Introduction Au Droit ESMG - 2024

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INTRODUCTION

Intérêt de l’introduction au droit. L’intérêt de l’introduction à l’étude du droit est, à


l’instar du mot « introduire » (qui signifie conduire, mener dans, au-dedans, faire pénétrer en
un lieu nouveau), de conduire des néophytes, que sont censés être les élèves techniciens
supérieurs, au monde clos et ésotérique de l’univers juridique.
Objectif de l’étude. L’objectif de cette étude est de faire découvrir, connaître et
maîtriser le vocabulaire et les techniques juridiques et, ainsi, familiariser les élèves
techniciens supérieurs à la terminologie, et même à la technologie juridique. Elle tend à
fournir un minimum de culture juridique indispensable, à l’étude du phénomène juridique en
général et du droit civil en particulier.

Chapitre I : Notions de droit et des droits


Même si vous vous situez à l’aube de vos études de droit, vous avez tous une certaine idée,
plus ou moins vague, de ce qu’est le droit. Pour vous, sans doute, le droit est ce qui ordonne,
ce qui interdit. L’idée que vous avez du droit est essentiellement liée à la contrainte, à la
sanction.
Mais le droit, c’est aussi beaucoup plus que cela. Le droit est partout. Le droit régit la vie des
hommes. Les règles de droit sont destinées à régir les rapports humains. Aussi, le droit surgit
dans tous les rapports humains. Il n’est pas étranger aux rapports d’affection : le droit régit les
rapports entre époux, y compris pour des questions aussi intimes que la fidélité, le devoir
conjugal ou l’assistance pendant la maladie mais aussi les rapports entre les parents et les
enfants, déterminant les règles de filiation, les rapports d’autorité, les devoirs réciproques…
Le droit régit naturellement les rapports économiques, les rapports des individus avec l’Etat,
les rapports des Etat entre eux. Partout, il y a du droit…. Parce que le droit est consubstantiel
à l’existence d’une société. Dès qu’il y a une société, il y a du droit. « Ubi societas, ibi jus »
qui signifie « Là où il y a société, il y a le droit ».
En effet, à partir du moment où plusieurs personnes vivent ensemble, naît aussitôt un besoin
d'ordonner leurs conduites. Ces règles de conduites, éparses et diverses, composent un
ensemble : le Droit. Le droit est un phénomène vivant. Les règles naissent, vivent, meurent,
évoluent dans leur contenu, parce que la société et les hommes qui la composent, évolue.
Parce que les rapports humains sont complexes, le droit est complexe.
Mais ce droit désigne plusieurs phénomènes, a plusieurs sens qu’il ne faut pas confondre. Ces
sens ne doivent pas être confondus mais mis en relation.
Le Droit recouvre donc plusieurs notions. Comme toute science, le droit a aussi son langage.
La science juridique emprunte parfois au langage usuel, son vocabulaire mais le sens en est
parfois différent, plus large ou plus restreint. Les mots ont parfois aussi deux sens. Il en est
ainsi du mot "droit". Il y a le Droit, qu'on serait tenté d'écrire avec une majuscule et les droits,
avec une minuscule : - tantôt, on entend par droit, l'ensemble des règles juridiques, ce qu'on
appelle "le droit objectif" ; - tantôt, on entend par droit, telle ou telle prérogative dont une
personne est titulaire, dont elle est le sujet, on parle alors des "droits subjectifs". Aussi, le mot
droit comporte pour les juristes, deux définitions distinctes. Les Anglais utilisent deux termes
différents : law, et rights. Le droit recouvre deux ensembles différents qui diffèrent
profondément, même s'ils se situent en relation. En effet, l'objet du droit objectif est de
délimiter les droits subjectifs des personnes.

1
- Le droit objectif : Le droit est, en premier lieu, un ensemble de règles destinées à organiser
la vie en société. A cet ensemble, on applique l'expression Droit objectif.
Il s'agit de délimiter la part de liberté et de contrainte de chacun. Il faut définir ce qui est
permis ou pas pour que la vie sociale soit possible. La société établit des règles destinées à
régir son fonctionnement, et par voie de conséquence, à organiser les relations des personnes
qui la composent.
Le droit objectif est constitué par l'ensemble de ces règles juridiques. Lorsqu'on étudie la règle
de droit objectif, cela signifie qu'on prend en considération la règle de droit, en elle-même et
pour elle-même, abstraction faite de son contenu. On envisage ce qui est commun à toutes les
règles juridiques : ses caractères, ses classifications, ses sources, son domaine d'application,
etc...
- Les droits subjectifs : Le mot droit a une seconde signification. Le Droit objectif reconnaît,
en effet, des prérogatives aux individus. Ces prérogatives sont des droits subjectifs dont les
individus peuvent se prévaloir dans leurs relations avec les autres. Il ne faut pas perdre de vue
que le droit a pour but d'organiser la vie en société, donc de régir des personnes qu'on appelle
sujets de droit. Dans ce second sens, le droit est envisagé de façon plus concrète et
particulière. On examine les droits dont une personne est titulaire, les prérogatives
individuelles que les personnes ont vocation à puiser dans le corps de règles constitué par le
droit objectif.
Le droit, pris dans son sens subjectif, désigne alors une prérogative accordée à telle ou telle
personne. Il s'agit par exemple du droit de propriété, de droit de vote, du droit de grève, du
droit d'exercer l'autorité parentale sur ses enfants, etc... C'est un droit subjectif qu'on envisage
lorsqu'on affirme : "j'ai le droit de faire telle et telle chose en vertu de ma qualité de parent ou
de propriétaire" mais d'une norme de droit objectif lorsqu'on parle de condamner quelqu'un à
réparer un dommage en vertu de l'article 1382 du Code civil".
Ces deux significations du mot droit ne s'opposent pas, elles sont complémentaires. Ce sont
deux façons différentes d'envisager le même phénomène, les deux faces d’un même miroir : le
droit. Le droit objectif tend à déterminer les droits subjectifs des individus.
Titre I : Droit objectif/droits subjectifs
Chapitre I : Les notions de Droit et des droits
Section 1. – Le Droit objectif
Pour appréhender le droit objectif, il nous faut d’abord le définir (§ 1) ensuite nous
déterminerons son domaine (§ 1) et enfin nous préciserons ses caractères (§ 3).
§ 1. – La définition du droit objectif
Le Droit objectif désigne l’ensemble des règles juridiques qui régissent la vie des
hommes en société, et dont le non-respect est sanctionné par l’autorité publique. Ce droit
est dit « objectif », parce que général et impersonnel, il se définit par son objet à savoir régir
la vie en société.
Exemple : le droit d’un État donné, tel le droit ivoirien, le droit français, le droit allemand
ou encore le droit applicable aux obligations : le droit des obligations, le droit pénal ou le
droit commercial, etc.
Pris dans son sens objectif, le droit a pour fonction première de régir l'activité
sociale des personnes. La définition objective du droit ne prend pas en compte les situations

2
particulières des individus ou sujets de droit ; elle ignore les subjectivités et met plutôt
l'accent sur l'objectivation des rapports sociaux.
Le droit, perçu globalement, c'est-à-dire le « droit objectif », s’identifie à la règle de
droit. Le doyen CARBONNIER l’indique clairement, lorsqu’il écrit que « le droit objectif est
l’ensemble des règles de droit tel qu’il s’exprime dans les sources formelles… »1. Aussi,
l’étude du droit objectif se ramène-t-elle à celle de la règle de droit.
§ 2. – Le domaine du droit objectif
La diversité des règles de droit. Le droit objectif est composé d’une infinité de règles
de droit s’appliquant aux différents rapports sociaux. De plus, il est différent d’un pays à un
autre. Ainsi est-on amené à les regrouper en plusieurs catégories, tout en établissant deux
grandes distinctions. Ces deux distinctions opposent respectivement le droit interne au droit
international et, dans le premier cas, le droit public au droit privé. La distinction droit
public/droit privé est considérée comme la summa divisio du droit, c’est-à-dire la division
fondamentale du droit car elle contient la distinction droit interne/droit international.
A. – La distinction droit interne/droit international
Le droit interne ou droit national s'entend du droit positif en vigueur dans un État
donné. On appelle droit positif, le droit en vigueur dans un pays donné, à une époque
donnée, par opposition aux droits anciens et aux droits étrangers. C'est le cas du droit ivoirien,
c'est-à-dire l'ensemble des règles de droit applicables sur le territoire national. Le droit interne
repose sur une importante division : celle entre le droit public et le droit privé (voir infra B).
Le droit international, en revanche, s'entend du droit qui régit la société
internationale ou la "communauté internationale", composée principalement des États et
des organisations internationales. Il est encore dénommé droit des gens : jus gentium ou jus
inter gentes.
Le droit international comprend le droit international public, le droit international
privé et le droit communautaire.
Le droit international public régit les rapports entre États souverains ainsi que les
organisations internationales (ONU, UA, UE, OMC, Banque mondiale, etc.).
Le droit international privé régit les relations internationales des personnes privées,
c’est-à-dire les rapports privés dans lesquels intervient un élément d'extranéité. Il règle
essentiellement les conflits de lois et les conflits de juridictions, mais aussi la condition des
étrangers et les questions de nationalité.
Le droit communautaire s'entend de l'ensemble des normes juridiques d'une
organisation intergouvernementale d'intégration régionale. Par exemple le droit de l’OHADA,
le droit de l’Union européenne, le droit de l’Union africaine, le droit de la CEDEAO, le droit
de la CIMA, etc. Le droit communautaire se rapproche à la fois du droit international public et
du droit international privé. Cette "bi-appartenance" se manifeste par ses sources, ses
domaines d'intervention et les effets des actes édictés.

1
J. CARBONNIER, Droit civil, op. cit., p. 120.

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B. – La distinction droit privé/droit public
Une importante division existe en droit interne entre le droit privé et le droit public. C’est
la summa divisio du droit. La distinction opérée entre le droit privé et le droit public constitue
la distinction fondamentale du droit objectif.
1 – Le droit privé
Le droit privé réglemente les relations entre personnes privées – personnes physiques
(individus) ou morale (sociétés ou associations par exemple). Le droit privé est divisé en
branches.
Le droit civil est la branche du droit privé qui régit les rapports des particuliers entre eux
sur le plan individuel, familial et pécuniaire. Le droit civil constitue le droit commun et il est
la base du droit privé. On mentionnera à titre d’illustration le droit des personnes, le droit de
la famille, le droit des biens, le droit des obligations, etc.
Le droit privé comporte des matières spécialisées qui se sont progressivement détachées
du droit civil, telles que :
― le droit commercial, qui régit les actes de commerce et qui est applicable aux
commerçants. L'on tend à une spécialisation plus poussée de ce droit en fonction du type
d'activité exercée : droit des sociétés commerciales, droit de la propriété industrielle et
commerciale, droit des transports (terrestres, maritimes, aériens), droit bancaire (effets de
commerce, réglementation de la profession, y compris des changes), droit des assurances
(notions de risques assurables, assurances de dommages, assurances de personnes) ;
― le droit du travail, qui régit les rapports individuels et collectifs de travail qui
naissent entre employeurs et salariés à l’occasion d’un contrat de travail – la relation de travail
est strictement réglementée par l'État en vue d'assurer la protection des travailleurs ;
― le droit international privé (déjà examiné) qui régit les rapports entre particuliers qui
comportent un élément d'extranéité. Exemple : la détermination du droit applicable au contrat
conclu entre des personnes de nationalités différentes.
2 – Le droit public
Le droit public régit les relations dans lesquelles est impliquée une personne publique
(l’État ou une collectivité publique (une région, un département, une commune) ou encore une
entreprise publique. On dénombre quatre principales branches du droit public. Ce sont les
droits constitutionnel, administratif, financier et international public.
Le droit constitutionnel comprend l'ensemble des règles qui déterminent l'organisation
politique de l'État et le fonctionnement régulier des pouvoirs publics (les pouvoirs exécutif,
législatif et judiciaire).
Le droit administratif réglemente l'organisation des personnes morales de droit public
(régions, départements, communes, établissements publics...) ainsi que leurs rapports avec les
particuliers.
La législation financière ou finances publiques est relative à l’élaboration et à
l’exécution du budget de l’État. Il se rapporte à la dette publique, aux recettes publiques et
aux dépenses publiques. Il se subdivise en deux sous-branches :
― le droit budgétaire ou finances publiques stricto sensu, s’intéresse aux règles et aux
opérations relatives aux deniers publics, c’est-à-dire ceux de l’État et des autres personnes
publiques ; et

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― le droit fiscal, qui se consacre à l’étude de l’impôt et des diverses taxes.
Enfin, le droit international public, que nous avons déjà défini, régit les rapports entre
États ainsi que le statut d'un certain nombre d'organisations internationales.
3 – Les droits mixtes
Les branches mixtes sont celles qui se sont détachées à la fois, du droit privé et du droit
public. La mixité procède donc du "mélange" des règles des deux types de droit. Ces matières,
qui accordent une place importante à l'État, en tant que puissance publique, devraient relever
du droit public. Mais, ces disciplines sont rattachées au droit privé, en raison de la nature des
règles applicables, qui font d'ailleurs le plus souvent l'objet de codification. À cela s'ajoutent
deux autres raisons : elles sont justiciables des tribunaux judiciaires et enseignées par les
professeurs de droit privé. Il en va ainsi :
― du droit pénal, qui a pour objet de définir les infractions et d'en organiser la
répression, c'est une matière de droit public dans la mesure où elle régit les rapports entre la
société et les particuliers, mais c'est une matière de droit privé parce qu'elle s'adresse à des
individus et veille sur des intérêts privés ;
― du droit judiciaire privé ou procédure civile, qui régit l'organisation des tribunaux
et, en cela, c'est du droit public, mais réglemente aussi l'exercice des actions en justice pour
sauvegarder des intérêts privés et, en cela, c'est du droit privé.
― du droit communautaire qui s'entend de l'ensemble des normes juridiques d'une
organisation intergouvernementale d'intégration régionale.
N.B. La division du droit objectif en plusieurs branches permet de comprendre que nous
sommes en présence d’un système, d’un ordre juridique.

Section 2. – Le droit subjectif


§ 1. – La définition du droit subjectif
Le droit désigne ensuite les prérogatives (au sens de : pouvoir, avantage ou faculté)
reconnues par le droit objectif à chaque personne et dont celle-ci peut se prévaloir dans ses
relations avec les autres. Ce droit est dit subjectif, parce qu’il appartient à un sujet, à une
personne déterminée. Le droit de propriété et le droit de créance en constituent des
illustrations topiques.
Le droit de propriété permet de donner une illustration topique du droit subjectif, en
tant que « droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvue
qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements » (art. 544 C. civ.).
Le droit personnel ou droit de créance est un rapport juridique entre deux ou plusieurs
personnes, dont l'une, le créancier ou sujet actif, a le droit d'exiger d'une autre, le débiteur ou
sujet passif, une prestation, une abstention ou un objet.
Les droits subjectifs donnent au droit (objectif) un aspect concret car ils lui permettent de
rejoindre les personnes dans leurs situations particulières.
Remarque : on ne peut dissocier catégoriquement droit objectif et droit subjectif et les
envisager séparément, car ils ne sont que deux faces de la même réalité. Plusieurs raisons
peuvent être invoquées en ce sens.

