LHB Lang2022
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To cite this article: Michel Lang, Matteo Darienzo, Jérôme Le Coz & Benjamin Renard (2022):
Evaluation des incertitudes et de l’homogénéité de longues séries de débits de crue sur le Rhin à
Bâle (1225–2017) et Maxau (1815–2018), LHB, DOI: 10.1080/27678490.2022.2053313
1. Introduction
Le niveau de protection contre les inondations du Rhin avec les règles usuelles de dimensionnement des crêtes de
supérieur (Figure 1), entre Kehl-Strasbourg et digues. La crue millénale (resp. décamillénale) de l’étude
Neuburgweier-Lauterbourg, est régi par la convention de l’université allemande (IWG, 2010) validée par la
franco-allemande du 4 juillet 1969 sur l’aménagement Commission Permanente de mai 2010 correspond à
du Rhin. Une série de revanches sont à respecter entre le une crue centennale (resp. millénale) dans certaines
niveau de la crête de digue et la ligne d’eau atteinte pour études françaises. A cet effet, une expertise sur la
différents débits de référence exprimés en m3/s. Les caractérisation des débits extrêmes du Rhin a été
calculs par modélisation hydraulique réalisés par le réalisée par INRAE de 2018 à 2020, pour le compte de
Service de Navigation allemand, et validés en 2010 par la DREAL Grand-Est, avec des échanges au sein de la
la Commission Permanente pour l’aménagement du Commission Permanente internationale pour
Rhin supérieur, montrent que les digues du Rhin à l’aménagement du Rhin supérieur. Un avis a été
l’aval de Strasbourg ne respectent pas ces revanches con formulé (Lang, 2020) sur l’estimation des crues de
tractuelles pour les biefs de Gambsheim et Iffezheim, en référence du Rhin (Q10 à Q1500), sur la partie aval du
particulier sur le secteur amont du bief d’Iffezheim. Par cours franco-allemand (biefs de Gambsheim et
ailleurs, les français et les allemands souhaitent avoir une Iffezheim), à partir du traitement de deux longues
appréciation sur la correspondance entre débit de séries hydrométriques du Rhin à Bâle (1808–2017) et
référence et période de retour, pour pouvoir comparer Maxau (1815–2018).
Figure 1. Vue en plan du Rhin supérieur, secteur Kembs-Iffezheim (source : CIPR, 2021 ; EDF, 2010), et position des stations
hydrométriques de Bâle et Maxau.
Dans cet article, nous présentons les données dis plus en amont, et d’une estimation des apports de l’Ergolz
ponibles en termes de jaugeages et d’évolution morpho et de la Birs. A partir de 1994 jusqu’à aujourd’hui, la
logique du lit du Rhin (Section 2), qui vont être station hydrométrique de référence est celle de Bâle/
exploitées pour une analyse des incertitudes de recon Rheinhalle. On dispose de 53 jaugeages sur la période
stitution des débits de crue à l’aide du modèle BaRatin 1867–1933 (Figure 3) et de 88 jaugeages sur la période
(Section 3). Une série de tests statistiques est appliquée 1994–2017. Le croisement de différentes sources d’infor
pour contrôler l’homogénéité des séries (Section 4), mation communiquées par les services hydrométriques
dont une procédure exploitant les incertitudes sur les suisses (OFEV) et allemands (WSV ; BWSK, 1926 ;
débits de crue. Nous concluons (Section 5) sur les CECR, 1972 et fichiers numériques) permet de reconsti
niveaux d’incertitudes estimés à Bâle et Maxau et la tuer une série continue de valeurs maximales annuelles
qualité des longues séries reconstituées sur plusieurs de débits de crue de 1808 à 2017.
siècles. Le dossier hydrométrique de la station (OFEV)
contient une série de 5 profils en travers anciens (en
1914, 1916, 1918, 1922 et 1930) de la section du lit
2. Longues séries de Bâle et Maxau mineur du Rhin, qui montrent une certaine stabilité de
la section sur la période 1914–1922 et un enfoncement
2.1. Données disponibles à Bâle (Suisse)
du lit sur le levé de 1930 sur une partie de la section.
