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Revue Économie, Gestion et Société N°23 février 2020

LA RÉGLEMENTATION DU SECTEUR BANCAIRE:


UNE JUSTIFICATION THÉORIQUE

Par

Florent Jean Désiré KABIKISSA

Chercheur à la Faculté des Sciences Economiques, Université Marien


Ngouabi, Brazzaville - République du Congo.

Résumé
Les crises bancaires sont au cœur de la quasi-totalité des crises financières contemporaines
Quoiqu’elle fasse l’objet de plusieurs travaux de recherche, la réglementation du secteur
bancaire revient toujours, avec la résurgence des crises, au cœur des préoccupations des
autorités monétaires et des chercheurs. En effet, la prévention des paniques bancaires
constitue toujours une priorité, surtout pour les pays dont le secteur bancaire demeure fragile.
Avec la dernière crise des subprimes de 2008, de nouvelles mesures réglementaires ont été
adoptées par les Etats. L’objectif de cet article est de remettre en perspective le cadre
théorique sous-tendant la réglementation du secteur bancaire en s’appuyant sur les modèles de
Diamond et Dybvig (1983), Postlewaite et Vives (1987). En dépit des indéniables avancées
obtenues, ces mesures n’épuisent pas pour autant tous les aspects liées à la réglementation du
secteur bancaire de sorte que les menaces de crises bancaires demeurent toujours présentes.
Mots clés : réglementation, crise bancaire, crise financière, secteur bancaire.

THE REGULATION OF THE BANKING SECTOR: A THEORETICAL JUSTIFICATION

Abstract
Bank crises are at the heart of almost all contemporary financial crises. Although it is the
subject of several research projects, the regulation of the banking sector is still, with the
resurgence of crises, at the heart of the concerns of monetary authorities and researchers.
Indeed, the prevention of banking panics is still a priority, especially for countries whose
banking sector remains fragile. With the latest sub-prime crisis of 2008, new regulatory
measures were adopted by the states. The purpose of this article is to recall the theoretical
framework underlying the regulation of the banking sector based on the models of Diamond
and Dybvig (1983), Postlewaite and Vives (1987). Despite undeniable progress achieved at
the end of each crisis, the latest new measures advocated do not exhaust all the aspects related
to the regulation of the banking sector. Indeed, the threats of major banking crises are still
present.
Keywords: regulation, banking crisis, financial crisis, banking sector.
Classification JEL : G21, G28, E58

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Introduction

L’introduction de l’hypothèse d’information imparfaite et les modalités de l’équilibre


qu’elle implique conduisent à une approche du marché du crédit beaucoup plus riche que celle
proposée auparavant. Aussi, cette optique nous permet-elle d’étudier le problème de la
réglementation financière et bancaire en tenant compte de la complexité de ce secteur.

Sous des modalités diverses, la réglementation bancaire existe dans tous les pays. À
rechercher les raisons d’une telle législation, on s’aperçoit qu’il y a deux types d’arguments
tout à fait distincts qui la justifient, l’un tenant à la régulation du cycle économique
(fondement monétaire ou conjoncturel), l’autre tenant au contrôle prudentiel (fondement
prudentiel). Dans le cadre de la théorie moderne de l’intermédiation financière, la
réglementation prudentielle des banques occupe sans doute une place singulière. Aussi bien
dans les pays développés qu’en cours de développement, l’industrie bancaire représente l’un
des secteurs de l’économie où l’immersion du pouvoir public est la plus accentuée (Keffi et
Maraghni, 2011, p. 383) ; et l’analyse économique justifie l’intervention des pouvoirs publics
par l’existence des « dysfonctionnements » dans les marchés (Morel, p. 238). Les banques
produisent en effet un service public qui justifie une régulation, y compris d’inspiration
supranationale. Elles gèrent la monnaie, relaient les politiques monétaires et participent à la
production d’un bien public mondial : la stabilité financière (Dannon et Lobez, 2015, p. 279).

En effet, tout d’abord, les dépôts constituent une partie de la masse monétaire, et à ce titre
influencent le niveau d’activité. Il est donc nécessaire de réglementer les dépôts pour
contrôler la masse monétaire, ce qui constitue le fondement monétaire ou conjoncturel de la
réglementation. Mais, ensuite, la spécificité du contrat de dépôt, avec la vente par la banque
d’une option de vente crée une situation dans laquelle un système bancaire non réglementé est
vulnérable aux crises bancaires. Des situations peuvent apparaître dans lesquelles chaque
déposant a intérêt à retirer ses dépôts parce que les autres font de même. La règlementation se
justifie alors en tant que réponse à la nécessité de limiter le risque de panique et de défaillance
bancaire, et donc de protéger les déposants, ou le fonds d’assurance des dépôts et le
contribuable, lorsque les dépôts sont explicitement ou implicitement couverts (Tirole, 2014).
C’est cette deuxième justification, qui constitue le fondement prudentiel de la réglementation,
qui fera l’objet de cet article.

Cette question de la réglementation du niveau de contrôle des risques socialement désirable


du point de vue du bon fonctionnement du système financier et bancaire revient constamment
à l’ordre du jour des sommets mondiaux ces dernières années du fait des progrès de
l’ingénierie financière, des changements technologiques, de l’accentuation de la concurrence,
de l’évolution de la demande des services financiers et de l’augmentation des risques hors-
bilan consécutive (notamment les interactions avec le shadowbanking ou système bancaire
parallèle, non agréé). Aussi est-il important de réexaminer l’apport de la théorie sur ce point.

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La dernière crise des subprimes de 2007 a montré, par son intensité, ses répercussions
internationales et les coûts de sauvetage par les Etats, combien la résolution d’une crise du
système bancaire est coûteuse. Selon le FMI, les trois-quarts de ses pays membres ont connu
une crise bancaire et financière entre 1980 et 1996 (Madiès, 2006, p.62), 52 phases de crises
ont été recensées entre 2006 et 2010 (Jedidi et Pentecôte, 2015, p. 192). .

Afin de comprendre comment le problème se pose, il est intéressant de commencer par


étudier ce que serait le fonctionnement d’un système bancaire non réglementé, ce qui nous
permettra d’examiner la pertinence des deux types d’arguments traditionnellement invoqués
pour justifier l’existence d’une réglementation. Nous examinons également le problème de la
faillite bancaire dans sa spécificité (première partie).

Ensuite, nous développons dans la deuxième partie une modélisation des paniques bancaires
qui nous permettra de porter une appréciation sur les différents types de réglementations et
leur efficacité, notamment celles dont l’objet est, soit de limiter le risque de faillite bancaire,
soit de diminuer le coût de celle-ci pour le déposant (troisième partie). La littérature
académique sur cette thématique étant essentiellement anglo-saxonne, les Etats-Unis ayant
connu un bon nombre de cas de crises bancaires (bankruns), nous nous référons en priorité,
dans cet article, à l’expérience américaine ainsi qu’aux mécanismes qui ont été mis en place
dans ce pays.Cependant, avant de conclure ce travail, nous nous permettrons de réaliser un
survol de la réglementation dans certainspaysavec un accent particulier aux pays membres de
la zone franc (UEMOA1 et CEMAC2).

I. Revue de la littérature théorique

1.1. Système bancaire non réglementé

Tout établissement bancaire joue un double rôle puisque, d’une part, il permet de réaliser
des transferts de richesse entre individus par un simple jeu d’écritures comptables et, d’autre
part, il émet des créances sur lui-même en échange de créances sur d’autres agents.

