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Saleh ANAS et Moussa DIOP. Microfinance et développement de l’entreprenariat au Sénégal : une étude empirique
sur les trois grandes IMF les plus représentatives
Résumé :
L’objectif principal de cette étude est d’évaluer l’impact de la microfinance sur le développement de
l’entrepreneuriat au Sénégal. Pour vérifier l'existence de ce fait, nous avons administré un questionnaire à 111
clients de trois institutions de microfinance du Sénégal (CMS, PAMECAS, ACEP). Une méthode de la régression
logistique et la régression logit ordonné ont été utilisées pour mesurer respectivement la création d’entreprise par
les IMF et la création de valeur par la clientèle entrepreneuriale. Les résultats montrent, en premier lieu, que seules
les variables caractérisant la pérennisation des institutions de microfinance influencent positivement
l’entrepreneuriat (création d’entreprises) à travers la disponibilité des fonds, la minimisation des coûts d’agence et
des coûts de transaction. En second lieu, le développement de l’entrepreneuriat par la création de valeur est
influencé à la fois par des variables de massification du crédit (la vulgarisation du microcrédit positivement,
accompagnement des micro-entrepreneurs négativement) et de pérennisation des institutions (fonds disponibles
négativement et minimisation des coûts d'agence et coûts de transaction positivement). Ces résultats mitigés
montrent que la microfinance impacte peu le développement de l’entrepreneuriat au Sénégal. Ces travaux invitent
à examiner, sur la facilité des prêts, l’accessibilité massive et la qualité entre les crédits offerts par les institutions
de microfinance et les besoins de leurs usagers.
Abstract :
The main objective of this study is to assess the impact of microfinance on the development of entrepreneurship
in Senegal. To verify this, we administered a questionnaire to 111 clients of three microfinance institutions in
Senegal (CMS, PAMECAS, ACEP). Logistic regression and ordered logit regression were used to measure,
respectively, business creation by MFIs and value creation by entrepreneurial clients. The results show, firstly,
that only the variables characterising the sustainability of microfinance institutions have a positive influence on
entrepreneurship (business creation) through the availability of funds, the minimisation of agency costs and
transaction costs. Secondly, the development of entrepreneurship through the creation of value is influenced both
by variables of credit massification (the popularisation of microcredit positively, support for micro-entrepreneurs
negatively) and the sustainability of institutions (funds available negatively and minimisation of agency costs and
transaction costs positively). These mixed results show that microfinance has little impact on the development of
entrepreneurship in Senegal. This work calls for an examination of the ease of lending, mass accessibility and the
quality between the credit offered by microfinance institutions and the needs of their users.
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1. Introduction
La microfinance occupe une place de plus en plus importante dans le financement de l’activité
économique, en particulier dans les pays en développement. Par conséquent, elle devient
stratégique dans la mise en œuvre de politiques économiques dans plusieurs pays d’Afrique.
L’émergence en Afrique noire du secteur de la microfinance a été rendue possible par l’ancrage
dans les milieux socio-culturels d’un système informel d’épargne et de crédit comme les
« toutines ». Pour Servet et al. (1995), ce système tontinier des réalités socio-culturelles
africaines s’adaptait aux crédits de consommation et au financement des besoins en fonds de
roulement du petit commerce des femmes (Parkouda, 2015). Au cours de ces dernières années,
la microfinance a émergé et s’est imposée comme un sous-secteur du système financier dont
elle contribue à élargir la portée et à diversifier les services.
Selon J. Yaron (1994), la microfinance peut être définie comme « l’offre de services financiers
(épargne et crédit) de faibles dimensions à destination des micro-entreprises. Celles-ci
emploient généralement moins de dix (10) personnes, ont un capital et offrent des produits et
services au secteur informel et donc ne constituent pas une clientèle intéressante pour les
banques commerciales ». Cette définition exclut de son champ l’intervention des particuliers.
Pour donner une définition plus large, la microfinance est souvent désignée comme un ensemble
d’institutions dont la vocation essentielle est de fournir des services financiers aux pauvres. Le
préfixe « micro » est ajouté selon Prescott (1997) à cause de la faible taille des transactions.
Une institution comme la Grameen Bank au Bengladesh s’est développée et est devenue une
banque de microcrédit reconnue par les autorités monétaires et les organisations internationales.
Ce développement très rapide a été fortement encouragé et soutenu par les grandes
organisations internationales et l’agence de coopération multi et bilatérales. Leur soutien s’est
notamment traduit par le lancement en février 1997, lors du sommet mondial sur la
microfinance à Washington, d’une compagne mondiale visant à aider, par le microcrédit plus
de 100 millions de familles parmi les plus pauvres à l’horizon 2005. Un an plutard, en 1998,
l’Assemblée Générale des Nations Unis à proclamé 2005 l’année internationale de la
microfinance afin de saluer la contribution du microcrédit à l’allègement de la pauvreté
(Ndjambou, 2010).
