4.la Formation Des Mots. Le-Petit-Bon-Usage-De-La-Langue-Franaise-Grammaire (1) - 119-158

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CHAPITRE 3

La formation des mots


1. La dérivation
2. La composition
3. Autres procédés de formation

La langue française, qui vit au travers de ses usagers, est en


perpétuel devenir : des mots sortent de l’usage et disparaissent,
d’autres naissent, formés par dérivation, par composition, et, dans
une moindre mesure, par onomatopées et par abréviation.
(› Dérivation)
On distingue les mots simples qui ne peuvent être décomposés en
unités de sens plus petites (table, rue, sol, ciel) et les mots construits
qui sont formés d’au moins deux unités de sens : dans pommier, le
suffixe -ier signifie « arbre qui porte le fruit désigné par la base »
comme dans cerisier, poirier, prunier, etc. Les unités de sens du
lexique peuvent être composées de plusieurs unités lexicales,
reliées ou non par un trait d’union, on parle alors de mots
composés : avant-poste, pomme de terre, tête-à-queue, table ronde, etc.
(› Composition)
Certains mots du vocabulaire français sont des emprunts faits à
d’autres langues : redingote (de l’anglais riding-coat), kimono (du
japonais). Il y a de faux emprunts, mots artificiellement fabriqués
sur le modèle de mots étrangers : footing (= sport pédestre) forgé à
partir de l’anglais foot, « pied », sur le modèle de rowing (= sport
nautique), babyfoot (au lieu de table football en anglais), baskets (au
lieu de tennis shoes ou sneakers en anglais).
La forme de certains mots est calquée par transposition des
éléments dont ils sont composés dans la langue d’origine : gratte-ciel,
par exemple, est un calque de l’anglo-américain sky-scraper. Dans
d’autres cas, c’est le sens qui est calqué sur une autre langue, puis
associé à un mot déjà existant en français : le verbe router (dérivé de
route dans les années 80) reçoit ultérieurement un sens
supplémentaire (dans le domaine de l’informatique) calqué sur
l’anglais.
Les mots sont venus par formation populaire ou par formation
savante. Dans la formation populaire, ils proviennent de l’usage
naturel et spontané qu’en fait la masse des gens qui les emploient ;
dans la formation savante, ils résultent de l’action délibérée de
lettrés ou de commissions de terminologie. Par exemple, la
Commission d’enrichissement de la langue française (France) crée
ou promeut de nombreux termes pour désigner des réalités
nouvelles ou des inventions techniques et scientifiques : objet
connecté, mobile multifonction (pour smartphone), granulés de bois
(pour wood-pellet), végétalien (pour vegan). Ceux-ci sont ensuite
publiés au Journal officiel de la République et diffusés sur la toile
(www.culture.fr/franceterme).
Remarques
1. On appelle archaïsme un mot tombé en désuétude, un tour de phrase ou
une construction hors d’usage : occire (« tuer »), idoine (« propre à »),
moult (« beaucoup, très »). Ces archaïsmes peuvent subsister plus
longtemps en contexte littéraire ou être utilisés occasionnellement pour
créer un effet de style :
Cinq lampadaires occis par la rouille. (MARC LEVY, Un sentiment
plus fort que la peur, 2013)

EgyptAir : recherches en cours, moult hypothèses (EDOUARD


PFLIMLIN, Le Monde, 20/05/2016)
Dans certains cas, un mot archaïque peut être maintenu au sein d’une
locution ou d’une expression figée. C’est le cas de fur (qui signifie « taux,
proportion ») et de maille (qui signifie au Moyen Âge « un demi-denier »)
dans les expressions au fur et à mesure, avoir maille à partir.
2. On appelle néologisme un mot nouvellement créé ou un mot déjà en
usage, mais employé dans un sens nouveau ; il y a donc des néologismes
de forme et des néologismes de sens :
Néologisme de forme : flexitarien, dépose-minute, mère porteuse,
bébé-papiers, mariage gris.
La Chevrolet s’engagea dans la bretelle menant au parking
dépose-minute. (GUILLAUME MUSSO, Demain, 2013)
Néologisme de sens : la déferlante (des investissements japonais), une
puce ou un virus (en informatique), une souris (d’ordinateur), la jungle
(lieu de vie de fortune occupé par des réfugiés).
1. La dérivation
La dérivation crée des mots nouveaux en ajoutant à des mots
simples une particule sans existence indépendante (un affixe) que
l’on appelle :
préfixe quand elle se place au début du mot : inactif, mécontent ;
suffixe quand elle se place en fin de mot : mangeable, mangeoire,
mangeur.
Alors que l’ajout d’un préfixe produit un mot nouveau de même
catégorie que la base, les suffixes, eux, servent à dériver des noms,
des adjectifs, des verbes ou des adverbes à partir d’une base
appartenant à une autre catégorie : opportun (adjectif) a donné
opportunisme (nom).
Le radical (ou la base) est, dans un mot, l’élément essentiel, qui
exprime fondamentalement le sens de ce mot ; on peut le
reconnaitre en dégageant, dans les divers mots de la famille à
laquelle appartient le mot considéré, l’élément commun à tous ces
mots : dans détourner, le radical est tour (contour, pourtour, détour,
entourer, entourage, etc.).
Remarques
1. Strictement parlant, radical et racine ne sont pas synonymes. Tandis que
le radical est ordinairement un mot complet, la racine n’est qu’un
fragment de mot, auquel on aboutit en éliminant, dans un mot, tous les
éléments de formation secondaire : par exemple, struct dans instruction.
La notion de racine est principalement utilisée dans le domaine de
l’étymologie.
2. Certains préfixes existent cependant comme mots indépendants : entre,
sur, sous, contre, etc. (› Composition)
3. L’orthographe du préfixe peut être modifiée : ainsi in- devient il-, ir-, par
assimilation régressive, dans illettré, irréflexion ; dans impoli,
imbuvable, etc., il y a simple accommodation graphique.
4. La dérivation est dite régressive quand elle procède par suppression
d’une syllabe finale : galop est formé sur galoper ; démocrate, sur
démocratie. Seule la connaissance de l’histoire du mot permet d’identifier
les dérivations de ce type. (› Assimilation)
5. Certains mots sont venus par formation parasynthétique : à un mot
simple s’ajoutent simultanément un préfixe et un suffixe : éborgner,
encolure, atterrir.

