Produits Pseudo Euclidiens
Produits Pseudo Euclidiens
Produits Pseudo Euclidiens
Produits scalaires
pseudo-euclidiens
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Exemples :
1. Le produit scalaire canonique
(x1 , . . . , xn ); (y1 , . . . , yn ) −7 → x 1 y1 + x 2 y2 + · · · + x n yn
2. L’application
(x1 , x2 ); (y1 , y2 ) −7 → x 1 y2 + y 1 x2
2
Si X et Y sont les vecteurs Pcolonnes de P R n exprimant les coordonnées
dans la base B de vecteurs x = xi ei , y = yi ei de E, la bilinéarité de φ
entraı̂ne :
φ(x, y) = t XMBφ Y =
X
φi,j xi yj . (4)
i,j
donc MBφ détermine entièrement φ. C’est la seule matrice vérifiant (4) pour
tous les couples de vecteurs de E.
Soit B 0 = (e01 , . . . , e0n ) une autre base de E, P ∈ GL(n, R) la matrice de
changement de base de B à B 0 et X 0 les coordonnées de x dans B 0 , de sorte
que X = P X 0 .
On a alors φ(x) = t XMBφ Y = t X 0 t P MBφ P X 0 donc :
2 Produits scalaires
2.1 Définition
Définition 3 — Soit φ une forme bilinéaire symétrique sur E dont on note
Q la forme quadratique. On dit que φ est :
– positive [resp. négative] si Q(x) > 0 [resp. 6 0] pour tout x ∈ E ;
– définie positive [resp. définie négative] si Q(x) > 0 [resp. < 0] pour tout
x 6= 0 ;
– non dégénérée si aucun vecteur x 6= 0 ne vérifie : ∀y ∈ E, φ(x, y) = 0.
On appelle produit scalaire (pseudo-euclidien) une forme bilinéaire symé-
trique non dégénérée.
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Fig. 2 – Une forme quadratique définie positive (à gauche) et une forme
dégénérée (à droite)
Il faut noter que φ est non dégénérée si et seulement si elle est de rang n,
i.e. si son discriminant est non nul. Si φ est définie, elle est nécessairement
non dégénérée.
Si φ est définie, positive ou négative, et si F est un sous-espace de E, la
restriction de φ à F × F notée φ|F garde cette propriété. Mais si φ est non
dégénérée, il peut très bien exister un sous-espace F de E tel que φ |F soit
dégénérée (il y en a même toujours si φ n’est pas définie : la droite engendrée
par un vecteur x non nul vérifiant Q(x) = 0 en est un exemple). Ainsi un
produit scalaire non euclidien n’induit pas un produit scalaire sur tous les
sous-espace de E. On introduit en conséquence la terminologie suivante.
Définition 4 — On dit d’un sous-espace sur lequel la restriction de φ est
non dégénérée qu’il est non dégénéré.
De même, on dit d’un espace sur lequel la restriction de φ est définie positive,
définie négative, positive ou négative qu’il est lui-même respectivement défini
positif, défini négatif, positif ou négatif.
4
Fig. 3 – Un sous-espace non dégénéré (à gauche) et un sous-espace défini
positif (à droite)
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Fig. 4 – Un plan et sa droite orthogonale (à gauche), un plan dégénéré et
sa droite orthogonale (à droite)
qui est un système linéaire de rang k car φ étant non dégénéré sa matrice
est inversible. Donc la dimension de F ⊥ est n − k où k est la dimension de
F. ⊥ ⊥
Il est clair que F ⊥ F ⊥ , donc F ⊆ F ⊥ . Mais dim F ⊥ = n − (n −
⊥
dim F ) = dim F donc en fait F = F ⊥ .
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puisqu’en général ce n’est pas une norme. Un vecteur est unitaire s’il est de
norme 1.
On dit d’une famille de vecteurs de E qu’elle est orthogonale si les vec-
teurs qui la composent sont deux à deux orthogonaux. Si φ est un produit
scalaire et si de plus les vecteurs sont unitaires, on dit que la famille est
orthonormale.
Dans le cas pseudo-euclidien, on voit facilement qu’une famille orthonor-
male est toujours libre. Ainsi on appelle base orthonormale de E une famille
orthonormale à n éléments.
Proposition 9 — Tout produit scalaire admet une base orthonormale.
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Fig. 5 – Deux formes semi définies définies dégénérées (signature (0, 1, 2) à
gauche, (2, 0, 1) à droite)
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2.4 Traduction dans l’écriture polynômiale
Soit φ un produit scalaire, Q sa forme quadratique, (e i )i une base ortho-
normale. On note comme précédemment ε i = Q(ei ) = ±1.
