Droit Des Affaires

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 52

Introduction au droit des affaires

INTRODUCTION AU
DROIT DES AFFAIRES
Cours 2020-2021

RICHARD ALEMDJRODO
Enseignant-chercheur
Faculté de droit
Université de Lomé

1
Introduction au droit des affaires

ÉLÉMENTS DE BIBLIOGRAPHIE

1) E. BLARY-CLEMENT et F. DEKEUWER-DEFOSSEZ, « Droit commercial », Actes de commerce,


fonds de commerce, commerçants, concurrence, Domat Droit privé, Montchrestien, 2010
2) L. VOGEL, « Traité de droit des affaires - Tome 1, Du droit commercial au droit économique »,
LGDJ, 19ème éd., 2010
3) Y. REINHARD et Sylvie THOMASSET-PIERRE, « Droit commercial », Actes de commerce,
commerçants, fonds de commerce, Litec 7ème éd. 2008
4) J. MESTRE et M.-E. PANCRAZI, « Droit commercial », 28ème éd., LGDJ, Manuels, Droit privé, 2009
5) S. PIEDELIEVRE, « Actes de commerce, commerçants, Fonds de commerce », Cours de droit
privé, Dalloz, 2009
6) G. DECOCQ, « Droit commercial », Hypercours, Dalloz, 2009
7) F.- X. LUCAS, « Le droit des affaires », Que sais-je ?, 2005
8) M. MENJUCQ, « Droit commercial et des affaires », 6ème éd. Gualino, 2009
9) J.-P. BLATTER, « Droit des baux commerciaux », éd. Moniteur, 4ème éd., 2006
10) D. GUEVEL, « Droit du commerce et des affaires », éd. LGDJ, 3ème éd. 2007
11) B. PETIT, « Droit commercial », Litec, 2007
12) J. AZEMA, « Dictionnaire de droit des affaires », éd. Ellipses, 2008
13) P. CANIN, « Droit commercial », éd. Hachette, coll. Les fondamentaux, 4ème éd., 2010
14) Y. GUYON, Droit des affaires, T.1, 13 éd., Droit commercial général et sociétés, Economica,
2003

2
Introduction au droit des affaires

INTRODUCTION

Bien que la conception subjective du droit des affaires fasse l’amalgame avec le droit
commercial, il faut préciser que ce dernier reste un sous-ensemble du droit des affaires. Et ce
sont ses règles que nous verrons en priorité. C’est la partie du droit privé qui comprend les
règles particulières établies dans l’intérêt du commerce, pour tenir compte des nécessités
propres au monde des affaires que sont, en particulier, le besoin du crédit, la rapidité des
transactions commerciales et l’importance de la publicité.

Cependant, tous ceux qui s'intéressent au monde des affaires s'accordent pour dire que la législation
applicable dans la plupart des pays qui sont aujourd'hui signataires du Traité relatif à l'Harmonisation
du Droit des Affaires était archaïque et inadaptée, car remontant le plus souvent à la période
coloniale. Par ailleurs, il y avait une diversité des législations qui était peu compatible avec la tendance
à l’intégration économique par la constitution d’ensembles régionaux et sous-régionaux.

Toutefois, l’adoption d'une nouvelle législation est toujours redoutée aussi bien par les
praticiens que par les théoriciens qui craignent un bouleversement des habitudes acquises.
L'entrée en vigueur des Actes uniformes pris en application de l'art. 10 du Traité relatif à
l'Harmonisation du droit des affaires en Afrique n'a pas échappé à la règle. C'est ce qui
explique cette interrogation angoissée : y a-t-il une rupture avec les principes traditionnels
sur lesquels repose le droit des affaires ?

La lecture de l'Acte Uniforme portant Droit Commercial Général (AUDCG) révèle un


certain nombre d'innovations.

Dans la forme d'abord ; il y a un effort de simplification, car les règles qui étaient fixées dans
des textes différents et de valeur juridique inégale se retrouvent désormais dans un
document unique.

Dans le fond ensuite ; certaines règles solidement acquises ont été modifiées, si elles n'ont
pas été purement et simplement abrogées. (Voir par exemple les règles sur le fonds de
commerce).

Ces innovations ne doivent pas surprendre dans des pays qui se sont inscrits dans la
perspective d'une modernisation de la vie des affaires.

Il fallait, au vu de ce qui précède, une législation modernisée et harmonisée. L'Acte uniforme


portant sur le Droit Commercial Général constitue la première étape dans cette œuvre. Il
existe désormais des règles communes dont l'examen révèle d'importantes innovations. Il
suffit pour s'en convaincre d'analyser les règles qui régissent les deux aspects de la vie des
affaires : l'accès à la profession commerciale et l'exercice de cette profession.

3
Introduction au droit des affaires

TITRE 1

L'ACCÈS À LA PROFESSION
COMMERCIALE

En lisant l'art. 2 de l’AUDCG aux termes duquel « est commerçant celui qui fait de
l’accomplissement d’actes de commerce par nature sa profession », on a l'impression qu'il suffit
d'accomplir des actes de commerce pour devenir commerçant et qu'aucune condition
particulière n'est exigée.

On a d'autant plus cette impression qu'il y a, dans nos pays, le principe de la liberté du
commerce et de l'industrie. Pourtant malgré cette liberté du commerce et de l'industrie,
l'accès à la profession commerciale est subordonné à un certain nombre de conditions, dont
certaines sont liées à la personne, d'autres à l'activité.

4
Introduction au droit des affaires

CHAPITRE 1

LES CONDITIONS LIÉES À LA


PERSONNE

Il y a deux conditions de cette nature qui procèdent de préoccupations différentes : d'une


part, les conditions destinées à protéger ceux qui veulent devenir commerçants ; d'autre
part, les conditions destinées à protéger l'intérêt général.

SECTION 1- LES CONDITIONS DESTINÉES À PROTÉGER CEUX


QUI VEULENT DEVENIR COMMERÇANTS

Il y a certaines personnes auxquelles la loi interdit de participer au commerce juridique


parce qu'elle veut les protéger contre leur inexpérience ou la défaillance de leur faculté
mentale ou corporelle. C'est pourquoi la capacité d'exercice est une condition d'accès à la
profession commerciale. Les incapables ne peuvent donc pas être commerçants. La femme
mariée qui a retrouvé la pleine capacité peut en ce qui la concerne devenir commerçante.

§.1- Les incapables

Il s'agit des mineurs et des majeurs incapables.

A- Les mineurs

Le mineur ne peut devenir commerçant ni même accomplir occasionnellement des actes de


commerce. Au Togo, est considéré comme mineur, « tout être humain âgé de moins de dix-
huit (18) ans », dispose l’article 2, de la loi n° 2007-017 du 16 juillet 2007, portant Code de
l’enfant.

Le mineur peut cependant être relevé de l'incapacité par l'émancipation qui découle du
mariage. Le mineur émancipé peut comme un majeur accomplir tous les actes de la vie civile
avec quelques restrictions en matière d'adoption ou de mariage. Il peut contrairement aux
mineurs ordinaires devenir commerçant. Selon l'article 7 alinéa 1er de l’AUDCG, le mineur,
sauf s'il est émancipé, ne peut devenir commerçant ; cela signifie a contrario que le mineur
émancipé peut devenir commerçant.

B- Les majeurs incapables

Alors que l'incapacité est la règle chez les mineurs, c'est la capacité qui est la règle chez les
majeurs, et l’incapacité l’exception. Il y a 2 types d'incapacité chez les majeurs : les
incapacités de défiance et les incapacités de protection.

Les incapacités de défiance ont pour but d'empêcher certains majeurs d'accomplir eux-
mêmes certains actes de la vie civile et ceci à titre de sanction. Exemple Les personnes

5
Introduction au droit des affaires

condamnées à une peine afflictive et infamante sont placées sous le régime de la tutelle.

Quant aux incapacités de protection, elles sont destinées, comme le nom l'indique à assurer
la protection des personnes qui, en raison de la défaillance de leur faculté mentale ou
corporelle, sont présumées hors d'état d'exprimer leur volonté.

Sont frappés de ce type d'incapacité les majeurs chez lesquels, il y a une perturbation des
facultés mentales et les majeurs chez lesquels l'altération des facultés corporelles est telle
qu'elle empêche l'expression de la volonté. Quelle que soit sa nature, l'altération doit être
constatée par un médecin mais c'est le juge qui choisit le régime de sauvegarde le plus
approprié.

Ces régimes sont au nombre de trois :

Le placement sous protection de la justice : C'est un régime temporaire appliqué aux


malades internés ou soignés à domicile. Le seul effet de ce régime c'est de faire présumer
l'absence du consentement.

La Curatelle : Ce régime s'applique aux individus qui, sans être hors d'état d'agir eux-mêmes,
ont besoin d'être conseillés ou contrôlés dans les actes de la vie civile. Il s'applique
également aux individus qui, en raison de leur prodigalité, de leur intempérance ou de leur
oisiveté s'exposent au risque de tomber dans le besoin ou de compromettre gravement
l'exécution de leurs obligations familiales. Ce régime a pour effet d'empêcher le majeur
d'agir seul. En quelque sorte le majeur qui est placé sous ce régime doit nécessairement être
assisté de son curateur pour l'accomplissement des actes les plus importants.

La Tutelle : Ce régime s'applique aux majeurs dont les facultés mentales sont durablement
altérées par une maladie, une infirmité ou un affaiblissement lié à l'âge. Cette altération doit
être telle que la personne a besoin d'être représentée de manière continue dans les actes de
la vie civile. Lorsque le placement sous le régime de la tutelle est décidé, le majeur ne
pourra pas agir lui-même ; il devra être représenté par son tuteur.

L'AU ne dit pas expressément que les majeurs incapables ne peuvent pas devenir
commerçants. En effet après avoir indiqué que nul ne peut accomplir des actes de
commerce à titre de profession habituelle s'il n'est juridiquement capable d'exercer le
commerce (art. 6), le législateur se borne à préciser dans l'art. 7 que le mineur non
émancipé ne peut devenir commerçant.

Mais il ne faut pas oublier que les majeurs incapables sont presque dans la même situation
que les mineurs. On doit considérer qu'en dehors des majeurs placés sous le régime de la
protection de justice, aucun majeur incapable ne peut devenir commerçant.

§.2 - La situation de la femme mariée

Pendant longtemps la femme mariée était considérée comme incapable. À l'origine c'est à
dire au moment de l'adoption du code civil la femme mariée était frappée d'une incapacité
générale. C'est la loi du 18 février 1938 qui l'a relevée de cette incapacité. Mais elle ne
pouvait exercer le commerce qu'avec l'autorisation de son mari. Celle-ci fut supprimée par
la loi du 22 septembre 1942 : la femme n'avait plus besoin de l'autorisation du mari, mais
celui-ci pouvait s'opposer à l'exercice du commerce par sa femme si l'intérêt de la famille le

6
Introduction au droit des affaires

justifiait. Mais aujourd’hui rien ne s'oppose à l'exercice par la femme mariée de la profession
commerciale.

Il convient toutefois de souligner que la femme mariée qui ne fait que détailler le commerce
de son mari, n'a pas la qualité de commerçant. Cette règle qui résulte de l'article 7 alinéa 2
de l'AU vise d'ailleurs aussi bien la femme que le mari. Selon ce texte, le conjoint d'un
commerçant n'aura la qualité de commerçant que s'il accomplit lui-même des actes de
commerce à titre de profession habituelle.

SECTION 2- LES CONDITIONS LIÉES À LA NÉCESSITÉ DE


PROTÉGER L'INTÉRÊT GÉNÉRAL

Il faut assainir les professions commerciales pour assurer la protection de l'intérêt général.
Certaines personnes doivent donc être écartées de la vie des affaires. Deux procédés sont
utilisés pour y parvenir : les interdictions et les incompatibilités.

§.1- Les interdictions

Le législateur a jugé que dans l'intérêt de la clientèle et de manière générale dans l'intérêt
public, il faut empêcher certaines personnes d'exercer le commerce. C'est ce qui explique
l'adoption de la règle contenue dans l'article 10 de l'Acte Uniforme.

Il résulte de ce texte que l'activité commerciale ne peut être exercée par des personnes qui
ont fait l'objet d'une interdiction générale définitive ou temporaire prononcée par une
juridiction de l'un des Etats parties ou d'une interdiction professionnelle.

Il s'agit également des personnes à l'égard desquelles, a été prononcée une peine privative
de liberté pour un crime de droit commun ou une peine d'emprisonnement d'au moins 3
mois, non assortie d'un sursis pour un délit contre les biens ou une infraction en matière
économique ou financière.

Cette dernière interdiction est discutable. Certes, on peut comprendre qu'une personne
ayant fait l'objet d'une condamnation pour une infraction en relation avec les affaires, soit
exclue de la profession commerciale, mais on peut difficilement comprendre qu'une
personne condamnée pour une infraction d'une autre nature fasse l'objet d'une interdiction
d'exercer une profession commerciale.

À notre avis, l'auteur d'un meurtre, d'un homicide ou d'un incendie peut parfaitement être
un excellent commerçant. Lui interdire l'accès à la profession commerciale après l'exécution
de sa peine c'est empêcher sa réhabilitation, sa réinsertion sociale.

§. 2- Les incompatibilités

Après avoir posé comme principe qu'il n'y a pas d'incompatibilité sans texte, l'AUDCG
prévoit que l'exercice d'une profession commerciale est incompatible avec l'exercice des
professions énumérées à l'article 9.

Les professions visées sont les suivantes :

7
Introduction au droit des affaires

• Fonctionnaires et Personnels des collectivités publiques et des entreprises à


participation publique.

• Officiers Ministériels et Auxiliaires de justice (Avocats, Huissiers, Commissaires-


Priseurs, agents de change, notaires, greffiers, administrateurs et liquidateurs
judiciaires).

• Experts Comptables Agrées et Comptables Agrées, Commissaires aux comptes et


aux apports, conseillers juridiques, courtiers maritimes.

Les effets de l'incompatibilité sont prévus par l'article 8 de l'AU

Selon l'alinéa 4 de cet article, les actes accomplis par une personne en situation
d'incompatibilité sont valables à l'égard des tiers de bonne foi.

Quant à l'alinéa 5, il prévoit que les tiers peuvent, s'ils le souhaitent, se prévaloir des actes
accomplis par une personne en situation d'incompatibilité, mais celle-ci ne peut s'en
prévaloir.

8
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

CHAPI TRE 2

LES CONDI TI ONS LI ÉES À


L' ACTI VI TÉ

À l a l ect ure de l' arti cl e 2 de l' AUDCG, on se rend compt e que pour deveni r commerçant, il
faut accompli r des act es de commerce, mai s si cette condi ti on est nécessai re, ell e n' est pas
suffi sante.

Il f aut aussi accompli r l es act es de commerce d' une certai ne mani ère. C' est pourquoi on doi t
égal e ment se réf érer aux modes d' accompli sse ment des actes.

SECTI ON 1- LA NÉCESSI TÉ D' ACCOMPLI R DES ACTES DE


COMMERCE
L' accès à l a pr of essi on c ommerci al e est subordonné à l' accompli sse ment d' actes de
commerce. Le l égi sl ateur n' a cependant pas donné une défi niti on de l' acte de commerce ; il
s' est borné à donner une liste des actes consi dérés comme tel s.

