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Evaluation des incertitudes et de l’homogénéité de

longues séries de débits de crue sur le Rhin à Bâle


(1225–2017) et Maxau (1815–2018)
Michel Lang, Matteo Darienzo, Jérôme Le Coz, Benjamin Renard

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Michel Lang, Matteo Darienzo, Jérôme Le Coz, Benjamin Renard. Evaluation des incertitudes et de
l’homogénéité de longues séries de débits de crue sur le Rhin à Bâle (1225–2017) et Maxau (1815–2018).
LHB Hydroscience Journal, inPress, �10.1080/27678490.2022.2053313�. �hal-03673906�

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Hydroscience Journal

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Evaluation des incertitudes et de l’homogénéité de


longues séries de débits de crue sur le Rhin à Bâle
(1225–2017) et Maxau (1815–2018)

Michel Lang, Matteo Darienzo, Jérôme Le Coz & Benjamin Renard

To cite this article: Michel Lang, Matteo Darienzo, Jérôme Le Coz & Benjamin Renard (2022):
Evaluation des incertitudes et de l’homogénéité de longues séries de débits de crue sur le Rhin à
Bâle (1225–2017) et Maxau (1815–2018), LHB, DOI: 10.1080/27678490.2022.2053313

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SPECIAL SECTION: Hydrometrie 2021

Evaluation des incertitudes et de l’homogénéité de longues séries de débits de


crue sur le Rhin à Bâle (1225–2017) et Maxau (1815–2018)
a a,b a a
Michel Lang , Matteo Darienzo , Jérôme Le Coz and Benjamin Renard
a
INRAE, Unité de recherche RIVERLY, Centre de Lyon-Villeurbanne, Villeurbanne cedex, France ; bCIMA Research Foundations, Savona, Italy

RESUME MOTS CLEFS


Un diagnostic sur la sécurité aux inondations des digues du Rhin en aval de Strasbourg a été Crues ; Rhin ; incertitudes ;
réalisé par INRAE de 2018 à 2020, pour le compte de la DREAL Grand-Est, avec des échanges au données historiques
sein de la Commission Permanente internationale pour l’aménagement du Rhin supérieur. Un KEYWORDS
travail spécifique d’analyse des incertitudes est présenté à l’aide du modèle BaRatin sur la Flood; Rhine; Uncertainty;
reconstitution des débits de crue des séries de Bâle (1225–2017) et Maxau (1815–2018). La Historical data
largeur de l’intervalle d’incertitude à 95% varie à Bâle de ± 7% sur la période récente (1994–
2017) à ± 48% sur la période la plus ancienne (1225–1713), et à Maxau de ± 5% sur la période
récente (1977–2018) à ± 45% sur la période la plus ancienne (1815–1839). L’application de tests
statistiques fait apparaître des hétérogénéités pour les deux séries de crues, qui proviennent
pour partie des aménagements hydrauliques sur le Rhin au cours des deux derniers siècles. Les
séries corrigées de ces effets sont de meilleure qualité, avec toutefois une rupture vers 1966–
1976 à Bâle et Maxau, qui pourrait provenir d’un changement constaté en Europe centrale en
termes de régime de circulation climatique depuis les années 1970.
ABSTRACT
A diagnosis on the safety of dikes from floods along the River Rhine downstream of Strasbourg
was carried out by INRAE, on behalf of the DREAL Grand-Est, with exchanges within the
International Permanent Commission for the Development of the Upper Rhine. Two long series
in Basel (1225–2017) and Maxau (1815–2018) have been reviewed, with an analysis of dis­
charge uncertainties using the BaRatin model. The width of the 95% uncertainty interval of the
flood discharges varies in Basel from ± 7% over the recent period (1994–2017) to ± 48% over
the oldest period (1225–1713), and in Maxau from ± 5% (1977–2018) to ± 45% (1815–1839).
Statistical tests on the flood samples reveal a heterogeneity of the two series, which stems in
part from hydraulic developments to the Rhine over the past two centuries. The series
corrected for these effects are of better quality. However, there is still a step-change around
1966–1976 in Basel and Maxau, which cannot be explained by metrological problems (rating
curve) or by hydraulic engineering on the Rhine or in the catchment area. It could be due to a
change in the climate circulation regime in Central Europe since the 1970s.