Dans un système bancaire parfaitement concurrentiel, les établissements bancaires vont offrir
aux déposants une multitude de dépôts plus ou moins risqués. L’argument classique qui
justifie la réglementation du secteur bancaire est basé sur le fait que les dépôts constituent de
la monnaie, et que la monnaie a une influence sur le niveau d’activité. C’est cet argument qui
est développé par Johnson (1968, p. 976) lorsqu’il écrit : « un système bancaire concurrentiel
serait constamment incité à augmenter l’offre de monnaie nominale, et par conséquent à
alimenter l’inflation »3.

1UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine


2CEMAC : Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale.
3Gurley et Shaw (1960) et Patinkin (1961) estiment que dans ce contexte le système de prix est indéterminé

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En fait, Fama (1980) estime que le problème est plus complexe. Les dépôts bancaires
constituent dans un système bancaire non réglementé des biens hétérogènes, chacun ayant un
risque qui lui est propre, et ne doivent pas être assimilés à la monnaie. Sans perte de généralité
il est possible de définir un bien comme numéraire et les dépôts comme des biens concédant
des droits contingents, dépendant de la performance de la banque, qui sont libellés en termes
du numéraire. L’effet des banques sur le niveau d’activité ne proviendra pas alors de son
activité de services mais de son rôle de gestion de portefeuille. La question pertinente est,
d’après Fama, de savoir si les banques choisissent correctement les projets financés par elles,
qui sont déterminants du niveau d’activité. Or, sur un marché de capitaux parfaits,
l’application du théorème de Modigliani-Miller aux établissements bancaires établit qu’il n’y
a pas d’influence du mode de financement sur les prêts réalisés par ceux-ci. En effet, dans ce
cas, les déposants peuvent financer directement la production des entreprises sans passer par
l’intermédiaire des banques, de telle sorte que les activités de portefeuilles de celles-ci sont
sans influence sur les décisions d’investissements et de production des entreprises.

Si nous considérons un marché des capitaux imparfaits, la forme « faible » du théorème de


Modigliani-Miller, s’applique, bien que les déposants n’aient pas les mêmes possibilités
d’investissement que les banques, dès lors qu’il y a un même accès à ces investissements pour
toutes les banques, sans effets de clientèle. Dans ce cas, à l’équilibre, les banques vont
proposer le même rendement sur leurs dépôts. En effet, si une banque développait un nouveau
type de dépôts, l’inégalité des rémunérations qui s’ensuivrait aurait pour effet d’amener les
autres banques à compenser globalement cette modification dans la structure globale des
dépôts. Le théorème de Modigliani-Miller s’applique alors et chaque banque maximise la
valeur de ses actifs de sorte que la structure de son passif n’influence pas les caractéristiques
des projets d’investissement qu’elle a intérêt à financer.

Cet argument s’étend à un contexte où il existe une réglementation sous la forme de réserves
obligatoires et de limites à la rémunération des dépôts à vue (Fama, 1980). L’application du
théorème de Modigliani-Miller implique que les réserves obligatoires constituent uniquement
une taxe sur les dépôts, qui, à l’équilibre, influence les prix, aussi bien les taux sur les dépôts
que sur les prêts. L’imposition d’une limite à la rémunération des dépôts aura alors
simplement pour conséquence l’existence des rémunérations en nature par le biais de la sous-
tarification des services bancaires.

La thèse de Fama est donc la suivante : un système bancaire parfaitement déréglementé


devrait, dans des conditions, idéales, conduire à une allocation efficace des ressources, chaque
établissement se trouvant caractérisé par un niveau de risque propre.

Parmi les critiques que l’on peut formuler à l’égard de cette thèse une nous semble limiter
fortement la portée de l’argument avancé. Dans la modélisation proposée par Fama, les
banques n’émettent pas véritablement de la monnaie mais des titres. Il est vrai que la mise en
place d’une réglementation est alors superflue d’après le premier théorème du bien-être.
Cependant, une réglementation constitue un bien public, et la règlementation bancaire a pour

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objectif de convertir les titres de bancaires en monnaie. Ainsi, le problème s’assimile surtout à
celui de la création d’un bien nouveau, la monnaie bancaire. La réponse à cette question passe
par l’approche développée par Lancaster (1975) : il suffit d’examiner si le bien nouveau
fournit une combinaison des caractéristiques souhaitées par les différents agents concernés à
un coût plus faible. Or, la monnaie bancaire offre des caractéristiques de transférabilité que
n’offrent ni les espèces ni les autres formes de placement. C’est donc en ces termes que le
problème doit être d’abord formulé, et la réglementation apparaît justement comme
l’ensemble des règles qui fait que les dépôts bancaires aient les caractéristiques de la monnaie.

1.2. Le mécanisme de la faillite bancaire

La faillite bancaire est définie comme pour les entreprises à partir du seuil d’égalité entre la
valeur des actifs de la banque et la valeur de ses dettes. De façon équivalente, nous pouvons
dire que la faillite se produit à partir du moment où la valeur des actions de la banque est
nulle.

La différence entre la faillite de l’entreprise et la faillite bancaire provient d’une différence


dans la structure du financement. En effet, les dépôts à vue comportant une option de vente au
pair, les déposants peuvent exercer cette option à tout instant.

Nous serons donc amenés à distinguer deux notions différentes, la faillite bancaire et la crise
bancaire pour nous référer à ces deux situations.

La faillite bancaire résulte d’une « mauvaise gestion » de la banque et s’assimile à la faillite


d’une entreprise, générant des externalités négatives sur le reste de l’économie.

La crise bancaire (bankrun) est, par contre, le résultat d’un mouvement de retraits collectifs.
L’ensemble des déposants décidant d’effectuer des retraits, la banque se trouve confrontée au
dilemme suivant : soit elle se déclare défaillante et ne fait plus face à ses engagements, soit
elle cède des actifs lui permettant d’obtenir les liquidités nécessaires, mais ces cessions se font
souvent avec des moins-values, ce qui peut, malgré tout, conduire la banque à faire faillite.
Souvent, les mouvements de retrait font suite à des informations concernant la mauvaise
gestion de la banque, de telle sorte que la crise bancaire constitue l’aboutissement accéléré
d’une situation qui aurait conduit la banque à la faillite. Mais il n’en est pas toujours ainsi, de
telle sorte qu’une crise bancaire peut se produire pour un établissement bancaire bénéficiaire
déclenchant ainsi sa mise en faillite.

Il est important de souligner la spécificité de la faillite bancaire qui provient de la


combinaison d’une option de vente sur les dépôts et de l’illiquidité des actifs bancaires.

Ceci peut-être illustré en indiquant quelles sont les formes d’intermédiation financière qui
ne peuvent être en aucun cas sujettes à des crises bancaires.

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1°) Une Société d’Investissement à Capital Variable (SICAV) ou un Fonds Commun de


Placement (FCP) donnant le droit de tirer des chèques jusqu’à un montant défini par le
nombre de titres ou de points détenus.

Le détenteur de ce type de compte n’a pas d’option qu’il puisse exercer. En outre, la faillite
est pratiquement impossible, car tout se passe comme si l’intermédiaire financier était financé
à cent pour cent par ses actionnaires.

2°) La banque détient des actifs liquides ou facilement négociables pour un montant égal au
montant des dépôts

Dans ce cas, le put est couvert par la détention du support correspondant et la crise bancaire
n’a pas lieu de se produire. Par contre la banque peut être en faillite, suite à une baisse de la
valeur de ses créances.

Nous examinerons ci-dessous le caractère spécifique de la crise bancaire ainsi que les
conséquences de la faillite bancaire qui constitue le plus souvent, son issue.