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Tout d’abord, les droits subjectifs, loin d’être absolus et autonomes, sont limités par la
nécessité de respecter les intérêts majeurs de la société, régis par le droit objectif.
Ensuite, ces droits n’ont d’existence que dans les limites tracées par le droit objectif et
dans les conditions par lui fixées. L’exemple type nous est fourni par le droit de propriété.
§ 2. – La classification des droits subjectifs
Les divers types de droits subjectifs. Les droits subjectifs sont très nombreux et
diversifiés. On distingue traditionnellement deux grandes catégories de droits subjectifs : les
droits patrimoniaux et les droits extrapatrimoniaux.
A. – Les droits patrimoniaux
Les droits patrimoniaux sont ceux qui ont une valeur pécuniaire. Ils peuvent être évalués
en argent et sont donc inclus dans le patrimoine de la personne. Exemple, le droit de
propriété, le droit d’usufruit ou le droit de créance ou encore un brevet d’invention.
Les droits patrimoniaux se subdivisent en trois grandes catégories : les droits réels (ex.
le droit de propriété), les droits personnels (ex. le droit de créance qu’une personne (le
créancier) a contre une autre (débiteur)et les droits intellectuels (ex. un brevet d’invention).
Remarque : les droits patrimoniaux sont des droits évaluables en argent et pour cette
raison, ils sont susceptibles d’opérations juridiques, d’échanges ; on dit qu’ils sont cessibles
(ils peuvent être vendus ou cédés à d’autres personnes), transmissibles (par testament ou par
succession légale), saisissables par les créanciers qui pourront les faire vendre pour se payer
sur le prix de vente et enfin prescriptibles, c’est-à-dire susceptibles d’être perdus par leurs
titulaires ou acquis par d’autre du fait de la prescription, c’est-à-dire de l’écoulement du
temps.
B. – Les droits extrapatrimoniaux
On examinera la définition (1) et la classification (2) des droits extrapatrimoniaux.

1 – Définition
Les droits extrapatrimoniaux sont les droits non évaluables en argent, qui ne viennent
donc pas accroître le patrimoine. Selon la subdivision classique, on oppose traditionnellement
aux droits patrimoniaux, les droits extrapatrimoniaux. Ces droits seraient en dehors du
patrimoine de leur titulaire, bien qu'ils aient parfois des incidences plus ou moins importantes
sur ce patrimoine. Ils ont, avant tout, une valeur morale et beaucoup plus intime pour la
personne de leur titulaire car ils ont essentiellement pour objet de lui permettre d'exister
en tant que personne humaine et juridique, d'épanouir sa personnalité, de jouir de ses
libertés et de se protéger des autres. On dit d'ailleurs que ce sont des droits "attachés à la
personne". Ils sont généralement incessibles, intransmissibles, insaisissables et
imprescriptibles, à l'exact inverse des droits patrimoniaux. Ainsi, le droit à la vie privée, le
droit à l'honneur, le droit à l’image ou le droit d'agir en justice pour faire établir sa
filiation par exemple, ou encore le droit de vote, peuvent être rangés parmi les droits
extrapatrimoniaux.
2 – Classification
On distinguera les droits de la personnalité des autres droits extrapatrimoniaux.

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a) Les droits de la personnalité
Les droits de la personnalité sont des droits attachés à la personne de leur titulaire,
sans valeur patrimoniale directe (qu’il ne faut surtout pas confondre avec des droits
personnels). De ce fait, ils sont intransmissibles, imprescriptibles, insaisissables, et hors du
commerce. Les droits de la personnalité visent la protection et l'épanouissement de la
personne envisagée individuellement. En effet, ces droits sont des prérogatives permettant à
un individu d’affirmer sa « personnalité », c’est-à-dire ce qui fait qu’il est lui-même et pas un
autre. Ex : le droit au respect de la vie privée, le droit au nom, le droit à l’image, le droit
à la voix, le droit à l’honneur, etc. Mais ces droits de la personnalité ne couvrent pas tout le
domaine des droits extrapatrimoniaux.
b) Les autres droits extrapatrimoniaux
Il existe aussi un ensemble de droits familiaux (droit à la fidélité ou à l’assistance de son
époux, droits résultant de l’autorité parentale que la loi accorde aux parents sur la personne de
leurs enfants mineurs tels que le droit de garde, de surveillance et d’éducation de l’enfant), qui
tendent à protéger et garantir l'individu dans un milieu social donné ; ou encore le droit
moral de l’artiste sur son œuvre, et aussi les droits de la personne humaine (droits
naturels essentiels à la dignité de la personne humaine, ex droit au travail, droit au mariage,
droit de choisir et d’exercer sa religion, droit à la vie, etc.), qui débordent parfois le strict
cadre du droit privé. Ce sont aussi les droits professionnels, qui permettent à un individu de
travailler, de se défendre et de s’exprimer dans son milieu professionnel (ex. la liberté
d’expression, la liberté syndicale ou le droit de grève, etc.) et les droits civiques et politiques
(ex le droit de vote), qui permettent au citoyen de s’exprimer dans le cadre de la nation, mais
qui sont surtout du domaine du droit public.

Chapitre II : Finalités du droit


Le droit a pour but de régir les rapports entre particuliers (on parle de droit privé). Le droit
vise également à régir les rapports entre les particulier et l'état (on parle de droit public).
Le droit est une règle de vie en société. Bernard de Clairvaux qui a vécu de 1091 à 1153 disait
: "le droit est l'instrument et l'expression de la civilisation". Le droit a pour but de sanctionner
toutes situations dangereuses pour la collectivité. L'intérêt général passe avant l'intérêt privé.
Pour Louis Josserand, " Le droit c'est la conscience et la volonté collective se substituant aux
consciences et aux volontés individuelles, pour déterminer les prérogatives et les droits de
chacun".
Le droit des collectivités ou le droit objectif est le seul créateur de droit individuels ou
subjectifs. La société passe avant l'individu. Les droits subjectifs ne viennent que du droit
objectif. Ainsi l'individu découle de l'Etat. Le droit positif est la réunion des droits subjectifs
et objectif. Le droit subjectif découle du droit objectif, qui tous les deux ne sont que le droit
positif. Kant (en parlant du droit) affirme que "C'est l'ensemble des conditions qui limitent les
libertés pour rendre possible leurs accords".
Dans toute société, des règles de conduite doivent être instaurées afin que les relations entre
les individus soient possibles et que chacun puisse se réserver un espace de liberté sans nuire
à autrui. Les finalités de ces règles, qui constituent le droit, sont diverses et répondent à la
multitude des enjeux induits par la vie en société. En premier lieu, le droit vise à assurer d’une
manière générale l’ordre social afin d’éviter tout système anarchique. Il vient régir les
rapports humains et les relations entre les individus et la société sur le plan économique,
politique et social. Il protège l’intérêt général et assure le bien commun. En deuxième lieu, le

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droit vient également organiser la société par la mise en place de services publics (l’éducation,
l’armée ou la justice) et permet de rétablir l’équilibre entre les individus lorsque celui-ci est
remis en cause. Il garantit aux personnes une justice non-arbitraire. Enfin, en troisième lieu, le
droit protège les individus contre toute atteinte à leur personne ou à leurs biens et assure la
sanction de ceux qui n’observent pas les règles de conduite sociale.
Le droit positif a pour but premier d'établir une règle sociale, à savoir établir une société qui
se caractérise par une relation entre individus pacifique. La justice publique supplante la
justice privée.

Chapitre III : Caractères de la règle de droit


La règle de droit a plusieurs caractères.
§ 1. – Les caractères généraux de la règle de droit
Si le droit se définit comme un corps de règles ou de normes régissant les rapports
sociaux, toutes les règles gouvernant la conduite des hommes ne sont pas des règles de droit.
C’est pourquoi, il importe au préalable de distinguer la règle de droit des autres règles de
conduite sociale (A). Nous préciserons ensuite les caractères spécifiques de la règle de droit
(B).
A. – La distinction règle de droit et autres règles de conduite sociale
La règle de droit entretient des rapports très étroits avec les autres règles de conduite
sécrétées par la société. Aussi, n'est-il pas toujours aisé de les démêler. On s'efforcera
néanmoins de le faire en retenant, à titre illustratif, la religion, la morale et les règles de
convenance.
1 - Droit et religion
Les règles religieuses sont, parmi les règles de conduite sociales, celles qui ont le plus
imprégné et dominé le droit et, ce, plusieurs siècles durant. Dans les théocraties, c'est-à-dire
les gouvernements qui font reposer le pouvoir de leurs représentants sur la divinité, les
préceptes religieux et les règles de droit s’entremêlent et se confondent.
Mais, le droit a acquis son autonomie et s’est laïcisé. Il convient d'examiner en quoi il se
distingue de la religion, au double niveau de son contenu et de l’origine de sa sanction.
a) Distinction quant à leur contenu
On note ici l'existence de deux catégories de règles de droit, certaines étant indifférentes
à la religion et d'autres contraires à ses préceptes.
Certaines règles de droit sont indifférentes à la religion. Elles n’ont aucun rapport
avec les préceptes religieux. Il en va ainsi au moins pour deux raisons.
La première, c’est que le droit a un domaine d’intervention beaucoup plus vaste que
celui de la religion, en ce qu’il régit l’ensemble des rapports sociaux, alors que celle-ci se
limite à l’aspect spirituel.
La seconde raison, c’est que, fondamentalement, les deux règles sociales relèvent de
deux ordres bien distincts. Le droit relève du temporel et la religion du spirituel. Celui-là
appartient à la « terre » et au matériel, alors que celle-ci est tournée vers le « ciel » et
l’immatériel.

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Il en va ainsi des dispositions du Code de la route pour la religion. Il en va, inversement,
de même du célibat des prêtres ou des vœux de chasteté des religieux pour le droit.
D’autres règles juridiques sont en contradiction flagrante avec les préceptes
religieux. Elles sont moins nombreuses que les précédentes. Cependant ces règles sont
importantes, en ce qu’elles témoignent de l’autonomie du droit vis-à-vis de la religion. On
peut en ce sens rapporter deux types d’exemples.
Le premier, le plus ancien, est tiré de la Bible, plus précisément de Matthieu, chapitre 5,
verset 39, prend le contrepied de la loi du Talion, œil pour œil et dent pour dent. Sa
prescription est à son tour contredite par le droit : « Si quelqu’un te gifle sur la joue droite,
tend lui aussi l’autre ». Le droit à la légitime défense autorise, au contraire, à riposter par la
violence à une agression.
Le second type d’exemple se rapporte à l’actualité. Le divorce y tient une place
importante eu égard au temps mis pour lever l’interdiction qui le frappait. L’Église Catholique
y demeure toujours hostile, prescrivant le principe de l’indissolubilité du mariage. Les cas les
plus récents, dans lesquels les règles juridiques s’opposent non moins aux préceptes religieux,
se rapportent à la contraception, à l’avortement et à l’homosexualité.
b) Distinction quant à l’origine de la sanction
La distinction entre le droit et la religion est encore plus nette, lorsqu’on se réfère à
l’origine de la sanction infligée à leur manquement. On parvient ainsi à distinguer la sanction
étatique de la sanction divine.
La sanction de la règle de droit a une origine étatique – La violation d’une règle de
droit fait l’objet d’une sanction exercée par l’État. Celui-ci édicte les règles de droit et
sanctionne leurs violations par les citoyens.
La sanction des préceptes religieux a une origine divine – La violation d’un précepte
religieux relève, en revanche, des relations personnelles du croyant avec la divinité.
Par ailleurs, les sanctions étatiques diffèrent des sanctions religieuses quant à leur
finalité et à leur nature.
La finalité des deux types de sanction est différente. Le droit vise, d’une manière
générale, uniquement à châtier les manquements à ses prescriptions. Il ne distribue pas de
satisfecit, de récompense à ceux des citoyens qui se seraient bien comportés en respectant ses
prescriptions. Les sanctions pénales y occupent une place importante, faisant même l’objet
d’une discipline juridique, appelée droit pénal.
La sanction divine vise, elle, à la fois à punir les méchants, ceux qui auront enfreint les
préceptes religieux, et à récompenser les bons, ceux qui auront respecté lesdits préceptes. Les
premiers vont en enfer et les seconds au paradis, au ciel. Il faut toutefois compter avec la
grande miséricorde de Dieu.
Enfin, la nature et l’échelle des sanctions étatiques et divines sont différentes. Le
droit dispose d’un large éventail de peines. Celles-ci vont du simple blâme à la peine capitale
ou la prison à vie. La religion, du moins la religion chrétienne, énonce des sanctions, dont la
nature et l’échelle n’ont aucun rapport avec les sanctions étatiques. Ces sanctions, en allant du
mauvais au bien, ouvrent aux fidèles les portes de l’enfer, du purgatoire ou du paradis.
2 – Droit et morale

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Le droit se distingue de la morale. La morale peut s’entendre d’un corps de règles à
suivre pour faire le bien et éviter le mal. Ainsi, un individu peut être de bonne ou de mauvaise
moralité.
Les préceptes moraux, tout comme les préceptes religieux, inspirent les règles de droit. Il
en va ainsi, à titre d’exemples, de la bonne foi, du respect de la parole donnée, de la bonne
ou de la haute moralité, qui préside au recrutement de hauts fonctionnaires.
La notion juridique de bonnes mœurs qui est sans doute le point le plus saillant de
recoupement entre le droit et la morale, renvoie au consensus social existant à un moment
donné sur ce qu’il convient de faire sur le plan de la décence ou de la morale sexuelle.
Mais les deux types de règles se distinguent à la fois par leurs sources, leur contenu et les
sanctions de leurs violations.
a) La différence de sources
Les règles de droit et les préceptes moraux ne dérivent pas des mêmes sources. La
morale, à la différence du droit qui résulte de la volonté des gouvernants, puise généralement
sa source dans la conscience. Celle-ci peut être individuelle ou collective.
La conscience individuelle. La morale est, stricto sensu, individuelle. Elle ne concerne
qu’une personne donnée. Chacun a son idée ou sa conception du bien ou du mal. Cette
conception peut être différente de celle des autres. Elle peut être aigüe ou émoussée.
La conscience collective. La morale est également sociale, prenant en compte les
besoins et les aspirations de la collectivité dans laquelle vit l’individu. Cette collectivité peut
fortement influer sur la morale individuelle. Tout dépend de la capacité de résistance de
l’individu.
Ainsi, selon la force ou la faiblesse de caractère, la conscience individuelle peut être en
accord ou en désaccord avec la conscience collective.
b) La différence de contenu
Les deux types de règles se distinguent également par leur contenu et, ce, à un double
titre, par leurs domaines d’intervention et l’objectif poursuivi.
Les domaines d’intervention du droit et de la morale ne se recouvrent pas, ne
coïncident pas. Il en va ainsi au moins dans deux cas.
D’abord, à la différence du droit, la morale a un champ d’application très vaste. Elle
s’intéresse en effet aux devoirs de l’homme et, ce, non seulement dans ses rapports avec ses
semblables, mais encore avec la divinité.
Ensuite, le droit peut formuler des règles moralement neutres et même immorales. Il en
va de l’usucapion, avec la prescription trentenaire, grâce à laquelle le colon a acquis
frauduleusement la terre de nos ancêtres. Il en va de même de la taxation des prostituées,
bien que ce vieux métier pratiqué soit immoral. Il en va encore de même de la dépénalisation
de l’avortement. L’on peut ainsi relever que ce qui est permis n’est pas toujours honnête.
L’objectif poursuivi par les deux normes n’est pas le même. Le droit vise à assurer
l’ordre public et la paix sociale. La morale tend, au contraire, à la perfection de l’individu,
notamment au niveau spirituel de sa conscience individuelle. L’individu cherche à être en
règle, en phase avec sa conscience. Cette quête de la perfection conduit la morale à imposer
des devoirs de charité, rejoignant en cela la religion.