1. Principaux préfixes
Préfixes d’origine latine

PRÉFIXE SENS EXEMPLES

a- (ad-, ac-, tendance, abattre, adapter, affamer,


af-, ag-, al-, direction annoter, apporter, assécher,
an-, ap-, attrister
ar-, as-, at-)

anté-, anti- avant antédiluvien, antidater

bien- bienfaisant

b-, bis-, bé- deux bipède, bisection, bévue

circon-, autour circonférence,


circum- circumnavigation

cis- en deçà Cisjordanie, cisalpin

con- (co-, avec concitoyen, colocataire,


col-, com-, collatéral, compatriote,
cor-) corrélation

contre- opposition, à côté contrecoup, contresigner


de

dé- (des-, séparation, décharger, dissemblable


dis-, di-) distinction

en-, em- éloignement enlever, emmener

entr(e)-, au milieu, à demi, s’entraider, entrelacer,


inter- réciproquement entrevoir, intersection

ex- (é-, ef-, hors de exproprier, écrémer, effeuiller,


es-) essouffler

extra- hors de, superlatif extravagant, extrafort

in- (il-, im-, négation inactif, illettré, imbuvable,


ir-) irresponsible

mal- (mau-, mal maladroit, maudire,


malé-) malediction

mé-, més- mal, négation médire, mésaventure

mi- moitié milieu, mi-carême

non- négation non-sens

outre-, au-delà de outrepasser, ultraviolet


ultra-

par-, per- à travers, parsemer, parachever,


complètement performer

pén(é)- presque pénombre

post- après postdater

pour-, pro- devant, à la place pourvoir, pourchasser,


de projeter

pré- devant, avant préavis, présupposer

re- (ra-, ré-, répétition, contre, revoir, rafraichir, réagir,


res-, r-) intensité ressortir, remplir

semi-, moitié semi-remorque


demi-
sou(s)-, dessous soulever, subvenir
sub-

sur-, super- au-dessus surcharge, superstar

trans- au-delà, transpercer, tressaillir,


(tres-, tré-, déplacement trépasser, traduire
tra-)

vice, vi- à la place de vice-président, vicomte


Préfixes d’origine grecque

PRÉFIXE SENS EXEMPLES

a-, an- privation amoral, anaérobie

amphi- autour, double Amphibie

ana- renversement Anagramme

anti-, anté- opposition antialcoolique, antichrist

apo- éloignement Apostasie

arch(i)- au-dessus de archiconnu

cata- changement catastrophe

di(s)- double diptère, dissyllable

dys- difficulté dysfonctionnement

épi- sur épiderme

eu- bien euphonie, euphémisme

hémi- demi hémicycle

hyper- au-dessus hypertrophie, hyperespace,


hypercritique

hypo- au-dessous hypogée

méta- changement métaphore

para- à côté paradoxe

péri- autour périphrase


syn- (sym-, avec synthèse, symbole, syllabe,
syl-, sy-) symétrie

Remarque
Il y a deux préfixes anti-. L’un vient du latin anti, variante de ante (« avant »
dans le sens temporel ou locatif) : antédiluvien, antichambre. L’autre, plus
fréquent, vient du grec et a deux acceptions principales (« contre, opposé à
qqch » et « le contraire, l’opposé de ») qui peuvent traduire différentes
nuances de sens. Associé à un nom, le préfixe peut signifier « qui permet de
lutter contre » comme dans antichar, antirides, antidouleur (devant voyelle,
le -i peut tomber antalgique) ou « qui est l’opposé de » comme antihéros.
Associé à un adjectif, il peut signifier
« qui s’oppose à un système d’idées » : antibolchévique,
antieuropéen ;
« qui combat la maladie » : antibactérien, anticancéreux ;
« qui supprime les effets ou protège de » : antiatomique, antidérapant.
Il peut aussi fonctionner de manière plus générale comme un morphème
négatif :
Il faut reconnaître que les parents sont l’instance la plus anti-
érotique du monde. (AMÉLIE NOTHOMB, Barbe bleue, 2012)
Comme les mots, les préfixes sont des unités de sens qui peuvent être
polysémiques.

