Sarcoïdose
Sarcoïdose
Sarcoïdose
SARCOIDOSE
B. Boulet
Hôpital Roger Salengro, CHRU de Lille
Introduction
Etiologie
Elle n’est pas clairement établie. Le rôle d’agents infectieux (mycobactéries, virus ou
champignons) a été évoqué, mais ils n’ont jamais été mis en évidence. Il n’existe pas de
marqueur génétique mais le rôle de l’hérédité a été évoqué devant la découverte de cas
familiaux. Des anomalies immunologiques sont rapportées dans la sarcoïdose, mais elles sont
incomplètement comprises, variables d’un individu à l’autre et non spécifiques.
Signes cliniques
Terrain:
La maladie se manifeste entre 20 et 40 ans. Elle est plus fréquente chez les femmes en
période d’activité génitale et chez les sujets de race noire.
Signes généraux :
Ils sont souvent présents : petite altération de l‘état général, anorexie, perte de poids.
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Signes fonctionnels :
Les symptômes cliniques sont très variables. L’atteinte peut être infraclinique,
découverte de manière fortuite (adénopathies médiastinales bilatérales).Les signes
fonctionnels pulmonaires sont cependant fréquents : toux, douleurs thoraciques et dyspnée.
Les manifestations oculaires sont essentiellement l’uvéite granulomateuse et l’iridocyclite.
Signes biologiques
On peut retrouver une anémie, une leucopénie, une hyperéosinophilie, une diminution
de la concentration en sérum albumine.
Une hypercalcémie est observée dans 25% des cas du fait de l’augmentation de la
sensibilité à la vitamine D. Les granulomes seraient en effet impliqués dans la synthèse de
1,25-dihydroxyvitamine D (calcitriol). Les mesures de la calcémie, de la calciurie et du
calcitriol aident également au diagnostic.
Le test de Kveim est positif chez 60 à 80% des patients. L’injection intradermique de
0,2 ml d’une suspension à 10% de tissu sarcoïdosique produit un nodule contenant des
granulomes épithélioïdes sans nécrose caséeuse.
L’anergie cutanée et l’hypergammaglobulinémie sont fréquentes mais non spécifiques.
Le lavage bronchoalvéolaire retrouve une augmentation des lymphocytes et des macrophages,
et du rapport CD4/CD8.
Une élévation de l’enzyme de conversion de l’angiotensine s’observe chez 80% des
patients présentant une atteinte pulmonaire aiguë. Elle serait produite par les cellules
granulomateuses, mais elle n’est pas spécifique (également mise en évidence dans la maladie
de Gaucher ou la leptospirose). Il s’agit d’un bon marqueur de l’activité de la maladie.
Atteinte musculaire
Elle est le plus souvent asymptomatique, même si des granulomes existent chez 50 à
80% des patients présentant une sarcoïdose évoluant depuis moins de 2 ans (11).
. Forme nodulaire (Image 1). La sarcoïdose peut s’exprimer sous une forme nodulaire
atteignant surtout les muscles des membres inférieurs (7). Les nodules peuvent être sensibles
mais ils se manifestent le plus souvent comme des masses des tissus mous. Ils peuvent être
multiples et bilatéraux. Ils sont visibles en échographie (nodules hypoéchogènes) et en IRM
(nodules de forme étoilée en coupes axiales, d’aspect plus fusiforme en coupes sagittales et
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Elle peut se traduire par une infiltration granulomateuse, des nodules (Image 2), voire
des masses bien visibles en IRM, de signal non spécifique (hyposignal T1, hypersignal T2
rehaussement après injection de gadolinium) (8).
Atteinte osseuse
Sa fréquence a été diversement rapportée (1 à 15% des cas) car elle est le plus souvent
asymptomatique ou d’expression radiographique discrète (6). Elle est rare en l’absence de
lésion cutanée (parfois subtiles). Les patients avec une atteinte osseuse présentent une
radiographie thoracique anormale dans 80 à 90 % des cas (11).
Les lésions osseuses peuvent toucher l’ensemble du squelette mais elles atteignent
surtout les os de la main et des pieds.
Signes cliniques
L’atteinte osseuse est le plus souvent asymptomatique. Des tuméfactions des tissus
mous et des lésions cutanées des mains (moins typiquement des pieds) peuvent cependant
s’observer, notamment en regard des 1ères et 2èmes phalanges. Elles sont le plus souvent
symétriques et peuvent entraîner une douleur et une diminution de l’amplitude articulaire. Ces
tuméfactions des tissus mous peuvent aussi être visibles au nez, à la face et aux sinus, au
crâne et aux extrémités.
Des fractures pathologiques des côtes, des os tubulaires des extrémités (longs ou
courts) ou une compression médullaire peuvent s’observer.
. un aspect réticulé, en maille ou en nid d’abeille, avec des travées osseuses épaissies
et une corticale amincie. Cet aspect caractéristique est secondaire à l’infiltration de l’os
spongieux par les granulomes sarcoïdosiques qui détruisent certaines trabéculations et en
épaississent d’autres.
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En cas de rémission, les granulomes cèdent la place à du tissu fibreux, mais les lésions
pseudokystiques et les déformations osseuses perdurent.