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c) La différence des sanctions
Droit et morale se distinguent enfin par les sanctions qu’ils infligent à leurs
manquements. Il en va particulièrement ainsi de l’origine de ses sanctions :
L’origine externe des sanctions des violations de la règle de droit : c’est l’État qui, par
l’intermédiaire de ses organes, institue les sanctions au manquement des règles de droit (le
législateur), les prononce (le juge) et les exécute (l’exécutif).
Les sanctions varient en fonction de la nature du préjudice. Elles peuvent en effet être
soit matérielles (amende, révocation, emprisonnement) soit morales (blâme, avertissement,
présentation d’excuses publiques).
L’origine interne des sanctions des violations des préceptes moraux : c’est la
conscience qui reste le seul juge de l’individu. Il en va de la conscience individuelle, qui le
« gronde », lorsqu’il a fait le mal. Il en va de même de la conscience collective, qui
prononcera la sanction, si le comportement immoral est public. C’est le cas de la réprobation
populaire, lorsque par exemple, il a été porté atteinte à la pudeur publique ou qu’un individu a
été pris en flagrant délit de vol. Dans cette dernière hypothèse, la peine encourue risque d’être
très lourde, passant de simple blâme (réprobation) au lynchage jusqu’à ce que coups et
blessures graves ou mort s’ensuivent.
3 – Droit et règles de convenance
En dehors de la religion et de la morale, il existe d’autres règles sociales non juridiques
qui guident les comportements. Ces règles proposent des valeurs et imposent par ce fait des
manières d’être et de faire en société.
Les règles de convenance également appelées règles de bienséance (Jean Louis
BERGEL ; Jean CARBONNIER) ou des règles de mœurs (François TERRÉ) sont des règles
qui imposent des comportements nécessaires à la coexistence des hommes en société ; il s’agit
surtout des règles de savoir-vivre qui apportent une certaine qualité de vie ainsi que des
marques de distinction sociale. Elles portent sur la politesse et l’éducation, la courtoisie (les
salutations), les usages spécifiques (les pourboires facultatifs), l’hygiène, etc.
 Les règles de convenance ne sont pas des règles de droit. Elles font parties de ce
que le doyen CARBONNIER appelle le « non-droit ».
Les individus s’y conforment spontanément et librement. Ils peuvent s’y refuser au risque
de passer pour mal élevés, maladroits, impolis, goujats. Ils peuvent de ce fait être soit tolérés
avec un regard moqueur ou de mépris, soit rejetés par le groupe social.
C’est le cas du jeune homme qui ne salue personne, quand il arrive à un endroit donné ; ou
qui se tient assis et tend le premier la main pour saluer une dame ou une personne âgée ; ou
qui refuse de céder sa place, dans le bus, à une personne âgée ou handicapée.
C’est le cas également de la jeune fille, qui est totalement en marge de la mode ou
s’habille mal, ne tenant aucun compte des usages vestimentaires. Que diriez-vous de la jeune
fille qui porte un manteau de fourrure ou des bottes en daim, en plein soleil, dans les rues de
Yamoussoukro ?
 Certaines d’entre elles peuvent être sanctionnées par le droit. Elles deviennent, de
ce fait, des règles de droit. Ces règles revêtent alors un caractère obligatoire et l’on est
tenu de s’y conformer.

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Un exemple, c’est l’interdiction de fumer dans certains lieux publics. La réglementation y
afférente sanctionne les « sans gêne », qui se mettent à fumer sans tenir compte de leurs
voisins et les ignorent purement et simplement.
B. – Les caractères spécifiques de la règle de droit
Les règles de droit sont, à la différence des autres règles de conduite sociale, celles qui
revêtent des caractéristiques bien précises. Celles-ci, véritables conditions cumulatives sont au
nombre de trois. Les règles sociales ne peuvent prétendre à la qualité de normes juridiques
que si elles sont étatiques, générales et impersonnelles et obligatoires.
1 – Le caractère étatique
Le caractère étatique de la règle de droit procède de ce que l’État dispose seul, à la fois
du pouvoir de l’édicter et de celui de l’imposer par la contrainte. Il s’ensuit le double
monopole de l’édiction et de la contrainte.
a) Le monopole de l’édiction
L’État, par ses organes, élabore la règle de droit (lois, règlements) ou en fixe les
conditions (contrats). La norme sociale ne devient donc juridique que si elle a reçu
l’empreinte ou le sceau de l’État.
b) Le monopole de la contrainte
La règle de droit est sanctionnée par la contrainte étatique. En effet, l’État, qui a édicté la
règle de droit, va pouvoir la faire respecter, au besoin, par la contrainte, c’est-à-dire la force
publique. La contrainte de l’État est organisée et se manifeste par les sanctions infligées.
i) Une contrainte organisée
L’État est caractérisé par ce que Max WEBER appelle « le monopole de la contrainte
organisée ». L’État dispose seul de la force publique, à l’exclusion de toute autre institution,
nationale ou internationale. Ce monopole est destiné à assurer l’effectivité de la
souveraineté interne, par le maintien de l’ordre public interne (rôle de la Police et de la
Gendarmerie), et international, par la défense du territoire national contre des agressions
extérieures (rôle de l’Armée). Et, dès lors que l’État perd le monopole de la contrainte et que
celle-ci est également exercée par des groupes privés, des rebelles ou des milices, l’on aboutit
à l’anarchie, qui affecte la souveraineté et met en cause l’existence même de l’État. L’on
comprend dès lors que la police, prérogative de puissance publique par excellence, soit une
fonction monopolistique de l’Administration. Aussi, est-il fait interdiction à celle-ci d’en
déléguer l’exercice à des particuliers.
L’État met la force publique au service de la règle de droit. Celle-ci est assortie de
sanctions qui visent à dissuader et au besoin, réprimer.
ii) Des sanctions infligés
Les sanctions prévues et susceptibles d’être prononcées par les autorités compétentes
(surtout judiciaires) et, au besoin, exécutées par la force publique, revêtent diverses formes.
Elles comprennent les sanctions administratives, civiles et pénales.
― Les sanctions administratives sont prononcées par certaines autorités
administratives. On peut mentionner : les sanctions disciplinaires, qui interviennent en cas de
manquement à la discipline et vont du blâme à la révocation en passant par la suspension
temporaire ;
― Les sanctions civiles sont prononcées par les tribunaux et ne concerne que les
rapports des individus entre eux. Elles sont généralement destinées à réparer le préjudice
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causé à une personne par une autre. Elles peuvent consister à annuler un acte juridique (tel un
contrat : une vente illicite) ; condamner une personne à exécuter un acte juridique (ordre
donné, contrat) ou à payer des dommages-intérêts.
― Les sanctions pénales sont les peines les plus graves, car l’infraction qu’elles
sanctionnent mettent en jeu les rapports de l’individu avec la société. Les sanctions pénales
affectent les droits fondamentaux de l’individu : sa liberté et même sa vie. Les peines
privatives de liberté sont l’emprisonnement à temps et à perpétuité. Mais, la peine la plus
sévère est la peine capitale. L’individu, auteur d’une faute très grave (meurtre ou génocide) et
condamné par les tribunaux pénaux, est privé de son droit à la vie.
La spécificité de la règle de droit réside dans le fait que les sanctions, prévues pour
vaincre la résistance des citoyens récalcitrants, seront effectivement exécutées par les
autorités compétentes, en ayant recourt à la force publique. Il appartient à l’appareil judiciaire
de prononcer les sanctions et d’ordonner à l’exécutif d’user de la force publique pour les
exécuter.

2 – Le caractère général et impersonnel


La règle de droit édictée par l’État revêt un caractère général et impersonnel. Mais, ce
caractère, dont il importe d’appréhender la notion, est d’une portée limitée.
a) La notion de généralité
On dit que la règle de droit est générale ou impersonnelle ou encore objective, du fait
qu’elle s’adresse, à l’ensemble des personnes d’une société donnée. Mais, pour mieux cerner
ce caractère, il importe de passer en revue ses éléments constitutifs que sont la généralité et
l’impersonnalité.
 La généralité recouvre deux données essentielles et étroitement liées.
La première, c’est que la règle de droit a vocation à s’appliquer, non à telle ou telle
personne ou à un groupe de personnes, mais à l’ensemble des individus qui composent la
société.
La seconde donnée, c’est que la règle de droit ne particularise pas, ne discrimine pas.
Aussi, les personnes visées doivent-elles être traitées de la même manière, c’est-à-dire sur un
pied de stricte égalité.
 L’impersonnalité vient éluder [éclairer] davantage le caractère général de la règle de
droit. Celle-ci ne s’intéresse pas aux personnes en elles-mêmes, à leur situation
concrète et particulière. La règle juridique n’envisage les personnes que de manière
impersonnelle et abstraite. Il en résulte au moins deux conséquences, qui se
rapportent aux mesures individuelles et à l’indifférence du nombre des personnes
visées.
Les mesures ou décisions individuelles sont des actes édictés par les autorités
administratives et qui visent personnellement leurs destinataires. Ce sont des actes subjectifs,
qui se distinguent, de ce fait, de la règle de droit. Constituent ainsi des mesures individuelles
les nominations ou les révocations de fonctionnaires ou agents de l’’État.
L’indifférence du nombre de personnes visées par la règle de droit atteste son caractère
impersonnel. Celle-ci s’adresse indistinctement, abstraitement, à ses destinataires, sans tenir
aucun compte de leur nombre. Ainsi une décision conférant une décoration, dans l’ordre
national du mérite, à des milliers de personnes, n’est pas une règle de droit.

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Une règle de droit peut en revanche s’appliquer à une seule personne. Il en va ainsi des
règles relatives aux conditions d’éligibilité du Président de la République (art. 55 de la
Constit.). Ces règles s’appliquent à tous les candidats potentiels, mais n’aboutiront qu’à
l’élection d’un seul et unique titulaire.
b) La portée limitée de la généralité
Le caractère général et impersonnel de la règle de droit souffre de régimes
particuliers qui en réduisent la portée. En effet, si la règle de droit est la même pour tous,
cela ne veut pas dire qu’elle s’applique indifféremment à tous, à toutes les catégories de
personnes. La généralité signifie que les mêmes normes juridiques s’appliquent aux
personnes qui se trouvent dans les mêmes conditions.
Ainsi, les commerçants seront régis par les règles du droit commercial. De même,
les fonctionnaires se verront appliquer les dispositions du statut général de la fonction
publique, tandis que les salariés du secteur privé seront régis par les dispositions du Code
du travail.
Les règles particulières ne perdent pas pour autant leur caractère de généralité
ou d’impersonnalité. La catégorie de personne qu’elle régit est en effet perçue de
manière abstraite et objective : les commerçants, les fonctionnaires, les salariés du
secteur privé, etc.

3 – Le caractère obligatoire
a) La notion d’obligation
L’obligation est définie comme le « lien de droit par lequel une personne est tenue de
faire ou de ne pas faire quelque chose » (cf. Le Petit LAROUSSE). La règle de droit une fois
adoptée, lorsque les conditions de validité sont réunies, est obligatoire. Elle s’impose de ce
fait à ses destinataires. Ceux-ci n’ont pas un consentement à donner, ni même un avis à
émettre. Ils n’ont pas davantage le choix de respecter ou de ne pas respecter la loi, l’appliquer
ou ne pas l’appliquer. La règle de droit n’a donc pas un caractère facultatif, mais obligatoire.
Une obligation qui s’impose absolument.
Remarque : pour pouvoir remplir son but : assurer la sécurité dans la société, le
caractère obligatoire de la règle de droit doit être assorti de sanctions appuyées par
l’autorité publique. C’est ce caractère sanctionnateur et plus spécialement encore, le fait que
cette sanction à un caractère étatique, que la contrainte se manifeste par la possibilité de
recourir à la force publique, qui permet de distinguer la règle de droit d’autres règles de
conduite.
b) Les degrés de la force obligatoire
Le caractère obligatoire de la règle de droit doit être nuancé car il existe des degrés dans la
force obligatoire. En effet, suivant le degré de force obligatoire qu’elles revêtent, on distingue
deux catégories de règles de droit : d’une part, les règles supplétives, dispositives ou
interprétatives et, d’autre part, les règles impératives et d’ordre public.
i) Les règles supplétives, dispositives ou interprétatives
Une règle supplétive supplée à la volonté des contractants, c’est-à-dire qu’elle
s’applique si ceux-ci n’ont rien prévu. Ils peuvent cependant par l’expression de leur volonté,
écarter l’application de cette règle. Ainsi, l’art. 1651 du Code civil prévoit que si les parties
n’ont rien prévu à cet égard dans leur contrat, « l’acheteur doit payer au lieu et dans le temps

