Poly PbEvol
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Mars 2020
Table des matières
1 Rappels 1
1.1 Espaces de Hilbert . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
1.1.1 Théorèmes fondamentaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
1.1.2 Bases hilbertiennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.1.3 Orthogonal d’un sous-espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.2 Espaces de Sobolev . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.2.1 Définitions principales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.2.2 Trace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.2.3 Inégalité de Poincaré . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.2.4 Injections de Sobolev . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.3 Convergence faible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
1.3.1 Compacité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
1.3.2 Définition de la convergence faible . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.3.3 Propriétés de la convergence faible . . . . . . . . . . . . . . . 10
1.4 Problème de l’élasticité linéarisée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.4.1 Le modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.4.2 Inégalité de Korn . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
1.4.3 Problème aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.4.4 Formulation variationnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.4.5 Interprétation des résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
i
ii TABLE DES MATIÈRES
Rappels
1
2 CHAPITRE 1. RAPPELS
PK u ∈ K et ∀w ∈ K, hu − PK u, w − PK ui ≤ 0. (1.2)
Définition 1.6. Soit V un espace de Hilbert et soit a une forme bilinéaire sur V .
On dit que a est coercive sur V s’il existe un réel α > 0 tel que
∀u ∈ V, a(u, u) ≥ αkuk2 .
admet une unique solution. De plus, le problème (1.3) est équivalent au problème de
minimisation (
Chercher u ∈ V tel que
J(u) = inf J(w) (1.4)
w∈V
1
où la fonctionnelle d’énergie J(w) est définie par J(w) = a(w, w) − b(w).
2
Démonstration. Cf. les cours de première année [11, 14].
X X
u= un en et kuk2 = |un |2 .
n≥1 n≥1
Démonstration. Soit (vn )n≥1 une suite d’éléments de W ⊥ qui converge vers v ∈ V .
Pour tout w ∈ W , et tout n ≥ 1, on a hvn , wi = 0. En passant à la limite, on obtient
donc hv, wi = 0 et par conséquent v ∈ W ⊥ .
4 CHAPITRE 1. RAPPELS
x = PW x + y, (1.5)
⊥
avec y ∈ (W )⊥ , et donc hy, PW xi = 0. On a aussi y ∈ W ⊥ , et comme x ∈ W ⊥ ,
ceci implique hx, yi = 0. Donc
u = PW x + y. (1.6)
Définition 1.15. Pour k ≥ 1, l’espace de Sobolev H k (Ω) est l’ensemble des fonc-
tions f ∈ L2 (Ω) telles que les dérivées de f au sens des distributions, jusqu’à l’ordre
k, s’identifient à des fonctions de L2 (Ω). Autrement dit,
Comme l’espace L2 (Ω), les espaces H k (Ω) sont des espaces de Hilbert.
Théorème 1.17. Pour tout ouvert Ω de Rd , l’ensemble D(Ω) est dense dans L2 (Ω)
pour la norme L2 (Ω).
De plus, pour tout k ≥ 1, l’ensemble D(Rd ) est dense dans H k (Rd ) pour la norme
H k (Rd ).
Pour tout k ≥ 1, si Ω ⊂ Rd avec Ω 6= Rd , alors D(Ω) n’est pas dense dans
k
H (Ω).
Définition 1.18. Pour k ≥ 1, on définit H0k (Ω) comme la fermeture de D(Ω) dans
H k (Ω) (pour la norme de H k (Ω)).
Démonstration. On esquisse ici la preuve, dont les détails sont laissés au lecteur.
Soit x0 ∈ I fixé. Pour u ∈ H 1 (I), on définit
Z x
w(x) = u0 (s)ds.
x0
1.2.2 Trace
Pour une fonction définie dans un ouvert Ω, on souhaite définir sa valeur au bord
de Ω. Pour les fonctions u ∈ L2 (Ω), cette notion n’a pas de sens. Par contre, si u est
plus régulière, alors on peut définir rigoureusement cette notion.
Proposition 1.20. Soit Ω un ouvert borné et régulier. On peut définir une appli-
cation linéaire et continue
γ : H 1 (Ω) −→ L2 (∂Ω)
u 7→ γ(u),
et qui prolonge l’application trace pour les fonctions continues sur Ω : pour tout
u ∈ H 1 (Ω) ∩ C 0 (Ω), γ(u) = u|∂Ω .
L’application trace est continue de H 1 (Ω) dans L2 (∂Ω), ce qui signifie qu’il existe
une constante CΩ telle que
Remarque 1.21. L’application trace n’est pas surjective sur L2 (∂Ω), mais sur un
espace plus petit, qui est H 1/2 (∂Ω). Elle est en fait continue de H 1 (Ω) vers H 1/2 (∂Ω),
si bien qu’il existe CΩ tel que
Enfin, pour tout u ∈ H 1/2 (∂Ω), on a kukL2 (∂Ω) ≤ kukH 1/2 (∂Ω) .
L’espace H01 (Ω), défini comme la fermeture dans H 1 (Ω) de D(Ω), s’identifie à
l’espace des fonctions à trace nulle :
1.3.1 Compacité
On se place dans un espace vectoriel normé E. On rappelle la définition suivante :
Définition 1.28. Un sous-ensemble K ⊂ E est compact si, de toute suite (un )n≥0
d’éléments de K, on peut extraire une sous-suite convergente dans K.
Nous aurons besoin dans la suite de ce cours d’une notion plus fine que celle
d’ensemble compact, et que nous introduisons maintenant :
Définition 1.29. Un sous-ensemble K ⊂ E est relativement compact si, de toute
suite (un )n≥0 d’éléments de K, on peut extraire une sous-suite convergente dans E.
La différence avec la notion d’ensemble compact est donc que la limite de la suite
n’appartient pas nécessairement à K.
La preuve de la proposition suivante est laissée en exercice :
Proposition 1.30. Un sous-ensemble K ⊂ E est relativement compact si et seule-
ment si K est compact.
Supposons que la boule unité fermée est compacte. Alors on peut extraire de la suite
(en )n≥1 une sous-suite convergente, donc de Cauchy. Or ceci est contradictoire avec
(1.9).
1.3. CONVERGENCE FAIBLE 9
La suite In = inf k≥n uk est une suite croissante de réels, qui admet donc bien une
limite (éventuellement infinie).
Le lemme suivant montre que la notion de limite inférieure généralise la notion
de limite.
Lemme 1.33. Soit un une suite de réels qui converge vers λ. Alors λ = lim inf un .
Dans le cas d’une suite quelconque, on a le résultat suivant :
Lemme 1.34. Soit un une suite de réels, et soit λ = lim inf un . On peut extraire de
un une sous-suite qui converge vers λ.
Démonstration. On suppose λ ∈ R (le cas λ = +∞ se traite de la même façon).
On pose In = inf k≥n uk : par définition, λ = limn In . Soit ε > 0 et N > 0. Il existe
n0 > N tel que λ ≥ In0 ≥ λ − ε. De plus, il existe k0 ≥ n0 tel que ε + inf k≥n0 uk ≥
uk0 ≥ inf k≥n0 uk . Donc on a ε + λ ≥ uk0 ≥ λ − ε, ce qui conclut la preuve.
On note un * u.
Si V est de dimension finie, alors la convergence au sens faible est équivalente à
la convergence au sens fort. En dimension infinie, les deux notions sont différentes.
On a également la caractérisation équivalente suivante de la convergence faible.
Proposition 1.36. Soit V un espace de Hilbert, u ∈ V et (un )n∈N une suite
d’élements de V . Les deux propositions suivantes sont équivalentes :
(i) (un )n∈N converge faiblement vers u dans V ;
(ii) pour toute forme linéaire continue ϕ ∈ V 0 ,
ϕ(un ) −→ ϕ(u).
n→+∞
Démonstration. On montre que (ii) implique (i). Ceci découle du fait que, pour tout
w ∈ V , l’application ϕ : v ∈ V 7→ hv, wi ∈ R est une forme linéaire continue.
Montrons maintenant que (i) implique (ii). Ceci est une conséquence du théorème
de Riesz. En effet, pour tout ϕ ∈ V 0 , il existe w ∈ V tel que pour tout v ∈ V ,
ϕ(v) = hw, vi. D’où le résultat.
10 CHAPITRE 1. RAPPELS
Dans un espace de Hilbert, pour montrer qu’une suite converge faiblement (à
extraction près), il suffit donc de montrer qu’elle est bornée.
Démonstration. Soit un est une suite de points de C qui converge faiblement vers
u ∈ V . Comme C est convexe et fortement fermé dans V , on peut considérer la
projection de V sur C, qu’on note PC . D’après le théorème 1.4, on a
∀w ∈ C, hu − PC u, w − PC ui ≤ 0.
Proposition 1.42. De toute suite bornée de H01 (Ω), on peut extraire une-suite qui
converge faiblement vers u dans H 1 (Ω). De plus, u ∈ H01 (Ω).
1.4.1 Le modèle
En mécanique, l’inconnue est le déplacement u(x) ∈ Rd d’un point matériel situé
en x dans la configuration de référence. Soit donc Ω un ouvert de Rd et u une
fonction définie sur Ω et à valeur dans Rd . Une quantité importante est le tenseur
des déformations, noté e(u) et défini par
1
∇u + (∇u)t .
e(u) = (1.10)
2
Donc e(u) est une matrice symétrique de taille d × d dont les coefficients sont
1 ∂ui ∂uj
eij (u) = + . (1.11)
2 ∂xj ∂xi
On s’intéresse à un solide déformable, et on fait l’hypothèse que les déplacements
u et les déformations e(u) sont petits. Cette hypothèse permet de linéariser les
équations générales décrivant un solide élastique. On s’intéresse de plus ici aux
équations stationnaires, c’est-à-dire indépendantes du temps, et qui décrivent l’équilibre
d’un solide (leurs versions instationnaires, qui décrivent au contraire la dynamique
du solide, seront étudiées plus loin, au chapitre 6).
En plus du tenseur des déformations, la modélisation fait intervenir le tenseur des
contraintes σ. Comme e(u), le tenseur σ est une fonction de Ω à valeur dans Rd×d . Le
tenseur des contraintes est relié au tenseur des déformations par la loi constitutive du
matériau, qui est ici linéaire. On s’intéresse à des matériaux homogènes et isotropes,
si bien que cette relation s’écrit
σ(u) = 2µe(u) + λ(tr e(u)) Id, (1.12)
où λ et µ sont les coefficients de Lamé du matériau, qui varient d’un matériau à un
autre, et où Id est la matrice identité de Rd×d . La relation (1.12) s’appelle loi de
Hooke.
1.4. PROBLÈME DE L’ÉLASTICITÉ LINÉARISÉE 13
Pour des raisons thermodynamiques que nous ne détaillons pas ici, les coefficients
de Lamé vérifient
µ > 0 et 2µ + dλ > 0, (1.13)
où d est la dimension de l’espace dans lequel on travaille (en général, d = 3). Le
tenseur e(u) étant symétrique, le tenseur σ(u) l’est aussi. On définit la divergence
d’un tenseur symétrique σ comme le vecteur de composante
d
X ∂σij
∀1 ≤ i ≤ d, (div σ)i = .
j=1
∂xj
Le cas où ∂ΩN = ∅ est plus simple mathématiquement, mais moins réaliste du point
de vue physique. Il est en effet rare d’imposer le déplacement sur l’ensemble de la
frontière du solide.
d Z
X ∂(div u)
= − uj dx
j=1 Ω
∂xj
Z
= (div u)2 dx.
Ω
Cette inégalité est loin d’être triviale. En effet, au même titre que (1.17), le
membre de gauche fait apparaitre toutes les dérivées partielles de u, alors que e(u)
ne fait intervenir que des combinaisons linéaires de ces dérivées partielles.
Une conséquence importante de l’inégalité de Korn, et dont nous aurons besoin
dans l’étude de l’élasticité linéaire, est la proposition suivante.
1
≥ ke(un )kL2 (Ω) . (1.20)
n
Comme un est borné dans H 1 (Ω)d , au vu du corollaire 2.69, on peut extraire une
sous-suite uϕ(n) qui converge fortement vers u dans L2 (Ω)d et faiblement vers u dans
H 1 (Ω)d . On écrit l’inégalité de Korn (1.18) pour uϕ(n) − uϕ(p) :
2 2 2
kuϕ(n) − uϕ(p) kH 1 (Ω) ≤ CΩ kuϕ(n) − uϕ(p) kL2 (Ω) + ke(uϕ(n) − uϕ(p) )kL2 (Ω) .
Le premier terme du membre de droite peut être rendu petit pour n et p grands
car uϕ(n) converge fortement dans L2 (Ω)d . Il en est de même pour le second terme
18 CHAPITRE 1. RAPPELS
grâce à (1.20). Donc la suite uϕ(n) est de Cauchy dans H 1 (Ω)d , et elle converge donc
fortement vers u dans H 1 (Ω)d . Comme V est fermé dans H 1 (Ω)d , on a u ∈ V .
Avec (1.15), on voit donc que e(uϕ(n) ) converge fortement dans L2 (Ω)d×d vers
e(u), ce qui, avec la majoration (1.20), implique que e(u) = 0.
Donc la fonction u est telle que u ∈ V et e(u) = 0. La première partie de la preuve
montre donc que u = 0. Ceci est contradictoire avec le fait que kuϕ(n) kH 1 (Ω) = 1 et
que uϕ(n) converge fortement dans H 1 (Ω)d vers u.
1. Remarquer que, si u ∈ V ⊂ H 1 (Ω)d , la quantité div σ(u) n’est pas une fonction, mais
simplement une distribution.
1.4. PROBLÈME DE L’ÉLASTICITÉ LINÉARISÉE 19
XZ ∂vi 1X
Z
∂vi 1X
Z
∂vj
σij (u) = σij (u) + σij (u)
i,j Ω ∂xj 2 i,j Ω ∂xj 2 i,j Ω ∂xi
XZ
= σij (u)eij (v)
i,j Ω
XZ XZ
= λ tr e(u) δij eij (v) + 2µ eij (u)eij (v)
i,j Ω i,j Ω
Z Z
= λ tr e(u) tr e(v) + 2µ e(u) · e(v).
Ω Ω
Grâce à l’inégalité de trace (1.7), la forme b est continue sur V . Avec (1.15) et
(1.16), la forme a est continue sur V . Pour pouvoir appliquer le théorème de Lax-
Milgram, il reste à montrer que a est coercive sur V , et c’est ici qu’on a besoin de
l’inégalité de Korn. On a
Z Z
2
a(u, u) = λ (div u) + 2µ e(u) · e(u).
Ω Ω
Pour minorer a(u, u), on décompose la matrice e(u) en sa partie diagonale et hors
diagonale, suivant
1
e1 (u) = (tr e(u)) Id, e2 (u) = e(u) − e1 (u).
d
20 CHAPITRE 1. RAPPELS
On a bien sûr A(0) = 0. Le domaine de l’opérateur est inclus dans l’ensemble des
éléments de E pour lesquels Ax a un sens en tant qu’élément de F :
n o
D(A) ⊂ x ∈ E Ax ∈ F .
21
22 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA THÉORIE SPECTRALE
Se donner un opérateur linéaire, c’est se donner à la fois son domaine et son action
sur les éléments de ce domaine.
Sauf mention du contraire, on supposera toujours dans ce cours que le domaine
D(A) est dense dans E, i.e. que tout élément x ∈ E peut être approché par une
suite (xn )n≥1 d’éléments de D(A) tels que kx − xn kE → 0 lorsque n → +∞.
On verra par la suite (cf. la Remarque 2.25) qu’il est important de définir à la
fois l’action de l’opérateur (ici, appliquer −∆) et son domaine (sur quel ensemble
de fonctions il agit). Deux opérateurs ayant la même action sont a priori différents
si leurs domaines sont différents.
On ne peut pas toujours comparer les domaines de deux opérateurs en terme
d’inclusion, mais lorsque cela est possible, on parle d’extension.
Définition 2.3 (Extension d’un opérateur). On dit qu’un opérateur A2 est une
extension de l’opérateur A1 , et on note A1 ⊂ A2 , si D(A1 ) ⊂ D(A2 ) et A1 x = A2 x
pour tout x ∈ D(A1 ).
kAxkF
kAk = sup = sup kAxkF < +∞. (2.1)
x∈D(A)\{0} kxkE kxkE ≤1
Dans le cas où D(A) = E (le domaine de l’opérateur est égal à l’espace tout
entier), la définition ci-dessus est équivalente à la définition d’application linéaire
continue vue en cours de première année. On rappelle la caractérisation suivante
des applications linéaires continues de E dans F , lorsque E et F sont deux espaces
vectoriels normés.
∀u ∈ E, kAukF ≤ ckukE .
Remarque 2.6 (Extension d’un opérateur borné). Si D(A) est dense dans E et
kAxkF
sup < +∞,
x∈D(A)\{0} kxkE
L’application
A : C 1 ([0, 1]) −→ C 0 ([0, 1])
f 7−→ f 0
est linéaire. Montrer qu’elle n’est pas continue.
Remarque 2.9. On a cependant le résultat positif suivant. Soient E et F deux
espaces de Banach, et A une application linéaire de E dans F qui est fermée, c’est-
à-dire telle que l’ensemble ∪u∈E [u, Au] est fermé dans E × F . Alors A est continue
(cf. par exemple [3, Théorème II.21 p. 31]).
Définition 2.10. On note L(E, F ) l’espace vectoriel des opérateurs bornés de E
dans F . L’application k · k définie par
kAxkF
∀A ∈ L(E, F ), kAk := sup = sup kAxkF , (2.2)
x∈E\{0} kxkE x∈E, kxkE =1
et
∞
` (N, C) = (x1 , x2 , . . . , xn , . . . ) ∈ C N
sup |xi | < +∞ .
i∈N
On définit les opérateurs de shift à droite et de shift à gauche, de domaine `p (N, C),
par
τd (x1 , x2 , . . . , xn , . . . ) = (0, x1 , x2 , . . . , xn , . . . ) (2.3)
et
τg (x1 , x2 , . . . , xn , . . . ) = (x2 , x3 , . . . , xn , . . . ). (2.4)
Ces deux opérateurs sont des opérateurs bornés. Il est immédiat que kτd xk = kxk
pour tout x ∈ `p (N, C) et donc kτd k = 1. Pour τg , on note tout d’abord que kτg xk ≤
kxk, avec égalité par exemple pour x = (0, 1, 0, . . . ), ce qui donne kτg k = 1.
2.1. OPÉRATEURS LINÉAIRES 25
Aϕ = V ϕ.
Il n’est toutefois pas clair que l’on obtiendrait ainsi un sous-ensemble dense de
L2 (Rd ). C’est toutefois le cas si V ∈ L2loc (Rd ) car alors D(Rd ) ⊂ D(A), et D(Rd ) est
dense dans L2 (Rd ).
Exercice 2.17. Montrer que si, dans l’Exemple 2.16, la fonction V est continue et
bornée, alors kAk = sup |V (x)|.
x∈Rd
kAn − Am k ≤ ε (2.5)
si n, m ≥ Nε . En particulier, la suite (kAn k)n≥0 est bornée, et il existe C > 0 tel que
0 ≤ kAn k ≤ C < +∞ pour tout n ∈ N. Pour x ∈ E donné, on a
si n, m ≥ Nε . La suite (An x)n≥0 est ainsi une suite de Cauchy dans l’espace de
Banach F , et admet donc une limite ax ∈ F . On peut construire un opérateur limite
A en posant Ax = ax . On vérifie facilement que A est linéaire (par unicité de la
limite). Par ailleurs, en passant à la limite m → +∞ dans (2.6), on obtient
et donc, pour n ≥ Nε ,
Ainsi, A est dans L(E, F ) et on peut passer à la limite dans (2.5) (ou prendre le
supremum sur les x ∈ E avec kxkE ≤ 1) et obtenir que, pour tout ε > 0, il existe
Nε ∈ N tel que
kAn − Ak ≤ ε
pour tout n ≥ Nε . Ceci montre bien que An → A dans L(E, F ).