1. Introduction
Le niveau de protection contre les inondations du Rhin avec les règles usuelles de dimensionnement des crêtes de
supérieur (Figure 1), entre Kehl-Strasbourg et digues. La crue millénale (resp. décamillénale) de l’étude
Neuburgweier-Lauterbourg, est régi par la convention de l’université allemande (IWG, 2010) validée par la
franco-allemande du 4 juillet 1969 sur l’aménagement Commission Permanente de mai 2010 correspond à
du Rhin. Une série de revanches sont à respecter entre le une crue centennale (resp. millénale) dans certaines
niveau de la crête de digue et la ligne d’eau atteinte pour études françaises. A cet effet, une expertise sur la
différents débits de référence exprimés en m3/s. Les caractérisation des débits extrêmes du Rhin a été
calculs par modélisation hydraulique réalisés par le réalisée par INRAE de 2018 à 2020, pour le compte de
Service de Navigation allemand, et validés en 2010 par la DREAL Grand-Est, avec des échanges au sein de la
la Commission Permanente pour l’aménagement du Commission Permanente internationale pour
Rhin supérieur, montrent que les digues du Rhin à l’aménagement du Rhin supérieur. Un avis a été
l’aval de Strasbourg ne respectent pas ces revanches con­ formulé (Lang, 2020) sur l’estimation des crues de
tractuelles pour les biefs de Gambsheim et Iffezheim, en référence du Rhin (Q10 à Q1500), sur la partie aval du
particulier sur le secteur amont du bief d’Iffezheim. Par cours franco-allemand (biefs de Gambsheim et
ailleurs, les français et les allemands souhaitent avoir une Iffezheim), à partir du traitement de deux longues
appréciation sur la correspondance entre débit de séries hydrométriques du Rhin à Bâle (1808–2017) et
référence et période de retour, pour pouvoir comparer Maxau (1815–2018).

CONTACT Michel Lang [email protected]; [email protected]


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unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.
2 M. LANG ET AL.

Figure 1. Vue en plan du Rhin supérieur, secteur Kembs-Iffezheim (source : CIPR, 2021 ; EDF, 2010), et position des stations
hydrométriques de Bâle et Maxau.

Dans cet article, nous présentons les données dis­ plus en amont, et d’une estimation des apports de l’Ergolz
ponibles en termes de jaugeages et d’évolution morpho­ et de la Birs. A partir de 1994 jusqu’à aujourd’hui, la
logique du lit du Rhin (Section 2), qui vont être station hydrométrique de référence est celle de Bâle/
exploitées pour une analyse des incertitudes de recon­ Rheinhalle. On dispose de 53 jaugeages sur la période
stitution des débits de crue à l’aide du modèle BaRatin 1867–1933 (Figure 3) et de 88 jaugeages sur la période
(Section 3). Une série de tests statistiques est appliquée 1994–2017. Le croisement de différentes sources d’infor­
pour contrôler l’homogénéité des séries (Section 4), mation communiquées par les services hydrométriques
dont une procédure exploitant les incertitudes sur les suisses (OFEV) et allemands (WSV ; BWSK, 1926 ;
débits de crue. Nous concluons (Section 5) sur les CECR, 1972 et fichiers numériques) permet de reconsti­
niveaux d’incertitudes estimés à Bâle et Maxau et la tuer une série continue de valeurs maximales annuelles
qualité des longues séries reconstituées sur plusieurs de débits de crue de 1808 à 2017.
siècles. Le dossier hydrométrique de la station (OFEV)
contient une série de 5 profils en travers anciens (en
1914, 1916, 1918, 1922 et 1930) de la section du lit
2. Longues séries de Bâle et Maxau mineur du Rhin, qui montrent une certaine stabilité de
la section sur la période 1914–1922 et un enfoncement
2.1. Données disponibles à Bâle (Suisse)
du lit sur le levé de 1930 sur une partie de la section.
Plusieurs emplacements ont été retenus au cours du Un document allemand (BWSK, 1930) représente le
temps pour mesurer les hauteurs d’eau et estimer les profil en long du Rhin de Bâle à Mannheim (annexe 9 :
débits du Rhin à Bâle (Figure 2, avec la superficie du tronçon d’environ 250 km) pour différentes dates :
bassin contrôlé par chaque station). La station 1830, 1852, 1895, 1902, 1926.
hydrométrique de Bâle/Schifflände a été implantée en On peut noter sur le Tableau 1 que la pente du Rhin
1808 et a été la station de référence jusque 1933, date de à Bâle est restée stable (autour de 10−3, avec une légère
mise en service du barrage de Kembs qui depuis influence augmentation continue de 0.8 à 1.1 10−3), mais que le
la relation hauteur-débit. La période 1934–1993 est assez lit s’est incisé. Par ailleurs, un recensement des plus
difficile à suivre, aucun jaugeage ni courbe de tarage fortes crues de la période 1225–1807 a été réalisé par
n’ayant pu être récupérés. Le débit sur cette période Wetter et al. (2011), à partir des niveaux atteints dans
a été estimé à partir de la station de Bâle/Rheinfelden la vieille ville et d’un modèle hydraulique. On dispose
LHB: HYDROSCIENCE JOURNAL 3

