74pouvoirs p123-142 Responsabilite Magistrats
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Q U E L L E R E S P O N S A B I L I T É P O U R L E S M A G I S T R A T S ?
DANIEL LUDET
QUELLE RESPONSABILITÉ
P O U R L E S M A G I S T R AT S ?
D A N I E L L U D E T
Q U E L L E R E S P O N S A B I L I T É P O U R L E S M A G I S T R A T S ?
D A N I E L L U D E T
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I. LA RESPONSABILITÉ SANCTION
1. La responsabilité pénale
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La responsabilité pénale encourue par les magistrats n’a lieu d’être exa-
minée qu’en tant qu’elle les concerne dans l’exercice de leurs fonctions.
L’infraction éventuellement commise par un magistrat et qui n’aurait
aucun lien avec son métier n’appelle pas de remarque, sauf à observer,
bien sûr, qu’aucun traitement particulier, aucun privilège, ne serait
concevable. Mais rien n’indique qu’un problème subsiste sur ce point
après l’abrogation par la loi 93-2 du 4 janvier 1993 des articles 679 et sui-
vants du Code de procédure pénale, qui prévoyaient des dispositions
procédurales particulières pour de telles circonstances. Il n’existe aucun
obstacle à une responsabilité pénale pleine et entière.
La situation dans laquelle l’infraction résulterait d’un acte qui, tout
en n’étant pas dépourvu de lien avec l’exercice même des fonctions,
demeurerait extérieur à celui-ci (imaginons un objet de valeur dérobé
dans le tribunal à des fins personnelles ou même la soustraction, par un
juge d’application des peines, de fonds du comité de probation dont il
assure la gestion), n’appelle qu’un commentaire analogue. L’égalité de
tous devant la loi pénale doit être assurée, et rien ne permet de penser
qu’elle ne l’est pas, ou ne le serait pas, dans un tel cas, aucun privilège
de juridiction n’étant plus applicable, comme on l’a vu, après la loi du
4 janvier 1993 précitée.
1. Civ. 3 octobre 1953, Bull. civ. I, nº 224, comparer avec C.A. Paris 21 juin 1989 Saint-
Aubin – Gaz. Pal., 1989, 2e sem., p. 944.
2. Article 473 du Code civil.
3. Articles 622 à 626 du Code de procédure pénale.
4. Articles 149 et s. du Code de procédure pénale.
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2. La responsabilité civile
Là encore, il ne s’agit d’examiner que la responsabilité qui peut être
encourue pour les actes se rattachant étroitement à l’exercice des fonc-
tions judiciaires.
La responsabilité des magistrats professionnels de l’ordre judiciaire
repose, selon l’article 11.1 de l’ordonnance 58.1270 relative au statut de
la magistrature et l’article L 781.1 du Code de l’organisation judiciaire,
sur une distinction entre la faute personnelle et le fonctionnement
défectueux du service.
Si l’on met de côté la question des fautes n’ayant aucun lien avec
l’exercice des fonctions judiciaires, on est amené à constater que, pour
le justiciable victime de dommages causés par l’activité judiciaire, la dis-
ral d’une cour d’appel, agissant dans le cadre d’un pouvoir propre, peut infliger un « avertis-
sement » à un magistrat du siège ou du parquet de son ressort.
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tinction précédemment évoquée n’a pas une très grande portée pratique.
En effet, ou bien l’on sera en présence d’un fonctionnement défectueux
du service de la justice s’analysant en une « faute lourde » ou un « déni
de justice » et la victime devra agir, devant la juridiction judiciaire,
contre l’État en tant que responsable, ou bien l’on sera en présence
d’une faute personnelle du magistrat se rattachant au service public de
la justice, et la victime devra également agir devant la juridiction judi-
ciaire contre l’État, garant « des dommages causés par les fautes per-
sonnelles des juges et autres magistrats ». Dans ce dernier cas, seul
l’État, par la voie d’une action récursoire, pourra agir en responsabilité,
a posteriori, contre le magistrat. Cette action ne pourra être exercée que
devant une chambre civile de la Cour de cassation.
On relève dès à présent qu’un acte qui ne se détache pas du service
130 de la justice ne peut en aucune manière donner lieu à une action directe
de la victime à l’encontre du magistrat qui en est l’auteur.
La jurisprudence permet-elle d’avoir une idée plus précise, plus
concrète, de la portée de ce régime de responsabilité ? Dans une juris-
prudence « relativement abondante à ce jour mais très peu publiée » et
se composant « essentiellement de décisions des juridictions d’appel ou
de première instance, souvent définitives 1 », quelques points méritent
d’être relevés.