§. 1- La dét er mi nati on des actes de co mmer ce

À l' ori gi ne, c' est l' arti cle 632 du Code de commerce qui donnai t l a li ste des act es de
commerce. Cet arti cl e est abr ogé avec l' entrée en vi gueur de l' AUDCG. Dés or mai s, il f aut
se réf érer aux di sposi ti ons des arti cl es 3 et 4 de l’ Acte unif or me.

A- Les actes énu mér és par l' Act e unif or me sur l e droi t co mmerci al

Il y a ceux qui s ont vi sés à l' arti cl e 3, ce s ont l es actes de commerce par nat ure. Il y a aussi
ceux qui sont vi sés par l'arti cl e 4, ce sont l es actes de commerce par l a f or me.

1. Les actes de co mmer ce par nat ure

Ils sont très di vers ; cependant mal gré cette di versité, on peut t ent er de l es regr ouper en
troi s catégori es : l' achat pour revendre, l es servi ces et l es acti vités i ndustriell es.

a) L' achat pour revendre

C' est l e pre mi er act e de commerce vi sé par l' articl e 3. L' AU c onsi dère l' achat pour revendre
comme un act e de commerce, quel que s oi t l' obj et. Ai nsi, l' achat de t ous bi ens, meubl es ou
i mmeubl es, en vue de l eur revent e, est consi déré comme un acte de commerce.

9
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

Mai s, l' achat pour revendre i mpli que l a réuni on de troi s él é ments : D' abord, un achat : ce
ter me dési gne t out e acqui siti on à ti tre onéreux, cel a peut être une acqui siti on moyennant
un pri x fi xé en argent ; cel a peut être aussi un échange.

Ensui te, une revent e : l es achats qui ne s ont pas sui vi s de revent e ne s ont pas des act es de
commerce. Exe mpl e l' achat en vue de l a cons ommati on.

Enfi n, l'i ntenti on de réaliser des bénéfi ces : Même si l e t ext e ne l e di t pas expressé ment,
cel ui qui achèt e pour revendre sans voul oi r réaliser de bénéfi ces, n' accompl i t pas d' act es de
commerce. Ex : l a coopérati ve qui achèt e des pr odui ts pour l es revendre au mê me pri x ou à
un moi ndre coût à ses adhérents.

b) Les servi ces

On peut, en essayant de f ai re un regroupe ment, dégager deux t ypes de servi ces ayant l e
caractère d' acte de commerce :
Il y a, d' une part, l es actes ayant pour obj et d' off ri r à l a cli entèl e l' usage t e mporai re d' un
bi en : rentre dans cette catégori e l a l ocati on de biens meubl es.
Il y a, d' autre part, l es actes ayant pour obj et l' exécuti on de certai nes prestati ons au pr ofi t
d' une cli entèl e. Rentrent dans cette catégori e :

• Les opérati ons fi nanci ères, t ell es que l es opérati ons de bourse, de banque, de change
et d' assurance ;

• Les opérati ons des i nter médi ai res de comme rce ( opérati ons de courtage, de
commi ssi ons, d' agent commerci al) et l es opérations d' i nter médi ai res pour l' achat, l a
souscri pti on, l a vent e ou l a l ocati on d' i mmeubl es, de f onds de commerce, d' acti ons
ou de parts de soci étés co mmerci al es ou i mmobilières ;

• Les prestati ons de servi ces de caractère pure ment mat éri el t ell es que l es opérati ons
de transport et de tél écommuni cati on.

c) Les acti vi tés i ndustri ell es

Le l égi sl ateur vi se égal ement à l' arti cl e 3 l es opérati ons de manuf act ure. Il f aut ent endre par-
l à l es acti vi tés i ndustri ell es. Ces acti vités ont l e caractère d' actes de commerce, mê me si
ell es ont pour obj et l' expl oi tati on des mi nes, des carri ères et des gi se ments de ress ources
nat urell es.

2. Les actes de co mmer ce par l a f or me

Il exi ste deux cat égori es d' actes consi dérées comme act es de commerce par l eur f or me. Il y
a, d' une part, l es eff ets de commerce et l e warrant.

Il y a, d' autre part, l es soci étés commerci al es par l a f or me.

a) La l ettre de change, le bill et à ordre et l e warrant

La règl e sel on l aquell e l a l ettre de change est un acte de commerce par l a f or me s' expli que
par des consi dérati ons hi st ori ques. Cet eff et de commerce étai t l e titre per mettant de

10
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

constater un contrat de change qui n' était si gné que par des commerçants.

Auj ourd' hui, avec l' AUDCG, l a li ste des act es de c ommerce par l a f or me s' est all ongée. En
eff et, sel on l' arti cl e 4 de l ' AUDCG, « ont égal e ment l e car act ère d' act es de commer ce, et ce, par
l eur for me l a l ettre de change, l e bill et à ordre, et l e warr ant ».

La l ettre de change est l e ti tre par l equel une personne appel ée ti reur donne l' ordre, à une
autre personne appel ée ti ré, de payer, à une troisi ème pers onne appel ée bénéfi ci ai re ou à
son ordre, une somme d' argent dét er mi née, à une échéance dét er mi née.

Le bill et à ordre est l e ti tre par l equel une personne appel ée s ouscri pteur s' engage à payer, à
une échéance dét er mi née, une s omme d' argent dét er mi née, à une autre personne appel ée
bénéfi ci ai re ou à son ordre.

Le warrant est un déri vé du bill et à ordre qui per met de constituer et de trans mettre un
gage garanti ssant l' engagement du souscri pteur.

L' arti cl e 4 ne vi se pas l e chèque ; cet i nstrument de pai e ment ne constitue donc pas un act e
de commerce par l a f orme. Le caractère ci vil ou c ommerci al du chèque dépend al ors de l a
qualité de cel ui qui l' a émis et de l a nat ure de l' opérati on.

b) Les soci étés co mmer ci al es par l a f or me

Certai nes s oci étés s ont consi dérées comme des s oci étés commerci al es en rai son de l eur
f or me i ndépenda mment de l a nat ure de l eur acti vité. C' est ce qui résul te de l' arti cl e 6, ali néa
2 de l' AUS CGI E. Sel on ce t ext e « Sont commerci al es à rai son de l eur f orme et quel que s oi t
l eur obj et, l es s oci étés en nom c oll ectif (S NC), l es s oci étés en comma ndi te si mpl e ( S CS), l es
soci étés à responsabilité li mitée (SARL) et l es soci ét és anony mes (SA) ».

Il suffit donc qu' une s oci ét é s oi t constituée s ous l' une de ces f or mes pour être consi dérée
comme une soci été commerci al e, mê me si l' acti vité est essenti ell ement ci vil e.

B- Le caractère de l' énumér ati on

On s' est t ouj ours de ma ndé, s ous l' empi re de l a l égi sl ati on ant éri eure, si l' énu mérati on des
actes de commerce était li mitati ve ou i ndi cati ve.

Pour ce qui est de l' AUDCG, l e dout e n' est pl us per mi s. En eff et l' utilisati on de l' adverbe
« nota mment » dans l' arti cl e 3 montre cl ai re ment que l e l égi sl ateur n' a pas ent endu dresser
une li ste li mitati ve. C' est pourquoi l e débat sur l es cri tères de l' acte de commerce est
t ouj ours d' actualité. Troi s critères ont été successi ve ment proposés :

Le pre mi er cri tère est ti ré de l'i dée de ci rcul ati on. L' acte de commerce serai t, sel on l es
aut eurs qui ont mi s en avant ce cri tère, l' acte qui s'i ntercal e dans l a ci rcul ati on des ri chesses.
Ce cri tère présent e un avantage, c' est l a si mpl i cité. Chez l e pr oduct eur, l' acte n' est pas
encore dans l e commerce, c' est un act e ci vil. Chez l e cons ommat eur l' acte n' est pl us dans l e
commerce, c' est un acte ci vil.

Il présent e cependant des i nconvéni ents, car il ri sque de condui re à reconnaî tre l e caract ère
commerci al à des act es qui s ont ci vils. Ex : l' acte accompli par l es coopérati ves qui achèt ent

11
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

des produi ts pour l es revendre à l eurs adhérents sans rechercher de bénéf i ces.

Il abouti t égal e ment à écarter du domai ne du dr oit commerci al, des act es de commerce. Ex :
l' acte accompli par l'i ndustri el.

Le deuxi è me cri tère est ti ré de l'i dée de spécul ati on. L' acte de commerce serai t, pour l es
parti sans de ce cri tère, l'acte f ait dans l'i ntenti on de réali ser des bénéfi ces en spécul ant sur l a
transf or mati on ou l' échange des pr odui ts. Le t er me s pécul ati on doi t s' ent endre de t out e
recherche de bénéfi ce. Peu i mport e donc que l' acti vité s oi t défi citai re. Un commerçant peut,
en eff et, vendre à pert e auj ourd' hui, mai s l e sacrifi ce de bénéfi ce i mmédi at peut avoi r pour
résul tat, l a réali sati on d' un pl us grand profit dans l'aveni r.

Ce cri tère présent e l ui aussi des i nconvéni ents, mê me s'il tradui t s ouvent l a réalité. En
pre mi er li eu, on peut diffi cil ement l e mettre en œuvre, car il suppose que l' on scrut e
l'i ntenti on de l a personne ; ce qui n' est pas du t out ai sé.

Par aill eurs, il se révèl e s ouvent i nexact. En effet, certai ns actes de commerce s ont de
si mpl es pr océdés de pai ement et n'i mpli quent nulle ment l'i dée de réali ser des bénéfi ces. Ex :
Si gnat ure d' une l ettre de change.

I nverse ment certai ns actes accompli s par une personne, qui recherche des bénéfi ces, ne
sont pas nécessai re ment consi dérés comme des actes de commerce. Ex : l es act es accompl i s
par l' arti san.

Le troi si è me cri tère est tiré de l'i dée d' entrepri se. En appli cati on de ce cri tère, est consi déré
comme act e de commerce l' acte accompli dans l e cadre d' une entrepri se. Ce cri tère comme
l es précédents présent e des f ai bl esses. Certai ns actes s ont consi dérés comme des act es de
commerce mê me s'ils s ont accompli s en dehors du cadre de l' entrepri se. Ex: Si gnat ure d' une
l ettre de change, l es actes de spécul ateurs en bourse. Dans l e mê me t emps, certai ns act es
sont consi dérés comme des actes ci vils, mê me s'ils ont ét é accompli s dans l e cadre d' une
entrepri se. Exe mpl e : l es actes accompli s par l es arti sans.

En concl usi on, on doi t reconnaî tre que, pri s i sol é ment, aucun de ces cri tères n' est
sati sf ai sant ; il f aut donc l es combi ner pour avoi r une i dée de ce qu' est l' acte de commerce,
car t ous contri buent à expli quer cette noti on.

La dét er mi nati on de l'acte de commerce est de l a pl us grande i mportance, car seul


l' accompli sse ment d' actes de commerce répété per met de di sti nguer l es pr of essi ons
commerci al es et l es prof essi ons non commerci al es.

§. 2- L' utilisati on de l a noti on d' acte de co mmerce dans l a di sti ncti on des
pr of essi ons co mmerci al es et des prof essi ons non co mmerci al es

Pour être commerçant, i l f aut accompli r des act es de commerce. C' est ce qui expli que que
l es pr of essi ons, dont l' exerci ce n'i mpli que pas l' accompli sse ment d' actes de commerce, s ont
consi dérées comme des pr of essi ons non commerci al es.

En eff et, l e régi me des co mmerçants se di sti nguait nette ment de cel ui des autres act eurs de
l a vi e économi que, t el s que l es arti sans, l es agri cul teurs ou l es pr of essi ons li béral es. Les
cli vages t endent auj ourd’ hui à s’ est omper entre l es commerçants et ces derni ers act eurs. A

12
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

ai nsi é mergé l e concept des pr of essi onnel s que l’on oppose à cel ui des cons ommat eurs, et
qui regroupe en s on sei n t ous l es act eurs de l a vi e économi que, i ndépenda mment de l eur
spécifi cité.

C’ est dans cette opti que que l’ AUDCG a créé l e statut de l’ entreprenant qui, aux t er mes de
l’ arti cl e 30, est un entrepreneur i ndi vi duel, personne physi que qui, sur si mpl e décl arati on,
exerce une acti vité prof essi onnell e ci vil e, commerci al e, arti sanal e ou agri col e.

A- Les agri cul teurs

Tradi ti onnell ement, l es agri cul teurs s ont consi dérés comme des ci vil s, car ils n' accompli ssent
pas d' actes de commerce. En eff et, il s n' achèt ent pas pour revendre ; ils pr odui sent pour
vendre. Cette anal yse était conf ortée par l' arti cl e 638 anci en du Code de commerce qui
étai t ai nsi conçu : « Ne s ont poi nt de l a co mpétence des tri bunaux de commer ce, l es acti ons
i ntent ées contre un pr opri étai re cul ti vat eur ou vi gneron pour vent e de denr ées provenant de s on cr u
». On a d' aill eurs t ouj ours consi déré que l a terre rel ève du domai ne du droi t ci vil.

Il exi ste cependant des cas où l' agri cul teur est consi déré comme c ommerçant. Il en est ai nsi
l orsque l' acti vité de transf or mati on des pr odui ts à l aquell e se li vre parf ois l' agri cul teur, est
supéri eure à l' acti vité de pr oducti on.

De l a mê me ma ni ère l'él eveur, qui achèt e des ani maux et l es nourri t avec des pr odui ts
pr ovenant de l' extéri eur, est consi déré comme c ommerçant, dès l ors qu'il n' y a pas de
séj our prol ongé des ani ma ux dans sa f er me.

B- Les me mbr es des prof essi ons li béral es

Ils se di sti nguent des commerçants à troi s poi nts de vue.

D' abord, il s ne recherchent pas des bénéfi ces ; il s recueill ent des honorai res. Ensui te, il s
exercent une acti vité essenti ell ement i ntell ectuelle et j oui ssent d' une certai ne i ndépendance.
Enfi n, il s j oui ssent de l a confi ance personnell e de l eurs cli ents. C' est d' aill eurs ce qui expli que
l'i ncessi bilité de l eur cli ent èl e.

Pourtant on not e un gli sse ment de ces pr of essi ons vers l a commerci alité. La cli entèl e est de
pl us en pl us ret enue par l'i nstall ati on mat éri ell e et l es me mbres de ces pr of essi ons t ournent
l a règl e de l'i nterdi cti on de l a cessi on de l a cli entèl e en s' engageant à présent er l es cli ents au
successeur contre ré munérati on.

Par aill eurs, l a confi ance personnell e t end à disparaî tre en rai son de l' exerci ce de ces
pr of essi ons sous f or me de soci été.

Enfi n, l es me mbres des pr of essi ons li béral es f ont de pl us en pl us appel aux t echni ques du
commerce, l orsque l es règl es prof essi onnell es ne s' y opposent pas ; par exe mpl e l a publi cité.

C- Les arti sans

Le Code de commerce i gnore l es arti sans ; il en est de mê me du Code ci vil. C' est pourquoi
en France, c' est l a j uri sprudence qui a préci sé l e stat ut de l' arti san au regard du dr oi t
commerci al.