Figure 2. Plan de situation des stations hydrométriques dans le secteur de Bâle (repris d’un schéma EDF et des informations
fournies par l’OFEV, gestionnaire de la station).

fréquence des relevés a varié entre 1815 et 1881 (de 1 à


3 fois par jour suivant les périodes). Elle est passée à 3
fois par jour (5, 13 et 21 h) à partir de 1881. Les hautes
eaux ont été relevées de façon plus fréquente, de façon
à ne pas rater la pointe de crue. Le premier limni­
graphe est implanté en 1888, mais suite à des
problèmes métrologiques, les premiers enregistre­
ments en continu et validés des hauteurs ne commen­
cent qu’en 1897. Du fait de la seconde guerre
mondiale, les mesures ont été interrompues à plu­
sieurs reprises de mai 1942 à novembre 1943, et la
station de mesure a été détruite en novembre 1943. Un
Figure 3. Jaugeages sur le Rhin à Bâle/ Schifflände 1867–1933 nouveau limnigraphe a été installé fin février 1946.
(au flotteur de 1867 à 1908, au moulinet en surface de 1910 à Les débits de crue sont disponibles en continu depuis
1933). 1821, à partir de 22 courbes de tarage reconstituées sur la
période 1821–1973 (CECR, 1978) et de 15 courbes de
tarages établies à l’aide des 850 jaugeages réalisés depuis
Tableau 1. Evolution de la pente et de l’altitude du fond du lit
1947, dont 42 jaugeages avec un débit de crue supérieur à
mineur du Rhin à Bâle (période 1830–1926). Zéro échelle
Z = 243.90 m. 3000 m3/s. Le Rhin a fait l’objet d’importants travaux de
Année 1830 1852 1895 1902 1926 rectification au XIXe siècle et d’aménagements pour la
Pente du Rhin 0.8 10−3 0.8 10−3 1.0 10−3 1.1 10−3 1.1 10−3 navigation au XXe siècle. A partir du suivi de l’évolution
Fonds du lit (m) 244.5 244.5 244 244 243 des niveaux du Rhin à Maxau sur la période 1810–1927
(BWSK, 1930) et de leur interprétation (BAW, 2015),
nous avons reporté sur la Figure 4 les évolutions du lit
ainsi d’une collection de 38 crues avant la mise en
du Rhin de 1815 à 1946. On note une incision de plus
service de la station hydrométrique : 27 crues avec
d’un mètre de 1815 à 1904, suivie d’un exhaussement de
Q > 4911 m3/s sur la période 1268–1713 ; et 11 crues
30 à 40 cm de 1905 à 1946.
avec Q > 4322 m3/s sur la période 1714–1807.