Au Sénégal, l’intérêt porté au système financier décentralisé (SFD) n’a cessé de croitre ces
dernières années. Il se pose en alternative aux banques et système financier informel. Des lors,
en plus du rôle d’instrument de lutte contre la pauvreté et l’appui au développement de
l’entrepreneuriat des jeunes, la microfinance constitue un système alternatif pour combler la
faible bancarisation du système financier classique qui est à 18,0% en 2019. À l’échelle
mondiale, la microfinance compte 81,5 milliards de dollars de prêts octroyés et 91,4 milliards
de clients à bas revenus (Robleh, 2015). L’Asie du Sud mène le marché avec 52% des
emprunteurs mondiaux et avec le nombre le plus élevé d’emprunteurs femmes (92%) et ruraux
(80%). Quant à l’Afrique avec 7,3 millions d’emprunteurs et 4,9 milliards de dollars, présente
la croissance régionale la plus forte avec 11% en 2012 (Roblah, 2015). Le nombre de systèmes
financiers décentralisés (SFD) est de 508 unités à fin mars 2022. En outre, 17.284.110
personnes ont bénéficié des services financiers fournis par les institutions de microfinance sur
la période sous revue, à travers 4.373 points de services répartis dans les États membres de
l’Union (BCEAO, 2022).
En outre la microfinance a une portée à la fois microéconomique et macroéconomique. Au
niveau microéconomique, les initiateurs des programmes de microcrédit veulent développer
l’auto-emploi des pauvres en favorisant l’autofinancement de leurs projets. Quant au niveau
macroéconomique, la microfinance permet de soutenir la croissance économique et la réduction
du chômage. En effet, par son rôle d’intermédiaire financier, elle facilite la transformation
d’épargne accumulée inactive en investissement (Robleh, 2015).
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Quant au prêt progressif, il a pour but de motiver les emprunteurs à rembourser la somme
empruntée dans les délais convenus. Ainsi des visites fréquentes des agents du crédit sont
programmées pour, d’une part, accompagner les micros entrepreneurs dans la gestion de leurs
projets et, d’autre part, pour mieux contrôler leurs projets afin d’anticiper tout comportement
opportuniste de la part de l’emprunteur.
Les études d’impact ont pour but de mesurer la contribution de service des institutions de
microfinance au développement de l’entrepreneuriat. L’impact de la microfinance peut être
définie « comme l’ensemble des processus dont la finalité est de déterminer quels changements
significatifs et durables, positifs et /ou négatifs, prévus ou imprévus sont survenus dans un
espace donné à la suite de l’intervention d’une institution de microfinance à l’échelle de la
personne, du ménage, d’un groupe, d’une micro entreprise, d’un marché particulier, d’un
village, d’un quartier, d’une région » (Fouillet, 2003). Dans un tel contexte, la question de
l’entrepreneuriat est apparue au cours du débat et la microfinance trouve toute justification
comme un moyen de contribuer au développement de cette dernière.
Des financements importants ont été investis dans ce secteur. Le développement de
l’entrepreneuriat dans son rapport avec la microfinance tient une place fondamentale. Il nous
faut au préalable appréhender le mode de fonctionnement des IMF au Sénégal et le cadre
règlementaire qui le régit. Faisant partie intégrante du système financier, le secteur de la
microfinance est sous la tutelle de la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest
(BCEAO), du Ministère de l’économie et des finances à travers la cellule d’Assistance
Technique des Caisses Populaires d’Epargne et de Crédit (AT/CPEC), mais également du
ministère de la famille, de l’Entrepreneuriat féminin et de la microfinance par le bais de la
Direction de la microfinance qui supervise et contrôle leurs activités au sein du système. Leur
procédure est fortement dictée par ces institutions à travers la mise au point d’un certain nombre
de ratios prudentiels que ces institutions leur imposent et qu’ils sont tenus de respecter dans
leur procédure de gestion.
L’objet de cette contribution est de savoir par quels moyens les IMF peuvent parvenir à mettre
à la disposition des jeunes entrepreneurs un volume de crédit convenant au développement de
leurs projets dans un environnement concurrentiel, où les sources de financement deviennent
de plus en plus rares. Pour ce faire, nous fixons comme point d’ancrage de cette recherche la
question centrale suivante : Quelle est la contribution de la microfinance au développement de
l’entrepreneuriat au Sénégal ?
Le modèle d’analyse est décomposé en deux concepts à savoir la microfinance et le
développement de l’entrepreneuriat. La microfinance est disséquée à partir de trois théories : la
massification du crédit, la pérennisation des institutions de microfinance a été les coûts
d’agence et de transaction (Ndjambou, 2010). Quant au développement de l’entrepreneuriat, la
construite théorique est analysée par deux variables à savoir la création de valeur et la création
d’entreprise.
L’objectif principal de cet article est d’évaluer l’impact de la microfinance sur le
développement de l’entrepreneuriat au Sénégal. Il se décline en deux objectifs spécifiques :
d’évaluer l’effet de la massification du crédit sur le développement de l’entrepreneuriat au
Sénégal (i) et d’analyser la contribution de la pérennisation des IMF à travers les coûts
d’agence et de transaction sur le développement de l’entrepreneuriat au Sénégal (ii).
