Cours Applications Lineaires MRDC
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Étant donné un corps — commutatif — (𝐾 , +, ×) et un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel (𝐸, +, ⋅), on désignera sys‐
tématiquement par : • 0𝐾 et 1𝐾 les éléments neutres additif et multiplicatif du corps (𝐾 , +, ×), respectivement ;
• 𝐾 ∗ ≔ 𝐾 {0𝐾 } l’ensemble des éléments non nuls du corps (𝐾 , +, ×), qui coïncide avec l’ensemble 𝐾 × de ses
−
éléments inversibles ; • 0𝐸 le vecteur nul de l’espace (𝐸, +, ⋅), élément neutre du groupe (𝐸, +).
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Remarque — Une application est donc linéaire si, et seulement si, l’image d’une combinaison linéaire égale
la combinaison linéaire correspondante des images.
Démonstration — Fixons une application 𝑓 ∈ 𝐹 𝐸 et introduisons les notations propositionnelles suivantes :
𝑃 ⋅⇔ 𝑓 ∈ L(𝐸+, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅),
𝑄 ⋅⇔ (∀(𝑥, 𝑦) ∈ 𝐸 2 , ∀(𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 , 𝑓 (𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝜇 ⋅ 𝑦) = 𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑥) + 𝜇 ⋅ 𝑓 (𝑦)),
𝑅 ⋅⇔ (∀(𝑥, 𝑦) ∈ 𝐸 2 , ∀𝜆 ∈ 𝐾 , 𝑓 (𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝑦) = 𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑥) + 𝑓 (𝑦)),
𝑆 ⋅⇔ (∀𝑛 ∈ ℕ, ∀(𝑥𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ∈ 𝐸 𝑛 , ∀(𝜆𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ∈ 𝐾 𝑛 , 𝑓 (∑𝑛𝑖=1 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 ) = ∑𝑛𝑖=1 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑖 )),
𝑇 ⋅⇔ (∀𝐼 , ∀(𝑥𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 , ∀(𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) , 𝑓 (∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 ) = ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑖 )).
Implication 𝑷 ⇒ 𝑹 Elle est analogue à la première implication ; si l’application 𝑓 est linéaire, alors :
L’application 𝑓 est donc un homomorphisme de groupes entre les groupes additifs (𝐸, +) et (𝐹 , +) et l’on a
𝑓 (0𝐸 ) = 0𝐹 :
𝑓 (0𝐸 ) = 𝑓 (0𝐸 ) + 0𝐹 = 𝑓 (0𝐸 ) + (𝑓 (0𝐸 ) − 𝑓 (0𝐸 )) = (𝑓 (0𝐸 ) + 𝑓 (0𝐸 )) − 𝑓 (0𝐸 )
= 𝑓 (0𝐸 + 0𝐸 ) − 𝑓 (0𝐸 ) = 𝑓 (0𝐸 ) − 𝑓 (0𝐸 ) = 0𝐹 .
Dès lors, en choisissant désormais 𝑦 = 0𝐸 , on retrouve la compatibilité de l’application 𝑓 avec les lois de
multiplication par un scalaire :
2
𝑛
en posant 𝑥0 ≔ ∑𝑖=1 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 ∈ 𝐸 et en invoquant notamment la formule aux rangs 2 et 𝑛 :
𝑛+1
𝑓 ( ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 ) = 𝑓 (𝑥0 + 𝜆𝑛+1 ⋅ 𝑥𝑛+1 ) = 𝑓 (1𝐾 ⋅ 𝑥0 + 𝜆𝑛+1 ⋅ 𝑥𝑛+1 ) = 1𝐾 ⋅ 𝑓 (𝑥0 ) + 𝜆𝑛+1 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑛+1 )
𝑖=1 𝑛 𝑛 𝑛+1
= 𝑓 (∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 ) + 𝜆𝑛+1 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑛+1 ) = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑖 ) + 𝜆𝑛+1 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑛+1 ) = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑖 ).
𝑖=1 𝑖=1 𝑖=1
D’où le résultat escompté et, puisque le nombre 𝑛 est quelconque, l’hérédité de la récurrence.
Conclusion Le principe de récurrence assure la validité universelle de la propriété : la proposition 𝑆 est
effectivement vérifiée.
Implication 𝑺 ⇒ 𝑸 La proposition 𝑄 est un cas particulier de la formule 𝑆 : il suffit de choisir 𝑛 = 2.
Implication 𝑺 ⇒ 𝑻 Supposons la propriété 𝑆 vérifiée. Pour tout ensemble 𝐼 , toute famille de vecteurs
(𝑥𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 et toute famille de scalaires 𝛬 = (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) à support fini, on calcule, en notant 𝑆 ≔ supp(𝛬) et
𝑛 ≔ card(𝑆) ∈ ℕ puis en considérant une bijection 𝑔 : ⟦1, 𝑛⟧ → 𝑆 :
𝑛 𝑛
𝑓 (∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 ) = 𝑓 (∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 ) = 𝑓 (∑ 𝜆𝑔(𝑗) ⋅ 𝑥𝑔(𝑗) ) = ∑ 𝜆𝑔(𝑗) ⋅ 𝑓 (𝑥𝑔(𝑗) ) = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑖 ) = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑖 ),
𝑖∈𝐼 𝑖∈𝑆 𝑗 =1 𝑗 =1 𝑖∈𝑆 𝑖∈𝐼
(On peut aussi choisir le scalaire −1𝐾 dans la propriété de compatibilité avec les lois de multiplication par un
scalaire et invoquer la règle des signes dans chacun des espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅).) □
Corollaire 4 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels. L’application
identiquement nulle 0𝐹 𝐸 : 𝐸 ∋ 𝑥 ↦ 0𝐹 ∈ 𝐹 est linéaire entre les espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) et l’identité id𝐸 : 𝐸 ∋
𝑥 ↦ 𝑥 ∈ 𝐸 est un automorphisme de l’espace (𝐸, +, ⋅) :
Démonstration — On calcule :
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Exemple — Le triplet (ℝℝ , +, ⋅), où les lois + et ⋅ sont définies élément par élément à l’aide des lois + et ×
de l’ensemble ℝ, est un (ℝ, +, ×)‐espace vectoriel. On s’intéresse à son sous‐ensemble 𝒟(ℝ, ℝ), constitué des
fonctions dérivables. Les propriétés de la dérivation assurent que :
2
∀(𝑓 , 𝑔) ∈ (𝒟(ℝ, ℝ)) , ∀(𝜆, 𝜇) ∈ ℝ2 , 𝜆 ⋅ 𝑓 + 𝜇 ⋅ 𝑔 ∈ 𝒟(ℝ, ℝ) ∧ (𝜆 ⋅ 𝑓 + 𝜇 ⋅ 𝑔)′ = 𝜆 ⋅ 𝑓 ′ + 𝜇 ⋅ 𝑔 ′ ,
ce qui signifie que : • la partie 𝒟(ℝ, ℝ) — bien sûr non vide car possédant par exemple la fonction identiquement
nulle 0ℝℝ — définit un sous‐espace de l’espace (ℝℝ , +, ⋅) ; • l’opérateur de dérivation 𝒟(ℝ, ℝ) ∋ 𝑓 ↦ 𝑓 ′ ∈ ℝℝ
est linéaire entre les espaces (𝒟(ℝ, ℝ), +, ⋅) et (ℝℝ , +, ⋅).
Exemples — Soient un corps (𝐾 , +, ×) et un nombre 𝑛 ∈ ℕ. On travaille dans le (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel (𝐾 𝑛 ,
+, ⋅), dont les lois sont définies coordonnée par coordonnée à partir des lois du corps. On considère l’application
𝑛
𝑓 : 𝐾 𝑛 → 𝐾 et la famille d’applications (𝑔𝜎 )𝜎 ∈ 𝔖𝑛 ∈ ((𝐾 𝑛 )𝐾 )𝔖𝑛 définies par :
𝐾𝑛 → 𝐾
⎛
𝑛
⎞ 𝐾𝑛 → 𝐾𝑛
𝑓:⎜ , ∀𝜎 ∈ 𝔖𝑛 , 𝑔𝜎 : ( ).
⎜(𝑥𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ↦ ∑ 𝑥𝑖 ⎟⎟ (𝑥𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ↦ (𝑥𝜎(𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧
⎝ 𝑖=1 ⎠
On calcule, étant donnés un couple de vecteurs (𝑥, 𝑦) = ((𝑥𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ , (𝑦𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ) ∈ (𝐾 𝑛 )2 , un couple de scalaires
(𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 et une permutation 𝜎 ∈ 𝔖𝑛 :
𝑛 𝑛 𝑛 𝑛 𝑛
𝑓 (𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝜇 ⋅ 𝑦) = 𝑓 ((𝜆𝑥𝑖 + 𝜇𝑦𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ) = ∑(𝜆𝑥𝑖 + 𝜇𝑦𝑖 ) = ∑ 𝜆𝑥𝑖 + ∑ 𝜇𝑦𝑖 = 𝜆 ∑ 𝑥𝑖 + 𝜇 ∑ 𝑦𝑖
𝑖=1 𝑖=1 𝑖=1 𝑖=1 𝑖=1
= 𝜆𝑓 (𝑥) + 𝜇𝑓 (𝑦),
𝑔𝜎 (𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝜇 ⋅ 𝑦) = 𝑔𝜎 ((𝜆𝑥𝑖 + 𝜇𝑦𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ) = (𝜆𝑥𝜎(𝑖) + 𝜇𝑦𝜎(𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ = (𝜆𝑥𝜎(𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ + (𝜇𝑦𝜎(𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧
= 𝜆 ⋅ (𝑥𝜎(𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ + 𝜇 ⋅ (𝑦𝜎(𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ = 𝜆 ⋅ 𝑔𝜎 (𝑥) + 𝜇 ⋅ 𝑔𝜎 (𝑦),
(𝑔𝜎 −1 ∘ 𝑔𝜎 )(𝑥) = 𝑔𝜎 −1 ((𝑥𝜎(𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ) = (𝑥(𝜎 ∘𝜎 −1 )(𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ = (𝑥𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ = 𝑥 = id𝐾 𝑛 (𝑥),
(𝑔𝜎 ∘ 𝑔𝜎 −1 )(𝑥) = 𝑔𝜎 ((𝑥𝜎 −1 (𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ) = (𝑥(𝜎 −1 ∘𝜎)(𝑖) )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ = (𝑥𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ = 𝑥 = id𝐾 𝑛 (𝑥).
On déduit, les éléments considérés étant quelconques, que l’application 𝑓 est une forme linéaire de l’espace
(𝐾 𝑛 , +, ⋅) tandis que, pour tout 𝜎 ∈ 𝔖𝑛 , l’application 𝑔𝜎 en est un automorphisme, de bijection réciproque égale
à l’application 𝑔𝜎 −1 .
Rappels — Soient un corps (𝐾 , +, ×), un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel (𝐸, +, ⋅) admettant une base ℬ = (𝑒𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼
indexée par un certain ensemble 𝐼 ainsi que la famille (𝜋𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ (𝐾 ℱ )𝐼 des projections relatives à l’ensemble
ℱ ≔ 𝐾 (𝐼 ) :
𝐾 (𝐼 ) → 𝐾
∀𝑖 ∈ 𝐼 , 𝜋𝑖 : ( ), ∀𝛬 ∈ 𝐾 (𝐼 ) , 𝛬 = (𝜋𝑖 (𝛬))𝑖∈𝐼 .
(𝜆𝑗 )𝑗 ∈𝐼 ↦ 𝜆𝑖
(i) L’application 𝑔 : 𝐾 (𝐼 ) ∋ (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ↦ ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑒𝑖 ∈ 𝐸 est : • bien définie, par définition d’une combinaison
linéaire ; • injective, par liberté de la famille ℬ dans l’espace (𝐸, +, ⋅) ; • surjective, en vertu du caractère
générateur de la famille ℬ vis‐à‐vis de l’espace (𝐸, +, ⋅) ; • conséquemment bijective.
(ii) La bijection réciproque 𝑓 ≔ 𝑔 −1 : 𝐸 → 𝐾 (𝐼 ) est appelée application des coordonnées dans la base ℬ : à
tout vecteur 𝑥 ∈ 𝐸, elle associe la famille des coordonnées du vecteur 𝑥 dans la base ℬ, unique famille de
scalaires à support fini 𝛬 = (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) telle que 𝑥 = 𝑔(𝛬) = ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑒𝑖 .
(iii) Pour tout — éventuel — indice 𝑖 ∈ 𝐼 , on appelle 𝑖‐ième application coordonnée dans la base ℬ l’application
𝜑𝑖 ≔ 𝜋𝑖 ∘ 𝑓 : 𝐸 → 𝐾 . La famille (𝜑𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ (𝐾 𝐸 )𝐼 de ces applications est telle que, pour tout vecteur 𝑥 ∈ 𝐸, la
famille de scalaires (𝜑𝑖 (𝑥))𝑖∈𝐼 = 𝑓 (𝑥) est la famille des coordonnées du vecteur 𝑥 dans la base ℬ.
Proposition 6 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel admettant une base ℬ =
(𝑒𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 indexée par un certain ensemble 𝐼 . On considère : • la bijection 𝑔 : 𝐾 (𝐼 ) ∋ (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ↦ ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑒𝑖 ∈ 𝐸 ;
• l’application 𝑓 ≔ 𝑔 −1 : 𝐸 → 𝐾 (𝐼 ) des coordonnées dans la base ℬ ; • la famille (𝜑𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ (𝐾 𝐸 )𝐼 des applications
coordonnées dans la base ℬ.
(i) L’application 𝑔 est un isomorphisme de l’espace (𝐾 (𝐼 ) , +, ⋅) vers l’espace (𝐸, +, ⋅).
(ii) L’application des coordonnées 𝑓 est un isomorphisme de l’espace (𝐸, +, ⋅) vers l’espace (𝐾 (𝐼 ) , +, ⋅).
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(iii) Les applications coordonnées 𝜑𝑖 , pour 𝑖 ∈ 𝐼 , sont des formes linéaires de l’espace (𝐸, +, ⋅).
En résumé :
Démonstration — (i) Soient deux couples (𝛬, 𝛭) = ((𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 , (𝜇𝑖 )𝑖∈𝐼 ) ∈ (𝐾 (𝐼 ) )2 et (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 . Rappelons que
la réunion 𝑆 ∪ 𝑇 des supports finis 𝑆 ≔ supp(𝛬) et 𝑇 ≔ supp(𝛭) est finie et contient chacun des trois
ensembles 𝑆, 𝑇 et 𝑈 ≔ supp(𝜆 ⋅ 𝛬 + 𝜇 ⋅ 𝛭) — ce qui garantit la finitude de l’ensemble 𝑈 et la relation
𝜆 ⋅ 𝛬 + 𝜇 ⋅ 𝛭 ∈ 𝐾 (𝐼 ) . On calcule, en invoquant les règles de calcul dans l’espace (𝐸, +, ⋅) :
D’où, les éléments considérés étant quelconques, la linéarité de la bijection 𝑔, qui est donc un isomor‐
phisme, élément de l’ensemble iso(𝐾 (𝐼 ) , +, ⋅ ; 𝐸, +, ⋅).
(ii) Pour tous couples (𝑥, 𝑦) ∈ 𝐸 2 et (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 , on calcule, notant (𝛬, 𝛭) ≔ (𝑓 (𝑥), 𝑓 (𝑦)) ∈ (𝐾 (𝐼 ) )2 :
La bijection 𝑓 est ainsi linéaire : elle est un isomorphisme appartenant à l’ensemble iso(𝐸, +, ⋅ ; 𝐾 (𝐼 ) , +, ⋅).
(iii) On a évidemment, pour tous couples (𝑥, 𝑦) ∈ 𝐸 2 et (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 :
Démonstration — Pour tout — éventuel — indice 𝑗 ∈ 𝐼 , la famille de scalaires (δ𝑖,𝑗 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 𝐼 : • est de support égal
au singleton {𝑗}, fini ; • appartient donc à l’ensemble 𝐾 (𝐼 ) ; • vérifie les égalités ∑𝑖∈𝐼 δ𝑖,𝑗 ⋅ 𝑒𝑖 = δ𝑗,𝑗 ⋅ 𝑒𝑗 = 1𝐾 ⋅ 𝑒𝑗 = 𝑒𝑗 ;
• est conséquemment la famille des coordonnées du vecteur 𝑒𝑗 dans la base ℬ ; • égale dès lors la famille
(𝑒𝑖∗ (𝑒𝑗 ))𝑖∈𝐼 ; • vérifie, pour tout — éventuel — indice 𝑖 ∈ 𝐼 , l’égalité δ𝑖,𝑗 = 𝑒𝑖∗ (𝑒𝑗 ). □
Proposition 9 — Soient un corps (𝐾 , +, ×) et un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel (𝐸, +, ⋅) admettant deux bases ℬ =
(𝑒𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 et 𝒞 = (𝑓𝑗 )𝑗 ∈𝐽 ∈ 𝐸 𝐽 respectivement indexées par des ensembles 𝐼 et 𝐽 . On note ℬ∗ = (𝑒𝑖∗ )𝑖∈𝐼 ∈ (L(𝐸, +,
⋅ ; 𝐾 , +, ×))𝐼 et 𝒞 ∗ = (𝑓𝑗∗ )𝑗 ∈𝐽 ∈ (L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×))𝐽 les familles duales respectives des bases ℬ et 𝒞 . Les égalités
ℬ = 𝒞 et ℬ∗ = 𝒞 ∗ sont équivalentes.
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Implication réciproque Supposons que ℬ∗ = 𝒞 ∗ . D’une part, les deux ensembles d’indexation — sources —
𝐼 et 𝐽 des familles ℬ∗ et 𝒞 ∗ sont égaux ; d’autre part, lesdites familles ont les mêmes éléments, au sens où :
∀𝑖 ∈ 𝐼 = 𝐽 , 𝑒𝑖∗ = 𝑓𝑖∗ .
Notons 𝐼 2 ∋ (𝑖, 𝑗) ↦ δ𝑖,𝑗 ∈ {0𝐾 , 1𝐾 } le symbole de Kronecker associé à l’ensemble 𝐼 et au corps (𝐾 , +, ×).
Pour tout — éventuel — indice 𝑗 ∈ 𝐼 , les coordonnées du vecteur 𝑒𝑗 dans la base 𝒞 sont données par la famille
(𝑓𝑖∗ (𝑒𝑗 ))𝑖∈𝐼 = (𝑒𝑖∗ (𝑒𝑗 ))𝑖∈𝐼 = (δ𝑖,𝑗 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) , de support réduit au singleton {𝑗}, et l’on peut donc écrire et calculer :
En définitive, les bases ℬ et 𝒞 : • ont le même ensemble d’indexation — source — 𝐼 = 𝐽 ; • ont le même but 𝐸 ;
• ont les mêmes éléments — au sens où elles coïncident sur l’ensemble 𝐼 — ; • sont conséquemment égales. □
Proposition 10 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels. On suppose
que l’espace (𝐸, +, ⋅) admet une base ℬ = (𝑒𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 indexée par un certain ensemble 𝐼 . L’on introduit : • la
famille duale ℬ∗ = (𝑒𝑖∗ )𝑖∈𝐼 ∈ (L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×))𝐼 de la base ℬ ; • une famille de vecteurs 𝒴 = (𝑦𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐹 𝐼 de
l’espace (𝐹 , +, ⋅), elle aussi indexée par l’ensemble 𝐼 . Il existe une unique application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅)
envoyant la base ℬ sur la famille 𝒴 , au sens où 𝑓 ∘ ℬ = 𝒴 — c’est‐à‐dire que (𝑓 (𝑒𝑖 ))𝑖∈𝐼 = (𝑦𝑖 )𝑖∈𝐼 — ; il s’agit de
l’application 𝑓 : 𝐸 ∋ 𝑥 ↦ ∑𝑖∈𝐼 𝑒𝑖∗ (𝑥) ⋅ 𝑦𝑖 ∈ 𝐹 . Formellement, cette application 𝑓 est bien définie et vérifie :
Démonstration — Nous désignerons par 𝐼 2 ∋ (𝑖, 𝑗) ↦ δ𝑖,𝑗 ∈ {0𝐾 , 1𝐾 } le symbole de Kronecker relatif à l’en‐
semble 𝐼 et au corps (𝐾 , +, ×). Raisonnons par analyse‐synthèse.