Plusieurs emplacements ont été retenus au cours du Un document allemand (BWSK, 1930) représente le
temps pour mesurer les hauteurs d’eau et estimer les profil en long du Rhin de Bâle à Mannheim (annexe 9 :
débits du Rhin à Bâle (Figure 2, avec la superficie du tronçon d’environ 250 km) pour différentes dates :
bassin contrôlé par chaque station). La station 1830, 1852, 1895, 1902, 1926.
hydrométrique de Bâle/Schifflände a été implantée en On peut noter sur le Tableau 1 que la pente du Rhin
1808 et a été la station de référence jusque 1933, date de à Bâle est restée stable (autour de 10−3, avec une légère
mise en service du barrage de Kembs qui depuis influence augmentation continue de 0.8 à 1.1 10−3), mais que le
la relation hauteur-débit. La période 1934–1993 est assez lit s’est incisé. Par ailleurs, un recensement des plus
difficile à suivre, aucun jaugeage ni courbe de tarage fortes crues de la période 1225–1807 a été réalisé par
n’ayant pu être récupérés. Le débit sur cette période Wetter et al. (2011), à partir des niveaux atteints dans
a été estimé à partir de la station de Bâle/Rheinfelden la vieille ville et d’un modèle hydraulique. On dispose
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Figure 2. Plan de situation des stations hydrométriques dans le secteur de Bâle (repris d’un schéma EDF et des informations
fournies par l’OFEV, gestionnaire de la station).
Figure 4. Evolution du fond du lit du Rhin à Maxau de 1815 à 1946 (BAW, 2015 ; BWSK, 1930) et hypothèses retenues pour le calcul
d’incertitudes avec le modèle BaRatin.
qui conditionnent la relation hauteur-débit avec les 3.2. Incertitudes des débits de crue du Rhin à Bâle
jaugeages disponibles. La méthode produit une estima
3.2.1. Périodes avec jaugeages
tion de la courbe de tarage et des incertitudes associées
Période récente 1994–2017. A partir d’un profil en
(intervalle de confiance à 95% par exemple). La formu
travers levé en 2011 (Figure 5), nous avons
lation de l’a priori repose sur l’identification des
déterminé la section rectangulaire équivalente du lit
contrôles hydrauliques au droit de la station
mineur, et retenu une largeur B1 = 165 ± 20 m. Nous
hydrométrique (chenal, seuil . . .) et des paramètres
avons estimé la largeur du lit majeur à B2
associés (géométrie de la section, pente du lit, coeffi
= 130 ± 20 m, d’après l’extension de la zone inondable
cient de Strickler). Dans le cas d’un écoulement avec un
dans le centre ancien de Bâle (Wetter et al., 2011).
contrôle par un chenal, d’abord en lit mineur puis en lit
Pour un contrôle hydraulique par un chenal rectangu
majeur, la relation Q(H|θ) peut s’exprimer par des lois
laire large, avec une formulation dérivée de l’équation
puissance :
de Manning-Strickler : Q ¼ BKS1=2 H 5=3 , les plages de
k1 < H � k2 ðlit mineurÞ : QðH Þ ¼ a1 ðH b1 Þc1 (1a) valeurs retenues sur les paramètres physiques (B :
largeur de la section ; K : coefficient de Strickler ; S :
H � k2 ðlit majeurÞ : pente du lit) sont résumées dans le Tableau 2, avec
(1b) également les hauteurs d’activation k1 et k2.
