La Courbure de Gauss

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Le journal de maths des élèves, Volume 1 (1994), No.

1 51

unitaire sortante
La courbure de Gauss Σ −→ S2
Sylvain Barré M 7−→ N (M ).
Puisque le plan tangent à Σ en M est naturelle-
Introduction ment identifié au plan tangent à la sphère en N (M ),
l’application tangente dN : T Σ −→ T S 2 peut être
Il est souvent question de courbure en géométrie rie- vue comme une application linéaire dans chaque plan
mannienne. On se propose ici de comprendre de quoi tangent.
il s’agit dans le cas de la dimension 2. On définira
donc la courbure des surfaces appelée courbure de Affirmation. Pour tout M ∈ Σ, dN (M ) est
Gauss et on donnera tout de suite un moyen pratique une application linéaire symétrique (pour le produit
général pour la calculer. Ensuite, pour savoir ce que scalaire euclidien).
représente géométriquement cette notion, on donnera Démonstration. Dérivons par rapport à v l’égalité
trois moyens très visuels pour la comprendre. Pour le
< N (M ), Mu >= 0.
premier, on regarde la courbure des courbes tracées
sur la surface, pour le second, l’aire des petits disques On obtient < dN.Mv , Mu >= − < N, Mvu >. En
métriques, et enfin pour le troisième, la position de la inversant les rôles de u et v, et en utilisant le théorème
surface par rapport à ses plans tangents. de Cauchy-Schwarz, on voit que
Comme il est toujours bon d’avoir quelques exem- < dN.Mv , Mu >=< dN.Mu , Mv >,
ples en tête, dans la dernière partie, on étudiera plus ce qui est ce qu’on voulait.
précisément trois catégories d’exemples : les surfaces
de révolution, les voisinages tubulaires et les surfaces dN (M ) se diagonalise donc en base orthonormée.
réglées. Définition. L’application II := −dN est la seconde
forme fondamentale. Ses valeurs propres en M0 , K1
1 Les deux formes fondamentales, la et K2 sont les courbures principales, les directions
courbure de Gauss isotropes sont les directions asymptotiques. Le pro-
La courbure est une notion locale, donnons-nous donc duit K = K1 K2 = det dN (M0 ) est la courbure de
un plongement C ∞ d’une surface Σ : Gauss en M0 . Enfin, la demi-somme
K1 + K 2 1
U ⊂ R2 −→ R3 H= = tr dN (M0 )
2 2
(u, v) 7−→ M = M (u, v)
est la courbure moyenne en M0 .
où U est un ouvert de R2 . On utilisera la notation
Exemples. Dans le cas d’un plan affine, l’application
∂M/∂u = Mu . Aussi, on suppose Σ orientée par la
de Gauss est constante donc K1 = K2 = K = H = 0.
normale Mu ∧ Mv . La métrique induite par celle de
Dans le cas de la sphère S 2 plongée dans R3 comme
R3 euclidien, est représentée dans la carte (u, v) par
on pense et orientée vers l’extérieur, l’application de
la forme quadratique ds2 = Edu2 + 2F dudv + Gdv 2
Gauss N est cette fois l’identité, donc dN aussi et
appelée première forme quadratique fondamentale de
donc −K1 = −K2 = −H = K = 1. Pour ces deux
la surface riemanniène Σ, où, par définition,
exemples, les directions principales ne sont pas bien
E = |Mu |2 ; F =< Mu , Mv > ; G = |Mv |2 . définies.
Rappelons que la longueur d’une courbe M (u(t), v(t)) Remarques :
sera alors donnée par
Z 1p 1. Le signe “−” dans la définition de II sera expliqué
E u̇2 + 2F u̇v̇ + Gv̇ 2 dt plus loin.
0
2. Un changement d’orientation change aussi les
et l’aire de Σ par signes de K1 , K2 et H ; par contre K reste in-
Z
|Mu ∧ Mv | dudv. changée.
U 3. Bien que pour définir K, nous ayons eu recours à