Analyse Supposons qu’il existe une application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅) telle que 𝑓 ∘ ℬ = 𝒴 . Elle est
alors entièrement et uniquement déterminée car :
∀𝑥 ∈ 𝐸, 𝑥 = ∑ 𝑒𝑖∗ (𝑥) ⋅ 𝑒𝑖 ∧ 𝑓 (𝑥) = 𝑓 (∑ 𝑒𝑖∗ (𝑥) ⋅ 𝑒𝑖 ) = ∑ 𝑒𝑖∗ (𝑥) ⋅ 𝑓 (𝑒𝑖 ) = ∑ 𝑒𝑖∗ (𝑥) ⋅ 𝑦𝑖 .
𝑖∈𝐼 𝑖∈𝐼 𝑖∈𝐼 𝑖∈𝐼
Puisque les éléments considérés sont quelconques, c’est donc que 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅).
Transformation Enfin, se rappelant que tout — éventuel — indice 𝑗 ∈ 𝐼 est tel que 𝑒 ∗ (𝑒𝑗 ) = (δ𝑖,𝑗 )𝑖∈𝐼 et que
supp(𝑒 ∗ (𝑒𝑗 )) = {𝑗}, on calcule :
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Corollaire 11 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels. On suppose
que l’espace (𝐸, +, ⋅) admet une base ℬ = (𝑒𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 indexée par un certain ensemble 𝐼 . On a les équivalences
suivantes, où 0𝐹 𝐸 : 𝐸 ∋ 𝑥 ↦ 0𝐹 ∈ 𝐹 et 0𝐹 𝐼 : 𝐼 ∋ 𝑖 ↦ 0𝐹 ∈ 𝐹 :
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∀(𝑓 , 𝑔) ∈ (L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅)) , (𝑓 ∘ ℬ = 𝑔 ∘ ℬ ⇔ 𝑓 = 𝑔) ∧ (𝑓 ∘ ℬ = 0𝐹 𝐼 ⇔ 𝑓 = 0𝐹 𝐸 ).
Démonstration — Soit un couple (𝑓 , 𝑔) ∈ (L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅))2 . Établissons la première équivalence.
Implication réciproque Si 𝑓 = 𝑔, alors il est immédiat que 𝑓 ∘ ℬ = 𝑔 ∘ ℬ.
Implication directe Si 𝑓 ∘ ℬ = 𝑔 ∘ ℬ, alors, notant 𝒴 ≔ 𝑓 ∘ ℬ = 𝑔 ∘ ℬ ∈ 𝐹 𝐼 , les égalités 𝑓 ∘ ℬ = 𝒴 = 𝑔 ∘ ℬ
et la propriété d’unicité de la proposition précédente assurent que 𝑓 = 𝑔.
La seconde équivalence se déduit en choisissant 𝑔 = 0𝐹 𝐸 et en remarquant que 0𝐹 𝐸 ∘ ℬ = 0𝐹 𝐼 . □
Corollaire 12 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel admettant une base ℬ =
(𝑒𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 indexée par un certain ensemble 𝐼 . Notons 𝐼 2 ∋ (𝑖, 𝑗) ↦ δ𝑖,𝑗 ∈ {0𝐾 , 1𝐾 } le symbole de Kronecker
associé à l’ensemble 𝐼 et au corps (𝐾 , +, ×). La famille duale ℬ∗ = (𝑒𝑖∗ )𝑖∈𝐼 ∈ (L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×))𝐼 est l’unique
famille de formes linéaires de l’espace (𝐸, +, ⋅) telle que :
∀(𝑖, 𝑗) ∈ 𝐼 2 , 𝑒𝑖∗ (𝑒𝑗 ) = δ𝑖,𝑗 .
Démonstration — On a vu que la famille duale ℬ∗ satisfait à l’identité ci‐dessus. Toute autre famille 𝒞 =
(𝜑𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ (L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×))𝐼 vérifiant également cette identité est telle que :
∀𝑖 ∈ 𝐼 , (∀𝑗 ∈ 𝐼 , 𝜑𝑖 (𝑒𝑗 ) = δ𝑖,𝑗 = 𝑒𝑖∗ (𝑒𝑗 )) ∧ 𝜑𝑖 ∘ ℬ = 𝑒𝑖∗ ∘ ℬ ∧ 𝜑𝑖 = 𝑒𝑖∗ , 𝒞 = (𝜑𝑖 )𝑖∈𝐼 = (𝑒𝑖∗ )𝑖∈𝐼 = ℬ∗ . □
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Propriétés des lois On a déjà établi la linéarité de l’application identiquement nulle 0𝐹 𝐸 . On vérifie aussi
que, pour toute application linéaire 𝑓 ∈ 𝐿, l’application −𝑓 est également linéaire ; on calcule en effet, pour
tous couples de vecteurs (𝑥, 𝑦) ∈ 𝐸 2 et de scalaires (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 :
(−𝑓 )(𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝜇 ⋅ 𝑦) = −𝑓 (𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝜇 ⋅ 𝑦) = −(𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑥) + 𝜇 ⋅ 𝑓 (𝑦)) = −(𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑥)) − (𝜇 ⋅ 𝑓 (𝑦))
= 𝜆 ⋅ (−𝑓 (𝑥)) + 𝜇 ⋅ (−𝑓 (𝑦)) = 𝜆 ⋅ (−𝑓 )(𝑥) + 𝜇 ⋅ (−𝑓 )(𝑦),
en utilisant la définition de l’application −𝑓 , la linéarité de l’application 𝑓 et les règles de calcul dans l’espace
(𝐹 , +, ⋅), notamment la règle des signes. Calculons en outre, pour tout triplet d’applications linéaires (𝑓 , 𝑔, ℎ) ∈
𝐿3 , tout couple de scalaires (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 et tout vecteur 𝑥 ∈ 𝐸 :
((𝑓 + 𝑔) + ℎ)(𝑥) = (𝑓 + 𝑔)(𝑥) + ℎ(𝑥) = (𝑓 (𝑥) + 𝑔(𝑥)) + ℎ(𝑥) = 𝑓 (𝑥) + (𝑔(𝑥) + ℎ(𝑥)) = 𝑓 (𝑥) + (𝑔 + ℎ)(𝑥)
= (𝑓 + (𝑔 + ℎ))(𝑥),
(𝑓 + 𝑔)(𝑥) = 𝑓 (𝑥) + 𝑔(𝑥) = 𝑔(𝑥) + 𝑓 (𝑥) = (𝑔 + 𝑓 )(𝑥),
(𝑓 + 0𝐹 𝐸 )(𝑥) = 𝑓 (𝑥) + 0𝐹 𝐸 (𝑥) = 𝑓 (𝑥) + 0𝐹 = 𝑓 (𝑥) = 0𝐹 + 𝑓 (𝑥) = 0𝐹 𝐸 (𝑥) + 𝑓 (𝑥) = (0𝐹 𝐸 + 𝑓 )(𝑥),
(𝑓 + (−𝑓 ))(𝑥) = 𝑓 (𝑥) + (−𝑓 )(𝑥) = 𝑓 (𝑥) + (−𝑓 (𝑥)) = 𝑓 (𝑥) − 𝑓 (𝑥) = 0𝐹 = 0𝐹 𝐸 (𝑥) = 0𝐹 = −𝑓 (𝑥) + 𝑓 (𝑥)
= (−𝑓 )(𝑥) + 𝑓 (𝑥) = ((−𝑓 ) + 𝑓 )(𝑥),
(𝜆 ⋅ (𝑓 + 𝑔))(𝑥) = 𝜆 ⋅ (𝑓 + 𝑔)(𝑥) = 𝜆 ⋅ (𝑓 (𝑥) + 𝑔(𝑥)) = 𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑥) + 𝜆 ⋅ 𝑔(𝑥) = (𝜆 ⋅ 𝑓 )(𝑥) + (𝜆 ⋅ 𝑔)(𝑥)
= ((𝜆 ⋅ 𝑓 ) + (𝜆 ⋅ 𝑔))(𝑥),
((𝜆 + 𝜇) ⋅ 𝑓 )(𝑥) = (𝜆 + 𝜇) ⋅ 𝑓 (𝑥) = 𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑥) + 𝜇 ⋅ 𝑓 (𝑥) = (𝜆 ⋅ 𝑓 )(𝑥) + (𝜇 ⋅ 𝑓 )(𝑥) = ((𝜆 ⋅ 𝑓 ) + (𝜇 ⋅ 𝑓 ))(𝑥),
(𝜆 ⋅ (𝜇 ⋅ 𝑓 ))(𝑥) = 𝜆 ⋅ (𝜇 ⋅ 𝑓 )(𝑥) = 𝜆 ⋅ (𝜇 ⋅ 𝑓 (𝑥)) = (𝜆 × 𝜇) ⋅ 𝑓 (𝑥) = ((𝜆 × 𝜇) ⋅ 𝑓 )(𝑥),
(1𝐾 ⋅ 𝑓 )(𝑥) = 1𝐾 ⋅ 𝑓 (𝑥) = 𝑓 (𝑥),
où l’on a bien sûr invoqué les définitions des lois + et ⋅ dans l’ensemble 𝐿, l’associativité et la commutativité de
la loi d’addition + dans l’ensemble 𝐹 , la neutralité bilatérale de l’élément 0𝐹 dans le groupe (𝐹 , +), le caractère
symétrique des éléments 𝑓 (𝑥) et −𝑓 (𝑥) de ce groupe, la distributivité de la loi ⋅ de l’ensemble 𝐹 à gauche par
rapport à l’addition + de ce même ensemble et à droite par rapport à l’addition + de l’ensemble 𝐾 relativement
à l’addition + de l’ensemble 𝐹 , l’associativité mixte de la loi ⋅ de l’ensemble 𝐹 relativement à la multiplication
× de l’ensemble 𝐾 ainsi que la neutralité à gauche du scalaire 1𝐾 pour la loi ⋅ de l’ensemble 𝐹 ; puisque les
applications sont toutes de source 𝐸 et de but 𝐹 et que la variable 𝑥 est quelconque, on déduit que :
(𝑓 + 𝑔) + ℎ = 𝑓 + (𝑔 + ℎ), 𝑓 + 𝑔 = 𝑔 + 𝑓, 𝑓 + 0𝐹 𝐸 = 𝑓 = 0𝐹 𝐸 + 𝑓,
𝑓 + (−𝑓 ) = 0𝐹 𝐸 = (−𝑓 ) + 𝑓, 𝜆 ⋅ (𝑓 + 𝑔) = (𝜆 ⋅ 𝑓 ) + (𝜆 ⋅ 𝑔), (𝜆 + 𝜇) ⋅ 𝑓 = (𝜆 ⋅ 𝑓 ) + (𝜇 ⋅ 𝑓 ),
𝜆 ⋅ (𝜇 ⋅ 𝑓 ) = (𝜆 × 𝜇) ⋅ 𝑓, 1𝐾 ⋅ 𝑓 = 𝑓.
Tous les éléments considérés étant quelconques, c’est donc que le triplet (𝐿, +, ⋅) — constitué de l’ensemble 𝐿
et de ses lois + et ⋅ — est un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel ; en effet : • le magma (𝐿, +) constitue un groupe abélien
car il est : ◦ associatif et commutatif ; ◦ unifère, d’élément neutre bilatère égal à l’application identiquement
nulle 0𝐹 𝐸 ; ◦ symétrisable, tout élément 𝑓 ∈ 𝐿 admettant l’élément −𝑓 ∈ 𝐿 pour symétrique bilatère ; • la loi ⋅ de
l’ensemble 𝐿 : ◦ est distributive à gauche par rapport à la loi + de l’ensemble 𝐿 ; ◦ est distributive à droite par
rapport à la loi + de l’ensemble 𝐾 relativement à la loi + de l’ensemble 𝐿 ; ◦ vérifie une propriété d’associativité
mixte relativement à la loi × de l’ensemble 𝐾 ; ◦ admet l’élément neutre multiplicatif 1𝐾 du corps (𝐾 , +, ×) pour
élément neutre à gauche. □
Proposition 14 — Conservons les notations de la proposition précédente.
(i) Si l’un des espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) est de dimension nulle, alors il en est de même de l’espace (𝐿, +, ⋅).
Supposons désormais que l’espace (𝐸, +, ⋅) admet une base ℬ = (𝑢𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 indexée par un certain ensemble 𝐼 et
notons ℬ∗ = (𝑢𝑖∗ )𝑖∈𝐼 ∈ (L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×))𝐼 la famille duale correspondante.
(ii) Étant donnée une famille 𝒱 = (𝑣𝑗 )𝑗 ∈𝐽 ∈ 𝐹 𝐽 indexée par un certain ensemble 𝐽 et libre dans l’espace (𝐹 , +, ⋅),
la famille ℱ = (𝑓𝑖,𝑗 )(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 ∈ 𝐿𝐼 ×𝐽 définie ci‐dessous est libre dans l’espace (𝐿, +, ⋅).
𝐸→𝐹
∀(𝑖, 𝑗) ∈ 𝐼 × 𝐽 , 𝑓𝑖,𝑗 : ( ). (§)
𝑥 ↦ 𝑢𝑖∗ (𝑥) ⋅ 𝑣𝑗
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(iii) Si l’espace (𝐸, +, ⋅) est de dimension non nulle et l’espace (𝐹 , +, ⋅) est de dimension infinie, alors l’espace (𝐿, +, ⋅)
est de dimension infinie.
(iv) Supposons que l’espace (𝐸, +, ⋅) est de dimension finie et que l’espace (𝐹 , +, ⋅) admet une base 𝒞 = (𝑣𝑗 )𝑗 ∈𝐽 ∈ 𝐹 𝐽
indexée par un certain ensemble 𝐽 . Notons 𝒞 ∗ = (𝑣𝑗∗ )𝑗 ∈𝐽 ∈ (L(𝐹 , +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×))𝐽 la famille duale de la base
𝒞 . La famille 𝒟 = (𝑓𝑖,𝑗 )(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 ∈ 𝐿𝐼 ×𝐽 définie par la formule (§) constitue une base de l’espace (𝐿, +, ⋅) et sa
famille duale 𝒟∗ = (𝑓𝑖,𝑗∗ )(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 ∈ (L(𝐿, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×))𝐼 ×𝐽 vérifie :
(v) Dans chacun des cas précédents, la dimension — finie ou infinie — de l’espace (𝐿, +, ⋅) est donnée par la formule
suivante dans l’ensemble ℕ ≔ ℕ ∪ {+∞}, où l’on convient que 0 × (+∞) ≔ 0 ≕ (+∞) × 0 :
Les ensembles 𝑆𝑖 , pour 𝑖 ∈ 𝐼 , « partitionnent » l’ensemble 𝑆 suivant la valeur de la première coordonnée de ses
éléments : ils sont deux à deux disjoints et de réunion égale à l’ensemble 𝑆. De plus, pour tout — éventuel —
indice 𝑖 ∈ 𝐼 , les ensembles 𝑆𝑖 et 𝑇𝑖 satisfont aux équivalences suivantes :
donc, par extensionnalité, à l’égalité ensembliste 𝑆𝑖 = {𝑖} × 𝑇𝑖 : ils sont alors évidemment équipotents, les
applications 𝑇𝑖 ∋ 𝑗 ↦ (𝑖, 𝑗) ∈ 𝑆𝑖 et 𝑆𝑖 ∋ (𝑘, 𝑙) ↦ 𝑙 ∈ 𝑇𝑖 étant manifestement bien définies, bijectives et réciproques
l’une de l’autre. Établissons à présent deux implications.
Première implication Supposons que 𝛬 ∈ 𝐾 (𝐼 ) . Alors, pour tout — éventuel — indice 𝑖 ∈ 𝐼 : • les parties
𝑆𝑖 et 𝑆 𝑖 de l’ensemble fini 𝑆 sont elles‐mêmes finies ; • l’ensemble 𝑇𝑖 , équipotent à l’ensemble fini 𝑆𝑖 , est
également fini, si bien que 𝛬𝑖 ∈ 𝐾 (𝐽 ) .
Seconde implication Supposons à présent que l’ensemble 𝐼 est fini et que tout — éventuel — indice 𝑖 ∈ 𝐼
satisfait à la relation 𝛬𝑖 ∈ 𝐾 (𝐽 ) . Alors : • pour tout — éventuel — indice 𝑖 ∈ 𝐼 , l’ensemble 𝑆𝑖 , équipotent à
l’ensemble fini 𝑇𝑖 , est également fini ; • l’ensemble 𝑆 = ⋃𝑖∈𝐼 𝑆𝑖 , réunion finie d’ensembles finis, est lui‐même
fini, de sorte que 𝛬 ∈ 𝐾 (𝐼 ) .
(i) L’application identiquement nulle 0𝐿 = 0𝐹 𝐸 : 𝐸 ∋ 𝑥 ↦ 0𝐹 ∈ 𝐹 est élément de l’ensemble 𝐿 et l’inclusion
{0𝐿 } ⊆ 𝐿 est évidemment vérifiée. Si l’espace (𝐸, +, ⋅) est de dimension nulle, alors : • l’égalité 𝐸 = {0𝐸 }
est vérifiée ; • toute application linéaire 𝑓 ∈ 𝐿 est telle que 𝑓 (0𝐸 ) = 0𝐹 = 0𝐿 (0𝐸 ) et coïncide donc avec
l’application 0𝐿 , si bien que 𝑓 = 0𝐿 ; • on a conséquemment l’inclusion 𝐿 ⊆ {0𝐿 } et, par extensionnalité,
l’égalité 𝐿 = {0𝐿 }. Si l’espace (𝐹 , +, ⋅) est de dimension nulle, alors : • l’égalité 𝐹 = {0𝐹 } est vérifiée ; • toute
application 𝑓 ∈ 𝐹 𝐸 ne prend que la valeur 0𝐹 et égale donc l’application 0𝐹 𝐸 = 0𝐿 ; • en particulier, on a
encore l’inclusion 𝐿 ⊆ {0𝐿 } et, par extensionnalité, l’égalité 𝐿 = {0𝐿 }. Dans chacun de ces deux cas, l’en‐
semble 𝐿 se réduit au singleton {0𝐿 }, c’est‐à‐dire que l’espace (𝐿, +, ⋅) est de dimension nulle : la formule (★)
est vérifiée.