L’hypothèse principale part du postulat selon laquelle la microfinance contribue au
développement de l’entrepreneuriat au Sénégal. Notre étude repose sur une démarche à la fois
théorique et empirique. Le reste du document est divisé comme suit. Nous allons présenter dans
la section 2, la revue de la littérature pour essayer de mieux comprendre les concepts de la
microfinance et de l’entrepreneuriat au Sénégal et leur interaction. Dans la section 3, nous
présentons la méthodologie, les données obtenues à partir de l’enquête et le modèle
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véritable différence sur le niveau général de pauvreté dans le monde si ses opérations dépendent
du financement des donneurs.
Selon cette proposition, le capital financier nécessaire pour « faire une différence » dépasse de
loin ce que la communauté internationale est prête ou même capable de fournir. En outre, le
financement disponible, peu importe son niveau, serait instable, les donneurs étant
imprévisibles et de nature à retirer leur soutien en fonction de leurs intérêts changeants. Dans
ces conditions, les IMF se doivent d'aspirer à l'autosuffisance (Gonzalez-Vega, 1993) ou, dit
autrement, doivent couvrir le coût de leurs opérations avec les revenus qu'ils produisent, sous
peine de ne jamais réaliser les promesses que porte le mouvement du microcrédit. Selon la
même logique, la priorité doit être l'atteinte du plus grand nombre de pauvres possible et non
pas l'atteinte des populations les plus pauvres. Il serait judicieux de créer des institutions viables
et autonomes financièrement pour que l’impact sur la pauvreté soit efficace (Robleh, 2015).
Cette position institutionnaliste s’est étendue au milieu des années 1990. L’approche s’est
confirmée comme la voie de référence en matière de développement économique. La vision
institutionnaliste met en évidence l’hypothèse de pérennité des institutions de microfinance à
travers le triple défi de viabilité financière, de l’autonomie organisationnelle et de la
reconnaissance juridique. Ces défis ouvrent le débat sur la gouvernance en MF.
2.1.3 La théorie de la gouvernance et ses composants
• La théorie de coût d’agence
La mobilisation de la théorie d’agence permet de mettre à jour les imperfections du marché qui
entraînent l’exclusion du système bancaire des emprunteurs potentiels et la naissance des
mécanismes financiers alternatifs. Cette théorie insiste sur l’équité entre les intérêts de micro-
entrepreneurs et ceux des institutions de MF dans le but de diminuer les coûts d’agence et de
garantir les intérêts des parties prenantes.
La théorie de l’agence adhère à une hypothèse d’imperfections de l’information et met en
évidence la divergence d’intérêts qui se manifeste entre les membres de la firme. L’introduction
du comportement des membres de la firme remet en question l’objectif unique de maximisation
du profit et permet d’envisager la possibilité qu’existent pour une même firme différents
objectifs reflétant les intérêts divergents des parties en présence. Le postulat de la théorie de
l’agence stimule que toute relation contractuelle est une relation d’agence. Nous définissons
une relation d’agence comme un contrat par lequel une plusieurs personnes (le principal)
engagent une autre personne (l’agent) pour exécuter en son nom une tâche quelconque qui
implique une délégation d’un certain pouvoir de décision à l’agent (Jensen et Meckling, 1976).
Cette relation d’agence traduit une situation de dépendance entre deux agents : la situation d’un
agent dépend de l’action d’un autre agent c’est-à-dire qu’un individu agit sous la direction d’un
autre qui subit. La théorie de l’agence va s’intéresser aux relations principal-agent (Milgrom et
Robert, 1997).
La théorie de l’agence reste attachée à une problématique relative à la définition de contrats
efficients, de sorte que l’agent soit incité à avoir un comportement favorisant les intérêts du
principal. Selon la théorie de l’agence, l’impératif d’efficience interne est fonction de la
minimisation des coûts de production. Elle insiste principalement sur la minimisation des coûts
d’agence (Christelle, 2009 ; Maneva, 2019).
• Théorie des coûts de transaction
La théorie des coûts de transaction s’est construite en plusieurs temps. Elle repose, dans ses
développements actuels, sur certaines hypothèses différentes de l’axiomatique néo-classique,
principalement une hypothèse de rationalité différente. La notion de coût de transaction est
introduite pour la première fois par Ronald Coase (1937). Elle ne suscitera aucun commentaire
pendant de nombreuses années. C’est grâce aux travaux de Williamson (1994), que la notion
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de coût prend toute son ampleur. Grâce à ce concept, la théorie des coûts de transaction est en
mesure de rendre compte de l’existence de la firme dans une économie de marché. En autre,
elle permet de comprendre les formes de gouvernance des transactions. Elle permet aussi
d’étudier las formes organisationnelles (Robleh, 2015).
