce document est conçu pour aider les fintechs pionnières à
comprendre les stratégies spécifiques de gestion financière
utilisées par les personnes à faibles revenus dans les pays en
développement. Il est destiné à servir d’outil aux fournisseurs
de services financiers pour les aider à concevoir des produits
financiers appropriés susceptibles d’être régulièrement
utilisés par les personnes exclues des services financiers ou
mal servies. À cette fin, le document présente les
enseignements détaillés de 15 années de recherche sur
l’inclusion financière, ainsi que les données les plus récentes
du secteur sur les besoins et les souhaits des personnes à
faibles revenus. En s’appuyant sur des exemples, il compare
en outre les techniques informelles de gestion d’argent aux
techniques formelles utilisées par les personnes à revenus
élevés. Cette comparaison permet de montrer pourquoi de
nombreux outils financiers informels restent privilégiés par
les populations des marchés en développement, même
lorsque des services financiers formels sont disponibles. Le
document conclut en examinant certaines innovations
technologiques de pointe dans le secteur des fintech et en
mettant en évidence celles qui pourraient contribuer à mieux
servir les marchés des pays en développement.
FINCLUSION TO FINTECH
3 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Sommaire
Introduction 5
Exemple 1. Gérer ses liquidités : emprunt auprès d’une banque ou d’un voisin 22
Exemple 2. Constituer une somme importante : compte d’épargne vs achat
d’une poule 26
Exemple 3. Gérer les risques : police d’assurance vs garde monnaie 29
Exemple 4. Effectuer un paiement : argent mobile vs espèces 31
Conclusion 42
FINCLUSION TO FINTECH
4 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Introduction
FINCLUSION TO FINTECH
5 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Il y a à peine plus de 10 ans, les progrès de la technologie mobile ont conduit au développement Fin 2016, seuls
des services de transactions mobiles et des services de banque à distance (ce qu’on appelle la
finance digitale1). Avec la finance digitale est apparue une nouvelle méthode révolutionnaire
de distribution des services financiers aux marchés de masse2 du monde en développement.
21%
des 556 millions
Si le développement de la finance digitale a permis à des centaines de millions de nouveaux de comptes de
clients d'accéder aux services financiers, seule une petite fraction de cette population a choisi transactions
mobiles enregistrés
d’en faire un usage effectif. Fin 2016, seulement 21 % des 556 millions de comptes de dans le monde
transactions mobiles enregistrés dans le monde étaient actifs (sur une base de 30 jours)3. Qui étaient actifs sur 30
jours.
plus est, au sein de cette petite proportion d'adoptants, l'utilisation est peu fréquente et limitée
à certaines activités très spécifiques. En moyenne, les utilisateurs actifs de transactions
mobiles ne réalisent que 11 transactions par mois4.
Le problème est que, bien qu’un tout nouveau paradigme ait été développé pour la distribution
des services financiers5, les services eux-mêmes, pour la plupart, n’ont pas évolué. En mettant
l’accent sur l’offre plutôt que sur la demande, les services financiers offerts par ces nouveaux
canaux n’ont pas été repensés sur la base de la connaissance et de l’analyse des stratégies
spécifiques de gestion financière utilisées par les personnes à faibles revenus dans le monde
en développement. Par conséquent, ils ne sont utiles que pour un petit nombre de besoins de
gestion financière et occupent rarement la place centrale que les fervents défenseurs de
l'inclusion financière espéraient qu’ils prennent.
Dans bien des cas, les fournisseurs de services financiers digitaux sur les marchés en
développement offrent des services conçus pour des personnes salariées percevant des
revenus relativement élevés à une clientèle cible dont les besoins financiers sont très
différents. C’est pourquoi ces services financiers formels ne sont pas concurrentiels par
rapport à bon nombre de techniques informelles de gestion financière utilisées par le marché
de masse depuis des générations. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles l’accès ne
s’est pas traduit par un usage généralisé.
FINCLUSION TO FINTECH
6 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Il en résulte une immense opportunité de marché. Le secteur des
services digitaux attend toujours l’arrivée de services plus appropriés
conçus pour les clients du marché de masse. L’innovation est à la Nous faisons le pari que ce ne
porte du secteur et nous faisons le pari que ce ne sont pas les banques
sont pas les banques ni les
télécoms qui apporteront la
ni les télécoms qui apporteront la prochaine vague d’innovation dans
prochaine vague d’innovation
les services financiers digitaux mais les entreprises technologiques
dans les services financiers
du secteur des fintechs6 qui ont l’innovation inscrite dans leur ADN. digitaux, mais les entreprises
Jusqu'à présent, les fintechs se sont principalement concentrées sur technologiques du secteur des
les marchés des pays développés et des BRIC. Cependant, avec fintechs qui ont l’innovation
l’amélioration de la connectivité numérique et de la pénétration des inscrite dans leur ADN.
smartphones dans les pays en développement, les fintechs ont déjà
commencé à étendre leurs activités sur ces marchés.
Le but de ce document est d’aider les fintechs pionnières à comprendre comment les
personnes à faibles revenus7 gèrent leur argent afin de concevoir des solutions
technologiques à leur intention. À cette fin, le document présente certains des
enseignements de 15 années de recherche sur l’inclusion financière, ainsi que les données
les plus récentes du secteur afin de permettre au lecteur de comprendre les besoins
financiers des personnes à faibles revenus. Nous présentons en outre des exemples de
techniques informelles de gestion de l’argent utilisées dans les pays en développement pour
répondre à ces besoins, et nous montrons en quoi elles diffèrent de celles des personnes à
revenus élevés.
Ces exemples aideront le lecteur à comprendre pourquoi tant d’outils financiers informels
sont toujours privilégiés par les personnes vivant dans des lieux où les services financiers
formels8 sont déjà disponibles, et pourquoi il est si important de comprendre la finance
informelle lorsque l’on conçoit de nouveaux produits financiers. Nous concluons en
examinant certaines des évolutions technologiques déjà à l’œuvre dans le secteur des
fintechs, en mettant en évidence celles qui semblent avoir le potentiel d’améliorer les
services financiers sur les marchés des pays en développement.
6 D'une manière générale, nous désignons par secteur de la finance digitale les banques et les opérateurs télécoms des pays en développement qui
utilisent les réseaux de télécommunications pour offrir des services financiers de détail au marché de masse. À l'opposé, nous entendons par fintechs
les entreprises technologiques qui conçoivent des solutions pour le secteur financier et sont généralement basées dans les pays développés ou dans les
BRIC. Pour une meilleure compréhension de la distinction que nous faisons entre finance digitale et fintech, se reporter au document intitulé
Repenser les modèles de services financiers digitaux pour relever le défi des big data.
7 Bien qu'il existe sans aucun doute de nombreuses différences entre les populations à faibles revenus de différents pays, ainsi qu’au sein de la
population à faibles revenus d'un même pays, selon le niveau de vie, le sexe, l'origine ethnique ou encore l'âge, les études révèlent certaines
caractéristiques communes à ces différents groupes qu'il est important de comprendre. Si les auteurs reconnaissent qu'il existe des personnes à faibles
revenus dans les pays développés et que les marchés de masse des pays en développement comprennent également un nombre croissant de ménages
de classe moyenne et supérieure, ce document se concentre sur les adultes à faibles revenus des pays en développement.
8 Les services financiers formels sont ceux offerts par des fournisseurs de services financiers réglementés. Les services informels ne sont pas
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8 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Les entreprises, les experts en inclusion
financière et les décideurs politiques se sont
La plupart des services financiers
formels ont été conçus il y a des
tous concentrés sur l’appui au développement
dizaines d’années, avant que ne
des services financiers formels parce que
soient développés les canaux
ceux-ci présentent des avantages importants digitaux, et à une époque où les
par rapport aux services informels. Les services financiers de détail étaient
services financiers formels sont en particulier principalement axés sur les
plus faciles à développer à grande échelle que travailleurs salariés.
les services informels, et sont donc plus
propices aux économies d’échelle et à la
réglementation destinée à protéger les
intérêts des consommateurs9. Ils sont de ce
fait utiles pour les systèmes de paiement de
masse, par exemple les achats au détail, le
paiement des salaires, le stockage de valeurs
sécurisées et le crédit réglementé.
Les personnes à faibles revenus ont des revenus et des dépenses plus aléatoires, et donc des
besoins financiers plus fluctuants qui exigent des techniques de gestion financière
complexes. Ces techniques sont difficiles à standardiser et n'ont généralement réussi à se
développer que de manière informelle. D'énormes programmes publics ont été conçus pour
aider les personnes à faibles revenus à gérer leur argent, en étendant l'accès aux comptes
bancaires et aux comptes de transactions mobiles à cette population « non bancarisée ».
L'évaluation du degré de réussite de ces programmes est une tâche complexe qui fait l'objet
d'un débat permanent au sein du secteur. Ce document fait valoir que, même si les produits
financiers formels ont connu un certain succès, ce succès a généralement été limité en
termes d'adoption et d'utilisation. Si ces services étaient repensés pour tenir compte des
méthodes utilisées par les personnes à faibles revenus pour gérer leur argent, ils seraient
sans doute beaucoup plus utiles.
Il est également difficile de mesurer l’adoption et l’utilisation de ces services une fois qu’ils
sont disponibles. Lorsqu’une entreprise de télécommunications lance des services de
transactions mobiles pour ses clients, ces derniers y ont tous techniquement accès, mais
dans la pratique, ils peuvent ne pas en être informés ou ne pas disposer d’un agent à
proximité qui rendrait le service pratique à utiliser. Il est donc difficile de déterminer si
l’écart entre l’accès et l’adoption11 est dû au fait que le service n’est pas adapté aux besoins
des clients ou qu’il ne les atteint pas véritablement.
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9 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Il existe malheureusement peu de données disponibles sur cet aspect. Comme mentionné plus
haut, il est difficile de déterminer ce qui constitue un « accès pratique » aux services
financiers. Dans l'annexe 2, nous analysons l'ensemble des données relatives à l'inclusion
financière afin d'évaluer l'adoption et l'utilisation des services financiers formels dans les pays
en développement. Nous présentons les données les plus récentes, qui illustrent l'ampleur des
écarts entre l'accès, l'adoption et l'utilisation et qui nous incitent à penser que les raisons vont
au-delà d’un simple manque d'accès pratique. Pour vérifier cette hypothèse, nous avons ciblé
notre analyse sur les clients qui se sont inscrits aux services, car ils sont moins susceptibles
d’être concernés par un manque d’accès pratique.
Plus de
Nos recherches montrent qu’il existe un très grand nombre de clients inactifs, ce qui nous
pousse à affirmer que de nombreux produits formels sont mal conçus pour le marché de
masse. En outre, les clients actifs n’utilisent pas les services très souvent, et lorsqu’ils le font,
90 %
des
c’est généralement pour répondre à des besoins très spécifiques. Lorsque les clients transactions
commencent à utiliser les services financiers formels, c’est souvent pour compléter des financières
sont encore
stratégies informelles plutôt que pour les remplacer12. S’il peut y avoir beaucoup de raisons à informelles
cela, la plus importante selon nous est que, souvent, ces produits formels ne sont tout
simplement pas compétitifs vis-à-vis des solutions informelles habituelles.
Enfin, nous présentons des statistiques sur la part des transactions financières qui se font
encore de manière informelle (bien au-delà de 90 %), même dans des pays comme le Kenya,
pour illustrer l'ampleur des possibilités qui s'offrent aux concepteurs de produits fintech. Les
fintechs avisées ne disputeront pas la part de marché des autres fournisseurs de services
financiers formels qui servent moins de 10 % du marché, mais s'efforceront plutôt d’apporter
des améliorations aux techniques de gestion financière informelles encore utilisées, car ce
marché est beaucoup plus vaste et ne présente pas, ou peu, de concurrence formelle.
Cela ne signifie pas que ce sera simple. La finance informelle est très sophistiquée et a été
développée par les personnes à faibles revenus pour faire face à l’ensemble des problèmes
auxquels elles sont confrontées au quotidien. Les services financiers informels présentent
néanmoins de nombreuses faiblesses et peuvent encore être considérablement améliorés. Il
s’agit à nos yeux de la meilleure base pour concevoir la prochaine génération de produits
financiers.13
La section qui suit vise à mieux comprendre comment les personnes à faibles
revenus gèrent leur argent et en quoi leurs stratégies diffèrent de celles des
personnes à revenus élevés. Cette analyse contribuera à bien saisir pourquoi
certains produits actuels sont si rarement utilisés et quels produits futurs
pourraient répondre à une demande non satisfaite.
9Nous reconnaissons également que si ces caractéristiques des services financiers formels sont vraies en théorie, il existe souvent des problèmes de
mise en œuvre. Parmi les problèmes courants : (1) l’épargne réalisée grâce aux économies d’échelle n’est pas toujours répercutée sur les clients, (2) les
systèmes financiers formels ont pris une telle importance dans certains pays qu’ils sont considérés comme « trop gros pour faire faillite », ce qui induit
des restrictions dans les outils à la disposition des autorités de réglementation pour les contrôler, (3) la technologie évolue très rapidement, ce qui
rend difficile pour les organismes de réglementation d’adapter leur réglementation aux développements récents. L'exemple classique est celui de M-
PESA au Kenya, qui n'a pas été réglementé avant sa septième année d'activité, alors qu'il servait déjà plus de dix millions de clients.