(ii) Reprenons les notations de l’énoncé et de la propriété préliminaire. On notera aussi 𝐼 2 ∋ (𝑖, 𝑗) ↦ δ𝑖,𝑗 ∈
{0𝐾 , 1𝐾 } le symbole de Kronecker relatif à l’ensemble 𝐼 et au corps (𝐾 , +, ×). Observons que, en vertu de
la proposition 10 et du corollaire 5, la famille ℱ est bien définie : les applications 𝑓𝑖,𝑗 , pour (𝑖, 𝑗) ∈ 𝐼 × 𝐽 ,
sont bien définies et effectivement linéaires. Supposons les relations 𝛬 ∈ 𝐾 (𝐼 ×𝐽 ) et ∑(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 = 0𝐿
9
vérifiées. Fixons momentanément un indice 𝑘 ∈ 𝐼 — à supposer que 𝐼 ≠ ∅. Les parties 𝑆𝑘 et 𝑆 𝑘 de l’ensemble
fini 𝑆 sont finies et complémentaires dans l’ensemble 𝑆. L’on calcule :
1𝐾 ⋅ 𝑣𝑗 = 𝑣𝑗 si 𝑖 = 𝑘 i. e. (𝑖, 𝑗) ∈ 𝑆𝑘
∀(𝑖, 𝑗) ∈ 𝑆, 𝑓𝑖,𝑗 (𝑢𝑘 ) = 𝑢𝑖∗ (𝑢𝑘 ) ⋅ 𝑣𝑗 = δ𝑖,𝑘 ⋅ 𝑣𝑗 = {
0𝐾 ⋅ 𝑣𝑗 = 0𝐹 si 𝑖 ≠ 𝑘 i. e. (𝑖, 𝑗) ∈ 𝑆 𝑘
puis, en invoquant la définition des lois + et ⋅ de l’ensemble 𝐿 ainsi que les principes de sommation par
paquets et de réindexation — via le changement d’indices 𝑆𝑘 ∋ (𝑖, 𝑗) ↦ 𝑗 ∈ 𝑇𝑘 — :
0𝐹 = 0𝐿 (𝑢𝑘 ) = ( ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 )(𝑢𝑘 ) = ∑ (𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 )(𝑢𝑘 ) = ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 (𝑢𝑘 )
(𝑖,𝑗)∈𝑆 (𝑖,𝑗)∈𝑆 (𝑖,𝑗)∈𝑆
= ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 (𝑢𝑘 ) + ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 (𝑢𝑘 ) = ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑣𝑗 + ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 0𝐹 = ∑ 𝜆𝑘,𝑗 ⋅ 𝑣𝑗 + 0𝐹 = ∑ 𝜆𝑘,𝑗 ⋅ 𝑣𝑗 .
(𝑖,𝑗)∈𝑆𝑘 (𝑖,𝑗)∈𝑆 𝑘 (𝑖,𝑗)∈𝑆𝑘 (𝑖,𝑗)∈𝑆 𝑘 𝑗 ∈𝑇𝑘 𝑗 ∈𝐽
La liberté de la famille 𝒱 dans l’espace (𝐹 , +, ⋅) assure alors que (𝜆𝑘,𝑗 )𝑗 ∈𝐽 = (0𝐾 )𝑗 ∈𝐽 . L’indice 𝑘 étant quel‐
conque, c’est donc que :
∀(𝑖, 𝑗) ∈ 𝐼 × 𝐽 , 𝜆𝑖,𝑗 = 0𝐾 , 𝛬 = (0𝐾 )(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 .
D’où, la famille de scalaires 𝛬 étant à priori quelconque, la liberté de la famille ℱ dans l’espace (𝐿, +, ⋅).
(iii) Supposons que l’espace (𝐸, +, ⋅) n’est pas de dimension nulle et que l’espace (𝐹 , +, ⋅) est de dimension
infinie. On peut trouver dans ce dernier des systèmes libres de cardinal arbitrairement grand : le point
précédent assure alors que l’espace (𝐿, +, ⋅) possède lui aussi des systèmes libres de cardinal arbitrairement
grand et est donc également de dimension infinie. La formule (★) est vérifiée.
(iv) Conservons les notations et hypothèses de l’énoncé. La base 𝒞 de l’espace (𝐹 , +, ⋅) est libre et génératrice.
Le point (ii) garantit la liberté de la famille 𝒟 dans l’espace (𝐿, +, ⋅). Établissons son caractère générateur.
Considérons une application 𝑓 ∈ 𝐿 et notons 𝒲 = (𝑤𝑖 )𝑖∈𝐼 ≔ 𝑓 ∘ ℬ = (𝑓 (𝑢𝑖 ))𝑖∈𝐼 ∈ 𝐹 𝐼 . Reprenons à nouveau
les notations de la propriété préliminaire, en choisissant ici 𝛬 = (𝜆𝑖,𝑗 )(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 ≔ (𝑣𝑗∗ (𝑤𝑖 ))(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 ∈ 𝐾 𝐼 ×𝐽 .
Soulignons que l’ensemble 𝐼 est fini — de cardinal égal à la dimension de l’espace (𝐸, +, ⋅) — et que tout
— éventuel — indice 𝑖 ∈ 𝐼 est tel que 𝛬𝑖 = (𝑣𝑗∗ (𝑤𝑖 ))𝑗 ∈𝐽 ∈ 𝐾 (𝐽 ) . Rappelons que : • les ensembles équipotents
𝑇𝑖 = supp(𝛬𝑖 ) et 𝑆𝑖 = {𝑖}×𝑇𝑖 , pour 𝑖 ∈ 𝐼 , sont finis ; • les ensembles 𝑆𝑖 , pour 𝑖 ∈ 𝐼 , « partitionnent » l’ensemble
𝑆 ; • le support 𝑆 = ⋃𝑖∈𝐼 𝑆𝑖 de la famille 𝛬, réunion finie d’ensembles finis, est fini. Pour tout vecteur
𝑥 ∈ 𝐸, on calcule, en invoquant des décompositions dans les bases ℬ et 𝒞 , la linéarité de l’application 𝑓 ,
les règles de calcul dans l’espace (𝐹 , +, ⋅), les principes de réindexation et de sommation par paquets, la
commutativité du corps (𝐾 , +, ×) ainsi que la définition des lois + et ⋅ de l’ensemble 𝐿 :
𝑓 (𝑥) = 𝑓 (∑ 𝑢𝑘∗ (𝑥) ⋅ 𝑢𝑘 ) = ∑ 𝑢𝑘∗ (𝑥) ⋅ 𝑤𝑘 = ∑ 𝑢𝑘∗ (𝑥) ⋅ ∑ 𝑣𝑙∗ (𝑤𝑘 ) ⋅ 𝑣𝑙 = ∑ 𝑢𝑘∗ (𝑥) ⋅ ∑ 𝜆𝑘,𝑙 ⋅ 𝑣𝑙
𝑘 ∈𝐼 𝑘 ∈𝐼 𝑘 ∈𝐼 𝑙 ∈𝐽 𝑘 ∈𝐼 𝑙 ∈𝑇𝑘
= ∑ ∑ 𝑢𝑘∗ (𝑥) ⋅ (𝜆𝑘,𝑙 ⋅ 𝑣𝑙 ) = ∑ ∑ ∗
(𝑢𝑖 (𝑥)𝜆𝑖,𝑗 ) ⋅ 𝑣𝑗 = ∑ ∗
(𝜆𝑖,𝑗 𝑢𝑖 (𝑥)) ⋅ 𝑣𝑗
𝑘 ∈𝐼 𝑙 ∈𝑇𝑘 𝑘 ∈𝐼 (𝑖,𝑗)∈𝑆𝑘 (𝑖,𝑗)∈⋃𝑘∈𝐼 𝑆𝑘
= ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ (𝑢𝑖∗ (𝑥) ⋅ 𝑣𝑗 ) = ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 (𝑥) = ( ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 )(𝑥) = ( ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 )(𝑥).
(𝑖,𝑗)∈𝑆 (𝑖,𝑗)∈𝑆 (𝑖,𝑗)∈𝑆 (𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽
Les deux applications 𝑓 et ∑(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 , de même source 𝐸 et même but 𝐹 , coïncident et sont égales :
𝑓 = ∑ 𝜆𝑖,𝑗 ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 = ∑ 𝑣𝑗∗ (𝑤𝑖 ) ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 = ∑ 𝑣𝑗∗ (𝑓 (𝑢𝑖 )) ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 ∈ vect(𝐿,+,⋅) (𝒟).
(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 (𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 (𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽
D’où, l’application 𝑓 étant quelconque, le caractère générateur de la famille 𝒟 dans l’espace (𝐿, +, ⋅). En
définitive, la famille 𝒟, libre et génératrice, constitue une base de l’espace (𝐿, +, ⋅). Les calculs tout juste
menés prouvent que sa famille duale 𝒟∗ = (𝑓𝑖,𝑗∗ )(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 ∈ (L(𝐿, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×))𝐼 ×𝐽 vérifie :
∀𝑓 ∈ 𝐿, (𝑓𝑖,𝑗∗ (𝑓 ))(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 = (𝑣𝑗∗ (𝑓 (𝑢𝑖 )))(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×𝐽 , ∀(𝑖, 𝑗) ∈ 𝐼 × 𝐽 , ∀𝑓 ∈ 𝐿, 𝑓𝑖,𝑗∗ (𝑓 ) = 𝑣𝑗∗ (𝑓 (𝑢𝑖 )).
En outre, que l’ensemble 𝐽 soit fini ou non, on a :
dim(𝐿, +, ⋅) = card(𝐼 × 𝐽 ) = card(𝐼 ) × card(𝐽 ) = dim(𝐸, +, ⋅) × dim(𝐹 , +, ⋅).
(v) On a vérifié que la formule (★) vaut dans chacun des cas étudiés. □
10
Définition 15 (Espace dual) — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel. On appelle
espace dual de cet espace et l’on note souvent (𝐸 ∗ , +, ⋅) le (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel (L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×), +, ⋅) de
ses formes linéaires. Rappelons que :
𝐸 ∗ = L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×) = {𝜑 ∈ 𝐾 𝐸 | ∀(𝑥, 𝑦) ∈ 𝐸 2 , ∀(𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 , 𝜑(𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝜇 ⋅ 𝑦) = 𝜆 × 𝜑(𝑥) + 𝜇 × 𝜑(𝑦)},
les lois + et ⋅ sur cet ensemble étant définies élément par élément à partir des lois + et × de l’ensemble 𝐾 :
𝐸∗ × 𝐸∗ → 𝐸∗ 𝐾 × 𝐸∗ → 𝐸∗
⎛ ⎞ ⎛ ⎞
+: ⎜ 𝐸→𝐾 ⎟, ⋅:⎜ 𝐸→𝐾 ⎟.
⎜(𝜑, 𝜒 ) ↦ 𝜑 + 𝜒 : ( )⎟ ⎜(𝜆, 𝜑) ↦ 𝜆 ⋅ 𝜑 : ( )⎟
⎝ 𝑥 ↦ 𝜑(𝑥) + 𝜒 (𝑥) ⎠ ⎝ 𝑥 ↦ 𝜆 × 𝜑(𝑥) ⎠
Définition 16 (Espace bidual) — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel dont on
note (𝐸 ∗ , +, ⋅) l’espace dual. On appelle espace bidual de l’espace (𝐸, +, ⋅) et l’on note souvent (𝐸 ∗∗ , +, ⋅) l’espace
dual (L(𝐸 ∗ , +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×), +, ⋅) de son espace dual (𝐸 ∗ , +, ⋅). Rappelons que :
𝐸 ∗∗ = L(𝐸 ∗ , +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×) = L(L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×), +, ⋅ ; 𝐾 , +, ×)
∗
= {𝛷 ∈ 𝐾 𝐸 | ∀(𝜑, 𝜒 ) ∈ (𝐸 ∗ )2 , ∀(𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 , 𝛷(𝜆 ⋅ 𝜑 + 𝜇 ⋅ 𝜒 ) = 𝜆 × 𝛷(𝜑) + 𝜇 × 𝛷(𝜒 )},
les lois + et ⋅ sur cet ensemble étant définies élément par élément à partir des lois + et × de l’ensemble 𝐾 :
𝐸 ∗∗ × 𝐸 ∗∗ → 𝐸 ∗∗ 𝐾 × 𝐸 ∗∗ → 𝐸 ∗∗
⎛ ⎞ ⎛ ⎞
+: ⎜ 𝐸∗ → 𝐾 ⎟, ⋅:⎜ 𝐸∗ → 𝐾 ⎟.
⎜(𝛷, 𝛸 ) ↦ 𝛷 + 𝛸 : ( )⎟ ⎜(𝜆, 𝛷) ↦ 𝜆 ⋅ 𝛷 : ( )⎟
⎝ 𝜑 ↦ 𝛷(𝜑) + 𝛸 (𝜑) ⎠ ⎝ 𝜑 ↦ 𝜆 × 𝛷(𝜑) ⎠
(i) La proposition précédente assure que la famille 𝒟 = (𝑒𝑖∗ )(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×{1} est libre dans l’espace (𝐸 ∗ , +, ⋅). La
famille réindexée (𝑒𝑖∗ )𝑖∈𝐼 = ℬ∗ vérifie la même propriété.
(ii) Supposons l’espace (𝐸, +, ⋅) de dimension finie. (L’hypothèse d’existence d’une base est ici superflue puis‐
qu’un espace de dimension finie admet toujours des bases.) D’après la proposition précédente, le système
∗)
𝒟 est une base de l’espace (𝐸 ∗ , +, ⋅) et son système dual 𝒟∗ = (𝜑𝑖,𝑗 ∗∗ 𝐼 ×{1} vérifie :
(𝑖,𝑗)∈𝐼 ×{1} ∈ (𝐸 )
∗ :(
𝐸∗ → 𝐾
∀(𝑖, 𝑗) ∈ 𝐼 × {1}, 𝜑𝑖,𝑗 ), ∀𝜑 ∈ 𝐸 ∗ , 𝜑 = ∑ 𝜑(𝑒𝑖 ) ⋅ 𝜑𝑖,𝑗 .
𝜑 ↦ 1∗𝐾 (𝜑(𝑒𝑖 )) = 𝜑(𝑒𝑖 ) (𝑖,𝑗)∈𝐼 ×{1}
11
Par réindexation, le système ℬ∗ est aussi une base de l’espace (𝐸 ∗ , +, ⋅) et son système dual ℬ∗∗ = (𝑒𝑖∗∗ )𝑖∈𝐼 ∈
(𝐸 ∗∗ )𝐼 est tel que :
𝐸∗ → 𝐾
∀𝑖 ∈ 𝐼 , 𝑒𝑖∗∗ : ( ), ∀𝜑 ∈ 𝐸 ∗ , 𝜑 = ∑ 𝜑(𝑒𝑖 ) ⋅ 𝑒𝑖∗ .
𝜑 ↦ 𝜑(𝑒𝑖 ) 𝑖∈𝐼
(iii) Supposons l’espace (𝐸, +, ⋅) de dimension infinie. Notons 𝑒 ∗ : 𝐸 ∋ 𝑥 ↦ (𝑒𝑖∗ (𝑥))𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) l’application des
coordonnées dans la base ℬ. Introduisons et étudions l’application 𝜑 : 𝐸 ∋ 𝑥 ↦ ∑𝑖∈𝐼 𝑒𝑖∗ (𝑥) ∈ 𝐾 .
Bonne définition Pour tout vecteur 𝑥 ∈ 𝐸, la famille de scalaires 𝑒 ∗ (𝑥) ∈ 𝐾 (𝐼 ) est à support fini et la
somme ∑𝑖∈𝐼 𝑒𝑖∗ (𝑥) = ∑𝑖∈supp (𝑒 ∗ (𝑥)) 𝑒𝑖∗ (𝑥) ∈ 𝐾 est bien définie.
Linéarité Soient deux couples (𝑥, 𝑦) ∈ 𝐸 2 et (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 . Notons 𝑆 ≔ supp(𝑒 ∗ (𝑥)), 𝑇 ≔ supp(𝑒 ∗ (𝑦)) et
𝑈 ≔ supp(𝑒 ∗ (𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝜇 ⋅ 𝑦)). La réunion 𝑆 ∪ 𝑇 est finie et contient les trois ensembles 𝑆, 𝑇 et 𝑈 . On calcule :
Les éléments considérés étant quelconques, on déduit que l’application 𝜑 est une forme linéaire de l’espace
(𝐸, +, ⋅), c’est‐à‐dire que 𝜑 ∈ 𝐸 ∗ .
Défaut de génération Considérons une forme linéaire 𝜒 ∈ vect(𝐸 ∗ ,+,⋅) (ℬ∗ ) ≕ 𝐿 ⊆ 𝐸 ∗ . Il existe une
famille de scalaires 𝛬 = (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) telle que 𝜒 = ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑒𝑖∗ . Le support 𝑆 ≔ supp(𝛬) de la famille 𝛬 est
une partie finie donc stricte de l’ensemble infini 𝐼 : la différence ensembliste 𝐼 𝑆 est non vide — et même
−
infinie — et l’on peut en considérer un élément 𝑗. Rappelons, notant 𝐼 2 ∋ (𝑖, 𝑗) ↦ δ𝑖,𝑗 ∈ {0𝐾 , 1𝐾 } le symbole
de Kronecker relatif à l’ensemble 𝐼 et au corps (𝐾 , +, ×), que la famille (𝑒𝑖∗ (𝑒𝑗 ))𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) égale à la famille
(δ𝑖,𝑗 )𝑖∈𝐼 et est de support réduit au singleton {𝑗}. On calcule alors :
et l’on observe que les deux formes linéaires 𝜑 et 𝜒 ne coïncident pas et sont distinctes dans l’ensemble
𝐸 ∗ . Puisque la seconde est quelconque, c’est donc que la première n’égale aucun élément de l’ensemble 𝐿
et n’appartient pas à ce dernier. Les relations 𝐸 ∗ ∋ 𝜑 ∉ 𝐿 = vect(𝐸 ∗ ,+,⋅) (ℬ∗ ) prouvent qu’on a l’inclusion
stricte 𝐿 ⊂ 𝐸 ∗ et que la famille ℬ∗ n’engendre pas l’espace (𝐸 ∗ , +, ⋅) ; elle n’en constitue donc pas non plus
une base. Par réindexation, la famille 𝒟 n’engendre pas l’espace (𝐸 ∗ , +, ⋅) et n’en est pas une base. □
Vocabulaire (Base duale) — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel de dimension
finie. La famille duale ℬ∗ de toute base ℬ de l’espace (𝐸, +, ⋅) est, puisqu’elle est une base de l’espace dual
(𝐸 ∗ , +, ⋅) de l’espace (𝐸, +, ⋅), préférentiellement appelée base duale de la base ℬ.
Remarque — La démonstration précédente prouve que le point (iv) de la proposition 14 ne se généralise pas
lorsque l’espace source (𝐸, +, ⋅) est de dimension infinie.
Proposition 18 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅), (𝐹 , +, ⋅) et (𝐺, +, ⋅) trois (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels. On a :
ℎ(𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝜇 ⋅ 𝑦) = 𝑔(𝑓 (𝜆 ⋅ 𝑥 + 𝜇 ⋅ 𝑦)) = 𝑔(𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑥) + 𝜇 ⋅ 𝑓 (𝑦)) = 𝜆 ⋅ 𝑔(𝑓 (𝑥)) + 𝜇 ⋅ 𝑔(𝑓 (𝑦)) = 𝜆 ⋅ ℎ(𝑥) + 𝜇 ⋅ ℎ(𝑦).
12
bilinéaire vis‐à‐vis des espaces précédents si elle est linéaire en chacune de ses deux variables, l’autre étant
fixée, ce qui signifie encore que les propriétés de compatibilité suivantes sont vérifiées :
∀(𝑥, 𝑥 ′ ) ∈ 𝐸 2 , ∀(𝑦, 𝑦 ′ ) ∈ 𝐹 2 , ∀𝜆 ∈ 𝐾 , 𝑓 (𝑥 + 𝑥 ′ , 𝑦) = 𝑓 (𝑥, 𝑦) + 𝑓 (𝑥 ′ , 𝑦),
𝑓 (𝑥, 𝑦 + 𝑦 ′ ) = 𝑓 (𝑥, 𝑦) + 𝑓 (𝑥, 𝑦 ′ ),
𝑓 (𝜆 ⋅ 𝑥, 𝑦) = 𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑥, 𝑦) = 𝑓 (𝑥, 𝜆 ⋅ 𝑦).