3. Estimation des incertitudes sur les débits


2.2. Données disponibles à Maxau (Allemagne)
de crue
Les informations ont été fournies par le gestionnaire
3.1. Le modèle BaRatin
de la station, le WSV (Voies Navigables du Rhin
supérieur). Les premiers relevés systématiques de hau­ Les incertitudes sur les débits de crue à Bâle et Maxau
teur d’eau à Maxau (Zéro échelle Z = 97.79 m ; sont estimées à l’aide du modèle BaRatin (Le Coz et al.,
Superficie 50,343 km2) ont été réalisés à partir de 2014). Le principe est de croiser, par une approche
1815. D’après le dossier de la station (WSV, 1975), la bayésienne, une expertise sur les contrôles hydrauliques
4 M. LANG ET AL.

Figure 4. Evolution du fond du lit du Rhin à Maxau de 1815 à 1946 (BAW, 2015 ; BWSK, 1930) et hypothèses retenues pour le calcul
d’incertitudes avec le modèle BaRatin.

qui conditionnent la relation hauteur-débit avec les 3.2. Incertitudes des débits de crue du Rhin à Bâle
jaugeages disponibles. La méthode produit une estima­
3.2.1. Périodes avec jaugeages
tion de la courbe de tarage et des incertitudes associées
Période récente 1994–2017. A partir d’un profil en
(intervalle de confiance à 95% par exemple). La formu­
travers levé en 2011 (Figure 5), nous avons
lation de l’a priori repose sur l’identification des
déterminé la section rectangulaire équivalente du lit
contrôles hydrauliques au droit de la station
mineur, et retenu une largeur B1 = 165 ± 20 m. Nous
hydrométrique (chenal, seuil . . .) et des paramètres
avons estimé la largeur du lit majeur à B2
associés (géométrie de la section, pente du lit, coeffi­
= 130 ± 20 m, d’après l’extension de la zone inondable
cient de Strickler). Dans le cas d’un écoulement avec un
dans le centre ancien de Bâle (Wetter et al., 2011).
contrôle par un chenal, d’abord en lit mineur puis en lit
Pour un contrôle hydraulique par un chenal rectangu­
majeur, la relation Q(H|θ) peut s’exprimer par des lois
laire large, avec une formulation dérivée de l’équation
puissance :
de Manning-Strickler : Q ¼ BKS1=2 H 5=3 , les plages de
k1 < H � k2 ðlit mineurÞ : QðH Þ ¼ a1 ðH b1 Þc1 (1a) valeurs retenues sur les paramètres physiques (B :
largeur de la section ; K : coefficient de Strickler ; S :
H � k2 ðlit majeurÞ : pente du lit) sont résumées dans le Tableau 2, avec
(1b) également les hauteurs d’activation k1 et k2.
QðH Þ ¼ a1 ðH b1 Þc1 þ a2 ðH b2 Þc2
Le croisement des hypothèses faites sur ces
avec θ = (a1,a2,c1,c2,k1,k2) le vecteur des paramètres de paramètres avec 57 jaugeages ADCP (hauteur
la courbe de tarage (les paramètres b1 et b2 étant H > 5.5 m ; incertitude de mesure ± 5%) de la période
déduits des autres paramètres par continuité de la 1994–2018 donne une courbe de tarage BaRatin
relation QðH Þ en H ¼ k2 ). L’incertitude sur les débits a posteriori avec une incertitude de l’ordre de ± 4%
jaugés est estimée (GDH, 2017, tableau 4.2) d’après le (Figure 6). Nous avons reporté également les deux
type de jaugeage (exploration complète du champ de courbes de tarage de l’OFEV les plus extrêmes de la
vitesses ou seulement de la surface, dilution d’un tra­ période (N°10 de l’année 1995 et N° 16 de l’année 2002),
ceur) et des modalités de mesure de la vitesse (ADCP, ainsi que le débit estimé par l’OFEV pour les deux plus
moulinet, radar, caméra). fortes crues de la période : le 09/08/2007 et le 12/05/
Pour la période antérieure à l’existence de jau­ 1999. Si l’on affecte une incertitude de ± 7% aux débits
geages, le modèle BaRatin est appliqué de façon de crue de 2007 et 1999, la borne supérieure correspond
rétroactive, en remontant dans le temps depuis la à l’estimation BaRatin. Au final, nous retiendrons cette
première courbe de tarage calée à partir de jaugeages. incertitude de ± 7% pour le débit des crues maximales
Les informations disponibles sur l’évolution morpho­ annuelles de la période 1994–2017.
logique du lit du Rhin sont exploitées pour définir une Période 1867–1933. Aucun jaugeage n’ayant pu être
série de sous-périodes homogènes, avec pour chacune obtenu sur la période 1934–1993, nous avons poursuivi
une hypothèse sur les paramètres hydrauliques. l’analyse sur la période 1867–1933 (Bâle/Schifflände), pour
LHB: HYDROSCIENCE JOURNAL 5