10 Cette situation a déjà commencé à changer, mais dans les pays en développement, la première génération de ces produits semble davantage axée sur
la réalisation de bénéfices à court terme que sur la résolution des problèmes de gestion financière à long terme des clients. Si le développement de
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produits financiers digitaux a beaucoup à offrir, il doit aussi être soigneusement réglementé. Pour un exposé plus approfondi sur les produits de crédit
digital au Kenya, voir : http://www.cgap.org/blog/digital-credit-kenya-time-celebration-or-concern.
11 Le terme « accès » renvoie à la disponibilité d’un produit ou service, le terme « adoption » se réfère à la décision du client d’adhérer au service et le
terme « utilisation » (ou « usage ») désigne l’interaction effective de la personne avec le produit ou service (réalisation de transactions).
12 C’est également l’une des principales conclusions du projet Making Access Possible (MAP), décrit dans la Focus Note 3 (2016), Homefield
Advantage.
13 Il
ne s’agit pas d’une vérité générale qui signifierait que toutes les pratiques informelles constituent une bonne base pour la conception de
produits. Certaines pratiques sont simplement le résultat de conditions de vie difficiles et de l’absence de meilleures solutions et sont peu
susceptibles de fournir une base solide pour le développement de produits. Cependant, il existe de nombreuses pratiques informelles qui peuvent
être considérées comme supérieures aux alternatives formelles avec lesquelles elles sont en concurrence et devraient donc servir de référence pour
concevoir des produits qui apportent une réelle valeur ajoutée au secteur.
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02
Gestion financière
des personnes à
faibles revenus et
à revenus élevés
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Pour construire un modèle permettant de comprendre les différences de gestion financière
entre les personnes à faibles revenus et les personnes à revenus élevés, il faut commencer
par les notions de stocks et de flux financiers. Ceux-ci renvoient à la fois aux flux
financiers entrants et sortants et aux actifs détenus. Ils dépendent des moyens par lesquels
une personne perçoit de l’argent et des choix de vie et circonstances qui déterminent son
affectation14. Ils sont à la base des besoins financiers, qui comprennent : la liquidité, la
croissance des actifs, la gestion des risques et les paiements. Enfin, les solutions
financières désignent les stratégies, les outils, les produits et les services utilisés pour
aligner les deux premières variables et produire le niveau de vie souhaité, compte tenu des
ressources disponibles.
Stocks et flux
financiers (entrants,
sortants, actifs)
Besoins
financiers
(liquidités,
investissement,
gestion du
risque,
paiements
Solutions
financières
Pour comprendre la relation entre ces différents concepts, commençons par analyser les stocks
et les flux financiers. Il existe trois différences importantes entre les stocks et les flux financiers
des personnes à revenus élevés et ceux des personnes à faibles revenus :
• Les personnes à faibles revenus ont moins d’entrées d’argent et, par conséquent, leurs
stocks d’actifs sont généralement inférieurs à ceux des personnes à revenus élevés.
• Les personnes à faibles revenus ont beaucoup plus de sources de revenus que les personnes
à revenus élevés.
• Pour les personnes à faibles revenus, les flux entrants et sortants sont relativement
volatils et souvent imprévisibles, tant en fréquence qu'en volume.
Les recherches sur l’inclusion financière font systématiquement ressortir ces différences. Le
tableau ci-dessous compare des statistiques extraites de la littérature existante afin de fournir
un éclairage sur l’ampleur des différences relatives aux flux financiers entrants et sortants.
14Ce cadre s'inspire d'un modèle qui examine le revenu, les instruments et les objectifs. Pour en savoir plus sur ce modèle et pour mieux comprendre
comment les circonstances de la vie influencent le choix d'une solution financière, voir : MicroSave en collaboration avec Ignacio Mas, Musings on
Money - the what and why of the billions
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Tableau 1 : Entrées et sorties d’argent par niveau de revenu15
Adultes dans les pays à revenu élevé Adultes dans les pays à faible revenu
Flux financiers sortants Le projet KFD cite le chiffre de la Réserve Selon les résultats de KFD, les dépenses
fédérale américaine (2010) selon lequel les de consommation fluctuent de ± 43 %
Américains effectuent 73 achats par mois. d’un mois sur l’autre. Les ménages
ruraux font 31 achats par mois, contre 66
pour les ménages urbains.
L’étude KFD (Kenyan Financial Diaries) fournit un grand nombre d’informations sur la
manière dont les ménages à faibles revenus choisissent leurs solutions financières pour faire
face à la volatilité de leurs entrées et sorties d’argent. Les pratiques courantes visant à
réduire les dépenses comprennent entre autres la limitation des repas, la déscolarisation des
enfants ou l’augmentation des heures de travail.
Ses résultats montrent également que la volatilité des flux entrants est généralement due à
l’apparition de dépenses importantes qui forcent le ménage à trouver suffisamment d’argent
pour les couvrir. Bon nombre de ces dépenses anormalement élevées sont le résultat d'un
événement imprévu, tel que le recours à des soins médicaux, le décès d’un membre de la
famille ou une catastrophe. Ces raisons mettent en évidence l'importance de la réduction
des risques dans la gestion financière.
Néanmoins, multiplier les sources d’entrée d’argent peut également être considéré comme
une stratégie de gestion des risques. Si l’une des sources ne produit pas de revenus lorsque
c’est nécessaire, les autres peuvent suppléer. Les revenus peuvent également varier
indépendamment des dépenses, car les différentes sources d’entrées financières fluctuent
selon les périodes (c’est-à-dire de façon saisonnière).
La volatilité des flux financiers entrants et sortants contribue à expliquer pourquoi les
personnes à faibles revenus sont parfois réticentes à réaliser des investissements à long
terme ou à accepter des schémas de paiement ou de remboursement rigides. Ces
enseignements forment la base de la réflexion sur les besoins, les objectifs et les solutions
financières dans la section suivante.
15Les données de ce tableau sont presque entièrement compilées à partir de l’étude Kenyan Financial Diaries (KFD) (2014) (http://fsdkenya.org/wp-
content/uploads/2015/08/14-08-08_Financial_Diaries_report.pdf), et de la base mondiale Findex (2014) de la Banque mondiale
(http://www.worldbank.org/en/programs/globalfindex).
16 Sanford, Caitlin. (mars 2016). Estirando El Gasto.
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03
Besoins
financiers et
solutions
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Le secteur de l’inclusion financière classe les besoins financiers en quatre catégories universelles.
Si ces besoins sont les mêmes quel que soit le niveau de revenus, les solutions financières
conçues pour y répondre varient très fortement. Pour comprendre pourquoi, réexaminons
les différences relatives aux stocks et aux flux entre les groupes de revenus décrits dans la
section précédente.
Les personnes à faibles revenus ayant moins d’actifs, elles ont généralement moins de
résilience financière (c’est-à-dire une moindre capacité à se remettre d’un choc financier)
que les personnes à revenus élevés. En outre, étant donné la plus forte volatilité de leurs flux
financiers entrants et sortants, elles sont beaucoup plus sujettes à l’incertitude financière
que les personnes à revenus élevés.
Par conséquent, les personnes à faibles revenus sont souvent obligées de se concentrer sur
la stabilité financière. Dans l’étude des journaux financiers aux États-Unis, 77 % des
personnes interrogées ont déclaré accorder plus de valeur à la stabilité financière qu’à la
« progression sur l’échelle des revenus » 18. Les personnes à faibles revenus sont bien sûr
également intéressées par la croissance des actifs, mais la stabilité a souvent la priorité car
c’est elle qui détermine si le loyer ou les frais de scolarité seront payés ou si la famille pourra
acheter de la nourriture en quantité suffisante. Ainsi les personnes à faibles revenus
consacrent-elles plus de temps que les personnes à revenus élevés à la gestion des liquidités
à court terme et à l’amélioration de la résilience vis-à-vis des dépenses imprévues.
Lorsque la situation financière est stable et que les personnes à faibles revenus peuvent se
consacrer à l’accumulation de sommes d’argent plus importantes, elles le font
certainement19. Mais la nécessité de constamment réorienter les stocks et les flux en fonction
des besoins de stabilité et de croissance signifie qu’elles sont en permanence amenées à
modifier la répartition de leurs stocks et de leurs flux entre différentes solutions
financières20. Ce jonglage financier rend plus difficile pour les personnes à faibles revenus
de s’engager dans des stratégies de planification financière ou d’investissement à long terme.
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16 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Beaucoup plus que les La croissance et la stabilité
ménages à revenus élevés, étant toutes deux importantes
les personnes à faibles pour les personnes à faibles
revenus sont obligées revenus, celles-ci se retrouvent
d’accorder la priorité à la
stabilité financière (c.-à-d. la
liquidité, l'atténuation des
01 02 à jongler avec l’allocation de
leurs ressources financières
entre différents produits
risques) au détriment de financiers selon les
l'accumulation de sommes circonstances.
globales plus importantes.
Ces facteurs combinés influencent fortement le choix des solutions financières par les
différents groupes de revenus. Les produits financiers formels ont été conçus pour répondre
aux besoins financiers des personnes à revenus élevés. Ces produits ont été conçus pour les
flux prévisibles, les stocks stables et les besoins fixes qui caractérisent cette catégorie de
revenus, et non pour le réajustement et la réaffectation continus des ressources des
personnes à faibles revenus.
Pour les personnes à revenus élevés, la finance formelle offre clairement un produit pour
chaque besoin financier. La gestion de la liquidité se fait par le biais d’un compte bancaire,
l’accès à une somme d’argent plus importante par le biais d’un prêt, la protection contre les
risques imprévisibles se gère avec des polices d’assurance et les cartes de débit et de crédit
facilitent les transactions. La gestion financière au sein des populations à faibles revenus ne
peut pas aussi facilement être mise en correspondance avec des catégories de produits. Elle
se situe quelque part entre les catégories car ces populations essaient d’atteindre plusieurs
objectifs à la fois ou de réaffecter constamment leurs ressources entre les produits tout en
limitant les inconvénients par tous les moyens possibles.
Afin d’illustrer certaines des différences entre les solutions financières choisies par les
personnes à revenus élevés et celles à faibles revenus21, nous commençons par quelques
considérations générales sur les différences de gestion financière puis nous comparons les
solutions financières (stratégies, outils, produits et services) choisies par chaque groupe de
revenus pour satisfaire chacun des quatre besoins financiers universels présentés plus haut.
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17 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Tableau 2 : Outils et techniques de gestion financière par niveau de revenus 22
Adultes des pays à revenus élevés Adultes des pays à faibles revenus
Stratégies de gestion Bien qu’il existe tout un éventail de techniques de Les données de Findex (2014) montrent que
financière gestion possibles, le recours aux services seulement 28 % des adultes dans les pays à faibles
financiers formels est le plus répandu. Les revenus ont un compte bancaire, et que ceux qui en
données de la base Findex (2014) montrent que ont un ne l'utilisent pas très souvent. L’étude KFD
91 % des adultes ont un compte bancaire. Pour les rapporte l’utilisation de 14 outils financiers en valeur
personnes à revenus élevés, la gestion financière médiane et les recherches présentées dans Portfolios
s’apparente à de la planification stratégique, dans of the Poor23 en comptent 8 à 10 dans trois autres
la mesure où les entrées d’argent, les sorties pays. La gestion financière consiste essentiellement à
d’argent et les besoins sont suffisamment stables maintenir une certaine liquidité tout en assurant la
et prévisibles pour pouvoir définir un plan à long meilleure productivité possible des faibles sommes
terme pour satisfaire ces besoins. investies. Cela revient souvent à garder de petits
montants en liquide, à emprunter au besoin et à
maintenir des réseaux sociaux solides – et tient plus
du jonglage que de la banque.
Pour gérer la liquidité Généralement fait par le biais de l'épargne sur Généralement fait par le biais d’une combinaison de
à court terme un compte bancaire. Findex (2014) indique que stratégies d’épargne et de multiples sources informelles
67 % des adultes dans les pays à revenus élevés d’emprunt. Findex (2014) indique que seulement 47 %
ont déclaré avoir épargné au cours des 12 des adultes ont économisé de l’argent au cours des 12
derniers mois, et près de la moitié d'entre eux derniers mois24, et seulement 10 % d’entre eux ont utilisé
(47 %) l'ont fait sur un compte dans une pour cela un compte dans un établissement formel.
institution financière. L’étude KFD a constaté que les ménages détenaient en
valeur médiane 9 % de leurs actifs financiers dans des
institutions informelles. L’épargne est souvent
« investie » dans un groupe d’épargne, « prêtée » à un
membre de la famille ou utilisée pour augmenter des
stocks alimentaires. L’étude KFD estime que le ménage
médian ne conserve que 10 % de ses actifs financiers en
liquide.