Définition 20 (Algèbre) — Soit (𝐾 , +, ×) un corps. On appelle algèbre sur le corps (𝐾 , +, ×) ou (𝐾 , +, ×)‐algèbre
tout quadruplet (𝐴, +, ⋅, ×) où :
• 𝐴 est un ensemble muni de deux lois de composition interne + et × ainsi que d’une loi de composition
externe à gauche ⋅ de domaine d’opérateurs 𝐾 ;
• le triplet (𝐴, +, ⋅) est un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel ;
• l’opération × : 𝐴×𝐴 → 𝐴 constitue une application bilinéaire vis‐à‐vis de cette structure d’espace vectoriel
— et vérifie donc, en particulier, une propriété de distributivité bilatérale par rapport à la loi +.
Étant donnée une telle algèbre (𝐴, +, ⋅, ×) :
• les éléments des ensembles 𝐴 et 𝐾 sont encore respectivement appelés vecteurs et scalaires ;
• les lois + et ⋅ sont encore respectivement appelées addition et multiplication par un scalaire tandis que la
loi × est dénommée multiplication ;
• on démontre comme pour les pseudo‐anneaux l’absorbance multiplicative bilatérale du vecteur nul 0𝐴 ∈ 𝐴,
élément neutre additif ;
• les notions de combinaison linéaire, famille libre, famille génératrice, base et dimension sont définies pour
l’algèbre relativement à la structure de (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel sous‐jacente du triplet (𝐴, +, ⋅) ;
• la notion de diviseur de zéro — à gauche, à droite ou bilatère — est définie comme pour les pseudo‐anneaux
relativement à la loi multiplicative × et au vecteur nul absorbant 0𝐴 ;
• on dit que l’algèbre est :
◦ unifère ou unitaire si sa loi multiplicative × admet un élément neutre bilatère, souvent noté 1𝐴 ;
◦ intègre ou sans diviseur de zéro si elle n’admet pas de diviseur de zéro, ce qui équivaut à un théorème
du produit nul ;
◦ commutative si sa loi multiplicative × l’est ;
◦ associative si sa loi multiplicative × l’est, c’est‐à‐dire si le triplet (𝐴, +, ×) est en fait un pseudo‐anneau :
dans ce cas, les notions d’unitarité, commutativité, diviseur de zéro (à gauche, à droite ou bilatère) et
intégrité de l’algèbre et du pseudo‐anneau coïncident respectivement et l’on conserve également tout
le reste du vocabulaire des pseudo‐anneaux et, en cas d’unitarité, des anneaux.
Convention — Les conventions d’écriture et de priorité faites pour les pseudo‐anneaux et les espaces vecto‐
riels s’appliquent également aux algèbres.
Proposition 21 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel. On désigne par 𝐿 ≔ L(𝐸, +, ⋅)
= L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐸, +, ⋅) l’ensemble des endomorphismes de l’espace (𝐸, +, ⋅).
(i) La composition d’applications ∘ induit sur l’ensemble 𝐿 une loi de composition interne, encore notée ∘.
(ii) Le quadruplet (𝐿, +, ⋅, ∘), où les lois + et ⋅ sont définies élément par élément à partir des lois correspondantes
de l’ensemble 𝐸, constitue une (𝐾 , +, ×)‐algèbre associative et unitaire dont les éléments neutres additif et
multiplicatif 0𝐿 et 1𝐿 égalent respectivement l’application identiquement nulle 0𝐸 𝐸 : 𝐸 ∋ 𝑥 ↦ 0𝐸 ∈ 𝐸 et
l’identité id𝐸 : 𝐸 ∋ 𝑥 ↦ 𝑥 ∈ 𝐸 de l’ensemble 𝐸.
(iii) Si dim(𝐸, +, ⋅) ∈ {0, 1}, alors l’algèbre (𝐿, +, ⋅, ∘) est commutative et intègre.
(iv) Si l’espace (𝐸, +, ⋅) est de dimension supérieure ou égale au nombre 2 — dans l’ensemble ordonné (ℕ, ⩽) — et
admet une base, alors l’algèbre (𝐿, +, ⋅, ∘) n’est ni commutative ni intègre et admet même, pour tout nombre
𝑛 ∈ ℕ ∩ ⟦2, card(𝐼 )⟧, des éléments nilpotents d’indice de nilpotence égal au nombre 𝑛.
Démonstration — (i) La proposition précédente assure que la composée de deux endomorphismes de l’espace
(𝐸, +, ⋅) est encore un endomorphisme de cet espace. L’application 𝐿2 ∋ (𝑓 , 𝑔) ↦ 𝑓 ∘ 𝑔 ∈ 𝐿 est donc bien
définie et constitue une loi de composition interne dans l’ensemble 𝐿.
(ii) Il est connu que : • le triplet (𝐿, +, ⋅) est un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel de vecteur nul 0𝐿 égal à l’application
identiquement nulle 0𝐸 𝐸 ; • la loi ∘ est associative ; • l’application id𝐸 appartient à l’ensemble 𝐿 et est élément
13
neutre bilatère vis‐à‐vis de la loi ∘ de cet ensemble. Soient un triplet (𝑓 , 𝑔, ℎ) ∈ 𝐿3 et un scalaire 𝜆 ∈ 𝐾 . On
calcule, pour tout vecteur 𝑥 ∈ 𝐸 :
((𝑓 + 𝑔) ∘ ℎ)(𝑥) = (𝑓 + 𝑔)(ℎ(𝑥)) = 𝑓 (ℎ(𝑥)) + 𝑔(ℎ(𝑥)) = (𝑓 ∘ ℎ)(𝑥) + (𝑔 ∘ ℎ)(𝑥) = ((𝑓 ∘ ℎ) + (𝑔 ∘ ℎ))(𝑥),
(𝑓 ∘ (𝑔 + ℎ))(𝑥) = 𝑓 ((𝑔 + ℎ)(𝑥)) = 𝑓 (𝑔(𝑥) + ℎ(𝑥)) = 𝑓 (𝑔(𝑥)) + 𝑓 (ℎ(𝑥)) = (𝑓 ∘ 𝑔)(𝑥) + (𝑓 ∘ ℎ)(𝑥)
= ((𝑓 ∘ 𝑔) + (𝑓 ∘ ℎ))(𝑥),
((𝜆 ⋅ 𝑓 ) ∘ 𝑔)(𝑥) = (𝜆 ⋅ 𝑓 )(𝑔(𝑥)) = 𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑔(𝑥)) = 𝜆 ⋅ (𝑓 ∘ 𝑔)(𝑥) = (𝜆 ⋅ (𝑓 ∘ 𝑔))(𝑥),
(𝑓 ∘ (𝜆 ⋅ 𝑔))(𝑥) = 𝑓 ((𝜆 ⋅ 𝑔)(𝑥)) = 𝑓 (𝜆 ⋅ 𝑔(𝑥)) = 𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑔(𝑥)) = 𝜆 ⋅ (𝑓 ∘ 𝑔)(𝑥) = (𝜆 ⋅ (𝑓 ∘ 𝑔))(𝑥),
où l’on a invoqué la définition des lois + et ⋅ de l’ensemble 𝐿 et la linéarité de l’application 𝑓 . L’on observe
que : • les sources et buts des applications en jeu égalent tous l’ensemble 𝐸 ; • les applications (𝑓 + 𝑔) ∘ ℎ et
(𝑓 ∘ ℎ) + (𝑔 ∘ ℎ) coïncident sur l’ensemble 𝐸 et sont égales ; • les applications 𝑓 ∘ (𝑔 + ℎ) et (𝑓 ∘ 𝑔) + (𝑓 ∘ ℎ)
coïncident sur l’ensemble 𝐸 et sont égales ; • les applications (𝜆 ⋅ 𝑓 )∘, 𝜆 ⋅ (𝑓 ∘ 𝑔) et 𝑓 ∘ (𝜆 ⋅ 𝑔) coïncident sur
l’ensemble 𝐸 et sont égales. En somme :
(𝑓 + 𝑔) ∘ ℎ = (𝑓 ∘ ℎ) + (𝑔 ∘ ℎ), 𝑓 ∘ (𝑔 + ℎ) = (𝑓 ∘ 𝑔) + (𝑓 ∘ ℎ), (𝜆 ⋅ 𝑓 ) ∘ 𝑔 = 𝜆 ⋅ (𝑓 ∘ 𝑔) = 𝑓 ∘ (𝜆 ⋅ 𝑔).
Les éléments considérés étant quelconques, c’est donc que l’opération de composition ∘ est bilinéaire vis‐
à‐vis de la structure de (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel du triplet (𝐿, +, ⋅). À ce stade, on peut affirmer que le
quadruplet (𝐿, +, ⋅, ∘) est une (𝐾 , +, ×)‐algèbre associative et unitaire.
(iii) Dimension nulle Si dim(𝐸, +, ⋅) = 0, alors : • on a vu qu’on a les égalités 𝐸 = {0𝐸 } et 𝐿 = {0𝐿 } ; • la
commutativité et l’intégrité de l’algèbre triviale/nulle (𝐿, +, ⋅, ∘) sont immédiates :
∀(𝑓 , 𝑔) ∈ 𝐿2 , 𝑓 = 0𝐿 = 𝑔 ∧ 𝑓 ∘ 𝑔 = 0𝐿 = 𝑔 ∘ 𝑓 ∧ (𝑓 ∘ 𝑔 = 0𝐿 ⇒ (𝑓 = 0𝐿 ∨ 𝑔 = 0𝐿 )).
Dimension 𝟏 Supposons que dim(𝐸, +, ⋅) = 1. Notons (𝐸 ∗ , +, ⋅) et (𝐿∗ , +, ⋅) les espaces duaux respectifs
des espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐿, +, ⋅). L’espace (𝐸, +, ⋅) admet une base ℬ = (𝑒𝑖 )𝑖∈𝐼 = 𝐸 𝐼 indexée par un singleton 𝐼 .
Notons ℬ∗ = (𝑒 ∗ )𝑖∈𝐼 ∈ (𝐸 ∗ )𝐼 la base duale associée. D’après la proposition 14, le système 𝒞 = (𝑓𝑖,𝑗 )(𝑖,𝑗)∈𝐼 2 ∈
2
𝐿𝐼 défini ci‐dessous est une base de l’espace (𝐿, +, ⋅) :
𝐸→𝐸
∀(𝑖, 𝑗) ∈ 𝐼 2 , 𝑓𝑖,𝑗 : ( )
𝑥 ↦ 𝑒𝑖∗ (𝑥) ⋅ 𝑒𝑗
2
et son système dual 𝒞 ∗ = (𝑓𝑖,𝑗∗ )(𝑖,𝑗)∈𝐼 2 ∈ (𝐿∗ )𝐼 vérifie :
𝐿→𝐾
∀(𝑖, 𝑗) ∈ 𝐼 2 , 𝑓𝑖,𝑗∗ : ( ), ∀𝑓 ∈ 𝐿, 𝑓 = ∑ 𝑒𝑗∗ (𝑓 (𝑒𝑖 )) ⋅ 𝑓𝑖,𝑗 .
𝑓 ↦ 𝑒𝑗∗ (𝑓 (𝑒𝑖 )) (𝑖,𝑗)∈𝐼 2
14
⇒ (𝜆 = 0𝐾 ∨ 𝜇 = 0𝐾 )
⇒ (𝑓 = 0𝐿 ∨ 𝑔 = 0𝐿 ).
−
On calcule :
(𝑔 ∘ 𝑓 )(𝑒𝑖 ) = 𝑔(𝑓 (𝑒𝑖 )) = 𝑔(𝑒𝑖 − 𝑒𝑗 ) = 𝑔(𝑒𝑖 ) − 𝑔(𝑒𝑗 ) = 𝑒𝑗 + 𝑒𝑖 − 𝑒𝑗 = 𝑒𝑖 ,
(𝑓 ∘ 𝑔)(𝑒𝑖 ) = 𝑓 (𝑔(𝑒𝑖 )) = 𝑓 (𝑒𝑗 ) = 𝑒𝑗
et, puisque 𝑒𝑖 ≠ 𝑒𝑗 , l’on observe que les deux endomorphismes composés 𝑔 ∘ 𝑓 et 𝑓 ∘ 𝑔 ne coïncident pas en
le vecteur 𝑒𝑖 et sont donc distincts. C’est donc que les endomorphismes 𝑓 et 𝑔 ne commutent pas vis‐à‐vis
de la loi de composition ∘ : ce contre‐exemple prouve que l’algèbre (𝐿, +, ⋅, ∘) n’est pas commutative.
Non‐intégrité et nilpotence Soit un nombre 𝑛 ∈ ℕ ∩ ⟦2, card(𝐼 )⟧. L’on peut considérer un 𝑛‐arrange‐
ment (𝑖𝑗 )𝑗 ∈⟦1,𝑛⟧ ∈ 𝒜𝑛 (𝐼 ). Introduisons l’ensemble 𝐽 ≔ {𝑖𝑗 , 𝑗 ∈ ⟦1, 𝑛 − 1⟧} ainsi que l’endomorphisme ℎ ∈ 𝐿
défini par :
∀𝑗 ∈ ⟦1, 𝑛 − 1⟧, ℎ(𝑒𝑖𝑗 ) = 𝑒𝑖𝑗+1 , ∀𝑖 ∈ 𝐼 𝐽 , ℎ(𝑒𝑖 ) = 0𝐸 .
Rappelons que, en vertu des règles de calcul dans l’algèbre (𝐿, +, ⋅, ∘), on a : −
la dernière implication découlant du principe de contraposition et des lois de De Morgan du calcul des
prédicats. Calculons d’abord :
Par ailleurs, pour tout indice 𝑗 ∈ ⟦1, 𝑛 − 1⟧, une récurrence immédiate prouve que :
En particulier, les relations ℎ𝑛−1 (𝑒𝑖1 ) = 𝑒𝑖𝑛 ≠ 0𝐸 sont vérifiées et, en invoquant aussi le rappel précédent,
on déduit que :
ℎ𝑛−1 ≠ 0𝐿 , ∀𝑘 ∈ ⟦1, 𝑛 − 1⟧, ℎ𝑘 ≠ 0𝐿 .
Enfin :
∀𝑗 ∈ ⟦1, 𝑛 − 1⟧, ℎ𝑛 (𝑒𝑖𝑗 ) = (ℎ𝑗 −1 ∘ ℎ ∘ ℎ𝑛−𝑗 )(𝑒𝑖𝑗 ) = (ℎ𝑗 −1 ∘ ℎ)(ℎ𝑛−𝑗 (𝑒𝑖𝑗 )) ∀𝑖 ∈ 𝐽 , ℎ𝑛 (𝑒𝑖 ) = 0𝐸 . (‡)
= (ℎ𝑗 −1 ∘ ℎ)(𝑒𝑖𝑛 ) = ℎ𝑗 −1 (ℎ(𝑒𝑖𝑛 )) = ℎ𝑗 −1 (0𝐸 ) = 0𝐸 ,
∀𝑖 ∈ 𝐼 , ℎ𝑛 (𝑒𝑖 ) = 0𝐸 .
On peut écrire les égalités ℎ𝑛 ∘ ℬ = (0𝐸 )𝑖∈𝐼 = 0𝐿 ∘ ℬ et, par unicité, déduire que ℎ𝑛 = 0𝐿 . En défintive,
on a prouvé que l’endomorphisme ℎ est nilpotent, d’indice de nilpotence égal au nombre 𝑛. En particulier,
l’algèbre (𝐿, +, ⋅, ∘) n’est pas intègre : la composée ℎ ∘ ℎ𝑛−1 = ℎ𝑛 y est nulle sans qu’aucun des facteurs ℎ et
ℎ𝑛−1 ne le soit. □
15
Remarque — Avec les mêmes notations, on pourra appliquer dans l’algèbre associative et unitaire (𝐿, +, ⋅, ∘)
des identités remarquables et la formule du binôme de Newton à des endomorphismes commutant vis‐à‐vis
de la loi de composition ∘.
Proposition 22 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅), (𝐹 , +, ⋅) et (𝐺, +, ⋅) trois (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels. On a :
L’application 𝑓 −1 est donc linéaire. Il s’agit bien, en définitive, d’un isomorphisme de l’espace (𝐹 , +, ⋅) vers
l’espace (𝐸, +, ⋅), c’est‐à‐dire d’un élément de l’ensemble iso(𝐹 , +, ⋅ ; 𝐸, +, ⋅). □
Corollaire 23 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels. Il existe un
isomorphisme de l’espace (𝐸, +, ⋅) vers l’espace (𝐹 , +, ⋅) si, et seulement si, il en existe un de l’espace (𝐹 , +, ⋅) vers
l’espace (𝐸, +, ⋅) :
iso(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅) ≠ ∅ ⇔ iso(𝐹 , +, ⋅ ; 𝐸, +, ⋅) ≠ ∅.
Définition 24 (Espaces vectoriels isomorphes) — Deux espaces vectoriels sur un même corps sont dits
isomorphes s’il existe un isomorphisme de l’un vers l’autre.
Proposition 25 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel. On note (𝐿, +, ⋅, ∘) l’algèbre
des endomorphismes de l’espace (𝐸, +, ⋅) et 𝐺 ≔ GL(𝐸, +, ⋅) l’ensemble des automorphismes de ce même espace.
(i) La composition d’applications ∘ induit sur l’ensemble 𝐺 une loi de composition interne, encore notée ∘.
(ii) Le couple (𝐺, ∘) constitue un sous‐groupe du groupe symétrique (𝔖(𝐸), ∘) de l’ensemble 𝐸 : c’est le groupe des
unités de l’algèbre associative et unitaire (𝐿, +, ⋅, ∘).
(iii) Si dim(𝐸, +, ⋅) ∈ {0, 1}, alors le groupe (𝐺, ∘) est abélien.
(iv) Si l’espace (𝐸, +, ⋅) admet une base de cardinal supérieur ou égal à 2 — dans l’ensemble ℕ —, alors le groupe
(𝐺, ∘) n’est pas abélien.
Vocabulaire (Groupe général linéaire) — Avec les mêmes notations, le groupe (𝐺, ∘) est appelé groupe
général linéaire ou simplement groupe linéaire du (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel (𝐸, +, ⋅).
Démonstration — (i) Pour tout couple (𝑓 , 𝑔) ∈ 𝐺 2 , les automorphismes 𝑓 et 𝑔 sont des endomorphismes bijec‐
tifs de l’espace (𝐸, +, ⋅) et la composée 𝑓 ∘ 𝑔 : 𝐸 → 𝐸 est : • bien définie ; • bijective ; • un endomorphisme de
l’espace (𝐸, +, ⋅) ; • donc un automorphisme de cet espace, c’est‐à‐dire un élément de l’ensemble 𝐺. L’ap‐
plication 𝐺 2 ∋ (𝑓 , 𝑔) ↦ 𝑓 ∘ 𝑔 ∈ 𝐺 est donc bien définie et constitue une loi de composition interne dans
l’ensemble 𝐺.