2. Principaux suffixes
Comme les préfixes, beaucoup de suffixes sont également
polysémiques. Ils peuvent apporter différentes nuances de sens aux
bases auxquelles ils sont attachés. Les sens présentés dans les
deux tableaux qui suivent constituent un large éventail qui n’est
cependant pas exhaustif. Comme on le voit, certains suffixes
(comme -in) peuvent être utilisés pour former des substantifs
(tambourin) aussi bien que des adjectifs (enfantin). L’ajout d’un suffixe
peut entrainer un changement de genre : le fer, la ferraille. Certains
ajoutent une connotation péjorative (-aille, -ard, -asse) : poiscaille,
fêtard, tignasse.


J’ai grommelé à son intention une ribambelle fleurie de mots
en -asse. (VÉRONIQUE PINGAULT, Les maisons aussi ont leur
jardin secret, 2015)


Principaux suffixes formateurs de substantifs

SUFFIXE
SENS EXEMPLES
S

-ade collection, action colonnade, glissade

-age collection, action, feuillage, déminage, cirage,


produit, état servage

-aie, - plantation chênaie, hêtraie,


eraie châtaigneraie

-ail instrument épouvantail

-aille collection, action, pierraille, trouvaille, ferraille


péjoratif

-ain, -aine habitant(e) de, châtelain, trentaine,


collection, fonction, douzaine, forain, sacristain,
membre d’une écrivain, dominicain
collectivité

-aire objet se rapportant à moustiquaire, sanctuaire,


ossuaire, lampadaire

-aison action ou son crevaison, pendaison


résultat (› Variante -ison)

-an, -ane habitant(e) de Persan, Texan, Mosan

-ance, - action ou son alliance, puissance,


ence résultat présidence

-ard se rapportant à, montagnard, brassard, criard


péjoratif
-as, -asse collection, péjoratif plâtras, paperasse

-at état, institution secrétariat, pensionnat

-ateur objet, profession accumulateur, administrateur

-atoire lieu observatoire

-ature, - action ou son coupure, magistrature,


ure résultat, état, verdure, filature, chevelure
fonction, lieu,
collection

-eau, -elle diminutif drapeau, ruelle,


-ceau, - lionceau, lapereau,
ereau louveteau, arbrisseau
-eteau, -
isseau

-ée contenu, ayant cuillerée, matinée


rapport à

-(e)ment action ou son logement, recueillement,


résultat bâtiment

-er, -ier, - agent, réceptacle, écolier, herbier, archer,


ière arbre poirier, théière

-erie, -ie qualité, action, lieu fourberie, causerie, brasserie,


folie

-esse qualité finesse

-et, -ette, diminutif livret, fourchette, osselet,


-elet(te) tartelette
-eur qualité grandeur

-eur, - agent, instrument chercheur, plongeur,


euse youtubeur,
torpilleur, mitrailleuse,
bétonneuse

-ien, -éen profession, historien, lycéen, Parisien


nationalité

-il lieu chenil, courtil

-ille diminutif brindille, faucille

-in, -ine diminutif ou tambourin, tantine, gamin,


dépréciatif, carabin, diablotin, chopine,
substance caféine, grenadine,
térébenthine

-is lieu, résultat d’une logis, fouillis


action

-ise qualité sottise, débrouillardise,


maitrise

-isme disposition, chauvinisme, royalisme,


croyances, métier islamisme, journalisme

-ison action ou son guérison, trahison


résultat

-iste profession, qui archiviste, gréviste, apnéiste


s’occupe de
ou pratique le
-ite produit, maladie, anthracite, sulfite, méningite,
partisan bronchite, jésuite, sunnite

-itude qualité platitude, quiétude,


exactitude, latitude, altitude

-oir, -oire instrument, lieu arrosoir, baignoire

-on, -eron diminutif veston, aileron, caneton,


-eton, - oisillon
illon

-ose maladie, produit tuberculose, cellulose

-ot, -otte diminutif Pierrot, menotte

-oison action ou son pâmoison (› Variante -iason)


résultat

-té, -ité, - qualité fierté, authenticité,


eté citoyenneté, criminalité
Principaux suffixes formateurs d’adjectifs

SUFFIX
SENS EXEMPLES
ES

-able, - possibilité active blâmable, éligible


ible ou passive

-aire qui a rapport à, légendaire, lunaire,


qui a la forme triangulaire

-ais, -ois qui habite marseillais, namurois

-al, -el qui a le caractère royal, matinal, mortel,


de, relatif à professionnel

-an qui habite, disciple persan, catalan, mahométan,


de anglican

-ard qui habite, qui a le montagnard, savoyard,


caractère de vantard, thésard, mouchard,
(familier ou péjoratif) smicard, banlieusard, veinard