La théorie des coûts de transaction intègre les ressources mobilisées pour concevoir et suivre le
contrat portant transfert des droits de propriété d’un individu à un autre, d’une organisation à
une autre (Williamson, 1994). Elle cherche à mettre en place un contrat formel vérifiable par
les deux parties et à encadrer l’exécution de ce contrat. Contrairement à la théorie de l’agence,
la théorie de coût de transaction n’a pour ambition de démontrer la supériorité de la firme
capitaliste sur toute autre forme d’organisation de la production. La question à laquelle Coase
(1937) entend répondre est celle de l’existence de la firme. Pour tenter d’expliquer ce mode de
coordination de la production, Coase (1937) introduit une notion qui posera les fondements des
sciences de l’organisation.
• Théorie de l’architecture organisationnelle
La théorie de l’architecture organisationnelle stipule que la localisation de l’information
spécifique influence l’allocation des droits décisionnels. L’autonomie des universités favorise
la décentralisation du processus décisionnel par l’abandon de tout ou une partie des fonctions
de contrôle décisionnel et d’évaluation qu’exercent habituellement les pouvoirs publics. Les
connaissances spécifiques aux choix stratégiques et aux choix d’investissement sont
décentralisées au niveau des porteurs de projets et des enseignants. Les besoins opérationnels
émergent donc de ce niveau organisationnel, et impliquent la décentralisation des décisions
stratégiques. Ainsi, l’objectif de la pérennisation des institutions de microfinance (MF) et de la
massification des crédits est conditionné par la mise en place des systèmes de gouvernance
appropriés et adaptés aux spécificités culturelles de l’environnement (Ndiambou, 2010).
2.2. Théorie relative à l’entrepreneuriat
L’entrepreneuriat est considéré comme un processus dynamique et complexe. Il est la résultante
de facteurs psychologiques, socioculturels, politiques et économiques. Il prend la forme
d’attitudes, d’aptitudes, de perceptions, de normes, d’intentions et de comportements qui se
manifestent dans un contexte donné (Tounes, 2007). La création d’entreprise et de valeur
constituent la manifestation la plus visible de l’entrepreneuriat. Elle se décline par quatre phases
: la propension, l’intention, la décision et l’acte d’entreprendre.
L’entrepreneuriat est au cœur des problématiques de croissance, de compétitivité économique
et d’emploi ; il est assurément, aussi, un facteur de progrès (Ndiambou, 2010). L’impératif
d’adaptation à un monde en mutation permanente, tout comme la nécessité de générer de la
croissance et de combattre le chômage. La faculté d’entreprendre est un levier de croissance
économique et sociale d’une extraordinaire efficacité. Toute initiative qui favorise
l’entrepreneuriat et en améliore l’environnement fait donc avancer le pays. L’entrepreneuriat
est un concept tellement complexe et d’élément de nature différente, qu’il est nécessaire de
classer les différentes définitions avancées par les auteurs selon quatre courants de pensée ou
paradigme (Ndiambou, 2010) : le paradigme de l’opportunité d’affaires, le paradigme de la
création d’une organisation, le paradigme de la création de valeur et le paradigme d’innovation.
2.2.1. Le paradigme de l’opportunité d’affaires
Le rôle majeur accordé à l’opportunité conduit (Stevenson et Jarillo, 1990) à définir
l’entrepreneuriat comme « un processus par lequel des individus, soit en leur nom soit à
l’intérieur d’organisations, poursuivent des opportunités sans tenir compte de ressource qu’il
contrôle couramment ». L’opportunité est considérer avant tout comme une source de profit
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rendue possible par l’existence d’une demande solvable et des ressources requises disponibles
(Ndjambou, 2010).
2.2.2. Le paradigme de la création d’une organisation
Le paradigme de la création d’une organisation définit l’entrepreneuriat comme « un
phénomène conduisant à la création d’une organisation impulsée par un ou plusieurs individus
s’étant associés pour l’occasion » (Verstraete et Fayolle 2005). La création d’entreprise est
devenue aujourd’hui la source de développement et de croissance. Elle se base sur deux
éléments importants ; l’entrepreneur et le milieu. Il est important de préciser que la notion
d’organisation ne se réduit pas à celle d’entreprise. Les adeptes de ce courant de pensée
considèrent l’organisation aussi bien comme un moyen et un résultat du processus
d’entrepreneuriat (Ndjambou, 2010).
2.2.3. Le paradigme de la création de valeur
La dimension fondamentale de l’entrepreneuriat social est la création de valeur, notamment la
création de valeur économique et valeur sociale. La mission sociale résout les problèmes
sociaux et crée de la valeur économique et valeur sociale (Hmama et Alaoui, 2019). Pour qu’une
valeur sociale soit créée, les objectifs de l’entrepreneur social doivent rencontrer ceux des
bénéficiaires qui souhaitent avoir une satisfaction et un bien-être personnel. Ainsi, dans un
contexte social, l’entrepreneur ne crée de la valeur que lorsque le produit ou le service fourni
est d’une valeur pour le bénéficiaire et, par conséquent, augmente l’utilité totale des
bénéficiaires (Hmama et Alaoui, 2019).