(ii) L’égalité 𝐺 = 𝐿 ∩ 𝔖(𝐸) est immédiate puisque l’ensemble 𝐺 est constitué des applications 𝑓 ∈ 𝐸 𝐸 si‐
multanément : • linéaires de l’espace (𝐸, +, ⋅) vers lui‐même, c’est‐à‐dire appartenant à l’ensemble 𝐿 des
endomorphismes de cet espace ; • et bijectives, c’est‐à‐dire éléments de l’ensemble bij(𝐸, 𝐸) = 𝔖(𝐸) des
permutations de l’ensemble 𝐸. On a déjà vu que id𝐸 ∈ 𝐺 ≠ ∅ et le point précédent assure que l’en‐
semble 𝐺 est stable par la loi du groupe (𝔖(𝐸), ∘). Enfin, cet ensemble est également stable par passage
au symétrique vis‐à‐vis de cette même loi, c’est‐à‐dire par passage à la bijection réciproque, car, pour tout
16
automorphisme 𝑓 ∈ 𝐺, la bijection réciproque 𝑓 −1 de l’application 𝑓 est : • bijective ; • un endomorphisme
de l’espace (𝐸, +, ⋅) ; • conséquemment un automorphisme de ce même espace, c’est‐à‐dire un élément
de l’ensemble 𝐺. À ce stade, on peut affirmer que la partie 𝐺 ⊆ 𝔖(𝐸) définit un sous‐groupe du groupe
(𝔖(𝐸), ∘). Prouvons qu’elle égale la partie 𝐿∘ constituée des unités de l’algèbre associative et unitaire (𝐿,
+, ⋅, ∘) — c’est‐à‐dire des unités de l’anneau (𝐿, +, ∘).
Inclusion directe La bijection réciproque 𝑓 −1 de tout automorphisme 𝑓 ∈ 𝐺 ⊆ 𝐿 appartient à l’en‐
semble 𝐺 ⊆ 𝐿 et vérifie les relations 𝑓 −1 ∈ 𝐺 ⊆ 𝐿 et 𝑓 −1 ∘ 𝑓 = id𝐸 = 𝑓 ∘ 𝑓 −1 , de sorte que l’application 𝑓
est inversible dans l’anneau (𝐿, +, ∘) et appartient à l’ensemble 𝐿∘ . D’où l’inclusion 𝐺 ⊆ 𝐿∘ .
Inclusion réciproque Tout endomorphisme 𝑓 ∈ 𝐿∘ appartient à l’ensemble 𝐿 et admet un inverse 𝑔 ∈ 𝐿,
tel que 𝑔 ∘ 𝑓 = id𝐸 = 𝑓 ∘ 𝑔, si bien que : • les applications 𝑓 et 𝑔 sont bijectives et réciproques l’une de
l’autre ; • l’application 𝑓 est un automorphisme de l’espace (𝐸, +, ⋅), c’est‐à‐dire un élément de l’ensemble
𝐺. C’est donc que 𝐿∘ ⊆ 𝐺.
On a établi la double inclusion 𝐺 ⊆ 𝐿∘ ⊆ 𝐺, c’est‐à‐dire, par extensionnalité, l’égalité 𝐺 = 𝐿∘ escomptée. In
fine, le couple (𝐺, ∘) est un groupe : • en tant que sous‐groupe du groupe (𝔖(𝐸), ∘) ; • ou bien parce qu’il
se confond avec le groupe des unités (𝐿∘ , ∘) de l’anneau (𝐿, +, ∘).
(iii) Lorsque dim(𝐸, +, ⋅) ∈ {0, 1}, la commutativité de l’algèbre (𝐿, +, ⋅, ∘) se transmet évidemment au groupe
(𝐺, ∘).
(iv) Supposons que l’espace (𝐸, +, ⋅) admet une base ℬ = (𝑒𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 indexée par un certain ensemble 𝐼 de
cardinal supérieur ou égal à 2 — dans l’ensemble ℕ. Reprenons le contre‐exemple présenté lors de l’étude
de l’algèbre (𝐿, +, ⋅, ∘) et considérons un couple (𝑖, 𝑗) ∈ 𝒜2 (𝐼 ) ainsi que les deux endomorphismes 𝑓 ∈ 𝐿 et
𝑔 ∈ 𝐿 caractérisés par les relations suivantes :
𝑢 ∘ 𝑓 = 𝑓 ∘ 𝑢 = 𝑣 ∘ 𝑔 = 𝑔 ∘ 𝑣 = id𝐸 .
C’est donc que : • les endomorphismes 𝑓 et 𝑢 sont bijectifs et réciproques l’un de l’autre ; • les endomor‐
phismes 𝑔 et 𝑣 sont bijectifs et réciproques l’un de l’autre. En particulier, on a (𝑓 , 𝑔) ∈ 𝐺 2 . Par ailleurs,
on a déjà vu que 𝑔 ∘ 𝑓 ≠ 𝑓 ∘ 𝑔. Les automorphismes 𝑓 et 𝑔 ne commutent pas : le groupe (𝐺, ∘) n’est pas
abélien. □
17
3 Applications linéaires & sous‐espaces : noyau, image, théorème du rang
Proposition 26 — Soient un corps (𝐾 , +, ×), deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) ainsi qu’une
application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅).
(i) L’ensemble image directe 𝑓 [𝐴] ⊆ 𝐹 par l’application 𝑓 de toute partie 𝐴 ⊆ 𝐸 définissant un sous‐espace de
l’espace (𝐸, +, ⋅) définit un sous‐espace vectoriel de l’espace (𝐹 , +, ⋅).
(ii) L’ensemble image réciproque 𝑓 −1 [𝐵] ⊆ 𝐸 par l’application 𝑓 de toute partie 𝐵 ⊆ 𝐹 définissant un sous‐espace
de l’espace (𝐹 , +, ⋅) définit un sous‐espace vectoriel de l’espace (𝐸, +, ⋅).
Démonstration — (i) Soit une partie 𝐴 ⊆ 𝐸 définissant un sous‐espace de l’espace (𝐸, +, ⋅) : elle possède le
vecteur nul 0𝐸 et est stable par combinaison linéaire. Étudions la partie 𝑓 [𝐴] ≔ {𝑓 (𝑥), 𝑥 ∈ 𝐴} = {𝑦 ∈ 𝐹 |
∃𝑥 ∈ 𝐴 : 𝑦 = 𝑓 (𝑥)} ⊆ 𝐹 .
Vecteur nul On a 0𝐸 ∈ 𝐴 et l’on peut écrire les relations 0𝐹 = 𝑓 (0𝐸 ) ∈ 𝑓 [𝐴] ≠ ∅.
Stabilité par combinaison linéaire Pour tous couples (𝑦, 𝑧) ∈ (𝑓 [𝐴])2 et (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 , il existe un
couple (𝑥, 𝑡) ∈ 𝐴2 tel que (𝑦, 𝑧) = (𝑓 (𝑥), 𝑓 (𝑡)) et l’on peut écrire :
Conclusion La partie 𝑓 [𝐴] ⊆ 𝐹 est donc non vide et stable par combinaison linéaire dans l’espace
(𝐹 , +, ⋅) : elle définit un sous‐espace de ce dernier.
(ii) Soit une partie 𝐵 ⊆ 𝐹 définissant un sous‐espace de l’espace (𝐹 , +, ⋅) : elle possède le vecteur nul 0𝐹 et est
stable par combinaison linéaire. Étudions la partie 𝑓 −1 [𝐵] ≔ {𝑥 ∈ 𝐸 | 𝑓 (𝑥) ∈ 𝐵} ⊆ 𝐸.
Vecteur nul Les relations 𝑓 (0𝐸 ) = 0𝐹 ∈ 𝐵 assurent que 0𝐸 ∈ 𝑓 −1 [𝐵] ≠ ∅.
Stabilité par combinaison linéaire Pour tous couples (𝑥, 𝑦) ∈ (𝑓 −1 [𝐵])2 et (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 , on a :
Conclusion Ainsi la partie 𝑓 −1 [𝐵] ⊆ 𝐸 est‐elle non vide et stable par combinaison linéaire dans l’espace
(𝐸, +, ⋅) : elle définit un sous‐espace de ce dernier. □
Rappels (Noyau, image) — Soient un corps (𝐾 , +, ×), deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅)
ainsi qu’une application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅).
(i) L’application 𝑓 est, en particulier, un homomorphisme de groupes du groupe (𝐸, +) vers le groupe (𝐹 , +)
et l’on peut donc considérer son noyau ker(𝐹 ,+) (𝑓 ) = ker0𝐹 (𝑓 ) ≔ 𝑓 −1 [{0𝐹 }] = {𝑥 ∈ 𝐸 | 𝑓 (𝑥) = 0𝐹 } ⊆ 𝐸,
également noté ker(𝑓 ) en l’absence d’ambiguïté vis‐à‐vis de la structure dont est muni l’ensemble 𝐹 .
(ii) L’ensemble image de l’application 𝑓 est, indépendamment des structures sur les ensembles 𝐸 et 𝐹 , toujours
im(𝑓 ) ≔ 𝑓 [𝐸] = {𝑓 (𝑥), 𝑥 ∈ 𝐸} = {𝑦 ∈ 𝐹 | ∃𝑥 ∈ 𝐸 : 𝑦 = 𝑓 (𝑥)} ⊆ 𝐹 .
Proposition 27 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps, (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels ainsi qu’une
application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅).
(i) Le noyau ker(𝑓 ) de l’application linéaire 𝑓 définit un sous‐espace vectoriel de l’espace (𝐸, +, ⋅).
(ii) L’application 𝑓 est injective si, et seulement si ker(𝑓 ) = {0𝐸 }, ce qui équivaut encore à la seule inclusion
ker(𝑓 ) ⊆ {0𝐸 }.
(iii) L’ensemble image im(𝑓 ) de l’application linéaire 𝑓 définit un sous‐espace vectoriel de l’espace (𝐹 , +, ⋅).
(iv) L’application 𝑓 est surjective si, et seulement si, im(𝑓 ) = 𝐹 , ce qui équivaut encore à la seule inclusion
𝐹 ⊆ im(𝑓 ).
(v) Toute famille de vecteurs 𝒳 = (𝑥𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 indexée par un certain ensemble 𝐼 et génératrice de l’espace (𝐸, +, ⋅)
est telle que la famille 𝒴 = (𝑦𝑖 )𝑖∈𝐼 ≔ 𝑓 ∘ 𝒳 = (𝑓 (𝑥𝑖 ))𝑖∈𝐼 ∈ (im(𝑓 ))𝐼 engendre le sous‐espace vectoriel
(im(𝑓 ), +, ⋅) de l’espace (𝐹 , +, ⋅).
Démonstration — (i) La partie {0𝐹 } ⊆ 𝐹 définit un sous‐espace vectoriel de l’espace (𝐹 , +, ⋅). La proposition
précédente assure que la partie 𝑓 −1 [{0𝐹 }] = ker(𝑓 ) ⊆ 𝐸 définit un sous‐espace vectoriel de l’espace (𝐸, +, ⋅).
(ii) Ce point découle des propriétés du noyau d’un homomorphisme de groupes.
(iii) La partie 𝐸 ⊆ 𝐸 définit un sous‐espace vectoriel de l’espace (𝐸, +, ⋅), D’après la proposition précédente, la
partie 𝑓 [𝐸] = im(𝑓 ) ⊆ 𝐹 définit un sous‐espace vectoriel de l’espace (𝐹 , +, ⋅).
18
(iv) Ce point procède des propriétés de l’ensemble image d’une application quelconque.
(v) Conservons les notations de l’énoncé. Les éléments de la famille 𝒴 sont des vecteurs de l’espace (im(𝑓 ), +, ⋅)
et l’inclusion vect(im(𝑓 ),+,⋅) (𝒴 ) ⊆ im(𝑓 ) est immédiate. Réciproquement, pour tout vecteur 𝑦 ∈ im(𝑓 ) : • il
existe un vecteur 𝑥 ∈ 𝐸 tel que 𝑦 = 𝑓 (𝑥) ; • puisque la famille 𝒳 engendre l’espace (𝐸, +, ⋅), il existe une
famille de scalaires 𝛬 = (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) telle que 𝑥 = ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 ; • l’on peut écrire et calculer :
D’où l’inclusion im(𝑓 ) ⊆ vect(im(𝑓 ),+,⋅) (𝒴 ) : la famille 𝒴 est génératrice de l’espace (im(𝑓 ), +, ⋅). □
Proposition 28 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps, (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels ainsi qu’une
application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅). On a :
Vocabulaire — Avec les mêmes notations, étant donné un vecteur 𝑦 ∈ im(𝑓 ), on dit que la partie 𝑓 −1 [{𝑦}] ⊆ 𝐸
définit un espace affine de direction ker(𝑓 ).
Démonstration — Fixons une image 𝑦 ∈ im(𝑓 ) de l’application 𝑓 et considérons‐en un antécédent 𝑥 ∈ 𝑓 −1 [{𝑦}].
Inclusion directe Pour tout antécédent 𝑢 du vecteur 𝑦 par l’application 𝑓 , on a, notant 𝑡 ≔ 𝑢 − 𝑥 ∈ 𝐸 :
Inclusion réciproque Tout élément 𝑢 ∈ 𝑥 + ker(𝑓 ) s’écrit 𝑢 = 𝑥 + 𝑡 pour un certain vecteur 𝑡 ∈ ker(𝑓 ) et
vérifie :
𝑓 (𝑢) = 𝑓 (𝑥 + 𝑡) = 𝑓 (𝑥) + 𝑓 (𝑡) = 𝑦 + 0𝐹 = 𝑦, 𝑢 ∈ 𝑓 −1 [{𝑦}].
Conclusion Par extensionnalité, l’égalité 𝑓 −1 [{𝑦}] = 𝑥 + ker(𝑓 ) est effectivement vérifiée. □
Définition 29 (Rang) — Soient (𝐾 , +, ×) un corps et (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels. On
appelle rang — vis‐à‐vis des espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) — d’une application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅) et l’on
note rg(𝐸,+,⋅ ;𝐹 ,+,⋅) (𝑓 ) ∈ ℕ ou, en l’absence d’ambiguïté vis‐à‐vis des structures, rg(𝑓 ) la dimension — finie ou
infinie — du sous‐espace vectoriel de l’espace (𝐹 , +, ⋅) défini par l’ensemble image im(𝑓 ) de l’application 𝑓 :
19
les uplets (0, 0) et (0, 0, 0). On considère l’application suivante :
ℝ3 → ℝ 2
𝑓:( ).
(𝑥, 𝑦, 𝑧) ↦ (2𝑥 + 𝑦 − 3𝑧, −𝑥 + 𝑧)
Elle est linéaire ; on calcule en effet, pour tous couples (𝑠, 𝑡) = ((𝑥, 𝑦, 𝑧), (𝑢, 𝑣, 𝑤)) ∈ (ℝ3 )2 et (𝜆, 𝜇) ∈ ℝ2 :
𝑓 (𝜆 ⋅ 𝑠 + 𝜇 ⋅ 𝑡) = 𝑓 ((𝜆𝑥, 𝜆𝑦, 𝜆𝑧) + (𝜇𝑢, 𝜇𝑣, 𝜇𝑤)) = 𝑓 ((𝜆𝑥 + 𝜇𝑢, 𝜆𝑦 + 𝜇𝑣, 𝜆𝑧 + 𝜇𝑤))
= (2(𝜆𝑥 + 𝜇𝑢) + (𝜆𝑦 + 𝜇𝑣) − 3(𝜆𝑧 + 𝜇𝑤), −(𝜆𝑥 + 𝜇𝑢) + (𝜆𝑧 + 𝜇𝑤))
= (2𝜆𝑥 + 2𝜇𝑢 + 𝜆𝑦 + 𝜇𝑣 − 3𝜆𝑧 − 3𝜇𝑤, −𝜆𝑥 − 𝜇𝑢 + 𝜆𝑧 + 𝜇𝑤)
= (𝜆(2𝑥 + 𝑦 − 3𝑧) + 𝜇(2𝑢 + 𝑣 − 3𝑤), 𝜆(−𝑥 + 𝑧) + 𝜇(−𝑢 + 𝑤))
= (𝜆(2𝑥 + 𝑦 − 3𝑧), 𝜆(−𝑥 + 𝑧)) + (𝜇(2𝑢 + 𝑣 − 3𝑤), 𝜇(−𝑢 + 𝑤))
= 𝜆 ⋅ (2𝑥 + 𝑦 − 3𝑧, −𝑥 + 𝑧) + 𝜇 ⋅ (2𝑢 + 𝑣 − 3𝑤, −𝑢 + 𝑤) = 𝜆 ⋅ 𝑓 (𝑠) + 𝜇 ⋅ 𝑓 (𝑡).
Déterminons son noyau et son image. Fixons un instant deux vecteurs 𝑠 = (𝑥, 𝑦, 𝑧) ∈ ℝ3 et 𝑡 = (𝑢, 𝑣) ∈ ℝ2 . On
a les équivalences suivantes :
𝑠 ∈ 𝑓 −1 [{𝑡}] ⇔ 𝑓 (𝑠) = 𝑡
⇔ (2𝑥 + 𝑦 − 3𝑧, −𝑥 + 𝑧) = (𝑢, 𝑣)
⇔ (2𝑥 + 𝑦 − 3𝑧 = 𝑢 ∧ −𝑥 + 𝑧 = 𝑣)
⇔ (𝑥 = −𝑣 + 𝑧 ∧ 𝑦 = 𝑢 − 2𝑥 + 3𝑧 = 𝑢 + 2𝑣 − 2𝑧 + 3𝑧 = 𝑢 + 2𝑣 + 𝑧)
⇔ 𝑠 = (−𝑣 + 𝑧, 𝑢 + 2𝑣 + 𝑧, 𝑧) = (−𝑣, 𝑢 + 2𝑣, 0) + (𝑧, 𝑧, 𝑧) = (−𝑣, 𝑢 + 2𝑣, 0) + 𝑧 ⋅ (1, 1, 1)
⇔ 𝑠 ∈ (−𝑣, 𝑢 + 2𝑣, 0) + ℝ ⋅ (1, 1, 1) = {(−𝑣, 𝑢 + 2𝑣, 0) + 𝜆 ⋅ (1, 1, 1), 𝜆 ∈ ℝ}.
La dernière implication réciproque vient de ce que, si 𝑠 ∈ (−𝑣, 𝑢 + 2𝑣, 0) + ℝ ⋅ (1, 1, 1), alors il existe un scalaire
𝜆 ∈ ℝ tel que 𝑠 = (−𝑣, 𝑢 + 2𝑣, 0) + 𝜆 ⋅ (1, 1, 1) = (−𝑣 + 𝜆, 𝑢 + 2𝑣 + 𝜆, 𝜆) et, par identification des coordonnées,
on a nécessairement 𝜆 = 𝑧. En définitive : • puisque le vecteur 𝑠 est quelconque, on déduit par extensionnalité
que l’égalité ensembliste 𝑓 −1 [{𝑡}] = (−𝑣, 𝑢 + 2𝑣, 0) + ℝ ⋅ (1, 1, 1) est vérifiée et l’on peut aussi remarquer que
l’application ℝ ∋ 𝜆 ↦ (−𝑣 + 𝜆, 𝑢 + 2𝑣 + 𝜆, 𝜆) ∈ 𝑓 −1 [{𝑡}] est bien définie et bijective ; • le vecteur 𝑡 vérifie, en
particulier, les relations 𝑡 = 𝑓 (−𝑣, 𝑢 + 2𝑣, 0) ∈ im(𝑓 ) ; • puisque le vecteur 𝑡 est quelconque, c’est donc que
l’application 𝑓 est surjective, si bien que les égalités im(𝑓 ) = ℝ2 et rg(𝑓 ) = 2 sont vérifiées ; • en choisissant
𝑡 = (0, 0), on observe que ker(𝑓 ) = ℝ ⋅ (1, 1, 1) ≠ {0ℝ3 } et que l’application 𝑓 n’est pas injective.