L’aspect radiographique est habituellement caractéristique de la maladie. Les
principaux diagnostics differentiels à évoquer sont :
- la sclérose tubéreuse de Bourneville. Les lésions pseudo-kystiques des phalanges et
métacarpiens sont habituellement associées à une prolifération périostée.
- l’enchondromatose. Les calcifications de type cartilagineux sont fréquentes et il
existe une expansion osseuse avec déformation et raccourcissement des os.
- La goutte. Les tophus sont denses et les images d’érosion osseuse avec spicule
caractéristiques (image en hallebarde).
L’IRM n’est pas utile au diagnostic de sarcoïdose aux petits os de la main et du pied.
Les nodules sarcoidosiques n’ont pas de signal spécifique (8).
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Os tubulaires longs :
L’atteinte est inhabituelle. Elle se traduit par des lésions ostéolytiques uniques ou
multiples pouvant rarement éroder la corticale adjacente. On n’observe habituellement pas de
réaction périostée.
Rachis
L’atteinte vertébrale est inhabituelle, très rarement révélatrice (12). Elle est le plus
souvent asymptomatique, mais des douleurs, une déformation et des symptômes
neurologiques peuvent être observés.
En radiographie, elle peut se traduire par :
- des lésions ostéolytiques cernées d’un liseré de sclérose. Ces lésions prédominent
aux corps vertébraux et à la charnière thoraco-lombaire (7,10,11). Il n’y a pas d’atteinte
discale associée.
- une ostéocondensation diffuse ou focale d’un ou de plusieurs corps vertébraux,
adjacents ou non (5) (Image 5 et 6).
Cependant, au sein de certaines lésions, on met parfois en évidence des zones conservant un
signal de type graisseux (8).
Une masse intra médullaire ou intra durale, une arachnoïdite ou un épaississement des
méninges secondaires à la présence d’une infiltration granulomateuse sont parfois observés.
Elle peut être utile dans la surveillance du traitement. (12).
Crâne et face
La destruction osseuse des os de la face est la conséquence de l’envahissement
granulomateux des structures adjacentes, comme le revêtement cutané du nez, les sinus, la
muqueuse nasale, le nerf optique et son canal, le sac lacrymal. La destruction des os propres
du nez de type mité est caractéristique. Elle est volontiers associée à un lupus pernio.
L’atteinte des parois sinusiennes, des orbites et l’élargissement d’un ou des 2 canaux optiques
peut se rencontrer. Le scanner des cavités naso-sinusiennes est un excellent examen pour le
bilan des lésions. L’aspect le plus typique est celui de nodule sur le septum et les cornets et, à
un stade plus évolué, une ostéolyse ou une atrophie du septum, des cornets ou de la pyramide
nasale. L’aspect étant commun aux autres granulomatoses inflammatoires (lèpre, maladie de
Wegener), la biopsie reste nécessaire, au mieux guidées par les données du scanner (3).
L’atteinte du crâne est inhabituelle dans la sarcoïdose. Elle se traduit par des lésions
ostéolytiques uniques ou multiples à l’emporte-pièce, de taille variable, asymptomatiques.
Elle est pratiquement toujours associée à d’autres lésions de sarcoïdose, ce qui permet
d’éliminer les diagnostics de métastases et de myélome.
Thorax
L’atteinte costale n’est pas fréquente, à la différence de l’atteinte pulmonaire et
médiastinale. Les lésions sont lytiques, condensantes ou mixtes. Des fractures pathologiques
peuvent survenir. L’atteinte sternale est rare (11).
Atteinte articulaire
Elle est présente chez 10 à 35% des patients, plus souvent chez les femmes (11).
Polyarthrite aiguë:
Il s’agit de polyarthralgies et de polyarthrites symétriques des petites et moyennes
articulations, en particulier des chevilles, genoux, coudes, poignets et articulations des mains.
Elles apparaissent rapidement dans l’évolution de la maladie, précédant l’érythème noueux.
Associées à des adénopathies hilaires bilatérales et à l’érythème noueux, elles constituent le
syndrome de Löfgren, habituellement de bon pronostic. En radiographie, on peut noter une
tuméfaction synoviale et une raréfaction de l’os sous chondral. En histologie, la synoviale
présente une atteinte inflammatoire non spécifique. La CRP peut être augmentée.
Polyarthrite chronique
Elle est rare et s’observe quand la sarcoïdose évolue depuis quelques mois à années, chez
des patients qui présentent des localisations pulmonaires, cutanées ou osseuses. Elle évolue
par poussées et rémissions successives. Elle touche typiquement les chevilles, genoux,
épaules, poignets et petites articulations de la main. L’atteinte est rarement mono articulaire.
Elle est secondaire à l’infiltration de la synoviale par des granulomes non caséeux. Elle peut
être érosive, avec ou sans lésions sarcoïdosiques de l’os adjacent.
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Scintigraphie
Traitement
Les lésions symptomatiques sont traitées par corticothérapie (2). En cas de rémission
(qui peut être spontanée), les lésions ostéoarticulaires conservent un aspect radiographique
inchangé (1) . En IRM, leur signal peut devenir de type graisseux ou fibreux (8). Aux
muscles, l’hyperfixation scintigraphique diminue ou disparaît après la mise en route
traitement corticoïde.
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Références
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