Quand une surface est plongée, il y a une application un plongement, Gauss a montré qu’en fait, cette
naturelle C ∞ qui à tout point de Σ associe la normale notion ne dépend que de la métrique (du ds2 ).
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Plus précisément, K peut être calculée en fonc- Il ne reste plus qu’à inverser une matrice d’ordre 2,
tion de E, F, G et de leurs dérivées partielles pour obtenir la trace et le déterminant de la matrice
premières et secondes. Ceci constitue le Theo- (aij ). Ici, on obtient en fait sa transposée, mais ce
rema Egregium. On démontre aussi que si dans n’est pas gênant. On trouve :
une certaine carte (r, θ) (appelée carte polaire), eg − f 2 eG + Eg − 2f F
la métrique s’écrit ds2 = dr2 + J 2 dθ2 , alors K= et H = .
EG − F 2 EG − F 2
1 ∂2J Remarquons que ces formules sont faciles à retenir,
K(0, 0) = lim .
(r,θ)→0 J ∂r 2 au dénominateur, il y a la première forme, définie
positive, et au numérateur, la deuxième. La seconde
4. Deux surfaces isométriques ont donc même cour-
formule est un dédoublement de la première. A par-
bure, réciproquement, si deux surfaces ont des
tir de ces deux valeurs, il est facile de calculer les
courbures constantes identiques alors, elles sont
courbures principales qui sont racines du√ polynôme
localement isométriques. Pour montrer cela, on
X 2 − 2HX + K, on trouve : Ki = H ± H 2 − K.
utilise des coordonnées polaires (r, θ) qui mettent
la métrique sous une forme simple. Rappelons les différentes étapes pour le calcul pra-
tique :
On peut prolonger notre liste de définitions :
1. Trouver un paramétrage (u, v) de la surface.
• Si K1 (M ) = K2 (M ), on dira que M est un om- 2. Calculer E, F, et G.
bilic, 3. Former le produit Mu ∧ Mv .
• Si K1 (M ) = K2 (M ) = 0, on dira que M est un 4. Caculer |Mu ∧ Mv |2 = |Mu |2 |Mv |2 sin2 θ = EG −
point planaire, F 2. √
• Si K(M ) = 0, on dira que M est un point 5. Calculer N = Mu ∧ Mv / EG − F 2 .
parabolique, 6. Calculer Muu , Mvv , Muv puis e, f et g.
• Si K(M ) > 0, on dira que M est un point ellip- 7. Enfin, calculer K, H, K1 , K2 .
tique,
• Si K(M ) < 0, on dira que M est un point hyper- 3 Comment voir la courbure d’une surface
bolique. Nous allons donner divers moyens pour calculer la
courbure d’une surface et surtout pour voir son signe
2 Calculs explicites de K en fonction de ds2
d’un premier coup d’œil.
et II
Notons e, f, g les coefficients de la seconde forme Lien avec la courbure des courbes gauches
toujours dans la base (Mu , Mv ). Nous avons déjà re- tracées sur Σ
marqué les égalités suivantes bien commodes pour le Considérons une courbe γ(s) tracée sur Σ paramétrée
calcul : par longueur d’arc. Notons U = γ̇(s) et V =
e := − < dN.Mu , Mu >=< N, Muu > N (γ(s)) ∧ U ; de sorte que (U, V, N ) soit un repère
f := − < dN.Mu , Mv >=< N, Muv > orthonormé direct. Notons k et t la courbure et la
torsion de la courbe gauche γ. De la même façon,
g := − < dN.Mv , Mv >=< N, Mvv >
on va définir d’autres fonctions scalaires qui sont les
Notons (aij ) la matrice de −dN dans la base coefficients de la matrice antisymétrique qui exprime
(Mu , Mv ), (qui n’est pas nécessairement orthonor- (U̇ , V̇ , Ṅ ) en fonction de (U, V, N ) :
mée), c’est à dire :  
0 −kg −kN
−dN.Mu = a11 Mu + a21 Mv  kg 0 −tg  .
−dN.Mv = a12 Mu + a22 Mv kN tg 0
En faisant le produit scalaire de ces deux égalités par Si on écrit n = cos α N + sin α V la normale à la
Mu puis Mv , on obtient quatre égalités qui peuvent courbe gauche γ, on trouve facilement les relations :