Exemple (Interpolation de Lagrange) — Soit (𝐾 , +, ×) un corps dont on note 𝑛 ≔ card(𝐾 ) ∈ ⟦2, +∞⟧ le
cardinal. On notera aussi ℕ2 ∋ (𝑖, 𝑗) ↦ δ𝑖,𝑗 ∈ {0𝐾 , 1𝐾 } le symbole de Kronecker associé à l’ensemble ℕ des
nombres entiers naturels et à ce corps. On travaille sur le (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel (𝐾 𝐾 , +, ⋅) des applications
de source 𝐾 et de but 𝐾 , dont les lois + et ⋅ sont définies élément par élément à partir des lois + et × de
l’ensemble 𝐾 . Nous invoquerons continuellement, de façon implicite, le fait que deux applications de source
𝐾 et de but 𝐾 sont égales si, et seulement si, elles coïncident sur l’ensemble 𝐾 . Pour tout nombre 𝑝 ∈ ℕ :
• on désigne par 𝒫𝑝 le sous‐ensemble de l’ensemble 𝐾 𝐾 constitué des applications polynomiales de degré
inférieur ou égal au nombre 𝑝 :
𝑝
𝒫𝑝 ≔ {𝑃 ∈ 𝐾 𝐾 | ∃(𝑎𝑘 )𝑘 ∈⟦0,𝑝⟧ ∈ 𝐾 𝑝+1 : ∀𝑥 ∈ 𝐾 , 𝑃(𝑥) = ∑𝑘 =0 𝑎𝑘 𝑥 𝑘 } ;
20
• étant donnée une application polynomiale 𝑃 ∈ 𝒫𝑝 , on appelle (𝑝 + 1)‐uplet de coefficients de l’application
𝑃 tout uplet 𝑎 ∈ 𝐾 𝑝+1 tel que 𝑃 = 𝑃𝑎 — en général, l’unicité n’est pas assurée !
Sous‐espace & linéarité Soit un nombre 𝑝 ∈ ℕ. Par absorbance multiplicative et neutralité additive de
l’élément 0𝐾 dans le corps (𝐾 , +, ×), on a :
𝑝
𝑘
∀𝑥 ∈ 𝐾 , 𝑃0
𝐾 𝑝+1 (𝑥) = ∑ 0𝐾 𝑥 = 0𝐾 = 0𝐾 𝐾 (𝑥), 𝒫𝑝 ∋ 𝑃0 𝑝+1 = 0𝐾 𝐾 .
𝐾
𝑘 =0
De plus, pour tous couples (𝑎, 𝑏) = ((𝑎𝑘 )𝑘 ∈⟦0,𝑝⟧ , (𝑏𝑘 )𝑘 ∈⟦0,𝑝⟧ ) ∈ (𝐾 𝑝+1 )2 et (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 , on calcule, en invoquant
les définitions des lois des espaces (𝐾 𝑝+1 , +, ⋅) et (𝐾 𝐾 , +, ⋅) ainsi que les règles de calcul et les propriétés des
sommes indexées dans le corps (𝐾 , +, ×) :
Pour tous couples (𝑃, 𝑄) ∈ 𝒫𝑝2 et (𝜆, 𝜇) ∈ 𝐾 2 , il existe un couple (𝑎, 𝑏) ∈ (𝐾 𝑝+1 )2 tel que (𝑃, 𝑄) = (𝑃𝑎 , 𝑃𝑏 ) et l’on
a 𝜆 ⋅ 𝑃 + 𝜇 ⋅ 𝑄 = 𝜆 ⋅ 𝑃𝑎 + 𝜇 ⋅ 𝑃𝑏 = 𝑃𝜆⋅𝑎+𝜇⋅𝑏 ∈ 𝒫𝑝 . Résumons : • la partie 𝒫𝑝 est non vide et stable par combinaison
linéaire dans l’espace (𝐾 𝐾 , +, ⋅) : elle définit conséquemment un sous‐espace de cet espace ; • l’application 𝑓𝑝
est linéaire, élément de l’ensemble L(𝐾 𝑝+1 , +, ⋅ ; 𝒫𝑝 , +, ⋅).
Propriétés préliminaires Compte tenu des règles de calcul et des propriétés des sommes et produits in‐
dexés dans le corps (𝐾 , +, ×), de l’intégrité de ce même corps et du principe de récurrence, on démontre
successivement, comme dans les corps (ℝ, +, ×) et (ℂ, +, ×), que :
• pour tout nombre 𝑝 ∈ ℕ∗ , tout uplet 𝑎 = (𝑎𝑘 )𝑘 ∈⟦0,𝑝⟧ ∈ 𝐾 𝑝+1 et tout élément 𝛼 ∈ 𝐾 , on a :
• pour tout nombre 𝑝 ∈ ℕ, tout uplet 𝑎 = (𝑎𝑘 )𝑘 ∈⟦0,𝑝⟧ ∈ 𝐾 𝑝+1 , tout nombre 𝑞 ∈ ⟦0, 𝑝⟧, toute partie 𝐴 ∈ 𝔓𝑞 (𝐾 )
et toute énumération (𝛼𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑞⟧ ∈ 𝐴𝑞 des éléments de l’ensemble 𝐴, on a :
𝑃𝑎 [𝐴] ⊆ {0𝐾 }
𝑟
⇒ (∀𝑟 ∈ ⟦0, 𝑞⟧, ∃𝑏 = (𝑏𝑙 )𝑙 ∈⟦0,𝑝−𝑟⟧ ∈ 𝐾 𝑝−𝑟 +1 : 𝑏𝑝−𝑟 = 𝑎𝑝 ∧ (∀𝑥 ∈ 𝐾 , 𝑃𝑎 (𝑥) = 𝑃𝑏 (𝑥) ∏(𝑥 − 𝛼𝑖 )))
𝑖=1
• pour tout nombre 𝑝 ∈ ℕ, tout uplet 𝑎 = (𝑎𝑘 )𝑘 ∈⟦0,𝑝⟧ ∈ 𝐾 𝑝+1 et toute partie 𝐴 ∈ 𝔓𝑝 (𝐾 ), on a :
(∃𝐴 ∈ 𝔓(𝐾 ) : card(𝐴) > 𝑝 ∧ 𝑃𝑎 [𝐴] ⊆ {0𝐾 }) ⇒ (∀𝑞 ∈ ⟦0, 𝑝⟧, ∀𝑙 ∈ ⟦𝑝 − 𝑞, 𝑝⟧, 𝑎𝑙 = 0𝐾 )
⇒ 𝑎 = 0𝐾 𝑝+1
⇒ 𝑃𝑎 = 0𝐾 𝐾 ;
21
• par soustraction, on a, pour tout nombre 𝑝 ∈ ℕ et tout couple d’uplets (𝑎, 𝑏) ∈ (𝐾 𝑝+1 )2 :
• par implications circulaires, tout nombre 𝑝 ∈ ⟦0, 𝑛⟦ = {𝑞 ∈ ℕ | 𝑞 < 𝑛} et tout couple d’uplets (𝑎, 𝑏) ∈
(𝐾 𝑝+1 )2 vérifient :
(∃𝐴 ∈ 𝔓(𝐾 ) : card(𝐴) > 𝑝 ∧ 𝑃𝑎 |𝐴 = 𝑃𝑏 |𝐴 ) ⇔ 𝑎 = 𝑏
⇔ 𝑃𝑎 = 𝑃𝑏 .
Étant donné un nombre 𝑝 ∈ ⟦0, 𝑛⟦ = {𝑞 ∈ ℕ | 𝑞 < 𝑛} :
• ce qui précède juste garantit l’injectivité de l’application 𝑓𝑝 ;
• l’application 𝑓𝑝 est donc un isomorphisme de l’espace (𝐾 𝑝+1 , +, ⋅) vers l’espace (𝒫𝑝 , +, ⋅), c’est‐à‐dire un
élément de l’ensemble iso(𝐾 𝑝+1 , +, ⋅ ; 𝒫𝑝 , +, ⋅) ;
• la propriété d’existence et d’unicité suivante est dès lors vérifiée :
• l’on pourra donc parler du (𝑝 +1)‐uplet des coefficients d’une application polynomiale 𝑃 ∈ 𝒫𝑝 quelconque.
Enfin, pour tout ensemble fini 𝐼 de cardinal noté 𝑝 ≔ card(𝐼 ) ∈ ℕ et toute famille (𝛼𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 𝐼 :
• toute partie 𝐽 ⊆ 𝐼 est finie et telle que card(𝐽 ) ∈ ⟦0, 𝑝⟧ ;
• toute partie 𝐽 ⊆ 𝐼 est telle que card(𝐼 𝐽 ) = 𝑝 − card(𝐽 ) ∈ ⟦0, 𝑝⟧ ;
−
• l’ensemble 𝔓(𝐼 ) est fini, égal à la réunion des ensembles finis et deux à deux disjoints 𝔓𝑘 (𝐼 ) = {𝐽 ∈ 𝔓(𝐼 ) |
card(𝐽 ) = 𝑘}, pour 𝑘 ∈ ⟦0, 𝑝⟧ ;
• l’uplet (𝜎𝑘 )𝑘 ∈⟦0,𝑝⟧ ∈ 𝐾 𝑝+1 des polynômes symétriques élémentaires d’ordres successifs associés à la famille
(𝛼𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 𝐼 est défini par :
∀𝑘 ∈ ⟦0, 𝑝⟧, 𝜎𝑘 ≔ ∑ ∏ 𝛼𝑖 ;
𝐽 ∈ 𝔓𝑘 (𝐼 ) 𝑖∈𝐽
• les points précédents, une formule de développement et les règles de calcul dans le corps (𝐾 , +, ×) — dont
les principes de sommation par paquets et de réindexation — permettent de calculer :
𝑝
= ∑ (−1𝐾 )card(𝐽 ) (∏ 𝛼𝑖 )𝑥 𝑝−card(𝐽 ) = ∑ ∑ (−1𝐾 )𝑘 (∏ 𝛼𝑖 )𝑥 𝑝−𝑘
𝑝 𝑖∈𝐽 𝑘 =0 𝐽 ∈ 𝔓𝑘 (𝐼 ) 𝑖∈𝐽
𝐽 ∈⋃𝑘=0 𝔓𝑘 (𝐼 )
𝑝 𝑝 𝑝
= ∑ (−1𝐾 )𝑘 ( ∑ ∏ 𝛼𝑖 )𝑥 𝑝−𝑘 = ∑ (−1𝐾 )𝑘 𝜎𝑘 𝑥 𝑝−𝑘 = ∑(−1𝐾 )𝑝−𝑙 𝜎𝑝−𝑙 𝑥 𝑙 = 𝑃𝑎 (𝑥),
𝑘 =0 𝐽 ∈ 𝔓𝑘 (𝐼 ) 𝑖∈𝐽 𝑘 =0 𝑙 =0
𝐾 →𝐾
⎛
𝑝
⎞ 𝒫𝑝 → 𝐾 𝑝+1
∀𝑘 ∈ 𝐼 , 𝐸𝑘 : ⎜ ⎟, 𝑔𝑝 : ( ).
⎜𝑥 ↦ 𝑥 𝑘 = ∑ δ𝑘,𝑙 𝑥 𝑙 ⎟ 𝑃 ↦ (𝑃(𝑥𝑖 ))𝑖∈𝐼
⎝ 𝑙 =0 ⎠
22
Linéarité, base canonique & dimension Par définition des lois des espaces (𝒫𝑝 , +, ⋅) et (𝐾 𝑝+1 , +, ⋅), on a :
𝑝 𝑝 𝑝 𝑝
∀𝑎 = (𝑎𝑘 )𝑘 ∈𝐼 ∈ 𝐾 𝑝+1 , ∀𝑥 ∈ 𝐾 , (( ∑ 𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 )(𝑥) = ∑ 𝑎𝑘 𝐸𝑘 (𝑥) = ∑ 𝑎𝑘 𝑥 𝑘 = 𝑃𝑎 (𝑥)) ∧ ∑ 𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 = 𝑃𝑎
𝑘 =0 𝑘 =0 𝑘 =0 𝑘 =0
𝑗 ∈𝐼𝑖
Observons que, en vertu de la bijectivité de l’application 𝜑, tout indice 𝑖 ∈ 𝐼 est tel que : • la restriction‐
corestriction 𝐼𝑖 ∋ 𝑗 ↦ 𝑥𝑗 ∈ 𝐴𝑖 de la bijection 𝜑 est bien définie et demeure bijective ; • les relations 𝔓𝑝 (𝐾 ) ∋ 𝐴𝑖 =
𝐴 {𝑥𝑖 } sont vérifiées. Raisonnons par analyse‐synthèse.
−
𝑝+1
Analyse Soit un système ℒ = (𝐿𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝒫𝑝 satisfaisant à la condition (⁋) — à supposer, à ce stade,
qu’il en existe. Fixons momentanément un indice 𝑖 ∈ 𝐼 . Par hypothèse, on a l’inclusion 𝐿𝑖 [𝐴𝑖 ] ⊆ {0𝐾 }. Les
propriétés préliminaires assurent alors qu’il existe un scalaire 𝑎 ∈ 𝐾 tel que :
∀𝑥 ∈ 𝐾 , 𝐿𝑖 (𝑥) = 𝑎 ∏ (𝑥 − 𝛼) = 𝑎 ∏(𝑥 − 𝑥𝑗 ).
𝛼 ∈𝐴𝑖 𝑗 ∈𝐼𝑖
La condition de normalisation 𝐿𝑖 (𝑥𝑖 ) = 1𝐾 s’écrit 𝑎𝜋𝑖 = 1𝐾 et assure que les éléments 𝑎 et 𝜋𝑖 sont inversibles
et inverses l’un de l’autre dans le corps (𝐾 , +, ×). On déduit dès lors que : • l’égalité 𝑎 = 𝜋𝑖−1 est vérifiée ;
• l’application 𝐿𝑖 est entièrement et uniquement déterminée. Puisque l’indice 𝑖 est quelconque, le système
ℒ est donc lui‐même entièrement et uniquement déterminé.
Synthèse Notons que, pour tout indice 𝑖 ∈ 𝐼 : • l’injectivité de l’application 𝜑 garantit les relations
𝑥𝑖 ≠ 𝑥𝑗 et 𝑥𝑖 − 𝑥𝑗 ≠ 0𝐾 pour tout — éventuel — indice 𝑗 ∈ 𝐼𝑖 ; • par intégrité du corps (𝐾 , +, ×), on a aussi
∏𝑗 ∈𝐼𝑖 (𝑥𝑖 − 𝑥𝑗 ) ≠ 0𝐾 ; • le produit ∏𝑗 ∈𝐼𝑖 (𝑥𝑖 − 𝑥𝑗 ) = 𝜋𝑖 est dès lors inversible dans le corps (𝐾 , +, ×). • l’appli‐
cation 𝐿𝑖 ∋ 𝐾 ↦ 𝜋𝑖−1 ∏𝑗 ∈𝐼𝑖 (𝑥 − 𝑥𝑗 ) ∈ 𝐾 est bien définie ; • puisque card(𝐼𝑖 ) = 𝑝, les propriétés préliminaires
et la stabilité de l’ensemble 𝒫𝑝 par multiplication par un scalaire assurent que 𝐿𝑖 ∈ 𝒫𝑝 . L’on peut dès lors
𝑝+1
constituer le système ℒ = (𝐿𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝒫𝑝 ; il vérifie effectivement la condition (⁋) car :
𝜋 −1 (𝑥𝑗 − 𝑥𝑗 ) ∏𝑘 ∈𝐼𝑖 {𝑗} (𝑥𝑗 − 𝑥𝑘 ) = 0𝐾 = δ𝑖,𝑗 si 𝑗 ≠ 𝑖
∀(𝑖, 𝑗) ∈ 𝐼 2 , 𝐿𝑖 (𝑥𝑗 ) = 𝜋𝑖−1 ∏(𝑥𝑗 − 𝑥𝑘 ) = { 𝑖−1
−
23
Liberté Le système ℒ est libre dans l’espace (𝒫𝑝 , +, ⋅) puisque tout uplet de scalaires (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 𝑝+1 tel que
𝑝
∑𝑖=0 𝜆𝑖 ⋅ 𝐿𝑖 = 0𝐾 𝐾 vérifie :
𝑝 𝑝 𝑝
∀𝑗 ∈ 𝐼 , 0𝐾 = 0𝐾 𝐾 (𝑥𝑗 ) = (∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝐿𝑖 )(𝑥𝑗 ) = ∑ 𝜆𝑖 𝐿𝑖 (𝑥𝑗 ) = ∑ 𝜆𝑖 δ𝑖,𝑗 = 𝜆𝑗 , (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 = 0𝐾 𝑝+1 .
𝑖=0 𝑖=0 𝑖=0
𝑝
Caractère générateur Pour toute application 𝑃 ∈ 𝒫𝑝 , la combinaison linéaire 𝑄 ≔ ∑𝑖=0 𝑃(𝑥𝑖 ) ⋅ 𝐿𝑖 ∈
vect(𝒫𝑝 ,+,⋅) (ℒ ) ⊆ 𝒫𝑝 vérifie :
𝑝 𝑝
∀𝑗 ∈ 𝐼 , 𝑄(𝑥𝑗 ) = ∑ 𝑃(𝑥𝑖 )𝐿𝑖 (𝑥𝑗 ) = ∑ 𝑃(𝑥𝑖 )δ𝑖,𝑗 = 𝑃(𝑥𝑗 ), ∀𝛼 ∈ 𝐴, 𝑃(𝛼) = 𝑄(𝛼), 𝑃|𝐴 = 𝑄|𝐴
𝑖=0 𝑖=0
et, puisque card(𝐴) = 𝑝 + 1 > 𝑝, les propriétés préliminaires assurent que 𝑃 = 𝑄. D’où l’inclusion 𝒫𝑝 ⊆
vect(𝒫𝑝 ,+,⋅) (ℒ ) : le système ℒ engendre l’espace (𝒫𝑝 , +, ⋅).
Base de Lagrange Libre et générateur, le système ℒ est donc une base de l’espace (𝒫𝑝 , +, ⋅). On l’appelle
base de Lagrange associée à l’arrangement (𝑥𝑖 )𝑖∈𝐼 .
Image de 𝒈𝒑 Fort de cette étude, on peut désormais établir sans difficulté la surjectivité de l’application 𝑔𝑝 .
𝑝
En effet, pour tout uplet (𝑦𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 𝑝+1 , l’application polynomiale 𝑃 ≔ ∑𝑖=0 𝑦𝑖 ⋅ 𝐿𝑖 ∈ 𝒫𝑝 vérifie :
𝑝 𝑝
im(𝑔𝑝 ) ∋ 𝑔𝑝 (𝑃) = (𝑃(𝑥𝑗 ))𝑗 ∈𝐼 = (∑ 𝑦𝑖 𝐿𝑖 (𝑥𝑗 )) = (∑ 𝑦𝑖 δ𝑖,𝑗 ) = (𝑦𝑗 )𝑗 ∈𝐼
𝑖=0 𝑗 ∈𝐼 𝑖=0 𝑗 ∈𝐼
et il s’agit même de l’unique antécédent de l’uplet (𝑦𝑖 )𝑖∈𝐼 par l’injection 𝑔𝑝 : on l’appelle application polynomiale
interpolatrice de Lagrange associée à l’uplet ((𝑥𝑖 , 𝑦𝑖 ))𝑖∈𝐼 ∈ (𝐾 2 )𝑝+1 .
