MOOC UVED Ocean Transcription Galletti

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Ce document est la transcription révisée, chapitrée et illustrée, d’une vidéo du MOOC UVED

« L’Océan au cœur de l’Humanité ». Ce n’est pas un cours écrit au sens propre du terme ; le choix
des mots et l'articulation des idées sont propres aux interventions orales des auteurs.

Droit des pollutions marines et


planification spatiale marine
Florence Galletti
Chargée de recherche à l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD)
Les pollutions marines sont d'abord une situation de fait. C'est tout sauf un phénomène
simple.

1. Définition et caractérisation des pollutions marines


La pollution marine est définie par la Commission océanographique intergouvernementale
de l'UNESCO. C'est l'introduction, directement ou indirectement, de substances ou d'énergie
dans l'environnement marin qui vont entraîner des effets délétères, parmi lesquels les
dommages aux ressources, ressources biologiques évidemment, les dangers pour la santé
humaine, les entraves aux activités maritimes, y compris les pêcheries, la détérioration des
qualités de l'eau de mer pour son utilisation, la nôtre, et aussi la réduction des possibilités
dans le domaine des loisirs.

Il y a trois formes de pollution : la pollution chimique, après déversement de substances


chimiques, métaux lourds, détergents, hydrocarbures, biocides, la pollution physique, ici le
milieu va être transformé dans sa structure physique après un rejet solide, liquide ou
radioactif, par exemple de l'eau trop chaude ou trop douce, enfin la pollution biologique par
des micro-organismes, des germes, des bactéries, des virus, des champignons, des
pathogènes, et en cas d'introduction d'une espèce dans une zone marine où elle n'avait pas
vocation à se trouver et à se développer. Le plus souvent, un même milieu supporte plusieurs
types de pollution.

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2. Les pollutions marines et le droit
Le phénomène des pollutions marines est assez large, mais on voit qu'il peut être analysé et
découpé par les différentes disciplines, par exemple l'écologie des milieux, mais aussi la
géographie, et même la discipline juridique. Au final, les pollutions sont fondues, elles
interagissent ensemble pour dégrader le milieu réceptacle, et en tout cas le transformer.

Est-ce que c'est un phénomène que le droit peut traiter ?

Oui, mais les deux réponses que je vais donner se neutralisent, sans être tout à fait
contradictoires. D'abord, nous avons des analystes scientifiques de la santé du milieu marin
et des juristes qui ont été soucieux d'appréhender par le droit les atteintes au milieu marin.
On a donc utilisé le droit pour prévenir l'apparition des dommages écologiques en limitant
les risques de survenance des pollutions. On l'a aussi utilisé pour apporter une sanction, pour
permettre une dissuasion des comportements qui dégradent et assurer une réparation. Mais
nous avons aussi des causes juridiques au fait que les océans du XXIe siècle soient à ce point
sous pression anthropique. C'est le droit national qui s'applique activement au territoire
terrestre, au littoral et sur la côte, qui a permis l'émission des pollutions telluriques. Et c'est
le droit international de la mer qui, en organisant méthodiquement la répartition des droits
économiques sur les espaces maritimes, a légalisé des utilisations de la mer qui sont des
utilisations impactantes.

3. Les réponses juridiques : typologie des pollutions


Au niveau des réponses juridiques, la première d'entre elles a été d'établir une typologie de
la pollution. Nous avons la pollution par les navires, ou pollution maritime, la pollution par
les opérations d'immersion volontaires, les immersions de déchets, nous avons la pollution
tellurique, celle qui vient de la terre, nous avons la pollution due à l'exploration ou à
l'exploitation, plus grave, du sol et du sous-sol marins. Nous avons aussi différentes formes
de pollution à surveiller de près du fait de la présence de zones fragiles, d'écosystèmes
singuliers ou vulnérables ou d'espèces emblématiques. Nous avons, enfin, une série de
pollutions diverses et variées dans une catégorie où on va retrouver les pollutions par érosion
côtière, les pollutions atmosphériques, par exemple.

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4. Les strates d'instruments juridiques liés aux pollutions marines
Nous bénéficions aujourd'hui de strates d'instruments de prévention et de gestion des risques
de pollution avec la méthode suivante. D'abord, nous avons des conventions universelles qui
sont ensuite déclinées dans des conventions régionales. Nous avons aussi le droit national ou
interne des États et les accords de coopération qu'ils passent. On pourrait citer ici la
Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, entrée en vigueur en 1994, et qui
comporte une partie XII sur la protection de l'environnement marin.

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Nous avons le système de la convention-cadre, qui est complétée par des protocoles
additionnels et modifiée par des amendements. Et nous avons un exemple très important, qui
a été la Convention sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de
déchets. On l'appelle aussi la Convention de Londres, ou LC72, et elle est en vigueur depuis le
30 août 1975. Elle est accompagnée d'un protocole très important aussi, entré en vigueur le
24 mars 2006. Ce protocole nous a légué d'abord le fait qu'il faut s'occuper des déchets qui
viennent également de la terre, ce que ne faisait pas la 1re Convention de Londres. Il nous a
aussi légué le principe de la liste inversée, c'est-à-dire que les parties doivent s'interdire
l'immersion de tous déchets non listés dans une annexe et ne pas faire ce qu'ils faisaient avant,
à savoir s'autoriser l'immersion de déchets dangereux listés sous forme de catégories.