Cette convergence a lieu pour tout w ∈ W , ce qui implique bien que la suite (Aun )n∈N
converge faiblement vers Au dans W .
et son noyau n o
Ker(A) = x ∈ D(A) Ax = 0 .
On dit que A est injectif si Ker(A) = {0}, et que A est surjectif si Ran(A) = F .
L’opérateur est bijectif s’il est à la fois injectif et surjectif.
2.1. OPÉRATEURS LINÉAIRES 27
x = A−1 y ⇐⇒ y = Ax.
Il n’y a aucune raison a priori que l’inverse soit borné. Ceci motive la définition
suivante.
Définition 2.23 (Opérateur inversible). On dit qu’un opérateur A de domaine D(A)
est inversible si A : D(A) ⊂ E → F est bijectif et a un inverse A−1 : F → D(A) ⊂
E borné (comme opérateur de F dans E).
Notons qu’on ne demande pas que A soit lui-même borné.
Enonçons une propriété qui nous sera utile par la suite, et qui permet de conclure
à l’inversibilité d’un opérateur linéaire borné dès qu’il est bijectif (la preuve, omise,
repose sur le lemme de Baire, voir par exemple [15]).
Proposition 2.24. Si A ∈ L(E, F ) et A est une bijection de E vers F , alors
A−1 ∈ L(F, E).
Soit A un opérateur inversible (qu’on suppose non borné) : il est donc bijectif de
D(A) sur F et son inverse B est borné. Donc B ∈ L(F, E). Cependant, B n’est pas
nécessairement une bijection de F vers E (c’est seulement une bijection de F vers
D(A)). Si B est une bijection de F vers E, alors on peut appliquer la proposition
ci-dessus à B, ce qui donne le fait que A ∈ L(E, F ).
A titre d’exemple, on peut prendre E = H10 (Ω) pour un ouvert Ω ⊂ Rd borné,
F = L2 (Ω), et l’opérateur A défini sur D(A) = H2 (Rd ) ∩ E par Au = −∆u. On a
déjà vu qu’un tel opérateur n’est pas borné (cf. l’exemple 2.7). L’opérateur A est
bijectif de D(A) sur F , et son inverse est borné : pour tout g ∈ L2 (Ω), la solution
u ∈ D(A) de −∆u = g satisfait kukE ≤ CkgkF . L’opérateur B est bijectif de F sur
D(A) qui est un sous-espace strict de E. En particulier, B n’est pas surjectif sur E.
28 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA THÉORIE SPECTRALE
kf k = sup |f (t)|.
t∈[0,1]
et n o
1
D(A∞ ) = f ∈ C ([0, 1], R) f (1) = 0 ;
n o
1
— l’opérateur A00 de domaine D(A00 ) = f ∈ C ([0, 1], R) f (0) = f (1) = 0 ;
— l’opérateur Am de domaine “minimal” D(Am ) = D(]0, 1[, R).
On a bien sûr Am ⊂ A00 ⊂ Ak ⊂ AM pour tout k ∈ R ∪ {+∞}. Ces différents
opérateurs, bien qu’ayant la même action, ont des comportements très différents en
ce qui concerne leur injectivité ou leur surjectivité. Ainsi,
— AM n’est pas injectif car toutes les fonctions f + c pour f ∈ D(AM ) fixé et
c ∈ R quelconque ont la même image ;
— Ak est inversible si et seulement si k 6= 1, et
Z t Z 1 Z t Z 1
−1 1 k
Ak f : t 7→ f +k f = f+ f.
1−k 0 t 0 1−k 0
(λ Id − A)u = f
an = ln kAn k.
Lorsque n → +∞, q/n → 1/m alors que les valeurs de r sont limitées à 0, . . . , m − 1.
Ainsi,
1
sup ar −→ 0
r=0,...,m−1 n
et on en déduit donc
an am an
lim sup ≤ inf ≤ lim inf .
n→+∞ n m≥1 m n→+∞ n
Les inégalités ci-dessus sont finalement des égalités, ce qui montre que la suite
(an /n)n≥1 est bien convergente, et qu’elle converge vers inf (am /m).
m≥1
Exercice 2.33. Soient τd et τg les opérateurs de shift définis par (2.3) et (2.4).
Montrer que r(τd ) = r(τg ) = 1.
Le lemme suivant, simple, va nous être utile dans la suite :
X
Lemme 2.34. Soit A ∈ L(E) et soit z ∈ C. La série z n An est convergente dans
n
L(E) si et seulement si |z| < 1/r(A).
Démonstration. Comme E est un Banach, l’espace L(E) est un espace de Banach
(cf. la Proposition 2.18). D’après le coursXde première année [14], on sait que,
X si la
n n
série est normalement convergente, i.e. si |z| kA kE < ∞, alors la série z n An
n n
est convergente dans L(E).
Supposons |z| < 1/r(A). Soit ε > 0. Par définition du rayon spectral, il existe
Nε tel que, pour tout n > Nε , on a kAn k1/n ≤ r(A) + ε, donc |z|n kAn kE ≤
|z|n (r(A)+ε)n
tel que |z| (r(A)+ε) < 1.
X . Grace à l’hypothèse sur z, on peut trouver ε X
n n
La série |z| kA kE est donc convergente, donc la série z n An est convergente
n n
dans L(E). X
Supposons maintenant que la série z n An est convergente dans L(E). Ceci
n
implique que z n An converge vers 0 dans L(E) : lim |z|n kAn kE = 0. Or r(A) =
n
1/n
inf kAn kE . On a donc (|z|r(A)) ≤ |z| kA kE , et donc lim (|z|r(A))n = 0. Ceci
n n n
n n
implique que |z|r(A) < 1, d’où |z| < 1/r(A).
32 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA THÉORIE SPECTRALE
Démonstration. Le lemme 2.34 montre que, pour tout z tel que |z| < 1/r(A), la
+∞
X
série z n An converge dans L(E). C’est donc en particulier le cas pour z = 1, ce
n=0
qui indique que la série du membre de droite de (2.9) est une série convergente dans
L(E).
On écrit ensuite que, pour tout N , on a
N
X
(Id − A) An = Id − AN +1 . (2.10)
n=0
4. On a
σ(T ) ⊂ D(0, r(T )),
où D(0, r(T )) est le disque fermé centré en 0 et de rayon r(T ). On a aussi
que
σ(T ) ∩ C(0, r(T )) 6= ∅
où C(0, r(T )) est le cercle de centre 0 et de rayon r(T ). En particulier le
spectre d’un opérateur borné n’est jamais vide.
5. L’ensemble σ(T ) se décompose en l’union disjointe
σ(T ) = σp (T ) ∪ σr (T ) ∪ σc (T ),
avec n o
σp (T ) = λ ∈ C, λ − T non injectif ,
n o
σr (T ) = λ ∈ C, λ − T injectif et (λ − T )E 6= E ,
et
n o
σc (T ) = λ ∈ C, λ − T injectif et (λ − T )E 6= (λ − T )E = E .
Notons que les trois types de spectre définis ci-dessus ont été classés par ordre
croissant de défaut d’inversibilité :
— pour le spectre ponctuel, on a un défaut d’injectivité ;
— pour le spectre résiduel, on a un défaut majeur de surjectivité : même en
prenant l’adhérence de l’image de E, on ne retrouve pas E ;
— pour le spectre continu, l’inverse est bien défini sur un domaine dense, mais
n’est pas borné. Montrons ceci par l’absurde.
L’opérateur linéaire λ − T est bijectif de E sur (λ − T )E. On introduit son
inverse B : (λ − T )E → E, qui est défini sur un sous-ensemble dense de
E. Supposons B borné. On peut alors l’étendre par continuité comme un
opérateur de E sur E. Soit y ∈ E et u = By (qui existe car B est maintenant
défini sur tout E). Montrons que y = (λ − T )u :
— Si y ∈ (λ − T )E, c’est évident.
— Sinon, on sait qu’il existe une suite yn ∈ (λ − T )E telle que yn → y.
Puisque yn ∈ (λ − T )E, il existe un ∈ E tel que yn = (λ − T )un , et
donc un = Byn . La suite yn est convergente, donc de Cauchy. Puisque
B est borné, on voit que un est aussi de Cauchy, donc convergente. Par
définition, on a u = By = limn un . On peut donc passer à la limite
dans l’égalité yn = (λ − T )un (puisque λ − T est continu), ce qui donne
y = (λ − T )u.
34 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA THÉORIE SPECTRALE
Donc, si |λ−µ| r (µ−T )−1 < 1, alors λ−T est inversible (en vertu du lemme 2.35).
Sur l’ensemble C = {z ∈ C; 1/r(T ) < |z| < 1/(r(T ) − ε)}, on obtient donc que f (z)
est analytique, alors que la série est divergente, d’après le lemme 2.34. On obtient
donc une contradiction.
Remarque 2.37. Notons que σp (T ) est l’ensemble des valeurs propres de T , i.e.
l’ensemble des λ ∈ C tels qu’il existe u ∈ E \ {0} tel que
T u = λu.
En dimension finie, un opérateur linéaire injectif est bijectif. Ainsi,
σ(T ) = σp (T )
est simplement l’ensemble des valeurs propres de T dans ce cas.
2.2. THÉORIE SPECTRALE DES OPÉRATEURS BORNÉS 35
Exercice 2.41 (Spectre continu). Soit a < b deux réels, E = L2 ([a, b], C) et T ∈
L(E) défini par
T f (x) = x f (x).
Montrer que σ(T ) = σc (T ) = [a, b], en suivant les étapes ci-dessous :
1. Montrer que σ(T ) ⊂ [a, b].
2. Montrer que σ(T ) = [a, b] (en supposant qu’il existe λ ∈ [a, b] tel que λ − T
soit inversible, et en considérant ϕ ∈ C∞ ([a, b], C) valant 1 au voisinage de
λ).
36 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA THÉORIE SPECTRALE
f (x) 1
si |x − λ| ≥ et x ∈ [a, b],
ϕn (x) = λ−x n
0 sinon.
Exercice 2.42. Le schéma de preuve ci-dessus montre qu’on peut en fait étendre
l’argument à des opérateurs plus généraux, définis sur E = L2 (Rd , C), de domaine
Z
2 2
D(T ) = f ∈ E (1 + |V (x)| )|f (x)| dx < +∞ ,
Rd
pour V ∈ L∞
loc (R, R), et d’action
Ainsi, pour une fonction V continue, on montrera que σ(T ) = [min V, max V ], et
que σ(T ) = σc (T ) si V −1 ({λ}) est un ensemble au plus dénombrable sans point d’ac-
cumulation pour tout λ ∈ R. Notons en revanche que si on considère une fonction
V ∈ C∞ (R), valant c ∈ R dans un voisinage ] − η, η[ de l’origine, alors c ∈ σp (T ).
Démonstration. Pour prouver ce résultat, nous allons établir plusieurs résultats in-
termédiaires.
— Commençons par montrer que si λ ∈ C est tel que α = |Im(λ)| = 6 0, alors
λ − T est inversible.
Montrons tout d’abord que l’opérateur λ − T est injectif. En effet, pour tout
x ∈ H, on a
— Nous allons maintenant prouver que r(T ) = kT k. Tout d’abord, notons que
kT ∗ T k ≤ kT k kT ∗ k = kT k2 . Par ailleurs, comme |hx, T ∗ T xi| ≤ kT ∗ T k kxk2 ,
on a
!2
kT ∗ T k ≥ sup |hx, T ∗ T xi| = sup kT xk2 = sup kT xk = kT k2 ,
kxk=1 kxk=1 kxk=1
Remarque 2.44. On fait ici le lien entre le spectre résiduel d’un opérateur et le
spectre ponctuel de son adjoint.
La relation (2.7) montre de manière générale que, pour un opérateur borné
T ∈ L(E), si λ ∈ σr (T ), alors λ ∈ σp (T ∗ ). Bien sûr, dans le cas des opérateurs
autoadjoints, on a T ∗ = T et donc λ ∈ σr (T ) ∩ σp (T ) = ∅ par définition des
différentes parties du spectre. Ceci montre bien que σr (T ) = ∅ pour des opérateurs
autoadjoints.
Par ailleurs, on peut montrer que, si λ ∈ σp (T ), alors λ ∈ σp (T ∗ ) ∪ σr (T ∗ ).
Exercice 2.45. Donner un exemple d’opérateur borné tel que λ ∈ σp (T ∗ ) lorsque
λ ∈ σp (T ), et un exemple d’opérateur borné tel que λ ∈ σr (T ∗ ) lorsque λ ∈ σp (T ).
Exercice 2.46. Soit V un espace de Hilbert et soit T ∈ L(V ) un opérateur borné
auto-adjoint. On suppose que hT u, ui = 0 pour tout u ∈ V . Montrer qu’alors T = 0.
2.2. THÉORIE SPECTRALE DES OPÉRATEURS BORNÉS 39
∀x ∈ B 1 , kT xkF ≤ C.
On en déduit que
x
∀x ∈ E \ {0}, kT xkF = kxkE T ≤ CkxkE .
kxkE F
|x − x0 | ≤ δ ⇒ ∀u ∈ F, |u(x) − u(x0 )| ≤ ε.
Démonstration. Il est facile de montrer que K(E, F ) est un espace vectoriel. Grace
à la Proposition 2.54, on sait qu’il est inclus dans L(E, F ). Il reste à prouver que
c’est un sous-espace fermé de L(E, F ). Considérons pour cela une suite d’opérateurs
compacts (Tk )k∈N∗ qui converge dans L(E, F ) vers un opérateur T ∈ L(E, F ) et
montrons que T est compact. Soit B un borné de E, soit R > 0 un réel tel que
B ⊂ {x ∈ E, kxk ≤ R} et soit (un )n∈N une suite de T (B). Il faut montrer que on
peut extraire de (un )n∈N une sous-suite convergente (ceci prouvera que T (B) est
relativement compact et donc que T est compact).
Soit (wn )n∈N une suite d’éléments de B tels que pour tout n ∈ N, T (wn ) = un . On
va extraire de (un )n∈N une sous-suite convergente en utilisant un procédé diagonal.
42 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA THÉORIE SPECTRALE
On pose {wn0 }n = {wn }n et on construit, par récurrence sur k, la suite {wnk }n , qui est
une sous-suite de (wnk−1 )n∈N telle que (Tk (wnk ))n∈N soit convergente. On utilise pour
cela le fait que Tk est un opérateur compact, et que {wnk−1 }n , suite extraite de (wn )n ,
est bornée. On définit maintenant la suite (vn )n∈N par vn = wnn . Pour tout k ∈ N∗ ,
(vn )n≥k est une sous-suite de (wnk )n∈N : la suite (Tk (vn ))n∈N est donc convergente.
On pose u en = T (vn ). La suite (eun )n∈N est une sous-suite de (un )n∈N . On va
montrer qu’elle est de Cauchy. Soit ε > 0 et k ∈ N∗ tel que
ε
kT − Tk kL(E,F ) ≤ .
3R
Soit ensuite N ≥ 0 tel que ∀q > p ≥ N ,
ε
kTk (vp ) − Tk (vq )kF ≤ .
3
Il vient que, pour tout q > p ≥ N ,
ke
up − u
eq k = kT (vp ) − T (vq )kF
≤ kT (vp ) − Tk (vp )kF + kTk (vp ) − Tk (vq )kF + kTk (vq ) − T (vq )kF
≤ kT − Tk kL(E,F ) (kvp kE + kvq kE ) + kTk (vp ) − Tk (vq )kF
≤ ε.
La suite (e
un )n∈N est donc de Cauchy. Ceci conclut la preuve.
Une des conséquences importantes de ce résultat est que, si T est la limite d’une
suite d’opérateurs (Tn )n≥0 de rang fini (i.e. tels que la dimension de Ran(Tn ) est
finie), au sens où
kTn − T k −→ 0
où la norme est définie en (2.1), alors l’opérateur limite T est compact. En général,
la réciproque est fausse : on ne peut pas approcher n’importe quel opérateur com-
pact par une suite d’opérateurs de rang fini. Cette réciproque est cependant vraie
si on considère K(E, F ) avec F un espace de Hilbert (cf. [3, Section VI.1] ou la
Remarque 2.73 pour le cas où E = F est un espace de Hilbert).
Un des intérêts de ce résultat est que, si on arrive à obtenir une borne (en
norme H1 (Ω)) sur une suite de fonctions approchant la solution d’une équation
(par exemple, en montrant qu’une énergie est uniformément bornée), alors on peut
extraire de cette suite une sous-suite convergente (en norme L2 (Ω)). Cette limite est
alors un candidat naturel pour être une solution de l’équation.
Dans ce chapitre, ce résultat va nous permettre de montrer que les inverses de
certains opérateurs sont compacts, ce qui permettra de décrire complètement le
spectre de l’opérateur en question.
et ( )
+∞
X +∞
X
H10 (0, π) = u(x) = ck ek (x), (1 + k 2 )|ck |2 < +∞ .
k=1 k=1
De plus,
+∞
!1/2 +∞
!1/2
X X
kukL2 = |ck |2 , kukH1 = (1 + k 2 )|ck |2 .
k=1 k=1
On note que, pour montrer la complétude de la base des {ek }k≥1 dans L2 (0, π),
il suffit de prendre une fonction de L2 (0, π), de l’antisymétriser pour en faire
une fonction sur ] − π, π[, d’étendre la fonction à tout R en la périodisant, et
enfin de développer cette fonction sur la base des sinus et cosinus (en utilisant
la théorie des séries de Fourier).
2.3. OPÉRATEURS COMPACTS 45
Soit
I : H10 (0, π) −→ L2 (0, π)
u 7→ u
l’injection canonique de H10 (0, π) dans L2 (0, π). Pour tout N ∈ N∗ , soit IN
l’opérateur linéaire défini par
IN : H10 (0, π) −→ L2 (0, π)
+∞
X N
X
u= ck ek 7→ IN (u) = ck e k .
k=1 k=1
Montrons que la suite (IN )N ∈N∗ converge vers I dans L(H10 , L2 ). On calcule
k(I − IN )(u)k2L2
kI − IN k2L(H1 ,L2 ) = sup
0
u∈H10 (Ω), u6=0 kuk2H1
0
+∞
X
|ck |2
k=N +1
= sup +∞
(1+k2 )|ck |2 <+∞
P
(ck )k∈N∗ 6=0, X
(1 + k 2 )|ck |2
k=1
+∞
X
|ck |2
k=N +1
≤ sup +∞
(1+k2 )|ck |2 <+∞
P
(ck )k∈N∗ 6=0, X
(1 + k 2 )|ck |2
k=N +1
1
≤ −→ 0.
1 + (N + 1)2 N →+∞
Par ailleurs, pour tout N ∈ N∗ , l’opérateur IN est de rang fini (égal à N ).
C’est donc un opérateur compact. Il en résulte que I est limite dans L(H10 , L2 )
d’opérateurs compacts. C’est donc lui-même un opérateur compact d’après
le Théorème 2.58.