1.2.1. La spécificité de la crise bancaire

Les établissements bancaires ne se trouvant pas dans ces cas d’absence de dépôts ou
d’absence d’actifs illiquides, sont tous susceptibles d’avoir à faire face à un mouvement
collectif de retraits de la part de leurs déposants. Nous examinerons donc comment une crise
bancaire peut se produire et ses conséquences lorsqu’elle conduit à la faillite bancaire, en
étudiant successivement les divergences d’intérêts entre les différents agents concernés.

Dans la plupart des pays, les banques ont un organisme de tutelle qui est chargé de déclarer
la faillite bancaire. Aux Etats-Unis, cet organisme est une « charteringagency ».

1°) L’examen des différentes faillites bancaires fait apparaître ex-post le fait que les agences
de tutelle ont toujours trop tardé avant de déclarer les banques insolvables. Ceci est le résultat
des incitations des agents en présence. Les responsables de l’organisme de tutelle ne
souhaitent pas déclarer la faillite bancaire souvent pour des raisons liées à leur devenir
professionnel. Ils ont donc tendance à attendre et espérer que la banque puisse redresser une
situation difficile.

2°) Les déposants ont une option sur l’entreprise. Il est optimal pour eux d’exercer cette
option à partir du moment où la probabilité de défaillance de leur banque augmente, puisque
les rémunérations sont fixées, et qu’il y a un problème de révélation de la probabilité de
faillite. Si une banque répond à une crise bancaire en promettant une meilleure rémunération
sur les dépôts, l’effet de cette mesure risque d’être une accélération du mouvement, puisque la
banque admet une probabilité de défaillance plus élevée.

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Chacun des déposants-créanciers, non seulement détient une faible créance sur la banque, a
une information partielle sur la banque. Par conséquent son évaluation de la probabilité de
défaillance est fonction du comportement des autres déposants. Il est même incité à se
comporter en « passager clandestin », reportant sur d’autres la charge du contrôle de l’activité
de la banque sachant que les bénéfices d’une gestion prudente seront partagés par tous. La
crise bancaire est le résultat de cet effet du comportement d’un certain nombre d’agents sur
les anticipations des autres, qui fait que tous ont intérêt, à un moment donné, à retirer leurs
dépôts.

3°) Le comportement d’une banque qui fait face à une crise bancaire est de vendre des
actifs. Néanmoins, la vente d’actifs sous la pression des événements ne permet pas, pour des
actifs peu liquides, d’obtenir la valeur du marché. Il y a donc pour chaque actif une valeur de
liquidation qui présente une décote par rapport à la valeur de marché. La stratégie de la
banque sera de céder les actifs dans l’ordre correspondant à cette décote, liquidant d’abord les
actifs les plus facilement négociables.

Ceci indique qu’il y a deux valeurs à prendre en considération pour chacun des actifs
bancaires : la valeur de marché, notée 𝑚 ci-dessous, et la valeur de liquidation immédiate,
notée 1. Soit 𝑑 la valeur des dépôts exigibles de la banque. Alors trois situations sont
envisageables à la suite d’un mouvement de retraits collectifs de la part des déposants :

(1) 𝑑 < 1 < 𝑚 constitue la situation où la banque est liquide et solvable.


(2) 1 < 𝑑 < 𝑚 correspond à une situation d’insolvabilité d’une banque qui a pour origine
un problème d’illiquidité. En l’absence de crise bancaire la banque est ici solvable.
(3) 1 < 𝑚 < 𝑑 correspond à un problème fondamental d’insolvabilité, comparable à
l’insolvabilité d’une entreprise.

Le cas (2) ci-dessus constitue le cas de faillite bancaire que ne rencontre pas une entreprise/
les différentes réglementations sont conçues pour soutenir l’activité des banques se trouvant
dans cette situation ? En effet, une gestion cohérente des actifs bancaires passe par la
détention d’actifs qui ne sont pas cotés sur les marchés des titres (prêts aux particuliers, prêts
aux entreprises, …).

1.2.2. Les causes de la faillite bancaire et les issues possibles

Les risques auxquels fait face une banque sont déterminants du risque de faillite bancaire.
Toutefois, l’analyse des faillites bancaires montre que leur cause principale réside dans la
gestion des actifs bancaires.

Peterson et Scott (1985) ont analysé les données sur les faillites bancaires sur les
années1982-1984, et ont établi que la fraude constituait la cause principale de la faillite
bancaire ; la deuxième cause qu’ils mettent en évidence est la croissance trop rapide, mesurée

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par un accroissement des actifs supérieur à 40 % sur une période des deux ans précédant la
faillite ; la troisième cause est le faible rendement des actifs.

Des études menées au préalable avaient déjà établi le rôle de la fraude en tant que cause de
la faillite bancaire (Benson et al., 1986). Les deux autres causes sont liées au risque. En effet,
la plupart d’établissements ont une spécialisation dans le domaine de compétence qui les
empêche d’être bien diversifiés. De plus, outre ce choix de non-diversification de la part de
l’établissement bancaire, la législation elle-même peut imposer une limite à la diversification.
Il en est ainsi du Reinvestment Act qui imposait aux banques de chaque Etat de réinvestir les
fonds collectés dans cet Etat lui-même. Cette législation a conduit les banques au Texas à
investir uniquement dans trois domaines : le pétrole, l’agriculture et l’immobilier, ce qui a
provoqué un nombre important de faillites.

Cependant, même une banque diversifiée ne peut pas éviter de faire faillite face à un risque
de conjoncture, les faillites des entreprises étant très fortement corrélées. Les périodes de
dépression sont celles qui voient une augmentation des faillites bancaires. Du point de vue de
l’activité économique, les faillites bancaires ne semblent pas affecter l’activité économique,
alors qu’un faible niveau d’activité jouera un rôle déterminant dans l’accroissement des
faillites bancaires (Benson et al., 1986,).

En cas de faillite bancaire la législation prévoit en général le remboursement au moins


partiel des déposants par un organisme qui va reprendre à sa charge à la fois les actifs et les
actifs de la banque. Cet organisme peut être une émanation de la banque centrale ou un
organisme ayant pour mission d’assurer les montants en dépôt en échange d’une prime
préalablement versée par l’établissement bancaire.

L’une des trois procédures suivantes peut alors être mise en œuvre :
- Paiement et liquidation (pay off and liquidation) : cette procédure consiste purement et
simplement en la liquidation des actifs de la banque et dans le paiement des dépôts. La
banque défaillante cesse son activité.
- Achat et reprise (purchase and assumption) : l’organisme chargé de la mise en faillite
cède la banque défaillante à une autre banque. Cette opération correspond à une fusion
mais techniquement il y a achat des actifs et reprise du passif exigible séparément, à des
prix différents de leur valeur comptable, l’organisme assureur prenant à sa charge la
différence entre la valeur comptable des actifs et leur valeur effective, pour les prêts sur
lesquels il y a eu défaut par exemple.
- Achat et reprise partielle (modifiedpayoff) : apparue en 1983, cette forme de résolution
de la faillite bancaire prend la forme de l’achat de l’établissement défaillant par une
autre institution financière qui prend à sa charge uniquement les dépôts assurés. Les
déposants non assurés reçoivent alors un paiement partiel de l’organisme assureur et
une prime de l’institution financière acquéreuse.

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Une faillite bancaire peut constituer un événement sans grandes conséquences si elle est
déclarée suffisamment tôt. Le coût social sera en fait beaucoup plus faible que dans le cas
d’une entreprise. Ceci peut paraître surprenant, mais dans le secteur bancaire les produits et
services sont relativement homogènes, et le changement de banque ne bouleverse pas la vie
d’une entreprise ni celle des ménages concernés. Par contre, les changements qu’occasionne
la fin de relations de fournisseur ou de client pour une entreprise sont autrement nuisibles.