Nous avons un dispositif juridique international qui admet donc aujourd'hui, bien qu'il
l'encadre, la fonction d'élimination en mer. Ça peut être regrettable et toutes sortes de déchets
peuvent y être rejetés, les matières organiques d'origine naturelle, les boues d'épuration, les
matières géologiques inertes, inorganiques, les flux de CO₂ provenant des processus de
captage de CO₂ par exemple, mais aussi des grands objets construits dans des matériaux
comme le fer, l'acier, le béton, dans les situations où des lieux d'élimination ne sont pas
présents. Le dispositif juridique définit mieux aussi certains objets sources de pollution,
comme les épaves.

5. Axes de développement de la réponse juridique aux pollutions marines


Il y a deux grands domaines dans lesquels la gestion juridique s'est développée.

Le premier, c'est celui du droit de la navigation maritime, qui vise très précisément les
pollutions maritimes. Nous avons ici trois éléments. D'abord des conventions internationales

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pour l'exercice des activités maritimes. Deuxièmement, des recommandations de
l'Organisation maritime internationale qui sont très importantes puisqu'elles rapprochent la
réglementation et les usages techniques de la navigation. Elles encouragent donc des normes
aussi élevées que possible sur la sécurité maritime. Nous avons aussi des États, comme les
USA ou des organisations comme l'Union européenne, qui disposent d'un corps de règles en
matière de sécurité maritime et portuaire qui sont plus sévères que l'OMI, ce qui est possible.

Du côté du droit de l'environnement marin, le Programme des Nations Unies pour


l'environnement et le programme d'actions pour les mers régionales sur les océans, elles sont
au nombre de 18, ont développé toute leur action avec des conventions dédiées. On doit
rajouter aussi d'autres conventions environnementales comme la Convention de Minamata
sur le mercure de 2013, en vigueur depuis le 16 août 2017. Si on se concentre sur une des
Conventions mers régionales, ce serait peut-être la Convention pour la protection du milieu
marin et du littoral de la Méditerranée. C'est la Convention de Barcelone avec 21 États
bordiers de la Méditerranée, 22 parties, dont 8 États de l'Union européenne et l'Union
européenne elle-même. Elle est accompagnée de 7 protocoles qui forment un système
complexe, le système de Barcelone. Sur ces 7 protocoles, 5 sont consacrés à la lutte contre des
pollutions marines.

6. Les planifications spatiales marines


Si on regarde maintenant les planifications, sauf comportements illégaux ou dissimulés,
l'activité polluante ne se réalise pas hors de la connaissance de l'État et hors de contrôle du
droit. L'État est informé, il a attribué ces espaces. On voit donc des emprises spatiales, fixes
ou mobiles, qui se développent du trait de côte jusqu'à l'océan. On a cru que les pollutions
diffuses ne modèleraient pas les écosystèmes marins. Des règles pour l'aménagement de ces
espaces, qui exportent des risques vers les milieux, sont aujourd'hui de plus en plus
nécessaires. Nous avons de nouveaux concepts comme la planification spatiale marine.
D'autres sont discutés actuellement dans un cadre onusien, on les appelle les instruments de
gestion par zone pour les sites de haute mer. Mais planifier en milieu liquide n'est pas une
action identique aux planifications terrestres ou littorales conçues par les gouvernants et
mises en œuvre par les administrateurs.

Conclusion
Alors, le système est-il perfectible ? Oui, bien sûr. Mais il faudra mieux évaluer les failles de la
gestion juridique des pollutions marines. Il faut regarder aussi la performance des
infrastructures portuaires et offshore censées accompagner les activités du transport
maritime. Il faut réduire cette habitude de mentionner des obligations qui composent, c'est
vrai, un droit aujourd'hui qui est parfaitement apte à réduire les risques de déversement, mais
qui reporte de date butoir en date butoir les échéances de l'action. Il faut aussi faire évaluer

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l'action par l'État de l'application du droit contre les pollutions, et assister les secrétariats des
Conventions mers régionales pour cela. Ceci présuppose de développer des systèmes
pérennes de surveillance de la qualité des eaux et des technologies de contrôle de la pollution
marine. Il faudra bien engager aussi ces planifications spatiales marines qui incluent
davantage de zonage écologique plutôt que de se concentrer sur les seules planifications ou
les programmations industrielles. En tout état de cause, il faut augmenter les sanctions
pénales nationales pour la pollution environnementale et il faut, bien sûr, compresser les
émissions à la source, les émissions anciennes, comme le problème des métaux lourds, ou les
émissions nouvelles, comme les plastiques, les flux de CO₂, etc.

Réduire ou faire disparaître les pollutions, une fois qu'elles se sont répandues dans les eaux,
dans les sous-sols marins et dans les organismes vivants serait un effort technologique,
administratif et financier que la quasi-totalité du monde n'est pas en mesure d'assurer.

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