2.2.4. Le paradigme de l’innovation
Selon Shane et Venkatarman (2000), « l'entrepreneuriat est l’étude des opportunités de
création de nouveaux produits et services qui sont détectées, évaluées et exploitées ».
L’innovation permet de différencier les entrepreneurs des propriétaires et des dirigeants des
PME (Ndjambou, 2010). Plusieurs définitions sont avancées par les chercheurs. Nous reprenons
celle proposée par Hmama et Alaoui (2019) qui est la suivante : « l’entrepreneuriat est un
processus d’accès sur la création sociale de valeur économique, création d’une organisation,
en utilisant un ensemble de comportements entrepreneuriaux qui intègre une utilisation
innovante et une combinaison des ressources afin e poursuivre les opportunités qui se
présentent dans l’objectif de catalyser le changement et répondre aux besoins sociaux à travers
une entité qui est financièrement indépendante, autonome et durable ».
À travers cette définition, le développement de l’entrepreneuriat passe nécessairement par la
création de valeur, la création d’entreprise et l’innovation. Dans notre cadre d’analyse, nous
retiendrons comme variables explicatives de l’entrepreneuriat et ses liens avec la microfinance :
la création de valeur et la création d’entreprise.
2.3. Formulation des hypothèses sur l’articulation entre Microfinance et Entrepreneuriat
L’interaction entre la microfinance et l’entrepreneuriat se situe dans un long débat de la théorie
économique sur la contribution du développement financier sur la croissance économique
(Samuelson, 1937, Gaulmith et Mackinnon). Dans cette étude l’hypothèse générale s’inscrit
dans cette logique que la mricrofinance impulse la dynamique de l’entrepreneuriat en termes
de créations de valeurs, de création d’entreprise et même de création d’emplois.
2.3.1. Relation entre la massification du crédit au sein des IMF et le développement de
l’entrepreneuriat
La microfinance est parfois présentée comme l’une des sources financières adaptées aux petites
et moyennes entreprises (PME) (Peltoniemi et Vieru, 2013). Elle offre aux entrepreneurs
l'opportunité de stimuler leur expérience, d'accroître l'échelle de leurs activités et de devenir de
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plus en plus compétitifs. Avec l’aide des IMF, les gens peuvent gagner plus et ainsi mieux se
protéger contre les risques. Ils peuvent également planifier l’avenir et aller au-delà d’une survie
au jour le jour.
H1 : la massification du crédit des IMF a une influence significative sur la création de valeur
des entrepreneurs au Sénégal.
2.3.2. Relation entre la pérennisation des IMF et le développement de l’entrepreneuriat
Grace à la MF, les entrepreneurs peuvent créer des entreprises productives et sortir de la
pauvreté et de la vulnérabilité. L’entrepreneuriat à travers les IMF contribue à lutter contre la
pauvreté en fournissant aux ménages les plus pauvres un accès continu et permanent à un
système financier solide et stable afin de renforcer la sécurité économique de leur famille. La
microfinance pallie aux inégalités en offrant un accès aux crédits et aux services bancaires à
tous.
H2 : la pérennisation des IMF, les coûts d’agence et coûts de transaction ont également une
influence significative sur la création d’entreprises au Sénégal.
Les IMF au Sénégal répondent aujourd’hui de manière adaptée au besoin essentiel de la micro
entreprise qui est l’accès au crédit. On constate une plus grande prise en charge des besoins de
ces PME et un accompagnement durable par les IMF au Sénégal. Les trois IMF choisis dans
notre étude (CMS, PAMACAS, ACEP) concentrent l’essentiel de l’offre de microfinance au
Sénégal. Elles englobent 81,3% des prêts accordés et 83% des dépôts (Diop, 2018). Cependant,
la segmentation du crédit s’opère en fonction des différentes catégories socio-professionnelles.
3. Méthodologie
3.1. Echantillon, Collecte des données et Questionnaire
La croissance du secteur de la microfinance s’est accrue fortement et les évaluations des impacts
socio-économiques sont devenues importants pour les différents intervenants dans ce secteur
tant des bailleurs publics que des intervenants privés (Roblah, 2015). La population cible est
constituée de clients entrepreneurs des trois IMF au Sénégal et les responsables de ces mêmes
institutions. Il s’agit de l’Union des mutuelles du partenariat pour la mobilisation de l’épargne
et du crédit au Sénégal (UM /PAMECAS), Crédit Mutuel du Sénégal (CMS) et l’Alliance du
Crédit et de l’Epargne pour la Production (ACEP). L’échantillon retenu est de 111 individus.
Ensuite, en s’appuyant sur Parkouda (2015), la technique de l’échantillonnage aléatoire
systématiquement a été utilisée dans les répertoires des comptes d’épargne et des dossiers de
crédits pour le choix des individus de l’échantillon.