— Pour Ω =]0, π[d , on montre de la même manière que l’injection canonique de
H10 (Ω) dans L2 (Ω) est compacte. Il suffit de développer les fonctions u ∈ H10 (Ω)
dans la base tensorielle de Fourier :
+∞
X
u(x1 , x2 , · · · , xd ) = ck1 k2 ···kd sin(k1 x1 ) sin(k2 x2 ) · · · sin(kd xd ).
k1 ,k2 ,··· ,kd =1
où p désigne l’opérateur linéaire qui transforme une fonction de H10 (Ω) en une
fonction de H10 (ω) en la prolongeant par 0 dans ω \ Ω, Iω est l’injection cano-
nique de H10 (ω) dans L2 (ω) et r est l’opérateur de restriction qui à u ∈ L2 (ω)
associe la fonction u|Ω (qui est dans L2 (Ω)). Comme p et r sont des opérateurs
continus et Iω est un opérateur compact, il en résulte (cf. la proposition 2.59)
que IΩ est lui-même un opérateur compact.
Ceci conclut la preuve.
Remarque 2.66 (Injection compacte de H1 (Ω) dans L2 (Ω)). Une modification de la
preuve ci-dessus permet de montrer facilement que l’injection de HQ1 (Ω) dans L2 (Ω)
est compacte lorsque le domaine Ω est un parallélépipède Ω = di=1 ]ai , bi [. Pour
des domaines généraux, la question est plus difficile. Ce qui pose problème dans
la preuve ci-dessus, c’est de montrer que l’opérateur d’extension (celui qui à une
fonction f ∈ H1 (Ω) associe une fonction fe ∈ H1 (ω) où ω est un cube contenant Ω
et fe Ω = f ) est bien défini et est borné. De tels résultats existent pour des domaines
bornés réguliers, voir par exemple [6, Théorème 7.1.7] et [3, Théorème IX.7] et les
résultats ci-dessous.
On a le résultat suivant :
Théorème 2.67 (de Rellich-Kondrachov). Soit Ω ouvert régulier borné de Rd . On
a les injections compactes :
— si d > 2, alors H 1 (Ω) ⊂ Lq (Ω) pour tout q ∈ [1, p∗ [, avec 1/p∗ = 1/2 − 1/d.
— si d = 2, alors H 1 (Ω) ⊂ Lq (Ω) pour tout q ∈ [1, +∞[.
— si d = 1, alors H 1 (Ω) ⊂ C 0 (Ω).
On en déduit en particulier le résultat suivant.
Corollaire 2.68. Soit Ω un ouvert régulier borné de Rd . Alors l’injection H 1 (Ω) ⊂
L2 (Ω) est compacte.
Donc, si Ω est un ouvert régulier borné, alors, de toute suite bornée de H 1 (Ω),
on peut extraire une sous-suite convergente dans L2 (Ω).
Démontration du Corollaire 2.68. Si d ≥ 2, le résultat découle directement du
théorème de Rellich-Kondrachov. Si d = 1, on remarque que l’injection I : H 1 (Ω) ,→
L2 (Ω) est la composition de deux injections
I1 : H 1 (Ω) ,→ C 0 (Ω) et I2 : C 0 (Ω) ,→ L2 (Ω).
L’injection I1 est compacte d’après le théorème de Rellich-Kondrachov, et l’injection
I2 est continue. L’injection I = I1 ◦ I2 est donc compacte.
Le corollaire suivant est alors une conséquence immédiate de la Proposition 2.55.
Corollaire 2.69. Soit Ω un ouvert régulier borné de Rd . Soit un une suite bornée
de H 1 (Ω). On peut extraire de la suite un une sous-suite qui converge faiblement
vers u dans H 1 (Ω) et qui converge fortement vers u dans L2 (Ω).
Exercice 2.70. En utilisant le corollaire ci-dessus, démontrer l’inégalité de Poin-
caré (1.8) par un raisonnement par l’absurde.
2.3. OPÉRATEURS COMPACTS 47
Remarque 2.72. La preuve ci-dessous montre que plusieurs cas (et uniquement
ceux-là) peuvent se présenter :
1. on peut avoir σ(T ) = σp (T ), avec les cas suivants :
(a) ou bien σ(T ) = σp (T ) = {0}, auquel cas T = 0. Dans ce cas, la base (fn )
engendre tout l’espace, et la base (en ) est vide ;
(b) ou bien σ(T ) = σp (T ) = {µn }n∈{1,...,N } ∪ {0}, c’est-à-dire que T est de
rang fini (et bien sur T n’est pas injectif ). Dans ce cas, la base (en ) est
de cardinal fini N , et la base (fn ) est de cardinal infini ;
(c) ou bien σ(T ) = σp (T ) = {µn }n≥0 ∪ {0}, auquel cas T est non injectif. La
base (en ) est de cardinal infini, alors que la base (fn ) peut être de cardinal
fini ou infini en fonction de la dégénerescence de la valeur propre 0 ;
2. si σp (T ) ( σ(T ), alors σ(T ) est l’union disjointe de σp (T ) et de {0}. Dans ce
cas, T est injectif (car 0 ∈/ σp (T )) et on a σp (T ) = {µn }n≥0 et σc (T ) = {0}
(en effet, {0} = σ(T ) \ σp (T ) = σc (T ) ∪ σr (T ) et σr (T ) = ∅ d’après la
Proposition 2.43).
(a) Remarquons tout d’abord que E est stable par T . En effet, soit x ∈ E.
On peut écrire
X X
x= xn , xn ∈ En , kxn k2 < +∞.
n n
P
Comme par ailleurs (λn ) est finie ou tend vers 0, la série n λn xn converge
dans H. On a donc
X X
Tx = λ n xn , λn xn ∈ En , kλn xn k2 < +∞,
n n
Te : E ⊥ → E ⊥
v 7→ T v.
Tev = λv,
v ∈ En ∩ E ⊥ = {0} ,
Ceci généralise les opérations faites sur les matrices symétriques réelles.
A : L2 (Ω) −→ L2 (Ω)
f 7−→ u solution du problème (2.16).
Montrer que A est un opérateur borné et que A est défini positif. Pour montrer que la
forme bilinéaire associée a n’est pas coercive, on pourra supposer que Ω est la boule
ouverte de centre 0 et de rayon 1, et considérer les fonctions fn (x) = nd/2 χ(nx), où
χ est une fonction fixée de D(Ω).
Le théorème ci-dessous est alors un corollaire du Theorème 2.71 (on est dans le
dernier cas évoqué dans la Remarque 2.72).
Théorème 2.78. Soit V un espace de Hilbert de dimension infinie, et A un opérateur
borné, défini positif, auto-adjoint et compact de V dans V . Alors les valeurs propres
de A forment une suite (λk )k≥1 de réels strictement positifs qui tend vers 0, et il
existe une base hilbertienne (uk )k≥1 de V formée de vecteurs propres de A, avec
∀k ≥ 1, Auk = λk uk .
De plus, le sous-espace propre associé à chaque valeur propre est de dimension finie.
On remarque que le théorème ci-dessus ne caractérise que le spectre ponctuel de
l’opérateur, alors que le Theorème 2.71 caractérise tout le spectre.
Remarque 2.79. Comme (uk )k≥1 forme une base hilbertienne de V , on peut appli-
quer la proposition 1.10 et on a donc les relations suivantes pour tout w ∈ V :
X X
w= hw, uk iuk et kwk2 = |hw, uk i|2 .
k≥1 k≥1
Nous présentons ici une démonstration directe du théorème 2.78. Dans ce but,
nous aurons besoin des deux lemmes suivants.
Lemme 2.82. Soit V un espace de Hilbert (non réduit au seul vecteur nul) et A
une application linéaire continue auto-adjointe compacte de V dans V . On définit
hAu, ui hAu, ui
m= inf et M = sup .
u∈V \{0} hu, ui u∈V \{0} hu, ui
Ceci est contradictoire avec le fait que la suite Awk /λk converge à extraction près.
Démontration du théorème 2.78. Le lemme 2.82 montre que l’ensemble des valeurs
propres n’est pas vide, tandis que le lemme 2.83 montre que cet ensemble est soit fini,
2.3. OPÉRATEURS COMPACTS 55
soit infini dénombrable avec 0 comme seul point d’accumulation. On note (λk )k≥1
les valeurs propres de A et Vk = Ker(A − λk Id) les sous-espaces vectoriels propres
associés. Comme A est défini positif, on voit que les valeurs propres sont toutes
strictement positives.
1
Comme λk 6= 0, l’application A est compacte, et la proposition 2.63 montre
λk
1
que Vk = Ker( A − Id) est de dimension finie.
λk
Les sous-espaces propres sont orthogonaux deux à deux. En effet, si vk ∈ Vk et
vj ∈ Vj avec k 6= j, alors, comme A est auto-adjoint,
l’espace vectoriel engendré par les (vk )k≥1 . Montrons que W est dense dans V . Il
est clair que W est stable par A, c’est-à-dire A(W ) ⊂ W . L’application A étant
auto-adjointe, ceci implique que W ⊥ est lui-aussi stable par A. On considère alors
la restriction A0 de A à W ⊥ , qui est encore une application linéaire continue auto-
adjointe compacte. Si W ⊥ 6= {0}, on peut appliquer le lemme 2.82, et donc A0 a
une valeur propre λ. Soit u le vecteur propre associé : u ∈ W ⊥ et Au = λu. Donc
λ est une valeur propre de A, et par conséquent u ∈ W . Donc u ∈ W ∩ W ⊥ , ce
qui est contradictoire avec le fait que u 6= 0. Donc W ⊥ = {0}. Par conséquent,
V = {0}⊥ = (W ⊥ )⊥ = W (on a utilisé le lemme 1.13 pour obtenir la dernière
égalité), ce qui montre que W est dense dans V .
On construit maintenant une base hilbertienne de V . Pour cela, on considère dans
chacun des Vk (qui sont de dimension finie) une base orthonormée. Les réunions de
ces bases forme une base hilbertienne de V , car les Vk sont orthogonaux deux à deux
et W est dense dans V .
Comme V est de dimension infinie et que les Vk sont de dimension finie, on
obtient aussi que A possède un nombre infini dénombrable de valeurs propres.
56 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA THÉORIE SPECTRALE
Chapitre 3
3.1 Motivation
Ce chapitre est une introduction à l’étude mathématique et numérique des phéno-
mènes vibratoires. Ces phénomènes ont une grande importance pour de nombreuses
sciences de l’ingénieur : génie civil, acoustique (des instruments de musique mais
aussi des véhicules), détection de fissure dans des matériaux (par contrôle non des-
tructif), . . .
D’un point de vue mathématique, il s’agit d’étudier les valeurs propres et vecteurs
propres d’équations aux dérivées partielles. Illustrons notre propos sur un exemple
concret. On considère une membrane élastique homogène et isotrope, dont le bord
est maintenu fixe, initialement au repos, et on cherche à étudier sa réponse à une
excitation dépendant du temps.
Lorsqu’on néglige les forces de gravitation devant les forces de tension superfi-
cielle, et qu’on se place dans le cadre de l’élasticité linéaire, le système vérifié par le
déplacement vertical u(t, x) d’un point de la membrane situé au repos à la position
x ∈ Ω s’écrit :
1 ∂ 2u
(t, x) − ∆u(t, x) = f (t, x) dans R+∗ × Ω,
c 2 ∂t2
u(t, x) = 0 sur R+∗ × ∂Ω,
(3.1)
u(0, x) = 0 sur Ω,
∂u (0, x) = 0
sur Ω,
∂t
p
où c = S/ρ, S désignant la tension superficielle et ρ la masse surfacique de la mem-
brane. On reconnaı̂t dans l’EDP du système (3.1) une équation d’onde de célérité c
comportant un terme source f .
L’analogue discret (en espace) de ce problème est le système dynamique d’incon-
57
58CHAPITRE 3. EQUATIONS AUX DÉRIVÉES PARTIELLES ET PROBLÈMES AUX VALEURS PRO
Puisque A est symétrique, ses vecteurs propres forment une base orthonormée de
RN . On cherche alors une solution de (3.2) comme une combinaison linéaire sur ces
vecteurs propres :
XN
U (t) = αk (t)Uk avec αk (t) ∈ R.
k=1
d2 α k
+ λk αk (t) = bk (t) (3.4)
dt2
avec bk (t) = hB(t), Uk i. On est donc ramené à la résolution d’une équation différentielle
ordinaire scalaire.
L’argument clé qui a permis de ramener le système (3.2), posé en dimension
N éventuellement grande, à la résolution des N équations scalaires indépendantes
(3.4), est la diagonalisation de la matrice A et la recherche d’une solution comme
combinaison linéaire de vecteurs propres. Essayons maintenant d’utiliser la même
stratégie pour résoudre le problème (3.1). L’analogue de la matrice A, qui associe
au vecteur U le vecteur A U , est l’opérateur −∆, qui à la distribution u associe la
distribution −∆u. Il est donc naturel d’essayer de chercher des fonctions uk , définies
sur Ω, et des réels λk , tels que
Formellement, on a donc
ϕ00 (t) ∆v
∀t > 0, ∀x ∈ Ω, = = −λ,
ϕ(t) v
où λ ∈ R est une constante, et donc la fonction v(x) est un vecteur propre du
laplacien avec conditions de Dirichlet nulles au bord (on retrouve la relation (3.5)),
tandis que ϕ suit l’équation suivante, similaire à (3.4) :
La suite de ce chapitre est organisée ainsi. Les théorèmes abstraits qui ont été
présentés au Chapitre 2 sont utilisés dans la section 3.2 pour étudier les modes
propres du laplacien et de l’élasticité linéarisée. En pratique, on ne peut calculer
qu’une approximation numérique des valeurs et vecteurs propres, et l’analyse d’er-
reur est discutée dans la section 3.3. Enfin, la mise en oeuvre numérique d’une
méthode de discrétisation aboutit au bout du compte à un problème d’algèbre
linéaire, qui consiste à diagonaliser une matrice. Quelques algorithmes pour la résolu-
tion d’un tel problème seront discutés dans la section 3.4.
que dans les cours d’Analyse de première année [11, 14], dans lequel on a tout d’abord
démontré, dans un cadre assez général, le théorème de Lax-Milgram, qu’on a ensuite
appliqué à différentes équations. Nous appliquerons le résultat abstrait démontré à
la section 3.2.1 dans les sections 3.2.2 (pour l’étude des valeurs propres du laplacien)
et 3.2.3 (pour l’étude des modes propres de l’élasticité linéaire).
Pour ne pas confondre les produits scalaires sur H et sur V , nous les noterons
respectivement h·, ·iH et h·, ·iV . Les normes associées sont notées k · kH et k · kV . Les
hypothèses sur la forme a donnent donc l’existence de M > 0 et α > 0 tels que
Le problème qui nous intéresse ici est : trouver λ ∈ R et u ∈ V \ {0} tels que
On dira alors que λ est valeur propre de la forme bilinéaire a (ou du probème
variationnel (3.8)), et que u est le vecteur propre associé.
On donne dès à présent un cas typique d’application du cadre abstrait développé
ici. Soit Ω un ouvert borné de Rd . On pose V = H01 (Ω), H = L2 (Ω), et
Z
a(u, v) = ∇u · ∇v.
Ω
Nous montrerons à la section 3.2.2 que les hypothèses faites ci-dessus sont vérifiées,
et que résoudre (3.8) est alors équivalent à chercher λ ∈ R et u ∈ H01 (Ω), u 6= 0, tels
que
−∆u = λu dans Ω.
Ainsi, λ et u seront valeur propre et vecteur propre du laplacien dans Ω avec condi-
tions aux limites de Dirichlet.
forment une suite croissante (λk )k≥1 de réels strictement positifs qui tend vers l’in-
fini, et il existe une base hilbertienne de H de vecteurs propres associés, c’est-à-dire :
Démonstration. L’injection V ⊂ H étant continue, on sait qu’il existe C > 0 tel que
A : H −→ V
f 7−→ u unique solution de (3.11),
et
A : H −→ H
f 7−→ Af.
Comme a est coercive sur V , on a, pour u solution de (3.11),
et donc A est auto-adjointe sur H. On montre enfin que A est définie positive sur
H. En prenant g = f dans l’égalité précédente, on voit que, pour tout f ∈ H,
∀k ≥ 1, Auk = µk uk .
et donc, en posant
1
λk = ,
µk
on obtient (3.9). Montrons que les vk définis par
uk
vk = √
λk
forment une base hilbertienne de V pour le produit scalaire a(·, ·). On a vk ∈ V et
l’espace vectoriel engendré par les vk est dense dans H, donc dense dans V . Enfin,
les vecteurs vk sont orthogonaux deux à deux, car
!
uk up
a(vk , vp ) = a √ , p
λk λp
1
= p a(uk , up )
λk λp
√
λk
= p huk , up iH = δkp .
λp
L’égalité (3.14) est donc claire. Soit u un point de minimum : R(u) = λ1 . Soit v ∈ V
quelconque. La fonction f (t) = R(u + tv) est minimale en t = 0, donc f 0 (0) = 0. Or
Comme f 0 (0) = 0 et a(u, u) = λ1 kuk2H , on obtient a(u, v) = λ1 hu, viH pour tout
v ∈ V , et donc u est vecteur propre associé à la valeur propre λ1 .
2
P
⊥ j≥k λj αj
De même, pour v ∈ Wk−1 , on a R(v) = P 2
et donc
j≥k αj
λk = min R(v) ≤ max min R(v) .
⊥ ,v6=0
v∈Wk−1 W ∈Ek−1 v∈W ⊥ \{0}
≥ min R(v)
⊥ )\{0}
v∈(W ∩Wk−1
≥ min R(v) = λk .
⊥ \{0}
v∈Wk−1
Par conséquent,
min max R(v) ≥ λk .
W ∈Ek v∈W \{0}
Comme C0∞ (Ω) est dense dans L2 (Ω) et inclus dans H01 (Ω), on a bien que V est
dense dans H. Comme Ω est borné, on peut appliquer le théorème de Rellich 2.67,
et l’injection V ⊂ H est bien compacte. La forme a est bien bilinéaire, symétrique,
continue et coercive sur V (ce dernier point résulte directement de l’inégalité de
Poincaré (1.8)). Par conséquent, il existe une suite croissante (λk )k≥1 de réels positifs
et une base hilbertienne (uk )k≥1 de L2 (Ω) tels que uk ∈ H01 (Ω) et
Z Z
1
∀v ∈ H0 (Ω), ∇uk · ∇v = λk uk v.
Ω Ω
La preuve suit les mêmes étapes que la preuve du théorème 3.3. Le seul point délicat
est la coercivité de la forme bilinéaire a, qui a été démontrée à la section 1.4.4 (cf.
l’inégalité (1.31)).
A = BB t .
Kh U = λh Mh U. (3.20)
68CHAPITRE 3. EQUATIONS AUX DÉRIVÉES PARTIELLES ET PROBLÈMES AUX VALEURS PRO
K̃h Ũ = λh Ũ , (3.21)
On étudie donc −∆u = λu dans H01 (Ω). On suppose qu’on utilise une méthode
d’éléments finis P1 sur un maillage formé de triangles (en 2D) ou de tetraèdres (en
3D) de sommets (ai )1≤i≤d+1 . On utilise la formule de quadrature
Z d+1
Volume(K) X
ψ(x)dx ≈ ψ(ai ), (3.22)
K d+1 i=1
où K est un triangle (ou un tétraèdre) du maillage. Ceci revient donc à choisir pour
noeud d’intégration les sommets de K, qu’on affecte tous du même poids.