s’écrire matriciellement sous la forme :
µ ¶ µ ¶µ ¶  k cos α = kN
e f a11 a21 E F k sin α = kg
= . 
f g a12 a22 F G t = tg − α̇
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Avec les définitions suivantes : Proposition. Les courbures principales K1 et K2 en


M0 sont les valeurs extrémales des courbures des sec-
1. kg est la courbure géodésique de γ, tions normales en M0 prises dans la direction de la
2. kN est la courbure normale de γ, normale en M0 .
3. tg est la torsion géodésique de γ.
Démonstration. Il est bien connu que sur le cercle
4. on appelle géodésique (resp. ligne asymptotique, {x2 +y 2 = 1}, la fonction K1 x2 +K2 y 2 est extrémale
ligne de courbure), une courbe qui vérifie kg = 0 pour les directions propres {x = 0} et {y = 0} (si
(resp. kN = 0 et tg = 0), K1 6= K2 ).
Affirmation. On a les propriétés suivantes :
Voilà un premier moyen pour reconnaı̂tre la courbure.
1. Une courbe est géodésique si et seulement si son Dans la figure 1, les deux sections normales γ1 et γ2
plan osculateur est perpendiculaire au plan tan- ont des courbures normales opposées ; la courbure de
gent. la surface sera donc négative en M0 .
2. Une courbe est ligne asymptotique si et seulement Dans la figure 2, les sections normales ont toutes des
si elle est partout tangente à une direction asymp- courbures normales de même signe, la courbure sera
totique. positive ou nulle.
3. Une courbe est ligne de courbure si et seulement Dans la figure 3, il y a en plus une section normale de
si elle est partout tangente à une direction prin- courbure nulle. La courbure de la surface en M0 sera
cipale. nulle.
Démonstration. 1. C’est évident puisque kg est Attention, ce n’est pas parce qu’il y a une droite sur
la composante de U̇ suivant V . une surface que cette surface est de courbure nulle ;
2. On a les égalités suivantes : c’est vrai en K ≥ 0 s’il s’agit d’une section nor-
male, mais faux en général et nous verrons des ex-
kN =< N, U̇ >= − < dN.U, U >= II(U ), emples de surfaces réglées de courbure < 0 (penser au
ce qui montre ce qu’on cherche. paraboloı̈de hyperbolique ou à l’herperboloı̈de à une
nappe).
3. De même,
tg =< N, V̇ >= − < dN.U, V >, Théorème (Meusnier). Fixons-nous un point
M0 ∈ Σ et un vecteur tangent U ∈ TM0 Σ. Alors,
mais < dN.U, V >= 0 signifie que U est vecteur
le lieu des centres de courbure en M0 des courbes pas-
propre de dN .
sant par M0 , tangentes à U , est le cercle de diamètre
Notre démonstration est terminée. M0 C, dans le plan (N, V ), où C est le centre de cour-
bure de la section normale. Ce cercle est appelé cercle
Remarquons que si on peut tracer une droite sur une
de Meusnier.
surface, alors c’est une géodésique et une ligne asymp-
totique en même temps. Démonstration. Paramétrons les courbes γ par
longueur d’arc, alors, puisque kN = II(U ), elles ont
Courbure des sections normales, théorème de toutes la même courbure normale. Il suffit maintenant
Meusnier de se souvenir que l’inversion dans le plan envoie les
On a déjà vu dans le calcul du second point de la droites ne contenant pas l’origine sur des cercles pas-
démonstration précédente, que II(U ) = kN , com- sant par l’origine. On obtient bien le cercle annoncé.
posante normale de l’accélération. Supposons main- Pour voir la réciproque, c’est-à-dire que tout point
tenant que γ soit une section normale en M0 (i.e. du cercle en question est un centre de courbure d’une
l’intersection au voisinage de M0 du plan normal à courbe tangente à U , il suffit de considérer des sec-
Σ en M0 et de Σ). Il est alors clair que kg (M0 ) = 0 tions transverses.
pour de telles courbes. Si bien qu’on peut interpréter
On pourra penser au cas de la sphère, voir figure 4.
II(U ) comme la courbure en M0 de la section normale
tangente à U . %
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Les formules de Puiseux et de Diquet