Conclusion Les applications 𝑓𝑝 et 𝑔𝑝 sont deux isomorphismes appartenant respectivement aux ensembles
iso(𝐾 𝑝+1 , +, ⋅ ; 𝒫𝑝 , +, ⋅) et iso(𝒫𝑝 , +, ⋅ ; 𝐾 𝑝+1 , +, ⋅). Les égalités im(𝑓𝑝 ) = 𝒫𝑝 et im(𝑔𝑝 ) = 𝐾 𝑝+1 sont, en particu‐
lier, vérifiées ; les isomorphismes 𝑓𝑝 et 𝑔𝑝 sont donc de rang égal au nombre 𝑝 + 1 :
Démonstration — L’espace (𝐸, +, ⋅) est de dimension finie donc : • son sous‐espace (ker(𝑓 ), +, ⋅) est lui‐même de
dimension finie, moindre ; • d’après la proposition 30, l’application linéaire 𝑓 est de rang fini, inférieur ou égal
au nombre dim(𝐸, +, ⋅), c’est‐à‐dire que le sous‐espace (im(𝑓 ), +, ⋅) de l’espace (𝐹 , +, ⋅) est de dimension finie,
inférieure ou égale à celle de l’espace (𝐸, +, ⋅). Notons 𝑛 ≔ dim(𝐸, +, ⋅) ∈ ℕ, 𝑝 ≔ dim(ker(𝑓 ), +, ⋅) ∈ ⟦0, 𝑛⟧ et
𝑟 ≔ rg(𝑓 ) = dim(im(𝑓 ), +, ⋅) ∈ ⟦0, 𝑛⟧. L’on peut considérer une base 𝒞 = (𝑢𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑝⟧ ∈ (ker(𝑓 ))𝑝 de l’espace
(ker(𝑓 ), +, ⋅). Ce système est libre dans l’espace (ker(𝑓 ), +, ⋅) ; le système coprolongé 𝒞|𝐸 demeure libre dans
l’espace (𝐸, +, ⋅). Le théorème de la base incomplète assure qu’il est possible de compléter le système libre
𝒞|𝐸 en une base ℬ = (𝑢𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ∈ 𝐸 𝑛 de l’espace (𝐸, +, ⋅). Démontrons que le système 𝒟 = (𝑣𝑖 )𝑖∈⟦𝑝+1,𝑛⟧ ≔
(𝑓 (𝑢𝑖 ))𝑖∈⟦𝑝+1,𝑛⟧ ∈ (im(𝑓 ))𝑛−𝑝 constitue alors une base de l’espace (im(𝑓 ), +, ⋅).
𝑛
Liberté Soit un système de scalaires (𝜆𝑖 )𝑖∈⟦𝑝+1,𝑛⟧ ∈ 𝐾 𝑛−𝑝 . Supposons que ∑𝑖=𝑝+1 𝜆𝑖 ⋅ 𝑣𝑖 = 0𝐹 . On a :
𝑛 𝑛 𝑛 𝑛
0𝐹 = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑣𝑖 = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑢𝑖 ) = 𝑓 ( ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑢𝑖 ), ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑢𝑖 ∈ ker(𝑓 ).
𝑖=𝑝+1 𝑖=𝑝+1 𝑖=𝑝+1 𝑖=𝑝+1
𝑛
Décomposons le vecteur ∑𝑖=𝑝+1 𝜆𝑖 ⋅ 𝑢𝑖 ∈ ker(𝑓 ) dans la base 𝒞 de l’espace (ker(𝑓 ), +, ⋅) et notons (𝜆𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑝⟧ ∈
𝐾 𝑝 l’uplet de ses coordonnées. On peut écrire, en invoquant, comme d’habitude, les règles de calcul dans
24
l’espace (𝐸, +, ⋅) :
𝑛 𝑝 𝑝 𝑛 𝑛
∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑢𝑖 = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑢𝑖 , 0𝐹 = − ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑢𝑖 + ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑢𝑖 = ∑ 𝜇𝑖 ⋅ 𝑢𝑖 ,
𝑖=𝑝+1 𝑖=1 𝑖=1 𝑖=𝑝+1 𝑖=1
−𝜆𝑖 si 𝑖 ⩽ 𝑝
∀𝑖 ∈ ⟦1, 𝑛⟧, 𝜇𝑖 ≔ { .
𝜆𝑖 si 𝑖 > 𝑝
Par liberté de la base ℬ dans l’espace (𝐸, +, ⋅), on déduit que (𝜇𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ = (0𝐾 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ et que (𝜆𝑖 )𝑖∈⟦𝑝+1,𝑛⟧ =
(0𝐾 )𝑖∈⟦𝑝+1,𝑛⟧ . D’où, l’uplet de scalaires considéré étant à priori quelconque, la liberté du système de vecteurs
𝒟 dans l’espace (im(𝑓 ), +, ⋅).
Caractère générateur Soit un vecteur 𝑦 ∈ im(𝑓 ). Il existe un vecteur 𝑥 ∈ 𝐸 tel que 𝑦 = 𝑓 (𝑥). Décomposons
le vecteur 𝑥 dans la base ℬ de l’espace (𝐸, +, ⋅) et notons (𝜆𝑖 )𝑖∈⟦1,𝑛⟧ ∈ 𝐾 𝑛 l’uplet de ses coordonnées. On calcule :
𝑛 𝑛 𝑝 𝑛 𝑝 𝑛
𝑦 = 𝑓 (∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑢𝑖 ) = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑢𝑖 ) = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑢𝑖 ) + ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑢𝑖 ) = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 0𝐹 + ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑣𝑖
𝑖=1 𝑖=1 𝑖=1 𝑖=𝑝+1 𝑖=1 𝑖=𝑝+1
𝑛 𝑛
= 0𝐹 + ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑣𝑖 = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑣𝑖 ∈ vect(im(𝑓 ),+,⋅) (𝒟).
𝑖=𝑝+1 𝑖=𝑝+1
Puisque le vecteur 𝑦 est quelconque, c’est donc que im(𝑓 ) ⊆ vect(im(𝑓 ),+,⋅) (𝒟), c’est‐à‐dire que le système 𝒟
engendre l’espace (im(𝑓 ), +, ⋅).
Conclusion Libre et générateur, le système 𝒟 est effectivement une base de l’espace (im(𝑓 ), +, ⋅). La di‐
mension 𝑟 de cet espace égale le cardinal 𝑛 − 𝑝 dudit système ; c’est exactement la formule du rang annoncée :
𝑟 =𝑛−𝑝 i. e. 𝑝 + 𝑟 = 𝑛. □
Corollaire 32 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps, (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels ainsi qu’une ap‐
plication linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅). On suppose que les espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) sont tous deux de dimension
finie et que leurs dimensions sont égales. Alors les trois assertions suivantes sont équivalentes :
(i) l’application 𝑓 est injective ; (ii) l’application 𝑓 est surjective ; (iii) l’application 𝑓 est bijective.
Démonstration — Posons 𝑛 ≔ dim(𝐸, +, ⋅) = dim(𝐹 , +, ⋅) ∈ ℕ, 𝑝 ≔ dim(ker(𝑓 ), +, ⋅) ∈ ⟦0, 𝑛⟧ et 𝑟 ≔ rg(𝑓 ) =
dim(im(𝑓 ), +, ⋅) ∈ ⟦0, 𝑛⟧. Le théorème du rang assure que 𝑝 + 𝑟 = 𝑛. Raisonnons par équivalences successives :
• l’injectivité de l’application linéaire 𝑓 équivaut à l’égalité ensembliste ker(𝑓 ) = {0𝐸 } ;
• de par la caractérisation d’un espace réduit au singleton constitué de son seul vecteur nul, cette égalité est
elle‐même équivalente à l’égalité 𝑝 = 0 ;
• la formule du rang assure que les relations 𝑝 = 0 et 𝑟 = 𝑛 sont équivalentes ;
• la caractérisation de l’égalité d’un espace de dimension finie et de l’un, quelconque, de ses sous‐espaces
assure que les égalités 𝑟 = 𝑛 et im(𝑓 ) = 𝐹 sont équivalentes ;
• la surjectivité de l’application 𝑓 se traduit par l’égalité im(𝑓 ) = 𝐹 .
Par transitivité du connecteur logique d’équivalence, on déduit que l’injectivité et la surjectivité de l’appli‐
cation 𝑓 sont équivalentes, c’est‐à‐dire que l’équivalence (i) ⇔ (ii) est vérifiée. Ainsi, si 𝑓 satisfait à l’une de
ces propriétés, elle satisfait aussi automatiquement à l’autre et est donc en fait bijective ; la réciproque étant
immédiate, c’est donc que les équivalences (i) ⇔ (iii) et (ii) ⇔ (iii) sont elles aussi vérifiées. □
Contre‐exemple — Le corollaire précédent n’est, en général, plus valable en dimension infinie. Donnons un
contre‐exemple. Travaillons dans le (ℝ, +, ×)‐espace vectoriel (ℝℝ , +, ⋅), dont les lois + et ⋅ sont définies élément
par élément à partir des lois + et × de l’ensemble ℝ. Notons 𝒫 le sous‐ensemble — strict — de l’ensemble ℝℝ
constitué des fonctions polynomiales :
25
Nous introduisons aussi la famille ℬ = (𝐸𝑘 )𝑘 ∈ℕ ∈ 𝒫ℕ définie par :
ℝ→ℝ
⎛ ⎞
∀𝑘 ∈ ℕ, 𝐸𝑘 : ⎜ 𝑘 ⎟.
⎜𝑥 ↦ 𝑥 𝑘 = ∑ δ𝑘,𝑙 𝑥 𝑙 ⎟
⎝ 𝑙 =0 ⎠
de sorte que 𝜆 ⋅ 𝑃 + 𝜇 ⋅ 𝑄 ∈ 𝒫. Puisque les éléments considérés sont quelconques, c’est donc que la partie
𝒫 ⊂ ℝℝ est stable par les lois de l’espace (ℝℝ , +, ⋅).
Sous‐espace La partie 𝒫 ⊂ ℝℝ , non vide et stable par combinaison linéaire, définit un sous‐espace vectoriel
de l’espace (ℝℝ , +, ⋅).
Liberté Soit une suite 𝛬 = (𝜆𝑘 )𝑘 ∈ℕ ∈ ℝ(ℕ) telle que ∑𝑘 ∈ℕ 𝜆𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 = 0ℝℝ . Le support 𝑆 ≔ supp(𝛬) est une
partie finie donc majorée de l’ensemble ordonné (ℕ, ⩽). Considérons un majorant 𝑛 ∈ ℕ de l’ensemble 𝑆.
L’inclusion 𝑆 ⊆ ⟦0, 𝑛⟧ est vérifiée. D’une part :
∀𝑘 ∈ ⟦𝑛 + 1, +∞⟦, ℕ ∋ 𝑘 > 𝑛 ∧ 𝑘 ∉ 𝑆 ∧ 𝜆𝑘 = 0 ;
d’autre part :
𝑛 𝑛 𝑛
∀𝑥 ∈ ℝ, 0 = 0ℝℝ (𝑥) = ( ∑ 𝜆𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 )(𝑥) = ∑ 𝜆𝑘 𝐸𝑘 (𝑥) = ∑ 𝜆𝑘 𝑥 𝑘 ,
𝑘 =0 𝑘 =0 𝑘 =0
𝑛
et : • l’application polynomiale ℝ ∋ 𝑥 ↦ ∑𝑘 =0 𝜆𝑘 𝑥 𝑘 ∈ ℝ est identiquement nulle et admet, en particulier,
strictement plus de 𝑛 racines — par exemple les nombres 𝑘, pour 𝑘 ∈ ⟦0, 𝑛⟧ — ; • tous les coefficients 𝜆𝑘 , pour
𝑘 ∈ ⟦0, 𝑛⟧, sont donc nuls, en vertu d’une propriété déjà rappelée dans un exemple précédent. En définitive,
par une disjonction de cas immédiate, tous les nombres 𝜆𝑘 , pour 𝑘 ∈ ℕ, sont nuls. La suite 𝛬 considérée étant
à priori quelconque, c’est que la famille ℬ est libre dans l’espace (𝒫, +, ⋅).
Caractère générateur Soit une fonction polynomiale 𝑃 ∈ 𝒫. Il existe un nombre 𝑛 ∈ ℕ et un uplet
𝑛
(𝑎𝑘 )𝑘 ∈⟦0,𝑛⟧ ∈ ℝ𝑛+1 tels que 𝑃 : ℝ ∋ 𝑥 ↦ ∑𝑘 =0 𝑎𝑘 𝑥 𝑘 ∈ ℝ. Posons (𝑎𝑘 )𝑘 ∈⟦𝑛+1,+∞⟦ ≔ (0)𝑘 ∈⟦𝑛+1,+∞⟦ . Le sup‐
port de la suite (𝑎𝑘 )𝑘 ∈ℕ ∈ ℝℕ est manifestement inclus dans le segment — fini — ⟦0, 𝑛⟧ de l’ensemble ordonné
(ℕ, ⩽) donc fini. On calcule :
𝑛 𝑛 𝑛
∀𝑥 ∈ ℝ, 𝑃(𝑥) = ∑ 𝑎𝑘 𝑥 𝑘 = ∑ 𝑎𝑘 𝐸𝑘 (𝑥) = ( ∑ 𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 )(𝑥) = ( ∑ 𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 )(𝑥)
𝑘 =0 𝑘 =0 𝑘 =0 𝑘 ∈ℕ
et l’on déduit que :
𝑃 = ∑ 𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 ∈ vect(𝒫,+,⋅) (ℬ).
𝑘 ∈ℕ
Puisque la fonction 𝑃 est quelconque, c’est donc que la famille ℬ engendre l’espace (𝒫, +, ⋅).
Base & dimension Libre et génératrice, la famille ℬ constitue une base de l’espace (𝒫, +, ⋅) : on l’appelle
base canonique de cet espace. Elle est indexée par l’ensemble infini ℕ, si bien que l’espace (𝒫, +, ⋅) est de
dimension infinie.
On note désormais (𝒫∗ , +, ⋅) l’espace dual de l’espace (𝒫, +, ⋅) et ℬ∗ = (𝐸𝑘∗ )𝑘 ∈ℕ ∈ (𝒫∗ )ℕ la famille duale de
la base ℬ. On étudie l’opérateur de dérivation 𝑓 : 𝒫 ∋ 𝑃 ↦ 𝑃 ′ ∈ 𝒫 sur l’ensemble 𝒫.
26
Bonne définition Rappelons que pour tout nombre 𝑘 ∈ ℕ, la fonction 𝐸𝑘 ∈ 𝒫 est dérivable et que sa
fonction dérivée 𝐸𝑘′ vérifie :
0 ℝ∈𝒫 si 𝑘 = 0
𝐸𝑘′ = { ℝ .
𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 −1 ∈ 𝒫 si 𝑘 > 0
Considérons une fonction polynomiale 𝑃 ∈ 𝒫 et notons 𝑎 = (𝑎𝑘 )𝑘 ∈ℕ ≔ (𝐸𝑘∗ (𝑃))𝑘 ∈ℕ ∈ ℝ(ℕ) la suite de ses
coordonnées dans la base ℬ. Le support 𝑆 ≔ supp(𝑎) ⊂ ℕ, fini, admet un majorant 𝑛 ∈ ℕ dans l’ensemble
𝑛
ordonné (ℕ, ⩽). L’on a l’inclusion 𝑆 ⊆ ⟦0, 𝑛⟧ et l’égalité 𝑃 = ∑𝑘 =0 𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 . La fonction 𝑃, combinaison linéaire
de fonctions dérivables, est dérivable et, en vertu des formules de dérivation, sa fonction dérivée 𝑃 ′ : ℝ → ℝ
vérifie :
𝑛 𝑛 𝑛−1
𝑃′ = ∑ 𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘′ = ∑ 𝑘𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 −1 = ∑ (𝑙 + 1)𝑎𝑙 +1 ⋅ 𝐸𝑙 ∈ 𝒫.
𝑘 =0 𝑘 =1 𝑙 =0
Il est même immédiat que la suite ((𝑘 + 1)𝑎𝑘 +1 )𝑘 ∈ℕ ∈ ℝℕ :
• stationne en le nombre 0 dès le rang 𝑛 ; • est de
support inclus dans le segment — fini — ⟦0, 𝑛 − 1⟧ donc fini ; • appartient à l’ensemble ℝ(ℕ) . Ainsi, on peut
écrire :
𝑛−1
∑ (𝑘 + 1)𝑎𝑘 +1 ⋅ 𝐸𝑘 = ∑ (𝑘 + 1)𝑎𝑘 +1 ⋅ 𝐸𝑘 = 𝑃 ′ , (𝐸𝑘∗ (𝑃 ′ ))𝑘 ∈ℕ = ((𝑘 + 1)𝑎𝑘 +1 )𝑘 ∈ℕ = ((𝑘 + 1)𝐸𝑘∗+1 (𝑃))𝑘 ∈ℕ .
𝑘 ∈ℕ 𝑘 =0
Elle constitue donc un endomorphisme de l’espace (𝒫, +, ⋅) et appartient à l’ensemble L(𝒫, +, ⋅).
Noyau Le noyau ker(𝑓 ) de l’endomorphisme 𝑓 vérifie :
où l’on a notamment invoqué le théorème de caractérisation des fonctions — à valeurs réelles — constantes
sur un intervalle non trivial de l’ensemble ordonné (ℝ, ⩽) — corollaire du théorème des accroissements finis.
En particulier, on observe que 𝐸0 ∈ ker(𝑓 ) ≠ {0ℝℝ } et l’on déduit que l’application 𝑓 n’est pas injective.
Image Soit une fonction 𝑃 ∈ 𝒫. Posons (𝑎𝑘 )𝑘 ∈ℕ ≔ (𝐸𝑘∗ (𝑃))𝑘 ∈ℕ ∈ ℝ(ℕ) . Comme précédemment, le support
de cette suite est fini et admet un majorant 𝑛 ∈ ℕ.
Analyse Soit une fonction 𝑄 ∈ 𝒫 telle que 𝑃 = 𝑓 (𝑄) — à supposer, à ce stade, qu’il en existe. Notons
(𝑏𝑘 )𝑘 ∈ℕ ≔ (𝐸𝑘∗ (𝑄))𝑙 ∈ℕ ∈ ℝ(ℕ) . Compte tenu de l’égalité 𝑃 = 𝑄 ′ et de calculs précédents, on a (𝑎𝑘 )𝑘 ∈ℕ =
((𝑘 + 1)𝑏𝑘 +1 )𝑘 ∈ℕ . Par translation et division, cette identité se réécrit (𝑏𝑘 )𝑘 ∈ℕ∗ = (𝑎𝑘 −1/𝑘)𝑘 ∈ℕ∗ . Seul le
coefficient 𝑏0 demeure indéterminé.
Synthèse Définissons la suite (𝑏𝑘 )𝑘 ∈ℕ ∈ ℝℕ par :
𝑎𝑘 −1
𝑏0 ≔ 0, ∀𝑘 ∈ ℕ∗ , 𝑏𝑘 ≔ .