Vérifier que la formule de quadrature (3.22) conduit effectivement à une matrice
de masse Mh diagonale.
3.3. MÉTHODES NUMÉRIQUES 69
a(v, v)
R(v) = .
kvk2H
λm ≤ λm,h .
Soient (um )m≥1 les vecteurs propres de (3.8), et soit Wm le sous-espace vectoriel de
V engendré par (u1 , . . . , um ), qui est de dimension m.
Si σm,h > 0, on a
λm
λm,h ≤ 2
.
σm,h
ce qui contredit l’hypothèse σm,h > 0. Donc dim Wm,h = m et (3.23) implique que
a(Πh v, Πh v)
λm,h ≤ max R(v) = max .
v∈Wm,h \{0} v∈Wm ,kvkH =1 kΠh vk2H
Pour tout v ∈ V , on a
a(v, v) = a (Πh v, Πh v) + a (v − Πh v, v − Πh v) + 2a (v − Πh v, Πh v) .
Par définition de Πh v, le dernier terme est nul. Par coercivité de a, le second terme
est positif. Donc a(v, v) ≥ a (Πh v, Πh v) et donc
a(v, v)
λm,h ≤ max .
v∈Wm ,kvkH =1 kΠh vk2H
Pm Pm 2
Pour v ∈ Wm tel que kvkH = 1, on a v = i=1 αi ui avec i=1 αi = 1, donc
a(v, v) ≤ λm , d’où
1 λm
λm,h ≤ λm max 2
= 2 .
v∈Wm ,kvkH =1 kΠh vkH σm,h
On voit donc que la différence entre λm,h et λm est reliée aux propriétés d’approxi-
mation de V par Vh . Plus Vh est “proche” de V , plus on s’attend à ce que la solution
Πh u ∈ Vh du problème (3.24) soit proche de u, donc en particulier que kΠh ukH soit
proche de kukH . Ceci implique alors que σm,h est proche de 1 (puisqu’on minimise
kΠh vkH sur des vecteurs v de norme 1). On remarque donc que, pour aller plus loin
dans l’estimation de λm,h , il n’est plus nécessaire de faire appel à la spécificité du
problème (c’est un problème aux valeurs propres). Disposer de propriétés d’approxi-
mation de V par Vh suffit.
Mentionnons enfin que ces propriétés d’approximation sont souvent reliées à
l’existence d’une application rh de V dans Vh telle que, pour tout v ∈ V , on a
limh→0 kv − rh (v)kV = 0. Dans le cas d’une approximation par éléments finis P1 ,
l’application rh est par exemple l’interpolation de v sur les noeuds du maillage.
Supposons maintenant que Wm , l’espace vectoriel engendré par les m premiers vec-
teurs propres de la forme bilinéaire a, soit inclus dans H k+1 (Ω). Alors, il existe Cm
tel que, pour tout v ∈ Wm de norme 1, on a
Détaillons ceci. On peut toujours supposer que les m premiers vecteurs propres de
a, notés uj , 1 ≤ j ≤ m, sont orthogonaux deux à deux pour le produit scalaire
de H 1 , et sont de norme 1 : kuj kH 1 = 1. On a supposé que Wm ⊂ H k+1 (Ω), donc
uj ∈ H k+1 (Ω) vérifie la majoration (3.27). En posant C m = C sup1≤j≤m kuj kH k+1 (Ω) ,
on a donc
∀j, 1 ≤ j ≤ m, kuj − rh uj kH 1 (Ω) ≤ C m hk . (3.29)
Soit maintenant v ∈ Wm , avec kvkH 1 = 1. On décompose v sur la base des uj :
m
X X
v= αj uj avec kvk2H 1 = αj2 = 1.
j=1 j
X X
kv − rh vkH 1 (Ω) = αj (uj − rh uj ) ≤ |αj | kuj − rh uj kH 1 (Ω) .
j H 1 (Ω) j
soit kΠh vkH 1 (Ω) ≥ 1 − C̃m hk . Ceci implique σm,h ≥ 1 − C̃m hk . L’estimation (3.25)
donne donc, pour une constante Cm , l’encadrement λm ≤ λm,h ≤ λm (1 + Cm hk ), soit
0 ≤ λm,h − λm ≤ Cm hk . (3.30)
Nous finissons cette section en énonçant un résultat précis de convergence pour les
valeurs propres et les vecteurs propres du laplacien, définis par (3.16), approximés
par une méthode d’éléments finis triangulaires Pk . Un tel résultat se généralise à
d’autres problèmes et d’autres types d’éléments finis.
Théorème 3.15. Soit Ω un ouvert borné et régulier de Rd . Soit (Th )h≥0 une suite
de maillages triangulaires réguliers de Ω. Soit V0h le sous-espace de H01 (Ω) défini
par la méthode des éléments finis Pk , de dimension J.
Soient (λm , um )m≥1 les valeurs propres et vecteurs propres du problème (3.16),
et soit (λm,h )1≤m≤J les valeurs propres de l’approximation variationnelle (3.18) cor-
respondante sur l’espace de dimension finie V0h . Pour tout m ≥ 1 fixé, on a
Il existe une famille de vecteurs propres (um,h )1≤m≤J de (3.18) dans V0h telle que, si
λm est valeur propre simple, alors
Si le sous-espace engendré par (u1 , . . . , um ) est inclus dans H k+1 (Ω) avec k+1 > d/2,
alors il existe Cm indépendant de h tel que
— l’ordre de convergence des valeurs propres est le double de celui pour les
vecteurs propres 1 . On retrouvera ce phénomène (lié au caractère auto-adjoint
de l’opérateur) dans les algorithmes de calcul des valeurs propres et vecteurs
propres d’une matrice (cf. par exemple la proposition 3.17).
Nous mentionnons ici trois méthodes typiques pour une matrice symétrique :
— la méthode de la puissance, analysée dans la section 3.4.1. C’est la méthode
la plus simple, mais elle ne permet (au mieux) que de calculer les valeurs
propres de plus grande et de plus petite valeur absolue.
— la méthode de Given-Householder, qui permet de calculer une ou plusieurs
valeurs propres de rang quelconque sans avoir à calculer toutes les valeurs
propres. Cette méthode est en fait la concaténation de deux algorithmes, l’al-
gorithme de Householder qui permet de transformer une matrice symétrique
en une matrice tridiagonale de mêmes valeurs propres, et l’algorithme de Gi-
vens qui permet le calcul des valeurs propres d’une matrice tridiagonale. Nous
n’en dirons pas plus et renvoyons à la bibliographie pour plus de détails.
— la méthode de Lanczos, analysée dans la section 3.4.2. Comme l’algorithme
de gradient conjugué, cette méthode fait appel aux espaces de Krylov. Nous
en décrirons ci-dessous l’esprit. Cette méthode est à la base de nombreux
développements récents qui conduisent aux méthodes les plus efficaces pour
de grandes matrices creuses.
1. On voit aussi que l’estimation (3.30) sur les valeurs propres n’est pas optimale, si la forme
bilinéaire a correspond au laplacien.
74CHAPITRE 3. EQUATIONS AUX DÉRIVÉES PARTIELLES ET PROBLÈMES AUX VALEURS PRO
Proposition 3.17. On suppose que A est une matrice réelle symétrique de taille
n, de valeurs propres (λ1 , . . . , λn ) rangées par ordre de valeur absolue croissante, et
que λn est positive et simple : |λ1 | ≤ . . . ≤ |λn−1 | < λn . Soit (e1 , . . . , en ) une base de
vecteurs propres orthonormés. On suppose que x0 n’est pas orthogonal à en . Alors
la méthode de la puissance converge, au sens où
Démonstration.
Pn On décompose le vecteur initial sur les vecteurs propres de A :
x0 = P i=1 i i avec βn 6= 0 par hypothèse. Le vecteur xk est proportionnel à
β e ,
A x0 = ni=1 βi λki ei et de norme 1, donc
k
n−1
X
βn en + βi (λi /λn )k ei
i=1
xk = !1/2 . (3.33)
n−1
X
βn2 + βi2 (λi /λn )2k
i=1
3.4. ALGORITHMES DE DIAGONALISATION 75
Comme |λi | < λn , on voit que xk converge vers x∞ = signe (βn )en . On déduit de
(3.33) que
n−1
X
βn λn en + βi (λi /λn )k λi ei
i=1
yk+1 = !1/2 ,
n−1
X
βn2 + βi2 (λi /λn )2k
i=1
On est souvent intéressé par le calcul des valeurs propres petites. L’algorithme
suivant, très inspiré de la méthode de la puissance, permet de calculer la valeur
propre de valeur absolue la plus petite.
Proposition 3.20. On suppose que A est une matrice réelle symétrique inversible
de taille n, de valeurs propres (λ1 , . . . , λn ) rangées par ordre de valeur absolue crois-
sante, et que λ1 est positive et simple : 0 < λ1 < |λ2 | ≤ . . . ≤ |λn |. Soit (e1 , . . . , en )
une base de vecteurs propres orthonormés. On suppose que x0 n’est pas orthogonal
à e1 . Alors la méthode de la puissance inverse converge, au sens où
1
lim = λ1 , lim xk = x∞ avec x∞ = ±e1 .
k→+∞ kyk k k→+∞
Kk = Vect r0 , Ar0 , . . . , Ak r0 .
(Tk )i,i = hAvi , vi i, (Tk )i,i+1 = (Tk )i+1,i = kv̂i+1 k, (Tk )i,j = 0 sinon.
Lemme 3.22. Pour tout j ≤ k0 + 1, on a v̂j 6= 0 et donc vj est bien défini, tandis
que v̂k0 +2 = 0.
Pour 1 ≤ k ≤ 1 + k0 , la famille (v1 , . . . , vk ) coı̈ncide avec la base orthonormée
de l’espace de Krylov Kk−1 construite par le procédé de Gram-Schmidt appliqué à la
famille (r0 , . . . , Ak−1 r0 ).
Soit ek le k-ième vecteur de la base canonique de Rk , et Idk la matrice identité
de taille k × k. Alors, pour 1 ≤ k ≤ 1 + k0 , on a
et
Vkt AVk = Tk et Vkt Vk = Idk . (3.36)
3.4. ALGORITHMES DE DIAGONALISATION 77
donc hwj , wp i = δpj pour tout p ≤ j, ce qui donne l’hypothèse de récurrence au rang
j.
Par récurrence, on montre aussi que wj ∈ Kj−1 , tant que les vecteurs wj existent.
Donc la famille (w1 , . . . , wj−1 ) est une famille de j − 1 vecteurs orthogonaux deux
à deux et qui appartiennent tous à Kj−3 , qui est de dimension j − 2. Ceci est
contradictoire : donc l’algorithme stoppe à un indice j > k0 + 1.
Supposons maintenant que ŵk0 +2 6= 0. Alors la famille (w1 , . . . , wk0 +2 ) est une
famille de k0 + 2 vecteurs orthogonaux deux à deux et qui appartiennent tous à
Kk0 +1 = Kk0 , qui est de dimension k0 + 1. Ceci est à nouveau contradictoire. Donc
l’algorithme stoppe exactement à l’indice k0 + 2.
Pour tout j ≤ k0 + 1, la famille (w1 , . . . , wj ) est une famille de j vecteurs ortho-
normés et qui appartiennent tous à Kj−1 , qui est de dimension j : donc cette famille
constitue une base orthonormée de Kj−1 , qui coı̈ncide avec la base orthonormée
construite par le procédé de Gram-Schmidt appliqué à la famille (r0 , . . . , Aj−1 r0 ).
Lemme 3.23. Les valeurs propres de Tk0 +1 sont aussi valeurs propres de A.
Réciproquement, si on suppose que Pi r0 6= 0 pour tout i, alors toutes les valeurs
propres de A sont aussi valeurs propres de Tk0 +1 et k0 + 1 = m. Les valeurs propres
de Tk0 +1 sont simples.
Dans le cas où Pi r0 6= 0 pour tout i, la récurrence de Lanczos permet donc de
construire une matrice Tk0 +1 qui est tridiagonale et dont les valeurs propres sont
exactement les valeurs de A. On pourrait alors penser calculer les valeurs propres
de A de la façon suivante :
— on applique la récurrence de Lanczos jusqu’à l’ordre k0 + 1, ce qui permet de
construire la matrice Tk0 +1 .
— on calcule les valeurs propres de la matrice Tk0 +1 . Le problème sur Tk0 +1
est plus simple que le problème initial sur A, car Tk0 +1 est tridiagonale et il
existe des algorithmes pour le calcul des valeurs propres qui sont spécifiques
aux matrices tridiagonales, comme l’algorithme de Givens.
— comme (dans les bons cas) Tk0 +1 a exactement les mêmes valeurs propres que
A, on a ainsi calculé les valeurs propres de A.
Une telle approche n’est cependant pas la meilleure façon d’exploiter la récurrence de
Lanczos, à cause d’instabilités numériques liées à des erreurs d’arrondi. Une bonne
façon d’exploiter la récurrence de Lanczos sera donnée par le lemme 3.24 ci-dessous.
On démontre maintenant le lemme 3.23.
Comme nous l’avons précisé plus haut, la bonne façon d’exploiter la récurrence
de Lanczos n’est pas de calculer la matrice Tk0 +1 pour ensuite la diagonaliser. Il est
plus intéressant d’exploiter le lemme que nous donnons maintenant :
Ce lemme vient compléter la discussion qui fait suite au lemme 3.23. Une façon
efficace d’utiliser la récurrence de Lanczos est en effet la suivante : si la dernière
composante d’un vecteur propre de Tk est petite, i.e. |hek , yi| kyk, alors la va-
leur propre correspondante est une bonne approximation d’une valeur propre de
A. Ainsi, le calcul (d’une approximation) des valeurs propres de A passe toujours
3.4. ALGORITHMES DE DIAGONALISATION 81
Soit εj = signe (λj − λ), on prend le produit scalaire de l’égalité ci-dessus avec
ε j Pj V k y :
εj (λj − λ)kPj Vk yk2 = hy, ek iεj hv̂k+1 , Pj Vk yi.
On somme sur les j, avec εj (λj − λ) = |λj − λ| ≥ mini |λi − λ| :
m
X m
X
2
min |λi − λ| kPj Vk yk ≤ hy, ek i εj hv̂k+1 , Pj Vk yi.
i
j=1 j=1
Pm
Or j=1 kPj Vk yk2 = kVk yk2 = kyk2 , donc
m
|hek , yi| X
min |λi − λ| ≤ εj hv̂k+1 , Pj Vk yi
i kyk2 j=1
m
|hek , yi| X
≤ kv̂k+1 k kPj Vk yk
kyk2 j=1
v
u m
|hek , yi| √ uX
≤ kv̂k+1 k mt kPj Vk yk2 .
kyk2 j=1
Pm
En utilisant à nouveau j=1 kPj Vk yk2 = kyk2 , on obtient le résultat annoncé.
82CHAPITRE 3. EQUATIONS AUX DÉRIVÉES PARTIELLES ET PROBLÈMES AUX VALEURS PRO
Chapitre 4
décrit elle l’évolution de la distribution statistique u(t, x, p) des particules d’un fluide
dans l’espace des phases R3 ×R3 3 (x, p). La fonction F modélise les forces appliquées
à chaque particule et la fonction f décrit les collisions entre les particules.
Equation de la chaleur
L’équation de la chaleur est le prototype de toute une famille d’équations appelées
paraboliques :
∂u
− ∆u = f. (4.1)
∂t
Typiquement, u(t, x) représente la température au temps t et au point x ∈ Ω d’un
matériau homogène situé dans un domaine Ω ⊂ R3 . La fonction f s’interprète alors
comme une source de chaleur. Si Ω est borné, il faut ajouter des conditions aux
bords (de type Dirichlet ou Neumann par exemple).
En fait la même équation intervient dans de très nombreuses situations : par
exemple u peut aussi modéliser la diffusion d’une concentration dans le domaine
Ω, ou l’évolution du champ de pression d’un fluide s’écoulant en milieu poreux, ou
encore la loi d’un mouvement brownien dans Ω. Des généralisations de l’équation
(4.1) peuvent permettre de décrire des matériaux non homogènes ou en présence
d’un effet convectif. Elles peuvent devenir non linéaires (de type réaction-diffusion
par exemple) :
∂u
− ∆u = F (u). (4.2)
∂t
L’équation de la chaleur (4.1) est également la base de plusieurs problèmes de
frontières libres, comme le problème de l’obstacle parabolique
∂u
(
− ∆u = −1u>0 ,
∂t
u≥0
qui décrit un système composé de deux phases (par exemple un gla con plongé dans
de l’eau). Il y a ici deux inconnues : la solution, et le domaine dans lequel l’équation
est vérifiée. On appelle frontière libre le bord de l’ensemble {u = 0}, qui évolue
au cours du temps. Des modèles similaires interviennent en finance mathématique
(modèles de type Black-Scholes).
∂ 2u
− ∆u = f (4.3)
∂t2
qui est le prototype d’une famille d’équations appelées hyperboliques. Lorsqu’elle est
posée dans un domaine borné Ω ⊂ R2 , u peut représenter le déplacement vertical
4.1. EXEMPLES D’ÉQUATIONS D’ÉVOLUTION 85
Equation de Schrödinger
L’équation de Schrödinger
∂u
−i − ∆u + V u = 0 (4.5)
∂t
ressemble beaucoup à l’équation de la chaleur (si V = 0) puisque c’est comme si
on avait remplacé t par it. Elle intervient abondamment en mécanique quantique R
pour la description de la matière à l’échelle microscopique. Si on suppose Ω |u(t =
0, x)|2 dx = 1, |u(t, x)|2 dx peut représenter la probabilité de présence au temps t
d’une particule quantique dans le vide (V = 0) ou en présence R d’un champ électrique
2
extérieur V . Grâce à la présence du complexe i, on aura Ω |u(t, x)| dx = 1 pour
tout t ∈ R.
Alors que les équations précédentes étaient posées dans l’espace physique (R2
ou R3 ...), l’équation de Schrödinger a la particularité d’être fréquemment étudiée
dans des espaces Rn avec n très grand. Par exemple si on désire décrire l’évolution
d’un système comportant N particules quantiques dans l’espace R3 , on aura u =
u(x1 , ..., xN ) où chaque xi ∈ R3 : |u(x1 , ..., xN )|2 représente alors la probabilité de
présence de trouver la particule numéro k en xk ∈ R3 . Ceci rend la description de
la matière à l’échelle microscopique très complexe et justifie la nécessité de trouver
des modèles valides à des échelles supérieures. La dérivation de tels modèles à partir
de l’échelle microscopique est alors d’un grand intérêt.
Autres équations
L’équation de Burgers
∂u ∂u ∂ 2u
+u =ν 2
∂t ∂x ∂x
apparaı̂t en mécanique des fluides ou en acoustique (elle peut modéliser la dynamique
d’un gaz par exemple). Lorsque ν = 0,
∂u ∂u
+u =0
∂t ∂x
86 CHAPITRE 4. INTRODUCTION AUX PROBLÈMES D’ÉVOLUTION
on obtient le prototype d’une équation pour laquelle il peut apparaı̂tre des discon-
tinuités (ondes de choc).
L’équation d’Airy
∂u ∂ 3 u
+ 3 =0
∂t ∂x
est elle-même la base de l’équation (non linéaire) de Korteweg-de Vries (KdV)
∂u ∂u ∂ 3 u
+u + =0
∂t ∂x ∂x3
qui est un modèle prototype pour la description d’ondes de type “solitons” comme
on peut parfois en observer à la surface de l’eau.