13
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

Ell e l' a f ait à parti r de trois él éments :

D' abord, l' aut onomi e : l'arti san est un travaill eur aut onome, ce qui per met de l e di sti nguer
du sal ari é (cel ui qui est dans un li en de subordi nati on et perçoi t une ré munérati on n' est pas
arti san).

Ensui te, l' absence de spécul ati on sur l es servi ces et sur l es machi nes. L' arti san ne doi t pas
spécul er sur l e travail d' autrui en e mpl oyant à s on servi ce un trop grand no mbre de
coll aborateurs. Il ne doit pas non pl us spécul er sur l e travail des ma chi nes, car il vi t
nor mal e ment de son travail manuel ou du travail fa mili al.

Enfi n, l' absence de spécul ati on sur l es marchandises ou l es mati ères premi ères qu'il utilise.
L' arti san ne doi t pas accompli r d' acte de commerce sans rapport avec ses acti vités de
pr oducti on, de transf ormati on, de réparati on ou de prestati on de services. S'il est obli gé de
revendre l es pr odui ts en l' état, ces revent es ne doi vent pas excéder une certai ne f racti on de
ses revenus.

§. 3- L’ atténuati on de l a di sti ncti on tradi ti onnell e : l e stat ut de l’entreprenant

D’ après l es di sposi ti ons de l’ arti cl e 30, AUDCG, l’ entreprenant est une personne physi que, à
l’ excl usi on de t out e pers onne moral e, qui entreprend l’ exerci ce d’ une acti vi té
pr of essi onnell e, qui peut être ci vil e, commerci ale, arti sanal e ou agri col e, mai s rel ati ve ment
peu i mportant e au regard du chiffre d’ aff ai res. En eff et, l’ entreprenant n’ a dr oi t à ce stat ut
que, si pendant deux exerci ces successifs, l e chiffre d’ aff ai res annuel généré par s on acti vi té
n’ excède pas l es seuil s fixés dans l’ Act e unif or me portant organi sati on et har moni sati on des
compt abilités des entrepri ses au ti tre du système mi ni mal de trésoreri e. Ces seuil s s ont,
sel on l’ arti cl e 13, AUCE :

 30 milli ons de FCF A, pour l es entrepri ses de négoce (acti vité commerci ale),
 20 milli ons de F CF A, pour l es entrepri ses arti sanal es et assi mil ées, not a mment
agri col es,
 10 milli ons de F CF A pour l es entrepri ses de servi ces, qui peuvent être de nat ure
ci vil e.

En revanche, l orsque durant deux années consécuti ves, l e chiffre d’ aff ai res de l’ entreprenant
excède l es li mites fi xées pour ses acti vités, il est t enu, dès l e pre mi er j our de l’ année
sui vant e et avant l a fi n du pre mi er tri mestre de cette année, de respect er t out es l es charges
et obli gati ons appli cabl es à l’ entrepreneur i ndi vi duel. Dès l ors, il perd sa quali té
d’ entreprenant et ne bénéfi ci e pl us de l a l égi sl ati on spéci al e qui l ui est appli cabl e en cett e
qualité. Il doi t en conséquence se conf or mer à l a régl e mentati on appli cabl e à ses acti vités. En
d’ autres t er mes, s’il s’agi t d’ un entreprenant c ommerçant, il abandonne s on stat ut
d’ entreprenant pour cel ui de commerçant, en se f ai sant i mmatri cul é comme t el au RCCM,
et en se conf or mant à t out es l es obli gati ons, notamment compt abl es, i nhérent es à l’ exerci ce
du commerce.

L’ entreprenant est en eff et di spensé d’i mmatricul ati on au RCCM et n’ est s ou mi s, pour
l’ exerci ce de s on acti vité, qu’ à une si mpl e décl arati on sans f rai s au greffe de l a j uri di cti on
compét ent e ou à l’ organe compét ent (art. 39 & 62, AUDCG).

14
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

SECTI ON 2- LE MODE D' ACCOMPLI SSE ME NT DES ACTES


Un si mpl e parti culi er peut accompli r occasi onnell ement des act es de commerce sans pour
autant deveni r commerçant. L' accompli sse ment d' actes de commerce est, cert es, une
condi ti on nécessai re d' acqui siti on de l a qualité de commerçant, mai s c' est une condi ti on
i nsuffi sante ; il f aut en outre deux autres condi ti ons : d' une part, l' accompl isse ment des act es
de commerce à ti tre de pr of essi on ; d' autre part, l' accompli sse ment de ces actes de ma ni ère
i ndépendant e et personnell e.

§. 1- L' acco mpli sse ment des actes de co mmerce à titre de prof essi on

Est commerçant, di spose l’ arti cl e 2, AUDCG, cel ui qui f ait de l’ accompl isse ment d’ act es de
commerce par nat ure sa pr of essi on. Ce qui i mpli que une acti vité habi tuell e, réguli ère. En
d’ autres t er mes, l' accompl i sse ment d' actes de commerce ne conf ère l a qualité de
commerçant que si l'i ntéressé en ti re l' essenti el de ses revenus.

Il faut dédui re de cette exi gence deux conséquences :

En pre mi er li eu, l orsque l a personne accomplit des act es de commerce i sol és, ell e n' acqui ert
pas de ce seul f ait l a qualité de commerçant. Ex : l' arti san qui, accessoi rement à s on acti vi té
de producti on ou de transf or mati on, achèt e pour revendre certai ns produi ts.

En second li eu, l a personne qui accomplit des actes de commerce, mê me de f açon répét ée,
n' acqui ert pas l a qualité de commerçant, dès l ors que l' accompli sse ment de t el s actes ne l ui
pr ocure pas l' essenti el de ses revenus.

Ai nsi l' accompli sse ment d' actes de commerce par l a f or me, mê me de mani ère répét ée, ne
conf ère pas l a qualité de commerçant. Il a ét é j ugé qu' un baill eur qui tire des l ettres de
change pour percevoi r ses l oyers n' a pas l a qualité de commerçant. Ce qui l ui pr ocure ses
revenus ce n' est pas l' émi ssi on des l ettres de change, mai s l a mi se en l ocati on de ses
i mmeubl es.

La pr of essi on commerci al e doi t être exercée à ti tre pri nci pal ; cel a ne veut pas di re que
cette pr of essi on doi t être excl usi ve. On peut en eff et exercer à l a f oi s une pr of essi on
commerci al e et une prof essi on ci vil e. On est al ors commerçant parce que l' une des
pr of essi ons est commerci al e.

Il a ét é j ugé qu' un notaire qui spécul e en bourse avec l' argent déposé par ses cli ents doi t
être consi déré comme un commerçant et s oumi s à ce ti tre aux pr océdures coll ecti ves.
L' exerci ce si mul tané de deux pr of essi ons ne doi t cependant pas être conf ondu avec
l' exerci ce à ti tre pri nci pal d' une pr of essi on et l' accompli sse ment accessoi re d' actes rel evant
nor mal e ment d' une autre prof essi on.

Ai nsi l orsque l'i ntéressé exerce à ti tre pri nci pal une pr of essi on commerci al e, il est
commerçant mê me s'il accomplit des act es ci vils accessoi re ment. D' aill eurs ces act es ci vil s
devi ennent des act es de commerce par appli cati on de l a t héori e de l' accessoi re, s'ils ont ét é
accompli s pour l es besoi ns du commerce.

I nverse ment, l orsque l'i ntéressé exerce à ti tre pri nci pal une acti vité ci vile, il reste un ci vil
mê me s'il accomplit accessoi re ment des act es de commerce. Ces actes de co mmerce

15
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

peuvent aussi deveni r des act es ci vils par appli cati on de l a t héori e de l'accessoi re. Ex: un
arti san qui est a mené à achet er des mati ères pre mi ères qu'il revend i ncorporées dans un
pr odui t est un ci vil. Ces achats pour revendre qui s ont des act es de commerce par nat ure
devi ennent des actes ci vils, sauf s'ils dépassent l es besoi ns de l a prof essi on.

§. 2 - L' acco mpli sse ment des actes de mani ère i ndépendant e et pers onnell e :
Les i nter médi ai res de co mmerce

On a t ouj ours consi déré que pour être commerçant, il f aut j oui r d' une certai ne aut onomi e
dans l' exerci ce de s on acti vité ; c' est pourquoi l es auxili ai res des commerçants qui ne
j ustifi ent pas d' une i ndépendance suffi sante ne s ont pas consi dérés comme des
commerçants, al ors que l es i nter médi ai res i ndépendants s ont consi dérés comme
commerçants.

Ceux qui accompli ssent des act es de commerce pour l e compt e d' autrui, n' ont pas l a quali té
de commerçant du f ai t de l eur li en de dépendance vi s-à-vi s de l eur commettant. C' est l e cas
des sal ari és des commerçants qui sont li és à l eurs empl oyeurs par un contrat de travail.

Les i nter médi ai res de commerce dér ogent à cette règl e. Aux t er mes de l’ arti cl e 169,
AUDCG, « l’i nter médi ai re de co mmerce est une personne physi que ou moral e qui a l e pouvoi r
d’ agi r, ou ent end agi r, habi tuell e ment et pr of essi onnel l ement pour l e co mpt e d’ une autre personne,
co mmerçant e ou non, afi n de concl ure avec un ti ers un act e j uri di que à car actère co mmerci al. »
L’ arti cl e 170, préci se que l’i nter médi ai re de commerce est un commerçant, s ou mi s en t ant
que tel aux condi ti ons prévues par l es arti cl es 6 à 12, AUDCG.

Tr oi s types d' i nter médi ai re s ont prévus par l'Act e unif or me : Les commi ssi onnai res, l es
agents commerci aux et l es courti ers. Ces i nter médi ai res s ont s ou mi s à deux s ort es de
règl es : des règl es communes à t ous l es types d’i nter médi ai res et des règl es pr opres à
chaque type.

A- Les règl es co mmunes

Les règl es communes, qui constituent ce que l' on pourrai t appel er l e dr oi t commun de
l'i nter médi ati on comme rci al e, s ont fi xées par l es arti cl es 169 à 191, AUDCG. Ell es
concernent l e stat ut des i nt er médi ai res, l a constituti on et l' étendue de l eurs pouvoi rs, l es
eff ets des actes qu'ils acco mpli ssent et l a fi n de l eur contrat.

1. Le Stat ut des i nter médi ai res

Ils s ont t ous commerçants (art. 170). Il s doi vent, à ce ti tre, re mpli r t out es l es condi ti ons
prévues par l es arti cl es 6 à 12 AUDCG, c’ est-à- di re ne pas être i ncapabl es ou f rappés
d’i ncompati bilité ou d’int erdi cti on. Il s peuvent être personnes physi ques ou pers onnes
moral es.

2. La consti tuti on et l' étendue des pouvoi rs

Les i nter médi ai res s ont ma ndatai res. C' est ce qui expli que l' appli cati on des règl es du ma ndat
aux rel ati ons entre l'i nter médi ai re, l e représent é et l es ti ers. Ces règl es sont compl ét ées par
l es di sposi ti ons de l' AU. Ils ti rent l eurs pouvoi rs d' un mandat qui peut être écri t ou verbal.
En l' absence d' écrit l e mandat peut être prouvé par t out moyen, y compri s par té moi gnage.

16
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

En ce qui concerne l' étendue des pouvoi rs, ell e est fi xée, en l' absence de sti pul ati ons
contract uell es, par l a nat ure de l' affai re. Sel on l' arti cl e 178 de l' AU, l es i nter médi ai res
peuvent nota mment acco mpli r l es act es j uri di ques nécessai res à l' exécution de l eur mandat.
Le mandat ne comport e pas cependant l e pouvoi r d' accompli r certai ns actes en l' absence de
pouvoi r spéci al. Il s ne peuvent nota mment, s'ils n' ont pas reçu de pouvoi r spéci al, engager
une pr océdure j udi ci ai re, transi ger, compr omettre, s ouscri re des engagements de change,
ali éner ou grever des i mmeubl es, fai re des donations.

3. Les eff ets des actes acco mpli s par l es i ntermé di ai res

Pour anal yser ces eff ets, il faut di sti nguer troi s situati ons :

L'i nter médi ai re agi t pour l e compt e du représenté dans l es li mites de s on pouvoi r et dans
l es condi ti ons où l e ti ers connai ssait ou étai t censé connaî tre sa qualité d'i nter médi ai re.
Da ns ce cas, ces act es li ent di recte ment l e représent é et l e ti ers, à moi ns qu'il ne résul te des
ci rconstances de l' espèce que l'i nter médi ai re a entendu s' engager personnell ement.

L'i nter médi ai re agi t pour l e compt e du représenté dans l es li mites de ses pouvoi rs, mai s l e
ti ers i gnorai t ou n' était pas censé connaî tre l a qualité de l'i nter médi ai re. Da ns ce cas, c' est
l'i nter médi ai re qui est personnell ement engagé.

L'i nter médi ai re agi t sans pouvoi r ou excède ses pouvoi rs. Dans ce cas, ses actes ne li ent ni
l e représent é, ni l e ti ers. Il n' en serai t autre ment que si l e comport e ment du représent é
avai t condui t l e ti ers à croi re rai sonnabl e ment et de bonne f oi que l'i nter médi ai re avai t l e
pouvoi r d' agi r pour s on compt e. Dans cette derni ère hypot hèse, l e représent é ne peut se
préval oi r, à l' égard du ti ers, du déf aut de pouvoi r de l'i nter médi ai re.

Lorsqu'il agi t sans pouvoi r ou en dehors des li mites de ses pouvoi rs, l'i nter médi ai re est t enu
d' i nde mni ser l e ti ers, afi n de l e rétabli r dans l a si tuati on qui aurai t ét é l a sienne si l' acte avai t
ét é accompli avec l es pouvoi rs nécessai res.

Le représent é peut cependant ratifi er l' acte accompli par l'i nter médi ai re qui agi t sans
pouvoi r ou en dehors des li mites de ses pouvoi rs. Dans cette hypothèse, l' acte ratifi é
pr odui t l es mê mes eff ets que s'il avai t été accompli en vert u d' un pouvoi r.

Le contrat d'i nter médi ati on f ai t naî tre des obligati ons à l a charge du représent é et de
l'i nter médi ai re. Le représent é doi t re mbourser à l'i nter médi ai re en pri ncipal et i ntérêts, l es
avances et f rai s que cel ui-ci a engagé pour l' exécuti on réguli ère du mandat ; il doi t aussi l e
li bérer des obli gati ons contractées.

L'i nter médi ai re doi t, en ce qui l e concerne, rendre compt e de sa gestion à t out e époque
l orsque l e représent é en f ai t l a de mande. Il doi t verser l es s ommes perçues pour l e compt e
du représent é ; en cas de retard, il paye l es i ntérêts. Il doi t, enfi n, exécut er correct e ment
son mandat ; en cas d' i nexécuti on ou de mauvai se exécuti on, il doi t i nde mni ser l e
représent é pour l e dommage subi.

4. La fi n du mandat

Les causes de cessati on du mandat de l'i nter médi ati on s ont prévues par l es arti cl es 188 et

17
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

189. L' arti cl e 188 vi se l es causes sui vant es :

• l' accord entre l e représent é et l'i nter médi ai re ;


• l' exécuti on compl ète de l' opérati on ou des opérati ons pour l esquell es l e pouvoi r a
ét é conf éré ;
• l a révocati on à l'i niti ati ve du représent é ;
• l a renonci ati on de l'i ntermédi ai re.