Pour tout
P vecteur x ∈ E, comme φ est non dégénéré et que pour tout j
on a φ(x − εi φ(x, ei )ei , ej ) = 0,
n
X
x= εi φ(x, ei )ei (7)
i=1
Ainsi on a
n
X
Q(x) = εi φ(x, ei )2 (8)
i=1
P 2
et on voit que la forme quadratique de φ s’écrit sous la forme Q = ±li où
∗
les li forment une base du dual E de E.PAutrement dit, il existe une base de
E dans laquelle on peut écrire Q(x) = ±x2i où les xi sont les coordonnées
de x dans la base en question.
Donnons une méthode pratique pour établir une telle écriture à partir
de la donnée de Q. Dans une base B = (e i )i quelconque, on peut écrire
Q(x) sous la forme d’un polynôme homogène de degré 2 en (x 1 , . . . , xn ), les
coordonnées de x dans B.
Si Q(x) admet un terme carré, de la forme ax 2i , on écrit (en se plaçant
dans le cas i = 1 pour simplifier l’écriture)
9
On obtient bien une famille libre de formes linéaires, car dans la base
duale de B elle s’écrit de façon étagée (la première forme est la seule à
dépendre de x1 , les deux premières sont les seules à dépendre de x 1 et x2 ,
etc.)
Cette méthode fonctionne sans utiliser l’hypothèse de non dégénérescen-
ce, et permet donc de démontrer la remarque du théorème A.
Démonstration : Il suffit de voir que si p et q sont tous les deux non nuls,
il existe nécessairement un vecteur isotrope. Or il existe alors deux vecteurs
unitaires orthogonaux e+ et e− de carrés respectifs 1 et −1. Alors e + +e− est
non nul et la bilinéarité donne φ(e + +e− , e+ +e− ) = φ(e+ , e+ )+2φ(e+ , e− )+
φ(e− , e− ) = 1 + 0 − 1 = 0 donc e+ + e− est isotrope.
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Pour les sous-espaces isotropes, on utilise la méthode de la démonstration
de la proposition 12. Soit l = min(p, q). Une base orthonormale nous donne
en particulier une famille orthonormale libre de vecteurs
(e+ − + − + −
1 , e1 , e2 , e2 , . . . , e l , el )
où les e+ −
i sont de carré 1 et les ei de carré −1. Alors la famille
(e+ −
i + ei )16i6l
3 Groupes orthogonaux
Étant donné un produit scalaire φ sur E, on s’intéresse au groupe O(φ)
des endomorphismes qui préservent φ (on parle d’isométries).
Remarquons que préserver φ est équivalent à préserver sa forme quadra-
tique Q. Un sens est évident, l’autre découle de l’identité de polarisation.
Soit B une base de E et M la matrice de φ dans cette base. Alors si
X et Y sont les vecteurs coordonnées d’éléments x et y de E, on a vu que
φ(x, y) = t XM Y . Soit b une application linéaire de E dont on note B la
matrice dans la base B. Alors b préserve φ si pour tous les couples de vecteurs
de E on a φ(b(x), b(y)) = φ(x, y), autrement dit si t BM B = M .
D’après le théorème A il existe une base pour laquelle M = I p,q où (p, q)
est la signature de φ. Ceci justifie la définition suivante.
Définition 14 — On note O(p,q) le groupe des matrices réelles carrée B
de dimension n (où n = p + q) telles que
t
BIp,q B = Ip,q (9)
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sous-groupe isomorphe à O(p) × O(q) et que SO 0 (p,q) contient un sous-
groupe isomorphe à SO(p) × SO(q).
Comme dans le cas euclidien, on peut caractériser les éléments de O(p,q)
par leur action sur les bases.
Proposition 15 — Soit (e1 , . . . , en ) une base de E orthonormale pour φ.
Un endomorphisme a de E est une isométrie si et seulement s’il envoie
(e1 , . . . , en ) sur une base orthonormale pour φ en respectant le carré de ses
éléments (Q(a(ei )) = Q(ei ) pour tout i).
tout en fixant les ei pour i > p. On se ramène ainsi au cas où e 0 = e1 (voir
figure).
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C
f−ce’
f
Passage de e à e0 . C est le cône iso-
e’
trope, D le sous-espace défini positif
e
D engendré par les (ei )i6p .
P
On peut alors écrire f = ce1 + i>p yi ei . Alors f −ce1 est orthogonal à e1
et quitte à se placer dans une nouvelle base orthonormale on peut supposer
que f s’écrit f = ce1 + sen , avec nécessairement c2 − s2 = 1.
Il existe donc un réel t0 tel que c = cosh(t0 ) et s = sinh(t0 ). La famille at
d’isométries définie par at (ei ) = ei pour i 6= 1 et i 6= n, at (e1 ) = cosh(t)e1 +
sinh(t)en et at (en ) = sinh(t)e1 + cosh(t)en constitue un chemin continu
d’isométries entre l’identité a 0 et at0 , qui envoie e0 sur f .