L’équation d’Euler-Bernoulli
∂u ∂ 4 u
+ 4 =0
∂t ∂x
peut quant à elle modéliser la torsion d’une poutre unidimensionnelle.
4.2 Préliminaires
On se pose généralement différentes questions lors de l’étude d’une équation
d’évolution.
La première est bien sûr l’existence et l’unicité de solutions dans un espace fonc-
tionnel bien choisi. Pour cela, il pourra être très utile de commencer par choisir des
espaces fonctionnels assez “gros”, c’est-à-dire contenant beaucoup plus de fonctions
que celles qui sont régulières par rapport à toutes leurs variables. On parle alors
de solutions faibles. Intuitivement, plus l’espace fonctionnel est grand et plus il sera
facile de démontrer l’existence de la solution. Mais, on peut aussi se demander quelle
est la régularité de la solution lorsque la condition initiale est elle-même régulière
ainsi que les autres paramètres de l’équation. On peut ainsi obtenir l’existence et
l’unicité de solutions régulières a posteriori, qu’on appelle des solutions fortes. L’uti-
lisation de solutions faibles peut donc être soit un intermédiaire utile pour démontrer
l’existence de solutions plus régulières, soit une nécessité lors de l’étude d’équations
pour lesquelles on se s’attend pas à ce que la solution soit ou reste régulière au cours
du temps.
Le fait qu’il existe une unique solution à un modèle mathématique n’implique pas
automatiquement que le modèle considéré soit un “bon” modèle. Une autre question
importante est celle de la dépendance de la solution en fonction des conditions ini-
tiales et des divers paramètres apparaissant dans l’équation. D’une part on peut se
demander comment la solution varie (dans l’espace fonctionnel choisi) si on change
un peu ces paramètres et reste robuste par rapport à de légers changements de ces
paramètres. C’est une question d’apparence anodine mais qui est fondamentale
4.2. PRÉLIMINAIRES 87
lorsque l’on envisage d’utiliser des méthodes de simulation pour pouvoir approcher
numériquement les solutions de telles équations. Le mathématicien Jacques Hada-
mard a donné une définition de ce qu’est un “bon” modèle, en parlant de problème
bien posé. En notant f les données du modèles (le second membre, les données
initiales, le domaine, etc.), u la solution recherchée, et A l’opérateur qui agit sur u,
supposons que le problème considéré soit de trouver u solution d’un problème du
type
A(u) = f. (4.6)
Définition 4.1. On dit que le problème (4.6) est bien posé si pour toute donnée f il
admet une solution u unique, et si cette solution u dépend continûment de la donnée
f.
La troisième condition, la moins évidente, est pourtant cruciale dans une pers-
pective d’approximation numérique. En effet, faire un calcul numérique d’une solu-
tion approchée de (4.6) revient à perturber les données (qui de continues deviennent
discrètes) et à résoudre (4.6) pour ces données perturbées. Si de petites perturbations
des données conduisent à de grandes perturbations de la solution, il n’y a aucune
chance pour que la simulation numérique soit proche de la réalité (ou du moins de
la solution exacte). Par conséquent, cette dépendance continue de la solution par
rapport aux données est une condition absolument nécessaire pour envisager des
simulations numériques précises.
Une question reliée à la question ci-dessus est alors le choix d’un schéma numérique
pour approcher les solutions de l’équation dont on peut prouver qu’elle converge en
un certain sens vers la solution lorsque les paramètres de discrétisation tendent dans
une certaine limite (par exemple un pas de temps ou un pas de maillage aura voca-
tion à tendre vers 0), et de quantifier l’erreur faite par rapport à la solution exacte
de l’équation par rapport aux paramètres de la discrétisation.
Enfin, on peut chercher ensuite à décrire un peu plus précisément le compor-
tement de la solution au cours du temps, en particulier en relation avec des mo-
tivations physiques (signe de la solution, vitesse de propagation, comportement en
temps grand, etc). Le comportement qualitatif peut alors être très différent suivant
le type d’équation considérée.
Dans le cadre de ce cours, nous aborderons brièvement quelques-unes de ces
questions sur quelques exemples types d’équations d’évolution. Nous étudierons tout
particulièrement l’équation de la chaleur.
Nous avons pris le partie dans ce polycopié de commencer par vous présenter tout
d’abord une méthode numérique, qui est une des plus anciennes et des plus simples
méthodes pour approcher numériquement les solutions de problèmes d’évolution, à
savoir la méthode des différences finies. La présentation de cette méthode fera l’objet
du Chapitre 5.
88 CHAPITRE 4. INTRODUCTION AUX PROBLÈMES D’ÉVOLUTION
A part dans quelques cas très particuliers, il est impossible de calculer explicite-
ment les solutions des différents modèles présentés ci-dessus. Il est donc nécessaire
d’avoir recours au calcul numérique pour estimer qualitativement et quantitative-
ment ces solutions. Le principe de toutes les méthodes de résolution numérique
des équations aux dérivées partielles est d’obtenir des valeurs numériques discrètes
(c’est-à-dire en nombre fini) qui approchent (en un sens convenable à préciser) la
solution exacte.
Il existe de nombreuses méthodes d’approximation numérique des solutions d’équations
aux dérivées partielles. Nous présentons dans ce chapitre une des plus anciennes et
des plus simples, appelée méthode des différences finies (nous verrons plus loin une
autre méthode, dite méthode des éléments finis).
Nous nous contenterons ici d’illustrer la méthode des différences finies sur le
cas de l’équation de la chaleur, mais il faut savoir que celle-ci est utilisé pour de
nombreux autres problèmes.
89
90 CHAPITRE 5. MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES
Nous supposerons dans toute la suite du chapitre qu’il existe bien une et une seule
solution u(t, x) à ce problème, et que celle-ci est une fonction régulière en temps et en
espace. Nous verrons dans le chapitre suivant les résultats qui permettent d’affirmer
que tel est bien le cas.
Pour définir un schéma numérique basé sur une méthode de différences finies,
il est nécessaire d’introduire les différentes discrétisations du problème, à savoir la
discrétisation en espace et la discrétisation en temps.
Commençons par la discrétisation en espace. Soit N ∈ N∗ et soit ∆x := N1+1 un
pas d’espace. On définit un maillage régulier de l’intervalle [0, 1] comme suit :
∀0 ≤ j ≤ N + 1, xj := j∆x,
∀0 ≤ j ≤ N + 1, u0j := u0 (xj ).
Comme mentionné ci-dessus, les conditions aux limites de (5.1) peuvent être
de plusieurs types, mais leur choix n’intervient pas dans la définition des schémas.
Les conditions limites de Dirichlet homogènes (5.2) se discrétisent de la manière
suivante :
∀n ∈ N∗ , un0 = unN +1 = 0.
5.1. PRINCIPE DE LA MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES 91
Dans le cas de conditions limites périodiques (5.3), on impose les relations suivantes :
∀n ∈ N∗ , un0 = unN +1 .
Il nous reste à discrétiser l’équation aux dérivées partielles (5.1) en tant que
telle. Le principe d’une méthode de différences finies est de remplacer les dérivées
intervenant dans l’équation considérée par des différences finies en utilisant des
formules de Taylor dans lesquelles on néglige les restes. Par exemple, on approche
la dérivée seconde en espace (le laplacien en dimension 1) par la formule suivante :
−unj−1 + 2unj − unj+1
−∂xx u(tn , xj ) ≈ . (5.4)
(∆x)2
En effet, la formule (5.4) vient de la formule de Taylor suivante :
Si ∆x est petit, la formule (5.4) est une “bonne” approximation (elle est naturelle,
mais pas unique). La formule (5.4) est dit centrée car elle est symmétrique en j.
Remarque 5.1. La formule (5.4) nécessite de définir les valeurs de unj pour j ≤ 0
ou j ≥ N +1. Dans le cas de conditions aux bords de Dirichlet homogènes, on impose
un+1
j − ujn−1 −unj−1 + 2unj − unj+1
+D = 0.
2∆t (∆x)2
92 CHAPITRE 5. MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES
unj − ujn−1
∂t u(tn , xj ) ≈
∆t
qui conduit au schéma
unj − un−1
j −unj−1 + 2unj − unj+1
+D = 0. (5.5)
∆t (∆x)2
un+1
j − unj
∂t u(tn , xj ) ≈
∆t
qui conduit au schéma
un+1
j − unj −unj−1 + 2unj − unj+1
+D = 0. (5.6)
∆t (∆x)2
unj − un−1
j −un−1 n−1
j−1 + 2uj − un−1
j+1
+D = 0. (5.7)
∆t (∆x)2
U n − U n−1
+ ADir U n−1 = 0, (5.8)
∆t
5.1. PRINCIPE DE LA MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES 93
Dans le cas de conditions limites périodiques, comme un0 = unN +1 pour tout n ∈ N,
il suffit de connaı̂tre la formule qui relie les valeurs du vecteur U n := (unj )1≤j≤N +1 ∈
RN +1 aux valeurs du vecteur U n−1 := (un−1 j )1≤j≤N +1 ∈ RN +1 . Dans ce cas, le schéma
(5.7) se réécrit de manière équivalente
U n − U n−1
+ APer U n−1 = 0, (5.10)
∆t
et le schéma (5.5) se réécrit de manière équivalente
U n − U n−1
+ APer U n = 0, (5.11)
∆t
avec APer ∈ R(N +1)×(N +1) la matrice définie par
2 −1 −1
(∆x)2 ∆x2
0 ··· ··· 0 ∆x2
−12 2 −1
0 ··· ··· 0
∆x (∆x)2 ∆x2
−1 2 −1
0
∆x2 (∆x)2 ∆x2
0 ··· 0
APer := D
. ... ... ... ..
.. . .
−1 2 −1
0
··· 0 ∆x2 (∆x)2 ∆x2
0
−1 2 −1
0 ··· ··· 0
∆x2 (∆x)2 ∆x2
−1 −1 2
∆x2
0 ··· ··· 0 ∆x2 (∆x)2
Le schéma (5.5) est appelé schéma d’Euler implicite et le schéma (5.7) est ap-
pelé schéma d’Euler explicite. Cette dénomination vient de la remarque suivante :
la formule (5.7) (ou de manière équivalente les formules 5.8 et (5.10)) donne une
expression explicite des valeurs de (unj )0≤j≤N +1 en fonction des valeurs précédentes
de (un−1
j )0≤j≤N +1 (ou de manière équivalente du vecteur U n en fonction du vecteur
n−1
U ). En effet, pour le schéma d’Euler explicite, on a alors
U n = U n−1 − ∆tAU n−1 = (I − ∆tA)U n−1 ,
94 CHAPITRE 5. MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES
U n = (I + ∆tA)−1 U n−1 .
alors les schémas se modifient en remplaçant 0 au second membre par une ap-
proximation de f (t, x) au point (tn , xj ). Par exemple, si on choisit l’approximation
f (tn , xj ), le schéma explicite (5.6) devient
un+1
j − unj −unj−1 + 2unj − unj+1
+D = f (tn , xj ),
∆t (∆x)2
ou de manière équivalente
unj − un−1
j −un−1 n−1
j−1 + 2uj
n−1
− uj+1
+D = f (tn−1 , xj ),
∆t (∆x)2
Dans le cas de conditions aux limites de Dirichlet, en notant F n−1 := (f (tn−1 , xj ))1≤j≤N ,
on obtient alors l’expression du vecteur U n en fonction du vecteur U n−1 comme suit
U n − U n−1
+ ADir U n−1 = F n−1 .
∆t
Exercice 5.3. Ecrire l’expression de U n en fonction du vecteur U n−1 et du vecteur
F n := (f (tn , xj ))1≤j≤N dans le cas d’un problème de la chaleur avec second membre
et d’un schéma d’Euler implicite avec conditions limites de Dirichlet homogènes.
F (u) = 0.
Remarquons que F (u) est une notation pour une fonction de u et de ses dérivées
partielles en tout point (t, x). De manière générale, un schéma aux différences finies
est défini, pour tous les indices possibles n, j par la formule
n+m
F∆t,∆x {uj+k }m− ≤m≤m+ ,k− ≤k≤k+ = 0 (5.12)
a été écrite de telle manière que, pour une fonction régulière u(t, x) qui n’est pas une
solution de l’équation F (u) = 0, la limite de l’erreur de troncature n’est pas nulle.
96 CHAPITRE 5. MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES
en espace.
Démonstration. Soit v(t, x) une fonction de classe C 6 . Par développement de Taylor
autour du point (t, x), on calcule l’erreur de troncature du schéma (5.7)
v(t + ∆t, x) − v(t, x)
∆t
−v(t, x − ∆x) + 2v(t, x) − v(t, x + ∆x)
+D
(∆x)2
= (∂t v(t, x) − D∂xx v(t, x))
∆t (∆x)2
+ ∂tt v(t, x) − D ∂xxxx v(t, x)
2 12
+ O (∆t)2 + (∆x)4 .
Nous introduisons ici la notion de schéma stable pour une certaine norme.
5.3. STABILITÉ ET ANALYSE DE FOURIER 97
Définition 5.10. Soit 1 ≤ p ≤ +∞. Un schéma aux différences est dit incondition-
nellement stable pour la norme Lp s’il existe une constante K > 0 indépendante de
∆t et de ∆x (lorsque ces valeurs tendent vers 0) telle que
quelle que soit la donnée initiale U 0 . Si (5.15) n’a lieu que pour des pas ∆t et ∆x
astreints à certaines inégalités, on dit que le schéma est conditionnellement stable.
Remarque 5.11. Puisque toutes les normes sont équivalentes dans RN , le lecteur
trop rapide pourrait croire que la stabilité par rapport à une norme implique la sta-
bilité par rapport à toutes les normes. Malheureusement, il n’en est rien et il existe
des schémas qui sont stables par rapport à une norme mais qui ne le sont pas par
rapport à une autre. En effet, le point crucial de la Définition 5.10 est que la majo-
ration est uniforme par raport à ∆x alors même que les normes définies par (5.14)
dépendent de ∆x.
Définition 5.12. Un schéma aux différences finies est dit linéaire si la formule
F∆t,∆x ({un+m n+m
j+k }) = 0 qui le définit est linéaire par rapport à ses arguments uj+k .
La stabilité d’un schéma linéaire à deux niveaux est très facile à interpréter. En
effet, par linéarité tout schéma linéaire à deux niveaux peut s’écrire sous la forme
condensée
U n = M U n−1 (5.16)
où M est un opérateur linéaire (une matrice, dite d’itération) de RN dans RN . Par
exemple, pour le schéma explicite (5.7), la matrice M vaut
1 − 2c c 0 ··· ··· 0 0
c 1 − 2c c 0 ··· ··· 0
0
c 1 − 2c c 0 · · · 0
M = (I − ∆tADir ) =
.. .. .. .. .. .
. . . . .
0
· · · 0 c 1 − 2c c 0
0 ··· ··· 0 c 1 − 2c c
0 0 ··· ··· 0 c −2c
∆t
avec c = D (∆x)2.
U n = M nU 0
kAn U 0 kp ≤ KkU 0 kp , ∀n ∈ N, ∀U 0 ∈ RN .
98 CHAPITRE 5. MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES
kM n kLp ≤ K, ∀n ∈ N.
Remarque 5.15. Dans le Définition 5.14, les inégalités tiennent compte non seule-
ment du minimum et du maximum de U 0 mais aussi de 0 qui est la valeur imposée
au bord par les conditions de Dirichlet. Cela est nécessaire si la donnée initiale U 0
ne vérifie pas les conditions aux limites de Dirichlet (nous verrons dans un prochain
chapitre que cela peut effectivement être le cas), et inutile dans le cas contraire.
Si la condition CFL est vérifiée, alors (5.18) montre que unj est une combinaison
convexe des valeurs au temps précédent un−1 n−1
j−1 , uj , un−1
j+1 . En effet, tous les coeffi-
cients dans le membre de droite de (5.18) sont positifs et leur somme vaut 1. En
particulier si la donnée initiale U 0 est bornée par deux constants m et M telles que
m ≤ u0j ≤ M, ∀0 ≤ j ≤ N + 1,
alors une récurrence facile montre que les mêmes inégalités restent vraies pour tous
les temps ultérieurs
en prenant en compte les conditions aux limites de Dirichlet. Le schéma (5.7) vérifie
donc le principe du maximum discret et est donc stable en norme L∞ .
Supposons maintenant au contraire que la condition CFL ne soit pas vérifiée,
c’est-à-dire que
2D∆t > (∆x)2 .
Alors pour certaines données initiales, le schéma n’est pas stable (il peut être stable
pour certaines conditions initiales exceptionnelles, par exemple pour U 0 = 0 !). Pre-
nons la donnée initiale définie par
u0j = (−1)j , ∀0 ≤ j ≤ N + 1,
∆t
|unj | ≥ D un−1 n−1
j−1 + uj+1 ,
(∆x)2
On obtient donc que |unj | −→n→+∞ +∞ et le shéma n’est donc pas stable en norme
L∞ .
100 CHAPITRE 5. MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES
Exercice 5.17. Montrer que le schéma implicite (5.5) est stable en norme L∞ quels
que soient les pas de temps ∆t et d’espace ∆x. On dit que le schéma d’Euler implicite
est inconditionnellement stable en norme L∞ .
Indication : On supposera que la condition initiale U 0 est telle qu’il existe deux
constantes m ≤ 0 ≤ M telles que
m ≤ u0j ≤ M, ∀1 ≤ j ≤ N,
m ≤ unj ≤ M, ∀1 ≤ j ≤ N,
avec Z 1
u n
b (k) = un (x)e−2iπkx dx.
0
Autrement dit,
bn (k) = M (k)b
u un−1 (k) = M (k)n u
b0 (k),
avec
∆t ∆t
M (k) := 1 − 2D (1 − cos(2πk∆x)) = 1 − 4D (sin(πk∆x))2 .
(∆x)2 (∆x)2
∆t
4D 2
(sin(πk∆x))2 ≤ 2,
(∆x)
soit
2D∆t (sin(πk∆x))2 ≤ (∆x)2 . (5.19)
Si la condition CFL (5.17) , i.e. 2D∆t ≤ (∆x)2 est satisfaite, alors l’inégalité (5.19)
est vraie quel que soit le mode de Fourier k ∈ Z, et par la formule de Plancherel, on
en déduit
Z 1 X X Z 1
n 2 n 2 n 2 0 2
kU k2 = |u (x)| dx = |b
u (k)| ≤ |b
u (k)| = |u0 (x)|2 dx = kU 0 k22 ,
0 k∈Z k∈Z 0
Exercice 5.19. Montrer que, pour des conditions aux limites périodiques, le schéma
implicite (5.5) est stable en norme L2 .
|M (k)| ≤ 1, ∀k ∈ Z.
Remarque 5.21. On peut également montrer que le schéma explicite (5.7) avec
conditions limites de Dirichlet est stable en norme L2 si et seulement la condition
CFL 2D∆t ≤ (∆x)2 . La preuve est juste un peu plus pénible que dans le cas de
conditions de bords périodiques. De même, le schéma implicite (5.5) avec conditions
limites de Dirichlet est inconditionnellement stable en norme L2 .
5.4 Convergence
Nous avons maintenant tous les outils pour démontrer la convergence des schémas
de différences finies. Le principal résultat en ce sens est le Théorème de Lax qui
affirme que, pour un schéma linéaire à deux niveaux, consistance et stabilité implique
convergence.
avec en le vecteur “erreur” défini par ses composantes enj = unj − u(tn , xj ).