QðH Þ ¼ a1 ðH b1 Þc1 þ a2 ðH b2 Þc2
Le croisement des hypothèses faites sur ces
avec θ = (a1,a2,c1,c2,k1,k2) le vecteur des paramètres de paramètres avec 57 jaugeages ADCP (hauteur
la courbe de tarage (les paramètres b1 et b2 étant H > 5.5 m ; incertitude de mesure ± 5%) de la période
déduits des autres paramètres par continuité de la 1994–2018 donne une courbe de tarage BaRatin
relation QðH Þ en H ¼ k2 ). L’incertitude sur les débits a posteriori avec une incertitude de l’ordre de ± 4%
jaugés est estimée (GDH, 2017, tableau 4.2) d’après le (Figure 6). Nous avons reporté également les deux
type de jaugeage (exploration complète du champ de courbes de tarage de l’OFEV les plus extrêmes de la
vitesses ou seulement de la surface, dilution d’un tra période (N°10 de l’année 1995 et N° 16 de l’année 2002),
ceur) et des modalités de mesure de la vitesse (ADCP, ainsi que le débit estimé par l’OFEV pour les deux plus
moulinet, radar, caméra). fortes crues de la période : le 09/08/2007 et le 12/05/
Pour la période antérieure à l’existence de jau 1999. Si l’on affecte une incertitude de ± 7% aux débits
geages, le modèle BaRatin est appliqué de façon de crue de 2007 et 1999, la borne supérieure correspond
rétroactive, en remontant dans le temps depuis la à l’estimation BaRatin. Au final, nous retiendrons cette
première courbe de tarage calée à partir de jaugeages. incertitude de ± 7% pour le débit des crues maximales
Les informations disponibles sur l’évolution morpho annuelles de la période 1994–2017.
logique du lit du Rhin sont exploitées pour définir une Période 1867–1933. Aucun jaugeage n’ayant pu être
série de sous-périodes homogènes, avec pour chacune obtenu sur la période 1934–1993, nous avons poursuivi
une hypothèse sur les paramètres hydrauliques. l’analyse sur la période 1867–1933 (Bâle/Schifflände), pour
LHB: HYDROSCIENCE JOURNAL 5
Figure 5. Profil en travers du Rhin à Bâle/ Rheinhalle (HKV, 2011) avec une section rectangulaire équivalente, et le report
approximatif des hauteurs HX(100), HX(10), HA et HN(10) associées respectivement aux débits de crue de période de retour 100 et
10 ans, au débit moyen annuel, et au débit d’étiage décennal.
Tableau 2. Paramètres retenus pour le tracé a priori de la courbe de tarage du Rhin à Bâle/ Rheinhalle (période récente).
Lit mineur Lit majeur
Paramètres physiques k1 (m) K1 (m1/3/s) B1 (m) S1 c1 k2 (m) K2 (m1/3/s) B2 (m) S2 c2
1.3 ± 0.5 35 ± 5 165 ± 20 10−3 ± 510−4 1.67 ± 0.05 9 ± 0.5 15 ± 5 130 ± 20 10−3 ± 5 10−4 1.67 ± 0.05
pffiffiffiffi pffiffiffiffi
Paramètres de la courbe k1 a1 ¼ K 1 B 1 S 1 c1 k2 a2 ¼ K2 B2 S2 c2
idem 186.6 ± 57 idem idem 71.1 ± 31 idem
1.67 ± 0.05
1.67 ± 0.02
1.67 ± 0.05
1.67 ± 0.05
BaRatin obtenue avec ces valeurs a priori, et également
c2
trois couples (H, Q) obtenus par modélisation hydrauli
que (table 2, de Wetter et al., 2011). Les débits correspon
dent à la submersion de différents emplacements de
référence dans le centre historique de Bâle :
8 10−4 ± 5 10−4
−4
10 ± 5 10
S2 • Quai « Blumenplatz » inondé : altitude Z = 249.6 m,
−3 Q = 4300 m3/s ;
a2 ¼ K2 B2 S2 ¼ 61:7 � 13:8 • Début d’inondation de « Fischmarkt » : altitude
a2 = 232.6 ± 68.6
a2 = 66.9 ± 13.8
a2 = 55.2 ± 21.4
Z = 250.1 m, Q = 4900 m3/s ;
Lit majeur
130 ± 10
130 ± 20
130 ± 20
Z = 251.1 m, Q = 6400 m3/s.
ffiffiffi
B2 (m)
130 p
17 ± 3
15 ± 5
20 ± 5
5 ± 0.3
5 ± 0.5
5 ± 0.5
k2 (m)
1.66 ± 0.02
1.67 ± 0.05
1.67 ± 0.05
8 10−4 ± 5 10−4
−4
a1 = 180.3 ± 26.1
a1 = 168.3 ± 58.0
170 ± 2
170 ± 5
170 ± 5
38.5 ± 1
35 ± 5
35 ± 5
−0.9 ± 0.5
0.5 ± 0.5
−1 ± 1
k1 (m)
prior
prior
1808–1866
1225–1807
Figure 7. Courbe de tarage BaRatin a priori sur le Rhin à Bâle/ Schifflände, période 1808–1866, avec le report de trois couples (H,Q)
obtenus par modélisation hydraulique (Wetter et al., 2011).