On observe tout d’abord qu’il ne paraît pas exister d’obstacle de
principe à ce que la responsabilité de l’État pour faute lourde puisse
résulter d’actes juridictionnels 2. On note ensuite, toujours dans le cadre
de la responsabilité pour fonctionnement défectueux du service, que la
jurisprudence paraît se montrer assez exigeante quant à l’existence
d’une faute lourde ou d’un déni de justice, notions déjà restrictives par
elles-mêmes. Le professeur Perrot remarque à ce sujet que, si le carac-
tère restrictif des conditions posées dans l’article L 781.1 du Code de
l’organisation judiciaire a pu être critiqué, on pouvait difficilement
admettre, s’agissant des activités juridictionnelles, que « le fonctionne-
ment défectueux du service public de la justice pût, en soi et sans autre
condition, entraîner la responsabilité de l’État », toute erreur de juge-
ment pouvant alors devenir une source de responsabilité, « ce qui eût été
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impensable » 3.
S’agissant de la responsabilité de l’État en tant que garant de la
faute personnelle d’un magistrat se rattachant au service, on peut noter
que les auteurs ne font pas état d’une jurisprudence très abondante 4, ce
qui donne à penser qu’une telle faute n’a pas été souvent reconnue, ni
peut-être invoquée. La tendance de la jurisprudence à caractériser la
faute lourde, dans le cadre de la responsabilité pour fonctionnement
défectueux du service, en se référant à la définition qu’en retenait la
Cour de cassation sous le régime juridique de responsabilité personnelle
du magistrat antérieur 5 à celui actuellement en vigueur (« celle qui a été
commise sous l’influence d’une erreur tellement grossière qu’un magis-
trat normalement soucieux de ses devoirs n’y eût pas été entraîné 1 ») en
rapproche le contenu de celui de la faute personnelle. Dès lors qu’un
acte d’un magistrat est en cause, n’est-on pas tenté de l’analyser comme 131
une faute lourde du service, plus aisément « admissible » par un tribu-
nal, car ne stigmatisant pas personnellement un magistrat, plutôt que
comme une faute personnelle se rattachant au service, l’État indemni-
sant dans un cas comme dans l’autre ?
Enfin, l’on doit encore mentionner que la Cour de cassation ne
paraît jamais avoir été saisie d’une action récursoire de l’État à
l’encontre d’un magistrat.
A côté de la responsabilité de l’État pour fonctionnement défec-
tueux du service de la justice, et de la responsabilité personnelle des
magistrats garantie par l’État, existent des régimes spéciaux de respon-
sabilité : la responsabilité de l’État en cas de dommage résultant d’une
faute quelconque commise dans le fonctionnement de la tutelle des
incapables 2, la réparation accordée par l’État dans le cadre de la révision
d’une condamnation pénale 3, l’indemnisation à la charge de l’État de la
personne ayant fait l’objet d’une détention provisoire en cas de non-lieu,
relaxe ou acquittement 4.
On constate donc que des voies diverses existent pour réparer les
dommages qui peuvent résulter, notamment, de l’activité des magistrats.
Les conditions posées, dans le cadre de ces différents régimes, sont
souvent assez restrictives, ce qui s’explique par le caractère particulier
de l’activité en cause, à savoir la justice. On observe aussi que l’indem-
nisation est, dans tous les cas, mise à la charge de l’État, et que celui-ci
ne paraît pas mettre en œuvre l’action récursoire. C’est dire que la res-
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ponsabilité civile pesant sur les magistrats, dans la mesure assez étroite
où les textes l’envisagent, n’a pas de portée pratique.
Cette situation est parfois source de critiques et de suggestions
tendant à l’instauration d’une responsabilité civile personnelle effective
des magistrats à raison des dommages causés dans l’exercice de leurs
fonctions.
Faute de projets précis en ce sens, une telle solution pose, a priori,
autant de problèmes qu’elle serait censée en résoudre. Comment justi-
fier, à l’égard des actes des magistrats, un régime de responsabilité déro-
gatoire par rapport à celui régissant les actes de la quasi-totalité des
autres agents publics et qui distingue la faute personnelle de la faute de
service, l’agent n’ayant pas à répondre personnellement de cette der-
nière? Faudrait-il alors distinguer entre faute de service « anonyme » et
132 faute de service « personnalisée » ? Comment mettre en place des
garanties procédurales afin d’éviter que ne soit, par le biais d’un tel
régime de responsabilité, ouverte largement la voie à des actions de
déstabilisation de la justice dont l’activité, si elle peut être parfois criti-
quable, est au premier chef utile à la société ?
Le remède à l’irresponsabilité de fait actuellement constatée n’est
donc pas si simple.
3. La responsabilité disciplinaire
Les dispositions applicables aux magistrats en matière disciplinaire sont
assez développées dans le cadre de leur statut.