La raison de ce faible coût de la faillite réside dans les caractéristiques des actifs bancaires
qui sont souvent liquides et facilement négociables : hypothèques, obligations, prêts à des
entreprises peuvent être cédés facilement, alors que pour une entreprise les équipements ou un
réseau de clients constitue des actifs dont la valeur en dehors de l'entreprise est pratiquement
nulle.

Par contre, lorsque la faillite est déclarée tardivement, le coût de la faillite pour les
déposants peut être beaucoup plus élevé. Ce retard se produit souvent dans les faits parce que
les mécanismes institutionnels ne sont pas véritablement incitatifs.

Les modalités de liquidation des établissements défaillants seront donc déterminantes du


coût de la faillite. Dans la procédure de paiement et liquidation le coût est élevé puisqu’il
comprend le coût pour l’organisme assureur de payer chacun des déposants, et le coût à la fois
pour les déposants, et pour les emprunteurs d’établir des relations avec d’autres banques.
Dans la procédure d’achat et reprise, comme dans celle d’achat et reprise partielle, le coût est
beaucoup plus faible, puisque :
- l’organisme assureur évite le coût de gestion du paiement à chacun des déposants,
- le prix d’achat de l’ensemble des actifs bancaires est supérieur à la somme des prix de
liquidation,
- la continuité des relations banque-clients est préservée,
- les pertes de la banque défaillante peuvent parfois être déductibles des impôts de
l’établissement acquéreur.

2. La modélisation des crises bancaires

Les contributions originales de Diamond et Dybvig (1983) ainsi que celle de Postlewaite et
Vives (1987) ont permis de clarifier le débat théorique sur la réglementation bancaire en
proposant une modélisation simple des crises bancaires. Celles-ci montrent que l’absence
d’un mécanisme d’assurance de dépôt peut donner naissance à des paniques bancaires au
niveau du système bancaire (Keffi et Maraghni, 2011).

Afin de modéliser les problèmes de liquidité, nous considérons un monde dans lequel il y a un
seul bien et deux types de consommateurs, ceux vivant une période (type 1) et ceux vivant
deux périodes (type 2).

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À la période 0 les consommateurs-déposants ne connaissent pas leur type. Par conséquent,


leur fonction d’utilité dépend de l’état de la nature 𝑗 qui se réalise et qui détermine le type du
déposant.

𝑈 𝐶1 𝑠𝑖 𝑗 = 1 (𝑡𝑦𝑝𝑒 1)
𝑈 𝐶1 , 𝐶2 , 𝑗 =
𝑈 𝐶1 + 𝐶2 𝑠𝑖 𝑗 = 2 (𝑡𝑦𝑝𝑒 2)

Cette spécification de la fonction d’utilité implique que le consommateur 2 est indifférent


entre tous les paniers de biens dont la somme des composantes temporelles est constante.

Nous supposerons qu’il existe un continuum de consommateurs, qu’une fraction 𝑡 de ceux-ci


est de type 1 et que la fonction restante 1 − 𝑡 est de type 2.

La banque joue dans ce modèle un rôle proche de la production. Elle dispose de deux
technologies, une à court terme (une période) et l’autre à long terme (deux périodes) qui
peuvent être schématisées comme suit :

𝑇=0 𝑇=1 𝑇=2

0 𝑅 𝑙𝑜𝑛𝑔 𝑡𝑒𝑟𝑚𝑒
−1
1 0 𝑐𝑜𝑢𝑟𝑡 𝑡𝑒𝑟𝑚𝑒
avec 𝑅 > 1.

Par conséquent la banque permet aux agents d’obtenir plus que ce qu’ils obtiendraient
simplement en stockant le bien de consommation.

En supposant que tous les agents ont les mêmes dotations initiales, nous pouvons calculer les
𝑗
caractéristiques de l’optimum de Pareto en supposant des consommations contingentes, 𝐶𝑇 ,
où 𝑗 est le type et 𝑇 la date. Il est clair, tout d’abord, que la banque va investir une quantité
1−𝑡 𝐶22
𝑡 𝐶11 dans la technologie à court terme et une quantité dans la technologie à long terme,
𝑅
et que 𝐶21 = 0, faute de quoi les consommations de type 2 pourraient obtenir un niveau
d’utilité plus élevé sans diminuer celui des consommateurs de type 1.

Enfin, comme le consommateur ne connaît pas son type ex-ante il est possible pour les
consommateurs de type 2 d’assurer les consommateurs de type 1, comme cela est classique
dans un équilibre avec biens contingents. Les consommations, qui à l’optimum satisfont
l’égalité entre les taux marginaux de substitution, vérifient :

𝑈 , (𝐶1∗ 1 )
=𝑅 [1]
𝑈 , (𝐶2∗ 2 )

𝐶2∗2
et la contrainte de ressources𝑡 𝐶1∗1 + 1 − 𝑡 =1 [2]
𝑅
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Comme 𝑅 > 1,nous obtenons𝑈 ′ 𝐶2∗2 < 𝑈 ′ (𝐶1∗1 ) et la décroissance de 𝑈 ′ implique 𝐶2∗2 >
𝐶1∗1 . Si, de plus, l’aversion relative au risque est supérieure à 1 on peut montrer (cf. Diamond
& Dybvig, 1983, p. 407, note 3) qu’à l’optimum 𝐶2∗2 < 𝑅et 𝐶1∗1 > 1.

Le contrat entre la banque et un consommateur est passé à la période 0. Il ne peut pas


dépendre du type du consommateur puisque cette caractéristique n’est pas observable par la
banque. Par contre, celle-ci peut offrir le contrat suivant :

(−1, 𝐶1∗1 , 𝐶2∗2 )

Où 𝐶1∗1 et 𝐶2∗2 sont les consommations qui satisfont [1] et [2].

En effet, avec ce contrat les agents de type 1 ont intérêt à choisir𝐶1∗1 et les agents de type 2 ont
intérêt à attendre pour consommer 𝐶2∗2 . Néanmoins, si tous les déposants décidaient de retirer
la somme 𝐶11 à la période 1 la banque se trouverait en situation d’illiquidité. Cette situation
peut se produire en cas d’asymétrie d’information entre les agents. En effet, si les agents de
type 2 ne distinguent pas les types à l’origine des retraits qu’ils observent, leur intérêt dans ce
cas peut consister à retirer leurs dépôts s’ils croient que parmi ces retraits se trouvent des
agents de type 2 mieux informés qu’eux sur la politique d’investissement de la banque (Chari
et Jagannathan, 1988).

Plus précisément, considérons des contrats de dépôts dans lesquels :


- la rémunération 𝑇 = 1en est de 𝑟1 par unité déposée,
- les déposants n’ayant pas retiré leurs fonds en 𝑇 = 1possèdent une fraction des actifs de
la banque correspondante à leurs dépôts,
- les déposants souhaitant effectuer leurs retraits sont servis séquentiellement jusqu’à ce
que la banque n’ait plus d’actifs.

Si 𝑓𝑗 est la fraction des déposants effectuant des retraits à la période 1 qui sont servis avant le
consommateur 𝑗, celui-ci obtient à la période 1 :

𝑟1 𝑠𝑖 𝑓𝑗 < 𝑟1− 1
𝑉1 𝑓𝑗 , 𝑟1 =
0 𝑠𝑖 𝑓𝑗 ≥ 𝑟1− 1

En supposant (comme le font Diamond &Dybvig, 1983) que le choix entre les deux
technologies est fait à la période 1, ou encore que l’arrêt à la période 1 de la deuxième
technologie permet d’obtenir 1 unité par unité déposée.