Tableau 1 : Echantillonnage des clients
Secteur d’activité Nombre d’individus enquêtés
UM /PAMECAS 40
ACEP 40
CMS 31
Total 111
Source : Enquête réalisée par les auteurs, 2022.
La collecte des données consiste à administrer un questionnaire à 111 clients de ces institutions
de MF. Nous choisissons d’utiliser une technique de collecte des données à la fois quantitative
et qualitative. Un tel choix se justifie par le fait que la méthode qualitative permet de compléter
les informations obtenues de l’étude quantitative. L’emploi de la méthode quantitative nous
conduit à l’administration d’un questionnaire auprès des bénéficiaires du crédit. L’utilisation
de la méthode qualitative nous permet de recueillir l’opinion des enquêtés à l’aide de guide
d’entretien (Parkouda, 2015). L’enquête est faite par le biais d’un questionnaire intégrant
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l’ensemble des variables de notre recherche. Le questionnaire est structuré en cinq thèmes : la
situation socio-économique des clients, la massification du crédit, la pérennisation des IMF, les
coûts d’agence et coûts de transaction, et le développement de l’entrepreneuriat. La phase de
descente sur le terrain pour recueillir ces informations a eu lieu au mois de septembre 2022.
3.2. Méthode d’analyse
La régression logistique a été utilisée pour étudier l’impact de la MF sur la création d’entreprise
(Oui/Non), et la régression logit ordonné pour analyser le même impact sur la création de valeur
(obtention de revenus inférieurs ou supérieurs à la moyenne du marché). Pour expliquer le
développement de l’entrepreneuriat au Sénégal par chacune des trois approches de la MF, une
équation comportant les indicateurs de ces approches en question est estimée en lien avec
d’autres variables de contrôle insérées dans le modèle. Les variables du modèle sont renseignées
dans le tableau ci-après :
Tableau 2 : Synthèse des concepts et variables de recherche
Niveau Concepts Variables Définition des variables
Désigne les campagnes de
Vulgarisation de Microcrédit
communication visant un large public
(VDM)
pour faire connaître les microcrédits.
Désigne les facilités offertes aux
Facilité de prêt et
populations démunies pour accéder aux
accessibilité massive (FPA)
crédits.
Massification de crédit Désignent les stratégies de soutien et
Stratégie
(MSC) d’accompagnement des personnes ayant
d’accompagnement des
obtenus ces microcrédits afin de réduire
emprunteurs diminus (SAE)
le taux d’échec.
Désigne la couverture territoriale des
Proximité géographique des
services de microfinance et son
services financiers (PGS)
rapprochement avec sa cible.
Désigne l’horizon temporel du
Fourniture durable des
microcrédit en termes de mois ou
services financiers (FDS)
d’années.
Disponibilité des Désigne la disponibilité des fonds afin
programmes de microcrédits d’éviter les files ou délais d’attente
(DPM) longs.
Pérennisation des IMF
Longévité territoriale des Désigne l’horizon temporel sous l’angle
(PIMF)
institutions (LTI) de la localisation territoriale
Viabilité financière et Désigne la capacité financière et
technique (VFT) technique de l’IMF
Cela signifie la diminution de cout de
Microfinance Minimisation des coûts l’agence de sorte qu’il est l’équité entre
d'agence (MCG) les intérêts de micro-entrepreneur et
ceux des institutions de microfinance.
Fait référence à une la capacité de
Efficacité organisationnelle l’entreprise à atteindre ses objectifs tout
(EO) en développant les employés, les
Cout d’agence et cout processus et l’infrastructure.
de transaction Respect des intérêts du
micro-entrepreneur (RIM)
Atteinte des objectifs de
développer les employés, les
processus et l’infrastructure
(ADE)
Désigne le nombre de revenus ou de
Création de valeur Revenus distribués (RED) salaires distribués dans l’entreprise en
question.
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Développement
de
Création d’entreprise Taux de création
l’entrepreneuriat Désigne le nombre d’entreprises créées.
d’entreprise (TCE)
4. Résultats et discussion
4.1. Résultats des estimations des modèles
La régression logistique et la régression linéaire appartiennent à la même famille des modèles
GLM (Generalized Linear Models) : dans les deux cas, on relie un événement à une
combinaison linéaire de variables explicatives. Nous cherchons à expliquer la création
d’entreprise (NE) et la création de valeur (RED) à partir des variables de la microfinance. Dans
le cas de la régression logistique et la régression logit ordonné, respectivement pour les
variables dépendantes (RED) et (NE), les termes d’erreur suivent une loi normale N (μ, σ) où
σ la probabilité d’avoir une alternative (l’événement du succès ou une autre modalité) et μ est
une fonction linéaire des variables explicatives. Le principe de la régression logistique est
d’expliquer ou de prédire une variable pouvant prendre 0 et 1.