N La métrique apporte une distance naturelle sur Σ
g1 (voir l’article de Stéphane Grognet dans ce joural).
Soit M0 ∈ Σ, notons
M0 D(ε) = {M ∈ Σ, d(M, M0 ) ≤ ε}
le disque de rayon ε, et
C(ε) = {M ∈ Σ, d(M, M0 ) = ε}
le cercle. Alors, on montre que quand ε → 0 on a
g2 les développements limités suivants, qui contituent re-
spectivement les formules de Puiseux et de Diquet :
K(M0 ) 2
Long C(ε) = 2πε[1 − ε + o(ε2 )]
Figure 1: Courbure négative 6
K(M0 ) 2
Aire D(ε) = πε2 [1 − ε + o(ε2 )]
12
Pour nous convaincre, nous allons regarder le cas de
N la sphère de rayon R (de courbure constante 1/R2 ).
On calcule :
M0 L(ε) = 2πR sin(ε/R)
ε2
= 2πε[1 − + o(ε2 )] ,
6R2
A(ε) = πR2 [1 − cos(ε/R)]
ε2
= πε2 [1 − + o(ε2 )] .
12R2
Voilà un second moyen pour reconnaı̂tre la courbure :
Figure 2: Courbure positive En courbure négative, si on met un disque à plat, des
plis se forment, son périmètre est > 2πε, figure 6.
En courbure positive, le disque se déchire quand on le
met à plat, son périmètre est < 2πε, figure 7.
En courbure nulle, le disque se met bien à plat, figure
8.
M0
3.1 Courbure et convexité
Une surface est localement un graphe au dessus de son
Figure 3: Courbure nulle plan tangent. Si on se place au voisinage de O ∈ Σ,
en supposant TO Σ = {z = 0} alors, il y aura un
paramétrage sous la forme z = f (x, y). Rappelons
que II(U ) est la courbure en O de la section normale
qui est tangente à U ∈ TO Σ. On s’aperçoit donc que
la seconde forme coı̈ncide avec la différentielle seconde
de f en O si la surface est orientée vers le haut :
C M0
II = D2 f (O).
Au passage, donnons une définition :
Définition. Le paraboloı̈de osculateur à Σ en O est
Figure 4: Le cas de la sphère défini par z = II(x, y) = K1 ξ12 + K2 ξ22 , où ξ1 et ξ2
sont les coordonnées principales en O.
Le journal de maths des élèves, Volume 1 (1994), No. 1 55

Affirmation. On a les propriétés suivantes :


• Si K > 0 alors Σ est localement strictement con-
vexe, i.e. d’un seul côté de ses plans tangents.
• Si K < 0 tout plan tangent traverse la surface.
Démonstration. La première affirmation provient
R du fait que D2 f (O) est définie (positive ou négative),
et la seconde s’obtient en considérant le paraboloı̈de
Figure 5: osculateur tangent à l’ordre 2 à Σ en O, qui est un
paraboloı̈de hyperbolique enK < 0.
Nous voilà donc avec un troisième moyen en poche
pour voir la courbure :
En courbure négative, Le plan tangent traverse la sur-
M0
face, figure 9.
En courbure positive, la surface est d’un seul côté du
plan tangent, figure 10.
Pour la tôle ondulée (figure11), on n’est ni dans un
cas, ni dans l’autre.

Figure 6: K < 0 4 Quelques exemples


On a donné un moyen pour calculer la courbure à par-
tir d’un paramétrage quelconque, mais dans les cas
particuliers, des paramétrages bien choisis peuvent
M0 simplifier les expressions. Remarquons pour com-
mencer que la connaissance du groupe des isométries
de la surface considérée peut nous renseigner. En par-
ticulier, si une surface est homogène, c’est-à-dire si
son groupe d’isométries agit transitivement, alors sa
courbure sera constante.

Surfaces de révolution
Prenons l’axe Oz pour axe de révolution et no-
Figure 7: K > 0 tons γ(s) la méridienne dans le plan {y = 0} :
(x(s), 0, z(s)) (voir figure 12).
Affirmation. Les cercles horizontaux et les
méridiennes sont les lignes de courbure.
Démonstration. Prenons pour normale N =
(−ż, 0, ẋ), dans le plan {y = 0}. Il suffit de différencier
(mentalement) l’application de Gauss suivant les
courbes en question, pour obtenir le résultat. C’est-
à-dire, il s’agit de vérifier que les vecteurs tangents
sont propres pour l’application −dN et on obtient,
en regardant la figure les valeurs propres qui sont les
courbures principales. Si δ est un cercle horizontal et
Figure 8: K = 0 si on note toujours γ̇ = U et δ̇ = V ,

dN.U = −kU et dN.V = − V
x
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ceci achève notre démonstration.