Pour accumuler un Généralement fait par le biais d'un emprunt Généralement fait en découpant la somme en petits
montant important25 auprès d'une banque ou d'une société émettrice montants plus faciles à gérer et/ou en empruntant de
(pour investir ou de cartes de crédit. Findex (2014) montre que petites sommes auprès de sources multiples. Findex
dans les pays à revenus élevés, 37 % des adultes (2014) montre que dans les pays à faibles revenus, 52 %
payer une dépense
ont emprunté de l'argent au cours des 12 des adultes ont emprunté de l'argent au cours des 12
élevée)
derniers mois. 17 % ont emprunté cet argent à derniers mois. 9 % ont emprunté cet argent à une
une institution financière, contre 15 % à la institution financière, contre 35 % à la famille ou à un
famille ou à un ami. 49 % ont une carte de ami. 1 % détient une carte de crédit.
crédit.
Pour faire face aux Généralement fait par le biais de l’épargne Généralement fait en collectant des fonds auprès de la
dépenses imprévues pour les petites dépenses et de l’assurance famille et des amis et en liquidant les actifs
pour les dépenses plus importantes. 16 % n’ont disponibles. 24 % n'ont pas pu trouver de fonds
pas pu trouver de fonds d’urgence au moment d'urgence au moment voulu. Pour ceux qui le
voulu. Pour ceux qui ont pu, 52 % ont puisé pouvaient, 48 % ont trouvé des fonds auprès des amis
dans leur épargne, 22 % ont emprunté auprès et de la famille, 20 % ont travaillé davantage ou
de la famille ou d’amis et 12 % ont travaillé obtenu un prêt de leur employeur, et 18 % ont utilisé
davantage ou obtenu un prêt de leur leurs économies.
employeur.
Pour effectuer et Bien que l'argent liquide soit encore un outil Même en Afrique de l'Est, l'argent liquide reste la
recevoir des répandu pour les paiements, il est de plus en principale forme de paiement. Les paiements sont un
paiements plus courant d'utiliser des canaux digitaux. peu moins fréquents, généralement de faible valeur, et
D’après Findex, 75 % ont une carte de débit et souvent destinés aux petits détaillants, ce qui les rend
49 % ont utilisé internet pour effectuer un difficiles à digitaliser. Findex montre que 7 % ont une
achat au cours des 12 derniers mois. carte de débit. 1 % ont utilisé internet pour effectuer
un achat au cours des 12 derniers mois. 10 %
effectuent des paiements à l'aide d'un compte mobile
(utilisation d'un téléphone mobile pour payer des
factures ou envoyer de l'argent).
FINCLUSION TO FINTECH
18 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Le paradoxe de la gestion financière est que moins on a d’argent, plus il faut y consacrer de
temps. Lorsqu’on ne détient que quelques dollars, chaque dollar devient très important et l’on
doit passer beaucoup de temps à utiliser toute une gamme d’outils pour s’assurer qu’il est
utilisé de manière optimale26. Les différences observées dans le choix des solutions financières
par les deux groupes de revenus nous aident à voir et à comprendre les tendances qui doivent
orienter la conception de meilleures solutions.
2. Étant donné qu’une proportion plus importante de personnes à revenus élevés détient des
comptes formels, et dans la mesure où les paiements sont de montant plus élevé et
souvent destinés à de plus gros détaillants, la part des paiements digitaux est bien
supérieure dans les pays à revenus élevés.
3. Si les personnes à faibles revenus sont constamment en train de gérer des liquidités, elles
ne détiennent pas beaucoup d’actifs liquides. Elles cherchent des liquidités
lorsqu’elles sont nécessaires, et les trouvent à différents endroits ou les empruntent à
différentes personnes en fonction des circonstances et du montant dont elles ont besoin.
4. Une autre raison explique que les actifs liquides soient maintenus à un niveau peu élevé,
c’est qu’il est difficile de conserver une approche stratégique de leur utilisation lorsqu’ils
sont à portée de main et que les besoins sont multiples. La tentation et le vol sont très
problématiques. Les gens utilisent souvent les structures sociales pour accroître leur
discipline d’épargne et diminuer leurs liquidités. Les solutions les plus courantes sont
les groupes d’épargne, les ACEC et les AREC.27
5. La gestion financière des populations à faibles revenus est fortement dépendante de leurs
réseaux sociaux. Ces réseaux offrent la discipline nécessaire pour épargner, obtenir des
liquidités lorsque c’est nécessaire et mutualiser les risques en cas d’urgence28.
6. Les solutions financières qui permettent aux personnes à faibles revenus de répondre à
de multiples besoins financiers en même temps, de façon à tirer le maximum du
peu d’argent dont elles disposent, sont très attractives. De même que les solutions qui leur
donnent la souplesse nécessaire pour réaffecter facilement les ressources au
fur et à mesure de l’évolution de leur situation.
17 Les trois premiers éléments de ce cadre sont tirés de Portfolios of the Poor. Depuis la création de ce cadre, les paiements sont généralement ajoutés
comme quatrième élément. Pour plus d'informations sur le cadre original, voir : Collins, D., Morduch, J., Rutherford, S. et Ruthven, O. (2009).
Portfolios of the Poor : How the World's Poor Live on $2 a Day. Princeton University Press.
18 Morduch, Jonathan, et Schneider, Rachel. Spikes and Dips: How Income Uncertainty Effects Households.
19Les personnes à faibles revenus utilisent des méthodes et des hiérarchies pour guider leur décision quotidienne de gestion financière et trouver un
équilibre entre leur besoin de souplesse et d’autodiscipline. Ces pratiques sont bien décrites dans : George, D., & Mas, I. (Octobre 2015) Rendre les
services financiers digitaux pertinents – 2ème partie. MicroSave.
20Pour mieux comprendre les stratégies employées par les personnes à faibles revenus à cette fin, voir : Mas, I. (janvier 2015). Money Resolutions, A
Sketchbook. CGAP.
FINCLUSION TO FINTECH
19 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
21 Pour en savoir plus sur les différences d’habitudes financières en Afrique du Sud et au Kenya, (deux écosystèmes financiers à différents stades de
développement), voir l’étude de Zollman, J. & Cojocaru, J. (janvier 2015). Cash Lite: Are we there yet? Rethinking the evolution of electronic
payments in Kenya based on evidence in the Kenyan and South African Financial Diaries.
22 Les données de ce tableau sont presque entièrement compilées à partir des journaux financiers kenyans (KFD) (2014), accessibles à l’adresse
(entretien avec des experts, CGAP, 2006). Il veut dire par là que, dans de nombreuses communautés à faibles revenus des pays en développement, il
n’existe pas d’aide sociale fournissant un filet de sécurité. Dans ce contexte, si vous n’avez pas d’entrées d’argent quotidiennes, ce qui est très
courant, vous êtes obligé d’avoir un peu d’argent de côté pour tous les jours où vous devrez malgré tout vous nourrir et payer d’autres dépenses. En
outre, les recherches sur l’épargne soulèvent souvent des questions de sémantique. Les personnes à faibles revenus se considèrent rarement comme
des « épargnants », soit parce qu’elles estiment que les montants qu’elles mettent de côté sont trop faibles, soit parce qu’elles achètent des actifs
(toiture en tôle, jeunes arbres, poulets, bracelets en or), qu’elles prévoient de liquider si besoin ultérieurement sans toutefois considérer cela comme
de l’épargne. C’est pourquoi les recherches quantitatives sur l’épargne nécessitent souvent une interprétation prudente.
25 Selon l’importance de la somme à réunir, différentes stratégies peuvent être employées. Les petites sommes peuvent être épargnées, mais les
sommes plus élevées (par ex. réparation de la maison, achat d’une voiture, frais universitaires) sont beaucoup plus susceptibles d’être obtenues grâce
au crédit.Pour approfondir ce sujet, voir : Mullainathan, S., & Shafir, E. (2013). Scarcity: Why having too little means so much. New York, NY : Times
Books.
26. Pour les lecteurs peu familiers des ACEC (associations cumulatives d’épargne et de crédit) et des AREC (associations rotatives d’épargne et de
crédit), cette Focus Note de Bankable Frontier Associate et de la Fondation Gates fournit une synthèse très éclairante dans l’annexe. Disponible
en ligne : https://docs.gatesfoundation.org/documents/Focus%20Note%201%20Outcompeting%20the%20 Lockbox%20-
%20Linking%20Savings%20Groups%20to%20the%20Formal%20Financial%20Sector.pdf
27. Il est important de noter cependant que dépendre de son réseau social pour ses besoins financiers peut aussi être pesant. Cette solution met à
mal la confidentialité de la situation financière des utilisateurs, ce qui peut s’avérer embarrassant.
FINCLUSION TO FINTECH
20 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
04
Comprendre la
gestion financière
informelle à l’ère
digitale
FINCLUSION TO FINTECH
21 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Cette section s’appuie sur les données ainsi que sur les cadres conceptuels présentés dans
les sections précédentes pour illustrer de manière pratique les facteurs qui influencent les
décisions financières des personnes à faibles revenus. Nous présentons pour cela quatre
exemples montrant comment s’opère le choix d’une personne à faibles revenus entre un
produit formel et une stratégie informelle pour chacune des quatre catégories de besoins
financiers.
De manière générale, l’objectif de ces comparaisons n’est pas de montrer que les options
informelles sont supérieures dans tous les cas. Les circonstances qui entourent la décision
peuvent faire passer une option avant l’autre. Ces comparaisons montrent simplement que,
dans certaines situations très courantes29, les options formelles ne sont pas nécessairement
supérieures aux techniques informelles, qui offrent souvent des avantages que les solutions
formelles ne peuvent pas encore offrir.
Exemple 1. Gérer ses liquidités : emprunt auprès d’une banque ou d’un voisin
La situation : Aban doit payer les frais de scolarité de sa fille la semaine prochaine. Bien
qu'il n'ait pas assez d'argent pour le faire maintenant, il doit recevoir de l'argent dans deux
semaines, dont le montant sera suffisant pour couvrir les frais. Aban aimerait obtenir un
crédit à court terme pour cette dépense. Il peut soit solliciter un crédit auprès de l’agence
bancaire locale de sa ville30, soit demander à son voisin. Voici comment il évaluerait les deux
options.
FINCLUSION TO FINTECH
22 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Cadre pour le choix d’une stratégie financière :
Garantie d’accès au Même s’il peut accéder physiquement à la L’issue dépendra de la situation financière du voisin
crédit banque, Aban ne pourra peut-être pas emprunter d’Aban et de sa relation avec lui. Bien qu’il soit courant
sans produire une preuve de salaire, un titre de d’emprunter de l’argent à des amis, ces derniers doivent
propriété dont il peut prouver qu’il lui appartient souvent faire face à des dépenses semblables et peuvent
ou une pièce d’identité formelle. En outre, il est ne pas être en mesure de prêter des liquidités lorsque
fort probable qu’il n’ait pas d’antécédents de c’est nécessaire. Il est très important de maintenir une
crédit officiels pour permettre à la banque bonne réputation auprès des voisins qui peuvent vous
d’établir sa cote de crédit. Enfin, même s’il aider, par exemple les commerçants. Entretenir ces
remplit les conditions ci-dessus, les prêts à court relations et s’assurer de rembourser dans les délais les
terme comme celui dont il a besoin sont rares et crédits obtenus des amis et de la famille aide à
il est peu probable qu’il puisse toucher la somme développer une cote de crédit informel au sein de la
en moins d’une semaine. communauté (réputation financière).
Coût du crédit Si les banques offrent souvent des taux d’intérêt La plupart des crédits informels sont accordés avec un
concurrentiel sur les crédits d’un an ou plus, les taux d’intérêt réduit, voire sans intérêt31. Le coût réel de
crédits à court terme sont souvent assortis de l’emprunt est celui de la réciprocité (le prêteur pourra à
taux d’intérêt plus élevés et de pénalités de son tour demander à l’emprunteur de lui prêter de
remboursement anticipé. Par ailleurs, les frais de l’argent en cas de besoin). Cela peut, selon les cas,
crédit peuvent augmenter considérablement le s’avérer plus ou moins lourd que de payer des intérêts à
coût réel de l’emprunt. une banque. En outre, impliquer un membre de son
réseau social dans sa situation financière implique une
perte de confidentialité.
Avantages Établir des antécédents de crédit auprès d’une Possibilité de créer, outre la relation sociale, une
supplémentaires banque est très important pour obtenir relation financière dans laquelle le prêteur et
d’autres prêts, possiblement plus élevés, à l’emprunteur peuvent s’entraider en se prêtant des
l’avenir. liquidités à court terme à l’avenir, évitant ainsi le
paiement d’intérêts à une banque.
Commodité Les formalités administratives de demande de Les conditions de prêt peuvent être plus souples,
crédit et le temps nécessaire à l’approbation notamment les modalités de décaissement et de
peuvent être des obstacles. De plus, avoir à se remboursement. Si le crédit est accordé par un voisin,
déplacer à la banque pendant les heures de les versements ont toutes les chances d’être simples,
travail, avoir affaire à un caissier intimidant ou mais il peut arriver que l’ami ou le parent qui vous
devoir faire la queue peut s’avérer pénible. accorde un prêt soit plus difficile à joindre au moment
voulu.