Si 𝑓 est le total des demandes de retrait à la période 1, min(𝑓𝑟1 , 1) est le total des retraits à
cette période et les 1 − 𝑓 déposants restant à la période 2 obtiennent :

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Revue Économie, Gestion et Société N°23 février 2020

1 − 𝑓 𝑟1 𝑅
𝑉2 = 𝑀𝑎𝑥 ( , 0)
1−𝑓
Afin de mieux comprendre le comportement stratégique des agents de type 2, supposons qu’il
y a deux groupes d’agents dont les comportements sont homogènes. Les agents 𝑓 jouent
systématiquement la stratégie « retrait à la date 1 » que nous noterons 𝑎1 . Les agents 1 − 𝑓
jouent la stratégie qui est la plus avantageuse pour eux. Nous pouvons décrire dans ce cas la
matrice des gains de chaque type d’agent comme suit, les agents de type 𝑓 (respectivement
1 − 𝑓) représentant une proportion 𝑓 (respectivement 1 − 𝑓) de l’ensemble des déposants :

1 −𝑓 𝑟1 𝑅
Si 𝑟1 > , les agents de type (1 − 𝑓) ont intérêt à effectuer un retrait à la date 1.
1−𝑓
Mais cette condition s’écrit encore [3] :

𝑅 − 𝑟1
𝑓 >
𝑟1 (𝑅 − 1)

De telle sorte que si elle est réalisée, les agents de type 𝑓 jouent leur stratégie 𝑎1 et une crise
bancaire se développe. Le niveau de retraits d’équilibre à la période 1 est 𝑓 = 1 qui satisfait
bien [3], puisque𝑟1 > 1. De façon symétrique si l’inégalité inverse de [3] est réalisée, les
agents 1 − 𝑓 préfèrent attendre la date 2 pour effectuer leurs retraits. Ainsi 𝑓 = 𝑡 est le
second type d’équilibre, qui satisfait l’inverse de [3].

Par conséquent, deux équilibres de Nash coexistent, un équilibre efficient et un équilibre de


crise bancaire. La banque offre des services de liquidité mais est vulnérable aux crises
bancaires.

Si par contre 𝑟1 ≤ 1, l’équilibre de cette crise bancaire est écarté mais l’équilibre efficient ne
peut plus être obtenu. La banque n’offre pas de services de liquidité autres que ceux à la
disposition des consommateurs ; en revanche elle offre un placement sur deux périodes au
taux 𝑅 − 1. On obtient donc avec 𝑟1 = 1 une allocation dont la production est efficiente mais
qui ne permet pas aux consommateurs de s’assurer contre le risque.

Il est facile de démontrer que, dans ce cadre, la suspension de convertibilité ou l’assurance sur
les dépôts suffit à exclure les paniques bancaires et à obtenir l’allocation efficiente en
posant𝑟1 = 𝐶1∗1 .

En revanche, lorsque le modèle est généralisé au cas des retraits aléatoires, 𝑡 étant alors une
variable aléatoire, la suspension de convertibilité ne permet plus d’atteindre un partage du
risque optimal alors que l’assurance (et la taxation correspondante des consommateurs) le
permet (Diamond et Dybvig, 1983).

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Le modèle ci-dessus explique les crises bancaires uniquement par la réalisation d’un équilibre
de Nash dans un modèle où deux équilibres coexistent. Ceci pose un problème classique de
choix d’une solution, qui devrait reposer sur l’observation de signaux exogènes, tels que les
tâches solaires (sunspotequilibrium). En fait, il est intéressant d’examiner une version
légèrement différente du même modèle dans lequel il y a un équilibre de Nash unique et une
crise bancaire se produit avec une probabilité non nulle.

Postlewaite et Vives (1987) proposent, en effet un modèle à deux agents et trois périodes dans
lequel la technologie de la banque ne peut être interrompue à la période 1 qu’en faisant une
perte 1− 𝑟1 .

Nous pouvons représenter la technologie par la suite de facteurs d’intérêt 𝑟1 , 𝑟2 et 𝑟3 où


𝑟1 < 1. Une unité de bien investie sur les trois périodes rapportera 𝑟1 𝑟2 𝑟3 , 𝑟1 𝑟2 sur deux
périodes et 𝑟1 sur une période. Les contrats bancaires considérés doivent permettre aux agents
d’obtenir au moins leur dépôt initial, même s’ils n’obtiennent pas d’intérêts. La matrice de
gains est alors la suivante :
agent 2
agent 1 𝑎1 𝑎2 𝑎3
𝑎1 (𝑟1 , 𝑟2 ) (1, (2𝑟1 − 1)𝑟2 ) (1, (2𝑟1 − 1)𝑟2 𝑟3 )

𝑎2 ((2𝑟1 − 1)𝑟2 , 1) (𝑟1 𝑟2 , 𝑟1 𝑟2 ) (1, (2𝑟1 𝑟2 − 1)𝑟3 )

𝑎3 ((2𝑟1 − 1)𝑟2 𝑟3 , 1) ((2𝑟1 𝑟2 − 1)𝑟3 , 1) (𝑟1 𝑟2 𝑟3 , 𝑟1 𝑟2 𝑟3 )

En effet, les actifs bancaires à la période 𝑡 sont :

𝐴𝑡 = 2𝑟𝑡
𝑇=1

S’il y a retrait simultané chaque agent obtient 𝐴𝑡 /2; si par contre un agent effectue un retrait à
la date 𝑡, 𝑡 ≤ 2, l’autre obtient à la date 𝑡 + 1 la somme (𝐴𝑡 − 1)𝑟𝑡+1 .

Considérons la sous-matrice correspondant aux deux premières stratégies, 𝑎1 et 𝑎2 en nous


restreignant à des agents qui vivent deux périodes.

Si 𝑟1 > (2𝑟1 − 1)𝑟2 et 1 > 𝑟1 𝑟2 cette matrice décrit un jeu du type « dilemme du
prisonnier ». En effet, la stratégie 𝑎1 de chacun des agents domine sa stratégie𝑎2 . Dans cette
situation chaque agent a intérêt à effectuer un retrait à la période 1. Il y a crise bancaire, et
celle-ci conduit à une allocation inefficience des ressources, puisque chacun des deux agents
auraient pu obtenir des consommations plus élevées (𝑟2 > 1)en attendant la période 2.

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En considérant maintenant la matrice des gains pour des agents vivant 3 périodes, la situation
précédente ne se produit plus pour une valeur de 𝑟3 suffisamment élevée. Un équilibre
bayésien unique se réalisera alors, correspondant à la situation suivante :

- chaque agent conjecture que l’autre joue 𝑎1 s’il est de type 1 ou 2 et 𝑎3 s’il est de type
3.
- Les stratégies optimales associées à ces croyances sont alors effectivement 𝑎1 pour un
agent de type 1 et 𝑎3 pour un agent de type 3, ce qui corrobore les conjectures.

Par conséquent, dans le modèle de Postlewaite et Vives, les crises bancaires se produiront
avec une probabilité égale à la probabilité qu’aucun des deux agents ne soit de type 3.

Dans le modèle de Diamond et Dybvig, les crises bancaires étaient le résultat des anticipations
autoréalisées des agents. Elles peuvent être qualifiées de crises bancaires spéculatives. En
revanche, les crises bancaires constituent dans le modèle de Postlewaite et Vives le seul
équilibre pour des agents de type 1 et 2. Il s’agit donc de crises bancaires fondamentales.

De nombreux travaux ultérieurs ont cherché à enrichir, voire critiquer, à la suite de


Postlewaite et Vives, le modèle originel de Diamond et Dybvig sans véritablement parvenir à
le remettre en cause.