-âtre approximatif, noirâtre, rougeâtre, bellâtre,


péjoratif folâtre

-é qui a le caractère de azuré, imagé, iodé, âgé

-esque qui a rapport à livresque, romanesque,


cauchemardesque

-et, -elet diminutif propret, aigrelet

-eur, - caractère rageur, courageux, hargneux


eux
-er, -ier caractère mensonger, saisonnier

-ien qui habite, qui parisien, historien


s’occupe de

-if caractère tardif, craintif, coopératif,


subversif

-in caractère, diminutif enfantin, blondin, rouquin

-ique caractère, origine volcanique, ibérique

-issime superlatif richissime, énormissime

-iste caractère, relatif égoïste, socialiste, terroriste


à un parti

-ot diminutif pâlot, viellot, fiérot

-u qualité barbu, feuillu

-ueux qualité luxueux, majestueux

3. Suffixes formateurs de verbes


La grande majorité des nouveaux verbes est formée au moyen du
suffixe -er (liker, googler, ubériser, déradicaliser, vapoter, covoiturer,
téléverser) ; quelques-uns, beaucoup plus rares, sont en -ir : rougir,
maigrir, s’amochir, etc.
“ Tu les auras vus s’amochir à mesure qu’ils vieillissent.
(PIERRE MAGNAN, Le commissaire dans la truffière, 1978)


Certains verbes en -er sont formés au moyen d’un suffixe complexe,
qui leur fait exprimer une nuance diminutive, péjorative ou
fréquentative :

SUFF SUFF
EXEMPLE EXEMPLE
IXE IXE

-ailler trainailler -iller mordiller

-asser rêvasser -iner trottiner

-ayer bégayer -iser neutraliser

-eler bosseler -ocher effilocher

-eter voleter -onner chantonner

-eyer grasseyer -oter vivoter, neigeoter,


picoter

-(i)fier momifier -oyer foudroyer

De nombreux adverbes sont formés à l’aide du suffixe -ment. (›


Adverbes en -ment)
Remarque
La dérivation porte typiquement sur des formes simples, mais peut
également s’appliquer à l’un des éléments d’un mot composé (Sans-abri >
sans-abrisme, alors que *abrisme n’existe pas seul).
Le rapport pointe la nécessité impérieuse de prévenir les
expulsions locatives pour tarir à la source le sans-abrisme.
(TONINO SERAFINI, Libération, 6/12/2007)

4. La conversion
La conversion (aussi appelée dérivation impropre), sans changer
la forme des mots, les fait passer d’une catégorie grammaticale à
une autre.
a) Peuvent devenir noms :
1° des adjectifs : un malade, le beau, l’humanitaire ;
2° des infinitifs : le sourire, le savoir, un aller ;
3° des participes présents ou passés : un trafiquant, un raccourci,
une issue.

“ Le beau n’a qu’un type ; le laid en a mille. (V ICTOR HUGO,


Cromwell, 1827)


Remarque
En les faisant précéder de l’article, on peut donner à des pronoms, à des
impératifs, à des mots invariables, le caractère de noms : le moi, un rendez-
vous, le bien, les devants, de grands bravos.

b) Peuvent devenir adjectifs :


1° des noms : un ruban rose, un discours rasoir ;
2° des participes : un spectacle charmant, un livre illustré ;
3° des adverbes : des gens très bien.
c) Peuvent devenir adverbes des noms, des adjectifs : voir clair, voter
utile.
d) Peuvent devenir prépositions des adjectifs, des participes : plein
ses poches, durant dix ans, excepté les enfants.
e) Peuvent devenir conjonctions certains adverbes : Aussi j’y tiens.
Ainsi(= par conséquent) je conclus que…
f) Peuvent devenir interjections des noms, des adjectifs, des
formes verbales :
Attention ! Bon ! Suffit !
2. La composition
La composition est un mécanisme linguistique permettant de former
des mots nouveaux :

1. Composition avec des mots français

a) Définition
On forme des mots nouveaux en combinant entre eux deux ou
plusieurs mots français : chou-fleur, sourd-muet, portemanteau, pomme
de terre, super-héros. Cette combinaison peut résulter d’une
composition à partir de deux mots indépendants (homme-grenouille,
porte-serviette) ou du figement d’une locution : homme de paille, pain
d’épice, plante verte, etc. Quand les éléments qui entrent dans la
composition ne sont plus interprétés dans l’usage, il est fréquent
qu’ils soient agglutinés : gendarme, monsieur, passeport, vinaigre.
Si le trait d’union permet de marquer la différence entre certains
composés et un groupe syntaxique libre équivalent (il progresse sans
gêne vs un sans-gêne), il n’est pas en soi un critère suffisant de
reconnaissance des mots composés, car l’usage de celui-ci n’est
pas uniforme : on écrivait traditionnellement malappris, mais mal-
1
aimé (avec trait d’union ou soudure ) ; eau-de-vie, mais eau de rose
(avec ou sans trait d’union). Il faut donc chercher d’autres critères
pour définir les mots composés. (› Trait d’union)
Certains composés se caractérisent par des traits
morphosyntaxiques inhabituels. Par exemple, chaise longue se
caractérise par la postposition de l’adjectif qui serait devant le nom
dans un syntagme libre une longue chaise ; rouge-gorge (en plus du
trait d’union) se caractérise par l’antéposition de l’adjectif de couleur
et par le genre masculin qui renvoie à la catégorie oiseau, à laquelle
ressortit le composé, plutôt qu’au nom gorge.
La notion de figement permet de rendre compte de l’existence des
locutions dans la langue. Ces unités figées sont perçues comme un
seul mot (une unité lexicale) et mémorisées telles quelles, même si
elles se composent de plusieurs mots séparés par des blancs. Selon
la nature des mots simples avec lesquels ces unités composées
peuvent commuter, on parlera de locution nominale, locution
adjectivale, locution verbale, etc. Plusieurs critères (qui ne sont pas
toujours présents simultanément) permettent d’identifier le figement.
1° Critère référentiel : on peut identifier le référent unique qui est
globalement désigné par les locutions pomme de terre, fort en thème
ou galop d’essai et remplacer celles-ci par un mot simple
équivalent : légume, érudit, test.
2° Critère syntaxique : certaines locutions se démarquent des
règles ordinaires de la syntaxe (accord, concordance des temps,
etc.) :