Une procédure de segmentation (Darienzo et al., [−5% ; +4%] sur la période 1947–1968, et de [−3% ;
2021) a permis de décomposer cette période 1947– +2%] sur la période 1968–2017. Le modèle SPD
2017 en 11 sous-périodes, au lieu des 37 courbes de a donné une estimation du paramètre b1 du fond du
tarage officielles (Figure 8). lit mineur pour les 11 sous-périodes. On note un
Une variante du modèle BaRatin-SPD (Mansanarez exhaussement d’environ 50 cm de 1947 à 2017
et al., 2019) a été utilisée pour rechercher les (Figure 9), qui est cohérent avec le suivi morphologi
paramètres (ai,bi,ci) des courbes de tarage des 11 sous- que du lit du Rhin (BAW, 2015).
périodes en une seule itération. On obtient une incer Période antérieure 1815–1946. Aucun jaugeage n’est
titude très faible sur les débits, respectivement de disponible. Nous avons repris les valeurs a posteriori de
la courbe BaRatin de la période 1947–1968 qui a suivi,
en dégradant l’information sur les paramètres a1 et a2
Tableau 4. Incertitudes retenues sur les débits jaugés du Rhin de la courbe de tarage (équation 1), et en intégrant les
à Maxau de 1947 à 2017. informations disponibles sur l’évolution morphologi
Période Jaugeage Q ≤ 3000 m3/s Q > 3000 m3/s que du lit du Rhin. Nous avons distingué 6 sous-
1947–1999 Moulinet ± 10% ± 20% périodes considérées comme homogènes (Figure 4) :
2000–2017 ADCP ± 5% ± 10%
1815–1820, 1821–1839, 1840–1874, 1875–1904, 1905–
Figure 8. Segmentation des jaugeages du Rhin à Maxau (période 1947–2017) (le second graphe donne les densités de probabilité
des dates de rupture – en bleu, et la date la plus probable – en rouge).
8 M. LANG ET AL.
Figure 10. Courbes de tarage à Maxau sur la période 1815–1946 : courbes BaRatin avec intervalle de confiance à 95% et courbes
officielles reconstituées.
L’incertitude finale uQ� sur les débits corrigés Q � Au final, les valeurs retenues pour les incerti
est obtenue en supposant que les variables Q et c sont tudes sur les débits sont résumées dans le
indépendantes et suivent une loi normale : Tableau 5.
� � � �2 !� �
uQ� 2 uc uQ 2
¼ 1þ 4. Tests sur l'homogénéité des séries de crue
EðQ�Þ 1 þ EðcÞ EðQÞ
� �2 Après avoir estimé l’incertitude sur les débits de crue à
uc
þ (2) Bâle (1225–2017) et Maxau (1815–2018), nous allons
1 þ E ð cÞ
vérifier l’homogénéité de ces deux longues séries.
(E espérance mathématique) Comme les valeurs de débit ont été corrigées pour
10 M. LANG ET AL.
raisonner sur un même état de référence « 1977 » du nombre cumulé mt de crues sur un intervalle [0 ; t]
Rhin et tenir compte des aménagements réalisés au en fonction de la date t, et à vérifier son position
cours du temps, les tests d’homogénéité seront nement par rapport à l’intervalle de confiance à
appliqués sur les séries « brutes » (sans correction) et 90%. Nous avons considéré 9 configurations : date
les séries « corrigées » (état de référence « 1977 »). Une de début de la série : 1225, 1714 (dérivation de la
procédure de segmentation mise au point par Kander) ou 1808 (début des enregistrements
Darienzo et al. (2021) sera appliquée, en exploitant systématiques) ; série brute ou avec correction n°1
les incertitudes sur les débits de crue qui viennent ou n°2 (pour ramener le débit des crues antérieures
d’être calculées (Tableau 5). aux aménagements de 1714 et 1890 à la situation
actuelle).