14
où doit se faire la délivrance », les contractants peuvent alors au contraire prévoir que le
paiement aura lieu avant ou après la livraison.
Une règle est interprétative de la volonté des contractants, en ce qu’ils se sont référés
implicitement à la règle formulée par le législateur.
Enfin, une règle dispositive est une règle à la disposition des citoyens, que ces derniers
peuvent choisir d’adopter à condition de le déclarer expressément. Mais une fois que la
volonté s’est manifestée dans un sens ou dans un autre, la règle choisie devient obligatoire.
ii) Les règles impératives et d’ordre public
Tout comme les précédentes, ces règles sont obligatoires. Mais, à la différence de celle-
là, celles-ci ne sont pas dérogeables. Il importe cependant de nuancer en distinguant les règles
impératives de celles d’ordre public.
Les règles impératives s’imposent aux citoyens qui ne peuvent en écarter
l’application. Le Code civil fournit là également un exemple assez significatif. La loi sur la
capacité de la femme mariée est impérative. Aussi, les deux époux ne peuvent s’entendre pour
y déroger et placer la femme sous la « tutelle » maritale. La loi n° 2019-570 du 26 juin 2019
relative au mariage est d’ailleurs assez nette sur ce point. L’art. 66 prescrit en effet : « Chaque
époux a a la pleine capacité juridique. Toutefois, ses droits et pouvoirs sont limités par l’effet
du régime matrimonial et les dispositions ci-après ».
Toutefois, les règles impératives peuvent souffrir de dérogations ou de dispenses
accordées par les autorités administratives ou judiciaires. Ainsi, une dispense d’âge peut
être accordée par le Procureur de la République au jeune, qui n’est pas en âge de se marier.
Dans ce dernier cas, la dispense vient déroger au principe de l’âge matrimonial, qui est
désormais fixé à dix-huit ans pour la femme et pour l’homme.
Les règles d’ordre public sont une catégorie particulière de règles impératives, dont
la force contraignante est très accentuée. Elles ne souffrent d’aucune dérogation.
L’ordre public, qui participe de la conception générale du droit, est consacré par l’art. 6 du
Code civil qui dispose que : « On ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois
qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs ».
Il en va ainsi du respect des droits fondamentaux de la personne, du principe de
l’inaliénabilité du domaine public, de l’interdiction de l’exercice des compétences de police
par des particuliers.
iii) La reconnaissance du caractère impératif ou non de la règle de droit
La question qui se pose est de savoir comment reconnaître qu’une règle déterminée revêt
un caractère impératif ou, au contraire dispositif, supplétif ou interprétatif. Il n’existe pas de
critère précis et l’on doit s’en remettre au législateur et, à défaut, au juge.
La volonté du législateur – Lorsque le législateur s’est prononcé expressément, aucune
difficulté ne se présente, relativement au caractère impératif ou non de la règle de droit. Dans
des cas, du reste, rares, le législateur se prononce sur l’impérativité des règles qu’il édicte.
Celles-ci sont alors suivies des mots : « à peine de nullité » ou encore « cette disposition est
d’ordre public ».
L’interprétation du juge – Lorsque la loi reste silencieuse sur la question, la difficulté
surgit. Il revient alors au juge, à l’occasion d’un litige, d’interpréter la loi pour dire si elle
revêt un caractère impératif ou, au contraire, dispositif, interprétatif ou supplétif.

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Chapitre IV : Histoire du droit
(Voir les éléments exposés lors de la séance magistrale)

Titre III : Les sources du droit


Les sources du droit sont les modalités d’établissement de la règle de droit, les matières
diverses d’établissement de la règle de droit. En droit interne, la loi est la source du droit au
sens large avec en première ligne la constitution. A côté du droit interne, il faut prendre en
compte l’ordre international dont le rôle dans la création du droit est de plus en plus
important.

Chapitre I : Sources internationales


Section I : Les principaux traités et accords internationaux
Il existe plusieurs types de textes internationaux :
-les traités bilatéraux ou multilatéraux qui ont pour vocation de permettre la réalisation
d’opérations juridiques dans un domaine particulier (traité de commerce par exemple) ;
-les traités qui ont pour vocation de permettre une harmonisation des règles applicables dans
une matière ;
-les conventions internationales qui tendent à proclamer et à défendre les droits fondamentaux
de toute personne (la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 adoptée par
l’Assemblée générale des Nations Unies

Section II : La place des traités et accords interraciaux dans l’ordre juridique interne
Les traités et accords internationaux occupent une place intermédiaire entre la Constitution à
laquelle ils ne doivent pas être contraire et les lois internes qui doivent leur être conformes. La
suprématie accordée aux engagements internationaux ne s’applique pas dans l’ordre interne
aux dispositions de valeur constitutionnelle. S’ils contiennent une clause contraire à la
constitution, l’autorisation de ratification ne peut intervenir qu’après révision de la
constitution.
Par ailleurs, les traités ou accords régulièrement ratifiés ont une autorité supérieure à celle des
lois internes mais sous réserve de réciprocité c’est-à-dire de leur application par l’autre ou les
autres parties signataires.

Chapitre II : Sources communautaires


Section I : notion de droit communautaire
§1 : Le droit communautaire s'entend de l'ensemble des normes juridiques d'une
organisation intergouvernementale d'intégration régionale. Par exemple le droit OHADA, le
droit de l’Union européenne, le droit de l’Union africaine, le droit de la CEDEAO, le droit de
la CIMA, etc. Le droit communautaire se rapproche à la fois du droit international public et

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du droit international privé. Cette "bi-appartenance" se manifeste par ses sources, ses
domaines d'intervention et les effets des actes édictés.
§2 : Les sources du droit communautaire
Les sources du droit communautaire relèvent du droit international public. Il en va
ainsi qu'il s'agisse du droit communautaire primaire ou du droit communautaire dérivé.
Le droit communautaire primaire est constitué de l'ensemble des traités et accords
internationaux créant l'organisation régionale ou sous-régionale.
Exemple 1 : le Traité de Lagos en date du 28 mai 1975 instituant la Communauté
Économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) plusieurs fois révisé. Cette
organisation se compose de 15 États membres.
Exemple 2 : le Traité de Port-Louis (Île-Maurice), daté du 17 octobre 1993 créant
l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) révisé le 17
octobre 2008 à Québec. L'OHADA regroupe 17 États membres.
Exemple 3 : le Traité instituant la Conférence Interafricaine des Marchés d'Assurances
(CIMA) signé le 10 juillet 1992 à Yaoundé, par les 14 États africains de la zone Franc et qui a
également pour objectif l'harmonisation des législations en matière d'assurance (Code CIMA).
Le droit communautaire dérivé des traités est, quant à lui, constitué par l'ensemble des
normes juridiques édictées par les différentes instances de l'organisation internationale.
Celles-ci ont ainsi reçu compétence pour produire des actes juridiques internationaux, tels que
les règlements de la CEDEAO (art. 9), les actes uniformes de l'OHADA (art. 10) ou encore
les directives, décisions, recommandations et avis desdites instances.
§3 : Les domaines d'intervention
Les domaines d'intervention sont assez diversifiés et embrassent aussi bien le droit
public que le droit privé. Ainsi, les politiques communes en matière économique,
commerciale, monétaire et douanière, qui affectent la souveraineté des États membres,
relèvent du droit public (CEDEAO). En revanche, le droit des assurances (Code CIMA), les
contrats de transport de marchandises, ou le droit commercial en général (OHADA)
appartiennent au droit privé.
Les normes juridiques édictées par les instances communautaires viennent se substituer
au droit interne des États. Exemple : l'Acte uniforme OHADA portant droit commercial
général a succédé au code colonial français de 1807.
Section II : Les effets juridiques des actes communautaires
Les effets juridiques des actes communautaires présentent, par rapport au droit commun
des normes internationales, une double originalité. Tout d'abord, les normes
communautaires sont dans la plupart des cas "directement applicables". Elles entrent
donc immédiatement en vigueur en l'absence de toute procédure de transformation en normes
internes ou de réception. Ensuite, elles créent directement des droits au profit des
particuliers. Ceux-ci peuvent s'en prévaloir et en invoquer le bénéfice devant les instances
politiques ou juridictionnelles.

Chapitre III : Sources nationales : étatiques et professionnelles


Le terme de « source » revêt deux sens bien distincts. Le premier se réfère à l’ensemble
des forces ou facteurs socio-économiques et politiques, qui conditionnent l’existence et le

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contenu des normes juridiques : ce sont les sources matérielles. Le second sens correspond
au processus technique de formation des normes juridiques, au mode d’élaboration des
règles de droit : ce sont les sources formelles. Seules ces dernières nous intéressent.
Les sources formelles du droit forment un ensemble assez cohérent, dénommé « bloc
légal » ou « bloc de légalité » ou encore « pyramide de légalité ». Ces sources de la légalité
sont assez diversifiées. On les classe en deux grandes catégories, selon qu’elles sont écrites ou
non.

Section I : Les sources nationales étatiques


Sous-section 1. – Les sources nationales écrites ou sources directes du droit
Les sources écrites du droit sont celles qui sont consignées dans des documents
spécifiques, dénommés, dans une acception générique, textes de lois. Ce sont généralement la
constitution, les traités ou accords internationaux, les lois et les règlements.
§ 1. – La Constitution
La constitution est un ensemble de règles ayant pour objet d’assurer l’organisation et le
fonctionnement des différentes institutions composant l’État. Elle peut prendre une forme
écrite ou non écrite ; mais la constitution écrite demeure la plus répandue. Dans sa forme
écrite, la constitution apparaît plus visiblement comme la norme fondamentale de l’État et la
norme suprême dans l’État (A) ; elle est par ailleurs structurée en deux parties (B).
A. – La constitution, norme fondamentale de l’État et norme suprême dans l’État
La constitution, loi fondamentale de l’État. La constitution est l’acte par lequel l’État
accède à l’existence juridique. C’est la constitution qui fonde juridiquement l’État. En
d’autres termes, c’est la constitution qui crée l’État, qui est l’acte fondateur de l’État, ou
encore qui donne une existence juridique à l’État. C’est à ce titre qu’elle est appelée la norme
ou la loi fondamentale. La Côte d'Ivoire s'est dotée d'une nouvelle Constitution depuis le 08
novembre 2016. C'est la Loi n° 2016-886 du 08 novembre 2016 portant Constitution de la
République de Côte d'Ivoire, publiée au JORCI du 9 novembre 2016. Cette nouvelle
Constitution remplace celle du 1er août 2000 et fonde la troisième République de Côte d'Ivoire.
La constitution, norme suprême dans l’État. Par ailleurs, les règles de droit forment,
comme déjà indiqué, un système pyramidal. Elles sont hiérarchisées. C'est la raison pour
laquelle il existe une hiérarchie des normes juridiques. La Constitution, en sa qualité de loi
fondamentale, est la norme suprême de l'État. Elle constitue la norme de référence à
laquelle toutes les autres doivent être conformes.
La loi fondamentale, en tant que norme suprême de l'État, se place au sommet de la
pyramide juridique que constitue la hiérarchie des normes juridiques. Elle s'impose de ce
fait à toutes les autres normes nationales. Celles-ci lui doivent respect, sous peine d'encourir
l'annulation pour inconstitutionnalité.
B. – La constitution, norme structurée en deux parties
Les constitutions modernes sont structurées en deux parties formellement inégales : le
préambule et le dispositif ou corpus constitutionnel (corps de la constitution). La nouvelle
Constitution ivoirienne comprend ainsi un préambule qui fait partie intégrante de la
Constitution et un dispositif composé de 184 articles (133 dans l'ancienne Constitution)

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subdivisés en Titres, Chapitres et en Articles. La nouvelle Constitution ivoirienne comporte
de nombreuses innovations (voir document annexe).
1 – Le préambule
Le préambule est un préliminaire, généralement très bref, qui exprime la philosophie
politique et sociale de l’État. Il en va ainsi du préambule de la Constitution des États-Unis
d’Amérique du 17 septembre 1787, qui déclare avec une brièveté remarquable :
« Nous, Peuple des États-Unis, en vue de former une Union plus parfaite, d’établir la
justice, de faire régner la paix intérieure, de pourvoir à la défense commune, de développer
le bien-être général et d’assurer les bienfaits de la liberté à nous-même et à notre postérité,
nous décrétons et établissons cette Constitution pour les États-Unis d’Amérique ».
A contrario, depuis le renouveau démocratique des années 1990, les préambules des
Constitutions des États d’Afrique paraissent relativement longs. Cela d’autant qu’ils exposent,
dans leur majorité, la philosophie politique de l’État et surtout la vision socio-politique des
peuples en quête d’une liberté et d’une identité fondées sur des valeurs intangibles.
2 – Le dispositif
D’une façon générale, l’objet du dispositif constitutionnel consiste à définir avec
précision les droits et libertés fondamentaux et surtout à organiser le pouvoir politique d’État.
Les différents titres consacrent les règles relatives aux droits, libertés et devoirs de l'homme ;
à l'État et à la souveraineté ; aux pouvoirs publics (notamment législatif, exécutif et
judiciaire), leur mode de désignation, leur attribution, leur rapport ; la fixation des modes de
dévolution et d'exercice du pouvoir politique ; l'organisation de l'administration locale et la
coopération internationale; aux traités et accords internationaux, à l'association et à la
coopération entre États ; à la révision de la Constitution.
§ 2. – La loi
Bien que se trouvant dans un rapport de subordination à la constitution et au traité, la loi
demeure la principale source écrite, en ce que la grande majorité des rapports de droit est
régie par des lois. Il peut arriver que la constitution soit suspendue à l’issue d’un coup d’État ;
mais les lois ne cessent pas pour autant de régir la vie sociale.
A. – La définition de la loi
La loi est un mot à sens multiple ou polysémique. Elle est définie aussi bien au sens
matériel qu'au sens formel ; et même en retenant le sens formel, il faut faire une distinction
entre la loi ordinaire et les autres lois.
1 – La définition matérielle et la définition formelle de la loi
La définition matérielle appréhende la loi dans une acception large. Pris dans un sens
large, le mot loi désigne toute norme émanant de l’autorité publique et présentant les
caractères : général, impersonnel et obligatoire. Au sens large, la loi désigne tout acte de
portée générale pris par une autorité étatique compétente pour régir une situation. Ici la loi
s’identifie à la notion de règle de droit. Elle s’analyse en un acte de législation par
opposition à l’acte conventionnel (ou contractuel).
Dans ce sens, la loi peut désigner une diversité d’actes juridiques. Ceux-ci peuvent
revêtir ou non la nature de loi. Il en va ainsi, dans le premier cas, de la Constitution, qui est
une loi, la loi fondamentale ou loi constitutionnelle. Il en va de même du règlement, qui n’a
pas la nature formelle de loi, mais qui, en raison de ses caractères général et impersonnel, est