Pour tous les tests d’hypothèse, nous choisissons le seuil de 5%. La règle de décision est la
suivante :
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Saleh ANAS et Moussa DIOP. Microfinance et développement de l’entreprenariat au Sénégal : une étude empirique
sur les trois grandes IMF les plus représentatives
Source : Auteurs
Figure 2 : Sensibilité et spécificité du modèle de régression logistique
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Si l’on prend logiquement 50% comme étant la probabilité au-delà duquel le client de MF aurait
créé une nouvelle entreprise, nous obtenons un taux de bon classement de 81,08%. Ce qui
signifie que 8 individus sur 10 sont bien classés par le modèle.
Cela permet de voir la capacité du modèle de la régression logistique à reproduire les valeurs
effectivement observées de notre variable dépendante sur l’échantillon.
Tableau 4 : Taux de bon classement, sensibilité et spécificité du modèle
Classification D ҃ D Total
+ 24 8 32
- 13 66 79
Total 37 74 111
Sensibilité 64,86%
Spécificité 89,19%
Taux de bon classement 81,08%
Source : Auteurs
La sensibilité et la spécificité sont respectivement de 64,86% et 89,19% avec un taux de bon
classement du modèle de 81,08%.
La distribution de la probabilité estimée de création d’entreprise permet de constater que le
meilleur seuil de coupure (cut-off) est de 0,4927. On constate que 30% des clients de
microfinance sont estimés avoir créé une entreprise contre 70% ne l’ayant pas fait.
Tableau 5 : Taux de création d’entreprise prédit des clients de microfinance
Accès au crédit prédit Oui Non Total
Effectifs 33 78 111
Pourcentages 30% 70% 100%
Source : Auteurs
4.1.3. Test du modèle de régression logit ordonné
Dans la régression logit ordonné, il convient de noter que prendre en compte l’hypothèse de
pentes parallèles lorsqu’on analyse les effets d’une variables indépendante lorsque cette
hypothèse est respectée, l’effet mesuré par les coefficients de régression ou leur transformation
en odds ratio (OR) ne présente pas de différence significative (Hmama et Alaoui, 2019).
Tableau 6 : Tests de validation de la régression logit ordonné
Chi2 df P>Chi2 P-value ASL
Wolfe Gould 20,94 18 0,282 0,0300
Brant 60,48 18 0,000 0,0400
Score 47,14 18 0,000 0,0100
Likelihood ratio 60,95 18 0,000 0,00600
Wald 31,85 18 0,023 0,0300
Source : Auteurs
Les estimations de la régression logit ordonné peuvent être validées selon les tests de validation
ci-dessus (les p-values sont inférieur à 0,05). Les tests ont été calculés en faisant un bootstrap
avec 10 réplications pour obtenir les p-values. Les estimations sont donc valides.
4.2. Discussion
Notons que dans les modèles Logit, la valeur des coefficients n’est pas interprétable. Ce sont
leurs signes que nous allons interpréter. Et pour chaque variable explicative, nous référons à la
modalité de référence (celles qui ne s’affichent pas dans le tableau de résultats). Les seules
variables significatives seront interprétées, cela se traduit par une p-value inférieure au seuil de
5%.
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Les individus qui pensent un peu que les IMF atteignent les objectifs de développer les
employés, les processus et l’infrastructure sont plus incités à créer des entreprises par rapport à
des individus qui sont tout à fait d’accord que ces institutions les atteignent.
4.2.2. Interprétation des résultats du modèle de régression logit ordonné : création de
valeurs
Le tableau 8 donne les résultats des estimations des variables de la microfinance qui expliquent
la création de valeurs des entrepreneurs bénéficiant des crédits des IMF sélectionnées.
Tableau 8 : Estimations du modèle des facteurs de la création de valeur des entrepreneurs
Coefficient P>|z|
Statut matrimonial
Marié(e) 2,665** 0,019
Vulgarisation de microcrédit
Pas du tout bien passé -15,738*** 0,000
Proximité géographique des services financiers
Ne couvre pas 1,983** 0,022
Minimisation des coûts d'agence
Oui 1,723** 0,048
Efficacité organisationnelle
Non pas vraiment 20,558*** 0,000
Source : Auteurs
Pour le second modèle, le Sexe, la Classe sociale, la Stratégie d’accompagnement des
emprunteurs démunis, la Capacité technique et financière pour répondre à l’exigence des
clients, le Délai d’attente pour bénéficier du service, l’Horizon temporel du microcrédit se sont
révélés non significatifs au seuil de 5%.
Concernant les variables significatives du modèle de régression logit ordonné, s’agissant de
l’âge, les individus du troisième âge (de plus de 61 ans) sont moins incités à entreprendre par
rapport aux jeunes de 30 à 40 ans. Donc il en ressort que plus on est jeune, plus on a des
avantages en termes de création de valeur, autrement dit, des revenus plus élevés par rapport à
la moyenne du marché. Par rapport aux célibataires, les individus d’autres statuts matrimoniaux
(mariés, veufs) sont plus chanceux d’avoir des revenus plus élevés que la moyenne du marché.