Sur la période 1225–2017, on dispose de 27 crues avec
4.1. Test sur le processus de Poisson pour les
un débit Q > 4911 m3/s sur 1268–1713, 11 crues avec un
valeurs de crue du Rhin à Bâle supérieures à un
débit Q > 4322 m3/s sur 1714–1807 (Section 2.1), et 210
seuil
valeurs maximales annuelles sur 1808–2017 (OFEV).
Nous avons appliqué un test d’homogénéité sur la Pour mémoire, les seuils de 4911 et 4322 m3/s correspon
série de crues historiques à Bâle (Figure 11). Le dent aux crues extrêmes recensées par Wetter et al.
principe du test (Lang et al., 1999) consiste à repor (2011), et qui inondé le centre ancien de Bâle (Section
ter sur un graphique la courbe expérimentale du 3.2.2 : quai « Blumenplatz » et place « Fischmarkt »).
Figure 11. Test de Poisson sur l’homogénéité de la série de débits de crue du Rhin à Bâle supérieurs à un seuil : a) données brutes ;
b) correction n°1 ; c) correction n°2.
LHB: HYDROSCIENCE JOURNAL 11
Tableau 6. Contrôle d’homogénéité sur les valeurs maximales annuelles de crue du Rhin (p-value p pour le test de Pettitt).
Série Période Données Test de Pettitt Procédure de Darienzo
Bâle 1890–2017 Brutes p = 2E-3 ; rupture en 1933 Rupture vers 1929–1930
1808–2017 Brutes p = 2E-4 ; rupture en 1933 Rupture vers 1930–1933
Corrigées (1714 et 1890) p = 1E-3 ; rupture en 1964 Rupture 1966 ou 1976
Maxau 1815–2018 Brutes p = 2E-3 ; rupture en 1976 Rupture en 1976
Correction n°1 Pas de rupture Pas de rupture (*)
Rupture en 1976 (**)
(*) Procédure de Darienzo appliquée en considérant que les débits de crue sont connus exactement
(**)Procédure de Darienzo appliquée en considérant que les débits de crue ont une incertitude (Tableau 5)
Figure 12. Résultats de la procédure de segmentation de Darienzo et al. (2021) sur la série corrigée de débit maximum annuel : a) à
Bâle (1808–2017) ; b) et c) à Maxau (1815–2018) sans/avec incertitudes sur les débits ; avec la date de rupture la plus probable
(maxpost, trait vertical pointillé en bleu), la densité de probabilité de la date de rupture (en-dessous en bleu), la valeur moyenne
par période (trait horizontal en rouge), et les incertitudes paramétrique et totale (bandeaux rouge et rose).
12 M. LANG ET AL.
Sur la Figure 11a (gauche), avec 39 crues supérieures contre, en incluant les incertitudes calculées
à 4911 m3/s sur 1225–2017, on observe davantage de précédemment (Tableau 5), une rupture est
crues sur la période 1651–1764 et une sortie de l’inter détectée vers 1976 avec la procédure de Darienzo
valle de confiance. En raisonnant avec la correction n°1, (Figure 12c).
le seuil de 4911 m3/s est réduit à 4041 m3/s (correction Au final, les corrections apportées sur les séries de
du Jura et dérivation de la Kander). On comptabilise 45 Bâle et Maxau permettent d’améliorer l’homogénéité
crues ayant dépassé 4041 m3/s, et la série apparaît des séries. Il subsiste toutefois une rupture sur les
comme homogène (Figure 11b, gauche). Avec la correc deux séries, vers 1966 ou 1976, qui ne peut être
tion n°2 (Figure 11c, gauche), la série reste hétérogène. expliquée par un changement métrologique. Nous
Le test de Poisson a également été appliqué sur les n’avons pas connaissance d’aménagement de grande
périodes 1714–2017 et 1808–2017 (Figure 11, milieu et ampleur du territoire qui puisse expliquer cette rupture.
droite). On retrouve le même comportement, avec une Brönnimann et al. (2019) pointent en Europe centrale
série brute considérée comme hétérogène, de même une période plus intense de crues au XIXe siècle, et une
que la série modifiée avec la correction n°2 (CECR, période moins active 1943–1970 (« flood-poor period »,
1978). La série issue de la correction n°1, qui prend en Figure 11b, Brönnimann et al., 2019), qui induit que la
compte par modélisation hydraulique (Wetter et al., période après 1970 a bien été plus active qu’avant 1970.