Les relations sociales sont également utilisées pour atteindre des objectifs financiers. Il est
beaucoup plus difficile d'épargner seul qu'en groupe, et de nombreuses personnes à faibles
revenus participent à des groupes d'épargne, ou à des structures similaires comme les chamas,
AREC, ACEC ou mutuelles de crédit. La pression sociale de l'épargne collective incite chaque
membre à maintenir sa contribution régulière. De plus, ce type de groupements d'épargne
offre souvent l'accès à de petits prêts, ce qui peut être très utile.
FINCLUSION TO FINTECH
23 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Cependant, la confiance préalable nécessaire au soutien financier doit se construire dans le
temps, c’est pourquoi même dans les situations qui offrent une option de crédit formel, une
personne comme Aban pourrait choisir d’accéder au crédit par le biais de son réseau social de
façon à développer des relations avec des membres importants de sa communauté.
Possibilités d’amélioration :
Actuellement, il existe peu de produits financiers formels dont l’utilisation permette aux
clients de développer ou d’optimiser leurs relations sociales. Certains fournisseurs ont
essayé de digitaliser les AREC ou les chamas existants avec plus ou moins de succès32. Cela
restera un défi jusqu'à ce que la finance formelle intègre avec succès les réseaux sociaux, ou
s'améliore au point de pouvoir les remplacer.
Les entreprises fintech qui conçoivent des produits financiers formels doivent approfondir
leurs recherches pour trouver des mécanismes plus sophistiqués permettant aux utilisateurs
de faire davantage qu’envoyer simplement de l’argent. Les produits basés sur le réseau social
pourraient également permettre de structurer le crédit entre amis33 et les demandes d’argent
à des fins spécifiques formulées par plusieurs personnes34. En outre, les données du réseau
social pourraient être exploitées pour attester du sérieux d’une personne demandant un
crédit35. Certaines plateformes de crédit alternatives commencent déjà à intégrer des
données des réseaux sociaux dans leurs évaluations de solvabilité36. Toutes ces plateformes,
cependant, exigent que les emprunteurs soient équipés de smartphones et sont
principalement basées en Afrique de l’Est. En outre, il semble que sur certaines d’entre elles,
l’évaluation dépende du statut de salarié ou de non salarié de l’emprunteur 37.
Plus généralement, en ce qui concerne le crédit formel, il manque toujours des solutions
pour contracter de petits crédits, à court terme, assortis d’un processus d’approbation
simple et rapide. Étant donné que les personnes à faibles revenus ont souvent recours à de
petits montants de crédit pour leurs besoins de liquidités quotidiens, de tels produits
pourraient être très utiles. Des produits comme M-Shwari et KCB M-PESA au Kenya, M-
Pawa en Tanzanie et MoKash en Ouganda et au Rwanda sont de bons débuts, mais cette
catégorie de produits comporte encore des primes de risque assez élevées. De même, bien
que nous ayons assisté au développement de certaines plateformes de prêt alternatives,
telles que Tala, Branch et Saida, beaucoup sont assorties de taux d'intérêt élevés, un
problème important si l’on en croit les rapports mettant en avant le problème des emprunts
multiples.38
29 Ceci est également bien illustré dans le document : Making Access Possible research. Note 6. Mapping the DNA.
30 Selon les pays, il peut aussi s’agir d’une mutuelle de crédit ou d’une institution de microfinance.
31 C’est valable lorsqu’on emprunte à un ami proche, un membre de la communauté ou un membre de la famille. Les prêteurs informels,
cependant, peuvent facturer des taux d’intérêt plus ou moins élevés.
32 Pour plus de détails, voir la partie « Crédit P2P » dans la Section 5.
33 Une application de reconnaissance de dette ou un moyen de rappeler à vos amis qu’ils vous doivent de l’argent par l’intermédiaire d’un tiers
neutre pourrait être très utile. Cette approche contribuerait à éliminer les tensions sociales liées au service de la dette informelle. Un système
s’apparentant aux applications utilisées dans les marchés développés pour permettent à des amis de suivre des factures et autres dépenses
partagées (voir www.splitwise.com), mais qui porterait sur les crédits informels, pourrait être intéressant à explorer.
34Fin 2016, FSD Africa a publié un rapport sur le paysage du crowdfunding en Afrique de l'Est. Le rapport a constaté que la principale source de
croissance dans ce domaine provenait des flux de dons ou de prêts concessionnels des pays développés vers les marchés moins développés, sur des
plateformes telles que Kiva (www.kiva.org). Bien qu'il existe des plateformes locales de financement participatif en Afrique de l'Est, comme M-
Changa au Kenya (http://changa.co.ke/), l'étude n'a relevé que quatre solutions locales actives, avec des niveaux de croissance et de succès
variable. Très peu de ces solutions de crowdfunding exploitent donc de manière optimale les relations sociales existantes au sein des communautés
mal servies. Pour lire le rapport dans son intégralité, voir : https://www.fsdafrica. org/wp-content/uploads/2016/10/16-11-07-
Crowdfunding_Report-final-1.pdf.
FINCLUSION TO FINTECH
24 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
35 L'organisation de microcrédit digital Kiva a piloté en 2011 un programme appelé « Kiva Zip » visant à utiliser les réseaux sociaux des utilisateurs
afin qu’ils soient appuyés par leurs relations à l’occasion d’une demande de crédit. Elle a clôturé le programme au Kenya en 2015. Pour en savoir plus :
http://nextbillion.net/weekly-roundup-10-2-15/
36 Branch (www.branch.co) utilise les données des smartphones pour évaluer si l’utilisateur est susceptible d’être un bon emprunteur. Cette
approche est en partie reliée au réseau social, par exemple qui il appelle, à quelle fréquence, et avec qui il interagit sur les plateformes de
messagerie sociales. De même, Tala (www.tala.co) utilise une application pour smartphone pour évaluer la solvabilité à travers des informations
biographiques de base - de la taille du réseau social à la régularité des habitudes quotidiennes. Nous voyons également émerger d'autres
plateformes de données, telles que Cignifi et First Access, qui créent un profilage de crédit intelligent basé sur des données alternatives. Ces
premiers efforts sont intéressants à observer, mais il semble qu'il y ait encore de la marge de croissance et d'apprentissage. En outre, des questions
subsistent quant à la capacité prédictive des données alternatives.
37 Il ressort que les emprunteurs de Lenddo (www.lenddo.com) doivent être des salariés (voir : http://www.thehindubusinessline.com/money-and-
time-celebration-or-concern. Pour plus d'informations sur les emprunts multiples et les motivations pour accéder au crédit digital, voir cette
analyse 2017 de MSC Consulting : Expérience client du crédit digital au Kenya
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25 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Exemple 2. Constituer une somme importante : compte d’épargne vs achat d’une poule
La situation : Joyce a un peu d’argent en excédent et elle estime que son premier besoin
serait de l’utiliser pour accumuler une certaine somme. Elle a un compte formel dans une
banque et peut le déposer sur ce compte, ou bien elle peut l'investir quelque part et espérer
obtenir un rendement. Joyce pense que le meilleur investissement serait l’achat d’une poule
- un achat courant si l’on en croit les résultats de l’étude KFD 2014 qui montrent que 66 %
des ménages possèdent au moins une poule, et que le ménage médian en possède six.39 Voici
comment elle peut évaluer les deux options.
Sécurité Bien qu'il s'agisse d'une option très sûre, surtout dans les Il y a des risques associés à la possession d’une poule
pays qui offrent une garantie sur les dépôts, les (p. ex. vol, perte, maladie, mort). Toutefois, le risque
chercheurs de l’étude KFD 2014 ont signalé une incidence peut sembler moins effrayant car il est plus facile à
surprenante de ménages qui considèrent que les banques comprendre qu’une circonstance comme la faillite
« exploitent » leurs clients. Qu’elles soient justifiées ou d'une banque ou l'inflation.
non, ces perceptions peuvent avoir un impact aussi
important qu’une réalité objective.
Retour sur Bien qu'un petit taux d'intérêt puisse être offert par la La possession d’une poule entraîne des coûts. Elle doit
investisse- banque, il est souvent inférieur au taux d'inflation et, de être abritée, parfois traitée avec des médicaments et, en
ment (coût plus, il n'est probablement pas significatif en valeur particulier dans les zones urbaines, nourrie. Cependant,
absolue sur un dépôt de faible montant. Enfin, les gains l’abri peut être construit à partir de matériaux de
compris)
éventuels peuvent être annulés par les frais de tenue de construction de rebut, les aliments peuvent être des
compte, le solde minimum, les frais de retrait ou les restes de nourriture et la médication peut être minime.
frais de transport jusqu'à la banque. De plus, à mesure que la poule grandit, sa valeur
augmente et peut même se multiplier si elle a des
poussins ; elle peut aussi fournir des revenus grâce aux
œufs. Le propriétaire obtient ainsi un rendement sur
investissement sans doute plus important que ce qu'il
aurait pu percevoir de la banque avec le même montant.
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26 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Les comptes bancaires sont très liquides si les retraits 71 % des ménages de l’étude KFD 2014 considéraient une
Liquidité
peuvent être effectués facilement, mais ce n'est pas poule comme un actif liquide. En outre, la poule peut
souvent le cas dans les pays en développement. contribuer à la liquidité/aux entrées d’argent si elle pond
Cependant, il arrive qu’une personne à faibles revenus régulièrement des œufs.
privilégie les comptes d’épargne peu liquides. Des Pour ceux qui veulent conserver leur épargne dans un
recherches menées en 2009 au Kenya ont montré que les actif « fixe » et non liquide, la poule constitue un moyen
pressions exercées au sein du ménage sur les femmes afin d'épargne plus sûr et moins facilement accessible qu'un
qu’elles partagent leur épargne avec leur mari les ont compte bancaire.
poussées à rechercher des dispositifs d’épargne à coûts de
transaction élevés, même lorsqu’il existait des dispositifs
à plus faible coût. Lorsqu’on leur fournit plusieurs cartes
utilisables aux guichets automatiques pour améliorer la
liquidité de leur compte d’épargne, les femmes dotées
d’un faible pouvoir de négociation épargnent moins.
Commodité Les principales difficultés tiennent à l’absence Les animaux comme les poules sont beaucoup plus
d’agence/agent à proximité, à la nécessité de se difficiles à élever en milieu urbain, et il faut les
déplacer pendant les horaires de travail et au temps surveiller et en prendre soin quotidiennement.
d’attente éventuel. Toutefois, cette tâche peut être déléguée aux membres
de la famille.
Possibilités d’amélioration :
Aujourd’hui, les actifs non financiers, tels que les animaux domestiques et les engrais, sont des
achats courants pour les personnes à faibles revenus. Le rendement de ces actifs peut être
supérieur à celui des produits formels. Il est difficile de calculer de manière très fiable le
rendement d’un prêt à un ami ou d’un investissement dans un animal de ferme. Les produits
financiers formels n’ont donc pas nécessairement besoin de concurrencer directement ces
produits, même s’ils seraient beaucoup plus attractifs s’ils offraient des rendements plus
importants. M-Shwari, par exemple, est un produit d’épargne qui débloque l’accès au crédit à
court terme. Par ailleurs, les banques ont connu un certain succès dans le passé en offrant aux
déposants des avantages semblables à ceux des loteries44.
Il est indéniable que les produits qui aident les gens à gérer intuitivement leurs différents
comptes mentaux sont difficiles à concevoir. La difficulté consiste à conserver une simplicité
d’utilisation tout en autorisant une souplesse suffisante pour s’adapter aux comptes personnels
de différentes personnes. Cette question spécifique est traitée plus en détail dans la dernière
section.
FINCLUSION TO FINTECH
27 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
39 Zollman,J. (2014). Kenyan Financial Diaries (KFD). Financial Sector Deepening Kenya [FSDK].
40Schaner, Simone. The Cost of Convenience? Transaction Costs, Bargaining Power, and Savings Account Use in Kenya. 2013c. Dartmouth
College Working Paper.
41 Julie Zollmann - CGAP (2014), When Saving for Tomorrow Necessitates Borrowing for Today.
42Cela peut changer, car les algorithmes utilisés pour évaluer les demandes de crédit digital utilisent le solde/l’activité du compte pour calculer le
montant/les dispositions des crédits accordés aux clients. Cependant, on ne sait pas encore très bien quelle importance relative ont ces facteurs dans
les algorithmes ni dans quelle mesure les utilisateurs comprennent ce lien et sont prêts à lui accorder la priorité.
43 MSC en collaboration avec Ignacio Mas, Musings on Money - the what and why of the billions.
44 Using the Lure of Lottery to Spur Savings.
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Exemple 3. Gérer les risques : police d'assurance vs garde-monnaie45
Indemnisation/ Une indemnisation bien conçue couvrira une La prestation peut se limiter à retrouver l’équivalent de
prestation partie des pertes, idéalement assez pour l’épargne qu’il a laissée au commerçant ; cependant, le
permettre à Migbaru de satisfaire les besoins de commerçant peut aussi lui accorder un crédit sur la
base qu’il aurait couverts avec le montant des base de la relation qu’il a établie avec lui. L’une des
ventes qu’il a perdu. choses les plus intéressantes à faire pour Migbaru
lorsqu’il a de l’argent de côté est de le répartir dans son
réseau social, afin de se ménager la possibilité de
demander de l’argent dans le futur quand il en aura
besoin.