“ Quelque chose est arrivé que nous ne sommes plus libres de


défaire. (JEAN-PAUL SARTRE, Les mouches, 1943)

Elle est pathétique, mais elle a l’air heureuse. (VIRGINIE


DESPENTES, Apocalypse bébé, 2010)


Elles peuvent également empêcher certaines transformations
telles que : la passivation (Max a fait fortune vs *La fortune a été faite
par Max), la nominalisation (ville haute vs *la hauteur de la ville), ou
l’adjonction d’un adverbe (boite noire vs *boite très noire).
3° Critère sémantique : le sens global de la locution n’est pas
toujours équivalent à la somme des parties dont elle se
compose : cordon-bleu (« fin cuisinier »), table ronde (« réunion où
les intervenants sont placés sur pied d’égalité »), boite noire
(« enregistreur des données de vol »). Ce critère est très
variable : par exemple, plante verte est plus facilement
compréhensible sur le plan littéral (on parle de transparence
sémantique) que boite noire dont le sens ne peut pas être
deviné.
Le phénomène du figement est dit gradable, car il y a des
séquences très figées qui refusent tout changement et d’autres qui
s’accommodent de certaines adaptations en fonction du contexte :
insertion de mots (avoir vraiment peur), accord du verbe (elle a fait
fortune), etc.

b) Noms composés de différentes


catégories
Ces procédés de création touchent toutes les catégories
grammaticales.
Noms nom + nom : homme-grenouille,
composés moissonneuse-lieuse, artiste peintre, timbre-
poste
nom + prép. + nom : homme de paille, tableau
de bord, tête à claques
nom + dét. + nom : Château-la-Pompe,
assurance tous risques
nom + adjectif : vinaigre, carte bleue, bande
dessinée, chaise longue
adjectif + nom : blanc-seing, rouge-gorge,
grand œuvre, nu-pieds, franc-maçon, vieux-
beau
prép. + nom : après-midi, à-coup, arrière-gout,
sous-verre
adverbe + nom : presqu’ile, plus-value, mal-
être, pis-aller, non-lieu
verbe + nom : cache-misère, garde-barrière,
taille-crayon
verbe + verbe : laisser-passer, savoir-faire

Locution sourd-muet, comme il faut


adjectivale

Locution faire fortune, rendre visite, savoir gré


verbale

Locution on ne peut plus, tout à fait


adverbiale

Locution en compagnie de, quant à


prépositionn
elle
Déterminant beaucoup de, une foule de
composé

Locution bien que, au cas où


conjonctive

Remarques
1. Quand l’expression verbale inclut d’autres éléments que le verbe lui-
même, on parle d’expression verbale figée (› Phrase figée) :
Il est temps d’arrêter les frais. (MARC BRESSANT, La citerne, 2009)
Les choses sont claires, il n’y a pas à chercher midi à quatorze
heures. (JEAN GIONO, Le hussard sur le toit, 1951)
Lucile aimait naviguer à contre-courant, mettre les pieds dans le
plat, se savait sous surveillance. (DELPHINE DE VIGAN, Rien ne
s’oppose à la nuit, 2011)
2. Le défigement consiste à détourner une expression figée en remplaçant
certains éléments normalement obligatoires ou en modifiant une structure
syntaxique normalement fixe :
Clara rosissante qui a mis les petits plats dans les
gigantesques. (DANIEL PENNAC, La petite marchande de prose,
1989) (Au lieu de mettre les petits plats dans les grands.)