Figure 5. Profil en travers du Rhin à Bâle/ Rheinhalle (HKV, 2011) avec une section rectangulaire équivalente, et le report
approximatif des hauteurs HX(100), HX(10), HA et HN(10) associées respectivement aux débits de crue de période de retour 100 et
10 ans, au débit moyen annuel, et au débit d’étiage décennal.

Tableau 2. Paramètres retenus pour le tracé a priori de la courbe de tarage du Rhin à Bâle/ Rheinhalle (période récente).
Lit mineur Lit majeur
Paramètres physiques k1 (m) K1 (m1/3/s) B1 (m) S1 c1 k2 (m) K2 (m1/3/s) B2 (m) S2 c2
1.3 ± 0.5 35 ± 5 165 ± 20 10−3 ± 510−4 1.67 ± 0.05 9 ± 0.5 15 ± 5 130 ± 20 10−3 ± 5 10−4 1.67 ± 0.05
pffiffiffiffi pffiffiffiffi
Paramètres de la courbe k1 a1 ¼ K 1 B 1 S 1 c1 k2 a2 ¼ K2 B2 S2 c2
idem 186.6 ± 57 idem idem 71.1 ± 31 idem

3.2.2. Périodes sans jaugeages


Période 1808–1866. Aucun jaugeage n’étant dispon­
ible, nous reprenons les valeurs a posteriori des
paramètres hydrauliques de la période 1867–1908
pour les valeurs a priori du lit mineur de la période
1808–1866, en dégradant l’information de certains
paramètres susceptibles d’être affectés par de poten­
tiels détarages (Tableau 3). On notera une différence
importante sur les hauteurs d’activation k1 et k2 de la
période 1867–1909, prior et posterior, qui reste diffi­
cile à interpréter. Les valeurs a priori ont été fixées à
Figure 6. Courbe de tarage du Rhin à Bâle/ Rheinhalle, période partir d’informations limitées, issues de profils en
récente 1994–2017 : estimation BaRatin, report des deux long (période 1830–1906), sans relevé de profil en
courbes de tarage extrêmes et des deux plus forts débits de travers. Les valeurs a posteriori ont bénéficié de l’in­
crue. formation apportée par les 11 jaugeages de la période
1867–1909.
D’après le Tableau 1, nous voyons que le fond du lit
laquelle une série de profils en travers (1914–1930) et de a baissé de 0.5 m entre 1852 et 1895 : nous retenons
profils en long (1830–1926) donnent une idée de la topo­ une hauteur d’activation du lit mineur plus haute de
graphie du lit mineur du Rhin. D’après les 70 jaugeages 0.5 m sur la période 1808–1866, et augmentons l’in­
disponibles, nous avons distingué trois sous-périodes : certitude : k1 = −0.9 ± 0.5 m. Nous retenons pour le
1867–1909, 1910–1925, 1926–1933. Les incertitudes obte­ Strickler K1 une fourchette [35 ; 40] m1/3/s, pour la
nues avec le modèle BaRatin sont respectivement de largeur B1 une fourchette [165 ; 175] m et pour la
½ 12% ; þ26%�; ½ 5% ; þ9%� et [−7% ; +10%]. A titre pente S1 une fourchette [6 10−4 ; 10−3]. Pour le lit
conservatoire, en considérant une augmentation des incer­ majeur, en l’absence de meilleure information, nous
titudes en remontant dans le temps, l’incertitude sur la conservons les valeurs a priori de la période 1867–
période 1910–1925 a été prise identique à celle de 1926– 1908, sauf pour la pente S2, que nous prenons iden­
1933, à savoir [−7% ; +10%]. tique à celle du lit mineur.
6 M. LANG ET AL.