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assimilé à celle-ci. La définition matérielle est si imprécise et si générale que le souci de clarté
invite à spécifier ce qu’est la loi au sens formel et organique.
La définition formelle et organique appréhende la loi en considération de l’autorité qui
en est l’auteur. Au sens formel et organique, la loi s’entend de l’acte voté par le parlement
et promulgué par le Chef de l’État. L’article 85 Constitution précise que « le pouvoir
législatif est exercé par le Parlement. Le Parlement est composé de l’Assemblée nationale et
du Sénat ».
Dans ce sens, la loi se distingue du règlement qui, émane, non plus du parlement, mais du
gouvernement, plus précisément de l’autorité exécutive ou administrative, par opposition à
l’autorité législative. La nature de la loi stricto sensu la distingue ainsi du règlement.
2 – Les différents types de lois
Le juriste fait la distinction principalement entre la loi ordinaire, la loi organique, la loi
référendaire et la loi constitutionnelle.
a) Les lois ordinaires
Le caractère ordinaire permet de distinguer la loi proprement dite des autres lois.
L’ordinaire s’oppose, sinon à l’extraordinaire, à tout le moins à l’exceptionnel, au particulier.
Le caractère spécifique des autres lois, par opposition à la loi ordinaire, réside à la fois dans
leur objet et leur procédure d’élaboration. Il en va ainsi des lois constitutionnelles, organiques
et référendaires.
Domaine de la loi ordinaire. La loi ordinaire est adoptée selon la procédure ordinaire à
la majorité simple des parlementaires. Elle a pour objet de fixer, en application de la
constitution, les grandes orientations de la politique de la nation. Elle fixe les règles
essentielles et détermine les principes fondamentaux de l’État et de ses démembrements. Il lui
est de ce fait attribué un domaine d’intervention relativement vaste. Certes, les matières
relevant de sa compétence sont limitativement énumérées (voir art. 101 Constitution). Mais,
elles demeurent les plus importantes : la citoyenneté, la nationalité, l’état et la capacité des
personnes, le statut général de la fonction publique, la détermination des crimes et délits, etc.
En la forme, la loi ordinaire, demeure la loi par excellence, le droit commun législatif.
Le constituant n’use pas de l’adjectif « ordinaire », tandis qu’il qualifie les autres lois, telle la
loi organique, la loi constitutionnelle… Et toute la Constitution ne connaît que la loi. La
doctrine n’a recours à l’ordinaire que pour des raisons de commodité pratique, permettant de
l’identifier. Ainsi, en l’absence de toute précision, de toute qualification, l’on est en présence
de la loi ordinaire. Ex. : la loi n° 2015-532 du 20 juillet 2015 portant Code du travail.
b) La loi constitutionnelle
La loi constitutionnelle a pour objet l’établissement ou la révision de la Constitution. La
loi constitutionnelle définit les droits fondamentaux, fixe l’organisation des pouvoirs et
détermine leurs rapports réciproques. En clair, la loi constitutionnelle, c’est la constitution.
Avec l’avènement de la troisième République en Côte d’Ivoire, c’est la Loi n° 2016-886 du
16 novembre 2016 portant Constitution de la République de Côte d’Ivoire.
c) Les lois organiques
Les lois organiques « sont celles qui ont pour objet de préciser ou de compléter les
dispositions relatives à l’organisation ou au fonctionnement des institutions, structures et
systèmes prévus ou qualifiés comme tels par la Constitution » (art. 102, al. 1er Constitution).
4 – Les lois référendaires

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Le parlement adopte les lois au nom de la souveraineté nationale qu’il représente. Le
peuple peut cependant exercer lui-même ce pouvoir. Ces lois dites référendaires sont
prévues par l’art. 75 Constitution. Le président de la République peut ainsi soumettre au
référendum « tout texte ou toute question qui lui paraît devoir exiger la consultation directe
du peuple ». Certes, la loi référendaire peut revêtir la nature d’une loi ordinaire ou d’une loi
constitutionnelle. Mais sa spécificité réside dans le fait qu’elle est adoptée, non par le
Parlement, mais directement par le peuple souverain, par la voie du référendum. Elle échappe
de ce fait au contrôle de constitutionnalité.
La loi référendaire était inconnue de la pratique institutionnelle en CI, avant que ne soient
adoptées par le référendum des 23 et 24 juillet 2000, deux lois référendaires. L’une est une loi
constitutionnelle : Loi n° 2000-513 du 1er août 2000 portant Constitution de la CI. L’autre
est une loi ordinaire : la loi n° 2000-514 du 1er août 2000 relative au Code électoral.
B. – L’existence juridique de la loi
La loi, norme édictée par le pouvoir législatif, ne vient à l’existence juridique qu’à l’issue
de son élaboration et par l’entremise de son entrée en vigueur.
1 – L’élaboration de la loi
Comment s’élabore la loi ? On sait qu’à l’époque la plus ancienne le droit et la religion
étaient indifférenciées. C’est sous la forme d’oracles que la loi était édictée, et le Roi
législateur n’était qu’un représentant par qui Dieu parlait aux hommes. À la suite d’un
processus de laïcisation, la loi s’exprima par les autorités de l’État.
L’article 93 Constitution dispose que « Le Parlement vote la loi et consent l’impôt ».
Cette disposition pose un principe péremptoire selon lequel le Parlement est la seule autorité
pouvant créer la loi. Toute loi émane en conséquence du Parlement. Mais, tous les actes
édictés par le Parlement ne sont pas des lois. La loi est une règle générale et impersonnelle ;
elle se distingue ainsi d’une résolution adoptée par le Parlement.
La loi étant l’expression de la volonté générale, son élaboration doit être opérée avec
soin. Le processus d’élaboration de la loi passe ainsi par deux moments : l’initiative et
l’adoption.
a) L’initiative de la loi
L’initiative de la loi est partagée par le PR et les membres du parlement (art. 74
Constitution). Le projet de loi est un projet de texte dont l’initiative est du pouvoir exécutif.
La proposition de loi est un projet de texte dont l’initiative est du pouvoir législatif.
b) L’adoption de la loi
La loi est discutée en commission puis en assemblée plénière. Elle est votée par le
parlement. Les art. 109 et 110 de la Constitution décrivent la procédure d’adoption de la loi
par le Parlement. Une loi simplement élaborée n’est applicable que si elle entre en vigueur.
2 – L’entrée en vigueur de la loi
L’entrée en vigueur est soumise à deux conditions : la promulgation et la publication.
a) La promulgation de la loi
La définition de la promulgation : C’est l’acte (un décret) par lequel le Chef de l’État
atteste de l’existence de la loi (le parlement l’ayant définitivement et régulièrement votée) et
ordonne aux autorités publiques de l’exécuter et de la faire observer.

22
Les délais de promulgation : La loi doit être promulguée par le Président de la
République dans les trente jours qui suivent la transmission qui lui est faite de la loi
définitivement adoptée par le Parlement ; ou dans les 5 jours en cas d’urgence (article 74
alinéa 2 Constitution).
La sanction du défaut de promulgation. L’article 74 de la Constitution, qui met à la
charge du président de la République, l’obligation de promulguer la loi dans les délais
impartis, l’assortit d’une sanction. Le Conseil Constitutionnel, saisi par le président de
l’assemblée nationale ou par le président du sénat, peut en effet déclarer « exécutoire » la loi
non promulguée dans les délais impartis.
Art. 74 Constitution : « Une loi non promulguée par le Président de la République
jusqu’à l’expiration des délais prévus au présent article est déclarée exécutoire par le
Conseil constitutionnel saisi par le Président de l’une des deux chambres du Parlement, si
elle est conforme à la Constitution ».
La portée de la promulgation : C’est la date de promulgation qui constitue la date de
naissance de la loi. La promulgation rend la loi opposable à l’administration. Outre la date, la
loi comporte un numéro. Ainsi, on sait de la loi n° 78-07 du 9 janvier 1978 portant institution
des communes de plein exercice en Côte d’Ivoire qu’elle a été promulguée le 9 janvier 1978,
et que ce fut la 7e loi à l’être pour l’année 1978.
Exercice : déterminer la date de promulgation et le numéro de la loi n° 2016-886 du 8
novembre 2016, portant Constitution de la République de Côte d’Ivoire.

b) La publication de la loi
Définition de la publication. Au sens étymologique, publier, c’est porter à la
connaissance du peuple. La publication est le mode de publicité général et impersonnel, au
contraire de la notification qui est un mode de publicité individuel.
Mode de publication. La publication est généralement faite par l’insertion du texte au
Journal officiel de la République de Côte d’Ivoire. Exceptionnellement, une publication
d’urgence peut être opérée par affichage dans les préfectures ou par annonce radio.
Effet de la publication. C’est la publication qui justifie la maxime : Nemo censetur
ignorare legem. Mais c’est un principe d’une portée relative, car faut-il encore que la règle de
droit entre dans les mœurs.
La loi entre en vigueur et est rendue opposable aux citoyens trois jours francs après la
publication. Le délai légal d’information est de trois jours francs, à compter de la
publication. Pour calculer le jour franc, on ne tient compte ni du jour qui sert de point de
départ, dies a quo, ni de celui qui sert de point d’arrivée, dies ad quem.
Exemple 1 : Une loi ou un décret publié le 14 octobre 2019 ne sera opposable aux
citoyens qu’à partir du 18 octobre.
Exemple 2 : une loi ou un décret publié le 1 er janvier 1980 ne sera opposable aux citoyens
qu’à partir du 5 janvier.

C. – L’autorité de la loi dans le temps


Aucune loi n’est éternelle, toutes peuvent changer. Les conflits de lois dans le temps sont
une question difficile. Pendant longtemps, la question a été dominée par la théorie des droits
acquis ; depuis une soixantaine d’années, une autre analyse est apparue, au moins en doctrine,
l’effet immédiat des lois nouvelles.

23
En 1929, la controverse sur les conflits de lois dans le temps a été renouvelée par Paul
ROUBIER : un principe nouveau a dominé la question. Désormais, la solution des conflits de
lois dans le temps serait non le respect des droits acquis, mais plutôt l’application
immédiate de la loi nouvelle : une situation juridique serait régie par la loi en vigueur au
moment où elle se produit.
1 – Le principe : l’application immédiate de la loi nouvelle
Selon l’article 2 du Code civil, « la loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’a point d’effet
rétroactif ». Le principe est que la loi nouvelle a un effet immédiat : elle s’applique
immédiatement aux situations juridiques qui s’accomplissent pendant sa mise en vigueur,
tandis que tout ce qui est passé reste soumis à la loi ancienne. L’assertion règle donc à la fois
le passé et le futur.
― La constitution ou l’extinction d’une situation juridique. Pour juger si une
situation juridique s’est valablement constituée ou éteinte, il faut considérer la loi en vigueur
au jour de cette constitution ou de cette extinction. Ainsi, une situation juridique valablement
constituée sous l’ancienne loi ne devient pas irrégulière au seul motif que la loi nouvelle pose
d’autres exigences non satisfaites à l’époque.
― Les effets d’une situation juridique en cours. La loi nouvelle s’applique aux effets à
venir des situations juridiques en cours au moment où elle entre en vigueur. Les effets passés
restent en revanche régis par la loi ancienne. Par exemple une loi qui modifie les conditions
d’exercice. Par exemple une loi qui modifie les conditions d’exercice de l’autorité parentale
s’appliquera immédiatement à toutes les filiations en cours.
2 – Les exceptions : la rétroactivité et la survie de la loi ancienne
― La rétroactivité de la loi. La non-rétroactivité des lois est un principe général du
droit. Si cette règle s’impose au juge, au contraire, elle ne lie pas le législateur, sauf en
matière pénale, où les libertés publiques sont en cause. Le principe de non-rétroactivité de
la loi en matière pénale connaît une exception : la loi pénale plus douce doit au contraire
être rétroactive. Cette rétroactivité suppose que les faits commis antérieurement à l’entrée en
vigueur de la loi plus douce n’aient pas encore donné lieu à une décision passée en force de
chose jugée au jour où cette nouvelle loi entre en vigueur. En matière civile, le législateur
peut déclarer une loi rétroactive, à condition qu’il le dise d’une façon claire.
― La survie de la loi ancienne. En matière contractuelle, le principe est non pas
l’application immédiate de la loi nouvelle, mais au contraire la survie de la loi ancienne :
celle-ci continue de régir les effets futurs (c’est-à-dire postérieurs à l’entrée en vigueur de la
loi nouvelle) des situations juridiques contractuelles (c’est-à-dire des situations
juridiques qui ont été créées par contrat) en cours au moment de l’entrée en vigueur de
la loi nouvelle, dès lors qu’elles ont été constituées avant celle-ci. La jurisprudence (arrêt
de la première Chambre civile de la Cour de cassation française) accueille clairement ce
principe de solution : « […] les effets d’un contrat conclu antérieurement à la loi nouvelle,
même s’ils continuent à se réaliser postérieurement à cette loi, demeurent régis par la
disposition de la loi sous l’empire de laquelle le contrat a été passé […] ».
Cette exception au principe de l’application immédiate de la loi nouvelle connaît
elle-même une exception (on en revient donc au principe). Parfois, bien que la situation soit
formellement d’origine contractuelle, il apparait en effet nécessaire d’uniformiser des
situations similaires Tel est le cas lorsque la situation, bien que trouvant sa source dans
un contrat, est davantage statutaire que contractuelle. Par exemple si une loi nouvelle
vient diminuer le temps de travail ou augmenter le salaire minimum, elle sera appliquée

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immédiatement à tous les contrats de travail en cours : il n’est pas concevable que des salariés
d’une même entreprise soient, sur ces points fondamentaux de leurs statuts, soumis à des
règles différentes selon la date de conclusion de leur contrat.
§3. – Les règlements
Le règlement est, en principe, la dernière source écrite, celle qui se situe au bas de la
pyramide juridique. Son étude amène à en cerner la notion, les formes, et l’entrée en vigueur.
A – La notion de règlement
Le règlement est une norme générale et impersonnelle édictée par l’exécutif.
 Une norme générale : Le règlement est une norme générale, en ce qu’il a une portée
générale et impersonnelle. Il en résulte deux conséquences bien distinctes.
Le règlement revêt le même caractère que la loi et participe de celle-ci. C’est la raison
pour laquelle les deux actes sont souvent assimilés, confondus.
L’acte règlementaire s’oppose, en revanche, à l’acte individuel, qui vise une ou quelques
personnes déterminées (nomination ou révocations de fonctionnaires). Il en va de même de
l’acte collectif, qui pourtant vise plusieurs personnes dont les situations sont solidaires les
unes des autres (ordre de classement des candidats admis à un concours). Ces deux catégories
d’actes ne sont pas réglementaires, n’ayant pas un caractère général et impersonnel.
 Une norme édictée par l’exécutif. Si la loi est édictée par le parlement, qui est investi
du pouvoir législatif, le règlement l’est par l’exécutif qui lui, dispose du pouvoir
règlementaire.
Les règlements ou actes règlementaires sont ainsi édictés par les autorités exécutives,
investies du pouvoir règlementaire. On en distingue principalement deux catégories. Ce sont
le Président de la République d’une part et d’autre part les autres autorités administratives.
Le PR édicte des règlements, qui prennent la forme de décret. Ceux-ci se distinguent en
décret simple et en décret pris en Conseil des ministres. Ces derniers sont des actes
solennels.
Les autres autorités administratives, investies du pouvoir réglementaire sont les ministres
et les autorités administratives locales. Les actes de ces autorités revêtent la forme d’arrêtés.
Il en va notamment ainsi des arrêtés ministériels, préfectoraux ou municipaux.
B. – Les différents types de règlement
Le règlement peut revêtir plusieurs formes. On distinguera les ordonnances des
règlements stricto sensu.
1 – Les ordonnances
L’ordonnance est un acte émanant du Président de la République ; elle intervient dans les
matières réservées à la loi : « Le Président de la République peut, pour l’exécution de son
programme, demander au Parlement, par une loi, l’autorisation de prendre par ordonnance,
pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi » (art. 106
Constit.). Elle doit être ratifiée par le parlement. Lorsque ces conditions sont réunies, les
ordonnances ont force de loi et ne peuvent être modifiées que par une loi.
2 – Les règlements stricto sensu
On distingue en fonction de l’auteur de l’acte : les décrets, les arrêtés et les circulaires et
en fonction du domaine dans lequel il est intervenu : les règlements autonomes et les
règlements dérivés.