Étendue de la Il est important de noter que si Migbaru ne subit Que l’événement se produise ou non, quel que soit le
couverture aucune perte, ou que les pertes sont dues à un moment auquel il se produit, ou s’il s’agit d’un
événement non couvert par l’assurance, ou qui événement totalement différent, Migbaru conserve la
s’est produit en dehors des dates couvertes par valeur de la prime qu’il aurait payée. En d’autres
l’assurance, ou s’il ne peut tout simplement pas termes, son épargne fournit au moins une couverture
prouver que ces pertes devraient être couvertes, minimale pour faire face à tout événement, à tout
il ne reçoit rien. moment.
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29 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Commodité Cela dépend habituellement de la simplicité et C’est un système on ne peut plus simple, et il devrait
de la rapidité de l’indemnisation en cas de être très pratique. Cependant, on ne peut pas écarter le
déclaration de sinistre valide. Certaines polices risque que le commerçant utilise l’argent pour autre
indicielles peuvent être assorties d’un processus chose et ne soit pas en mesure de le restituer quand
de demande d’indemnisation simple, mais au Migbaru en a besoin, ni le risque d’une escroquerie
prix d’une couverture très spécifique (par ex. sous une forme ou une autre. Même dans ce cas,
inondation), ce qui peut être vérifié facilement cependant, Migbaru pourrait probablement récupérer
sans la visite d’un agent d’assurance. la valeur correspondante en nature.
Possibilités d’amélioration :
Dans l’exemple ci-dessus, la police d’assurance offre une indemnité potentielle plus
importante, mais les conditions de cette indemnisation sont limitées à la survenue d’un type
d’événement très spécifique, au cours d’une période de temps limitée. En renonçant à
acheter la police, Migbaru se prive d’une indemnisation potentielle plus importante, mais
gagne en flexibilité quant à la manière dont il peut dépenser l’argent qu’il a ainsi économisé.
Par exemple, si Migbaru devait faire face à une urgence de santé, il aurait encore l’argent
qu’il n’a pas dépensé pour la prime et pourrait, en outre, solliciter un crédit auprès du
commerçant. Si les polices de micro-assurance peuvent offrir une valeur ajoutée, les
fournisseurs de services financiers formels doivent également comprendre que les
contraintes propres à une police d’assurance limitent la capacité des utilisateurs à pratiquer
la « culture de liquidités ». C’est pourquoi, pour couvrir des risques imprévus, beaucoup de
gens préfèrent les petits crédits.
45 Stuart Rutherford (2016), Getting and Spending in Central Bangladesh - Money management patterns in fifty low-income households.
46 Les garde-monnaie sont des personnes suffisamment fiables pour se voir confier l’argent d’un tiers. Il peut s’agir d’un commerçant, d’un
collègue de travail, d’un membre de la famille ou d’un voisin. Le principe consiste à allouer une partie de ses ressources à la prévention des
risques, plutôt que d’acheter un produit qui ne vous couvrira que dans certaines conditions. Dans cet exemple, d’autres stratégies consisteraient
à creuser un puits, investir dans l’irrigation, ou encore changer le type de culture pratiquée.
47Les opérateurs de réseaux mobiles offrent de plus en plus de produits de micro-assurance pour fidéliser la clientèle et réduire le taux de
désabonnement. Bon nombre de ces produits (un tiers selon cette publication du CGAP de 2014 : http://www.cgap.org/publications/emerging-
global-landscape-mobile-microinsurance) sont offerts gratuitement, bien que souvent conditionnés par l'activité des clients. Les produits
« freemium », qui consistent à offrir un premier niveau d’assurance de base gratuitement, sont également une offre courante. Toutefois, bon
nombre de ces polices offrent une couverture très basique, la plupart du temps sans choix.
48 Ignacio Mas et John Gitau (2014), Liquidity Farming: How the poor cultivate relationships to create sources of future cash.
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30 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Exemple 4. Effectuer un paiement : argent mobile vs espèces
La situation : Bien que Betty ait un compte d'argent mobile et l'utilise régulièrement pour
acheter du crédit de communication et payer ses factures mensuelles, elle ne l'utilise pas
souvent pour faire des achats dans les magasins. Alors qu'elle fait la queue à la caisse du
supermarché, Betty accède à son portefeuille mobile et vérifie le solde de son compte. Après
vérification, Betty voit qu'elle a à la fois assez d’espèces et de monnaie électronique pour
payer ses courses. Voici comment elle évaluerait les deux options.
Sécurité Le principal risque est d'envoyer par erreur de l'argent à Il y a un risque de sécurité à transporter des espèces
un mauvais numéro de commerçant et de ne pas être en pour effectuer ces paiements, car elles peuvent être
mesure de le récupérer. perdues ou volées ; cependant une fois à la caisse, ce
En outre, il existe une variété de stratagèmes de fraude risque est négligeable.
sur les systèmes de transactions mobiles, mais il est rare
que les utilisateurs perdent de l'argent.
Coût Cela peut dépendre du système, et parfois du Le retrait au guichet automatique ou en agence bancaire
commerçant concerné, mais généralement les paiements peut être assorti de frais, mais souvent les entrées d’argent
chez les commerçants sont gratuits ou assortis d’un très des ménages à faibles revenus se font en espèces, de sorte
faible coût49. Ce coût est habituellement beaucoup moins que le coût est tout à fait minime.
élevé que celui d’une carte de crédit, mais plus élevé que
celui d’une carte de paiement.
Rapidité Souvent lent ; après avoir accédé au compte, saisi le La principale difficulté survient lorsque le commerçant n’a
montant du paiement et le numéro du commerçant, le pas les espèces requises pour rendre la monnaie au client.
système peut prendre un certain temps pour envoyer C’est probablement rare dans les supérettes, mais peut
une confirmation à la fois à l’acheteur et au vendeur. être fréquent dans les petites boutiques de détail.
Cela peut être fastidieux dans un endroit comme une
supérette, où se forment souvent des files d’attente de
clients.
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31 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Commodité La valeur électronique est pratique à stocker. De plus, Les principaux inconvénients sont : de devoir se rendre à
dans les pays disposant de vastes réseaux d’agents, elle la banque pour effectuer des retraits suffisants pour les
peut également être pratique à acheter. Cependant, paiements, mais si vous recevez des espèces directement,
l’utiliser pour faire un paiement dans la plupart des pays ce n’est pas un problème ; et de prendre le risque de
nécessite toujours de saisir une série de codes et stocker une somme d’argent importante entre les
d’attendre des confirmations, ce qui exige beaucoup différents paiements (par ex. vol, perte). Si l’on a assez
plus d’efforts que de compter simplement un peu d’argent liquide à un point de paiement donné (comme
d’argent liquide dans un portefeuille. Elle exige c’est presque toujours le cas), c’est un mode de paiement
également que les clients sachent lire et écrire. extrêmement pratique.
Les pionniers de M-PESA sont tombés sur une solution à plus forte valeur ajoutée pour
répondre à un besoin que les clients satisfaisaient déjà de manière informelle. Le service
s’est rapidement développé, et des services similaires se sont répandus dans les pays en
développement. Néanmoins, dans l’ensemble, les transactions mobiles continuent à se
limiter aux transferts d’argent nationaux, au paiement de factures et à l’achat de crédit de
communication. Plus précisément, ces services n’ont pas réussi à atteindre un taux
d’utilisation élevé pour les paiements de détail51.
L'une des principales raisons en est le manque persistant de valeur ajoutée claire de ces
services par rapport à la simple utilisation d’espèces. En outre, le paiement mobile ne résout
aucune des grandes difficultés que pose le paiement de détail, n’offre aucun avantage
supplémentaire important et continue à être moins intéressant sur des aspects majeurs
comme la rapidité et la commodité. C’est pourquoi il n’est pas surprenant de constater que
tous les fournisseurs qui ont essayé d’encourager les clients à utiliser leur compte de
transactions mobile pour faire des paiements de détail ont échoué à stimuler réellement
l’adoption.
Possibilités d’amélioration :
Dans un précédent document intitulé Repenser les modèles de services financiers digitaux
pour relever le défi des big data 52, nous examinons de manière plus approfondie les
possibilités de digitalisation des paiements de détail. En synthèse, nous reconnaissons que
les fournisseurs de services de transactions mobiles doivent résoudre les problèmes actuels
de rapidité et de commodité, et fournir une proposition de valeur claire aux clients et aux
commerçants. En outre, ils doivent cibler des groupes démographiques spécifiques et
explorer l’utilisation des paiements mobiles pour les biens et services en ligne comme l’a fait
avec succès l’application WeChat de Tencent en Chine.53
49 Il doit être noté que, parfois, ces coûts ne sont pas très transparents. Voir : Mazer, R. Fixing Hidden Charges in Lipa na M-PESA, CGAP.
50 Pour en savoir plus sur l’histoire de M-PESA, voir : Lonie, S. et Hughes, N. M-PESA: Mobile Money for the "Unbanked" Turning Cellphones into 24-
Hour Tellers in Kenya.
51Nous fondons notre jugement sur la faible part de paiements de détail effectués par voie mobile en pourcentage du total des paiements de
détail. Cependant, en valeur absolue, il y a certainement d'importants volumes de paiements effectués par le biais de systèmes comme Lipa na
M-PESA au Kenya. Le rapport annuel 2016 de Safaricom fait état de 43 603 commerçants actifs (sur une base de 30 jours) et de 20,2 milliards de
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32 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
shillings kenyans (environ 195 millions USD) de transactions (mars 2016).
52 Schiff, A. & McCaffrey, M. (2017). Repenser les modèles de services financiers digitaux pour relever le défi des big data.
53 Dans de nombreux pays, en particulier en Afrique, la connectivité digitale reste un obstacle pour ce type d’approche. Il est donc suggéré de
cibler plutôt les personnes à revenus moyens à élevés, qui forment de toute façon probablement la grande majorité des clients utilisant des sites
de commerce en ligne.
FINCLUSION TO FINTECH
33 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
05
Développement
de produits :
idées pour les
acteurs fintech
FINCLUSION TO FINTECH
34 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
L’un des principaux objectifs de ce document est de convaincre les lecteurs que le
développement de produits financiers pour le marché de masse dans les pays en
développement doit adopter une approche différente. En synthèse, le futur développement
de produits 54 dans ce secteur devrait :
1) Créer des solutions en s’inspirant des techniques populaires de gestion financière
informelles employées par les ménages depuis des générations, plutôt que d’essayer
d’étendre l’accès aux produits financiers conçus pour des personnes ayant des stocks et
des flux financiers plus importants et des besoins plus stables ;
2) Utiliser des outils digitaux pour concevoir des produits évolutifs et flexibles. Développer
des produits capables d’aider les clients dans leurs processus décisionnels complexes et
d’intégrer d’autres aspects de leur vie, comme les réseaux sociaux et les actifs mobiliers,
dans leur gestion financière.
En résumé, plutôt que d’adopter une stratégie « Push » en poussant leurs produits sur le
marché des personnes à faibles revenus, les fournisseurs de services financiers digitaux
devraient suivre une stratégie « Pull » en développant des solutions basées sur la demande
de services.
Dans cette section, nous présentons cette idée organisée autour de deux thèmes centraux de
la finance informelle et étudions les solutions technologiques afin d’identifier les initiatives
qui ont le potentiel de mettre sur le marché de nouveaux produits enthousiasmants. Plus
précisément, nous nous intéressons aux thèmes suivants : 1) le soutien financier des réseaux
sociaux et 2) la dilution des frontières entre les différentes catégories de produits.
Ce document souligne l’importance de la gestion des liquidités pour les personnes à faibles
revenus en raison de la volatilité de leurs entrées et sorties d’argent. Il explique en outre que
la liquidité n’est pas gérée en conservant beaucoup d’actifs liquides, en application du
principe d’argent actif. Celui-ci est fréquemment mis en œuvre à travers la culture de
liquidités, via de multiples entrées d’argent et par la création d’un réseau social qui peut
aider en cas de besoin. Cela signifie que les réseaux sociaux qui soutiennent la gestion
financière sont primordiaux. De plus, les produits qui peuvent être conçus pour améliorer
l’utilisation des relations sociales dans la gestion financière ont une grande importance et
mérite toute notre attention.
De gros progrès ont déjà été faits sur le soutien financier du réseau social. L’avènement de
l’argent mobile il y a 10 ans a été une évolution majeure qui a permis à des millions de
FINCLUSION TO FINTECH
35 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
personnes d’envoyer de l’argent plus facilement aux membres de leur réseau social dans
d’autres régions de leur pays. L’argent mobile a été largement adopté dans les pays en
développement où les solutions financières formelles ne sont pas populaires.