Nous avons reporté sur la Figure 7 la courbe de tarage

1.67 ± 0.05

1.67 ± 0.02

1.67 ± 0.05

1.67 ± 0.05
BaRatin obtenue avec ces valeurs a priori, et également

c2
trois couples (H, Q) obtenus par modélisation hydrauli­
que (table 2, de Wetter et al., 2011). Les débits correspon­
dent à la submersion de différents emplacements de
référence dans le centre historique de Bâle :

9 10−4 ± 1.5 10−4


8 10−4 ± 2 10−4

8 10−4 ± 5 10−4
−4
10 ± 5 10
S2 • Quai « Blumenplatz » inondé : altitude Z = 249.6 m,
−3 Q = 4300 m3/s ;
a2 ¼ K2 B2 S2 ¼ 61:7 � 13:8 • Début d’inondation de « Fischmarkt » : altitude

a2 = 232.6 ± 68.6
a2 = 66.9 ± 13.8

a2 = 55.2 ± 21.4
Z = 250.1 m, Q = 4900 m3/s ;
Lit majeur

• Fortes inondations de « Fischmarkt » : altitude


± ffi20

130 ± 10
130 ± 20

130 ± 20
Z = 251.1 m, Q = 6400 m3/s.
ffiffiffi
B2 (m)
130 p

On note une bonne cohérence entre la courbe de


Tableau 3. Paramètres retenus pour la courbe de tarage BaRatin avec incertitudes du Rhin à Bâle/ Rheinhalle : période 1808–1866 et 1225–1807.

tarage Baratin estimée de façon très approximative à


partir de valeurs a priori des paramètres hydrauliques,
K2 (m1/3/s)
15 ± 5

17 ± 3
15 ± 5

20 ± 5

et celle obtenue par modélisation hydraulique. Les


incertitudes de la courbe de tarage Baratin sont de
[−18% ; +22%]. A titre conservatoire, de façon à avoir
des incertitudes plus importantes en remontant dans le
9 ± 0.5

5 ± 0.3

5 ± 0.5

5 ± 0.5
k2 (m)

passé, comme l’intervalle d’incertitude sur la période


1867–1909 était de [−12% ; + 26%], nous retenons une
incertitude finale sur les débits de la période 1808–1866
comprise dans l’intervalle [−18% ; +26%].
1.67 ± 0.05

1.66 ± 0.02

1.67 ± 0.05

1.67 ± 0.05

Période 1225–1807. Wetter et al. (2011) ont recensé


c1

38 crues ayant inondé le centre ancien de Bâle. Nous


avons fait une série d’hypothèses sur la valeur des
paramètres de la courbe de tarage (Tableau 3), en
retenant des incertitudes plus fortes (hauteur d’activa­
8 10−4 ± 1.5 10−4
8 10−4 ± 2 10−4

8 10−4 ± 5 10−4
−4

tion du lit mineur k1, Strickler K1 et K2, pente S1 et S2),


10 ± 5 10

qui conduisent à une incertitude de [−35% ; +44%].


S1
−3

Période intermédiaire 1934–1993. Cette période,


a1 ¼ K1 B1 S1 ¼ 191:5 � 59:4

pour laquelle aucun jaugeage ni courbe de tarage


a1 = 185.2 ± 18.1

a1 = 180.3 ± 26.1

a1 = 168.3 ± 58.0

n’ont pu être récupérés, est encadrée par deux


Lit mineur

périodes 1910–1933 et 1994–2017 où les incertitudes


173p±ffiffiffi20

170 ± 2
170 ± 5

170 ± 5

sont faibles, ±9% et ±7% du fait de l’existence de


ffi
B1 (m)

jaugeages. A titre conservatoire, nous avons retenu


une incertitude de ±20%, voisine de celle des
périodes 1808–1866 (±22%) et 1867–1909 (±19%).
37.5 ± 2.5
K1 (m1/3/s)