De plus, si le schéma est précis à l’ordre q en espace et à l’ordre r en temps,
alors pour tout T > 0 il existe une constante CT > 0 telle que
Démonstration. Pour simplifier, on suppose que le schéma est discrétisé avec des
conditions aux limites de Dirichlet. La même démonstration est aussi valable pour
des conditions aux limites de périodicité. Un schéma linéaire à deux niveaux peut
s’écrire sous la forme condensée (5.16), i.e.
U n+1 = M U n , (5.22)
en+1 = M en − ∆tn ,
Remarque 5.23. Le Théorème de Lax est en fait valable pour toute équation aux
dérivées partielles linéaire. Il admet une réciproque au sens où un schéma linéaire
consistant à deux niveaux qui converge est nécessairement stable. Remarquer que la
vitesse de convergence dans (5.21) est exactement la précision du schéma. Enfin, il
est bon de noter que cette estimation (5.21) n’est valable que sur un intervalle borné
de temps [0, T ] mais qu’elle est indépendant du nombre de points de discrétisation
N.
104 CHAPITRE 5. MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES
Chapitre 6
Problèmes d’évolution
paraboliques
6.1 Préliminaires
6.1.1 Lemme de Gronwall
Avant de rappeler le lemme de Gronwall, nous donnons ici la définition d’une
fonction absolument continue à valeurs dans un espace de Banach.
Définition 6.1. Soit I ⊂ R un intervalle de R et soit X un espace de Banach.
On dit qu’une fonction continue u : I → X est une fonction absolument continue
si et seulement si pour tout > 0, il existe δ > 0 tel que pour toute suite finie
(αn )n≤N , (βn )n≤N ⊂ I tels que
(αn , βn ) ∩ (αm , βm ) = ∅ ∀n 6= m
et X
|βn − αn | ≤ δ,
n∈N
alors X
ku(βn ) − u(αn )kX ≤ .
n∈N
Proposition 6.2. Une fonction f est absolument continue sur un intervalle compact
I = [a, b] ⊂ R si et seulement si il existe une fonction g ∈ L1 ([a, b]) telle que
Z x
∀x ∈ [a, b], f (x) − f (a) = g(t) dt.
a
105
106 CHAPITRE 6. PROBLÈMES D’ÉVOLUTION PARABOLIQUES
pour tout t ∈ [0; T ], où ϕ et ψ sont des fonctions positives de L1 (0, T ). Alors
Rt
Z t
ϕ(s)ds
∀t ∈ [0; T ], η(t) ≤ e 0 η(0) + ψ(s)ds .
0
est continue sur D(Ω) muni de la norme H 1 . Comme D(Ω) est dense dans H01 (Ω)
pour cette norme, cette application se prolonge (de manière unique) en une appli-
cation linéaire continue sur H01 (Ω), notée
On peut donc associer à tout T ∈ H −1 (Ω) un élément du dual topologique de H01 (Ω)
(i.e. de l’espace vectoriel des formes linéaires continues sur H01 (Ω)). On définit ainsi
−1
H (Ω) −→ (H01 (Ω))0
α:
T 7→ hT, ·iH −1 ,H01 .
6.1. PRÉLIMINAIRES 107
Si on restreint L à D(Ω) ⊂ H01 (Ω), on obtient une forme linéaire sur D(Ω) qui vérifie
Il reste à vérifier que L est une distribution (c’est-à-dire qu’elle est continue sur D(Ω)
pour la topologie de D(Ω)). Soit donc K compact inclus dans Ω et ϕ ∈ DK (Ω). Il
vient
1/2
|L(ϕ)| ≤ CkϕkH 1 ≤ C kϕk2L2 + k∇ϕk2L2 .
p p
Or kϕkL2 ≤ |K| sup |ϕ| et k∇ϕkL2 ≤ |K| sup |∇ϕ|. Donc
avec gα ∈ L2 (Ω), on a
X
∀ϕ ∈ D(Ω), |hT, ϕiD0 ,D | = |h ∂ α gα , ϕiD0 ,D |
|α|≤1
X
≤| (−1)|α| hgα , ∂ α ϕiD0 ,D |
|α|≤1
X
=| (−1)|α| hgα , ∂ α ϕiL2 |
|α|≤1
X
≤ kgα kL2 k∂ α ϕkL2
|α|≤1
X
≤ kgα kL2 kϕkH 1 .
|α|≤1
On voit aisément que cette définition est une extension directe de la notion
de mesurabilité pour des fonctions à valeurs scalaires (ou à valeurs dans Rn avec
n ∈ N∗ ). Le théorème suivant est également une extension directe d’un résultat que
vous connaissez bien pour des fonctions à valeurs scalaires.
Théorème 6.8. Soit (fn )n∈N une suite de fonctions mesurables définies sur [a, b]
à valeurs dans X. Si (fn )n∈N converge simplement (dans X) vers une fonction f :
[a, b] → X, alors f est une fonction mesurable.
Exercice 6.9. Montrer que si s : [a, b] → X est une fonction étagée, alors
Z Z
s(t) dt ≤ ks(t)kX dt.
[a,b] X [a,b]
Pour définir l’intégrale de Lebesgue, nous utilisions dans le cas scalaire le résultat
crucial suivant : toute fonction mesurable (à valeurs scalaires) peut être vue comme
la limite simple d’une suite de fonctions étagées. Il se trouve que ce résultat n’est pas
toujours valide dans le cas d’espaces de Banach généraux, ce qui justifie la définition
suivante :
Exercice 6.11. Montrer que si une suite (fn )n∈N de fonctions Lebesgue-mesurables
converge simplement presque partout vers une fonction f , alors f est une fonction
Lebesgue-mesurable.
110 CHAPITRE 6. PROBLÈMES D’ÉVOLUTION PARABOLIQUES
Nous sommes armés à présent pour pouvoir définir l’intégrale de Bochner d’une
fonction intégrable.
6.2. LES ESPACES DE BOCHNER 111
Une propriété très importante de l’intégrale de Bochner est donnée dans la pro-
position suivante.
u : t 7→ {x 7→ u(t, x)}.
Tous ces espaces sont eux-mêmes des espaces de Banach lorsqu’ils sont munis des
normes associées :
k
X
||u||C k (I,X) = supt∈I u(m) (t) X ,
m=0
Z 1/p
||u||Lp (I,X) = ||u(t)||pX dt , 1 ≤ p < ∞,
I
Nous utiliserons souvent des espaces du type L2 (I, H0p (Ω)) ou L2 (I, H −r (Ω)). Ce
sont tous des espaces de Hilbert.
Si u ∈ Lp (I, H k (Ω)) pour un ouvert régulier Ω ⊂ Rd avec p ≥ 1 et k ≥ 1, alors
on peut évidemment définir ∇u par
∇u : t 7→ {x 7→ ∇x u(t, x)}.
1
ExerciceR6.27. Montrer que R si X est un espace de Hilbert et si w1 , w2 ∈∞Lloc (I, X)
vérifient I w1 (t)ϕ(t) dt = I w2 (t) ϕ(t) dt pour toute fonction ϕ ∈ Cc (I), alors
nécessairement u(t) = w(t) pour presque tout t ∈ I. En déduire que la dérivée
faible de u définie par (6.2) est définie de manière unique.
Remarque 6.28. La dérivée faible est juste la dérivée au sens des distributions,
mais pour la distribution u à valeurs vectorielles, c’est-à-dire dans l’espace X.
114 CHAPITRE 6. PROBLÈMES D’ÉVOLUTION PARABOLIQUES
Nous avons le lemme suivant, qui se montre de manière analogue que dans le cas
de fonctions à valeurs scalaires.
Lemme 6.29. Soit u ∈ L1loc (I, X) telle que u0 (t) = 0 pour tout t ∈ I. Alors, il existe
u0 ∈ X tel que u(t) = u0 pour presque tout t ∈ I.
Preuve : Soit η ∈ Cc∞ (I) telle que I η = 1 et soit a ∈ I. Pour toute fonction
R
ϕ ∈ Cc∞ (I), on a
ϕ(t) = Aη(t) + ψ 0 (t),
R Rt
où A = I ϕ(t) dt et ψ(t) = a [ϕ(s) − Aη(s)] ds. On a alors
Z Z Z
u(t)ϕ(t) dt = A u(t)η(t) dt + u(t)ψ 0 (t) dt,
I
Z I ZI Z
0
= ϕ(t) dt u0 − u (t)ψ(t) dt = u0 ϕ(t) dt ,
I I I
R
où u0 := I Aη(t)u(t) dt. En utilisant des arguments similaires à ceux de l’Exer-
cice 6.27, ceci implique bien que u(t) = u0 pour presque tout t ∈ I. ♦
La dérivée faible possède des propriétés intéressantes qui nous seront utiles par
la suite, que nous donnons dans la Proposition 6.30.
Proposition 6.30. Soit X un espace de Banach. Soit u ∈ L1loc (]a, b[, X) tel que
u0 ∈ L1loc (]a, b[, X). Alors,
Z t
u(t) − u(s) = u0 (τ ) dτ, pour presque tout t, s ∈ I. (6.3)
s
Rt
Preuve : Montrons d’abord qu’il existe u0 ∈ X tel que u(t) − s u0 (τ ) dτ = u0
Rt
pour presque tout t ∈ I. Notons v(t) := s u0 (τ ) dτ pour tout t ∈ I. Montrons tout
d’abord que
v 0 (t) = u0 (t).
Soit ϕ ∈ Cc∞ (I, R) et soit c, d ∈]a, b[ tel que [c, d] ⊂]a, b[ et {s} ∪ Suppϕ ⊂ [c, d].
Z Z Z t
0 0 0
v (t)ϕ(t) dt = − ϕ (t) u (τ ) dτ dt.
]c,d[ ]a,b[ s
La fonction (t, τ ) ∈ [c, d] × [c, d] 7→ ϕ0 (t)u0 (τ ) est une fonction intégrable sur [c, d] ×
6.2. LES ESPACES DE BOCHNER 115
[c, d]. On peut donc appliquer le théorème de Fubini (voir Exercice 6.24) pour obtenir
Z Z t Z d Z d Z s Z τ
0 0 0 0 0 0
− ϕ (t) u (τ ) dτ dt = − ϕ (t)u (τ ) dt dτ + ϕ (t)u (τ ) dt dτ
]c,d[ s s τ c c
Z d Z s
= ϕ(τ )u0 (τ ) dτ + ϕ(τ )u0 (τ ) dτ
Zs c
= ϕ0 (τ )u0 (τ ) dτ.
[c,d]
Cette dernière égalité prouve bien que u0 (t) = v 0 (t) pour tout t ∈]a, b[. Donc il existe
u0 ∈ X tel que Z t
u(t) = u0 + u0 (τ ) dτ. (6.4)
s
Il nous reste à prouver que u0 = u(s). En utilisant le théorème de convergence do-
minée, on peut montrer aisément que la fonction v est continue (voir Exercice 6.22).
Ceci implique, en utilisant la formule (6.4) que la fonction u est continue. De plus,
toujours en utilisant le théorème de convergence dominée, on montre que v(t) −→ 0,
t→s
ce qui montre que nécessairement u0 = u(s). ♦
Exercice 6.31. Soit X un espace de Banach. Soit u ∈ L1loc (]a, b[, X) tel que u0 ∈
L1loc (]a, b[, X). Montrer que
u(t + h) − u(t)
lim = u0 (t) dans X, pour presque tout t ∈ I, (6.5)
h→0 h
d 0 0
hu(t), v(t)iH = V 0 hu (t), v(t)iV + V 0 hv (t), u(t)iV .
dt
Nous donnerons la preuve uniquement dans le cas où V = H = V 0 . La preuve
dans le cas général est plus longue : nous renvoyons par exemple à [5, Chap. XVIII
§ 1] pour le cas général ou à [7] pour le cas où V = H01 (Ω) et H = L2 (Ω).
Preuve : [Théorème 6.32]
L’idée lorsque V = H est d’utiliser la formule (6.3). D’après la Proposition 6.30,
on a Z t
u(t) − u(s) = u0 (τ ) dτ,
s
donc
sup ||u(t)||H ≤ (b − a)−1/2 ||u||L2 (]a;b[,H) + (b − a)1/2 ||u0 ||L2 (]a;b[,H) .
t∈[a;b]
Alors les points 1. et 2. du Théorème 6.32 signifient que l’on a une injection continue
1d
||u(t)||2H = V 0 hu
0
(t), u(t)iV .
2 dt
De même on trouve que si v ∈ V , alors t 7→ hu(t), viV est absolument continue et
on a
0 d
V 0 hu (t), viV = hu(t), viH .
dt
Remarque 6.36. Dans la pratique, nous utiliserons souvent le théorème précédent
avec
V = H01 (Ω) ⊂ H = L2 (Ω) ⊂ V 0 = H −1 (Ω)
où Ω est un ouvert borné de Rn (ou Ω = Rn ). Le choix de V = H01 (Ω) correspond
aux conditions au bord de Dirichlet.
On obtient donc que si u ∈ L2 (]0; T [, H01 (Ω)) est tel que u0 ∈ L2 (]0; T [, H −1 (Ω)),
alors u ∈ C 0 ([0; T ], L2 (Ω)), donc u(0) et u(T ) ont un sens dans L2 (Ω).
∂ b
G(t, k) + |k|2 G(t,
b k) = 0, (6.6)
∂t
c’est-à-dire
b k) = Ce−t|k|2 .
G(t,
avec Z
∀t > 0, G(t, x)dx = 1.
∂
(
G − ∆G = 0, t > 0
∂t (6.7)
G(0) = δ.
Remarque 6.37. Une autre façon de trouver la fonction G est de remarquer que si
u(t, x) est une solution de l’équation de la chaleur, alors u(λ2 t, λx) l’est également. Il
est donc naturel de chercher une fonction solution sous la forme u(t, x) = v(|x|2 /t).
On tombe alors sur la même fonction G.
∀x ∈ Rn , lim u(t, x) = 0.
t→∞
Exercice 6.43 (Équation de la chaleur dans tout l’espace avec second membre).
Soient g ∈ L2 (Rn ) et f ∈ C 1 ([0; ∞), L2 (Rn )). Montrer que le problème
∂
(
u − ∆u = f, t > 0
∂t (6.10)
u(0) = g,
admet une solution unique u ∈ C 0 ([0; ∞), L2 (Rn )) ∩ C 1 ((0; ∞), L2 (Rn )), donnée par
la formule de Duhamel
Z t
u(t) = U (t)g + U (t − s)f (s) ds. (6.11)
0
Définition 6.44 (Solutions faibles). Soit u ∈ L2 (]0; T [, H01 (Ω)) telle que u0 ∈
L2 (]0; T [, H −1 (Ω)). On dit que u est une solution faible de (6.12) si on a
Z Z
0
(C1) H −1 (Ω) hu , viH 1 (Ω) + ∇u(t) · ∇v = f (t)v pour tout v ∈ H01 (Ω) et presque
0
Ω Ω
partout en t ∈]0; T [.
(C2) u(0) = g.
d 0
hu, viL2 (Ω) = H −1 (Ω) hu , viH 1 (Ω) .
dt 0
(6.13)
Remarque 6.46. L’estimée (6.13) montre que le problème de la chaleur est bien
posé au sens de Hadamard. En effet, soit f1 , f2 ∈ L2 (]0; T [, L2 (Ω)), g1 , g2 ∈ L2 (Ω)
et notons u1 , u2 les solutions de l’équation de la chaleur associées respectivement à
(f1 , g1 ) et (f2 , g2 ). Par linéarité de l’équation de la chaleur, la fonction u1 − u2 est
alors solution de l’équation de la chaleur associée aux données (f1 − f2 , g1 − g2 ).
L’estimée (6.13) montre alors que
max ||u1 (t) − u2 (t)||L2 (Ω) + ||u1 − u2 ||L2 (]0;T [,H 1 (Ω)) + ||u01 − u02 ||L2 (]0;T [,H −1 (Ω))
0≤t≤T 0
≤ C ||f1 − f2 ||L2 (]0;T [,L2 (Ω)) + ||g1 − g2 ||L2 (Ω) .
Il existe deux méthodes de preuve de ce théorème, que nous allons voir dans ce
cours. La première méthode présentée est appelée méthode par approximation de
Galerkin. Cette méthode est utile car elle est à l’origine de la méthode d’approxi-
mation numérique la plus couramment utilisée pour discrétiser ce type d’équations
paraboliques, à savoir la méthode des éléments finis. La deuxième méthode, dite
122 CHAPITRE 6. PROBLÈMES D’ÉVOLUTION PARABOLIQUES
max ||um (t)||L2 (Ω) + ||um ||L2 (]0;T [,H 1 (Ω)) + ||u0m ||L2 (]0;T [,H −1 (Ω))
0≤t≤T 0
≤ C ||f ||L2 (]0;T [,L2 (Ω)) + ||g||L2 (Ω) . (6.14)
On déduit alors l’estimée sur ||um ||L2 (]0;T [,H 1 (Ω)) en utilisant ce que nous avons déjà
0
démontré pour majorer le dernier terme ci-dessus.
On estime maintenant ||u0m ||L2 (]0;T [,H −1 (Ω)) par dualité. On considère une fonction
fixée v ∈ H01 (Ω), telle que ||v||H 1 (Ω) ≤ 1. On peut alors écrire v = v 1 +v 2 avec v 1 ∈ Vm
0
et v 2 ∈ Vm⊥ = Vect(wk , k ≥ m + 1). Bien sûr ||v 1 ||H 1 (Ω) ≤ 1. On a alors
0
0
H −1 (Ω) hum , viH 1 (Ω) = L2 (Ω) u0m , v 1 L2 (Ω)
0
Z
1
= f (t), v L2
− ∇um (t) · ∇v 1 .
Ω
Étape 3 : existence.
Nous pouvons maintenant démontrer l’existence d’au moins une solution en pas-
sant à la limite faible.
Comme um et u0m sont des suites bornées, respectivement dans les espaces de Hil-
bert L2 (]0; T [, H01 (Ω)) et L2 (]0; T [, H −1 (Ω)), on peut extraire des sous-suites uϕ(m) et
u0ϕ(m) telles que uϕ(m) * u dans L2 (]0; T [, H01 (Ω)) et u0ϕ(m) * v dans L2 (]0; T [, H −1 (Ω)).
Il est facile de voir que v = u0 , donc que u ∈ C 0 ([0; T ], L2 (Ω)).
Soit maintenant une fonction test de la forme
M
X
v(t) = dk (t)wk , (6.17)
k=1
avec dk (t) des fonctions régulières de t. Comme v(t) ∈ Vm pour tout m ≥ M et tout
t ∈ [0; T ], on a d’après (6.23)
Z T Z T Z Z T
hu0m (t), v(t)iL2 dt + ∇um (t) · ∇v(t)dt = hf (t), v(t)iL2 dt.
0 0 Ω 0
pour tout v(t) de la forme (6.17) ci-dessus, donc pour tout v ∈ L2 (]0; T [, H01 (Ω)) par
densité. Ainsi, u est une solution faible de l’équation.
6.4. L’ÉQUATION DE LA CHALEUR SUR UN OUVERT BORNÉ Ω 125
Il reste à vérifier que u(0) = g. Soit pour cela une fonction v de la forme (6.17)
qui est régulière et satisfait de plus v(T ) ≡ 0. En intégrant l’égalité ci-dessus par
parties, on obtient
Z T Z TZ Z T
0
− hu(t), v (t)iL2 dt + ∇u(t) · ∇v(t)dt = hf (t), v(t)iL2 dt + hu(0), v(0)i.