M0 Si le paramétrage n’est pas par longueur d’arc, on en
déduit les formules pratiques suivantes :
ẍż − ẋz̈
T S K1 = k = 2
M0 (ẋ + ż 2 )3/2
et

S K2 = ,
x(ẋ2 + ż 2 )1/2
Figure 9: Le plan tangent traverse la surface d’où
ż(ẍż − ẋz̈)
K= .
x(ẋ2 + ż 2 )2

Surfaces minimales de révolution


Définition. Une surface sera dite minimale si sa
courbure moyenne H est partout nulle.
Remarque. Une
surface minimale est nécessairement de courbure de
M0 Gauss négative car K1 = −K2 ⇒ K = K1 K2 ≤ 0.
Un plan est une surface minimale de révolution ;
Figure 10: La surface est d’un seul côté du plan cherchons maintenant les méridiennes transverses à
tangent l’horizontale qui engendrent des surfaces minimales.
Il s’agit de résoudre l’équation différentielle suivante
où x est fonction de z :
ẍ 1
3/2
= .
(ẋ + 1) x(1 + ẋ2 )1/2
En multipliant par ẋ(1 + ẋ2 )1/2 , on peut intégrer et
trouver
log(1 + ẋ2 ) = log x2 + log λ2
où λ > 0 est une constante, en prenant l’exponentielle
et en intégrant à nouveau, on obtient, à une ho-
mothétie près la chaı̂nette d’équation x = chz, c’est
la caténoı̈de (figure 13).

Surfaces de révolution à courbure constante


Prenons cette fois-ci z = F (x), et résolvons
Figure 11: Tôle ondulée
−ż z̈

x(1 + ż 2 )2
z
où ε = ±1 est la courbure. Il vient donc
1
= εx2 + c
N 1 + ż 2
où c est une constante réelle quelconque. On n’obtient
d pas de formules explicites, mais une formule intégrale.
y Dans chacun des cas ε = ±1, on obtient trois types
g de solutions suivant les valeurs du paramètre c. Pour
une valeur particulière de ce paramètre, on obtient la
x sphère en courbure positive et la surface de Beltrami
en courbure négative (voir les dessins dans le livre de
Figure 12: Surface de révolution M.Berger et B.Gostiaux page 432).
Le journal de maths des élèves, Volume 1 (1994), No. 1 57

4.1 Voisinages tubulaires


Soit Γ(t) une courbe gauche paramétrée par longueur
d’arc. Nous noterons n et b les normale et binormale,
de plus, k et T seront sa courbure et sa torsion. Con-
sidérons une courbe plane γ paramétrée par longueur
d’arc (x(s), y(s)). Soit la nappe paramétrée :
M (s, t) = Γ(t) + x(s)n(t) + y(s)b(t).
Il est facile de calculer le produit extérieur Figure 13: La caténoı̈de
 
T (xẋ + y ẏ)
Mt ∧ Ms =  ẏ(1 − kx) 
−ẋ(1 − kx)
dans le repère (Γ̇, n, b). Si on suppose |kx| < 1 pour b
tous s, t et si de plus γ est un cercle de rayon ε < 1/k
alors la nappe sera une surface immergée et la normale
n
aura une expression simple :
N = cos(s)n(t) + sin(s)b(t). t
On calcule alors Mtt , Mts , Mss pour finalement ar-
river à une expression de la courbure de Gauss :
−k cos s
K= .
ε(1 − kε cos s)
En regardant dans le plan normal (n, b), on voit ap- Figure 14: Dans le plan normal
paraı̂tre les régions à K > 0, celles à K < 0 et celles
à K = 0, comme le montre la figure 14.
Remarquons que les petits cercles à t constant sont des
lignes de courbures associées à la courbure 1/ε. Par b
contre, les courbes à s constant ne sont pas toujours R− cos(s)
des lignes de courbure. Si la torsion T est nulle, c’est
le cas. Par exemple, dans le cas où γ est un cercle
de rayon R. Alors, en regardant la figure suivante, on n
peut obtenir K2 = − cos s/(R − ε cos s) et bien sûr t
K1 = 1/ε.
La figure 16 montre la régionalisation suivant le signe
de la courbure. R