2011) l’effet des aménagements réalisés en 1714 et Schmocker-Fackel et Naef (2010a, 2010b) mentionnent
1890, peut être considérée comme homogène. également un accroissement de la fréquence des crues
A noter que le diagnostic réalisé sur la série brute en Suisse à partir des années 1970 (Figure 5,
1808–2017 (Figure 11a, droite) n’est pas forcément Schmocker-Fackel & Naef, 2010a, Schmocker-Fackel
très robuste, vu le faible nombre de valeurs de crues & Naef, 2010b). Des investigations complémentaires
avec un débit supérieur à 4322 m3/s (seulement 8 sont nécessaires pour attribuer une cause à la rupture
crues). C’est pour cette raison que le diagnostic sur la constatée vers 1966–1976, mais l’origine climatique
période 1808–2017 est approfondi dans la section sui semble la plus vraisemblable, même si ce point mérite
vante, en raisonnant sur les valeurs maximales d’être approfondi.
annuelles.
5. Conclusions
4.2. Test de segmentation sur les valeurs Les longues séries de débit de crue sur le Rhin à
maximales annuelles du Rhin à Bâle et Maxau Bâle (1225–2017) et Maxau (1815–2018) ont fait
Nous avons appliqué le test de Pettitt (1979) et une l’objet d’une analyse des incertitudes à l’aide du
procédure de segmentation (Darienzo et al., 2021) sur modèle BaRatin. L’exploitation des données dispon
les séries de crues maximales annuelles à Bâle (1808– ibles en hydrométrie (hauteurs d’eau, jaugeages,
2017) et Maxau (1815–2018). Le test permet de géométrie de la section, profils en long, lignes
rechercher une rupture dans une série et indique le d’eau) et d’études hydrauliques (modélisation des
rang de l’échantillon associé à cette rupture. La crues) montre que la qualité de reconstitution des
procédure recherche de façon itérative N ruptures débits de crue au XIXe siècle est meilleure à Bâle
dans une série et fournit pour chaque rupture détectée qu’à Maxau (respectivement ± 20% et ± 40%), du
la densité de probabilité de la date de rupture. fait d’une meilleure stabilité du lit du Rhin à Bâle.
On peut noter dans le Tableau 6 qu’aucune rup Les débits de crue récents sont très bien connus (±
ture n’est détectée dans la série brute à Bâle en lien 5–7%) et les débits de crue anciens sont plus diffi
avec les travaux de correction des eaux du Jura en ciles à estimer (± 45–48%).
1890. Une rupture est positionnée plutôt vers 1930– Les séries de débits corrigés des effets des
1933, qui pourrait correspondre au déplacement de aménagements hydrauliques sont de meilleure qualité
la station de Schifflände à Rheinfelden et d’un nou que les séries brutes. Elles peuvent être considérées
veau mode de calcul des débits. La série corrigée de comme homogènes, à l’exception d’une rupture vers
Bâle est considérée comme hétérogène, avec une 1966–1976, qui semble d’origine climatique. Ces deux
date de rupture vers 1964–1966 ou 1976 longues séries de débits critiquées et validées ont pu être
(Figure 12a), sans explication physique connue. La exploitées pour apporter une réponse sur la qualifica
série brute de Maxau est considérée comme tion en fréquence du débit de débordement du Rhin
hétérogène par les deux approches statistiques. Le supérieur en aval de Strasbourg (Lang et al., 2021).
test de Pettitt conduit à accepter l’hypothèse
d’homogénéité de la série corrigée, de même que la
Disclosure statement
procédure de Darienzo (Figure 12b) si on néglige le
fait que les débits de la série ont une incertitude. Par No potential conflict of interest was reported by the author(s).
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