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a) Les décrets, les arrêtés, les circulaires
Le décret est la forme que prennent généralement les actes du Président de la
République (PR). En CI, en sa qualité de détenteur exclusif du pouvoir exécutif (art. 63
Constit.), le PR est seul habilité à prendre des décrets et à les signer. On distingue deux
catégories de décrets : les décrets en Conseil des ministres et les décrets simples.
Les décrets en conseil des ministres comprennent les décrets réglementaires et les
décrets non réglementaires (portant sur les nominations aux emplois supérieurs de l’État).
L’article 71 de la Constitution prescrit que :
« Le conseil des ministres délibère obligatoirement :
― des décisions déterminant la politique générale de l’État ;
― des projets de lois, d’ordonnances et de décrets règlementaires ;
― des nominations aux emplois supérieurs de l’État, dont la liste est établie par la loi ».
Les décrets simples sont ceux pris en dehors du conseil des ministres, ils portent
notamment nomination des membres du gouvernement, nomination à d’autres emplois de
l’État, exécution des lois. À la différence des décrets délibérés en conseil des ministres, qui
sont des actes solennels et qui doivent être expressément prévus par un texte, les décrets
simples existent en dehors de tout texte.
L’arrêté est la forme solennelle des actes des ministres. L’arrêté ministériel est le plus
souvent réglementaire. Mais, l’arrêté ministériel peut être individuel, notamment l’arrêté n°
2011-22 du 3 août 211 portant nomination du directeur de cabinet du ministre délégué auprès
du premier ministre, ministre de la défense ; il peut être aussi collectif. L’arrêté
interministériel est l’acte signé par deux ou plusieurs ministres.
Les autorités locales peuvent également prendre des actes, soit de façon individuelle, soit
de façon collégiale. Les actes des autorités individuelles s’entendent de ceux des organes
exécutifs des collectivités locales. Les actes des préfets, sous-préfets, président du conseil
régional, gouverneur de district, maires sont appelés « arrêtés ». Exemple : les arrêtés
préfectoraux, les arrêtés municipaux. Mais ces autorités peuvent prendre d’autres actes, tels
des décisions, notes, circulaires…
Les actes des autorités collégiales sont ceux des assemblées délibérantes des
collectivités territoriales. Les actes en question sont ceux édictés par les organes ci-après
conseil régional, conseil du district et conseil municipal. Ces actes sont dénommés
« délibérations ». Mais, ces autorités peuvent également édicter d’autres actes, tels que des
arrêtés, proclamations, adresses (à la population) ou vœux.
Enfin, les circulaires ou instructions de service sont des prescriptions données par les
chefs de service, tout particulièrement les ministres, aux agents placés sous leur autorité pour
l’interprétation ou l’application des textes législatifs ou réglementaires.
b) Les règlements autonomes et les règlements dérivés
L’autorité exécutive peut, selon la nature du pouvoir règlementaire, édicter soit des
règlements dérivés, soit des règlements autonomes ;
Les règlements dérivés sont ceux qui ont pour objet d’assurer l’exécution des lois. Ils
sont pris par le pouvoir règlementaire pour assurer l’application de la loi. Ils sont subordonnés
à la loi. Le pouvoir réglementaire dérivé ne s’exerce que lorsqu’une loi prévoit que des
règlements, décrets ou arrêtés, nécessaires à son application soient édicté par l’exécutif. En
dehors, de toute invitation de la loi, des règlements dérivés peuvent être pris pour compléter
ou préciser les dispositions d’une loi en vue de favoriser sa meilleure mise en œuvre.

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Les règlements autonomes sont ceux qui, à la différence des précédents, sont pris dans
le cadre du pouvoir réglementaire autonome et qui ne sont pas subordonnés à la loi. Le
pouvoir règlementaire autonome est une innovation de la Constitution française de 1958
(art. 37) reprise par notre loi fondamentale.
Avant 1958, le pouvoir réglementaire était toujours dérivé de la loi et ne devait que se
borner à en assurer l’exécution. Désormais, la Constitution lui confère une autonomie qui
l’affranchit du pouvoir législatif. Cette autonomie se manifeste par l’attribution d’un domaine,
qui lui est propre et qui se distingue de celui du législateur. Les règlements adoptés en vertu
du pouvoir règlementaire, devenu autonome, revêtent la même nature. Ce sont des règlements
autonomes, distincts des règlements dérivés.
Le pouvoir règlementaire autonome et les règlements qui en dérivent sont consacrés par
l’article 103 de la Constitution. Ce texte dispose : « Les matières autres que celles qui sont du
domaine de la loi, relèvent du domaine règlementaire ». Le domaine du règlement autonome
se définit ainsi négativement par rapport à celui de la loi.
C. – L'entrée en vigueur du règlement
À la différence de la loi dont l'entrée en vigueur est soumise à la promulgation, l’acte
règlementaire et les actes administratifs en général deviennent valides dès leur émission,
c’est-à-dire dès leur signature. Celle-ci est apposée par l’autorité administrative compétente.
Le règlement tout comme la loi n'est opposable aux citoyens qu'à compter de sa publication
au JORCI.

Sous-section II – Les sources nationales non écrites ou indirectes du droit


Les sources non écrites sont celles qui ne sont pas formellement établies dans un texte ou
qui ne se présentent pas sous la forme habituelle d’une règle de droit. Elles ne résultent pas
des organes constitutionnellement investis du pouvoir constituant, du pouvoir législatif ou du
pouvoir réglementaire dans la production normative. Dans les systèmes romano-germanique,
elles ne sont des sources du droit qu’indirectement. Quoi qu’il existe une controverse sur leur
nature normative, on peut retenir trois principales sources non écrites : la coutume (§ 1), la
jurisprudence (§ 2), la doctrine (§ 3).
§ 1. – La coutume
La coutume, c’est l’usage émanant de la conscience populaire qui, en devenant peu à peu
obligatoire, constitue par là même une source de droit.
A. – Les éléments constitutifs
La coutume se définit généralement par deux éléments indissociables, l’un matériel et
l’autre psychologique.
1° L’élément matériel, denommé consuetudo, c’est l’usage, la pratique des sujets de
droit. Mais, pour engendrer la coutume, l’usage doit présenter au moins deux caractères : être
continu et général.
 La continuité, c’est la répétition du précédent dans le temps. Le précédent est un fait,
un usage unique. Un précédent isolé ne peut être générateur de la coutume. L’adage
dit d’ailleurs « une fois n’est pas coutume ». Il s’ensuit la répétition des précédents.
 La généralité, c’est la répétition du précédent dans l’espace. La pratique doit être
suivie par les sujets de droit. La force juridique de la coutume vient de son acceptation
par ceux-ci. Et, tout comme la loi, elle doit revêtir un caractère général et impersonnel.

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2° L’élément psychologique, dénommé opinio juris, vient s’ajouter à la pratique pour
engendrer la norme coutumière. L’opinio juris s’appréhende comme la conviction d’appliquer
le droit. L’usage est accepté par les personnes juridiques comme faisant droit, comme une
obligation juridique. Celles-ci ont ainsi le sentiment d’être liées. Ainsi pour conférer valeur
juridique à une pratique, à un usage, on tient compte des dispositions psychologiques de ceux
qui l’ont créé, c’est-à-dire des sujets de droit.
B. – Le rôle de la coutume
On attribue généralement un triple rôle à la coutume. Et on en déduit de ce fait trois types
de coutumes. Ce sont les coutumes secundum legem, praeter legem et contra legem.
1 – La coutume secundum legem (selon la loi)
La coutume secundum legem vient seconder, c’est-à-dire compléter ou préciser la loi.
Elle s’applique parce que la loi renvoie directement à elle. La coutume joue ici le rôle
d’auxiliaire de la loi. Aussi, s’impose-t-elle au même titre qu’elle. Et, il en va ainsi que la loi
soit supplétive de volonté ou même impérative.
Les domaines de prédilection, abondamment rapportés par les auteurs, sont la propriété
immobilière et le contrat. Le Code civil y renvoie aux usagers locaux ou professionnels.
Ainsi, en matière foncière, les dispositions pertinentes sont les articles 645, 663, 671 et 674.
Ceux-ci renvoient, pour l’usage des eaux par les riverains, les clôtures, les distances à
observer pour les plantations et certaines constructions…) aux « …usagers constants et
reconnus ».
2 – La coutume praeter legem (à côté de la loi)
La coutume praeter legem vient combler une lacune de la loi. Celle-là intervient dans le
silence de celle-ci. La loi ne renvoie pas ici à la coutume et elle n’est pas non plus intervenue
en la matière. La coutume vient alors combler le vide juridique.
Assez rares en droit civil (l’un des exemples les plus topiques est le fait que la femme
porte le nom patronymique de son mari. Il s’agit d’une coutume du 19 e siècle, qui n’a été
codifiée que récemment en France et consacrée par la loi ivoirienne), elles sont couramment
admises en droit commercial.
3 – La coutume contra legem (contre la loi)
La coutume contra legem vient s’opposer à la loi. Elle va à l’encontre de celle-ci. Si la
coutume secundum legem est admise, la coutume praeter legem tolérée, la coutume contra
legem est difficilement admise. Si l’on admettait en effet l’autorité d’une telle coutume, l’on
devrait conclure que la loi peut être abrogée par désuétude. Or l’abrogation par désuétude
n’est pas admise.
Le principe qui prévaut, c’est donc le rejet de la coutume contra legem. La Cour
suprême, chambre administrative, a confirmé ce principe dans l’arrêt Gnadré Teti et autres c/
Université de Côte d’Ivoire en date du 8 février 1985. Elle a refusé d’admettre qu’une
« pratique devenue coutume » puisse modifier un décret.
Toutefois, l’on estime que ce principe de non abrogation de la loi par la coutume n’a pas
une portée absolue. Il existe en effet nombre de textes tenus en échec par des pratiques
coutumières. Il en va ainsi dans toutes les matières, aussi bien en droit privé qu’en droit
public, y compris en matière constitutionnelle.
Le continent africain est en effet marqué par l’ineffectivité institutionnelle. Il emprunte
des institutions à l’Occident pour les reléguer au Musée des Institutions juridiques. Il en va
ainsi des régimes à parti unique qui consacraient pourtant le multipartisme. Il en va de même,

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en général, des pratiques coutumières ancestrales qui sont contraires à la législation dite
moderne : dot, polygamie, excision…

§ 2. – La jurisprudence
A. – La définition
Le terme de jurisprudence revêt deux sens bien distincts, l’un large et l’autre restreint.
Au sens large, il s’entend de l’ensemble des décisions des tribunaux et cours de justice
(jugements, arrêts, décisions). Au sens restreint, il désigne la solution généralement donnée
par eux à une question de droit.
B. – Le rôle
Si théoriquement, la jurisprudence se réduit à une simple source d’interprétation, elle
constitue en fait une véritable source de droit. On attribue généralement trois fonctions à la
jurisprudence : appliquer la loi, l’interpréter ou lui suppléer. La fonction de suppléance de la
loi révèle davantage le pouvoir normatif du juge.
La fonction d’application de la loi : elle consiste, pour le juge, à confronter la règle de
droit, posée dans l’abstrait par le législateur, au fait. Il est ainsi amené à découvrir les faits, à
les qualifier, avant de leur appliquer le droit.
L’interprétation revient à dégager le sens et la portée d’un texte. Elle vise à l’élucider.
Aussi, moins la loi sera-t-elle claire et plus étendu sera le pouvoir du juge. Celui-ci apporte
incontestablement un complément à la loi.
La fonction de suppléance permet au juge de créer la règle de droit ex nihilo, c’est-à-
dire à partir de rien, en ne se fondant sur aucun texte. Et il en va ainsi parce que la loi l’y
oblige.
L’article 4 du Code civil dispose en effet : « Le juge qui refuse de juger, sous prétexte
du silence, de l’obscurité et de l’insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable
de déni de justice ». Le juge ne peut donc prendre prétexte du silence de la loi, de son
obscurité ou de son insuffisance pour se dérober à ses responsabilités. Il lui est fait obligation
de dire le droit sous peine d’être poursuivi pour déni de justice.
La jurisprudence vient ainsi combler les lacunes de la loi. L’on a, à l’instar de la
coutume, une jurisprudence praeter legem, qui vient combler un vide juridique. Le pouvoir
créateur du juge est ici évident, incontestable. Et, c’est précisément cette fonction qui a permis
au juge de construire, un certain nombre de théories ou de systèmes juridiques. Ceux-ci se
rencontrent dans les diverses disciplines du droit. On peut mentionner, en droit civil, la
théorie de l’enrichissement sans cause ou encore le contrat d’assurance.
§ 3. – La doctrine
La doctrine joue un rôle non négligeable dans l’élaboration et l’application de la règle de
droit. Ce qui justifie sa place dans les sources non écrites, en tant qu’autorité juridique.
A. – La définition
Le terme doctrine revêt deux sens bien distincts. Il désigne respectivement des personnes
et leurs opinions.
Les personnes sont les auteurs qui ont écrit et émis des idées dans le domaine
juridique. Ce sont à la fois les théoriciens et les praticiens du droit. Les premiers sont les
éminents professeurs de droit, qui enseignent dans les différentes disciplines. Les seconds
auteurs sont composés de magistrats, d’avocats, de notaires et autres juristes.

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Les opinions sont les idées, les pensées émises par les auteurs donnant leur point de
vue sur le droit ou une question y relative. Ces opinions sont contenues dans des documents
divers : manuels, traités, notes, chroniques, répertoires. L’ensemble de ces textes et
documents contient ou forme la littérature juridique.