Pour Freixas (1999), la contagion à l’origine des crises bancaires modélisée par Diamond et
Dybvig, contagion purement spéculative, doit être distinguée d’une autre forme de contagion,
la similitude des actifs, qui renvoie au fait que les banques investissent dans des actifs dont les
rendements sont corrélés. Ainsi, lorsqu’une banque fait faillite, les déposants des banques qui
ont investi dans des actifs identiques sont rationnellement conduits à retirer leurs dépôts le
plus vite possible. Dans le premier cas, la contagion conduit à la liquidation de banques
solvables, alors que dans le second cas elle conduit à la liquidation de banques insolvables
(Marini 2005, p. 13).

L’extension par Engineer (1999) du modèle de Diamond et Dybvig à trois périodes et à trois
types d’agents n’a pas remis en cause, mais a plutôt conforter, les résultats de Diamond et
Dybvig en faveur d’un système d’assurance des dépôts. Tout comme la critique portant sur la
fonction d’utilité (Wallace, 1988 ; Jacklin et Bhattacharya, 1988 ; Huo et Yu, 1994) n’a pas
conduit à des changements de résultats (Madiès, 2006). Enfin, l’introduction de la monnaie
comme intermédiaire des échanges dans le modèle de Diamond et Dybvig (Selgin, 1993), n’a
eu pour seul mérite que de réhabiliter la suspension de la convertibilité des dépôts (Madiès,
2006, p. 73).

3. Réglementation et risque de crise systémique

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La crise bancaire a pour origine une réévaluation de la probabilité de défaillance de la


banque qui rend optimal l’exercice du put associé aux dépôts à vue. La question qui se pose
alors est celle de la contagion de ce type de mouvement. Ce mouvement ne risque-t-il pas de
s’étendre aux autres établissements bancaires, et, si c’est le cas, quels vont être les effets de ce
mouvement ? Du point de vue des anticipations des agents, il semble assez clair que toute
crise bancaire est un signe de faiblesse du système bancaire dans son ensemble. Aussi la crise
bancaire d’un établissement accroît la probabilité de crises pour les autres établissements via
les échanges/crédits interbancaires, générant ainsi un effet externe. Pour évaluer l’importance
de cet effet externe et le risque de faillite de l’ensemble du système bancaire, que nous
appellerons risque systémique, il est nécessaire de distinguer les différents types de crise
bancaire en fonction des actifs qui seront détenus à la place des dépôts. Il est possible de
détenir des dépôts dans une autre banque, des titres ou des espèces.

Dans le premier cas, il n’y a pas de risque systémique puisque le montant des dépôts auprès
du système bancaire reste inchangé.

Dans le deuxième cas, les déposants choisissent de détenir des titres, auquel cas les dépôts,
sont transférés aux vendeurs des titres (SICAV, FCP, …) dont la demande d’espèces est
généralement faible. Ainsi, ce transfert crée un nouveau dépôt, mais l’équilibre ne peut se
rétablir que s’il y a une baisse des taux sur les titres et une hausse des taux sur les dépôts. Les
banques réduiront alors leur offre de crédit et le revenu d’intermédiation financière diminuera.

La crise du système bancaire ne peut, en fait, avoir lieu que si les déposants échangent leurs
dépôts contre des espèces. Pour répondre à la demande d’espèces les banques doivent liquider
leurs actifs, ce qui les place dans une situation d’illiquidité. La crise de 1930-1933 aux Etats-
Unis, au cours de laquelle quelque 9000 établissements bancaires ont fait faillite constitue une
illustration de ce phénomène. Les déposants ont placé leurs avoirs soit en espèces soit dans
des comptes garantis par l’Etat (Postal savingaccounts) créant une situation d’illiquidité
bancaire généralisée.

Si le coût de défaillance d’une banque peut être limité et plus faible que le coût de
défaillance d’une entreprise, le coût d’une crise systémique est extrêmement élevé. Aussi, les
autorités de tutelle entendent-elles limiter le risque de ce type de crise, et l’étude de la
réglementation à ce niveau passe par une compréhension des incitations qui apparaissent lors
d’une panique bancaire.

Supposons que l’unité de temps soit le temps nécessaire à un déposant pour exercer son
option de retrait à vue. À la période 0, un certain nombre de déposants informés décident de
retirer leurs avoirs. Cela a pour effet :
- de modifier les anticipations des autres agents ;
- de diminuer la valeur des actifs bancaires de l’écart entre la valeur de marché et la
valeur de liquidation immédiate.

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Considérons le point de vue d’un déposant qui doit choisir entre exercer son put ou attendre.
À chaque période 𝑡 la valeur des actifs en contrepartie de ses dépôts diminue. Il y a donc
intérêt pour lui à retirer immédiatement la totalité de ses avoirs auprès de la banque en
difficulté.

L’objectif d’une réglementation bancaire est, comme nous l’avons vu, de modifier ce
système incitatif.

Théoriquement, il est possible d’atteindre cet objectif :


- au moyen de restrictions sur le droit des déposants à exercer leurs puts ;
- au moyen de restrictions portant sur la structure de l’actif et du passif bancaire ;
- en passant un contrat avec une ou plusieurs institutions qui apportent une garantie de
liquidité ;
- en imposant une plus grande discipline aux établissements bancaires ayant des risques
élevés de faillite.

La suspension de la convertibilité des dépôts (c’est-à-dire la fermeture des guichets)


constitue un exemple du premier type de restriction. Elle consiste à dégager un établissement
bancaire de sa responsabilité contractuelle en l’autorisant à ne pas racheter les dépôts (à leur
valeur) sur demande des déposants. Il est possible également d’imposer une pénalité aux
déposants qui effectuent des retraits, ce qui peut prendre des formes diverses. Baltensperger et
Dermine (1987), proposent qu’en cas de crise tous les déposants soient traités ex-post de la
même façon quelle que soit leur position dans la file d’attente. Il n’y a plus alors d’intérêt
pour les déposants à exercer leur put immédiatement, ce qui limite l’incitation à effectuer des
retraits en cas de crise bancaire.

L’existence de réserves obligatoires tout comme l’imposition d’un seuil minimal pour les
fonds propres (prescriptions du comité de Bâle) constitue des règles de gestion prudentielles
qui relèvent du deuxième type de restriction ci-dessus. Elles sont aussi la contrepartie d’une
garantie de liquidité de la part du prêteur en dernier ressort.

Mais, trois instruments ou mécanismes, éventuellement complémentaires, sont souvent


brandis par les autorités de régulation pour limiter ou prévenir les crises bancaires : le système
d’assurance des dépôts, la fonction du prêteur en dernier ressort et la supervision.

3.1. Les systèmes d’assurance de dépôts et le problème d’aléa moral

Si la défaillance bancaire est assimilée à un accident, il est naturel de considérer un système


d’assurance qui intervient dans ce cas. Mais cette comparaison a ses limites puisque la banque
influence sa propre probabilité de défaillance : se pose alors un problème de risque moral, la
banque assurée se trouvant incitée à prendre trop de risques. Pour jouer pleinement son rôle et

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éviter de confondre insolvabilité et problème de liquidité, le système de garantie des dépôts


doit s’accompagner d’un contrôle prudentiel efficace, c’est-à-dire des normes de fonds
propres. Qu’elle soit à prime nulle ou proportionnelle, la garantie des dépôts justifie la
nécessité d’un contrôle des risques liés aux activités bancaires et la mise en place des
coefficients de fonds propres, de liquidité ou de diversification des crédits (Kareken et
Wallace, 1978). Lorsque le niveau de risque des banques est inobservable, le régulateur doit
parvenir à définir le niveau de fonds propres adéquat. Pour ce faire, il peut mettre en place une
procédure de révélation (modèle principal-agent) afin d’inciter les banques à révéler leur
niveau de risque (Bonnet, 1998). Des fonds propres plus importants devraient réduire les
incitations, pour les actionnaires, à prendre des risques excessifs (Pessarossi et Weill, 2015).