0 0 Ω 0
−∆wk = λk wk
où les λk sont les valeurs propres du Laplacien de Dirichlet, voir le Théorème
3.3. Rappelons que l’on a hwk , w` i = δk` et h∇wk , ∇w` i = λk δk` . Comme u ∈
C 0 ([0; T ], L2 (Ω)), on peut écrire pour tout t
X
u(t) = αk (t)wk
k≥1
où chaque αk (t) = hu(t), wk iL2 (Ω) est une fonction absolument continue sur [0; T ]
d’après le Théorème 6.32. En choisissant v = wk dans (C1), on obtient que chaque
αk est une solution du problème
0
αk (t) + λk αk (t) = βk (t) dans ]0; T [
αk (0) = αk0
où
βk (t) = hf (t), wk i, αk0 = hg, wk i.
126 CHAPITRE 6. PROBLÈMES D’ÉVOLUTION PARABOLIQUES
Il s’agit pour chaque k d’une équation différentielle ordinaire dont l’unique solution
est Z t
0 −λk t
αk (t) = αk e + βk (s)e−λk (t−s) ds, t > 0.
0
Ainsi, on trouve que u doit vérifier
X Z tX
−λk t
u(t) = e hg, wk iwk + e−λk (t−s) hf (s), wk iwk (6.18)
k≥1 0 k≥1
si cette formule a un sens. L’unicité est donc automatique si nous pouvons montrer
que cette formule a un sens dans les espaces fonctionnels adaptés. Introduisons
l’opérateur X
U (t) = e−λk t |wk ihwk | (6.19)
k≥1
où la notation |wk ihwk | désigne le projecteur orthogonal dans L2 (Ω) sur Vect(wk ).
Comme −∆ ≥ 0, on obtient que λk ≥ 0 pour tout k, donc que pour chaque t > 0
U (t) définit un opérateur auto-adjoint borné tel que
0 ≤ U (t) ≤ 1. (6.20)
La formule (6.18) s’écrit alors
Z t
u(t) = U (t)g + U (t − s)f (s) ds, (6.21)
0
expression à rapprocher de (6.11). Si nous pouvons montrer que cette formule fournit
bien une fonction u ∈ L2 (]0; T [, H01 (Ω)) telle que u0 ∈ L2 (]0; T [, H −1 (Ω)), nous
aurons démontré à la fois l’existence et l’unicité.
Remarquons que
U ∈ L∞ ([0; T ], B(L2 (Ω), L2 (Ω)))
d’après (6.20).
Prouvons maintenant le
Lemme 6.50. On a
U ∈ B(L2 (Ω), L2 ([0, T [; H01 (Ω)))
et
U 0 ∈ B(L2 (Ω), L2 (]0, T [, H −1 (Ω))).
6.4. L’ÉQUATION DE LA CHALEUR SUR UN OUVERT BORNÉ Ω 127
Preuve : Commençons par estimer ||U (t)||L2 (Ω)→H 1 (Ω) . Pour cela, nous prenons une
0
fonction ψ ∈ L2 (Ω) et calculons
||U (t)ψ||2H 1 (Ω) = ||∇U (t)ψ||2L2 (Ω)
0
X
= e−2tλk λk hwk , ψi2
k≥1
On a donc pour tout (ϕ, ψ) ∈ L2 (Ω) × H01 (Ω), et pour presque tout t ∈]0, T [,
0
H −1 (Ω) hU (t)ϕ, ψiH 1 (Ω) = H −1 (Ω) h(−∆)U (t)ϕ, ψiH 1 (Ω)
0 0
Ainsi,
||U 0 (t)ϕ||H −1 (Ω) ≤ ||U (t)ϕ||H 1 (Ω)
0
et
||U 0 (t)ϕ||L2 (]0,T [,H −1 (Ω)) ≤ ||U (t)ϕ||L2 (]0,T [,H 1 (Ω)) ||U (t)||L2 (Ω)→L2 (]0,T [,H 1 (Ω)) ||ϕ||L2 (Ω) .
0 0
♦
128 CHAPITRE 6. PROBLÈMES D’ÉVOLUTION PARABOLIQUES
Étape 3 : conclusion.
Montrons maintenant que (6.21) fournit bien une fonction de L2 (]0; T [, H01 (Ω))
telle que u0 ∈ L2 (]0; T [, H −1 (Ω)) en utilisant le Lemme 6.50. Posons
Z t
u1 (t) = U (t)g et u2 (t) = U (t − s)f (s) ds.
0
D’après le Lemme 6.50, on a d’abord que u1 (t) ∈ L2 (]0, T [, H01 (Ω)). De plus, comme
u01 (t) = U 0 (t)g, on a, toujours d’après le Lemme 6.50, que u01 ∈ L2 (]0, T [, H −1 (Ω).
On a aussi
Z
2
||u2 (t)||L2 (]0,T [,H 1 (Ω)) = ku2 (t)k2H 1 (Ω) dt,
0 0
]0,T [
Z Z t
= k U (t − s)f (s) dsk2H 1 (Ω) dt,
0
]0,T [ 0
Z Z t
≤ kU (t − s)f (s)k2H 1 (Ω) dst dt,
0
]0,T [ 0
Z Z t
≤T kU (t − s)f (s)k2H 1 (Ω) dst dt,
0
]0,T [ 0
Z Z t
=T kU (t − s)f (s)k2H 1 (Ω) dt ds,
0
]0,T [ 0
Z Z t
=T kU (t0 )f (s)k2H 1 (Ω) dt0 ds,
0
]0,T [ 0
Z Z
0 0
=T kU (t )f (s)k2H 1 (Ω) dt ds,
0
]0,T [ ]0,T [
Z
=T kU (·)f (s)k2L2 (]0,T [,H 1 (Ω)) dt0 ds,
0
]0,T [
Z
≤T kU k2L2 (Ω)→L2 (]0,T [,H 1 (Ω)) kf (s)k2L2 (Ω) ds,
0
]0,T [
où nous avons utilisé que ||U (t)||L2 (Ω)→L2 (Ω) ≤ 1 et l’inégalité de Cauchy-Schwarz.
Ceci démontre que le dernier terme de (6.21) tend vers 0 dans L2 (Ω) quand t → 0.
Ainsi, nous devons juste prouver le
Lemme 6.51. Soit g ∈ L2 (Ω). Alors on a
donc X
||U (t)g − g||2L2 (Ω) = (e−λk t − 1)2 hg, wk i2
k≥1
qui tend vers 0 par convergence dominée (ou en coupant la série en deux). ♦
Ceci termine la preuve du Théorème 6.45. ♦
Remarque 6.52. Si f ∈ L2 (]0; T [, L2 (Ω)) pour tout T > 0, alors on obtient une
unique solution définie pour tout t > 0, mais les estimées sur cette solution dépendent
du temps final considéré.
Voici maintenant un résultat fournissant la régularité par rapport aux conditions
initiales :
Théorème 6.53 (Régularité par rapport aux conditions initiales). Il existe une
constante C (dépendant de T et Ω) telle que pour tous g ∈ L2 (Ω) et f ∈ L2 (]0; T [, L2 (Ω)),
l’unique solution u de (6.12) vérifie :
max ||u(t)||L2 (Ω) + ||u||L2 (]0;T [,H 1 (Ω)) + ||u0 ||L2 (]0;T [,H −1 (Ω))
0≤t≤T 0
≤ C ||f ||L2 (]0;T [,L2 (Ω)) + ||g||L2 (Ω) . (6.22)
130 CHAPITRE 6. PROBLÈMES D’ÉVOLUTION PARABOLIQUES
On a
1 2 2
hf (t), u(t)iL2 (Ω) ≤ ||f (t)||L2 (Ω) + ||u(t)||L2 (Ω)
2
donc,
Z
1
H −1 (Ω)
0
hu , uiH 1 (Ω) + |∇u(t)|2 ≤ ||f (t)||2L2 (Ω) + ||u(t)||2L2 (Ω) . (6.24)
0
Ω 2
donc
max ||u(t)||L2 (Ω) ≤ eT ||g||2L2 (Ω) + ||f ||2L2 (]0;T [,L2 (Ω)) .
0≤t≤T
Z
0
H −1 (Ω) hu , viH 1 (Ω) = hf (t), viL2 − ∇u(t) · ∇v. (6.25)
0
Ω
Exercice 6.58. Montrer que si f ∈ L2 (Ω) ne dépend pas du temps, l’unique solution
faible obtenue par le Théorème 6.45 vérifie
−∆v = f
Théorème 6.59 (Effet régularisant avec f ≡ 0). On suppose que Ω est un ouvert
borné de Rn , de classe C ∞ . Soit g ∈ L2 (Ω) une condition initiale et u l’unique
solution faible obtenue par le Théorème 6.45. Alors pour tout 0 < < T , on a
u ∈ C ∞ ([; T ] × Ω).
Preuve : La preuve est plus difficile que dans le cas de l’espace tout entier et nous
ne donnons que les idées générales. Fixons 0 < < T . Nous voulons montrer que
(t, x) 7→ (U (t)g)(x) est une fonction régulière par rapport au couple (t, x) lorsque
g ∈ L2 (Ω). L’idée est de prouver que pour tous ` ≥ 0 et m ≥ 0, il existe une
constante C`,m telle que
g f u
2m+1 dk dk
H (Ω) dtk
f ∈ L (]0; T [, H 2m−2k (Ω))
2
dtk
u ∈ L (]0; T [, H 2m+2−2k (Ω))
2
k = 0, ..., m k = 0, ..., m + 1
mais il faut ajouter des conditions de compatibilité. Par exemple la dérivée u0 vérifie
aussi l’équation de la chaleur mais avec condition initiale u0 (0) = ∆g + f (0, ·). Pour
pouvoir utiliser les résultats précédents, il faut donc que cette fonction soit au moins
dans L2 (Ω), ce qui impose des conditions sur f et g. Voir par exemple [7] pour plus
de détails.
Nous nous contenterons du résultat partiel suivant :
u ∈ C ∞ ([0; T ] × Ω).
Ainsi Z t
m m
(−∆) u = U (t)(−∆) g + U (t − s)(−∆)m f (s)ds.
0
pour tout m ≥ 1.
Ensuite on a
∂t u(t0 , x0 ) = 0 et ∇u(t0 , x0 ) = 0.
Or d’après l’équation,
−∆u(t0 , x0 ) = f (t0 , x0 ) > 0
donc c’est absurde.
Si maintenant le minimum est atteint en (T, x0 ), on a seulement
∂
u(T, x0 ) ≤ 0
∂t
6.4. L’ÉQUATION DE LA CHALEUR SUR UN OUVERT BORNÉ Ω 135
mais on a toujours
−∆u(t0 , x0 ) = −tr (Hess(u)(t0 , x0 )) ≤ 0
car x 7→ u(T, x) admet un minimum local en x0 dans l’ouvert Ω. L’équation donne
alors
∂
0 < f (T, x0 ) = u(T, x0 ) − ∆u(T, x0 ) ≤ 0
∂t
qui est aussi absurde. Nous avons prouvé que soit t0 = 0, soit x0 ∈ ∂Ω. On a donc
bien min[0;T ]×Ω u(t, x) = 0.
Nous venons donc de démontrer que si f et g sont des fonctions régulières stricte-
ment positives sur Ω, alors u ≥ 0. Le cas général s’obtient par densité des fonctions
régulières positives dans L2 (Ω) et L2 (]0; T [, L2 (Ω)), et en utilisant la continuité de
u par rapport aux données f et g, prouvée au Théorème 6.53. ♦
Remarque 6.62. Dans le cas où g ∈ H 1/2 (Ω), il existe une autre preuve de ce
résultat qu’il est utile de connaı̂tre, et dont on donne ici les grandes idées sans
rentrer dans les détails. On prend v = u− dans la formulation variationnelle (C1)
et on obtient donc (on admet que l’on peut prendre v = u− comme fonction test,
même si u− , qui est bien une fonction de H01 (Ω) pour presque tout temps, dépend
du temps)
Z Z Z
∂u − −
u + ∇u · ∇u = f u− .
Ω ∂t Ω Ω
On en déduit :
Z Z
1d − 2
|u | + |∇u− |2 ≤ 0,
2 dt Ω Ω
|u−
R 2
et donc, comme Ω 0 | = 0, pour tout t ≥ 0,
Z Z tZ
1 − 2
|u | + |∇u− |2 ≤ 0.
2 Ω 0 Ω
u(t, x) > 0 ∀x ∈ Ω
∂
(
u(t, x) + b · ∇x u(t, x) = 0, (t, x) ∈ (0, ∞) × Rn ,
∂t (7.2)
u(0, x) = g(x), x ∈ Rn .
Les arguments précédents montrent que la fonction u définie sur [0, ∞) × Rn par
est l’unique solution de (7.2) dans C 1 ([0, ∞) × Rn ). Notons que la formule (7.3)
décrit une onde progressive avançant dans la direction b à la vitesse ||b||Rn .
137
138 CHAPITRE 7. AUTRES PROBLÈMES D’ÉVOLUTION
Maintenant si g n’est pas une fonction C 1 , on ne peut bien sûr chercher une so-
lution C 1 à (7.2). Pourtant la définition (7.3) a toujours un sens avec des hypothèses
très faibles sur g et on peut décider arbitrairement que ceci définit une solution faible
de (7.2). Par exemple si g ∈ Lp (Rn ), on aura u ∈ C 0 ([0, ∞), Lp (Rn )).
Pour tout t ≥ 0 fixé, τb (t) est un opérateur borné de W m,p (Rn ) dans lui même
pour tous m ≥ 0, p ≥ 1. Notons que la famille (τb (t))t≥0 vérifie les deux propriétés
importantes
τb (0) = Id
τb (t + s) = τb (t)τb (s).
On parle de semi-groupe. Si g ∈ H k (Rn ), la “solution faible” (7.3) s’écrit alors
u(t) = τb (t)g ∈ C 0 ([0, ∞), H k (Rn )). Toutes les équations d’évolution linéaires d’ordre
un en temps et sans second membre vont s’écrire sous cette forme pour un semi-
groupe bien choisi.
Reste à savoir en quel sens une telle solution résout (7.2). Voici un résultat
facile dont le but principal est d’habituer le lecteur à la manipulation des espaces
introduits à la section précédente.
u ∈ C 0 ([0, ∞), H 1 (Rn )) ∩ C 1 ([0, ∞), L2 (Rn )), ∇u ∈ C 0 ([0, ∞), L2 (Rn )), (7.4)
et l’égalité
u0 + b · ∇u = 0 (7.5)
a lieu dans C 0 ([0, ∞), L2 (Rn )).
D’autre part, on a
lim ||u(t, ·) − g||H 1 (Rn ) = 0 (7.6)
t→0
Preuve : Soit g ∈ H 1 (Rn ) et u = {t 7→ τb (t)g}. Il est clair que u ∈ C 0 ([0; ∞), H 1 (Rn )).
Définissons alors v := {t 7→ −b · τb (t)∇g} qui est une fonction de C 0 ([0; ∞), L2 (Rn ))
car ∇g ∈ L2 (Rn ). Notons que v = −b · ∇u. Il suffit de montrer que u0 = v. On utilise
la définition (??) : soit w ∈ Cc∞ (Rn ) et ϕ ∈ Cc∞ ([0; ∞)) deux fonctions test fixées.
On a Z ∞ Z ∞
v(t)ϕ(t)dt, w = hv(t), wiL2 ϕ(t)dt.
0 L2 0
7.1. L’ÉQUATION DE TRANSPORT 139
c’est-à-dire Z t
u(t, x) = g(x − tb) + f (s, x + (s − t)b)ds
0
résout (7.7) dans C 1 ([0, ∞) × Rn ). Nous utiliserons plus tard cette formule pour
l’étude de l’équation des ondes.
140 CHAPITRE 7. AUTRES PROBLÈMES D’ÉVOLUTION
∂t
u(0, x) = u1 (x),
Nous supposons pour commencer que u0 et u1 sont des fonctions suffisamment
régulières. On a :
∂2 2
2 ∂ ∂ ∂ ∂ ∂
−c = −c +c
∂t2 ∂x2 ∂t ∂x ∂t ∂x
donc une solution de l’équation aux dérivées partielles s’écrit (comparer avec l’équation
de transport)
u(t, x) = f (x − ct) + g(x + ct).
La fonction (t, x) 7→ f (x − ct) représente une onde progressive avançant à la vitesse
c vers la droite, alors que (t, x) 7→ g(x + ct) est une onde progressive avançant à la
vitesse c vers la gauche. On calcule
u(0, x) = u0 (x) = f (x) + g(x)
et
∂
u(0, x) = u1 (x) = −cf 0 (x) + cg 0 (x).
∂t
On trouve donc la formule de d’Alembert :
1 x+ct
Z
1
u(t, x) = (u0 (x − ct) + u0 (x + ct)) + u1 (s) ds. (7.9)
2 2c x−ct
Cette formule a un sens dès que u0 et u1 sont dans L1loc , u étant alors solution
de l’équation des ondes au sens des distributions. Pour donner un sens précis aux
conditions aux limites, on peut démontrer un équivalent de la Proposition 7.2 :
Proposition 7.3. Si u0 ∈ H 1 (R) et u1 ∈ L2 (R), alors la formule (7.9) fournit une
solution
u ∈ C 0 (R, H 1 (R)) ∩ C 1 (R, L2 (R)) ∩ C 2 (R, H −1 (R)) (7.10)
de l’équation des ondes
∂2 2 ∂
2
u−c u=0 (7.11)
∂t2 ∂x2
où cette égalité a lieu dans C 0 (R, H −1 (R)) et telle que
lim ||u(t) − u0 ||H 1 (R) = 0, lim ||u0 (t) − u0 ||L2 (R) = 0 (7.12)
t→0 t→0
1 x+ct
Z
1
u(t, x) = (u0 (x − ct) + u0 (x + ct)) + u1 (s) ds
2 2c x−ct
d 1 x+ct 1 x+ct
Z Z
= u0 (s) ds + u1 (s) ds
dt 2c x−ct 2c x−ct
Z Z
d
= G(t, x − y)u0 (y) dy + G(t, x − y)u1 (y) dy.
dt R R
La solution de l’équation des ondes dans tout Rn avec n > 1 s’écrit de façon similaire
avec une fonction G adaptée voir l’exercice 7.4.
142 CHAPITRE 7. AUTRES PROBLÈMES D’ÉVOLUTION
Exercice 7.4. (L’équation des ondes dans Rn ). On suppose que g et h sont régulières,
et que f ≡ 0. Montrer que la solution de l’équation des ondes sans second membre
sur tout Rn avec conditions initiales u(0) = u0 et u0 (0) = u1 s’écrit
d
u(t) = G(t)u0 + G(t)u1
dt
où
ψ(x − y)
Z
1
(G(t)ψ)(x) = 1B(0;t) (y) p dy si n = 2, (7.14)
2π R2 t2 − |y|2
Z
1
(G(t)ψ)(x) = ψ(x − y) dσ(y) si n = 3, (7.15)
4πt S(0;t)
où B(0; t) est la boule ouverte de centre 0 et de rayon t et S(0; t) est la sphère de
centre 0 et de rayon t, dσ(y) est la mesure surfacique de cette sphère.
Vérifier que la solution se propage à vitesse finie : si Supp(u0 ) ∪ Supp(u1 ) ⊂
B(0, r), alors
Supp(u(t, ·)) ⊂ B(0, r + t).
Si n est pair quelconque, G(t) s’obtient par une formule similaire à (7.14) tandis
que si n est impair quelconque, G(t) s’obtient par une formule similaire à (7.15),
voir [7].