Tout ef oi s, l orsque l e représent é révoque de mani ère abusi ve l e ma ndat confi é à


l'i nter médi ai re, il doi t l'i nde mni ser des domma ges causés. De mê me, l'i nter médi ai re qui
renonce de mani ère abusi ve à l' exécuti on de s on ma ndat doi t i nde mni ser l e représent é des
dommages causés.

Le mandat de l'i nter médi ai re cesse égal e ment en cas de décès, d'i ncapacité ou dans l es cas
prévus par l’ Acte unif orme portant organi sati on des pr océdures coll ectives d’ apure ment du
passif, que ces événe ments concernent l e représent é ou l'i nter médi ai re (arti cl e 189).

À c ôt é des règl es qui constituent l e dr oi t commun de l'i nter médi ati on c ommerci al e, il y a
des règl es propres à chaque type d'i nter médi ai re.

B- Les règl es propres

1. Le co mmi ssi onnai re

Sel on l’ arti cl e 192, AUDCG, « l e co mmi ssi onnaire est un pr of essi onnel qui, moyennant l e
verse ment d’ une co mmi ssion, se charge de concl ure t out act e j uri di que en son pr opre no m mai s
pour l e co mpt e du co mmet tant qui l ui en donne mandat. »

Le contrat de commi ssi on f ait naî tre des obli gati ons à l a charge, aussi bi en du
commi ssi onnai re que du commettant.

a. Les obli gati ons du commi ssi onnai re

Il doi t exécut er, conf ormé ment aux di recti ves du commettant, l es opérati ons f ai sant l' obj et
du contrat. Il doi t agi r avec l oyaut é pour l e compte du commettant. C' est pourquoi il l ui est
i nterdi t d' achet er pour son pr opre compt e l es marchandi ses qu'il est chargé de vendre ou
de vendre ses pr opres marchandi ses à s on commettant. Il doi t donner au commettant t out
rensei gne ment util e rel atif à l' opérati on. Il doi t sauvegarder l es dr oi ts de recours contre l e
transport eur l orsque l es marchandi ses expédi ées pour être vendues se trouvent dans un
état manif este ment déf ect ueux. Il doi t f ai re vendre l es marchandi ses l orsqu'il y a li eu de
crai ndre une dét éri oration rapi de. Il doi t vendre au pri x fi xé par l e commettant.

Le commi ssi onnai re qui a vendu en dess ous du pri x mi ni mu m fi xé par l e commettant est
tenu envers l ui de l a différence, sauf s’il prouve qu’ en vendant, il a préservé l e commettant
d’ un dommage, et que l es ci rconstances ne l ui ont pas per mis de prendre ses ordres.

Le commi ssi onnai re qui achèt e à pl us bas pri x, ou qui vend pl us cher que ne l e portai ent l es
ordres du commettant, ne peut bénéfi ci er de l a diff érence (art. 200).

18
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

b. Les obli gati ons du commett ant

Le commettant doi t payer une ré munérati on ou une commi ssi on, et cell e-ci est due l orsque
l e mandat est exécut é. Quel que s oi t l e résul tat, l a ré munérati on est due, mê me si
l' opérati on est défi citai re. Il doi t re mbourser l es f rai s et débours nor maux exposés par l e
commi ssi onnai re et qui se s ont révél és nécessaires. Pour garanti r l e pai e ment des s ommes
auxquell es il a dr oi t, l e commi ssi onnai re peut exercer un dr oi t de rét enti on sur l es
marchandi ses qu'il déti ent.

2. Le courti er

Le stat ut du courti er est fi xé par l es arti cl es 208 à 215 de l' AUDCG. Sel on l' arti cl e 208, « l e
courti er est un pr of essi onnel qui met en r apport des personnes en vue de f aciliter ou f ai re abouti r l a
concl usi on de conventi ons entre ces personnes ».

Tout comme dans l e cas du contrat de commi ssion, l e contrat de courtage donne nai ssance
à des obli gati ons à l a charge du courti er et des droi ts à son profit.

a. Les obli gati ons du courti er

Le courti er doi t de meurer i ndépendant à l' égard des parti es et s' absteni r d'i nterveni r
personnell ement dans une transacti on sans l' accord de cell es-ci. Il doi t f ai re t out ce qui est
util e pour l a concl usi on du contrat. Il doi t donner aux parti es t out rensei gne ment util e à l a
concl usi on de l' accord. Il doi t s' absteni r de réali ser des opérati ons de commerce pour s on
pr opre compt e.

b. Les droi ts du courti er

Le courti er a dr oi t à une ré munérati on constituée par un pourcentage du mont ant de


l' opérati on. La ré munérati on est support ée par l e donneur d' ordre. Si c' est l e vendeur qui
est donneur d' ordre, cette ré munérati on ne peut être support ée mê me parti ell ement par
l' acquéreur. Ell e vi ent dans ce cas en déducti on du pri x nor mal encai ssé par l e vendeur. Si
l' achet eur est seul donneur d' ordre, il support e l a ré munérati on qui vi ent s' aj out er au pri x. Si
l es deux parti es s ont donneuses d’ ordre, l e pourcentage correspondant à l a commi ssi on due
au courti er est fi xé et réparti entre ell es d’ un commun accord.

La ré munérati on est due dès que l'i ndi cati on donnée par l e courti er ou l a négoci ati on qu' il a
condui te, aboutit à l a concl usi on du contrat. Lorsque l e contrat a ét é concl u s ous condi ti on
suspensi ve, l a ré munération du courti er n’ est due qu’ après l a réali sati on de l a condi ti on.

En pl us de l a ré munération, l e courti er a dr oi t au re mbourse ment des dépenses eff ect uées si


cel a avai t ét é convenu. Le re mbourse ment est dû, dans ce cas, mê me si l e c ontrat n' est pas
concl u.

Cependant, l e courti er perd s on dr oi t à ré munérati on et à re mboursement, s’il a agi dans


l'i ntérêt du ti ers contractant au mépri s de ses obli gati ons à l' égard de s on donneur d' or dre
ou s'il s' est f ait re mettre à l'i nsu de ce derni er une ré munérati on par l e ti ers contractant.

19
I ntroducti on au dr oi t des aff aires

3. Les agents co mmer ci aux

Le stat ut de l' agent commerci al est fi xé par l es arti cl es 216 à 233. Sel on l'arti cl e 216, « l’ agent
co mmerci al est un mandat ai re pr of essi onnel chargé de f açon per manente de négoci er et,
évent uell e ment, de concl ure des contrats de vent e, d' achat, de l ocati on ou de prest ati on de servi ces,
au no m et pour l e co mpt e de pr oduct eurs, d'i ndustri el s, de co mmerçants, ou d' autres agents
co mmerci aux, sans être li é envers eux par un contrat de travail. »

Le contrat d' agence, comme t out contrat d’i nter médi ati on, f ait naî tre un certai n nombre
d' obli gati ons et de droi ts à l' égard de l' agent commerci al.

a. Les obli gati ons

L' agent commerci al a une obli gati on de l oyaut é et un devoi r d'i nf or mation. Ces obli gati ons
pèsent égal e ment sur l e ma ndant. Il a l' obli gati on de restituer à l a fi n du contrat t out ce qui
l ui a ét é re mi s pour l a durée du contrat, soi t par l e mandant, s oi t par un ti ers pour l e
compt e du mandant. Cette obli gati on qui, au demeurant pèse aussi sur l e mandant, ne f ai t
pas obstacl e à l' exerci ce du droi t de rétenti on.

Il ne peut accept er l a représentati on d' une entrepri se concurrent e sans l' accord du mandant.
Il ne peut mê me pas après l a fi n du contrat utiliser ou révél er l es i nf or mati ons qui
présent ent un caractère confi denti el.

b. Les droi ts

L' agent commerci al a droi t à une ré munérati on qui, dans l e sil ence du c ontrat, prend l a
f or me d' une commi ssi on cal cul ée conf or mé ment aux usages prati qués dans l e sect eur
d' acti vi té couvert par l e ma ndat. Il a dr oi t au re mbourse ment des f rai s et débours qu' il a
assumés en vert u d' une i nstructi on spéci al e du ma ndat. Ce dr oi t au re mbourse ment ne
couvre pas l es f rai s et débours résul tant de l' exerci ce nor mal de s on acti vité, sauf
conventi on ou usage contrai re. En cas de cessati on de ses rel ati ons avec l e mandant, il a
dr oi t à une i nde mni té c ompensatri ce. Cette i nde mni té n' est pas due l orsque l' agent
commerci al se trouve dans l' un des cas prévus par l' arti cl e 230 :

• en cas de cessati on du contrat provoquée par l a faute grave de l' agent commerci al ;

• en cas de cessati on du contrat résul tant de l'i niti ati ve de l' agent, à moi ns que cett e
cessati on ne s oi t j ustifi ée par des ci rconstances i mputabl es au mandant ou ne s oi t
due à l' âge, l'i nfi r mité ou l a mal adi e de l' agent commerci al, et pl us général ement, par
t out es ci rconstances i ndépendant es de l a vol onté de l' agent par sui te desquell es l a
poursui te de son acti vité ne peut pl us être rai sonnabl e ment exi gée ;

• l orsqu' en accord avec l e ma ndant, l' agent commerci al cède à un ti ers l es dr oi ts et


obli gati ons qu'il déti ent en vert u du contrat d' agence.

20
Introduction au droit des affaires

TITRE 2

L'EXERCICE DE LA PROFESSION
COMMERCIALE

Le commerçant est dans une situation particulière, car il a des droits et il supporte des
obligations, lesquels sont inconnus du droit civil. C'est ce qui fait la particularité de sa
condition juridique. Il exerce ses activités dans des conditions particulières.

21
Introduction au droit des affaires

CHAPITRE 1

LES OBLIGATIONS DU
COMMERÇANT

Elles sont de deux sortes : il y a, d'une part, les obligations comptables ; il y a d'autre part
l'obligation de se faire immatriculer au RCCM.

SECTION 1- LES OBLIGATIONS COMPTABLES

Le commerçant a l'obligation de tenir des livres de commerce conformément aux


dispositions de l'article 13, AUDCG. L'importance de ces livres n'est plus à démontrer. Ils
servent souvent de preuve en cas de contestation portant sur les opérations effectuées.

En dehors de cet intérêt strictement privé, il y a un intérêt fiscal. L'administration fiscale


peut, ainsi, vérifier les déclarations effectuées par les commerçants en consultant les livres
de commerce.

Divers documents doivent ainsi être établis par le commerçant, afin de déterminer avec
précision sa situation financière, et ce, conformément aux dispositions de l’Acte uniforme
relatif à l’organisation et l’harmonisation des comptabilités des entreprises et de l’Acte
uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique.

§.1- Les règles de tenue des livres

Il y a des règles de tenue fixées par les articles 13 et 14 de l'AU. Mais ces règles ne
s'appliquent qu'aux livres obligatoires.

A- Les livres obligatoires

Il s'agit :

• du livre-journal qui enregistre au jour le jour les opérations commerciales effectuées


par le commerçant.

• du grand-livre avec balance générale récapitulative

• du livre d'inventaire sur lequel sont transcrits le bilan et le compte de résultat de


chaque exercice.

S’agissant des personnes morales commerçantes, elles doivent, en outre, établir tous les ans
leurs états financiers de synthèse.

Tous ces livres doivent être tenus conformément à l'Acte uniforme portant organisation et

22
Introduction au droit des affaires

harmonisation des comptabilités des entreprises dans l'espace OHADA. Ils doivent
comporter la mention du numéro d'immatriculation au RCCM.

B- Les livres facultatifs

Ils ne sont pas soumis aux règles fixées par les articles 13 et 14. Ils sont donc tenus à la
convenance du commerçant. On peut citer, entre autres, le livre de caisse et le livre des
effets à payer ou à recevoir où on indique les traites avec leurs échéances.

§.2- L'utilisation des livres en justice

A- La valeur des livres en tant que mode de preuve

Selon l'article 5 de l'AU, les livres régulièrement tenus peuvent être admis par le juge pour
constituer une preuve entre commerçants. Mais, il faut pour cela un certain nombre de
conditions, dont certaines résultent de l'article 5 lui-même. Elles sont de deux ordres. Il faut,
d'une part, que les livres soient régulièrement tenus ; il s'ensuit qu'un livre tenu en violation
des règles prévues ne peut pas servir de preuve. Il faut, d'autre part, que le litige à propos
duquel on prétend se servir des livres oppose des commerçants.

Que se passe-t-il alors lorsqu'il s'agit d'une contestation opposant un commerçant et un civil
? Il ne fait pas de doute que le commerçant ne peut pas utiliser ses propres livres contre un
civil. En revanche, on a toujours admis que le civil peut opposer au commerçant les livres
que celui-ci a tenus.

D'autres conditions résultent des articles 60 et 5, AU. L'article 60 prévoit qu'une personne
assujettie à l'immatriculation ne peut se prévaloir jusqu'à l'intervention de celle-ci de la
qualité de commerçant. En application de cette règle, il faut être régulièrement immatriculé
pour pouvoir produire ces livres comme mode de preuve.

Quant à l'article 5, qui pose le principe de la liberté de preuve en matière commerciale, il ne


vise que les actes de commerce. La possibilité de produire les livres de commerce comme
mode de preuve est une application particulière de la règle de la liberté de preuve. Dès lors,
même dans les rapports entre commerçants, il faut que l'acte que l'on prétend prouver soit
un acte de commerce.

B- Les techniques d'utilisation des livres

Deux techniques d'utilisation sont possibles. D'une part, la présentation qui consiste à
produire le livre, dans le but d’en extraire ce qui intéresse le litige ; ainsi, le commerçant ne
sera pas tenu de communiquer l'ensemble de ses livres à son adversaire. D'autre part, la
communication qui consiste à communiquer l'ensemble des livres à l'adversaire qui pourra
les consulter dans toutes leurs parties.

Dans le souci de préserver le secret des affaires, l'AU ne consacre que la 1 ère technique :
celle de la présentation. C'est ce qui résulte de l'art. 5, al. 5, aux termes duquel: «Dans le
cours d'une contestation, la présentation des livres de commerce et des états financiers de synthèse
peut être ordonnée par le juge, même d'office, à l'effet d'en extraire ce qui concerne le litige».

23
Introduction au droit des affaires

SECTION 2- L'OBLIGATION DE SE FAIRE IMMATRICULER AU RCCM

Le registre de commerce est un registre important, car c'est un instrument d'information ,


non seulement pour les pouvoirs publics, mais aussi pour les tiers. Les pouvoirs publics ont
besoin de renseignement et de statistiques pour diriger l'économie, alors que les tiers,
appelés à faire crédit aux commerçants, ont besoin d’obtenir rapidement les renseignements
susceptibles de justifier l'octroi de ce crédit ou de légitimer une prudente réserve.

L’Acte uniforme a réglementé l’organisation et le fonctionnement du Registre du commerce


et du Crédit Mobilier (RCCM).

§.1- L'organisation du RCCM

L’Acte uniforme distingue le RCCM proprement dit, le Fichier National et le Fichier


Régional.