Un moyen de limiter le problème de risque moral est de faire que l’assurance, qui peut être
explicite ou implicite (du fait de la propriété publique des institutions financières comme en
Chine), soit réduite aux dépôts, voire aux dépôts dont le montant est inférieur à une certaine
limite. Aux Etats-Unis, l’assurance des dépôts garantit un remboursement à hauteur de
250.000 dollars aux déposants, et le système de garantie des dépôts est doublé d’un guichet
d’escompte de la Réserve fédérale pour assurer la liquidité des banques. En France, l’adhésion
au Fonds de Garantie des Dépôts créé par la loi du 25 juin 1999 relative à l’épargne et à la
sécurité financière est obligatoire pour tous les établissements de crédit, et un plafond
individuel d’indemnisation des déposants est fixé à 100 000 euros).

De plus, puisque l’assurance est un moyen de limiter les crises bancaires et d’assurer la
stabilité financière, il est naturel qu’elle porte uniquement sur les dépôts à vue, les dépôts à
terme étant un passif comme les autres.

Cette assurance doit être obligatoire, faute de quoi, les déposants auraient intérêt
individuellement à ne pas l’acheter ou à retarder cet achat dès lors que les autres déposants
sont déjà assurés (problème dit de « free riding »).

Le problème de savoir qui paye l’assurance obligatoire est secondaire : que ce soit le
déposant ou la banque, la rémunération des dépôts et des services bancaires sera ajustée en
conséquence. L’assurance-dépôts pourrait même être financée par la fiscalité. Parce que le
niveau optimal de garantie des dépôts varie inversement avec la qualité du système bancaire,
lorsque la solidité du système bancaire est incertaine, les gouvernements devraient envisager
de soutenir les systèmes d’assurance-dépôts et de procéder à des recapitalisations
subventionnées des banques en difficulté (Morrison et White, 2011).

Le choix entre un organisme d’assurance privé ou public est délicat. Un système


d’assurance privé peut permettre une meilleure allocation du risque puisque les banques et
certains déposants peuvent alors détenir des actions des sociétés d’assurance, et ce faisant,
atteindre leur niveau de risque optimal. Une assurance privée présenterait également
l’avantage d’inciter les banques, par la concurrence, à correctement évaluer les risques et donc

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à déterminer convenablement la prime d’assurance (Morel, p. 241). Certains états américains


ont eu recours à des organismes d’assurance privés, avec des succès mitigés (Mishkin, 1992).

Il y a toutefois deux difficultés dans la mise en place d’une assurance privée.

En effet, tout d’abord, la décision de fermeture d’une banque ne serait plus à la discrétion de
la Banque centrale ou de l’autorité de régulation mais de la compagnie d’assurances qui serait
plutôt incitée à limiter ses risques en déclarant la faillite trop rapidement.

Ensuite, une seconde difficulté apparaît du fait que la co-assurance n’élimine pas le risque
systémique (problème de surface financière, et donc de crédibilité), et que par conséquent la
garantie du prêteur de dernier ressort doit toujours intervenir. L’évaluation d’un prix pour le
soutien de la banque centrale est alors extrêmement délicat, puisque la probabilité de risque
systémique alors même que chaque déposant est assuré est très proche de zéro.

En l’absence d’assurance, il n’est pas exclu que le prêteur de dernier ressort intervienne
pour dédommager les déposants. Ce mode de fonctionnement, lorsqu’il est systématique, fait
de l’assurance sur les dépôts un bien public financé par l’Etat4.

Le prix de l’assurance peut être déterminé à partir d’un modèle d’évaluation d’options
(Merton, 1977). En effet, la banque a une valeur des dépôts 𝐵 , comprenant éventuellement les
intérêts.

Soit 𝑉 la valeur des actifs de la banque supposé suivre un processus stochastique.

1) Si 𝑉 > 𝐵 , alors les actionnaires ont la différence 𝐵 − 𝑉


2) Si 𝑉 < 𝐵 , l’assurance intervient pour couvrir la différence.

Le paiement effectué par l’assureur est donc : 𝑀𝑎𝑥 (0, 𝐵 − 𝑉 )

Mais ceci est la valeur d’un put qui est vendu par l’assureur. La formule de Black et Scholes
permet de déterminer la valeur de la prime d’assurance. Cette formule établit que le prix de
l’assurance doit être lié au niveau des fonds propres de la banque. Une banque avec des fonds
propres plus importants devrait payer une prime d’assurance plus faible. En fait, dans la
pratique ce n’est pas le cas.

Une critique intéressante de cette façon d’évaluer la prime d’assurance en utilisant la


formule de Black et Scholes est celle de Buser, Chen et Kane (1981) qui estiment que

4
Généralement ces interventions sont discrétionnaires. Elles ont été pendant longtemps la seule forme d’assurance en
Europe. Aujourd’hui l’Allemagne, la France, l’Italie et les Pays-Bas ont une assurance propre à l’ensemble du secteur
bancaire, la Belgique et le Royaume-Uni ayant une assurance Etatique (Cf. Baltensperger et Dermine (1987)).
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l’assurance peut être sous-évaluée pour compenser le coût de la règlementation bancaire


(Cross Subsidy).

3.2. Le prêteur de dernier ressort

La justification du rôle du prêteur de dernier ressort repose sur l’impossibilité d’un système
d’assurance et co-assurance de garantir un paiement fixé en cas de crise systémique. Par
conséquent, une interprétation restrictive de ce rôle conduirait à réserver l’intervention du
prêteur de dernier ressort au cas de risque systémique.

En fait, non seulement le prêteur de dernier ressort est souvent chargé de la mise en œuvre
de la politique monétaire, mais, de plus, il fournit des liquidités à des banques qui font face à
des difficultés. En effet, ce faisant, il évite à celles-ci d’avoir à liquider des actifs à des prix en
dessous de leur valeur de marché.Mais cela pose plusieurs types de problèmes :

- tout d’abord, le soutien du prêteur de dernier ressort doit être réservé aux banques
illiquides mais solvables, faute de quoi il n’y a plus de sanction des banques insolvables
et les établissements bancaires sont encouragés à prendre plus de risques. Or, la
détermination de la solvabilité d’un établissement n'est pas dans les attributions du
prêteur de dernier ressort. Par conséquent, le prêteur de dernier ressort fournira des
liquidités uniquement contre des garanties qui constitueront autant de nantissements des
actifs de la banque en difficulté, et à des taux d’autant plus élevés que le risque de
défaillance est important, afin de dissuader les banques d’avoir trop souvent recours à
ses liquidités.

- Ensuite, en cas de faillite ultérieure de la banque, les prêts apportés par le prêteur de
dernier ressort, consentis parfois à des taux élevés, peuvent engendrer un accroissement
des pertes futures de la banque et augmenter de ce fait les paiements que l’assureur
devra effectuer lors de la liquidation ou cession de la banque. Ainsi, une situation
potentiellement conflictuelle existe entre assureur et prêteur de dernier ressort, le
premier ayant intérêt à une mise en liquidation plus rapide, le second soutenant encore
la banque en difficulté.

Malgré cela, le soutien du prêteur de dernier ressort en l’absence de crise systémique se


justifie comme un mode de prévention de celle-ci. En effet, en soutenant chaque établissement
bancaire en difficulté le prêteur de dernier ressort rend crédible sa garantie de liquidité en cas
de crise systémique dont l’ampleur mettrait en doute la capacité du système d’assurance à
rembourser les montants en dépôt.