2. Composition savante (avec


des mots grecs ou latins)

a) Définition
On forme des mots nouveaux en combinant entre eux des formants
grecs ou latins qui n’existent pas de manière autonome en français
(composition savante) ou en associant ceux-ci à un mot français
(composition hybride) :
grec + grec : phil-anthrope, baro-mètre, bio-graphie ;
grec + latin : stétho-scope, auto-mobile ;
français + grec : herbi-vore, cocaïno-mane ;
Ces compositions n’ont pas toujours eu lieu en français. La
formation peut être antérieure à un emprunt : baromètre a été formé
en anglais avant d’être emprunté en français ; philanthrope et
biographie existaient déjà en grec et sont donc des emprunts
savants. À l’inverse, herbivore (apparu en 1748) et philatélie (apparu
en 1864) sont des compositions françaises.
Comme on le voit, tantôt les éléments composants sont soudés,
tantôt ils sont reliés entre eux par le trait d’union, tantôt encore ils
restent graphiquement indépendants. Face à cette hésitation de
l’usage, on recommande la soudure dans les cas suivants
(› Recommandations pour les mots nouveaux) :
composés formés de contr(e)- et entr(e)- : entretemps,
contrexemple ;
composés formés d’extra-, infra-, ultra- : extraterritorial,
infrapaginal, ultracompliqué (la soudure est cependant évitée dans
les cas où un problème de prononciation surviendrait : intra-
utérin) ;
composés formés d’éléments savants (hydro-, baro-, socio-,
philo-) : hydrologie, bathyscaphe, barotraumatisme, sociopathe, etc.
les onomatopées et mots d’origine étrangère : froufrou, tictac,
weekend, etc.
Remarque
Dans de rares cas, l’ordre des éléments entrant dans la composition est
interchangeable et modifie le sens du mot. Ainsi, on oppose cruciverbiste
(« amateur de mots croisés ») et verbicruciste (« personne qui conçoit les
mots croisés »), mot de création plus récente.

b) Mots ou radicaux latins et grecs


Nombre de termes savants sont formés à l’aide de mots ou radicaux
(formants) latins et grecs.
Mots ou radicaux latins

FORMA
SENS EXEMPLES
NTS

agri- champ agricole

-cide qui tue parricide, suicide

-cole ayant rapport à la viticole, horticole


culture

-culture act. de cultiver apiculture, ostréiculture

-fère qui porte crucifère

-fique qui produit frigorifique

-fuge qui met en fuite, qui fébrifuge, centrifuge


fuit

-grade pas, degré plantigrade, centigrade

omni- tout omniscient, omnivore

-pare qui produit ovipare

-pède pied quadrupède

-vore qui mange granivore, carnivore


Mots ou radicaux grecs

SUFFIXE
SENS EXEMPLES
S

aéro- air aéroport, aérolite

-algie douleur névralgie

anthropo- homme anthropométrie

archéo- ancien archéologie

auto- soi-même autobiographie

bathy- profond, profondeur bathymétrie, bathyscaphe

biblio- livre bibliographie

bio- vie biographie, biodégradable

céphale tête céphalopode, microcéphale

chromo-, couleur chromosome, monochrome


-chrome

chrono-, - temps chronomètre, isochrone


chrone

cosmo-, - monde cosmographie, cosmonaute,


cosme microcosme

cratie, - pouvoir démocratie, aristocrate


crate

dactylo-, doigt dactylographie, ptérodactyle


-dactyle
dynamo- force dynamomètre

gast(é)r(o ventre gastéropode, gastroentérite


)-

-gène engendrant hydrogène, pathogène

géo- terre géologie, géographie

-gramme écrit, poids télégramme, décagramme

grapho-, - écrit, étude graphologie, biographie,


graphie, - sismographe
graphe

hydr(o)-, - eau hydrographie, anhydre


hydre

logo-, discours logopédie, biologie, dialogue


logie, -
logue

-mane, - folie cocaïnomane, mégalomanie


manie

méga(lo)- grand mégalithique

mono- seul Monothéisme

morpho-, forme morphologie,


-morphe anthropomorphe

nécro- mort nécrophage, nécrologie

neuro-, nerf neurologie, névropathe,


névr(o)- névralgie
-nome, - règle métronome, gastronomie
nomie

ortho- droit orthopédie

paléo- ancien paléographie

patho-, - maladie pathogène, psychopathe,


pathe, - télépathie
pathie

phago-, - manger phagocyte, aérophagie,


phagie, - anthropophage
phage

phil(o)-, - ami philatélie, philosophe,


phile bibliophile

-phobe, - haine anglophobe, agoraphobie


phobie

phono-, - voix, son phonétique, microphone,


phone, - téléphonie
phonie

photo- lumière photographie

ptéro-, - aile ptérodactyle, hélicoptère


ptère

-scope, - regard spectroscope, endoscopie


scopie

-technie science pyrotechnie

télé- loin téléphone, télévision


-thérapie guérison hydrothérapie

thermo-, - chaleur thermomètre, isotherme


therme

-tomie coupe laparotomie

Remarque
De manière plaisante, des dénominations de collections sont formées à partir
de formants grecs et latins : puxisardinophilie (« collection de boites de
sardines », du grec puxi « boite »), lécithiophilie (« collection de flacons de
parfum », du lat. lecythus « lécythe, fiole »), digiconsuériphilie (« collection
de dés à coudre », du lat. digitus « doigt » et consuere « coudre »).