Cependant, plus récemment, des entreprises comme Paypal et Venmo, WeChat, Google
Wallet, Facebook Messenger, Snapchat et Square ont développé des solutions digitales de
virement de particulier à particulier (P2P)55 qui fonctionnent bien sur les marchés
développés et ceux des BRIC.
Ces solutions encore très simples permettent aux utilisateurs de s’envoyer de l’argent,
généralement à l’aide d’un téléphone mobile. Pour un grand nombre de gens, cela semble
plus pratique que d’envoyer de l’argent liquide ou d’effectuer des virements bancaires en
ligne. Toutefois, il est probable que ces systèmes puissent encore être significativement
améliorés.
Malheureusement, bien qu’il existe déjà un grand nombre de données enregistrées par ces
systèmes P2P, très peu de recherches permettent d’établir l’objet premier des transferts P2P
et par conséquent les améliorations qui pourraient être utiles. Nos commentaires sont donc
basés sur l’observation des mécanismes de soutien financier du réseau social dans les pays
en développement. Nous présentons ci-dessous quelques idées qui offrent à nos yeux un
grand potentiel.
De plus, des produits comme Google Wallet, Circle et Facebook Messenger permettent
désormais plus facilement qu'auparavant de demander de l'argent à ses contacts. Bien que
cela soit logique dans une situation où l'on vous doit de l'argent, les demandes plus générales
pourraient avoir moins de succès. Une caractéristique utile serait de pouvoir demander de
l'argent à des fins spécifiques57.
Imaginons par exemple que le moment du paiement des frais de scolarité approche et qu’une
personne souhaite envoyer une demande à plusieurs de ses contacts pour l’aider à les payer.
L’argent reçu suite à cette demande pourrait être envoyé directement à l’établissement
scolaire concerné ou sur un compte qui ne pourrait être utilisé que pour le paiement des frais
de scolarité. Des solutions comme celles-ci peuvent aussi être attractives dans la mesure où
elles rejoignent l’approche de comptabilité mentale des utilisateurs. Le produit M-Tibia, une
coentreprise formée par Safaricom et PharmAccess, grâce auquel les clients reçoivent des
contributions au paiement de soins médicaux dans un portefeuille dédié, en est une
illustration58.
Crédit P2P
Une autre tendance mise en évidence dans ce document est la grande proportion de prêts
consentis entre pairs dans les communautés à faibles revenus. Ces prêts informels servent à
gérer les liquidités à court terme et à faire face aux risques imprévus à mesure qu'ils
surviennent. Ils présentent des avantages par rapport à la plupart des produits financiers
formels, car il est possible d’accéder à de petits montants, pour des périodes courtes et sans
payer d’intérêts, ou très peu.
Des solutions ont déjà été testées pour déterminer si les produits digitaux pouvaient
apporter des améliorations à cette pratique informelle. De nombreuses solutions offertes
actuellement sont basées sur les modèles d’AREC ou ACEC (MChama, PezaZetu, Puddle
et MoneyFellows par exemple), mais les fournisseurs peuvent adopter toute une variété
d’approches différentes64. Un second groupe de produits conçus comme des teneurs de
marché aide à structurer les prêts et à assurer les remboursements des emprunteurs vers
les investisseurs sans l’implication d’une banque (PeerForm, Funding Circle, Prosper et
Lending Club sur les marchés développés et Pezesha au Kenya).
Tandis que pour le premier groupe de produits, les concepteurs doivent s’assurer qu’ils
apportent des améliorations concrètes aux pratiques informelles déjà utilisées (comme dans
le cas des groupes d’épargne digitaux), pour le second groupe, ils doivent faire en sorte de
créer de nouvelles possibilités pour les emprunteurs. Toutefois, la plupart des modèles
actuels exigent des vérifications d’identité qui sont difficilement applicables dans les pays
en développement (par exemple notation de crédit, facture de services publics), et beaucoup
sont conçus pour refinancer des emprunts existants à plus long terme.
Par conséquent, il faudrait faire évoluer ces modèles de manière significative afin d’assurer
leur pertinence pour les personnes à faibles revenus dans les pays en développement, qui
recherchent des crédits instantanés, de faible montant et sur de courtes périodes, et qui
disposent de très peu d’éléments pour prouver leur identité. D’autres types de données
pourraient aider à surmonter cet obstacle lié à l’identification, mais il est difficile de prévoir
la disponibilité de ces données.
54Pour approfondir la réflexion sur les moyens de créer des services financiers digitaux basés sur des pratiques financières informelles intuitives
et utiles, voir le très riche contenu de : Gupta, A. K., Mas, I., & Varghese, A. (Octobre 2015). Rendre les services financiers digitaux pertinents – 3ème partie
55Les solutions internet ne sont pas encore adaptées à la plupart des marchés des pays en développement où la connectivité internet est encore
faible. De plus, ces services sont conçus pour les clients qui ont déjà des cartes de débit ou de crédit, lesquelles sont utilisées pour l'enregistrement
des clients et pour retirer et déposer de l'argent liquide dans le système. Dans certains pays en développement, des comptes bancaires ou des
comptes de transactions mobiles pourraient être utilisés pour enregistrer les clients, mais dans la plupart des cas, la connectivité internet doit
FINCLUSION TO FINTECH
37 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
d'abord être améliorée et d'autres solutions devront être utilisées pour l'enregistrement des clients (par ex. la biométrie) et le transfert d’espèces
dans et hors du système (par ex. les réseaux d’agents).
56 Cette
idée, ainsi que d'autres suggestions excellentes, vient de Mas, I. (juillet 2013) The Need for Intuition Rather than Simplicity Around
Account Features. Disponible en ligne : http://blog.microsave. net/the-need-for-intuition-rather-than-simplicity-around-account-features/
57Un exemple de ce type de produit est Tilt (www.tilt.com), une start-up de paiement (désormais détenue par AirBnB qui veut l’intégrer dans sa
plateforme) qui cible la génération des Millennials dans les pays développés et leur permet de créer et partager des collectes de fonds ciblées entre
amis. Des applications de crowdsourcing de ce type sont disponibles sur les marchés en développement comme l'Afrique de l'Est. Toutefois,
comme on l'a vu précédemment, ces applications sont généralement axées sur les flux de fonds des pays développés vers les pays moins
développés. Ils ne permettent donc pas de tirer parti des relations existantes au sein des communautés à faibles revenus. Voir cette étude pour plus
de détails : https://www.fsdafrica.org/wp-content/uploads/2016/10/16-11-07-Crowdfunding_Report-final-1.pdf.
58 Pour plus d’informations, voir : https://www.pharmaccess.org/update/safaricom-launches-transformative-partnership-to-promote-healthcare-
inclusion-in-kenya/.
59 La croissance initiale de WeChat – le service de paiement mobile chinois – a été liée à l'introduction de produits ciblant la contribution
financière des réseaux sociaux des utilisateurs à l’occasion d’événements spéciaux. En 2014, WeChat a introduit le concept de « Red Packets »
digitaux dans son réseau de paiement. Les « pochettes rouges » reproduisent la coutume traditionnelle consistant à offrir des enveloppes rouges
contenant de l’argent lors d'événements spéciaux, comme les mariages, les fêtes et les anniversaires. Lorsque les pochettes rouges ont été lancées
en 2014 pendant le Nouvel An chinois, le nombre de personnes utilisant les paiements WeChat a plus que triplé, passant de 30 millions à 100
millions par mois. Pour en savoir plus: https://www.fastcompany.com/3065255/china-wechat-tencent-red-envelopes-and-social-
money?partner=rss&utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+fastcompany%2Fheadlines+%28Fast+Company%
29. Si une entreprise devait développer un tel produit dans les marchés en développement, il s'agirait très probablement d'un site de messagerie
sociale de premier plan comme Facebook.
60 Pour une présentation plus approfondie des groupes d’épargne, voir : http://www.seepnetwork.org/filebin/pdf/resources/Savings_FINAL_web.pdf
61BFA et la Fondation Gates fournissent quelques repères utiles dans cette note d'orientation :
https://docs.gatesfoundation.org/documents/Focus%20Note%201%20 Outcompeting%20the%20Lockbox%20-
%20Linking%20Savings%20Groups%20to%20the%20Formal%20Financial%20Sector.pdf
62Au Nigeria, Diamond Bank a lancé le produit Diamond eSUSU en 2016, mais aucun résultat n'a encore été publié
(http://www.diamondbank.com/personal/savings/diamond-esusu/). eSUSU teste actuellement une solution via une application
(http://www.esusu.today/) ; eMoneyPool a développé une solution web, mais ne la propose que sur le territoire américain
(https://www.youtube.com/watch?v=_ dmoXYJr6rk). Les bailleurs de fonds opérant dans les pays en développement se sont également montrés
très intéressés à la fois par la création de liens entre les groupes d’épargne et les institutions financières formelles (résultats très mitigés) et par le
développement d’interfaces digitales permettant la gestion des groupes. En Tanzanie, la plateforme Digital Saving Group (DSG) a été créée pour la
Fondation Aga Khan avec un financement de FSDT et de la Fondation Gates, et un appui technique de BFA
(http://www.akdn.org/sites/akdn/files/media/publications/2017_04_-_akf_-_digital_savings_groups_dsg.pdf ). Cependant, nous n’avons pu
trouver aucun rapport sur le système. CARE International a mené un projet pilote consistant à relier des groupes d'épargne au porte-monnaie
électronique M-Pesa en Tanzanie, mais a rencontré des problèmes et a décidé de se concentrer plutôt sur les partenariats avec les banques
commerciales (http://www.care.org/sites/default/files/documents/ECON-2013-CARE-%20Connecting-the-worlds-poorest_0.pdf). En 2014, la
GSMA a alloué des fonds à Airtel Ouganda, qui s'est associée à la Grameen Foundation pour développer Airtel Weza. L'étude de cas de la GSMA
sur ce produit (2015) a noté qu'il était trop tôt pour en tirer des conclusions et que son potentiel commercial était incertain étant donné la faible
utilisation du service (https://www.gsma.com/mobilefordevelopment/wp-content/ uploads/2015/06/Case-Study_Airtel-Uganda-1.pdf ). Enfin,
une subvention de 17,6 millions USD a été accordée à Oxford Policy Management dans le cadre du projet Savings at the Frontier en 2015. Une
revue de la littérature existante sur les liens entre les groupes d’épargne et le financement formel est en cours et des projets pilote sont prévus en
Tanzanie, en Zambie et au Ghana (http://www.opml.co.uk/projects/savings-frontier).
63 Voir cet article d’Accion pour plus d’informations sur les cercles d’épargne : http://blogs.accion.org/fin-tech/digital-savings-circles/
64 PWC, Peer Pressure (2015) présente en particulier des modèles impliquant une collaboration avec des banques.
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38 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Thème 2. Gommer la différenciation entre les catégories de produits
Deux points méritent d’être soulignés ici. Le premier est que les personnes à faibles revenus
ne considèrent pas qu’un seul produit lorsqu’elles cherchent à atteindre un objectif donné.
Des produits plus dynamiques, qui s’affranchissent des frontières existantes entre les
catégories actuelles comme les comptes d’épargne, les prêts et les polices d’assurance,
pourraient avoir plus de succès. Le deuxième point est que l’utilisation de plusieurs produits
à la fois est compliquée, ce qui signifie qu’une aide à l’optimisation des ressources peut
également s’avérer utile.
Ces technologies chatbot sont déjà entrées dans la sphère financière. L'un des meilleurs
exemples est le chatbot de MasterCard 67 propulsé par Kasisto68. Sur les marchés moins
développés, nous avons vu le lancement de quelques robots simples conçus pour contribuer
à l’éducation financière et à la sensibilisation69. Pour ce qui est d'aider les utilisateurs dans
FINCLUSION TO FINTECH
39 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
leur gestion financière, Kudi (www.kudi.ai) a été tout récemment lancé au Nigeria pour aider
à gérer le paiement de factures et les transferts P2P.
De plus, des percées plus récentes dans le domaine de l'intelligence artificielle
d’application générale (les principaux exemples étant Watson d'IBM et DeepMind de
Google) montrent que les chatbots peuvent fonctionner en autoapprentissage et se former
à nouveaux domaines de connaissance70. C’est passionnant si l’on considère qu’ils pourront
un jour aider les utilisateurs à répondre à des questions complexes telles que : « quel est le
meilleur usage à faire du prochain dollar reçu ? ». Cependant, l’apprentissage d’une
multiplicité de langues régionales présentes dans de nombreux pays en développement
constituera inévitablement un défi de taille.
En théorie, ces technologies peuvent nous aider à collecter de l’information de manière plus
efficiente, l’analyser pour nous et fournir les solutions recherchées. En outre, les chatbots
pourraient devenir des « avocats du numérique » pour les personnes à faibles revenus, en
les aidant à naviguer dans les systèmes formels complexes par lesquels ils doivent passer
pour accéder aux produits et services financiers essentiels71.