4.2 Surfaces réglées Figure 15: On trouve facilement K2

Mis à part le cas des cylindres dont les lignes de cour-


bure sont les droites associées à la courbure 0 et les
parallèles associées à sa propre courbure en tant que
courbe gauche, et celui des cônes dont les rayons sont
des lignes de courbure associées à 0, on peut trouver,
pour chaque système de règles, un paramétrage parti-
culier pour une surface réglée (au moins localement) : Figure 16: Régionalisation suivant le signe de la
X(t, u) = α(t) + uW (t) courbure
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où |α̇| = 1, |W | = 1, et < Ẇ , α̇ >= 0. La courbe On peut ajouter que si une surface est de courbure
α(t) s’appellera alors la ligne de striction. Par exem- nulle, on peut, localement, lui associer un système de
ple, pour le paraboloı̈de hyperbolique z = x2 − y 2 , règles (les lignes de courbure associées à 0) , voir figure
qui possède deux systèmes de règles orthogonales, on 18.
trouve les deux lignes de striction z = 0, y = ±x. La figure 19 ilustre le cas d’une surface non
Pour un hélicoı̈de droit on trouve son axe (voir figure développable.
17).
Si on appelle λ(t) = (α̇, W, Ẇ )/|Ẇ |2 le paramètre, on
obtient facilement l’expression : Conoı̈des droits minimaux
Xt ∧ Xu = λ(t)Ẇ + u(Ẇ ∧ W ). Pour terminer, on peut s’amuser à chercher les
√ que Xuu = 0 et Xtu = Ẇ
On voit immédiatement conoı̈des droits minimaux.
donc g = 0 et f = λ/ λ2 + u2 et donc finalement
Définition. Un conoı̈de est une surface réglée dont
−λ2 les règles ont des directions qui appartiennent toutes
K= 2
(λ + u2 )2 à un même plan vectoriel. Un conoı̈de est droit si
Remarques : sa ligne de striction est une droite dans la direction
orthogonale au plan.
1. On a déjà vu que les règles sont à la fois
Adoptons le paramétrage suivant :
géodésiques et lignes asymptotiques.
2. Si on note θ l’angle orienté entre N (t, u) et N (t, 0) X(t, u) = (u cos θ(t) ; u sin θ(t) ; t).
(dans le plan orienté (Ẇ , α̇)), on s’aperçoit de la On calcule Xt , Xu et Xtt , et on remarque que :
relation tan θ = u/λ, et donc K = − cos4 θ, où F = 0, g = 0 car Xuu = 0, G = 1,
θ varie de −π/2 à π/2 quand on se promène sur et
une règle d’un bout à l’autre. θ̈u
e= p .
3. Si λ(t) = 0 alors le point X(t, 0) est singulier (i.e. 1 + u2 θ̇2
Xt ∧ Xu = 0) et la courbure est nulle le long de On obtient donc
la règle correspondante. eG + Eg − 2f F = 0 ⇔ θ̈ = 0.
On a démontré l’affirmation suivante : Finalement :
Affirmation. La courbure d’une surface réglée est Affirmation. L’hélicoı̈de est le seul conoı̈de droit
négative, et nulle seulement le long des règles qui ren- minimal (l’angle est fonction affine de la hauteur).
contrent la ligne de striction en un point singulier.
La figure 20 montre le cas de l’hélicoı̈de θ = az + b.
Définition. On dira qu’une surface réglée est
développable si ses plans tangents ne varient pas le Bibliographie
long d’une même règle.
M.Berger et B.Gostiaux, Géométrie différentielle :
On notera que pour une surface développable, les variétés, courbes et surfaces, PUF, avril 1992.
règles sont les lignes de courbure associées à la cour- M.P. Do Carmo, Differential geometry of curves and
bure nulle. La courbure de Gauss sera donc elle aussi surfaces, Printice-Hall 1976.
nulle.
P.Attali, J.Guillard et A.Tissier, Géométrie 6, Bréal
Il est clair que les cylindres et les cônes sont 1981.
développables et, dans le cadre de nos calculs, vu
l’expression de la normale, on voit qu’une sur- ¦ Sylvain Barré
face réglée est développable si et seulement si son UMPA ENS–Lyon
46, allée d’Italie
paramètre λ est nul, c’est-à-dire si et seulement si sa
69364 Lyon cedex 7
courbure de Gauss est nulle. Finalement,
[email protected]
Affirmation. Une surface réglée est développable si
et seulement si sa courbure de Gauss est nulle.
Le journal de maths des élèves, Volume 1 (1994), No. 1 59

Figure 17: Ligne de striction pour un hélicoı̈de

Figure 18: Surfaces développables

Figure 19: Surface non développable

Figure 20: L’hélicoı̈de θ = az + b

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