B. – Le rôle
L’’on reconnaît à la doctrine deux rôles essentiels : elle met en ordre les règles de droit
et les apprécie. L’appréciation des règles de droit consiste, pour la doctrine, à émettre son
opinion, c’est-à-dire donner son point de vue sur les règles de droit édictées par les autorités
compétentes. Ces observations et critiques peuvent révéler les imprécisions, les insuffisances,
les lacunes, les ambiguïtés des règles édictées. Les critiques peuvent être poussées jusqu’aux
dénonciations de violation du droit, à l’inopportunité ou à l’inadaptation de la règle édictée.
La doctrine peut enfin assortir ses critiques de propositions concrètes.
D’une manière générale, la doctrine est considérée comme une simple autorité
juridique ou une « référence », et non comme une source du droit. En effet, les idées, les
opinions et les jugements émis par la doctrine ne sont pas des règles de droit. Ils n’ont aucun
caractère obligatoire et n’engagent que leurs auteurs. La doctrine est une source inépuisable
d’inspiration pour le législateur et le jurislateur. Ceux-ci s’y référeront soit pour édicter la
règle de droit, soit dire le droit.
Exceptionnellement, le droit international public considère la doctrine comme une
source du droit. Il consacre, en effet, expressément la doctrine comme moyen auxiliaire de
détermination des règles de droit. La consécration expresse de la doctrine est le fait de
conventions internationales très importantes comme le statut de la Cour internationale de
justice et la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
Section II : les sources professionnelles
(Voir les éléments exposés lors de la séance magistrale)

Titre IV : L’organisation judiciaire


Chapitre I : Les juridictions
Section 1 : Les principales juridictions
Les juridictions ont pour mission de rendre la justice sur toute l’étendue du territoire national,
au nom du peuple ivoirien. L’autorité judiciaire se compose aux termes de la Constitution
ivoirienne de juridictions suprêmes (Cour de Cassation, Conseil d’Etat, Cour des Comptes
et Conseil Constitutionnel) et de juridictions ordinaires comprenant les Cours d’Appel et
les Tribunaux. Toutefois, en attendant l’adoption des lois organiques relatives à la mise en
place effective de l’ensemble des juridictions suprêmes, l’autorité judiciaire s’articule autour
des juridictions suivantes :
§1 : Les juridictions inférieures
Les juridictions inférieures sont constituées par les juridictions du premier degré et du second
degré.
A- Les juridictions du premier degré
Ce sont celles qui connaissent en premier lieu des litiges. Il s’agit des tribunaux de première
Instance et des sections détachées.

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 Les tribunaux de première instance et les sections détachées
Il y en a 9, répartis entre les plus grandes villes : Abidjan-Plateau, Abidjan-Yopougon,
Bouaké, Daloa, Man, Korhogo, Abengourou, Bouaflé et Gagnoa. Les sections détachées sont
rattachées à des tribunaux de première instance.
Toutefois, ces juridictions sont autonomes et ne se chevauchent pas en matière civile,
administrative et pénale. Ces juridictions sont indépendantes et équivalentes sur le plan de la
compétence d’attribution. Elles ont le même pouvoir de juger aux termes de l’article 5 du
code de procédure civile, commerciale et administrative. Ainsi, on ne fait pas appel des
décisions des sections de tribunaux devant les tribunaux de première instance.
Les tribunaux de première instance statuent en formation collégiale. En ce qui concerne les
sections détachées, elles continuent en principe de siéger avec un seul juge. Toutefois, elles
doivent siéger en formation collégiale de trois (3) magistrats au moins dans les cas suivants :
- En matière civile et administrative lorsque l’intérêt du litige dépasse 50 millions de
FCFA ;
- En matière délictuelle et obligatoirement en présence du Ministère public (parquet) :
 Lorsque l’intérêt du litige excède 50 millions de FCFA
 Lorsqu’il s’agit d’infractions contre la sûreté de l’Etat, la défense nationale, la
sécurité publique ainsi que celle passible de la peine de mort (à remplacer depuis
l’abolition de cette peine par la constitution de 2000 par l’emprisonnement à
perpétuité).

 Le Tribunal de Commerce
Le tribunal du commerce est une juridiction autonome de premier degré. Les litiges attribués
au Tribunal de Commerce sont :
-Les contestations relatives aux engagements et transactions entre commerçants ;
-Les contestations entre associés d’une société commerciale ou d’un groupement d’intérêt
économique ;
-Les procédures collectives d’apurement du passif ;
-Les contestations entre toutes personnes relatives aux actes de commerce au sens de l’Acte
Uniforme relatif au Droit Commercial Général (dans les actes mixtes, la partie non
commerçante demanderesse peut saisir les tribunaux de première instance).
-Les contestations relatives aux actes de commerce accomplis par les commerçants à
l’occasion de leur commerce et l’ensemble de leurs contestations commerciales comportant
même un objet civil ;
-Les litiges attribués par les lois spéciales aux tribunaux de commerce.
Le Tribunal de Commerce gère aussi le Registre de Commerce et de Crédit Mobilier
(RCCM).
Le Tribunal du Commerce est composé de juges professionnels (magistrats de carrière) et
juges consulaires (opérateurs économiques choisis sur une liste d’aptitude établie par la
Chambre de Commerce et d’Industrie).
Il convient de noter que le Tribunal de Commerce est une innovation dans l’organisation
judiciaire ivoirienne et que seul le Tribunal de Commerce d’Abidjan est créé par le décret N°
2012-628 du 6 juillet 2012 portant création du Tribunal de Commerce d’Abidjan et fixant son
ressort territorial.
a. Les formations spéciales du tribunal de première instance
 Le tribunal du travail
Le tribunal du travail siège en formation collégiale. Son président est, en principe le président
du TPI ou de la section détachée de la localité concernée, sauf s’il désigne un magistrat à cet
effet. Les autres membres de ce collège de juges sont les deux (2) assesseurs représentant
respectivement les employeurs et les travailleurs. Il faut relever que, pour chaque affaire, le

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Président désigne autant que possible les assesseurs employeurs et travailleurs appartenant à
la catégorie professionnelle intéressée.
Sur le plan compétence, suivant l’article 81.8 du code du travail : « les tribunaux du travail
connaissent des différends individuels pouvant s’élever à l’occasion du contrat de travail
ou d’apprentissage, y compris les accidents du travail et les maladies professionnelles
entre employeurs ou apprentis et leurs employeurs ou maitres ».Ces tribunaux sont
également compétents pour se prononcer sur tous les différends individuels relatifs à la
validité et l’exécution des conventions collectives et règlements en tenant lieu. Leur
compétence s’étend aussi aux litiges entre employeurs ou apprentis à l’occasion des contrats
de travail ou d’apprentissage.
b. Les juridictions répressives
 Le tribunal criminel
Le tribunal criminel est la juridiction investie de la compétence de juger les individus
poursuivis pour infractions qualifiées crimes. (Ex: Assassinat). Il est composé d’un président
et de quatre assesseurs. Les sessions se tiennent, tous les trois mois au siège de chaque
tribunal de première instance en ce qui concerne le jugement des affaires instruites dans le
ressort de ce tribunal.
 Le tribunal correctionnel
Le tribunal correctionnel est compétent pour connaitre des délits. Il connait également des
crimes dont il est saisi par la Chambre d’accusation. Cette possibilité n’est envisageable que si
la Chambre d’accusation estime qu’il y a lieu de ne prononcer qu’une peine correctionnelle,
en raison des circonstances. Le prévenu est alors renvoyé devant le tribunal correctionnel, qui
ne peut décliner sa compétence.
 Le tribunal de simple police
Le tribunal de simple police connait des contraventions. Sont des contraventions, les
infractions que la loi punit d’une peine de un jour au moins à deux mois au plus
d’emprisonnement, et d’une peine d’amende inférieure ou égale à 360 000 FCFA ou l’une de
ces deux peines seulement.

B- Les juridictions de second degré


Au niveau du second degré, il y a essentiellement les Cours d’appel. Les cours d’appel
connaissent des recours exercés contre les décisions rendues par les tribunaux de première
instance et leurs sections détachées. Il existe trois cours d’appel : Abidjan, Bouaké et Daloa.
Ces juridictions sont constituées de chambres sociales, correctionnelles et civiles,
commerciales et administratives. Elles regroupent les magistrats du siège que sont le premier
Président, les Présidents de chambres et les conseillers, ainsi que les magistrats du ministère
public ou parquet général, comprenant le procureur général, les avocats généraux et les
substituts du procureur général.

Section 2 : Les juridictions supérieures


Au niveau supérieur, nous avons la Cour Suprême, le Conseil Constitutionnel et la Cour
Commune de Justice et d’Arbitrage qui devenue depuis l’avènement du droit OHADA une
juridiction suprême dans les Etats membres de l’organisation.
§1 : La Cour suprême (Cour de cassation)
Elle a son siège à Abidjan et connait des recours en cassation exercés contre les arrêts rendus
par les cours d’Appels, ou contre les jugements en dernier ressort par les tribunaux de
première instance ou leurs sections. Elle n’est cependant pas un nouveau degré de juridiction
car elle ne juge pas l’affaire à nouveau. Elle ne fait que vérifier l’application de la loi par la
juridiction qui a statué et dont la décision lui est déférée.

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§2 : Le Conseil Constitutionnel
Composée de personnalités connues pour leur compétence en matière juridique ou
administrative et désignées par le Président de la République, cette juridiction est juge de la
constitutionnalité des lois et est l’organe régulateur du fonctionnement des pouvoirs publics. Il
contrôle la régularité des opérations de référendum et en proclame les résultats. Il statue sur
l’éligibilité des candidats aux élections présidentielle et législative, sur les contestations
relatives à ces élections et proclame les résultats définitifs des élections présidentielles.
§3 : La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA)
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA est la juridiction de cassation des
Etats membres, dès lors qu’il s’agit d’un litige soulevant des questions relatives à
l’application des Actes uniformes. Elle assure l’unité d’interprétation et d’application des
Actes uniformes. La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage a son siège à Abidjan.
§4 : La Haute Cour de Justice
Cette juridiction non permanente connaît des actes accomplis par le Président de République
en cas de haute trahison et des faits qualifiés crimes ou délits commis par le vice-Président de
la République et les membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions. Cette cour
est composée de membres élus en leur sein en nombre égal par l’assemblée national et le
sénat, dès la première session de la législature.
Elle est présidée par le Président de la cour suprême.

Chapitre II : Les personnels des juridictions : magistrats et auxiliaires


Ce sont les magistrats et les auxiliaires de justice qui seront étudiés ici.
Section 1 : Les magistrats
Ce sont les représentants de l’autorité publique auxquels la loi confère le pouvoir de rendre la
justice ou de requérir l’application de la loi. On distingue deux catégories de magistrats.
 Les magistrats du « siège » ou les juges : Ils rendent la justice en tranchant les litiges
portés devant eux par les citoyens ou en punissant de peines d’amende ou
d’emprisonnement les individus traduits devant eux pour avoir enfreint la loi. Ils rendent
la justice « assis ». D’où le nom de magistrature « assise ».
 Les magistrats du « Ministère public » ou le parquet : Ceux-ci forment ce qu’on
appelle la magistrature « débout » parce qu’ils requièrent la justice débout, c’est-à-dire
qu’ils se lèvent pour s’adresser au tribunal. Ce sont des agents du pouvoir exécutif et, en
tant que tels, subordonnés à leurs supérieurs hiérarchiques dont le premier est le garde des
sceaux.
Remarques : Les magistrats du « siège » sont inamovibles c’est-à-dire qu’ils ne peuvent être
destitués, suspendus, ou déplacés que dans les conditions prévues par la loi ; ils n’ont pas
d’ordre à recevoir du gouvernement.
Les magistrats du parquet font partie du corps judiciaire mais ne jouissent pas de la
prérogative de l’inamovibilité. Ce sont des agents du pouvoir central qui doivent se plier aux
injonctions de leurs supérieurs hiérarchiques, à peine de sanctions disciplinaires.

Section 2 : Les auxiliaires de justice


Ce sont :
 Le greffier : C’est un fonctionnaire chargé de donner l’authenticité aux actes du juge.
Ses fonctions principales sont entre autre l’assistance au juge dans tous les actes de
son ministère, la conservation des minutes des jugements et des procès-verbaux et la
délivrance des expéditions aux justiciables, la détention de certains registres

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 L’avocat : C’est un juriste assermenté qui fait profession d’aider de ses conseils les
justiciables et de plaider pour eux devant les tribunaux et cours ainsi que devant les
organisations juridictionnelles ou disciplinaires.
 L’huissier de justice : C’est un officier ministériel qui est chargé des significations, de
dresser procès-verbal des constatations qu’il a faites et de l’exécution forcée des
décisions de justice.
 Le commissaire-priseur : C’est un officier ministériel chargé, dans son ressort, de
procéder à la vente publique de meubles.
 Le notaire : C’est un officier ministériel chargé de conférer l’authenticité aux actes
instrumentaires (actes juridiques, contrats) et de conseiller les particuliers.
 L’expert : C’est une personne ressource à laquelle le juge a recours à titre
d’information. Il est dressé chaque année une liste d’experts par la cour d’appel pris
dans diverses spécialités (agriculture, mécanique, traduction des diverses langues,
chirurgie...).

Chapitre III : Droit commun du procès


Section 1 : Les principes de la procédure civile
Il s’agit des règles de compétence, déroulement du procès et les voies de recours.
§1 : Les règles de compétence
La compétence est l’étendue du pouvoir de juger qui appartient à chaque juridiction. En face
d’un litige déterminé, quelle est la juridiction compétente ? Il y a donc lieu de rechercher la
compétence d’attribution et la compétence territoriale pour saisir la juridiction qu’il faut pour
trancher le litige.

A- La compétence d’attribution
La compétence d’attribution, c’est la compétence d’une juridiction en fonction de la nature
des affaires, parfois aussi de leur importance pécuniaire. Ainsi, les TPI et leurs sections
détachées, connaissent de toutes affaires civiles, commerciales, administratives et fiscales
pour lesquelles compétence n’est pas attribuée expressément à une autre juridiction en raison
de la nature de l’affaire.
Ces juridictions statuent en toute matière en 1 er ressort sur toutes les demandes dont l’intérêt
du litige est supérieur à 500.000 FCFA ou est indéterminé, ainsi que sur celles relatives à
l’état des personnes, celles mettant en cause une personne publique et celles statuant sur la
compétence. Par contre quand l’intérêt du litige est inférieur à 500.000 FCFA, ils statuent en
premier et dernier ressort.
B- La compétence territoriale
La compétence territoriale précise quelle est la juridiction, parmi l’ensemble des juridictions
réparties sur le territoire, qui devra connaître de l’affaire. En matière civile, le tribunal
territorialement compétent est en principe celui du domicile du défendeur et, en l’absence
de domicile, celui de sa résidence. Mais ce principe admet des limites :
- Si le défendeur est Ivoirien établi à l’étranger ou est un étranger n’ayant en Côte
d’ivoire ni domicile ni résidence connue, le tribunal compétent est celui du domicile du
demandeur.
- En ce qui concerne les immeubles, le tribunal compétent est celui du lieu de situation
de l’immeuble litigieux.
- Pour les litiges qui naissent d’un contrat ou d’un accident, le tribunal compétent est
celui du lieu du contrat, de l’accident ;

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- En matière commerciale, le tribunal compétent est soit celui du domicile du défendeur,
soit celui où la promesse a été faite et la marchandise a été livrée, soit celui dans le
ressort duquel le paiement a été ou devait être effectué.
- En matière fiscale, celui du lieu de l’établissement de l’impôt.
-
§2 : Le déroulement du procès
Ici, il sera étudié, l’action en justice, les modes de saisine du tribunal et l’audience et le
jugement.