Comparés aux individus n’ayant aucun niveau d’éducation, ceux ayant un niveau d’éducation
plus élevé que ceux-ci ont moins de chance d’obtenir des revenus plus élevés que la moyenne
dans le marché. L’éducation influence négativement la probabilité de création de valeur des
individus. Cela pourrait s’expliquer par le fait qu’elle influence déjà négativement la probabilité
de créer une entreprise. Cela peut se justifier par le fait que les gens n’ayant aucun niveau
d’instruction ont plus d’idée (même une petite activité informelle) de créer de la valeur.
Quant au statut professionnel, les artisans ont créé plus de valeurs, comparés aux commerçants.
En effet, ils jugent leurs avantages dans l’entrepreneuriat au-delà de la moyenne du marché.
La vulgarisation de microcrédit influence positivement la création de valeur. Les individus qui
pensent que la vulgarisation de microcrédit ne s’est pas du tout bien passée ont une probabilité
plus faible de voir leur création de valeur augmenter par rapport à ceux qui pensent que cela
s’est très bien passé. Paradoxalement, les personnes ayant obtenus des microcrédits puis
moyennement accompagnés ou pas du tout ont plus de chance d’obtenir des revenus plus élevés
que la moyenne dans le marché par rapport à celles qui sont très bien accompagnées.
Les individus qui pensent que les IMF ne couvrent pas l’ensemble du territoire ont plus de
chance de créer de la valeur, comparée à ceux qui pensent que cela couvre avec succès la
proximité géographique des services financiers. Par rapport aux entrepreneurs qui pensent que
les fonds sont tout à fait disponibles pour répondre à l’appel des clients, ceux qui pensent
totalement le contraire (pas du tout) ont plus de chance de créer de la valeur.
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Les individus qui pensent que les coûts d'agence des IMF sont minimisés voient plus leur revenu
augmenter au-dessus de la moyenne du marché comparé à ceux qui pensent que ces couts sont
encore élevés. Le respect des intérêts du micro-entrepreneur augmente la chance que ce dernier
crée davantage de valeurs, voit ses avantages au-dessus de la moyenne.
La création de valeur est plus accentuée chez les individus qui pensent que les IMF ont vraiment
ou pas vraiment atteint leurs objectifs de développer les employés, les processus et
l’infrastructure que chez ceux qui pensent que les IMF ont tout à fait atteint cela.
Les individus qui stipulent que les IMF ne sont vraiment pas efficaces en termes d’organisation
sont plus probables d’accroitre leur création de valeur par rapport à ceux qui sont tout à fait
d’accord que les IMF ont des capacités organisationnelles efficaces.
5. Conclusion
La microfinance au Sénégal présente une croissance exponentielle de son actif, de son
membership ainsi que de sa pénétration géographique et sectorielle. Elle en est aujourd'hui à
revendiquer une intégration dans le système financier dit formel, ce qui suppose qu'elle a
dépassé toutes les étapes de professionnalisation et de consolidation de ses acquis. L'objet de
cet article était d’appréhender la contribution des institutions de microfinance au
développement de l’entrepreneuriat au Sénégal. Avant de répondre à cette problématique, nous
avons revu la littérature empirique relative à notre sujet. Nous nous sommes attardés sur la
théorie relative à la microfinance et le débat qui se retrouve au cœur des discussions du secteur.
D'un côté, on retrouve les Welfaristes qui prônent une approche à tendance sociale (servir les
plus démunis est l'objectif primordial) et de l'autre, les Institutionnalistes qui préfèrent mettre
l'accent sur les bons résultats financiers. Morduch (2005) qualifie cette opposition contrastée
du schisme de la microfinance. Cependant qu'elle soit de type commercial ou à tendance plutôt
sociale, une IMF doit se forger une stratégie qui consiste à trouver le juste milieu entre les
différents objectifs qu'elle s'est fixé si elle désire être rentable (voire financièrement viable) et
assurer ses activités de manière pérenne. La théorie de la gouvernance et ses composants qui
insiste sur l’efficacité organisationnelle et la réduction de cout d’agence.
Nos résultats montrent, en premier lieu, que les variables caractérisant la massification de crédit
n’ont pas eu d’effets significatifs sur le développement de l’entrepreneuriat. Par contre, la
Pérennisation des institutions de microfinance influence positivement l’entrepreneuriat à
travers la disponibilité des fonds. Et dans le même sens, la minimisation des coûts d’agence et
coûts de transaction favorise davantage la création d’entreprise. Ces résultats confirment bien
l’impact positif des institutions de microfinance sur le développement de l’entrepreneuriat
observées dans la littérature.
Les résultats de l’étude nécessitent l’examen d’autres pistes de recherche pour expliquer
davantage la contribution du secteur de microfinance sur le développement de l’entrepreneuriat
au Sénégal. Des orientations peuvent aller dans le sens de la réduction des taux d’échec en
accompagnant les personnes ayant obtenu des microcrédits, afin de faciliter les modalités de
prêts (par exemple les garanties), l’accessibilité massive et la qualité des services financiers de
base entre les IMF et les usagers.
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