A- Le RCCM

Il est tenu par le greffe de la juridiction compétente ou l’organe compétent sous la


surveillance du président de ladite juridiction ou du juge délégué par lui à cet effet ou de
l’autorité compétente.

Il comprend deux éléments :

• Un registre d'arrivée qui mentionne dans l'ordre chronologique la date et le numéro


de chaque déclaration acceptée, les noms, prénoms, raison sociale ou dénomination
sociale du déclarant ainsi que l'objet de la déclaration.

• Une collection des dossiers individuels tenue par ordre alphabétique. Ces dossiers
doivent comporter les éléments énumérés par les articles 44 à 46 de l'AU.

B- Le Fichier National

Il est prévu un fichier national dans chaque Etat partie. Il est destiné à centraliser les
renseignements consignés dans chaque RCCM et à permettre l’accès des assujetties et des
tiers à ces informations.

À l’instar du RCCM, le Fichier National comprend un registre d’arrivée et un répertoire


chronologique des personnes assujetties à l’immatriculation.

C- Le Fichier Régional

Tenu auprès de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage, il centralise les renseignements


contenus dans chaque Fichier National.

§.2- Le fonctionnement du RCCM

Il y a une opération initiale et des opérations postérieures.

24
Introduction au droit des affaires

A- L'opération initiale : l'immatriculation

1. Les personnes assujetties

Sont concernées par l'immatriculation, les personnes physiques ayant la qualité de


commerçant au sens de l'AUDCG. La requête en vue de l'immatriculation doit être
introduite dans le 1er mois de l'exploitation.

Sont également concernées, les sociétés commerciales et les autres personnes morales
visées à l'AUSCGIE qui doivent requérir leur immatriculation dans le mois de leur
constitution.

2. Les modalités

La demande d'immatriculation est déposée au greffe de la juridiction dans le ressort de


laquelle se trouve le commerce (personne physique) ou le siège social (personne morale). La
demande doit comporter les indications prévues par l'article 2 pour les personnes physiques
et l'article 29 pour les personnes morales.

L'immatriculation a un caractère personnel et il est interdit d'être immatriculé à titre


principal dans plusieurs registres ou dans un même registre sous plusieurs numéros. Dès
que la demande est en état, le greffier attribue un numéro qu'il mentionne sur le formulaire
remis au déclarant.

Le greffier qui a en charge le RCCM doit s'assurer sous sa responsabilité que les demandes
sont complètes. Il doit également vérifier la conformité de leurs énonciations aux pièces
justificatives produites. S'il constate des inexactitudes, il saisit la juridiction compétente ; il
en est de même s'il rencontre des difficultés.

B- Les formalités postérieures

L'inscription initiale doit être régulièrement mise à jour, c'est pourquoi le commerçant doit
faire mention de tous les changements qui interviennent dans sa situation. Il doit aussi se
faire radier du RCCM lorsqu'il cesse ses activités.

1. Les inscriptions modificatives

Une immatriculation secondaire doit être faite dans le délai d'un mois à compter du début
de l'exploitation si l'assujetti exploite des établissements commerciaux secondaires ou des
succursales dans le ressort d'autres juridictions.

De même, certains événements qui marquent la vie du commerçant doivent être constatés
par la rectification ou le complément des énonciations portées au RCCM. Il en est ainsi des
modifications concernant l'état civil, le régime matrimonial ou la capacité de l'assujetti.

2. La radiation

En cas de cessation de l'activité, le commerçant doit demander sa radiation du RCCM dans


le délai d'un mois. En cas de décès d'une personne, ses héritiers doivent dans le délai de 3
mois demander la radiation ou la modification s'ils doivent continuer l'exploitation.

25
Introduction au droit des affaires

En cas de dissolution d'une personne morale, c'est le liquidateur qui doit demander la
radiation dans le délai d'un mois à compter de la clôture des opérations de liquidation.

À défaut, le greffe de la juridiction compétente procède à la radiation sur décision de cette


juridiction rendue à la demande de tout intéressé.

§.3- Effets de l'accomplissement ou du défaut d'accomplissement de ces


formalités

A- Effets s’agissant de la formalité initiale

L'immatriculation qui est la formalité initiale produit des effets, le défaut d'immatriculation
produit lui aussi des effets.

1. Effet de l'immatriculation

L'effet principal que la loi attache à l'immatriculation c'est la présomption de commercialité.


C'est ce qui résulte de l'article 59 de l'AU, aux termes duquel toute personne immatriculée
au RCCM est présumée, sauf preuve contraire, avoir la qualité de commerçant.

Cette présomption est simple, aussi bien pour les personnes physiques, que pour les
personnes morales puisque l'article 59 ne fait pas de distinction.

Le caractère simple de cette présomption signifie que l'on peut prouver par tout moyen que
telle personne immatriculée l'a été à tort et que malgré cette immatriculation, elle n'a pas la
qualité de commerçant. L'immatriculation ne confère donc pas la qualité de commerçant.

Cette présomption de commercialité ne s'applique pas lorsqu'il s'agit d’un GIE.

2. Effet du défaut d'immatriculation

La personne assujettie à l'immatriculation et qui s'abstient d'y procéder ne peut pas se


prévaloir de la qualité de commerçant à l'égard des tiers et de l'administration. Dans le
même cas elle ne pourra pas invoquer le défaut d'immatriculation pour se soustraire aux
responsabilités et aux obligations qui découlent de la qualité de commerçant.

En somme cette personne qui ne peut pas bénéficier des droits des commerçants (droit au
renouvellement du bail, par exemple) est soumise à toutes les obligations des commerçants
(soumission aux procédures collectives, par exemple).

Il convient d'observer que si l'immatriculation n'est pas requise dans le délai légal, le tribunal
peut, soit d'office, soit à la requête du greffe ou de tout intéressé rendre une décision
ordonnant à l'intéressé d'y procéder.

B- Effets s’agissant des formalités postérieures

Le législateur ne se préoccupe pas des effets de l'accomplissement de ces formalités. Il ne se


préoccupe que des effets du défaut d'accomplissement.

26
Introduction au droit des affaires

1. Les effets du défaut d'accomplissement des mentions modificatives

Les faits ou actes qui auraient dû être mentionnés et qui ne l'ont pas été ne peuvent pas être
opposés par l'assujetti aux tiers et à l'administration. Il n'en serait autrement que si l'assujetti
prouvait que ceux-ci en avaient eu connaissance par d'autres moyens. Le défaut de mention
n'empêche pas les tiers et l'administration de se prévaloir de l'acte ou du fait contre
l'assujetti. Là aussi le tribunal a la possibilité d'ordonner l'inscription des faits ou actes qui
intéressent le commerçant.

2. Les effets du défaut de radiation

Le commerçant qui cesse ses activités doit se faire radier du RCCM. Que se passe-t-il
lorsqu'il ne se fait pas radier ? La jurisprudence avait toujours considéré que le défaut de
radiation entraînait une présomption irréfragable d'inopposabilité de la perte de la qualité de
commerçant. L'entrée en vigueur de l'AU ne devrait pas remettre en cause cette
jurisprudence ; en effet la règle sur laquelle s'appuyaient les tribunaux a été reprise dans
l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.

Il est prévu en effet que le commerçant qui cesse ses activités peut être déclaré en
redressement judiciaire ou en liquidation des biens dans le délai d'un an à compter de sa
radiation. Il ne s'agit pas d'une présomption de maintien de la qualité de commerçant, car le
commerçant qui a cessé ses activités sans se faire radier ne peut pas se prévaloir de sa
qualité de commerçant vis-à-vis des tiers.

27
Introduction au droit des affaires

CHAPITRE 2

L'ACTIVITÉ DU COMMERÇANT

Pour exercer leurs activités, les commerçants vont acquérir des biens, des droits dans la
perspective d’attirer une clientèle. Tous ces droits sont regroupés au sein de la notion
abstraite de fonds de commerce.

28
Introduction au droit des affaires

SOUS-CHAPITRE 1

LE FONDS DE COMMERCE

L’exercice du commerce va le plus souvent nécessiter la réunion de plusieurs éléments pour


attirer une clientèle. Il faut trouver un local, conclure un bail commercial, choisir un nom
commercial, acheter des marchandises. Tous ces éléments vont faire l’objet d’approche
unitaire par la notion du fonds de commerce. Aux termes de l’article 135, AUDCG, le fonds
de commerce est constitué par un ensemble de moyens qui permettent au commerçant
d’attirer et de conserver une clientèle.

Le fonds de commerce est constitué d’un certain nombre d’éléments (section 1) et peut, par
ailleurs, être l’objet de diverses opérations commerciales (section 2).

SECTION 1- LES ÉLÉMENTS DU FONDS DE COMMERCE

« Le fonds de commerce », dispose l’article 136, AUDCG, « comprend nécessairement la clientèle


et l’enseigne ou la clientèle et le nom commercial, sans préjudice du cumul de la clientèle avec
l’enseigne et le nom commercial ». La clientèle, l’enseigne et le nom commercial forment donc
le noyau dur du fonds de commerce. Mais, l’exploitation d’un commerce peut supposer
l’acquisition d’autres éléments qui vont intégrer le fonds de commerce. Ces éléments sont
énumérés à l’art. 137, AUDCG.

§.1- Les éléments inclus dans le fonds

Il s’agit des éléments obligatoires, sans lesquels on ne saurait parler de fonds de commerce.

A- La clientèle

La clientèle a toujours été considérée comme l’élément essentiel du fonds de commerce. Il


n’y a pas de fonds de commerce sans clientèle, solution régulièrement rappelée en droit
français par la Cour de cassation.

Qu’est-ce que la clientèle ? En droit français, le terme « clientèle » est tantôt employé en
lieu et place du mot « achalandage », tantôt on opère une distinction entre les deux notions.
L’opinion générale qui prévaut en doctrine est que la clientèle serait l’ensemble des
personnes attirées par la personnalité propre du commerçant, par exemple, ses qualités
d’accueil et sa compétence professionnelle, tandis que l’achalandage serait l’ensemble des
personnes attirées par la localisation géographique du fonds de commerce.

L’Acte uniforme n’emploie pas le terme « achalandage », mais cette omission ne supprime
pas la nécessité de situer, au moins sur le plan de l’analyse juridique pure, l’achalandage par
rapport à la clientèle. Aussi, certains auteurs définissent-ils la clientèle comme étant
l’ensemble des personnes qui s’approvisionnent habituellement ou occasionnellement auprès
d’un commerçant déterminé en raison de ses qualités personnelles ou de l’implantation de

29
Introduction au droit des affaires

son commerce. Toutefois, pour des raisons de simplicité, on propose de s’en tenir à une
notion unique de clientèle, définie comme l’ensemble des personnes en relations d’affaires
avec un commerçant, et d’ignorer les motifs qui poussent ces personnes à contracter1.

Cette présentation classique a été contestée, car l’analyse juridique n’est pas unanime à
considérer le droit à la clientèle comme un élément du fonds. On soutient, en effet, qu’en
dehors des monopoles de droit (brevets d’invention, marques de fabrique, dessins, modèles,
etc.), il n’y a pas de droit à la clientèle, puisque celle-ci peut être retirée par la concurrence.
La clientèle, c’est les consommateurs et ils n’appartiennent à personne. On affirme ainsi que
dans un régime d’économie libérale, « la clientèle est à qui sait la prendre »2.

En partant du principe qu’il n’y a pas de fonds de commerce sans clientèle, peut-on conclure
à l’identité entre les deux choses ? La question est d’importance, puisque la cession de la
seconde implique celle de la première. L’ensemble de la doctrine reconnaît que la
jurisprudence réserve un sort particulier à la clientèle parmi les éléments du fonds de
commerce. Mais, se fondant sur le fait que pour les juges l’élément essentiel du fonds de
commerce est la clientèle, certains auteurs vont jusqu’à assimiler le fonds de commerce à la
clientèle. En pratique, si la clientèle est nécessaire au fonds, elle est, cependant, insuffisante.
Elle doit prendre appui au moins sur un autre élément qui permette de l’attirer et de la
retenir. La détermination de cet élément est une question de fait propre à chaque fonds.

B- Le nom commercial et l’enseigne

L’article 136, AUDCG, comprend également dans le fonds de commerce l’enseigne ou le


nom commercial. L’emploi par le texte de la conjonction de coordination « ou » rappelle
l’analogie qui peut exister entre les deux en tant qu’éléments d’identification du fonds, mais
cache la différence, car, contrairement au nom commercial qui est « la dénomination sous
laquelle est connu et exploité un établissement commercial »3, l’enseigne, destiné à attirer le
regard des passants4, peut consister en un emblème (objet, animal, signe ou symbole
quelconque) ou en une appellation de fantaisie.

Le nom commercial du fonds ne se confond pas avec le nom du propriétaire du fonds. Le


nom patronymique, en tant qu’il exprime l’état d’une personne physique, est soumis à un
régime d’ordre public qui en interdit la cessibilité et, plus généralement, le place hors
commerce. En pratique, cependant, il y a souvent confusion entre les deux ; par exemple,
lorsque le créateur du fonds de commerce lui donne son nom. On considère, dans ce cas,
que la confusion est fortuite, le nom patronymique pouvant changer alors que le titulaire du
fonds subsiste. Il peut en être ainsi par suite d’une filiation nouvelle ou d’un divorce. Par
contre, l’identité entre le nom patronymique et celui du fonds de commerce disparaît
lorsque le créateur du fonds, lui ayant donné son nom, le cède à un tiers. Si le nom
patronymique est celui d’un tiers, surtout un personnage historique ou prestigieux, le
commerçant engage sa responsabilité civile au cas où son choix crée la confusion et
occasionne un préjudice pour ce tiers.

Quant à l’enseigne, il peut consister, comme le nom commercial, en un nom patronymique.

1 Lamy Droit commercial, Fonds de commerce, n° 76


2 P. ROUBIER, Le droit de la propriété industrielle, t. 1, Sirey, 1952, p. 106.
3 CA, Paris, 5 juill. 1907, Annales de la Propriété Industrielle, 1908, p. 41
4 La jurisprudence décide que l’enseigne est acquise par le premier usage, qui est son apposition sur le local,

avant même l’ouverture du fonds (CA Poitiers, 10 novembre 1913, DP. 1914, II, p. 116)

30
Introduction au droit des affaires

S’il consiste en un emblème, il doit revêtir une forme et avoir des attributs particuliers pour
être suffisamment original. Mais il ne doit pas être de mauvais goût, par exemple constituer
une insulte à l’art, au bon sens et à l’esthétique générale de l’immeuble. En pareil cas, le
propriétaire de l’immeuble peut demander en justice que soit ordonnée la suppression des
peintures et inscriptions placées par le commerçant sur la façade.

Le nom commercial comme l’enseigne se transmettent avec le fonds. Leur protection est
assurée par l’exercice de l’action en concurrence déloyale sur le fondement des articles 1382
et 1383 du Code civil, sauf à préciser que le succès de l’action n’exige pas la démonstration
de l’existence d’un préjudice déjà réalisé puisqu’il s’agit de protéger un élément du fonds de
commerce. En ce qui concerne particulièrement le nom commercial, l’acquéreur et tous les
exploitants successifs du fonds ont le droit, en principe, de faire usage du nom du fondateur
sous lequel la maison est connue. Pour éviter la confusion, chaque acquéreur ou exploitant
successif doit ajouter son propre nom à celui du fonds, suivi du mot « successeur ».