« Tout manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à
l’honneur, à la délicatesse ou à la dignité, constitue une faute discipli-
naire », faute qui s’apprécie, pour un membre du parquet, « compte tenu
des obligations qui découlent de sa subordination hiérarchique » 1.
C’est le garde des Sceaux qui déclenche l’action disciplinaire en sai-
sissant le conseil de discipline qui est le Conseil supérieur de la magis-
trature, dans sa formation compétente à l’égard des magistrats du siège
et sous la présidence du premier président de la Cour de cassation si
c’est un juge qui est concerné, ou dans sa formation compétente à
l’égard des magistrats du parquet, sous la présidence du procureur
général de la Cour de cassation si c’est un membre du parquet qui est
concerné. Dans le cas d’un magistrat du siège, c’est le Conseil supérieur
qui statue sur l’action disciplinaire, sa décision s’imposant au garde des
Sceaux, qui en assure le cas échéant l’exécution. Dans le cas d’un magis-
trat du parquet, le Conseil supérieur ne rend qu’un avis au vu duquel le
garde des Sceaux statue sur l’action disciplinaire.
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gnent. La lecture, par exemple, des Propos sur la conduite des juges éma-
nant du Conseil canadien de la magistrature 1 est riche d’enseignements
à cet égard. De même, le Conseil supérieur de la magistrature d’Italie
assure périodiquement la publication de cahiers sur la « responsabilité
disciplinaire des magistrats » qui informent de ses décisions, de sa juris-
prudence. La position adoptée dans notre pays est d’autant plus diffi-
cile à comprendre parfaitement que les arrêts du Conseil d’État rendus
sur les recours frappant les sanctions disciplinaires sont souvent publiés
avec des informations de caractère nominatif précises, et sont même par-
fois commentés 2.
Consciente des inconvénients que le maintien d’une absolue dis-
crétion à l’égard des sanctions disciplinaires pouvait comporter, la
Direction des services judiciaires du ministère de la Justice a adressé à
134 la fin de 1994 aux chefs des cours d’appel et à l’École nationale de la
magistrature une étude sur la jurisprudence disciplinaire des magistrats
de l’ordre judiciaire dépourvue d’informations de caractère nominatif.
Tout en étant présentée comme destinée à l’information du corps judi-
ciaire, cette étude était assortie de « précautions d’emploi » si restric-
tives, quant à sa diffusion, que son emploi apparaissait finalement mal-
aisé. Ce processus, encore empreint de timidité, sinon de frilosité, a
connu son aboutissement normal avec la publication de larges extraits
de l’étude « confidentielle » dans une revue syndicale 3 et dans le jour-
nal Le Monde du 28 mars 1995 4.
S’il faut en croire ce dernier article de presse, plus de quatre-vingt-
dix décisions disciplinaires auraient été rendues depuis 1958 à l’encontre
de magistrats, dégageant, au fil des ans, un « embryon de jurisprudence
autour du devoir de réserve, mais aussi de la notion d’impartialité ».
Selon la même source, l’étude de la chancellerie relève « une évolution
du droit disciplinaire allant dans le sens d’un apport de plus en plus mar-
qué de règles et de principes directeurs de caractère déontologique » et
cite quelques attendus de décisions du CSM : « Les juges doivent pré-
senter en leur personne même les qualités de rigueur, d’intégrité et de
loyauté qui seules traduisent le sens de leurs responsabilités et la
conscience de leurs devoirs, les rendent dignes d’exercer leur mission et
légitiment leur action » ; « il incombe à tout magistrat d’observer une
réserve rigoureuse et d’éviter tout comportement de nature à entraîner
le risque que son impartialité puisse être mise en doute et que puisse
être, de ce fait, atteinte l’autorité de l’institution judiciaire ». Le même
organe de presse, rapporte enfin, sous forme de citation de l’étude, que
« la chancellerie, plus exigeante quant au respect des devoirs et obli-
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II. LA RESPONSABILITÉ-ACTION
1. La compétence professionnelle
Une justice digne de ce nom suppose des magistrats compétents. Le
magistrat est responsable de sa compétence professionnelle. Cette der-
nière affirmation paraît difficilement pouvoir être contestée, mais elle 137
appelle néanmoins certaines précisions.
L’accès à la magistrature suppose, en règle générale, dans notre
pays, une formation initiale assurée par l’École nationale de la magis-
trature aux candidats admis à un concours. Ce système s’applique à cha-
cun des élèves en vertu de dispositions législatives et réglementaires, et
1. Cf. « Le juge et son éthique », Les Cahiers de l’IHEJ, Paris, Institut des hautes études
sur la justice, 1993.
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voie qui seule peut garantir que l’éthique soit, dans la magistrature,
quelque chose de vivant et non un simple affichage dissimulant que cha-
cun est purement et simplement renvoyé à ses propres conceptions, à ses
seules idées personnelles quant aux exigences de sa fonction.