La situation est différente lorsque q = 1, ce cas est traité à la section
suivante.
4 Produits lorentziens
Un cas particulier est très étudié car il est au cœur de la théorie de la
relativité. Il s’agit du cas pseudo-euclidien le plus proche du cas euclidien,
c’est-à-dire la signature (p, 1).
Définition 16 — On appelle produit scalaire lorentzien (ou parfois seule-
ment produit lorentzien) un produit scalaire de signature (p, 1).
On peut être plus précis : l’ensemble des vecteurs de carré négatif com-
porte exactement deux composantes connexes : chaque surface de niveau
négative est un hyperboloı̈de à deux nappes de codimension 1 (voir la figure
1).
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Cela montre que la conclusion du théorème B n’a pas lieu : l’action de
SO0 (p,1) n’est pas transitive sur l’ensemble des vecteurs de carré −1.
Cette propriété est fondamentale, car elle correspond à l’orientation du
temps.
Définition 18 — Soit φ un produit lorentzien sur E. On dit d’un vecteur
x qu’il est :
– de type temps si son carré est strictement négatif ;
– de type lumière si son carré est nul (i.e. si x est isotrope) ;
– de type espace si son carré est strictement positif.
On dit qu’un sous-espace est de type temps, lumière ou espace si tout ses
vecteurs non nuls sont de ce type.
5 Équivalence conforme
Dans cette section on s’intéresse aux produits scalaires à une constante
multiplicative près.
Définition 19 — On dit que deux produits scalaires φ 1 , φ2 définis sur
le même espace E sont conformément équivalents s’ils sont égaux à une
constante multiplicative non nulle près :
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Inversement supposons qu’ils aient même cône isotrope. On note Q 1 et
Q2 leurs formes quadratiques, (p, q) la signature de φ 1 et on considère une
base orthonormée (e1 , . . . , ep , f1 , . . . , fq ) de φ1 où les ei sont de carré 1 et
les fi de carré −1. On va montrer que dans cette base la matrice de φ 2 est
proportionnelle à celle de φ1 .
Pour tout couple (i, j) convenable on a Q 1 (ei + fj ) = Q1 (ei − fj ) = 0
donc Q2 (ei + fj ) = Q2 (ei − fj ) = 0.
En développant on obtient
Q2 (ei ) + Q2 (fj ) + 2φ2 (ei , fj ) = 0
Q2 (ei ) + Q2 (fj ) − 2φ2 (ei , fj ) = 0
d’où Q2 (ei ) = −Q2 (fj ) et φ2 (ei , fj ) = 0.
Ainsi la matrice de φ2 dans la base (e1 , . . . , ep , f1 , . . . , fq ) est de la forme
A 0
0 B
où A et B sont des matrices carrées de dimension respective p et q et ou
chaque coefficient diagonal de A est l’opposé de chaque coefficient diagonal
de B. Donc il existe un réel λ tel que tous les coefficients diagonaux de A
soient égaux à λ et tous ceux de B à −λ. √
√ triplet (i, j, k) convenable on a Q 1 (ei + ej + 2fk ) = 0
De plus pour tout
donc Q2 (ei + ej + 2fk ) = 0.
En développant on obtient
0 = Q2 (ei ) + Q2 (ej ) + 2Q2 (fk ) + 2φ2 (ei , ej )
√ √
+2 2φ2 (ei , fk ) + 2 2φ(ej , fk )
= 2φ2 (ei , ej )
donc φ(ei , ej ) = 0 pour tous les (i, j) et A est diagonale.
De même on montre que B est diagonale.
Enfin λ est non nul car sinon φ2 serait nulle et aurait tout E comme
cône isotrope.
Le signe de la constante λ est facile à déterminer : si un quelconque
vecteur de carré positif pour φ1 est également de carré positif pour φ 2 , alors
λ > 0, sinon λ < 0.
Exercices
1. Surfaces de niveau
Soient φ un produit scalaire de forme quadratique Q et x un vecteur non
nul. Montrer qu’au voisinage de x la surface de niveau de x est une sous-
variété et que la direction de son espace tangent est exactement l’orthogonal
de x.
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2. Espace des produits scalaires
On interprète l’espace Sym(n) des matrices n × n symétriques comme
l’espace des formes quadratiques sur R n .
1. Montrer que le sous-ensemble SND(n) de Sym(n) correspondant aux
produits scalaires n’est pas connexe.
2. Montrer que la signature est une fonction localement constante sur
SND(n). En déduire les composantes connexes de SND(n).
3. Décrire l’adhérence dans Sym(n) dechacune des composantes connexes
de SND(n).
Corrections
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2.