3. Composition à partir de mots


abrégés
De nombreuses compositions sont également réalisées à partir de
mots abrégés dont la forme pourrait se confondre avec un formant
grec ou latin ou un autre affixe. On parle alors de fractomorphèmes
pour désigner ces formes. Par exemple, dans téléfilm et téléréalité,
télé- est une abréviation de télévision et non le formant grec télé-
(« loin ») que l’on retrouve dans les mots téléobjectif, télécopieur,
télévision.
De même, l’élément cyber- (tiré de cybernétique) est utilisé
dans une variété de composés évoquant les réseaux informatiques :
cyberespace, cyberattaque, cyberterroriste, etc. Dans bioingénieur ou
biodégradation on retrouve bien le sens du mot grec bios qui a servi à
construire biologie ou biologique (désignant de manière générale la
vie en tant que phénomène organique), alors que dans bioplanète
(nom de magasins spécialisés dans la vente de produits issus de
l’agriculture biologique), il s’agit d’une composition à partir du mot
autonome bio (adjectif ou substantif), abrègement de biologique
dans le sens « issu de l’agriculture biologique ».

“ Sauf qu’elle est soprano à l’Opéra de Cologne, pas


chanteuse dans des émissions de téléréalité. (MICHEL BUSSI,
Le temps est assassin, 2016)


3. Composition à partir de mots
abrégés
De nombreuses compositions sont également réalisées à partir de
mots abrégés dont la forme pourrait se confondre avec un formant
grec ou latin ou un autre affixe. On parle alors de fractomorphèmes
pour désigner ces formes. Par exemple, dans téléfilm et téléréalité,
télé- est une abréviation de télévision et non le formant grec télé-
(« loin ») que l’on retrouve dans les mots téléobjectif, télécopieur,
télévision. De même, l’élément cyber- (tiré de cybernétique) est utilisé
dans une variété de composés évoquant les réseaux informatiques :
cyberespace, cyberattaque, cyberterroriste, etc. Dans bioingénieur ou
biodégradation on retrouve bien le sens du mot grec bios qui a servi à
construire biologie ou biologique (désignant de manière générale la
vie en tant que phénomène organique), alors que dans bioplanète
(nom de magasins spécialisés dans la vente de produits issus de
l’agriculture biologique), il s’agit d’une composition à partir du mot
autonome bio (adjectif ou substantif), abrègement de biologique
dans le sens « issu de l’agriculture biologique ».
“ Sauf qu’elle est soprano à l’Opéra de Cologne, pas
chanteuse dans des émissions de téléréalité. (MICHEL BUSSI,
Le temps est assassin, 2016)


3. Autres procédés de formation

a) Onomatopées
Les onomatopées sont des mots imitatifs qui reproduisent
approximativement certains sons ou certains bruits : cocorico,
glouglou, tictac, froufrou.

Remarque
Les onomatopées sont souvent formées par réduplication d’une même
syllabe. On notera qu’elles ne reproduisent jamais exactement les bruits ou
les cris dont elles voudraient donner une représentation phonétique. Le cri du
canard, par exemple, évoqué en France par couincouin, l’est en Italie par
qua-qua, en Allemagne par gack-gack (gick-gack, pack-pack, quack-
quack), en Angleterre par quack, au Danemark par rap-rap, en Hongrie par
hap-hap.

b) Sigles et acronymes
Les locuteurs résistent naturellement aux mots trop longs, et
souvent, les abrègent. Un premier mécanisme consiste à réduire
une expression à un sigle constitué de ses seules lettres initiales :
TVA (= taxe sur la valeur ajoutée), ULM (= ultra-léger motorisé), MDR
(= mort de rire), équivalent de l’anglais LOL (= laughing out loud),
RAS (= rien à signaler). Si ce sigle constitue un mot prononçable
comme un mot simple, on le qualifie d’acronyme : sida (= syndrome
d’immunodéficience acquise), OTAN (= Organisation du traité de
l’Atlantique Nord), LIFRAS (= Ligue francophone de recherches et
d’activités subaquatiques).
c) Abrègement
Un second mécanisme repose sur la suppression d’une partie du
mot : l’abrègement du mot peut porter sur les syllabes finales ou
initiales : auto(mobile), ciné(ma)(tographe), micro(phone),
métro(politain), (auto)bus. Le succès de certaines formes abrégées
peut être tel que le mot original tombe en désuétude ou ne subsiste
que dans des contextes littéraires :

“ On y trouvait un rythme saccadé à l’image de ce


cinématographe dont les salles couvraient peu à peu les
boulevards de Paris et de la province. (NICOLAS D’ESTIENNE
D’ORVES, La gloire des maudits, 2017)


Remarques
1. À l’origine LOL et MDR étaient exclusivement utilisés à l’écrit, dans les
échanges électroniques (SMS, courrier électronique, etc.) où ils servaient
de marquage énonciatif signifiant que l’on ne doit pas prendre au sérieux
ou que l’on trouve très drôle un passage que l’on vient de lire ou d’écrire.
L’usage s’est diversifié et l’on retrouve aujourd’hui ces deux formes
utilisées comme adjectifs (= hilare) ou substantifs (= éclat de rire) et même
à l’oral dans des expressions du type J’étais trop MDR. ou Hé, LOL,
hein ! Cette seconde expression assume la fonction originale : il s’agit
d’un commentaire signifiant que ce qui précède dans la discussion ne doit
pas être pris au sérieux. On remarquera que LOL et MDR ne sont pas
interchangeables dans ces expressions qui présentent un certain degré de
figement.
Je suis écrivain, ajoutais-je (wo shi zuodjia), et LOL des trois
filles qui s’esclaffaient de plus belle. (JEAN-PHILIPPE TOUSSAINT,
Made in China, 2017)