3.3. La supervision

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Prévoir une crise du système bancaire est crucial car sa résolution est coûteuse. Selon le
Fonds monétaire international, en 2010, les coûts de sauvetage du système bancaire américain
se sont élevés jusqu’à 40 % du PIB national (Jedidi et Pentecôte, 2015, p. 190).La supervision
apparaît comme un moyen de recueil des informations nécessaires susceptibles de constituer
des signes avant-coureurs d’une crise. Elle concerne toutes les banques, quelque soit leur
taille et leur pouvoir de marché, et étend son champ d’action aux fonds de pension et aux
compagnies d’assurance. Dans les unions monétaires, le fait d’avoir une seule autorité de
surveillance chargée de veiller aux effets de contagion entre pays membres est de nature à
stabiliser le système bancaire (Loipersberger, 2018).

Ainsi, les établissements bancaires fournissent régulièrement des rapports sur leurs activités,
ce qui permet aux organismes de contrôle de vérifier s’ils ont satisfait aux règlementations en
vigueur. De surcroît, des enquêtes sur le terrain sont menées afin de permettre aux institutions
concernées d’avoir une information aussi précise que possible. L’objet de cette supervision est
de limiter les possibilités de fraude ainsi que la prise de risques excessive dans l’activité
bancaire et de la sanctionner éventuellement.

Aux Etats-Unis il existe pour chaque établissement bancaire une évaluation dans les cinq
catégories suivantes : Capital, Actifs, Management, Profits et Liquidités. Pour chacun de ces
postes un rating allant de 1 à 5 est établi.

Il est cependant évident qu’un traitement correct de l’information statistique disponible


permet d’obtenir de bons résultats, et se substitue donc en partie aux enquêtes sur le terrain.
En particulier, l’analyse discriminante permet de réaliser de bonnes prédictions de faillite. Sur
la base des données portant sur des ratios comptables recueillis entre 1970 et 1975, Sinkey et
Pettway (1980) ont pu prédire 15 des 16 faillites qui se sont produites en 1976 avec un an
d’anticipation et 14 d’entre elles deux ans à l’avance. De la même façon, l’utilisation de la
valeur de marché des banques permettrait d’obtenir d’assez bonnes prévisions, quoique moins
fiables. Les très bons résultats obtenus dans ces analyses statistiques sont quelque peu
surprenants, puisque la première cause de faillite étant la fraude, cela indique que celle-ci
serait, du moins en partie, statistiquement prévisible.

En Chine, le superviseur peut, en cas de non-respect de la réglementation, restreindre la


croissance des actifs de la banque, la contraindre à réduire sa proportion d’actifs risqués,
l’achat d’actifs fixes, limiter le paiement de dividendes aux actionnaires ainsi que l’ouverture
de nouvelles agences, refuser le démarrage de nouvelles activités bancaires.

Conclusion

L’objectif de cet article était de revisiter les fondements théoriques de la réglementation


bancaire et de les remettre en perspective. Malgré les avancées obtenues au cours du temps, la
répétition des crises mettent en relief les carences des réglementations prudentielles comme

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des dispositifs de surveillance des risques liés à l’activité bancaire (Jedidi et Pentecôte, 2015).
L’objectif de la réglementation prudentielle est essentiellement d’assurer la stabilité financière
du système des paiements en sa totalité et la protection des déposants en particulier (Keffi et
Maraghni, 2011). Mais, la réglementation bancaire est coûteuse, que ce soit directement (avec
les coûts de fonctionnement de l’autorité de régulation) ou indirectement au travers des
distorsions de comportement qu’elle peut provoquer (Morel, 2000, p. 239) dans un
environnement très concurrentiel..

Dans l’Union européenne, la régulation à l’échelle nationale a été abandonnée au profit d’un
superviseur supranational au sein de la Banque centrale européenne (BCE). Mais, cette Union
bancaire ne dispose pas encore en son sein d’une structure commune dédiée à la résolution
des crises bancaires, ni d’un fonds commun de garantie des dépôts pour soutenir son système
financier (Camdessus, 2014).

Même si elles ne trouvent pas leur source dans le secteur bancaire, les crises des pays dits
émergents (mexicaine de décembre 1994/janvier 1995, Thaïlandaise de juillet 1997, Coréenne
et Indonésienne de la fin 1997) ont ouvert la voie à la création dans ces pays de mécanismes
de garantie des dépôts assurée par l’Etat. Par la suite, les mécanismes de contrôle et de
régulation ont été progressivement ajustés aux meilleures pratiques internationales définies
par le Comité de Bâle (Camdessus, 2014). En Chine, depuis 2004, la réglementation
prudentielle a continuellement évolué pour s’arrimer aux standards internationaux, le
régulateur chinois a publié en juin 2012, les règles de mise en place des accords de Bâle III
(Pessarossi et Weill, 2015).
S’agissant des pays de la zone Franc, les études portant sur la réglementation bancaire dans
cette zone sont, à notre connaissance, peu nombreuses. Dans la zone UEMOA où le secteur
bancaire est fortement oligopolistique, la régulation microprudentielle en vigueur jusqu’en
1999, a cédé le pas depuis le 1er janvier 2000, aux prescriptions de Bâle I, la norme
internationale des fonds propres destinée à renforcer la solvabilité et la stabilité du système
bancaire, lequel canalise l’essentiel du financement des économies. Même si le respect de
certaines normes prudentielles reste faible et ne sont toujours pas conformes aux dispositions
internationales, la réglementation bancaire dans l’UEMOA tend néanmoins à se renforcer.
Elle repose désormais sur un certain nombre de dispositifs qui ont pour principaux objectifs
d’inciter les banques à revenir à leurs fondamentaux, de restaurer l’effet disciplinant de la
gouvernance et de limiter le risque systémique (Lobez, 2010). Depuis le 1er janvier 2018, afin
de promouvoir un système bancaire robuste, présentant un profil de risques bancaires
maîtrisés, les autorités monétaires de l’UEMOA ont mis en place un nouveau dispositif plus
proche des exigences de Bâle II et III. L’architecture de ce nouveau dispositif repose sur trois
piliers complémentaires, à savoir : (i) les exigences minimales de fonds propres en fonction
des risques (de crédit, opérationnel, de marché), (ii) les principes de la surveillance
prudentielle et le cadre d’intervention y afférent et (iii) les principes directeurs régissant la
discipline de marché qui vise à renforcer la transparence et la communication des
établissements vis-à-vis du public quant à leur exposition au risque (Gammadigbé, 2018).

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Dans la zone CEMAC en revanche, la réglementation bancaire repose sur deux piliers : les
exigences minimales de fonds propres et le Fonds de garantie des dépôts en Afrique Centrale
(FOGADAC) qui s’applique obligatoirement à tous les établissements de crédit implantés
dans le ou les territoires d’un ou plusieurs Etats de la CEMAC.

Cet article dont l’objectif était de revisiter les justifications théoriques de la réglementation
bancaire appelle à des développements spécifiques, à des approfondissements, sur les impacts
de l’application des normes prudentielles internationales (accords de Bâle) sur la rentabilité et
la stabilité des systèmes bancaires. A ce titre, des études méritent d’être menées, notamment
dans les pays où le financement bancaire est dominant comme ceux de la zone Franc, pour
circonscrire les effets de ces nouvelles contraintes sur la distribution de crédit et, par suite, sur
l’évolution de la production et des échanges (Cassou, 2016). Les systèmes bancaires dans
cette zone sont pris en étau entre le respect des obligations réglementaires et la préservation
de la stabilité financière, la recherche de la rentabilité et de la taille optimale et l’impératif de
financement du développement dans un contexte marqué par la rareté des ressources
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