§.2- Les autres éléments du fonds de commerce

Ils sont énumérés à l’article 137, AUDCG. Il s’agit des éléments corporels, d’une part, et des
éléments incorporels, d’autre part.

A- Les éléments corporels du fonds

Le matériel. L’exercice d’une activité commerciale peut nécessiter l’acquisition du matériel,


c'est-à-dire des biens meubles corporels qui font partie du fonds de commerce. Par
exception, ces meubles échappent au fonds de commerce lorsque le commerçant est
propriétaire des locaux et que les meubles sont rattachés par un lien de destination à
l’immeuble. Par exemple s’agissant d’un hôtel, les meubles garnissant l’hôtel sont affectés à
l’immeuble.

Les marchandises. C’est l’acquisition des marchandises, des stocks de matières 1ères et
des biens destinés à la vente (actif circulant). Les marchandises font partie du fonds de
commerce et ils sont cédés en même temps que le fond. Elles échappent, cependant, à
l’assiette du nantissement portant sur le fonds de commerce car ces actifs sont
particulièrement instables.

B- Les éléments incorporels

Le droit au renouvellement du bail. C’est la créance du locataire commerçant contre le


propriétaire de l’immeuble où le fonds est exploité. Bien que le droit au renouvellement du
bail ne soit ni un élément essentiel, ni un élément nécessaire du fonds de commerce, il n’en
constitue pas moins un élément important, lorsqu’il existe.

Les droits de propriété industriels. Il s’agit principalement des brevets d’invention, des
dessins, des modèles ou des marques. Ces droits confèrent à leurs titulaires un monopole
d’exploitation ou d’utilisation. Les droits de propriété industrielle ont toujours une
importance considérable et peuvent être cédés avec le fonds de commerce ou cédés en
dehors de toute cession du fonds de commerce.

Les licences d’exploitation et autorisations administratives qui ne sont pas attachées à la


personne de l’exploitant font partie du fonds de commerce. Elles peuvent être cédées avec

31
Introduction au droit des affaires

lui (ex. licence d’exploitation des débits de boisson…).

Le bénéfice de clause de non concurrence se transmet avec le fonds de commerce. Mais, les
contrats passés par le commerçant pour l’exercice d’une activité commerciale ne sont pas
transmis avec son fonds de commerce. On relève, toutefois, quelques exceptions : Il s’agit
des contrats de travail conclu pour l’exploitation du fonds de commerce. Ils sont transmis
avec le fonds de commerce. Il en est de même du contrat d’assurance relatif au fonds du
commerce, qui est transmis à l’acquéreur du fonds qui pourra le résilier.

32
Introduction au droit des affaires

SECTION 2- LA NATURE JURIDIQUE DU FONDS DE COMMERCE

Classiquement le fonds de commerce est présenté comme une universalité qu’on qualifie de
bien meuble incorporel.

§.1- Le fonds de commerce, une universalité ?

À la suite de la doctrine française, l’Acte uniforme relatif au droit commercial général indique
que le fonds de commerce est constitué par un ensemble de moyens qui permettent au
commerçant d’attirer et de conserver la clientèle. La nécessité de déterminer sa nature
juridique tient au fait que le fonds se présente sous deux aspects apparemment
contradictoires : un aspect unitaire et un aspect disparate. D’une part, en effet, le fonds de
commerce est une propriété incorporelle rassemblant différents éléments unis entre eux
pour une destination commune, qui est d’attirer et conserver la clientèle. La dispersion de
ces éléments entraîne la perte de la clientèle et la destruction du fonds. D’autre part, le
fonds de commerce ne se confond pas avec les différents éléments qui le composent.

En partant de l’union des éléments du fonds de commerce que justifie leur destination
commune, certains auteurs considèrent celui-ci comme une universalité juridique, un
patrimoine d’affectation doté d’un passif et d’un actif propres. D’autres auteurs préconisent
de voir dans le fonds de commerce une universalité de fait, définie normalement comme un
assemblage de biens réunis par une personne pour servir une destination commune, et
exclusive de toute idée de passif propre. C’est cette destination commune (l’exploitation
commerciale) qui fait que le fonds de commerce n’est pas une simple juxtaposition de biens
ou de valeurs, mais bien une universalité.

Le fonds de commerce comme une universalité de droit ?

L’universalité de droit est un ensemble de droits et d’obligations qui rassemble tous les
éléments de l’actif et du passif, inséparablement liés. Ex : patrimoine. Le fonds de commerce
ne saurait être qualifié d’universalité de droit, parce que les dettes nées de l’exploitation du
fonds ne sont pas en principe transmises avec le fonds. De plus, les actifs du fonds de
commerce ne répondent pas exclusivement du passif généré par l’exploitation. Les dettes du
commerçant pourront être réglées en appréhendant l’ensemble de son patrimoine et non
pas seulement le fonds de commerce qui a généré ces dettes.

Le fonds de commerce comme une universalité de fait ?

C’est un ensemble d’éléments d’actifs regroupés par une identité de destination et traité
comme un bien unique. Ex : troupeau. Un ensemble d’éléments qui visent le même objectif
qui est d’attirer la clientèle. Pour cette raison, tous ces éléments vont être appréhendés de
manière unitaire à l’occasion d’une opération unique. Cette qualification est toutefois
discutée, car le fonds n’est pas toujours traité comme un bien unique.

En matière de vente du fonds de commerce, le vendeur dispose ainsi d’un privilège qui va
s’exercer séparément sur les marchandises, sur le matériel et sur les éléments incorporels.

§.2- Le fonds de commerce est un bien meuble incorporel

On propose finalement de voir dans le fonds de commerce une propriété incorporelle, à

33
Introduction au droit des affaires

l’exemple de la propriété littéraire et artistique, de la propriété des brevets et des marques.

En effet, le fonds de commerce est uniquement composé de biens meubles et ne saurait en


aucun cas se rattacher à la catégorie des immeubles. La jurisprudence a toujours retenu
cette solution. Il s’agit d’un bien mobilier et incorporel. Le fonds de commerce est une
universalité de fait composée d’éléments corporels et incorporels.

Pour autant, et par simplicité, le fonds de commerce est qualifié de bien incorporel, car il
s’agit d’une enveloppe abstraite qu’il n’est pas possible d’appréhender physiquement.

SECTION 3- LES OPÉRATIONS RELATIVES AU FONDS DE


COMMERCE
Le fonds de commerce représente une valeur économique qui peut être source de crédit
pour le commerçant. Pour garantir le remboursement d’un prêt, le commerçant peut
consentir une sûreté sur ce bien en réalisant un nantissement.

Mais, le fonds de commerce est aussi un bien. Son propriétaire peut en conférer la
jouissance à un tiers qui l’exploitera pour en retirer des revenus. On parle alors de location-
gérance.

En outre, le commerçant propriétaire du fonds de commerce peut naturellement en


transférer la propriété à autrui dans le cadre d’une vente.

On analysera tour à tour chacune de ces opérations.

§.1 - La location-gérance du fonds de commerce

Dès avant l’adoption de l’Acte uniforme, on rencontre dans la pratique des affaires, le plus
grand nombre de contrats dans la matière de la location-gérance qui n’était pas réglementée
jusque-là. C’est notamment le cas dans le domaine de la distribution de produits pétroliers,
les compagnies pétrolières ayant pris l’habitude de donner en gérance libre les stations de
distribution leur appartenant. La location-gérance est aujourd’hui réglementée par les articles
138 à 146, AUDCG. Elle est appelée location-gérance ou encore gérance-libre pour la
distinguer de la gérance salariée.

L’article 138, al. 2, la définit comme étant « une convention par laquelle le propriétaire du fonds
de commerce, personne physique ou morale, en concède la location, en qualité de bailleur, à une
personne physique ou morale, locataire-gérant, qui l’exploite à ses risques et périls. »

À l’opposé du gérant salarié qui n’est qu’un simple employé, le gérant libre est un locataire
qui exploite le fonds de commerce en son nom propre et pour son compte, moyennant un
règlement de loyer appelé « redevance ». Il est commerçant ou il le devient s’il ne l’était pas
auparavant, car la location-gérance est pour lui une activité commerciale (art. 139). Quant au
propriétaire du fonds, qui n’a pas nécessairement la qualité de commerçant, il cesse de
l’avoir s’il l’avait auparavant.

Le contrat de location-gérance doit être clairement distingué du contrat de bail, car il a un


objet distinct. Ce ne sont pas en effet les locaux qui sont loués, mais le fonds de commerce

34
Introduction au droit des affaires

exploité dans les locaux. Par conséquent, l’existence d’une clause du bail interdisant la sous-
location ne fait pas obstacle à la conclusion d’un contrat de location-gérance. Il s’agit d’un
contrat original, dont la validité est soumise à certaines conditions, et qui produit certains
effets.

A- Les conditions de validité de la location-gérance

L’article 138, AUDCG, dispose que le fonds de commerce peut être exploité « en exécution
d’un contrat de location-gérance ». L’importance particulière que revêt la personnalité du
gérant dans un tel contrat fait que l’on doit considérer celui-ci comme conclu intuitu
personae, par conséquent non susceptible de cession. En outre, la nature très particulière du
fonds et les intérêts que celui-ci met en jeu font que le contrat de location-gérance est
soumis à des conditions de fond et de forme très strictes.

1. Les conditions de fond de la location-gérance

Les conditions de fond de la location-gérance se rapportent à la fois à l’objet du contrat et


aux parties, plus spécialement le locataire-gérant. L’objet de la location-gérance doit être un
fonds de commerce, disposant par conséquent d’une clientèle. Quant au locataire-gérant, il
doit avoir la capacité de faire le commerce, puisque, en louant et en exploitant le fonds de
commerce, il devient commerçant.

Il y a ensuite des conditions spéciales que doit remplir le loueur du fonds de commerce :
1) Il doit avoir été commerçant pendant deux ans, ou avoir exercé pendant la même
durée les fonctions de gérant ou de directeur commercial ou technique d’une
société ;
2) Il doit avoir exploité pendant une année au moins le fonds mis en gérance ;
3) Il ne doit pas tomber sous le coup d’une interdiction ou d’une déchéance d’exercer
le commerce.

Les délais ainsi prévus peuvent être réduits par la juridiction compétente, sans pouvoir être
inférieur à un an, notamment lorsque l’intéressé fait la preuve qu’il était dans l’impossibilité
d’exploiter son fonds personnellement ou par l’intermédiaire de ses préposés.

La formulation de la disposition invite à une interprétation libérale, tant en ce qui concerne


les cas dans lesquels la réduction du délai peut être demandée, que l’appréciation de la
nature ou du caractère de l’impossibilité. Une simple maladie du commerçant devrait donc
pouvoir constituer un cas d’impossibilité.

En outre, il résulte de l’article 143, AUDCG, que la condition de la qualité de commerçant


du loueur ou celle de l’exploitant personnelle du fonds pendant une durée minimale d’une
année ne sont pas exigées dans deux séries de cas.

En premier lieu, elles ne s’appliquent pas au cas de location-gérance consentie par l’Etat, les
collectivités locales et les établissements publics. La raison en est sans doute la qualité
particulière de ces personnes, encore que normalement l’Etat ou les collectivités locales ne
se livrent pas directement à l’exercice d’activités commerciales susceptibles de créer des
fonds de commerce à leur profit.

En second lieu, elles ne s’appliquent pas lorsque la location-gérance s’impose. Il résulte de la

35
Introduction au droit des affaires

disposition légale que la location-gérance s’impose lorsqu’on se trouve en présence :


1) d’incapables, en ce qui concerne le fonds dont ils étaient propriétaires, avant la
survenance de leur incapacité ;
2) d’héritiers ou légataires d’un commerçant décédé, en ce qui concerne le fonds
exploité par ce dernier ;
3) de contrats de location-gérance passés par des mandataires de justice chargés à un
titre quelconque de l’administration d’un fonds de commerce, à condition qu’ils y
aient été autorisés par la juridiction compétente et qu’ils aient satisfait aux mesures
de publicité prévues.

L’inobservation de ces conditions de fond entraîne au plan civil la nullité du contrat, qui peut
être demandée par chacun des cocontractants ou par les tiers intéressés.

36
Introduction au droit des affaires

1. Les conditions de forme de la location-gérance

Elles concernent essentiellement la publicité de la location-gérance. Le contrat doit être


publié dans la quinzaine de sa date, sous forme d’extraits, dans un journal d’annonces légales.
S’il est commerçant, le propriétaire loueur du fonds doit faire modifier son inscription au
RCCM, par la mention de la mise en location de son fonds. La fin du contrat de location
donne lieu aux mêmes mesures de publicité. L’inscription prise par le locataire au RCCM
doit indiquer l’identité et le domicile du loueur, ainsi que les dates du début et de la fin de la
location-gérance. Enfin, le locataire-gérant doit indiquer en tête de ses bons de commande,
factures et autres documents à caractère financier ou commercial, son numéro
d’identification au RCCM, sa qualité de locataire-gérant du fonds.

A- Les effets de la location-gérance

Ces effets sont à distinguer suivant qu’ils se produisent entre les parties au contrat ou à
l’égard des tiers. En ce qui concerne les effets entre les parties au contrat, ils sont soumis au
droit commun et à la liberté contractuelle. Ayant les obligations d’un bailleur, le propriétaire
ne doit pas, notamment, troubler le locataire par son fait personnel en lui faisant
concurrence. En contrepartie, le locataire s’engage à bien exploiter le fonds, à ne pas en
modifier la destination, et à payer le loyer.

Quant aux effets de location-gérance à l’égard des tiers, seuls certains d’entre eux ont été
réglementés par la loi. Ainsi :
1) Les créanciers du loueur peuvent demander au tribunal de prononcer l’exigibilité de
leurs créances. À peine de forclusion, l’action est introduite dans le délai de trois
mois à compter de la date de publication du contrat de location-gérance.
2) Les créanciers du locataire-gérant bénéficient de la solidarité entre le loueur et le
locataire-gérant pour le paiement de leurs créances. Cette solidarité dure tant que la
publicité du contrat n’a pas eu lieu ;
3) Les dettes afférentes à l’exploitation du fonds contractées par le locataire-gérant
pendant la gérance sont immédiatement exigibles à la cessation du contrat de
location-gérance ;
4) Le droit au renouvellement du bail est reconnu au seul preneur. C’est donc au
preneur (généralement le propriétaire du fonds), non au locataire-gérant, qu’il
incombe de demander le renouvellement du bail.

§.2 - Le nantissement du fonds de commerce

Le crédit est un élément important de la vie des affaires. Les banquiers, et plus généralement
les créanciers, exigent souvent du commerçant qu’il garantisse les crédits qu’ils lui
consentent. Or, le fonds de commerce est un bien, parfois d’une très grande valeur, et
souvent même le bien le plus important du patrimoine du commerçant. C’est donc tout
naturellement qu’il a été imaginé de l’offrir en garantie des dettes de celui-ci. Si le principe de
cette utilisation est relativement facile à exposer (A), il en va tout autrement de la mise en
œuvre de cette sûreté. Cette mise en œuvre pose, en effet, des problèmes, notamment celui
de la détermination de l’assiette du nantissement (B).