La réflexion à initier ne doit pas se donner, dans l’immédiat, d’autre
but qu’elle-même, elle ne doit pas avoir d’objet « réglementaire ». Mais
on peut en attendre qu’elle inspire, nourrisse les pratiques individuelles.
C’est une démarche de ce type qui a été mise en œuvre, depuis
quelques années, par l’Institut des hautes études sur la justice sous
l’impulsion d’Antoine Garapon 1, et le débat sur l’éthique du magistrat
a ainsi commencé d’être mené au sein des justices judiciaire et adminis-
trative. Il doit se développer, de façon décentralisée, au sein de chaque
juridiction, et devenir un accompagnement régulier du travail des
magistrats. L’initiation à la réflexion en commun sur les pratiques doit 141
être donnée dans le cadre de la formation initiale, et la formation conti-
nue doit ensuite aider les magistrats à la continuer en leur procurant par
exemple des instruments, des écrits, des éléments de comparaison.
Il y a assurément matière à des convergences entre la formation des
magistrats, qui, confiée à une école jouissant d’une large autonomie, leur
procure un espace de liberté, et la réflexion de ceux-ci sur les finalités
tion qui ne se réduise pas à la simple reproduction des pratiques professionnelles tout en res-
pectant l’indépendance des futurs magistrats, à la fois par une sélection fondée sur des critères
objectifs et par une pédagogie élaborée à l’abri de toute tutelle.
1. Les travaux récents d’A. Boigeol (notamment Comment devient-on magistrat ?
Enquête auprès de trois promotions d’auditeurs, en collab. avec A. Bancaud et G. Rosset, CRIV,
1991) et de J.-L. Bodiguel, en particulier Les Magistrats, un corps sans âme ? (Paris, 1991) ont
montré pour la France le décalage entre la population et les candidats au concours, qui fait
apparaître chez ces derniers une assez forte sous-représentation des étudiants d’origine
ouvrière ou, plus généralement, d’origine dite modeste, distorsion qui est encore accentuée par
une surreprésentation des candidates, elles-mêmes d’origine sociale souvent plus élevée que
celle de leurs condisciples, de telle sorte que la magistrature française au cours de ces années
recruterait au sein des facultés de droit, principalement parmi les étudiantes dont le père est
membre d’une profession libérale ou cadre supérieur, les étudiants masculins délaissant de plus
en plus une profession qui conduit à une institution que deux Français sur trois voient mal
fonctionner (cf. enquête CREDOC, 1991). Ce genre d’observations n’est d’ailleurs pas limité
à la France et, par exemple, de l’autre côté de la Manche, on fait aussi remarquer que la jus-
tice n’est pas suffisamment représentative du tissu social (féminisation insuffisante, représen-
tation trop faible des identités ethniques issues de la colonisation), on la trouve culturellement
trop uniformisée et peut-être même démodée… Sur le phénomène français de la féminisation
que l’on dit croissant et dont certains s’inquiètent, il n’empêche que la diminution de la pro-
portion des filles entre les candidats, les admissibles et les admis, est une constante jusqu’à ces
dernières années dont l’interprétation est complexe, mais on ne peut exclure l’hypothèse d’une
sursélection (voir A. Boigeol, « Les femmes dans la magistrature : entre spécificité et banali-
sation », Droit et Société, nº 25, 1993, p. 457).
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de leur liberté.
Ainsi seraient favorisés le dynamisme et la vivacité d’une démarche
qui, si elle exigera du temps et de l’engagement de la part des magistrats,
apportera au justiciable la garantie précieuse que leur responsabilité
n’est pas seulement un concept juridique réservé à des comportements
plus ou moins « déviants », mais aussi, et surtout, une préoccupation
animant chaque instant de leur vie professionnelle.
R É S U M É
Alors que les magistrats français apparaissent aujourd’hui plus libres d’exer-
cer des pouvoirs dont l’importance paraît grandissante, l’on doit poser la
142 question de leur responsabilité. Les aspects « classiques » de cette dernière
(responsabilité pénale, responsabilité civile, responsabilité disciplinaire)
révèlent des limites quant à leur effectivité, en raison d’une difficulté à
admettre qu’un acte juridictionnel soit critiquable autrement que par l’exer-
cice des voies de recours, et aussi parce que les actions disciplinaires s’accom-
pagnent encore de certaines réticences. C’est pourquoi il faut être attentif à
développer ces autres dimensions de la responsabilité que sont la compétence
professionnelle et l’éthique du magistrat. A travers elles, une responsabilité
vécue par chaque magistrat dans le quotidien de sa fonction peut se super-
poser à une responsabilité éprouvée seulement dans des situations particu-
lières, pour un profit plus concret du justiciable.