A- L’action en justice
L’action en justice est le pouvoir légal de saisir les juridictions. Toute personne physique ou
morale peut agir devant les juridictions en vue d’obtenir la reconnaissance, la protection ou la
sanction de son droit. Toutefois, l’action en justice n’est recevable que si le demandeur :
- Justifie d’un intérêt légitime juridiquement protégé, direct et personnel (c’est à-dire
fondé sur un droit et seul l’individu dont les intérêts sont en cause peut agir) ;
- A la qualité pour agir en justice (c’est-à-dire le titre juridique qui permet à une
personne d’invoquer en justice le droit dont elle demande la sanction) ;
- Possède la capacité pour agir en justice (c’est-à-dire être capable juridiquement).
NB : En principe, une action en justice suppose un demandeur qui est celui qui prend
l’initiative du procès et un défendeur qui est la personne contre laquelle le procès est engagé.
Quand l’action est portée devant la Cour d’appel, il s’agit de l’appelant et de l’intimé. Si c’est
devant la Cour suprême, ce sont le demandeur au pourvoi et le défendeur au pourvoi.

B- Les modes de saisine de la juridiction


Pour qu’il y ait procès, il faut une demande introductive d’instance qui est l’acte par lequel
une personne exerçant une action en justice prend l’initiative de saisir une juridiction. Il y a
trois modes d’introduction de la demande en justice. Ce sont :
 L’assignation : C’est l’acte d’huissier de justice adressé par le demandeur au
défendeur pour l’inviter à comparaître devant une juridiction de l’ordre judiciaire.
 La requête : C’est une demande orale ou écrite présentée au greffe de la juridiction
compétente pour connaître de l’affaire par le demandeur en personne ou par son
représentant ou mandataire.
 La comparution volontaire : C’est lorsque les parties se présentent volontairement
devant la juridiction compétente pour être jugées.

Section 2 : L’audience et la décision de la juridiction


Lorsque l’instance est introduite, l’affaire est inscrite au répertoire général c’est-à-dire sur un
registre où sont inscrites chronologiquement toutes les affaires portées devant cette
juridiction. On dit que l’affaire est enrôlée. Le demandeur devra en même temps consigner
une somme d’argent au greffe de la juridiction pour garantir le paiement des frais. Un dossier
est alors ouvert.
Le jour de l’audience, les parties en conflit sont admises à plaider soit par elles-mêmes ou par
l’intermédiaire de leurs avocats. Si la juridiction s’estime suffisamment éclairée, le président
clos les débats et l’affaire est mise en délibéré. Il lui appartient désormais de rendre sa
décision en indiquant les raisons qui l’ont déterminé.
La décision rendue peut prendre plusieurs dénominations en fonction du degré de juridiction.
Ainsi, si la décision vient des TPI et leurs sections détachées, on parle de jugement, si elle
émane des Cours d’appel et de la Cour suprême, elle est dite arrêt.

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§1 : Les voies de recours
Il faut distinguer les voies de recours ordinaires et les voies de recours extraordinaires.

A- Les voies de recours ordinaires


a. L’opposition
C’est la voie de recours par laquelle une partie condamnée par défaut sollicite de la juridiction
qui a statué, la rétractation, après débats contradictoire, de la décision rendue. Le délai est 15
jours à compter de la signification de la décision.

b. L’appel
« L’appel est une voie de recours qui permet de déférer la décision rendue à une juridiction
supérieure, qui juge à nouveau la cause, en fait et en droit, puis confirme ou infirme en la
réformant la sentence primitive ». La règle du double degré de juridiction est un principe
général de procédure qui consacre une garantie essentielle aux intérêts des plaideurs et à
l'intérêt supérieur de la Justice". (Com. du gvt Chenot, CE 4 fév. 1944)
C’est la voie de recours par laquelle une partie sollicite de la cour d’appel la reformation de la
décision rendue par la juridiction de première instance. L’appel s’applique à toutes les
décisions rendues en premier ressort, contradictoirement ou par défaut. Le délai pour
interjeter appel est de un (1) mois à partir de la signification de la décision.
L’appel a un effet suspensif, c’est-à-dire qu’il suspend l’exécution de la décision pour laquelle
on interjette appel, sauf dans le cas d’une exécution provisoire.
Il a aussi un effet dévolutif : la juridiction saisie statuera en fait et en droit.
B- Les voies de recours extraordinaires

a. L’interprétation et la rectification
La décision dont les termes sont obscurs ou ambigus peut être interprétée par le juge qui l’a
rendue, à condition qu’elle présente un intérêt pour la partie qui l’a sollicitée et qu’il ne soit
porté atteinte à l’autorité de la chose jugée.
Quant à la rectification, elle concerne les décisions contenant des fautes d’orthographe,
omissions ou erreurs matérielles.
b. La tierce opposition
C’est une voie de recours par laquelle une personne autre que les parties engagées dans
l’instance, peut attaquer une décision qui lui cause préjudice et demander à la juridiction qui
l’a rendue d’en supprimer les effets en ce qui la concerne personnellement.
c. La demande en révision
C’est la voie de recours ouverte aux parties contre les décisions rendues en dernier ressort,
non susceptibles d’opposition, dans le but de les faire rétracter par les juges qui les ont
rendues.
Cette demande n’est possible que dans des cas limitativement énumérés par la loi (manœuvres
mensongères ou dissimulations frauduleuses pratiquées sciemment...).Le délai est 2 mois à
compter de la découverte du dol, ou du jour où le faux a été déclaré, ou du jour où la pièce a
été recouvrée.
d. Le pourvoi en cassation
C’est le recours contre une décision en dernier ressort porté devant la Cour suprême et fondé
sur la violation de la loi. Le délai pour saisir la Cour suprême est de 1 mois à compter de la
décision.
Peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation, les décisions juridictionnelles de dernier
ressort. Cela veut dire que de façon générale, ce sont les décisions des cours d’appel qui sont
concernées, mais qu’exceptionnellement les décisions de premier degré de juridiction
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(tribunal statuant en premier et dernier ressort sur les demandes dont l’intérêt du litige
n’excède pas 500 000frs). C’est l’exception du principe du double degré de juridiction qui
s'exprime à travers l'appel (interjeter appel), c'est-à-dire qu'une juridiction du 2 ème degré va
reprendre l'affaire dans toutes ses dimensions.
- Saisie d'un pourvoi contre une décision de justice rendue en dernier ressort, la Cour de
cassation examine si les juges du fond ont correctement appliqué la règle de droit. - soit, elle
estime que les juges du fond n'ont commis aucune erreur de droit et elle rejette le pourvoi ; -
soit, elle considère que les juges ont commis une erreur de droit, elle casse et annule la
décision. En principe, puisque la Cour de cassation n'est pas un troisième degré de juridiction,
elle ne peut substituer sa décision à celle des juges du fond, elle doit renvoyer l'affaire devant
une juridiction du fond de même nature et de même degré que celle dont émanait la décision
qu'elle vient de casser. Néanmoins, elle peut casser sans renvoi, en particulier en cas de perte
de fondement juridique ou de pourvoi pour contrariétés de jugement, le jugement le plus
récent disparaissant par annulation. C'est le cas s'il n'y a plus rien à juger si, par exemple, le
texte qui punissait l'infraction a été supprimé pendant la procédure ou si une loi d'amnistie est
intervenue ;
- L'affaire est rejugée par la première juridiction de renvoi qui bénéficie d'une totale liberté
d'appréciation. L'arrêt de cassation a eu pour effet de remettre les parties dans l'état où elles
étaient avant la décision cassée. Puisqu'elle est juge du fond, la cour de renvoi va réexaminer
les faits et le droit. Elle peut analyser les faits différemment de la première juridiction. - La
cour de renvoi peut se ranger au point de vue juridique de la Cour de cassation mais elle n'est
pas obligée de le faire. Dans ce cas, l'affaire est terminée. Il peut y avoir un autre pourvoi en
cassation mais il ne portera pas sur le même problème (retour au premier pourvoi) ; - La cour
de renvoi peut aussi statuer dans le même sens que la juridiction dont la décision a été cassée
et donc résister à l'autorité de la Cour de cassation. Dans ce cas, s'il y a un pourvoi, il est
obligatoirement formé devant la formation la plus solennelle de la Cour de cassation ;
- La Cour de cassation examine pour une seconde et dernière fois le même problème de droit.
Deux positions peuvent être prises : - L'Assemblée plénière de la Cour de cassation peut se
ranger à la position des juges du fond (rare) et donc rejeter le pourvoi. L'affaire est terminée ;
- L'Assemblée plénière peut maintenir sa position initiale et casser la décision. Elle peut
casser sans renvoi, mais, plus couramment, elle renvoie l'affaire devant une seconde
juridiction de renvoi, de même nature et de même degré que les deux précédentes.
- La cour de renvoi doit obligatoirement s'incliner et statuer dans le même sens que la Cour de
cassation sur les problèmes juridiques qu'elle a tranchés. Elle reste néanmoins libre
d'apprécier souverainement les faits et tous les points de droit non soumis à la Cour de
cassation.
Un tel mécanisme correspond à environ 15 ans de procédure.

Titre IV : Les modes alternatifs de règlement des conflits (MARC)


Les MARC ont pour objectif de faciliter l’accès au droit, la résolution amiable des litiges et le
désengorgement des tribunaux.
Chapitre I : Les règlements amiables

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Section I : La conciliation
La conciliation est un mode alternatif de règlement des conflits qui permet de trancher
rapidement à l’amiable un différend simple entre deux personnes physiques ou morales avec
l’assistance d’un conciliateur. La procédure de conciliation est simple et ne requiert pas la
présence d’un avocat. Le conciliateur doit être impartial, compétent et diligent.
En cas d’accord, le conciliateur dresse un procès-verbal de conciliation, signé par les parties
et qu’il dépose au tribunal. En cas de désaccord, les parties peuvent saisir la juridiction
compétente.
Section II : La médiation
Dans l’espace de l’OHADA, la médiation est régie par l’Acte Uniforme relatif à la Médiation
(AUM). Selon l’article 1er dudit Acte uniforme, la médiation désigne tout processus, quelle
que soit son appellation, dans lequel les parties demandent à un tiers de les aider à parvenir à
un règlement amiable d’un litige, d’un rapport conflictuel ou d’un désaccord découlant d’un
rapport juridique, contractuel ou autre ou lié à un tel rapport, impliquant des personnes
physiques ou morales, y compris des entités publiques ou des Etats.
Le tiers en question est désigné médiateur. Ce dernier est tout tiers sollicité pour mener une
médiation quelle que soit l’appellation ou la profession de ce tiers.
L’initiative de la médiation peut être du fait des parties. L’on parlera de médiation
conventionnelle. La médiation peut également s’ouvrir sur demande ou invitation d’une
juridiction étatique. C’est la médiation judiciaire. De même, un tribunal arbitral ou toute autre
entité publique peut demander l’ouverture d’une médiation.
Le médiateur est un tiers impartial tenu au secret. Si les parties ne parviennent pas à un
accord, il appartiendra au juge de trancher.

Chapitre II : Les décisions d’arbitrage


L’arbitrage est régi par l’Acte Uniforme relatif au droit de l’Arbitrage (AUA). L’arbitrage de
règlement par recours à de simples particuliers que les parties prennent comme juges.
L’arbitrage est un mode hybride de règlement des litiges. En effet, il est conventionnel à sa
naissance et devient juridictionnel car des juges privés sont chargés de rendre une sentence.
Le recours à l’arbitrage est possible pour toutes les affaires à l’exception des affaires pénales
et des affaires administratives. Le recours à l’arbitrage est fréquent en matière de commerce
international étant donné qu’il permet de trancher rapidement les litiges.
Section I : Les conventions d’arbitrage
Le recours à l’arbitrage se fait à l’aide d’une convention d’arbitrage qui peut prendre la forme
d’une clause compromissoire ou d’un compromis d’arbitrage.
La clause compromissoire est la convention par laquelle les parties, avant la naissance de tout
litige, décide de soumettre les litiges qui pourraient naître entre elles à l’arbitrage. Le
compromis, quant à lui, est la convention par laquelle les parties décident de soumettre leur
litige déjà né à l’arbitrage.
La convention d’arbitrage doit être écrite et désignée les arbitres ou les modalités de leur
désignation. Elle permet aux parties de voir leur litige tranché par un tribunal arbitral et
entraîne de leur part une renonciation à un recours devant les juridictions ordinaires.
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Section II : L’instance arbitrale
Le tribunal arbitral doit être composé d’un seul arbitre ou de plusieurs arbitres en nombre
impair. En pratique, leur nombre ne dépasse pas trois selon le droit de l’OHADA. L’article 5
de l’AUA donne la composition du tribunal limitée à 3 arbitres dont 2 sont désignés par
chacune des parties. Le troisième est désigné par les 2 premiers.
Les arbitres ne sont pas obligés de suivre la procédure ordinairement suivie devant les
tribunaux. En droit OHADA, il existe un règlement d’arbitrage qui doit être suivi par les
arbitres, sauf si les parties décident de s’en écarter (article 10 AUA).
Section III : La sentence arbitrale
La sentence arbitrale est un écrit qui retrace la décision donnée au litige par les arbitres.
L’arbitre tranche le litige conformément à la procédure et aux formes voulues par les parties.
A défaut d’une telle convention, la sentence est rendue à la majorité des voix lorsque le
tribunal est composé de trois arbitres. Les arbitres peuvent être autorisés par les parties à
statuer en dehors des règles de droit, donc en équité. L’on dit qu’ils statuent en amiable
compositeur.
Les délibérations sont secrètes. La sentence a autorité de la chose jugée dès qu’elle est rendue.
La sentence n’est pas susceptible d’opposition, d’appel ni de pourvoi en cassation.
La sentence arbitrale n’est susceptible d’exécution forcée qu’en vertu d’une décision
d’exequatur rendue par le juge compétent dans l’Etat partie. La décision qui accorde
l’exequatur n’est susceptible d’aucun recours.

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