1. Le déterminant d’une matrice est un polynôme en ses coefficients, donc
l’application déterminant de Sym(n) dans R est continue. L’image de
SND(n) par cette application est R \ {0} donc comme l’image continue
d’un connexe est connexe, SND(n) n’est pas connexe.
2. Soit M ∈ SND(n) une matrice de signature (p, q) dont on note Q la
forme quadratique. Soient E+ un sous-espace de E de dimension p sur
lequel M est définie-positive et E− un sous-espace de E de dimension
q sur lequel M est définie-négative.
Soit A+ l’application définie sur Sym(n) par N 7→ inf Q( t xN x), où
la borne inférieure est prise sur tous les vecteurs x ∈ E + tels que
Q(x) = 1. Alors A+ est continue et vaut 1 en M . Il existe donc un
voisinage V+ de M dans Sym(n) sur lequel A+ ne s’annule pas. Ce
voisinage est donc formé de matrices symétriques dont la restriction à
E+ est définie positive. De la même façon on montre qu’il existe un
voisinage V− formé de matrices dont la restriction à E − est définie
négative.
Le voisinage V+ ∩ V− de M est donc formé de matrices de signature
(p, q) (et est en particulier inclu dans SND(n)), on a donc montré que
la signature est localement constante sur SND(n).
En particulier, deux matrices symétriques non dégénérées de signatures
différentes ne sont pas dans la même composante connexe de SND(n).
Notons Cp,q la composante connexe de la matrice I p,q ; les composantes
connexes de SND(n) sont exactement les C p,q . Pour le démontrer, il
suffit de trouver un chemin continu reliant n’importe quelle matrice
M de signature (p, q) à Ip,q . Or on sait qu’on peut écrire M = t P Ip,q P
avec P ∈ GLn (R). De plus GLn (R) a exactement deux composantes
connexes par arc, celle de la matrice identité I et celle de −I. Si P est
dans la première, il existe un chemin continu P (t) avec P (0) = P et
P (1) = I. On dispose alors d’un chemin continu M (t) = t P (t)Ip,q P (t)
avec M (0) = M et M (1) = Ip,q . De la même façon, si P est dans la
composante connexe de −I on utilise un chemin reliant P et −I pour
construire un chemin reliant M et (−I)I p,q (−I) = Ip,q , cqfd.
3. Ordonnons les signatures par la relation : (p 0 , q 0 ) 6 (p, q) si p0 6 p et
q 0 6 q.
De la même manière qu’on a montré que la signature est localement
constante sur SND(n), on peut montrer qu’elle est localement crois-
sante sur Sym(n).
De plus si on considère une matrice de signature (p, q) (avec p+q 6 n),
il est facile en la conjuguant à Ip,q de voir qu’elle peut être approchée
par des matrices de signature (p0 , q 0 ) pour toute signature (p0 , q 0 ) >
(p, q).
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Ainsi l’adhérence dans Sym(n) de la composante connexe C p,q de
SND(n) est l’ensemble des matrices dont la signature est inférieure
ou égale à (p, q).
3.
1. Notons Φ : (A, B) 7→ tr(AB) la forme polaire de T . Un simple calcul
permet de montrer que la forme bilinéaire Ψ : (A, B) 7→ tr( t AB) est
définie positive.
Par ailleurs toute matrice se décompose d’une unique façon en la
somme d’une matrice symétrique et d’une matrice antisymétrique. Au-
trement dit si on note Sn l’espace des matrices symétriques et A n celui
des matrices antiymétriques, on a gl(n, R) = S n ⊕ An . Les dimensions
respectives de Sn et An sont n(n+1)
2 et n(n−1)
2 .
Or Φ coı̈ncide
avec Ψsur Sn et avec −Ψ sur An donc la signature de
n(n+1) n(n−1)
T est 2 , 2 .
2. Si on note Sn0 l’espace des matrices symétriques de trace nulle, on a
sl(n, R) = Sn0 ⊕ An donc la restriction de T à sl(n, R) a pour signature
n(n+1)
2 − 1, n(n−1)
2 .
Comme T est non dégénérée et sl(n, R) est de codimension 1, l’ortho-
gonal de sl(n, R) est une droite. Or Φ(I, M ) = 0 si I est la matrice
identité et M une matrice de trace nulle. Donc l’orthogonal de sl(n, R)
pour T est la droite des matrices scalaires.
3. On commence par remarquer qu’une matrice n×n appartient à so(p, q)
si et seulement si elle est de la forme :
A B
tB D
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Références
[1] Rached Mneimné and Frédéric Testard. Introduction à la théorie des
groupes de Lie classiques. Collection Méthodes. [Methods Collection].
Hermann, Paris, 1986.
[2] Barrett O’Neill. Semi-Riemannian geometry, volume 103 of Pure and
Applied Mathematics. Academic Press Inc. [Harcourt Brace Jovanovich
Publishers], New York, 1983. With applications to relativity.
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