S’il est facile de voir le rôle que pourrait jouer ces robots conversationnels pour aider les
utilisateurs à prendre des décisions complexes et à mieux gérer leur argent, l’un des plus
grands défis qu’ils auront à relever sera de recueillir les informations dont ils ont besoin sur
le contexte dans lequel s’inscrivent ces décisions pour fournir des réponses optimales aux
différents utilisateurs. Dans les pays en développement, les pratiques actuelles courantes
(transactions en espèces, épargne en animaux, gestion des risques via des groupes
d’épargne) ne fournissent pas l’empreinte numérique72 dont ces systèmes ont besoin
pour fonctionner et améliorer leurs réponses aux utilisateurs.
Bien avant que la généralisation de ces solutions ne devienne une réalité dans les pays en
développement, des améliorations seront progressivement apportées grâce à ces
technologies. Elles peuvent déjà aider les clients à choisir le crédit le plus approprié ou à
configurer des rappels d’épargne ou des plafonds de dépenses. Juntos73 a ouvert la voie
dans le monde en développement en travaillant avec les banques et les télécoms sur des
plateformes SMS pour améliorer l'expérience client et augmenter leur taux d'activité.
D'autres solutions comme celles-ci sont certainement prometteuses pour l'inclusion
financière.
Des produits tels que le P9 de SafeSave au Bangladesh (2007) et Jipange KuSave au Kenya
(2010)75, ont été spécialement conçus pour offrir une expérience d'emprunt à des fins
d'épargne. Ces produits accordaient des prêts aux clients, dont une partie était placée dans
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40 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
un compte d'épargne. Aux clients qui honoraient leur remboursement, ils proposaient des
crédits progressivement plus importants, dont une part plus élevée était versée dans leur
épargne. À terme, les clients pourraient « emprunter » leur propre argent.
Bien qu’il s’agisse d’un moyen d’astucieux d’aider les utilisateurs à passer d’un emprunt
auprès d’une banque à un recours à sa propre épargne, le système présente un défaut
structurel. Il élimine en effet les revenus d’intérêts pour la banque, et donc son intérêt à
l’offrir. Toutefois, si l’on considère la technologie et l’offre de services financiers proposés
aujourd’hui par les opérateurs de réseaux mobiles suivant différents modèles de revenus,
un produit comme celui-ci pourrait fonctionner.
Une autre idée qui pourrait s'avérer séduisante est de gommer la frontière entre l'achat et
l'épargne. Par exemple, imaginez que chaque fois que vous utilisez votre portefeuille
d'argent mobile ou votre carte de débit, 1 % de la valeur de la transaction soit versée sur
votre compte d'épargne à long terme.76 Un tel produit pourrait être encore plus intuitif et
ne s'appliquer qu'à certains achats ou constituer une épargne à des fins spécifiques. Par
exemple, chaque fois que vous achetez un café, vous pourriez déposer de l'argent sur un
compte d'épargne scolaire. La conception devrait être suffisamment intuitive pour
reproduire les schémas de comptabilité mentale des utilisateurs, mais si elle est bonne, le
produit pourrait les aider à organiser ces dispositifs.
65Google a également acheté api.ai, une plateforme qui permet aux développeurs de créer des chatbots.
66Disponible en ligne sur Venture Beat : http://venturebeat.com/2016/11/11/facebook-messenger-chief-says-platforms-34000-chatbots-are-finally-
improving-user-experience/
67 Voir une démonstration des capacités de ce bot sur : https://www.youtube.com/watch?v=m-nbznORjaY
68 Parmi les autres exemples sur les marchés développés figurent Cleo (https://meetcleo.com/) et Penny (https://www.pennyapp.io/)
69 Voir Mr Finance Bot (http://www.onowmyanmar.org/mr-finance-bot/)
70 C'est encore très rare et n'est vrai que pour les robots pionniers comme ceux mentionnés.
71 DFS tech, filiale de DFS Labs, incubateur d'entreprises fintech spécialisé dans les marchés émergents, lance un consortium pour favoriser
l'innovation dans ce domaine. Voir pour plus de détails : http://www.dfslabtech.net/digital-advocates.html
72 Dans le document précédent intitulé Repenser les modèles de services financiers digitaux pour relever le défi des big data , nous décrivons les
stratégies que les fournisseurs de services financiers digitaux sont invités à suivre dès maintenant pour créer de meilleures bases de données dans
les pays en développement.
73Pour plus d'informations sur leur travail, voir cette étude de cas du CGAP : http://www.cgap.org/sites/default/files/Working-Paper-Juntos-
Finanzas-A-Case-Study-Oct-2015.pdf.
74 Pour en savoir plus sur ce phénomène, voir la Briefing Note de MSC : Borrowing to Save: Perspectives from Portfolios of the Poor.
75 Pour en savoir plus sur le fonctionnement de ces produits sur le marché, en particulier Jipange KuSave, voir cette étude de cas du CGAP.
76 On trouve des exemples de tels produits dans les pays développés, parmi lesquels le programme d'épargne « Keep the Change » de la Bank of
America (https://www.bankofamerica.com/deposits/manage/keep-the- change.go), qui consiste à arrondir le montant des achats quotidiens
effectués avec une carte de débit Bank of America et à verser la différence sur le compte d’épargne du client. Acorns (www.acorns.com) et
MoneyBox (ww.moneyboxapp.com) suivent le même concept, mais investissent la part arrondie plutôt que de la verser sur un compte d'épargne.
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Conclusion
Les idées présentées dans cette dernière section ne sont que des points de
départ. Elles se fondent sur l’identification de ce qui pourrait aider les
personnes à faibles revenus à mieux gérer leur argent et sur l’étude des derniers
développements des technologies de l'information. Nous souhaiterions voir plus
de recherche dans ces deux domaines.
Il est important de garder à l’esprit que les entreprises
fintech ont emprunté leur processus de développement
de produits à des entreprises de technologies, et non à
des sociétés financières. Ce facteur sera essentiel à la
réussite du développement de nouveaux produits
adaptés. Comme nous l'avons mentionné plusieurs fois
dans ce document, bien qu'il existe quelques très
bonnes bases de données générales sur les
comportements financiers comme Findex, et quelques
ensembles de données approfondies recueillies dans
certaines régions spécifiques par le biais de journaux
financiers, nous ne disposons pas encore du niveau de
granularité nécessaire pour prédire quels produits
feront les marchés de demain.
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42 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Annexes
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43 Fintech product development for low-income markets © 2017 Helix, Institute of Digital Finance
Annexe 1. Brève présentation de la finance digitale
Cette annexe propose une brève introduction à la finance digitale pour les lecteurs qui ne
sont pas familiers du secteur. L’expression finance digitale désigne les services bancaires
fournis par des agents et les services de transactions mobiles offerts par les banques et les
opérateurs télécoms. On trouve ces services dans les pays en développement ; actuellement,
271 offres de services financiers digitaux (transactions mobiles et services bancaires par
agent) ont été lancées dans 93 pays77.
Ces dispositifs se caractérisent par l’utilisation des réseaux de téléphonie mobile pour offrir
aux clients des services financiers, soit par le biais de terminaux mobiles, soit par le biais de
systèmes à carte. Les dépôts et les retraits d’espèces s’effectuent en grande partie par
l’intermédiaire de réseaux de magasins de détail78, qui touchent une commission pour
fournir des services de conversion des espèces en valeur électronique, et inversement.
Si les cas de réussite de services financiers digitaux se sont multipliés au cours des dix
dernières années, ils sont encore largement l’exception dans le secteur. Les fournisseurs ont
des difficultés à bâtir et à entretenir de grands réseaux d’agents, à faire adhérer de nouveaux
clients et à convaincre les clients existants d’utiliser les systèmes régulièrement.
Pour en savoir plus sur la finance digitale, voir les nombreuses ressources proposées par le
CGAP, GSMA MMU, MicroSave Consulting, l’Institut Helix, le programme MM4P du FENU,
l'Alliance for Financial Inclusion (AFI), le CENFRI et Financial Sector Deepening Kenya
(FSDK).
77 GSMA (2017), « Le point sur le secteur : les services d’argent mobile – Édition spéciale dix ans : 2006-2016 ».
78 Pour en savoir plus sur la conception de ces systèmes de distribution, voir : Mas, I. et McCaffrey, M. Designing Distributions Systems for Digital
Money.
79 Pour une présentation plus approfondie de ces transactions, voir : « OTC: A Digital Stepping Stone, or a Dead End Path? ».
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Annexe 2. Accessibilité, adoption et utilisation de la finance digitale
D'autres données tirées de l’étude Financial Access Survey du FMI révèlent que sur les 93
pays offrant des services financiers digitaux en 2015 83, 59 (63 %) ont déclaré des données
sur les comptes de transactions mobiles pendant au moins un an entre 2013 et 2015
(dernière année disponible). Dans ces pays, 30 % des adultes en moyenne avaient créé un
compte. Toutefois, la valeur médiane qui, à notre avis, constitue un repère plus précis n'était
que de 13 %. Cela s'explique par le fait que le nombre de « comptes créés pour 1 000
adultes » ne représente pas la proportion d'adultes ayant créé un compte dans le pays.
Dans ces bases de données, les adultes ayant plusieurs comptes sont comptabilisés plus
d'une fois. Si l’on prend l’exemple des principaux pays, le pourcentage d'adultes ayant créé
un compte de transactions mobiles serait de 184 % en Tanzanie, 118 % au Kenya, 112 % en
Ouganda et 104 % au Rwanda. Ces chiffres s’expliquent par le fait que les statistiques de
clients enregistrés chez les différents fournisseurs sont simplement additionnées, un même
client se trouvant donc souvent compté plusieurs fois. Nous savons, d'après l'étude
indépendante Finclusion menée par Intermedia au cours de cette période, que la proportion
réelle d'adultes ayant créé un compte mobile dans ces pays est de 50 % à 75 % inférieure à
ces niveaux. Par conséquent, nous pensons que la proportion médiane de 13 % d’adultes
inscrits constitue un maximum dans les pays où sont offerts des services de transactions
mobiles, ce qui est en cohérent avec l'estimation de la GSMA de 10 %.
Les statistiques sur les comptes bancaires présentent des tendances similaires. Les données
Global Findex de la Banque mondiale (2014) montrent que seulement 54 % des adultes ont
des comptes dans des pays à revenu intermédiaire et faible, et que ce chiffre tombe à 28 %
dans les pays à faible revenu84. Ce chiffre étant de 91 % dans les pays à revenu élevé, de
nombreux analystes du secteur estiment que les lacunes en termes d'accès aux services
financiers sont importantes dans les pays à revenu intermédiaire et à faible revenu tout
particulièrement. Lorsque l'accès aux services financiers s'élargit, on constate une
augmentation de la création de comptes, ce qui signifie que le manque d'accès était et
demeure un obstacle majeur.
Par conséquent, l'essentiel du travail accompli pour développer les services financiers
formels dans le monde en développement est axé sur l'amélioration de l'accès à ces services.
Cependant, les chiffres que nous présentons ci-dessous montrent que nous devons
également mettre davantage l'accent sur l'utilité des services qui sont offerts.
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Une fois le compte créé, son utilisation est irrégulière dans les pays
à faible revenu
Au-delà de la question du faible taux de création de comptes bancaires ou de comptes de
transactions mobiles, une autre préoccupation vient du fait que seule une faible proportion
des clients qui ont adhéré à ce service l’utilisent réellement. La GSMA rapporte que 21 %
seulement des comptes digitaux sont utilisés au moins une fois tous les 30 jours, ce qui laisse
79 % des comptes inactifs ou utilisés de façon extrêmement irrégulière. 85
Les données Financial Access Survey du FMI fournissent des chiffres très similaires. Sur les
59 pays ayant déclaré la création de comptes d'argent mobile, 14 (24 %) n'ont pas fourni de
données sur l'utilisation active des comptes. En outre, six pays ont communiqué les mêmes
chiffres pour la création et l’utilisation active, ce qui est pratiquement impossible, et nous
conduit à éliminer ces statistiques. Il reste donc les données de 39 pays, qui représentent
42 % des pays ayant effectué une déclaration. Nous constatons que sur le total des comptes
créés, seuls 36 % en moyenne (33 % en valeur médiane) ont été utilisés sur une base de 90
jours.
Sur les comptes de transactions mobiles actifs déclarés par les 39 pays mentionnés
précédemment, on relève une moyenne de 4,1 (médiane = 2,0)86 transactions par mois87.
Même au Kenya, un modèle en matière de services financiers mobiles et de services
bancaires par agent, Safaricom a estimé en 2014 que 98 % des transactions étaient encore
effectuées en espèces88. En 2015, seuls 46 % des comptes mobiles avaient un solde positif89,
ce qui signifie que la plupart des portefeuilles mobiles sont vides.
Cela ne signifie pas que les gens n'épargnent pas, mais plutôt qu'ils choisissent de le faire
autrement. Les données de l’étude sur les journaux financiers au Kenya réalisée en 2014
montraient que 91 % de l’épargne était réalisée par le biais de comptes informels dans le
pays. Au Rwanda, le dispositif financier le plus couramment utilisé était « l'épargne à
domicile »91. Au Mexique, l’instrument le plus courant était « l'emprunt auprès de la famille
et des amis »92.