37
Introduction au droit des affaires

A- Le principe de l’utilisation du fonds de commerce comme sûreté

Le registre du commerce institué par la loi du 18 mars 19191 était destiné à recevoir
uniquement l’inscription des commerçants. Le nouveau registre du commerce et du crédit
mobilier reçoit, outre l’inscription des commerçants, celle de certaines sûretés, dont le
nantissement du fonds de commerce2. Dans le nouveau droit OHADA, le nantissement du
fonds de commerce est réglementé à la fois par des dispositions de l’Acte uniforme relatif au
droit commercial général et de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés.

Le nantissement peut être judiciaire. L’article 164 de l’Acte uniforme portant organisation
des sûretés (AUS), donne en effet la faculté à un créancier de se faire autoriser par décision
de justice à prendre une inscription de nantissement sur le fonds de commerce de son
débiteur. La nature civile ou commerciale de la créance sur le fondement de laquelle
l’autorisation est sollicitée détermine la compétence du président du tribunal civil ou celui
compétent pour les questions commerciales. La première inscription est provisoire. Une
inscription définitive doit être prise après la décision judiciaire de validation du nantissement
passée en force de chose jugée.

B- L’assiette du nantissement

L’assiette du nantissement n’est pas définie par l’AUDCG, mais par l’AUS. Aux termes de
l’article 162, AUS, « Le nantissement du fonds de commerce est la convention par laquelle le
constituant affecte en garantie d'une obligation, les éléments incorporels constitutifs du fonds de
commerce à savoir la clientèle et l'enseigne ou le nom commercial. »

On distingue donc :
1) Les éléments nécessairement grevés par le nantissement : ce sont le fonds
commercial (clientèle, nom et enseigne);
2) Les éléments nécessairement exclus du nantissement : ce sont les droits réels
immobiliers conférés ou constatés par des baux (bail emphytéotique par exemple) ou
des conventions soumises à inscription au livre foncier (hypothèques par exemple). Il
faut aussi mentionner les créances, qui de toute façon, ne font pas partie du fonds de
commerce ;
3) Enfin, le nantissement peut porter sur les autres éléments incorporels du fonds de
commerce (droit au bail commercial, brevets d’invention, marques de fabrique ou de
commerce, dessins et modèles, autres droits de propriété intellectuelle) et le
matériel. Dans le cas d’une telle extension, mention doit en être faite dans une clause
spéciale désignant les biens engagés, ainsi que dans le registre du commerce et du
crédit mobilier.

SECTION 4- LA CESSION DU FONDS DE COMMERCE

Le fonds de commerce étant souvent le seul bien important du commerçant, sa cession


(vente, apport en société…) peut être dangereuse, non seulement, pour le commerçant lui-
même, s’il n’est pas assuré de recouvrer la créance du prix, mais aussi pour les créanciers,

1 Les conditions d’application à l’A.O.F. de cette loi ont été définies par un décret en date du 15 septembre
1928, modifié par un autre en date du 20 juillet 1939.
2 Article 35, AUDCG.

38
Introduction au droit des affaires

qui eux risquent de perdre leur gage, et également, pour l’acquéreur qui n’est pas à l’abri
d’une tromperie sur la consistance ou la valeur du fonds.

De ce fait, les règles de la vente paraissent insuffisantes pour éviter ces différents écueils. Le
législateur a donc prévu un régime spécifique applicable aussi bien aux conditions qu’aux
effets de la cession du fonds de commerce.

§.1- Les conditions de la cession du fonds de commerce

Elles sont relatives au fond et à la forme.

A- Les conditions de fond

Il convient de noter que la vente du fonds de commerce est soumise à trois corps de règles :
• En premier lieu, il y a le droit commun de la vente (consentement, capacité, objet
etc.) qui relève des dispositions du droit antérieur de chaque Etat partie ;
• En second lieu, les dispositions régissant certaines activités commerciales telles que le
commerce des armes, de pharmacie, de débit de boisson, qui relèvent également de
la compétence du législateur national de chaque Etat ;
• Enfin, les dispositions des articles 166 à 176 AUS.

S’agissant spécialement de l’objet, il ne peut avoir cession de fonds de commerce que


lorsque celle-ci porte sur la clientèle, l’enseigne ou le nom commercial. Il s’agit d’un objet
obligatoire auquel les parties peuvent adjoindre d’autres éléments du fonds de commerce
comme, tels que le droit au bail, les installations et aménagements, le matériel et mobilier…

En cas de cession ne comportant pas les éléments du fonds commercial, le régime légal de
cession du fonds de commerce n’est pas applicable.

B- Les conditions de forme

La cession du fonds de commerce doit être constatée par un écrit qui peut être un acte sous
seing privé ou un acte authentique. Cet écrit doit contenir des mentions obligatoires dont
l’omission ou l’inexactitude peut entraîner la nullité de l’opération. Ces mentions sont
relatives à :
- l’identité des parties ;
- la désignation du fonds ;
- la valeur réelle du fonds ;
- le prix convenu ;
- l’identité du séquestre désigné.

La nullité qui sanctionne l’omission ou l’inexactitude des énonciations est enfermée dans des
conditions restrictives qui font penser qu’il s’agit d’une sanction facultative inapplicable
lorsque le vendeur ne s’en prévaut pas dans un délai d’un an. S’il souhaite s’en prévaloir, il
devra démontrer que le manquement a, non seulement, affecté la consistance du fonds, mais
lui a également causé préjudice.

À l’exigence de l’écrit, s’ajoutent les exigences de publicité qui se réalisent d’abord par le
dépôt des copies certifiées conformes par les parties au RCCM et la publication dans un
journal d’annonces légales. Toutefois, la loi ne précise pas quelles sanctions s’attachent à

39
Introduction au droit des affaires

l’absence de publicité. Il faut en déduire que le défaut de publicité n’affecte pas la validité de
la cession mais retarde simplement le moment de libération de l’acquéreur à l’égard des
tiers.

40
Introduction au droit des affaires

§.2- Les effets de la cession du fonds de commerce

La cession du fonds de commerce produit les effets d’une vente. La propriété du fonds est
transférée à l’acquéreur (si la vente est inscrite au RCCM, art. 166 AUS) qui s’oblige à en
payer le prix. Cependant, la cession ne doit pas préjudicier aux intérêts des tiers.

A- Les effets entre les parties

1. Les obligations des parties

L’acquéreur et le vendeur assument des obligations distinctes.

a) Les obligations de l’acquéreur

Outre l’obligation de publicité déjà signalée, la loi ne mentionne que l’obligation de payer le
prix. Il reste que la référence au droit commun contenue dans l’article 147 AUDCG implique
que l’acquéreur du fonds de commerce assume les obligations de tout acquéreur : il doit
prendre possession du fonds, payer les frais de la vente et les droits fiscaux afférents à
l’opération. Par ailleurs, lorsque l’acte de cession ne règle pas le sort des contrats en cours,
il paraît tout à fait concevable que les contrats ne présentant d’intérêt que relativement au
fonds soient repris par l’acquéreur (contrats d’assurance, contrats de travail, contrats de
fourniture…) afin de préserver la continuité de l’exploitation.

S’agissant du prix, celui-ci doit être déterminé ou déterminable comme l’exigent les règles de
droit commun. Il doit en outre être sérieux et correspondre à la valeur réelle du fonds.
Lorsque les parties décident, dans un acte séparé, d’augmenter le prix stipulé ou de
dissimuler une partie du prix, on parle de contre-lettre. Aux termes de l’article 158 AUDCG,
la contrelettre est nulle (voir dans le même sens article 1293 Code Général des Impôts du
Togo). Cette nullité n’affecte pas l’acte de cession au prix apparent. Le vendeur ne pourra
pas réclamer en justice la partie dissimulée du prix.

Le prix est payé suivant les modalités de l’article 157 AUDCG, c’est-à-dire entre les mains
d’un séquestre qui est soit un notaire, soit un établissement bancaire désigné par les parties.
Celui-ci conserve le prix pendant le délai d’opposition qui est de trente (30) jours. En dépit
des frais supplémentaires que peut générer le recours à un tiers, ce système procure deux
avantages : le dépôt préalable est de nature à rassurer le vendeur que l’acquéreur dispose du
prix et est prêt à le payer ; de plus, le montant déposé chez un séquestre sort du patrimoine
de l’acquéreur et échappe ainsi à ses éventuels créanciers.

b) Les obligations du vendeur

L’obligation première du vendeur est de mettre le fonds cédé à la disposition de l’acheteur à


la date prévue dans l’acte de cession : c’est l’obligation de délivrance. Celle-ci est renforcée
par un certain nombre d’obligations prévues par les articles 155 et 156 AUDCG. Deux
obligations résultent de l’article 155 AUDCG : En premier lieu, il y a la garantie du fait
personnel. Le vendeur ne doit rien faire qui puisse troubler l’acquéreur dans l’exercice des
droits qu’il a acquis du fait de la cession. Ainsi par exemple, il ne saurait se permettre de
détourner la clientèle du fonds. En cédant son fonds, le vendeur contracte l’obligation de ne
pas se rétablir de manière à conserver en partie ou en totalité la clientèle attachée au fonds
cédé. Il ne peut cependant lui être interdit de se rétablir. Lorsque les parties prévoient une

41
Introduction au droit des affaires

clause de non-rétablissement, celle-ci doit être limitée dans le temps et dans l’espace pour
être valable. Le législateur allège cette condition en édictant qu’"une seule de ces limitations
suffit pour rendre la clause valable".

Par ailleurs, le vendeur est garant, non seulement du trouble qu’il peut causer lui-même, mais
également de celui causé par un tiers qui revendiquerait par exemple la propriété du fonds.
La garantie des vices cachés que mentionne l’article 156 AUDCG connaît une extension
importante puisqu’elle couvre également l’inexactitude des énonciations figurant dans l’acte
de vente.

2. Les garanties de paiement du vendeur

Le vendeur impayé bénéficie de deux garanties spéciales : le privilège du vendeur et l’action


résolutoire. Lorsqu’il est inscrit au RCCM (167 AUS), le privilège protège le vendeur contre
tous les nantissements qui pourraient être consentis par l’acquéreur et contre les aliénations
du fonds. En cas de non-paiement, le vendeur peut obtenir la résolution de la cession
conformément au droit commun. Cependant, il court le risque de se heurter aux créanciers
de l’acquéreur notamment à ceux qui sont inscrits sur le fonds. C’est la raison pour laquelle
la loi exige que les créanciers soient préalablement avertis de l’exercice de cette action par
la notification prévue à l’article 168 AUS. Une fois la résolution obtenue, celle-ci doit être
publiée au RCCM.

B- Les effets de la vente du fonds de commerce à l’égard des tiers

Le fonds de commerce étant également un moyen de crédit, les tiers créanciers sont
intéressés à sa cession. La publicité à laquelle donne lieu la vente du fonds est d’ailleurs en
grande partie destinée à les informer et surtout à leur permettre de s’opposer à cette
opération.

Le législateur confère le droit d’opposition à tout créancier sans autre précision. Il va de soi
que seuls sont concernés les créanciers privilégiés ou non, titulaires d’une créance exigible et
certaine au moins dans son principe. L’opposition doit être formée dans un délai de trente
(30) jours à compter de la parution de la publicité de la vente dans un journal d’annonces
légales (art. 159 AUDCG). L’opposition doit être notifiée au séquestre, à l’acquéreur et au
greffe du tribunal. Elle a pour effet de rendre le prix indisponible. Cette situation de gel reste
maintenue jusqu’à la mainlevée amiable ou judiciaire. Toutefois, si l’opposant ne saisit pas la
juridiction compétente dans un délai d’un mois à compter de la notification, le vendeur
pourra demander la mainlevée judiciaire de l’opposition.

Par ailleurs, le créancier opposant, privilégié ou nanti, dispose du droit de surenchère après
la publication de la vente ou après adjudication. La nouvelle vente se déroulera
conformément aux dispositions de l’Acte uniforme portant sur les procédures de
recouvrement et des voies d’exécution (AURVE).

42
Introduction au droit des affaires

SOUS-CHAPITRE 2

LA VENTE COMMERCIALE

L'originalité de l'Acte Uniforme portant sur le Droit Commercial Général, c'est de


renfermer un corps de règles destinées à régir la seule vente commerciale. Ces règles
contenues dans les articles 234 à 302 dérogent sur bien des points au droit commun de la
vente. C'est pourquoi les rédacteurs de l'Acte Uniforme ont pris soin de délimiter avec
précision leur domaine d'application.

Il résulte de l'article 234 que seuls les contrats de vente entre commerçants sont soumis à
cette réglementation nouvelle. L’article 235 décide ainsi que les dispositions de l'Acte
Uniforme régissant la vente commerciale ne s'appliquent pas aux ventes de marchandises
achetées pour un usage personnel, familial ou domestique. L’alinéa 2 de ce texte prévoit en
outre que les dispositions de l’AUDCG ne régissent pas les contrats dans lesquels la part
prépondérante de l'obligation de la partie qui fournit les marchandises consiste dans une
fourniture de main-d'œuvre ou d'autres services.

À ces exclusions, il convient d’ajouter la liste dressée par l’article 236 :

• les ventes aux enchères ;


• les ventes sur saisie ou de quelque autre manière par autorité de justice ;
• les ventes de valeurs mobilières, d’effets de commerce ou de monnaies ;
• les mobilisations et autres opérations sur créances ou instruments financiers ;
• les ventes de navires, bateaux, aéroglisseurs et aéronefs ;
• les ventes d’électricité.

Les règles fixées par les articles 234 et suivants de l'Acte Uniforme ne s'appliquent qu'aux
ventes commerciales, mais elles ne sont pas les seules à s'y appliquer. En effet, l'article 237
prévoit aussi l'application des règles du droit commun en la matière.

Ainsi, les dispositions de l'Acte uniforme et celles non contraires du droit commun de la
vente doivent être combinées avec les usages auxquels renvoient les articles 238 et 239
pour analyser la formation et les effets de la vente commerciale…/…

SECTION 1- LA FORMATION DU CONTRAT

L'Acte Uniforme ne comporte pas moins de 9 articles consacrés au mécanisme de formation


du contrat. En revanche, en ce qui concerne les conditions de validation, il ne prévoit
pratiquement aucune règle, ce qui oblige l'analyste à se tourner vers le droit national.

43
Introduction au droit des affaires

§.1- Le mécanisme de formation du contrat

Les rédacteurs de l'Acte Uniforme ont décrit le mécanisme de formation du contrat de


vente commerciale en définissant avec précision l'offre et l'acceptation.

A- L'offre

C'est une proposition de conclure un contrat, adressée à une ou plusieurs personnes. Une
telle proposition ne produit cependant d'effet qu'à la double condition d'être suffisamment
précise et d'indiquer la volonté de son auteur d'être lié en cas d'acceptation.

Si la deuxième condition ne semble pas poser de problème particulier, il n'en est pas de
même de la première. C'est pourquoi, les rédacteurs de l'Acte Uniforme ont pris le soin de
la définir en ces termes : Une offre est suffisamment précise lorsqu'elle désigne les
marchandises et, expressément ou implicitement, fixe la quantité et le prix ou donne les
indications permettant de les déterminer (art. 241 alinéa 2).