38.5 ± 1
35 ± 5

35 ± 5

3.3. Incertitudes des débits de crue du Rhin à


Maxau
Période 1947–2017. On dispose de la topographie
−1.4 ± 0.1

−0.9 ± 0.5
0.5 ± 0.5

−1 ± 1
k1 (m)

détaillée de la section d’écoulement et d’une série de


850 jaugeages. En l’absence d’information précise sur le
mode opératoire de chaque jaugeage, nous avons fait
l’hypothèse qu’ils avaient été réalisés au moulinet jusque
posterior

fin 1999 et à l’ADCP depuis 2000, avec une incertitude de


prior

prior

prior

respectivement ± 10 % et ± 5 % sur les débits. Cette


incertitude a été majorée pour les débits de crue (débit
supérieur à 3000 m3/s, soit H > 7.6 m) d’un facteur
1867–1909

1808–1866

1225–1807

multiplicatif égal à 2. Le Tableau 4 récapitule les incerti­


Période

tudes retenues sur les débits jaugés.


LHB: HYDROSCIENCE JOURNAL 7

Figure 7. Courbe de tarage BaRatin a priori sur le Rhin à Bâle/ Schifflände, période 1808–1866, avec le report de trois couples (H,Q)
obtenus par modélisation hydraulique (Wetter et al., 2011).

Une procédure de segmentation (Darienzo et al., [−5% ; +4%] sur la période 1947–1968, et de [−3% ;
2021) a permis de décomposer cette période 1947– +2%] sur la période 1968–2017. Le modèle SPD
2017 en 11 sous-périodes, au lieu des 37 courbes de a donné une estimation du paramètre b1 du fond du
tarage officielles (Figure 8). lit mineur pour les 11 sous-périodes. On note un
Une variante du modèle BaRatin-SPD (Mansanarez exhaussement d’environ 50 cm de 1947 à 2017
et al., 2019) a été utilisée pour rechercher les (Figure 9), qui est cohérent avec le suivi morphologi­
paramètres (ai,bi,ci) des courbes de tarage des 11 sous- que du lit du Rhin (BAW, 2015).
périodes en une seule itération. On obtient une incer­ Période antérieure 1815–1946. Aucun jaugeage n’est
titude très faible sur les débits, respectivement de disponible. Nous avons repris les valeurs a posteriori de
la courbe BaRatin de la période 1947–1968 qui a suivi,
en dégradant l’information sur les paramètres a1 et a2
Tableau 4. Incertitudes retenues sur les débits jaugés du Rhin de la courbe de tarage (équation 1), et en intégrant les
à Maxau de 1947 à 2017. informations disponibles sur l’évolution morphologi­
Période Jaugeage Q ≤ 3000 m3/s Q > 3000 m3/s que du lit du Rhin. Nous avons distingué 6 sous-
1947–1999 Moulinet ± 10% ± 20% périodes considérées comme homogènes (Figure 4) :
2000–2017 ADCP ± 5% ± 10%
1815–1820, 1821–1839, 1840–1874, 1875–1904, 1905–

Figure 8. Segmentation des jaugeages du Rhin à Maxau (période 1947–2017) (le second graphe donne les densités de probabilité
des dates de rupture – en bleu, et la date la plus probable – en rouge).
8 M. LANG ET AL.