Les données de la base Findex (2014) de la Banque mondiale montrent une tendance
similaire pour les comptes bancaires. D’après ces données, dans les pays à revenu élevé, 91 %
des adultes dotés d’un compte effectuent au moins un retrait par an, et 89 % au moins un
dépôt par an. Bien qu'il s'agisse d'un repère minimal pour mesurer l'utilisation d'un compte
dans la pratique, il est intéressant de le comparer aux pays à faible revenu où ces mêmes
mesures sont de 60 % et 64 % respectivement93. Sur cette base, nous pouvons estimer que
dans les pays à faible revenu, les adultes sont 39 % à 52 % moins susceptibles d’effectuer ces
opérations fondamentales sur leur compte, même sur une base annuelle.
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Utilisation annuelle des comptes
financiers
91% 89%
64%
60%
Pourcentage de personnes ayant fait un retrait Pourcentage de personnes ayant fait un dépôt au
au cours des 12 derniers mois cours des 12 derniers mois
Nous pensons que le fait d’avoir effectué un dépôt ou un retrait sur son compte au cours des
12 derniers mois est un indicateur insuffisant pour mesurer l’utilisation. C’est pour cette
raison que nous avons également examiné les autres mesures de l’utilisation des comptes
dans la base de données Findex 2014. Les données sur les retraits montrent que cette
tendance à l’utilisation beaucoup plus fréquente des comptes dans les pays à revenu élevé se
poursuit à mesure qu’augmente l’intensité d’utilisation. En examinant les données déclarées
sur les retraits94, nous constatons que l’utilisation dans les pays à revenu élevé est beaucoup
plus fréquente que dans les pays à faible revenu.
D'autres données du projet Making Access Possible (MAP) ont montré que sur les six pays
étudiés, un pays avait un taux de dormance des comptes bancaires de 76 %, tandis que dans
les cinq autres pays, 50 % à 71 % des adultes utilisaient simplement leurs comptes bancaires
comme « boîte aux lettres »95. Cette expression désigne les comptes utilisés pour recevoir
un paiement destiné à être immédiatement et intégralement retiré. Cela prouve une fois de
plus que l'utilisation des services financiers dans les pays en développement est
particulièrement faible, indépendamment de l’accessibilité de ces services.
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Les cas d'utilisation sont encore très spécifiques
Les raisons pour lesquelles l'utilisation des services financiers formels accessibles est si faible
sont complexes. Mais l'analyse ci-dessus montre bien qu'il existe des preuves convaincantes de
la faiblesse d’utilisation de ces services parmi ceux qui y ont accès et parmi ceux qui y ont adhéré.
En outre, l'utilisation est plus faible dans les pays à faible revenu que dans les pays à revenu
élevé, ce qui semble indiquer soit que les services ne sont pas vraiment nécessaires aux
personnes à faibles revenus, soit qu’ils ne sont pas conçus pour elles. Pour mieux comprendre
ce phénomène, nous proposons d’examiner plus en détail les cas d'utilisation des services.
Les nombreuses recherches sur l'inclusion financière exposées dans ce document montrent que
les personnes à faibles revenus n'ont pas moins besoin de services financiers que le reste du
monde, mais qu'elles ont simplement besoin que ces services soient mieux conçus pour satisfaire
leurs besoins. La vie financière des personnes à faibles revenus est plus complexe et les produits
formels qui leur sont offerts n’offrent pas de valeur ajoutée suffisante par rapport aux stratégies
informelles qu'elles utilisent déjà, ou que de manière très spécifique. Dans le deuxième cas, les
services sont adoptés mais à des fins limitées.
L’utilisation des transactions mobiles est dominée par trois types de transactions : la recharge
de crédit de communication, le paiement des factures et les virements entre particuliers (P2P).
Au total, ces trois types de transactions représentent 97 % du volume et 90,7 % de la valeur96 des
transactions financières mobiles dans le monde. Si la plupart des utilisateurs sont d’accord pour
dire que la recharge de temps de communication et le paiement des factures sont des
fonctionnalités très pratiques, il est difficile d’affirmer qu’elles transforment la vie des gens.
Toutefois, les transactions P2P (et ses dérivés moins fréquemment utilisés : les transferts de
gouvernement à particulier [G2P], d'entreprise à particulier [B2P], de particulier à entreprise
[P2B] et d'entreprise à entreprise [B2B]) et les services de type bancaire comme l'épargne, le
crédit et l'assurance ont certainement le potentiel d'améliorer considérablement la qualité de vie
des personnes à faibles revenus, mais la plupart ne sont pas populaires. L'utilisation de ce que
nous appelons les « services financiers sophistiqués », tels que les produits de crédit, d'épargne
et d'assurance, est également faible. Il n'existe que 26 services d'épargne mobile dédiés et 52
services de crédit mobile dans le monde97. Parmi les comptes d'épargne mobile au plan mondial,
seuls 69 % ont un solde positif98.
Les transactions dans les pays en développement sont fréquentes, mais généralement de faible
valeur99, comme l’achat d'un billet d'autobus ou de lait par exemple. Aucune de ces opérations
ou presque n'est effectuée via le téléphone mobile, et encore moins par l'intermédiaire d'un
compte bancaire. Au Kenya et sur d'autres marchés basés sur les portefeuilles mobiles, la
conception de ces systèmes rend ces petits paiements de proximité plus coûteux, plus
compliqués et plus lourds. En témoigne l'échec de la digitalisation des paiements des transports
publics (matatu) au Kenya100, où le tarif moyen est d'environ 0,50 USD. Enfin, l'étude Making
Access Possible (MAP) menée dans six pays a révélé que 99 % des adultes effectuaient ces petits
paiements immédiats exclusivement en espèces.101
À l'heure actuelle, l'argent mobile et les services bancaires par agent peuvent être utiles, mais ne
sont pas de nature à transformer les conditions de vie de beaucoup de ceux qui y ont accès et
encore moins de ceux qui les utilisent. Ce document aide à expliquer pourquoi en examinant par
quels moyens les personnes à faibles revenus gèrent leur argent et pourquoi elles choisissent de
continuer à utiliser des produits informels qu'elles ont adaptés à leurs besoins particuliers.
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80 GSMA (2016), « 2015 State of the Industry Report on Mobile Money »
81 Lorsqu’une entreprise de télécommunications lance des services de transactions mobiles pour ses clients, ces derniers y ont tous accès, mais
dans la pratique, ils peuvent ne pas en être informés ou ne pas disposer d’un agent à proximité qui rendrait le service pratique à utiliser. En
outre, ils peuvent ne pas disposer des documents d’identité nécessaires pour adhérer au service. Il est donc difficile de déterminer si l’écart entre
l’accès et l’adoption est dû au fait que le service n’est pas adapté aux besoins des clients ou qu’il ne les atteint pas véritablement.
82 Données analysées à partir du Portail Financial Access Survey du FMI. Disponible en ligne : http://data.imf.org/?sk=E5DCAB7E-A5CA-4892-
A6EA-598B5463A34C
83 GSMA (2016), « 2015 State of the Industry Report on Mobile Money ».
84Pourcentage d'adultes âgés de 15 ans et plus dans les pays respectifs. Au niveau mondial, 62 % de la population possède un compte et dans les
pays à revenu élevé, ce chiffre se monte à 91 %. Les pays à revenu élevé sont définis comme ceux dont le RNB par habitant était de 12 276 USD au
moins en 2010. Les pays à faible revenu sont définis comme ceux dont le RNB par habitant était inférieur ou égal à 1 005 dollars en 2010. Les
comptes considérés sont ceux fournis par une institution financière formelle ou un fournisseur de services financiers mobiles.
85Analyse réalisée à partir de données tirées de : GSMA (2017), « Le point sur le secteur : les services d’argent mobile – Édition spéciale dix ans :
2006-2016 ».
86Une transaction mobile désigne un paiement ou un transfert financier à un tiers effectué à partir du solde d'un compte d'argent mobile via
un téléphone mobile, ce qui inclue : les virements entre particuliers (P2P), les paiements de factures, les paiements chez des commerçants, et
les transferts d’argent internationaux. Il doit exister un réseau de points de transaction à l'extérieur des agences bancaires qui rend ce service
accessible aux personnes non bancarisées et sous-bancarisées. Les services qui permettent d’utiliser le téléphone mobile comme canal
supplémentaire pour accéder à un produit bancaire traditionnel ne sont pas inclus. Le service doit offrir une interface permettant aux agents
et/ou aux clients d’initier des transactions, et disponible sur les appareils mobiles de base.
87 Ce chiffre est inférieur pour les comptes créés dans l’ensemble des 59 pays ayant fait une déclaration : moyenne de 1,3 (médiane = 0,5)
transaction par mois.
88 Rapport annuel 2014 de Safaricom. Disponible en ligne :
http://www.safaricom.co.ke/annualreport_2014/public/downloads/DEEPEN%20FINANCIAL%20INCLUSION.pdf
89 GSMA (2016), « Mobile Insurance, Savings & Credit Report ».
90 Julie Zollman - FSD Kenya (2015), « Kenya Financial Diaries - The Financial Lives of the Poor ».
91 BFA (2016), « Rwanda Financial Diaries: Understanding the Financial Lives and Product Needs of Rwanda’s Underserved Consumers ».
92 Caitlin Sanford - BFA, Financial Diaries, MetLife Foundation (2016), « Estirando el Gasto - Findings from the Mexico Financial Diaries ».
93L’enquête Findex 2014 a cherché à déterminer la proportion de participants n’ayant fait ni retrait ni dépôt au cours des 12 derniers mois.
Dans les pays à revenu élevé, seulement 5 % des répondants n’avaient fait ni retrait ni dépôt, tandis que dans les pays à faible revenu, cette
proportion se montait à 25 % (cinq fois plus de personnes). C’est l’indicateur que les chercheurs de la Banque mondiale ont utilisé pour
mesurer la dormance des comptes, mais nous trouvons ce repère assez bas et nous choisissons donc de ne pas l’utiliser bien qu’il fasse
ressortir la différence de niveau d’utilisation entre les pays à revenu élevé et les pays à faible revenu.
94Nous avons également examiné les données sur les dépôts. Si les chiffres pour les pays à faible revenu sont très comparables, ceux des pays à
revenu élevé ne le sont pas, car très peu de personnes, même dans les pays à revenu élevé, font plus de trois dépôts par mois. C’est selon nous
probablement parce qu'il existe des dépôts d'employeurs et/ou de clients (surtout dans les pays à revenu élevé) qui ne sont pas comptabilisés
dans ces données. Nous avons donc choisi de ne pas présenter cette analyse.
95 Making Access Possible. Focus Note 4. Lost in the Mail.
96 GSMA (2017), « Le point sur le secteur : les services d’argent mobile – Édition spéciale dix ans : 2006-2016 ».
97 Ibid.
98 Ibid.
99Au Kenya, des recherches menées à partir de 2011 montrent que, dans un environnement de transactions en espèces, les deux tiers des
transactions sont inférieures à 3 USD et la valeur médiane des transactions est d'environ 1 USD, contre 75 USD aux États-Unis pour la valeur
moyenne des transactions mobiles. Tiré de : Daryl Collins, Julie Zollmann, Peter Flemming - CGAP, « Is M-PESA Replacing Cash in Kenya? »
100 Kenneth Odero - iafrikan (20156), « Kenya’s Cashless Payment System For Public Transport Was Doomed By A Series Of Experience Design
Failures ».
101 MAP Focus Note 5. (2016). The King is (not) Dead.
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Annexe 3. Bibliographie complémentaire
Ce document se veut un guide d'introduction à l'intention des professionnels du secteur des fintech qui
s'intéressent au développement de produits dans les pays en développement. Il contient de nombreuses
références à d’autres publications pour permettre aux lecteurs qui le souhaitent d’approfondir certains
sujets spécifiques. Par ailleurs, nous avons dressé ci-dessous la liste de quelques-unes des publications
les plus importantes sur ce thème pour ceux qui souhaitent développer leur expertise en la matière.
1. Bester, H., Hougaard, C., Gray, J., et Saunders, D. (2016). « Homefield Advantage’ Learning from the Popularity
of Local Financial Services Providers ». UNCDF. MAP Work.
2. Julie Zollman - FSD Kenya (2015). « Kenya Financial Diaries - The Financial Lives of the Poor ».
3. MicroSave en collaboration avec Ignacio Mas, Musings on Money - The What and Why of the Billions
MicroSave
4. Mas, I. (janvier 2015). Money Resolutions, A Sketchbook. CGAP.
5. Zollman, J. & Collins, D. (2010). « Financial Capacity and the Poor: Are we Missing the Mark? ». Financial
Sector Deepening Kenya (FSDK).
6. Collins, D., Morduch, J., Rutherford, S., & Ruthven, O. (2009). Portfolios of the Poor: How the World’s Poor
Live on $2 a Day. Princeton University Press.
7. Rutherford, S. (janvier 1999). The Poor and Their Money: An essay about financial services for poor people.
Institute for Development Policy and Management University of Manchester.
8. Shipton, P. (avril 1990). How Gambians Save and What their Strategies Imply for International Aid. Banque
mondiale.
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