(O2) u(0) = g.
(O3) u0 (0) = h.
et
sup ||u(t)||H 1 (Ω) + ||u0 (t)||L2 (Ω) + ||u00 ||L2 (]0;T [,H −1 (Ω))
0
0≤t≤T
≤ C ||f ||L2 (]0;T [,L2 (Ω)) + ||g||H 1 (Ω) + ||h||L2 (Ω) (7.17)
0
Remarque 7.7. Bien noter que nous avons pris g ∈ H01 (Ω) alors qu’ a priori on
pourrait donner un sens à une solution faible avec seulement g ∈ L2 (Ω), puisque
u ∈ C 0 ([0; T ], L2 (Ω)). Toutefois, contrairement à l’équation de la chaleur, il n’y a
pas d’effet régularisant avec l’équation des ondes. Pour avoir u ∈ L2 (]0; T [, H01 (Ω))
on est donc obligé de supposer g ∈ H01 (Ω). De même, on doit prendre h ∈ L2 (Ω).
Remarque 7.8. On peut en fait montrer que u ∈ C 0 ([0; T ], H01 (Ω)) et u0 ∈ C 0 ([0; T ], L2 (Ω)).
Nous verrons cela plus tard, au Corollaire 7.16.
Preuve : Pour l’équation de la chaleur nous avons donné la preuve par décomposition
sur les modes propres du Laplacien et proposé la méthode de Galerkin en exercice.
Nous faisons l’inverse cette fois.
d2
alors (O1)m et (O2)m équivalent à (nous utilisons que hu00m , wi = dt2
hum , wi d’après
le Théorème 6.32)
d2 m 2
(O1)0m 2
dk (t) + dm
k (t) ||∇wk ||L2 = hf (t), wk iL2 , ∀k = 1...m, p.p. t ∈ [0; T ] ;
dt
0
(O2)m dm
k (0) = hg, wk i, ∀k = 1...m.
(O3)0m d m
d (0)
dt k
= hh, wk i, ∀k = 1...m.
Il s’agit d’un système d’équations différentielles ordinaires du second ordre, qui
admet une unique solution (dm m
k (t))k=1 , définie sur tout [0; T ]. Bien noter cependant
que l’on a seulement t 7→ hf (t), wk iL2 ∈ L2 (]0; T [), donc l’unique solution dm k (t)
2 1
est en fait elle-même seulement dans H (]0; T [) ,→ C ([0; T ]). On obtient donc
que um ∈ C 1 ([0; T ], H 2 (Ω) ∩ H01 (Ω)), u0m ∈ C 0 ([0; T ], H 2 (Ω) ∩ H01 (Ω)) et u00m ∈
L2 (]0; T [, H 2 (Ω) ∩ H01 (Ω)) puisque les wk sont au moins dans H 2 (Ω) (elles sont bien
plus régulières si Ω est lui même très régulier).
Notons que comme um est une somme finie de wk ’s, on a que u00m , u0m ∈ L2 (]0; T [, H01 (Ω)).
L’équation précédente équivaut à
Z
1d 0 2 1 2
||um ||L2 (Ω) + |∇um | = hf (t), u0m iL2 (Ω) ≤
2
||f (t)||2L2 (Ω) + ||u0m ||L2 (Ω) .
2 dt Ω 2
(7.19)
où gm = m
P Pm
k=1 hwk , giwk et hm = k=1 hwk , hiwk . Ceci donne donc automatique-
ment une borne sur um dans L∞ (]0; T [, H01 (Ω)) et sur u0m dans L∞ (]0; T [, L2 (Ω)),
à condition bien sûr que les termes de droite soient eux-mêmes bornés, c’est-à-dire
que g ∈ H01 (Ω) et h ∈ L2 (Ω).
de sorte que
η 0 (t) ≤ ||f (t)||2L2 (Ω) + η(t).
D’après le Lemme de Gronwall, on obtient donc
Z
2
η(t) = ||u0m (t)||L2 (Ω) + |∇um (t)|2
Ω
Z Z t
t 0 2 2 2
≤ e ||um (0)||L2 (Ω) + |∇um (0)| + ||f (s)||L2 (Ω) . (7.20)
Ω 0
Or on a
m
X m
X
2
||u0m (0)||L2 (Ω) = (dm
k )0
(0)2
= hh, wk i2 ≤ ||h||2L2 (Ω)
k=1 k=1
où nous avons utilisé que les wk forment une base orthonormée de L2 (Ω). De même
Z m
X Z m
X Z
2 m 2 2 m 2
|∇um (0)| = (dk (0)) |∇wk | = (dk (0)) λk ≤ |∇g|2 .
Ω k=1 Ω k=1 Ω
Pour obtenir l’estimée sur u00m , nous raisonnons par dualité et considérons une
fonction fixe v ∈ H01 (Ω). Nous pouvons écrire v = v1 +v2 avec v1 ∈ Vm et v2 ∈ (Vm )⊥ .
Comme u00m (t) ∈ Vm ⊆ L2 (Ω) pour p.p. t ∈]0; T [, on a
00
H −1 (Ω) hum , viH 1 (Ω) = hu00m , viL2 (Ω) = hu00m , v1 iL2 (Ω) .
0
donc
|H −1 (Ω) hu00m , viH 1 (Ω) | ≤ C ||f (t)||L2 (Ω) + ||um (t)||H 1 (Ω) ||v1 ||H 1 (Ω) .
0 0 0
Pour en déduire l’estimée sur ||u00m ||L2 (]0;T [,H −1 (Ω)) , on utilise que f ∈ L2 (]0; T [, L2 (Ω))
et (7.21). ♦
ceci pour tout v ∈ L2 (]0; T [, Vm0 ) avec m0 quelconque. Comme ces fonctions sont
denses dans L2 (]0; T [, H01 (Ω)), on déduit bien que u vérifie (i).
Il reste à vérifier que u vérifie (O2) et (O3). Considérons une fonction régulière
quelconque v ∈ C ∞ ([0; T ], Vm0 ), telle que v(T ) = v 0 (T ) ≡ 0. En intégrant (7.22) par
parties, on obtient
Z T Z T Z Z T
00
hv (t), u(t)iL2 (Ω) dt + ∇u(t) · ∇v(t)dt = hf (t), v(t)iL2 (Ω) dt
0 0 Ω 0
− hu(0), v 0 (0)i + hu0 (0), v(0)i. (7.23)
Passant à la limite faible et utilisant que um (0) → g dans H01 (Ω) et que u0m (0) → h
dans L2 (Ω) par construction, nous trouvons finalement :
Z T Z T Z Z T
00
hv (t), u(t)iL2 (Ω) dt + ∇u(t) · ∇v(t)dt = hf (t), v(t)iL2 (Ω) dt
0 0 Ω 0
− hg, v 0 (0)i + hh, v(0)i. (7.25)
Ainsi u(0) = g et u0 (0) = h car v(0), v 0 (0) et m0 sont arbitraires. Ceci termine la
démonstration de l’existence d’une solution faible.
Notons que
v(t0 ) = 0 et ∇v(t0 ) = 0.
On applique maintenant (O1) et on intègre sur ]0; t0 [ :
Z t0 Z t0 Z
00
H −1 (Ω) hu (s), v(s)iH 1 (Ω) ds + ∇u(s) · ∇v(s) ds = 0.
0
0 0 Ω
donc puisque v 0 = −u
Z t0 Z t0
0
H −1 (Ω) hu (s), u(s)iH 1 (Ω) ds − hv 0 (s), v(s)iH 1 (Ω) ds = 0.
0 0
0 0
Or
0 1 d
H −1 (Ω) hu (s), u(s)iH 1 (Ω) = hu(s), u(s)iL2 (Ω)
0 2 ds
1 d
hv 0 (s), v(s)iH 1 (Ω) =
hv(s), v(s)iH 1 (Ω)
2 ds 0 0
u≡0
Exercice 7.11. (Formules explicites pour la décomposition sur les modes propres
du Laplacien). Considérons une solution faible u de l’équation des ondes sur Ω. On
décompose u sous la forme X
u(t) = αk (t)wk
k≥1
où √
X sin( λk t)
V (t) = √ |wk ihwk |.
k≥1
λk
3. Montrer que
00
Vérifier que V (t) = ∆V (t) = V (t)∆ et en déduire que
4. Montrer que la formule (7.26) fournit une fonction telle que u ∈ L∞ (]0; T [, H01 (Ω)),
u0 ∈ L∞ (]0; T [, L2 (Ω)) et u00 ∈ L2 (]0; T [, L2 (Ω)), qui est l’unique solution
faible de l’équation des ondes sur Ω.
||u||L∞ ([0;T ],V ) + ||u0 ||L∞ ([0;T ],H) + ||u00 ||L2 (]0;T [,V 0 ) ≤ C(||f ||L2 (]0;T [,H) + ||g||V + ||h||H ).
admet une unique solution faible ũ ∈ L∞ (]0; T [, H01 (Ω)) avec ũ0 ∈ L∞ (]0; T [, L2 (Ω)).
De plus si u est la solution de l’équation des ondes usuelle telle que u(T ) = g et
u0 (T ) = h, alors on a u = ũ.
g h f u
m+1 m dk dk ∞
H (Ω) H (Ω) dtk
f ∈ L (]0; T [, H m−k (Ω))
2
dtk
u ∈ L (]0; T [, H m+1−k (Ω))
k = 0, ..., m k = 0, ..., m + 1
mais il faut des conditions de compatibilité pour que ceci soit vrai, voir par exemple
[7]. Nous énonçons un résultat beaucoup plus simple, similaire au Théorème 6.60.
u ∈ C ∞ ([0; T ] × Ω).
7.2. L’ÉQUATION DES ONDES 151
||u0n − u0m ||L∞ (]0;T [,L2 (Ω)) + ||un − um ||L∞ (]0;T [,H 1 (Ω))
0
2 2
≤ C ||hn − hm ||L2 (Ω) + ||gn − gm ||H 1 (Ω) + + ||fn − fm ||L2 (]0;T [,L2 (Ω)) . (7.30)
0
On présente ici le principe de la méthode des éléments finis pour les équations
d’évolution. Nous nous concentrons ici sur deux types d’équations à savoir l’équation
de la chaleur et l’équation des ondes.
c’est-à-dire que chaque Ki est de volume d’ordre hn (il ne peut pas être aplati ou
s’aplatir quand h → 0). Introduisons alors l’espace d’approximation
k
:= u ∈ C 0 (Ω) | u|∂Ω = 0, u|Ki est un polynôme de degré k .
V0h
153
154CHAPITRE 8. MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS POUR LES ÉQUATIONS D’ÉVOLUTION
Pour chaque tel maillage, on peut définir une suite de points (ai )pi=1 ∈ Ω appelés
k
noeuds (p = dim Vh ) et des fonctions ϕi ∈ V0h ⊂ H01 (Ω) telles que ϕi (aj ) = δij . Pour
toute fonction régulière v on pose alors
p
X
rh v(x) = v(ai )ϕi (x).
i=1
Proposition 8.1. Soit (Th ) une suite de maillages réguliers comme ci-dessus. On
suppose que k + 1 > n/2. Alors pour tout v ∈ H k+1 (Ω), l’interpolée rh v est bien
définie et satisfait :
La propriété (8.1) est donc vraie pour une suite de maillages triangulaires réguliers,
puisque la proposition ci-dessus signifie que
où (wk ) est une base orthonormée de L2 (Ω) bien choisie (par exemple les fonctions
propres du Laplacien comme nous l’avons fait dans les preuves précédentes). On
peut alors poser simplement rh = le projecteur orthogonal sur Vh pour le produit
scalaire de H01 (Ω).
Exercice 8.2. Vérifier que la propriété (8.1) est bien vérifiée pour k assez grand,
si on prend Vh = Vect(w1 , ..., wm ), h = 1/m où les wk sont les fonctions propres du
Laplacien.
où gh ∈ Vh est telle que gh → g dans L2 (Ω). Soit (v1 , ..., vm ) une base orthonormée
de Vh . Si on écrit
Xm
uh (t) = αkh (t)vk ,
k=1
8.1. L’ÉQUATION DE LA CHALEUR 155
où Z
(Sh )k,` := hvk , v` iL2 (Ω) , (Kh )k,` := ∇vk · ∇v` .
Ω
Ce système d’équations différentielles ordinaires s’écrit sous la forme matricielle
lim ||uh − u||L2 (]0;T [,H 1 (Ω)) = lim sup ||uh (t) − u(t)||L2 (Ω) = 0.
h→0 0 h→0 t∈[0;T ]
Preuve : Soit > 0 et f˜ ∈ C0∞ (]0; T [×Ω), g̃ ∈ C0∞ (Ω) tels que
D’après la continuité par rapport aux données (cf le Théorème 6.53 pour le problème
sur tout H01 (Ω) et une généralisation évidente sur Vh ), on a
||u − ũ||L∞ (]0;T [,L2 (Ω)) + ||uh − ũh ||L∞ (]0;T [,L2 (Ω)) ≤ C
où ũ et ũh sont les solutions faibles associées à g̃ et f˜. Il suffit donc de prouver le
théorème pour ũ et ũh . Pour simplifier les notations, nous supposerons f˜ = f ∈
C0∞ (]0; T [×Ω) et g̃ = g ∈ C0∞ (Ω) de sorte que u ∈ C ∞ ([0; T ] × Ω) d’après le
Théorème 6.60.
156CHAPITRE 8. MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS POUR LES ÉQUATIONS D’ÉVOLUTION
On a pour tout vh ∈ Vh
Z
0
hu (t) − u0h (t), vh iL2 (Ω) + ∇(u(t) − uh (t)) · ∇vh = 0.
Ω
Soit maintenant πh le projecteur orthogonal sur Vh , pour le produit scalaire hv, wiH 1 (Ω) =
R 0
k 1 1
Ω
∇v · ∇w. On a donc pour tout v ∈ H (Ω) ∩ H 0 (Ω) ⊆ V ⊂ H 0 (Ω), avec k assez
grand,
d’après l’inégalité de Poincaré et l’hypothèse (8.1). Nous avons aussi utilisé que
On a pour tout vh ∈ Vh
Z
0
hπh u (t) − u0h (t), vh iL2 (Ω) + ∇(πh u(t) − uh (t)) · ∇vh = h(πh − 1)u0 (t), vh iL2 (Ω)
Ω
puisque Z
∀vh ∈ Vh , ∇(πh − 1)u(t) · ∇vh = 0
Ω
puisque
lim ||πh u(t) − u(t)||L2 (Ω) = 0
h→0
sup hSan , an i ≤ C
n
pour une constante C ne dépendant pas de ∆t (mais qui peut dépendre des données
α(0) et b(t) et de T ).
On a choisi la norme associée à la matrice de masse S (que l’on suppose inversible)
car c’est celle qui correspond à la norme de L2 (Ω). Mais bien sûr toutes les normes
sont équivalentes en dimension finie.
Lemme 8.5 (Stabilité des θ-schémas pour l’équation de la chaleur). Si 1/2 ≤ θ ≤ 1,
le θ-schéma est inconditionnellement stable. Si 0 ≤ θ < 1/2 il est stable sous la
condition
2
max λi ∆t ≤ (8.6)
1 − 2θ
où les λi sont les valeurs propres de S −1/2 KS −1/2 .
Preuve : On peut choisir de travailler une base orthonormée pour le produit
scalaire associé à S et qui est orthogonale pour celui associé à K. Dans cette base,
le θ-schéma s’écrit
où b̃n contient les coordonnées de (θb(tn+1 ) + (1 − θ)b(tn )) dans la nouvelle base et
D = diag(λi )
8.2. L’ÉQUATION DES ONDES 159
où
lim ||gh − g||H 1 (Ω) = 0, lim ||gh0 − g 0 ||L2 (Ω) = 0.
h→0 0 h→0
où Z
(Sh )k,` := hvk , v` iL2 (Ω) , (Kh )k,` := ∇vk · ∇v` .
Ω
Ce système d’équations différentielles ordinaires s’écrit sous la forme matricielle
2
Sh dtd 2 αh (t) + Kh αh (t) = bh (t)
(8.8)
α(0) = ah , α0 (0) = Ah
en posant
α1h (t) hgh , v1 iL2 (Ω)
αh = ... , ah = ..
,
.
h
αm (t) hgh , vm iL2 (Ω)
0
hgh , v1 iL2 (Ω) hf (t), v1 iL2 (Ω)
Ah = .. h ..
, b = .
. .
hgh , vm iL2 (Ω) hf (t), vm iL2 (Ω)
L’existence et l’unicité ainsi qu’une formule explicite s’obtiennent par diagonalisation
simultanée des matrices Sh et Kh . En pratique, on résout numériquement (8.8) par
une discrétisation temporelle, comme pour tout système d’équations différentielles
ordinaires.
q 0 (t) = ∂H
∂p
(q(t), p(t))
0 ∂H
p (t) = − ∂q (q(t), p(t))
avec
1 1
H(q, p) = (Sh )−1/2 Kh (Sh )−1/2 q, q Rn
+ ||p||2Rn
2 2
où q(t) = (Sh )1/2 αh (t) et p(t) = q 0 (t).
8.2. L’ÉQUATION DES ONDES 161
Alors on a
lim sup ||uh − u||H 1 (Ω) = lim sup ||u0h − u0 ||L2 (Ω) = 0.
h→0 t∈[0;T ] 0 h→0 t∈[0;T ]
c’est-à-dire
1d 2
||πh u0 (t) − u0h (t)||L2 (Ω) + ||πh u(t) − uh (t)||2H 1 (Ω)
2 dt 0
car u est très régulière donc (1 − πh )u00 (t) ∈ L2 (]0; T [, H01 (Ω)) d’après (8.1).
Le lemme de Gronwall nous donne
2
||πh u0 (t) − u0h (t)||L2 (Ω) + ||πh u(t) − uh (t)||2H 1 (Ω)
0
Z t
t 0 0 2 2 00 2
≤ e ||πh g − gh ||L2 (Ω) + ||πh g − gh ||H 1 (Ω) + ||(πh − 1)u (t)||L2 (Ω)
0
0
2
≤ C ||g 0 − gh0 ||L2 (Ω) + ||g − gh ||2H 1 (Ω)
0
2 2
+ C ||1 − πh ||2H k (Ω)→H 1 (Ω) ||g 0 ||H k (Ω) + ||g||2H k (Ω) + ||u00 ||L2 (]0;T [,H k (Ω))
0
a0 = α(0) et a1 = α0 (0).
Lemme 8.9 (Stabilité du schéma de Newmark pour l’équation des ondes). Si δ <
1/2, le schéma de Newmark est toujours instable. Si δ ≥ 1/2, le schéma est stable
si
δ ≤ 2θ ≤ 1
ou si
2
0 ≤ 2θ < δ et max λi (∆t)2 <
i δ − 2θ
où les λi sont les valeurs propres de S −1/2 KS −1/2 .
(∆t)2
n+1 n n
ãi ãi b̃i
n = Ai n−1 +
ãi ãi 1 + θλi (∆t) 2 0
8.2. L’ÉQUATION DES ONDES 163
où ãn contient les coordonnées de an dans la base considérée. Le schéma est donc
stable quand Sp(Ai ) ⊂ [−1; 1] pour tout i. Vérifier en exercice que l’on tombe bien
sur les conditions données dans l’énoncé. ♦
Comme pour l’équation de la chaleur, on peut étudier la convergence des schémas
que nous venons de présenter. Nous renvoyons à [13] pour plus de détails.
165