L'offre prend effet lorsqu'elle parvient à son destinataire. Elle prend fin soit à l'initiative de
l'offrant, soit à l'initiative du destinataire. On parlera alors de révocation ou de rejet selon le
cas. La révocation peut intervenir dans deux cas :

• si la volonté de l'offrant de se rétracter est connue du destinataire avant que celui-ci


n'ait expédié son acceptation;

• si le délai prévu pour l'acceptation est expiré sans acceptation.

Il convient d'observer que l'offrant ne peut se rétracter si l'offre précise qu'elle est
irrévocable ou si elle fixe un délai déterminé pour l'acceptation.

Le rejet qui est le fait du destinataire met fin à l'offre, même si celle-ci est irrévocable,
lorsqu'il parvient à l'offrant.

B- L'acceptation

Elle consiste en une déclaration ou en tout autre comportement du destinataire indiquant


qu'il acquiesce à une offre (art. 243 alinéa 1er).

Le silence ou l'inaction ne peut, à lui seul, valoir acceptation.

L'acceptation prend effet (forme le contrat) au moment où l'indication d'acquiescement


parvient à l'auteur de l'offre (art. 244, alinéa 1er).

Il faut toutefois, pour cela, qu'elle parvienne à son destinataire dans le délai fixé par l'offrant ;
si aucun délai n'est fixé, elle doit parvenir dans un délai raisonnable compte tenu des
circonstances de la transaction ou du moyen de communication utilisé. En tout état de
cause, l'offre verbale doit être immédiatement acceptée à moins que les circonstances
n'impliquent le contraire.

Le destinataire de l'offre doit veiller au contenu de sa réponse puisque le sort du contrat en


dépend. Si la réponse contient des éléments complémentaires ou différents n'altérant pas

44
Introduction au droit des affaires

substantiellement les termes de l'offre, elle vaut acceptation.

En revanche, si elle contient des additions, des limitations ou autres modifications, elle
équivaut à un rejet de l'offre et constitue une contre-proposition.

Le destinataire qui se ravise peut rétracter son acceptation dans les conditions prévues par
l'article 247. Ce texte prévoit, en effet, que l’acceptation peut être révoquée pourvu que la
révocation parvienne à l’auteur de l’offre au plus tard au moment où l’acceptation aurait pris
effet.

45
Introduction au droit des affaires

§.2- Les conditions de validité

Elles sont de deux ordres : les conditions de fond et les conditions de forme.

A- Les conditions de fond

L'Acte Uniforme sur le Droit Commercial Général prévoit très peu de conditions de fond
particulières. Les règles du droit commun ont, dès lors, vocation à s'appliquer (art. 237).

Il convient, cependant, de signaler l'existence de l'article 238 qui fixe les règles
d'interprétation de la volonté des parties.

Il résulte de ce texte que la volonté et le comportement d'une partie doivent être


interprétés selon l'intention de celle-ci lorsque l'autre connaissait ou ne pouvait ignorer
cette intention. À défaut, ils doivent être interprétés selon le sens qu'une personne
raisonnable, de même qualité que l'autre partie placée dans la même situation, leur aurait
donnés.

Pour déterminer l'intention d'une partie ou celle d'une personne raisonnable, on doit tenir
compte des circonstances de fait et notamment des négociations qui ont pu avoir lieu, des
pratiques qui ont pu être établies entre elles, voire des usages en vigueur dans la profession
concernée.

B- Les conditions de forme

Aucune condition de forme particulière n'est exigée. Le contrat de vente de marchandises


peut donc être verbal ou écrit. Le terme « écrit » doit s'entendre de toute communication
utilisant un support écrit, y compris le télégramme, le télex, la télécopie ou l’e-mail.

L'écrit n'est pas exigé non plus pour la preuve du contrat. L'article 240 est clair sur ce point
: en l'absence d'écrit, il peut être prouvé par tous moyens y compris le témoignage.

SECTION 2- LES EFFETS DU CONTRAT

Lorsqu'elle est régulièrement formée, la vente commerciale produit des effets sur la
situation des parties et le sort des marchandises.

§.1- La situation des parties

Chacune des parties supporte des obligations dont l'inexécution donne lieu à des sanctions.

A- Les obligations des parties

Les obligations qui pèsent sur le vendeur ont pour contrepartie, celles que l’acquéreur est
appelé à assumer.

1. Les obligations du vendeur

46
Introduction au droit des affaires

De par les dispositions de l’article 250, AUDCG, le vendeur doit assumer trois sortes
d’obligations : une obligation de livraison, une obligation de conformité et une obligation de
garantie.

a) L'obligation de livraison

Le vendeur doit livrer les marchandises et remettre, s'il y a lieu, les documents s'y
rapportant. L’Acte Uniforme édicte une réglementation très détaillée en la matière.

Il est possible que le contrat ait prévu un lieu déterminé ; dans ce cas, la livraison doit y être
effectuée (article 251). À défaut, le vendeur doit tenir les marchandises à la disposition de
l'acquéreur au lieu de fabrication, de stockage ou au siège de son activité de vendeur, sauf si
le contrat prévoit un transport desdites marchandises. C’est ainsi qu’il a été jugé que
l’acheteur qui, en l’absence de convention particulière, n’a pas pris livraison au domicile du
vendeur, ne peut poursuivre celui-ci pour défaut de livraison (TGI Mfoundi, n° 246 du 04
mars 2002 : Ohada.com/Ohadata J-04-216).

Le moment de la livraison est fixé par l'article 253. Il résulte de ce texte que le vendeur doit
livrer les marchandises à la date qui est fixée par le contrat ou à celle qui est déterminable
par référence aux stipulations contractuelles. Si une période de temps est fixée ou
déterminable par référence au contrat, la livraison peut avoir lieu à un moment quelconque
au cours de cette période. Dans tous les autres cas, la livraison doit être faite dans un délai
raisonnable.

L'Acte Uniforme ne comporte aucune disposition interdisant au vendeur de demander un


délai de grâce.

b) L'obligation de conformité

Le vendeur doit livrer les marchandises dans la quantité, la qualité, la spécification, le


conditionnement et l'emballage correspondant à ceux prévus au contrat.

Le vendeur est responsable de tout défaut de conformité existant au moment du transfert


des risques, même si ce défaut n'apparaît qu'ultérieurement (article 256), mais il peut
toujours réparer son manquement en cas de livraison anticipée (article 257).

L'acheteur, en ce qui le concerne, doit examiner les marchandises ou les faire examiner et
dénoncer tout défaut de conformité dans le délai d’un mois suivant la livraison. L’action de
l’acheteur fondée, fondée sur un défaut de conformité caché le jour de la prise de livraison,
est prescrite dans le délai d’un an à compter du jour où ce défaut a été constaté ou aurait
dû l’être (art. 259, AUDCG).

c) L'obligation de garantie

Elle est double : Le vendeur doit, d'une part, livrer les marchandises libres de tout droit ou
prétention d'un tiers, à moins que l'acheteur n'accepte de prendre les marchandises dans ces
conditions. Le vendeur doit, d'autre part, la garantie du vice caché de la chose vendue.

Cette garantie profite à l'acheteur contre le vendeur, mais aussi au sous-acquéreur contre le

47
Introduction au droit des affaires

fabricant ou un vendeur intermédiaire pour le vice caché affectant la chose dès sa


fabrication. Une clause limitative de garantie peut être insérée dans le contrat. Mais, pour en
bénéficier, le vendeur qui invoque une telle clause, doit démontrer que l’acheteur a connu et
accepter cette clause lors de la conclusion de la vente (art. 261).

48
Introduction au droit des affaires

1. Les obligations de l'acquéreur

Il a deux obligations : payer le prix et prendre livraison des marchandises.

a) L’obligation de payer le prix

L'acquéreur doit, non seulement payer le prix, mais aussi prendre toutes les mesures ou
accomplir toutes les formalités préalables au paiement effectif du prix.

Cette obligation de payer le prix n'est pas subordonnée à l'introduction d'une demande ou à
l'accomplissement d'une formalité de la part du vendeur.

Selon l'article 266, le lieu du paiement est, sauf stipulation contraire, l'établissement du
vendeur ou, dans certains cas, le lieu de la livraison ou de la remise de la marchandise.

Le prix est en principe payable au moment où le vendeur met à la disposition de l'acquéreur


les marchandises ou les documents qui les représentent.

Lorsque le contrat de vente prévoit la remise des marchandises à un transporteur, le


vendeur peut subordonner leur expédition ou la remise à l’acheteur du document qui les
représente au paiement préalable du prix.

Les parties peuvent aussi prévoir que l'acheteur n’est tenu de payer le prix qu'après avoir été
mis en mesure d'examiner les marchandises.

b) La prise de livraison

Elle consiste à accomplir tout acte qu'on peut raisonnablement attendre de lui pour
permettre au vendeur d'effectuer la livraison et à retirer les marchandises.

Si l'acquéreur tarde à prendre livraison des marchandises ou n’en paie pas le prix, le vendeur
doit prendre les mesures nécessaires raisonnables pour en assurer la conservation ; il sera
fondé alors à les retenir jusqu'à leur complet paiement et au remboursement des frais de
conservation (article 271 Acte Uniforme).

À cet égard, le législateur distingue l'inexécution et le retard dans l'exécution des obligations
des parties et prévoit deux types de sanctions.

2. L'inexécution des obligations

Les rédacteurs de l'Acte uniforme ont prévu deux types de règles pour sanctionner
l'inexécution des obligations résultant du contrat : des règles générales et des règles
spéciales.

a) Les règles générales

Elles concernent les sanctions prévues et la mise en œuvre de ces sanctions.

• Les sanctions prévues

49
Introduction au droit des affaires

Il y a d'abord « l'exception d'inexécution » : une partie peut demander à la juridiction


compétente l'autorisation de différer l'exécution de ses propres obligations lorsqu'il
apparaît, après la conclusion du contrat, que l'autre partie n'exécutera pas une partie
essentielle de ses obligations du fait d'une grave insuffisance dans la capacité d'exécution, de
son insolvabilité ou de la manière dont elle s'apprête à exécuter ou exécute le contrat.

Il est assez rare de constater une disposition législative subordonnant l'exception


d'inexécution à l'autorisation préalable du juge. Cela s'explique ici certainement par son
caractère préventif.

Il y a ensuite la résolution. Selon l'article 246 de l'Acte Uniforme,« si avant la date de


l'exécution du contrat, il est manifeste qu'une partie commettra un manquement essentiel à
ses obligations, l'autre partie peut demander à la juridiction compétente la résolution de ce
contrat ».

Il y a lieu de souligner là aussi, le caractère préventif de cette mesure qui est assez
inhabituelle.

Les conséquences de la résolution sont prévues par les articles 269 et 270.

Il y a enfin les sanctions pécuniaires. Elles peuvent prendre deux formes :

. soit le paiement d'intérêts : lorsqu'une partie ne paie pas le prix ou toute


autre somme due, l'autre partie a droit à des intérêts calculés au taux légal
applicable en matière commerciale ;

. soit le paiement de dommages et intérêts : une partie peut être


condamnée au paiement de dommages et intérêts lorsqu'il y a un
manquement à ses obligations ; ceux-ci sont égaux à la perte subie ou au
gain manqué par l'autre partie.

Une exonération de responsabilité est prévue par l'article 267 au profit de


la partie qui prouve que l'inexécution de ses obligations est due au fait d'un
tiers ou à un cas de force majeure.

50
Introduction au droit des affaires

• La mise en œuvre de l'action

L'article 274 alinéa, 1er de l'Acte Uniforme soumet les actions en matière de vente
commerciale à une courte prescription. Celle-ci est de 2 ans; son point de départ, c'est la date
à laquelle l'action peut être exercée.

a) Les règles spéciales

Venant s'ajouter aux règles générales, elles ont pour objet de régler les difficultés d'exécution
de la vente commerciale, qu'elles soient le fait du vendeur ou de l'acquéreur.

L'inexécution des obligations du vendeur est prévue par les articles 249 à 255. C.es textes
visent les manquements dans les livraisons successibles, le défaut de conformité, etc.

L'inexécution des obligations de l'acheteur est prévue par les articles 256 et suivants.

§.2- Le sort des marchandises

Les rédacteurs de l'Acte Uniforme ne traitent que du transfert de propriété et du transfert


des risques dans le Titre IV consacré aux effets du contrat, même si cette notion dépasse
largement ces deux questions.

A- Le transfert de propriété

L'article 283 pose la règle selon laquelle le transfert de propriété s'opère dès la prise de
livraison de la marchandise par l'acquéreur. Mais cette règle réserve la possibilité d'une
convention contraire. Les parties peuvent par exemple, convenir de reporter le transfert
jusqu'au paiement complet du prix en insérant une clause de réserve de propriété dans le
contrat.

Cette clause n'aura d'effet entre les parties que si l'acheteur en a eu connaissance par sa
mention dans le contrat de vente, le bon de commande, le bon de livraison, et au plus tard le
jour de cette livraison. Il convient de signaler que l'article 359 du CDCC ne subordonne pas
la validité de la clause de réserve de propriété à un tel formalisme.

Vis-à-vis des tiers, la clause de réserve de propriété ne sera opposable que si elle a été
régulièrement publiée au RC.C.M. conformément aux dispositions du Livre II de l'Acte
Uniforme. Le vendeur qui accomplit cette formalité de publicité est particulièrement bien
protégé car il pourra s'en prévaloir, à notre avis, même à l'égard du tiers de bonne foi. Il faut
rappeler à cet égard que l'article 360 alinéa 1er du COCC déclare la clause de réserve de
propriété inopposable aux tiers de bonne foi.

B- Le transfert des risques

Malgré l'intitulé de l'article 345, le COCC ne comporte aucune disposition spécifique à la


vente et traitant du transfert des risques. Il faut donc appliquer le droit commun et notamment
l'article 109 selon lequel le transfert des risques de la chose est lié au transfert de propriété,
qu'il se produise au moment de la délivrance ou à tout autre moment fixé par l'accord des
parties.

51
Introduction au droit des affaires

Dans l'Acte Uniforme, on trouve une règle comparable à celle qui est contenue dans l'article
109 du COCC; il s'agit de la règle prévue par l'article 285 alinéa 1er; selon ce texte, le transfert
de propriété entraîne le transfert des risques.

La conséquence logique que les rédacteurs de l'AU. déduisent de ce texte, c'est qu'à partir du
transfert de propriété, la perte ou la détérioration des marchandises ne dispense pas
l'acheteur de payer le prix, sauf si ces événements sont dûs à un fait du vendeur.

L'article 285 est complété par d'autres dispositions destinées à régler les problèmes
particuliers liés au transport des marchandises, au moment de la vente et à l'objet de la vente.

Lorsque le contrat de vente implique un transport des marchandises, les risques sont
transférés à l'acheteur à partir de la remise des marchandises au premier transporteur (article
286alinéa1er).

Lorsque les marchandises sont vendues en cours de transport, les risques sont transférés à
l'acheteur à partir du moment où le contrat est conclu, sauf si le vendeur qui a eu connaissance
ou qui aurait dû avoir connaissance de la détérioration, n'en a pas informé l'acheteur (article
287).

Lorsque la vente porte sur des marchandises non encore individualisées, le transfert des
risques n'intervient qu'après leur identification, car elles ne sont réputées avoir été mises
à la disposition de l'acheteur que lorsqu'elles ont été clairement identifiées aux fins du contrat
(article 288).

52

Vous aimerez peut-être aussi