Learning How To Curse in The Masters Tongue Strategies Du Postcolonialisme en Amerique Latine
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1. Spivak, Gayatri C. Outside in the Teaching Machine. New York : Routledge, 1993, p. 56.
2. Saïd, Edward. Culture and Imperialism. New York : Vintage Books, 1993, p. xxii.
3. Ibid., p. xii.
Revue 4-2005
de Littérature comparée
De peur que l’action militaire directe dans les colonies ne provoque des
réactions, les administrateurs anglais ont cherché à masquer ou dissimu-
ler leurs investissements matériels développant une vaste politique cultu-
relle, dont une des armes principales a été l’enseignement de la littérature
anglaise. En présentant la production littéraire anglaise comme exemple
d’humanisme gratuit, intéressé au seul perfectionnement de la formation
des individus, les colonisateurs opposaient à l’image négative de la domina-
tion, un idéal esthétique incantatoire, qui dressait le colonisateur en tant que
modèle, devant être admiré. La conséquence la plus immédiate et funeste de
cette stratégie fut l’internationalisation du regard du colonisateur et de toute
la Weltanschauung représentée par lui. Ce sont les réactions à cette posture
qui fixent le début de la littérature postcoloniale, marquée justement par son
caractère de résistance à la colonisation et de dénonciation de l’idéologie
colonisatrice, et ses formes de chosification du sujet.
4. Ashcroft, Bill, Griffiths, Gareth & Tiffin, Helen. The Empire Writes Back. Theory and
Practice in Post-Colonial Literature. Londres : Routledge, 1989, p. 4.
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dentale. Une théorie comme celle de Homi Bhabha, par exemple, provient
d’une réflexion sur la nature de la production culturelle post-coloniale et
des divers types d’hybridation qui en adviennent. Que ce soit en linguistique,
en philosophie ou en théorie de la littérature, les théories postcoloniales
opèrent toujours d’une façon subversive, visant à démanteler les présup-
posés aprioristiques issus de certaines théories européennes et à dévoiler
les complexités cachées derrière des affirmations à caractère moniste ou
universaliste, en faveur d’une vision non exclusive et plurielle. Bref, elles
constituent un projet de revisiter, de rappeler, mais surtout de mettre en
question le passé colonial.
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10. Achebe, Chinua. Morning yet on Creation Day. New York : Doubleday, 1975, p. 13.
11. Chakrabarty, D. “Postcoloniality and the Artifice of History : Who Speaks for
‘Indian’Pasts ?” Representations, vol. 4, n. 3, p. 228-247, 1990.
12. Gandhi, Leela, op. cit, p. 3.
13. Adam, I. & Tiffin, Helen (orgs.). Past the Last Post : Theorizing Postcolonialism and
Postmodernism. Hemel Hemsttead : Harvester Wheatsheaf, 1991, p. vii.
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Bien que les Études post-Coloniales aient surgi dans le milieu universi-
taire et intellectuel anglo-saxon et se soient appliquées, dans un premier
moment, à l’univers de langue anglaise, il est évident qu’elles ne se res-
treignent plus à ce contexte, ayant déjà eu des résultats intéressants dans
des espaces linguistiques comme la francophonie, les pays de langues por-
tugaise et espagnole. Cependant, dans chacun de ces domaines il y a des
spécificités d’ordre historique dont on ne peut pas ne pas tenir compte. Dans
le contexte anglo-saxon même il existe une distinction souvent établie entre
les colonies dites « d’établissement », telles que le Canada et l’Australie, et
celles « d’intervention », telles que l’Inde, qui présentent des préoccupations
assez distinctes en ce qui concerne le trauma de la colonisation. Et encore,
considérant ces deux catégories, on ne peut envisager de la même façon un
cas comme celui des pays du Commonwealth, et celui des États-Unis – pays
qui se transforme de dominé en dominateur, et qui identifie sa littérature
au XXe siècle avec le canon de la production européenne. En outre, dans les
États-Unis mêmes, il ne faut pas manquer de reconnaître les différences
fondamentales entre la production littéraire canonique et celle des groupes
défavorisés, qui se battent pour conquérir le droit à la parole.
14. Cité par Childs, Peter & Williams, Patrick. An Introduction to Post-Colonial Theory.
Londres : Prentice Hall, 1997, p. 5.
15. Spivak, Gayatri C., in Harasym, Sarah (org.). The Post-Colonial Critic : Interviews,
Strategies, Dialogues. Londres : Routledge, 1990, p. 166.
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Mais si les formes d’appropriation ont toujours été fréquentes dans les
littératures de l’Amérique latine, à tel point que l’on pourrait dire que l’ap-
propriation constitue l’une de ses marques principales – c’est la tradition de
la rupture à laquelle se sont référés plusieurs critiques 19 – il est indéniable
par ailleurs que les théories post-coloniales développées depuis la décen-
nie de 1970 jusqu’à présent ont constitué une contribution importante. Non
seulement elles ont rendu visible le rôle joué par ces formes d’appropria-
tion, mais aussi elles ont souligné l’intérêt d’encourager ces opérations, les
étendant à un genre de production qui jusqu’alors était resté en marge de la
reconnaissance officielle. En outre, ces théories ont conféré aux processus
d’appropriation une plus grande conscience du besoin constant de se repor-
ter au contexte, ce qui garantirait l’établissement de différences entre les
deux termes du processus. Les productions littéraires afro-brésilienne ou
afro-cubaines, par exemple, ont assimilé une série d’apports considérables
des États-Unis, mais dans la plupart des cas n’ont pas laissé de fixer leurs
différences, et il en va de même, très clairement, si l’on fait une étude com-
parative de la production des immigrants européens et asiatiques dans les
contextes latin et nord-américain. Dans le premier espace, le néocolonial,
des problèmes comme celui de la classe sociale apparaissent immédiate-
ment et se confondent ou se superposent bien souvent avec les éléments
d’identité ethnoculturelle.
19. V. Campos, Haroldo de. “Ruptura dos gêneros na literatura latino-americana”. In : Fer-
nández Moreno, César (org.). América Latina en su literatura. São Paulo : Perspectiva,
1972, p. 281-306.
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