Certaines mesures ne méritent comme commentaires qu’un


lol mêlé d’un mdr (mort de rire). (NICOLAS DE PERETTI, Le Monde,
10/04/2009)

Alors là je suis trop MDR, comment en 1 semaine un éduc


peut il arriver a changer un ado ? (CRAPAT16, Forum de
Charentelibre.fr, 25/02/2012)
2. Les sigles ou acronymes constituent de nouvelles unités qui peuvent à leur
tour faire l’objet de dérivation (RMI > rmiste, PACS > pacser).
C’est à ce moment qu’il l’a traînée au tribunal pour se pacser.
(VIRGINIE DESPENTES, Vernon Subutex 3, 2017)
3. On se gardera de confondre abrègement et abréviation. Dans le premier
cas, il s’agit d’un phénomène lexical qui produit un nouveau mot (ciné,
bus, etc.). Dans le second, il s’agit d’un phénomène purement graphique
visant à écrire le mot de manière plus courte : M. (= monsieur), Mme
(= madame), tél. (= téléphone). Le « langage SMS » est particulièrement
riche en abréviations dont beaucoup sont créées librement par les
utilisateurs sans référence à une norme : oj (« aujourd’hui »), pq
(« pourquoi » ou « parce que »), etc.

d) Analogie, contamination,
étymologie populaire, tautologie
Parmi les actions qui s’exercent dans le domaine de la formation des
mots et des expressions, il y a lieu de signaler encore : l’analogie, la
contamination, l’étymologie populaire et la tautologie.
L’analogie est une influence assimilatrice qu’un mot exerce sur un
autre au point de vue de la forme ou du sens ; ainsi bijou-t-ier a un t
d’après les dérivés comme pot-ier, cabaret-ier ; amerr-ir a deux r
devant le suffixe d’après atterr-ir (contrairement aux exemples
précédents, ici l’adaptation est purement graphique, elle ne s’entend
pas à l’oral).
La contamination est une sorte de croisement de deux mots ou
expressions d’où résulte un mot ou une expression où se retrouve
un aspect de chacun des éléments associés : ainsi le tour je me
souviens (aujourd’hui tout à fait commun) est issu de la
contamination de je me rappelle et il me souvient.

“ Faut-il qu’il m’en souvienne


La joie venait toujours après la peine.
(GUILLAUME APOLLINAIRE, Le pont Mirabeau, 1912)


La tautologie est une expression pléonastique qui revient à dire
deux fois la même chose, généralement par répétition littérale : au
jour d’aujourd’hui.
Remarques
1. Un gallicisme est une construction propre et particulière à la langue
française (impossible à traduire littéralement dans une autre langue) : il ne
voit goutte ; je me porte bien, à la bonne heure (à ne pas confondre
avec l’autre sens de gallicisme : « emprunt fait au français pas une autre
langue »).
D’ailleurs même dans le même pays, chaque fois que
quelqu’un regarde les choses d’une façon un peu nouvelle, les
quatre quarts des gens ne voient goutte à ce qu’il leur montre.
(MARCEL PROUST, Le côté de Guermantes, 1920)
Ce petit chéri se porte bien, très belle flamme. (ALBERT COHEN,
Belle du Seigneur, 1998)

C’est votre ami, à la bonne heure ! Monsieur a tout à fait l’air


d’un galant homme. (DENIS DIDEROT, Jacques le fataliste et son
maître, 1796)
2. Un barbarisme est une incorrection d’ordre lexicologique ou
morphologique ; il consiste à donner à un mot une forme ou un sens que
n’autorisent pas le dictionnaire ou la grammaire, par exemple : ils
s’asseyèrent (pour ils s’assirent), c’est l’acceptation ordinaire de ce
mot (pour c’est l’acception ordinaire de ce mot), aéropage (pour
aréopage), infractus (pour infarctus), etc.
3. Un solécisme est une incorrection d’ordre syntaxique, par exemple par
non-respect des règles de l’accord du verbe ou de l’emploi de tel ou tel
mode. Il crie trop que pour être pris au sérieux (au lieu de : Il crie trop
pour être pris au sérieux). (› Préposition sur)
4. Solécismes et barbarismes sont deux notions qui ne prennent de sens
qu’en rapport avec une norme dont ils s’éloignent. Certains usages perçus
à une époque comme déviants peuvent s’imposer avec le temps. Par
exemple, l’usage de la préposition sur semble évoluer et s’éloigner de la
norme, sous l’influence d’expressions parisiennes. D’origine populaire ou
familière, des expressions telles que travailler sur Paris ou habiter sur
Paris, s’entendent de plus en plus dans les médias au lieu de travailler à
Paris, près de Paris.

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