𝑘
Cette suite : • stationne en le nombre 0 dès le rang 𝑛 + 2 ; • est de support inclus dans le segment ⟦0, 𝑛 + 1⟧ de
l’ensemble ordonné (ℕ, ⩽) ; • est de support fini ; • appartient à l’ensemble ℝ(ℕ) . Des calculs précédemment
menés assurent que la fonction polynomiale 𝑄 ≔ ∑𝑘 ∈ℕ 𝑏𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 ∈ 𝒫 vérifie :
𝑛+1−1 𝑛 𝑛
𝑎𝑘 +1−1
𝑓 (𝑄) = ∑ (𝑘 + 1)𝑏𝑘 +1 ⋅ 𝐸𝑘 = ∑ (𝑘 + 1) ⋅ 𝐸𝑘 = ∑ 𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 = ∑ 𝑎𝑘 ⋅ 𝐸𝑘 = 𝑃, 𝑃 = 𝑓 (𝑄) ∈ im(𝑓 ).
𝑘 =0 𝑘 =0
𝑘+1 𝑘 =0 𝑘 ∈ℕ
27
4 Transformation d’une famille de vecteurs par une application linéaire
Notations — Dans cette section, étant donnés un corps (𝐾 , +, ×), un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel (𝐸, +, ⋅) et un
ensemble 𝐼 , on désigne par :
• 0𝐾 𝐼 ≔ (0𝐾 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) la famille de scalaires indexée par l’ensemble 𝐼 et identiquement nulle — c’est‐à‐dire
de support vide — ;
• lib𝐼 (𝐸, +, ⋅) l’ensemble des familles de vecteurs indexées par l’ensemble 𝐼 et libres dans l’espace (𝐸, +, ⋅) :
lib𝐼 (𝐸, +, ⋅) ≔ {(𝑥𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 | ∀𝛬 = (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) , ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 = 0𝐸 ⇒ 𝛬 = 0𝐾 𝐼 } ;
• gen𝐼 (𝐸, +, ⋅) l’ensemble des familles de vecteurs indexées par l’ensemble 𝐼 et engendrant l’espace (𝐸, +, ⋅) :
gen𝐼 (𝐸, +, ⋅) ≔ {𝒳 ∈ 𝐸 𝐼 | 𝐸 = vect(𝐸,+,⋅) (𝒳 )} = {(𝑥𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 | ∀𝑥 ∈ 𝐸, ∃(𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) : 𝑥 = ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 } ;
• base𝐼 (𝐸, +, ⋅) l’ensemble des bases de l’espace (𝐸, +, ⋅) indexées par l’ensemble 𝐼 :
base𝐼 (𝐸, +, ⋅) ≔ lib𝐼 (𝐸, +, ⋅) ∩ gen𝐼 (𝐸, +, ⋅) = {(𝑒𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 | ∀𝑥 ∈ 𝐸, ∃!(𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) : 𝑥 = ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑒𝑖 }.
Lemme 33 — Soient un corps (𝐾 , +, ×), un (𝐾 , +, ×)‐espace vectoriel (𝐸, +, ⋅) et un vecteur 𝑥 ∈ 𝐸. On a les
équivalences suivantes :
𝑥 ≠ 0𝐸 ⇔ (∀𝐼 , card(𝐼 ) = 1 ⇒ (𝑥)𝑖∈𝐼 ∈ lib𝐼 (𝐸, +, ⋅))
⇔ (∃𝐼 : card(𝐼 ) = 1 ∧ (𝑥)𝑖∈𝐼 ∈ lib𝐼 (𝐸, +, ⋅)).
Démonstration — On raisonne par implications circulaires.
Première implication Supposons que 𝑥 ≠ 0𝐸 . Considérons un singleton 𝐼 et notons 𝑖 ≔ ⋃ 𝐼 ∈ 𝐼 son unique
élément. Posons aussi 𝑥𝑖 ≔ 𝑥. Le système 𝒳 ≔ (𝑥)𝑗 ∈{𝑖} = (𝑥𝑗 )𝑗 ∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 est bien défini et, en vertu des règles de
calcul dans l’espace (𝐸, +, ⋅), tout système 𝛬 = (𝜆𝑗 )𝑗 ∈𝐼 = (𝜆𝑖 )𝑗 ∈{𝑖} ∈ 𝐾 𝐼 tel que ∑𝑗 ∈𝐼 𝜆𝑗 ⋅ 𝑥𝑗 = 0𝐸 vérifie :
0𝐸 = ∑ 𝜆𝑗 ⋅ 𝑥𝑗 = 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 = 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥, 𝜆𝑖 = 0𝐾 ∨ 𝑥 = 0𝐸 , 𝜆𝑖 = 0 𝐾 , 𝛬 = 0𝐾 𝐼 .
𝑗 ∈𝐼
C’est donc que la famille 𝒳 est libre, élément de l’ensemble lib𝐼 (𝐸, +, ⋅).
Deuxième implication Si tout singleton 𝐼 est tel que (𝑥)𝑖∈𝐼 ∈ lib𝐼 (𝐸, +, ⋅), alors c’est en particulier le cas
du singleton {1}.
Troisième implication Supposons qu’il existe un singleton 𝐼 tel que 𝒳 ≔ (𝑥)𝑖∈𝐼 ∈ lib𝐼 (𝐸, +, ⋅). L’ensemble
𝐼 , possédant un unique élément, est non vide : le vecteur 𝑥 apparaît effectivement au sein de la famille libre
𝒳 . Se rappelant qu’aucun vecteur d’une famille libre n’est nul, on conclut que 𝑥 ≠ 0𝐸 . □
Proposition 34 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps, (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels ainsi qu’une
application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅). Les assertions suivantes sont équivalentes :
(i) l’application 𝑓 est injective ;
(ii) l’application 𝑓 envoie toute famille libre dans l’espace (𝐸, +, ⋅) sur une famille libre dans l’espace (𝐹 , +, ⋅) :
∀𝐼 , ∀𝒳 ∈ lib𝐼 (𝐸, +, ⋅), 𝑓 ∘ 𝒳 ∈ lib𝐼 (𝐹 , +, ⋅) ;
(iii) il existe un singleton 𝐼 tel que tout système indexé par ce singleton et libre dans l’espace (𝐸, +, ⋅) est envoyé
sur un système libre dans l’espace (𝐹 , +, ⋅) :
∃𝐼 : card(𝐼 ) = 1 ∧ (∀𝒳 ∈ lib𝐼 (𝐸, +, ⋅), 𝑓 ∘ 𝒳 ∈ lib𝐼 (𝐹 , +, ⋅)).
Démonstration — On procède par implications circulaires. Définissons un prédicat unaire 𝑃 par :
∀𝐼 , 𝑃(𝐼 ) ⋅⇔ (∀𝒳 ∈ lib𝐼 (𝐸, +, ⋅), 𝑓 ∘ 𝒳 ∈ lib𝐼 (𝐹 , +, ⋅)).
Première implication Supposons l’application 𝑓 injective. Son noyau ker(𝑓 ) se réduit au singleton {0𝐸 }.
Considérons un ensemble 𝐼 et une famille 𝒳 = (𝑥𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ lib𝐼 (𝐸, +, ⋅) — à supposer que lib𝐼 (𝐸, +, ⋅) ≠ ∅. Pour
toute famille de scalaires 𝛬 = (𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) telle que ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑖 ) = 0𝐹 , l’on a :
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et la liberté de la famille 𝒳 dans l’espace (𝐸, +, ⋅) assure que 𝛬 = 0𝐾 𝐼 . On déduit que la famille (𝑓 (𝑥𝑖 ))𝑖∈𝐼 =
𝑓 ∘ 𝒳 ∈ 𝐹 𝐼 est libre dans l’espace (𝐹 , +, ⋅), c’est‐à‐dire que 𝑓 ∘ 𝒳 ∈ lib𝐼 (𝐹 , +, ⋅). Puisque l’ensemble 𝐼 et la famille
𝒳 sont quelconques, c’est donc que l’application 𝑓 envoie toute famille libre dans l’espace (𝐸, +, ⋅) sur une
famille libre dans l’espace (𝐹 , +, ⋅). Le prédicat 𝑃 est universellement valide.
Deuxième implication Si le prédicat 𝑃 est universellement valide, alors la propriété 𝑃(𝐼 ) est évidemment
vérifiée pour tout singleton 𝐼 , par exemple le singleton {1}.
Troisième implication Supposons qu’il existe un singleton 𝐼 pour lequel la propriété 𝑃(𝐼 ) est vérifiée.
Pour tout — éventuel — vecteur 𝑥 ∈ 𝐸 tel que 𝑥 ≠ 0𝐸 : • la famille 𝒳 ≔ (𝑥)𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 est libre dans l’espace
(𝐸, +, ⋅), en vertu du lemme précédent ; • la famille 𝑓 ∘ 𝒳 = (𝑓 (𝑥))𝑖∈𝐼 ∈ 𝐹 𝐼 est alors libre dans l’espace (𝐹 , +, ⋅),
compte tenu de la propriété 𝑃(𝐼 ) ; • une nouvelle application du lemme permet de déduire que 𝑓 (𝑥) ≠ 0𝐹 . On
a ainsi prouvé que :
∀𝑥 ∈ 𝐸, 𝑥 ≠ 0𝐸 ⇒ 𝑓 (𝑥) ≠ 0𝐹 , ∀𝑥 ∈ 𝐸, 𝑓 (𝑥) = 0𝐹 ⇒ 𝑥 = 0𝐸 , ker(𝑓 ) ⊆ {0𝐸 },
où l’on a également invoqué les principes de contraposition et de double négation. On retrouve l’injectivité
de l’application linéaire 𝑓 . □
Proposition 35 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps, (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels ainsi qu’une
application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅). Les assertions suivantes sont équivalentes :
(i) l’application 𝑓 est surjective ;
(ii) l’application 𝑓 envoie toute famille génératrice de l’espace (𝐸, +, ⋅) sur une famille génératrice de l’espace
(𝐹 , +, ⋅) :
∀𝐼 , ∀𝒳 ∈ gen𝐼 (𝐸, +, ⋅), 𝑓 ∘ 𝒳 ∈ gen𝐼 (𝐹 , +, ⋅) ;
(iii) il existe une famille génératrice de l’espace (𝐸, +, ⋅) envoyée par l’application 𝑓 sur une famille génératrice de
l’espace (𝐹 , +, ⋅) :
∃𝐼 : ∃𝒳 ∈ gen𝐼 (𝐸, +, ⋅) : 𝑓 ∘ 𝒳 ∈ gen𝐼 (𝐹 , +, ⋅).
Démonstration — On raisonne par implications circulaires.
Première implication Si l’application 𝑓 est surjective, alors l’égalité im(𝑓 ) = 𝐹 est vérifiée et, d’après la
proposition 27, toute famille de vecteurs 𝒳 ∈ 𝐸 𝐼 indexée par un certain ensemble 𝐼 et génératrice de l’espace
(𝐸, +, ⋅) est telle que la famille 𝑓 ∘ 𝒳 ∈ 𝐹 𝐼 engendre l’espace (im(𝑓 ), +, ⋅) = (𝐹 , +, ⋅).
Deuxième implication Si toute famille génératrice de l’espace (𝐸, +, ⋅) est envoyée par l’application 𝑓 sur
une famille génératrice de l’espace (𝐹 , +, ⋅), alors c’est en particulier le cas de l’identité id𝐸 = (𝑥)𝑥 ∈𝐸 ∈ 𝐸 𝐸 .
Troisième implication Supposons qu’il existe une famille 𝒳 = (𝑥𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐸 𝐼 : • indexée par un certain
ensemble 𝐼 ; • génératrice de l’espace (𝐸, +, ⋅) ; • telle que la famille 𝑓 ∘ 𝒳 = (𝑓 (𝑥𝑖 ))𝑖∈𝐼 ∈ 𝐹 𝐼 engendre l’espace
(𝐹 , +, ⋅). Tout vecteur 𝑦 ∈ 𝐹 = vect(𝐹 ,+,⋅) (𝑓 ∘ 𝒳 ) s’écrit 𝑦 = ∑𝑖∈𝐼 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑖 ) pour une certaine famille de scalaires
(𝜆𝑖 )𝑖∈𝐼 ∈ 𝐾 (𝐼 ) et vérifie :
𝑦 = ∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑓 (𝑥𝑖 ) = 𝑓 (∑ 𝜆𝑖 ⋅ 𝑥𝑖 ) ∈ im(𝑓 ).
𝑖∈𝐼 𝑖∈𝐼
C’est donc que 𝐹 ⊆ im(𝑓 ) et que l’application 𝑓 est surjective. □
Proposition 36 — Soient (𝐾 , +, ×) un corps, (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels ainsi qu’une
application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅).
(i) S’il existe une base de l’espace (𝐸, +, ⋅) envoyée par l’application 𝑓 sur une base de l’espace (𝐹 , +, ⋅), alors cette
application est bijective :
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Démonstration — Première implication Supposons qu’il existe une base ℬ ∈ base𝐼 (𝐸, +, ⋅) indexée par un
certain ensemble 𝐼 et telle que 𝒞 ≔ 𝑓 ∘ ℬ ∈ base𝐼 (𝐹 , +, ⋅). Notons 𝑔 ∈ L(𝐹 , +, ⋅ ; 𝐸, +, ⋅) l’unique application
linéaire telle que 𝑔 ∘ 𝒞 = ℬ. Les applications composées 𝑔 ∘ 𝑓 : 𝐸 → 𝐸 et 𝑓 ∘ 𝑔 : 𝐹 → 𝐹 sont bien définies et
linéaires, de sorte que (𝑔∘𝑓 , 𝑓 ∘𝑔) ∈ L(𝐸, +, ⋅)×L(𝐹 , +, ⋅). En outre, en invoquant l’associativité de la composition
d’applications ∘, on peut écrire les identités 𝑔 ∘ 𝑓 ∘ ℬ = 𝑔 ∘ 𝒞 = ℬ = id𝐸 ∘ ℬ et 𝑓 ∘ 𝑔 ∘ 𝒞 = 𝑓 ∘ ℬ = 𝒞 = id𝐹 ∘ 𝒞
puis, par unicité, déduire que 𝑔 ∘ 𝑓 = id𝐸 et 𝑓 ∘ 𝑔 = id𝐹 , c’est‐à‐dire que les applications 𝑓 et 𝑔 sont bijectives
et réciproques l’une de l’autre. C’est donc que 𝑓 ∈ iso(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅).
Seconde implication Supposons que 𝑓 ∈ iso(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅). L’application 𝑓 est conjointement injective et
surjective. Toute — éventuelle — base ℬ ∈ base𝐼 (𝐸, +, ⋅), libre et génératrice, est envoyée par l’application
𝑓 sur la famille 𝒞 ≔ 𝑓 ∘ ℬ ∈ 𝐹 𝐼 , qui, en vertu des deux propositions précédentes : • est libre dans l’espace
(𝐹 , +, ⋅) ; • engendre l’espace (𝐹 , +, ⋅) ; • constitue conséquemment une base de l’espace (𝐹 , +, ⋅) et appartient à
l’ensemble base𝐼 (𝐹 , +, ⋅).
Troisième implication Sous l’hypothèse que l’espace (𝐸, +, ⋅) admet une base ℬ ∈ base𝐼 (𝐸, +, ⋅) indexée
par un certain ensemble 𝐼 : • si l’application 𝑓 envoie toute base de l’espace (𝐸, +, ⋅) sur une base de l’espace
(𝐹 , +, ⋅), alors c’est en particulier le cas de la base ℬ ; • par implications circulaires, on déduit ainsi que les
implications précédentes sont des équivalences. □
Proposition 37 — Soient un corps (𝐾 , +, ×) et deux (𝐾 , +, ×)‐espaces vectoriels (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅).
(i) Soit un ensemble 𝐼 . Les assertions suivantes sont équivalentes :
a) les espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) sont isomorphes et l’un d’eux admet une base indexée par l’ensemble 𝐼 ;
b) chacun des espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) admet une base indexée par l’ensemble 𝐼 .
Lorsque ces conditions sont vérifiées, les espaces ont même dimension, égale à l’élément card(𝐼 ) ∈ ℕ. Formel‐
lement :
(ii) Si l’un des espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) est de dimension finie, alors ces deux espaces sont isomorphes si, et
seulement si, ils ont même dimension :
Démonstration — (i) Implication directe Supposons que les espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) sont isomorphes et
que l’un d’eux admet une base indexée par l’ensemble 𝐼 . D’une part, l’on peut considérer un isomorphisme
𝑓 ∈ iso(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅) — et l’on a aussi 𝑓 −1 ∈ iso(𝐹 , +, ⋅ ; 𝐸, +, ⋅) — ; d’autre part, par symétrie des rôles joués
par les deux espaces, on peut, sans perte de généralité, supposer que l’espace (𝐸, +, ⋅) admet une base
ℬ ∈ base𝐼 (𝐸, +, ⋅) indexée par l’ensemble 𝐼 . La proposition précédente assure que 𝑓 ∘ ℬ ∈ base𝐼 (𝐹 , +, ⋅).
Chacun des deux espaces admet donc une base indexée par le même ensemble 𝐼 . De plus : • si l’ensemble 𝐼
est fini, alors les dimensions de ces deux espaces sont finies, égales au cardinal card(𝐼 ) ∈ ℕ de l’ensemble
d’indexation 𝐼 de leurs bases ; • si l’ensemble 𝐼 est infini, alors les dimensions des deux espaces sont infinies,
égales à l’élément +∞ = card(𝐼 ) ; • les égalités dim(𝐸, +, ⋅) = card(𝐼 ) = dim(𝐹 , +, ⋅) sont toujours vérifiées.
Implication réciproque Supposons que chacun des espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) admet une base indexée
par l’ensemble 𝐼 . L’on peut considérer un couple (ℬ, 𝒞 ) ∈ base𝐼 (𝐸, +, ⋅) × base𝐼 (𝐹 , +, ⋅) ainsi que l’unique
application linéaire 𝑓 ∈ L(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅) telle que 𝑓 ∘ ℬ = 𝒞 . Cette application envoie la base ℬ de l’espace
(𝐸, +, ⋅) sur la base 𝒞 de l’espace (𝐹 , +, ⋅) : la proposition précédente assure qu’il s’agit d’un isomorphisme,
élément de l’ensemble iso(𝐸, +, ⋅ ; 𝐹 , +, ⋅). Les espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) sont donc isomorphes. En outre,
il est immédiat que l’un, au moins, de ces deux espaces admet une base indexée par l’ensemble 𝐼 puisque
c’est en fait le cas des deux.
(ii) On fait ici l’hypothèse que l’un des espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) est de dimension finie. À nouveau, par
symétrie des rôles joués par ces espaces, on peut supposer qu’il s’agit de l’espace (𝐸, +, ⋅). Notons alors
𝑛 ≔ dim(𝐸, +, ⋅) ∈ ℕ. L’on peut considérer une base ℬ ∈ base⟦1,𝑛⟧ (𝐸, +, ⋅).
Implication directe Si les espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) sont isomorphes, alors l’implication directe du
point précédent prouve que base⟦1,𝑛⟧ (𝐹 , +, ⋅) ≠ ∅ et que dim(𝐸, +, ⋅) = 𝑛 = dim(𝐹 , +, ⋅).
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Implication réciproque Supposons que dim(𝐸, +, ⋅) = dim(𝐹 , +, ⋅). Cette égalité se réécrit dim(𝐹 , +, ⋅) =
𝑛 et signifie que l’espace (𝐹 , +, ⋅) est de dimension finie, égale au nombre 𝑛. L’on peut alors considérer une
base 𝒞 ∈ base⟦1,𝑛⟧ (𝐹 , +, ⋅). Chacun des espaces (𝐸, +, ⋅) et (𝐹 , +, ⋅) admet une base indexée par le segment
⟦1, 𝑛⟧ de l’ensemble ordonné (ℕ, ⩽) : l’implication réciproque du point précédent permet de conclure que
ces espaces sont isomorphes. □
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