(1) les premiers « travaux de correction des eaux


du Jura » sur la période 1868–1890 ont
consisté à dériver le cours de l’Aar pour le
faire transiter par le lac de Bienne et à
accroître les capacités d’échange entre ce lac et
les lacs de Neuchatel et Morat. L’impact de ces
travaux a été significatif et a fait l’objet d’études
hydrauliques pour estimer l’effet de laminage
suivant le débit de la crue. Il commence à partir
d’un débit de 2600 m3/s et plafonne au-delà
d’un certain débit. Pour Wetter et al. (2011),
le laminage peut aller jusqu’à une réduction
Figure 9. Variations du paramètre b1 (fonds du lit mineur) du maximale de 600 m3/s (correction n°1) au-
Rhin à Maxau, pour les 11 sous-périodes de 1947 à 2017 delà d’un débit de 3900 m3/s. Pour l’étude
(valeur estimée et intervalle de confiance à 95%). CECR (1978), le laminage serait plus impor­
tant, avec une réduction maximale de
1300 m3/s (correction n°2) au-delà d’un débit
1929 et 1930–1946. La courbe de la première période de 5400 m3/s. Par la suite, nous testerons les
1815–1820 est obtenue par simple translation de la deux modes de correction, en donnant toute­
première courbe officielle en 1821–1827, avec une inci­ fois la préférence pour la correction n°1 basée
sion du fond du lit de 0.74 m entre 1820 et 1826 (BWSK, sur des études plus récentes.
1930). Les incertitudes obtenues avec la courbe BaRatin (2) la dérivation d’un affluent de l’Aar, la
pour certaines sous-périodes étant voisines, nous avons Kander, dans le lac Thun en 1714. L’effet de
retenu une incertitude de [−37% ; +48%] sur la période cet aménagement a été estimé par Wetter et al.
1815–1839 et de [−27% ; +37%] sur la période 1840–1946. (2011) à l’aide d’un modèle hydraulique. Les
A noter (Figure 10) que les courbes BaRatin sont crues historiques de la période 1268–1713,
assez nettement inférieures aux courbes de tarage offi­ supérieures à 4911 m3/s à Bâle, sont baissées
cielles sur la période 1840–1946 (−13% à – 42% pour de 270 m3/s pour tenir compte des effets de cet
les hauteurs comprises entre 7 et 8.8 m). Les courbes aménagement si les crues étaient survenues
officielles sont situées juste en-dessous de la borne dans l’état actuel, ainsi que de 600 à 1300 m3/s
supérieure de l’intervalle de confiance à 95% des (correction n°1 ou n°2) du fait des travaux de
courbes BaRatin. Les données officielles de débit de correction du Jura.
crue restent cohérentes avec celles estimées avec
BaRatin, avec prise en compte des incertitudes. Pour le Rhin à Maxau, la correction à appliquer
Il est difficile d’aller plus loin dans la comparaison : résulte des aménagements hydrauliques sur le Rhin
les courbes BaRatin sont bâties sur une série supérieur qui ont fortement modifié la propagation
d’hypothèses sur les paramètres physiques du lit des crues entre Bâle et Maxau. La série « brute » de
mineur et du lit majeur (hauteur d’activation k, Maxau a été corrigée pour ramener tous les débits de
Strickler K, largeur B, pente S, exposant c lié au type crue dans l’état d’aménagement de 1977 (référence pour
de contrôle hydraulique), d’informations sur la mor­ la convention franco-allemande du 6 décembre 1982) :
phologie passée du Rhin, et en remontant dans le
temps depuis la dernière courbe de tarage BaRatin (1) période 1982–2018 : un tableau produit par
avec jaugeages (1947–1968). Les courbes officielles LUBW (2019) résume l’effet de laminage des
reconstituées reposent sur une méthodologie d’inter­ zones de rétention réalisées depuis 1982 pour 7
polation des courbes de débits classés à Bâle et Kaubs, crues (débit à augmenter de +60 à 530 m3/s
situés respectivement 200 km en amont et 150 km en suivant les crues) ;
aval de Maxau (CECR, 1978 ; annexe 3.4). (2) période 1891–1977: les études CECR (1978) et
IWG (2010) indiquent la correction à apporter
pour revenir à un état de référence « 1977 »
3.4. Récapitulatif sur les incertitudes des débits de
(débit à augmenter d’un facteur multiplicatif de
crue du Rhin
0–11% suivant les crues) ;
Les séries « brutes » de débit Q ont été corrigées par un (3) période 1815–1890 : le rapport INRAE (Lang,
facteur multiplicatif c pour obtenir une série « corrigée » : 2020) indique la correction à apporter pour
Q* = (1 + c) Q. Pour le Rhin à Bâle, la correction à revenir à un état de référence « 1977 » (débit à
appliquer résulte de deux aménagements hydrauliques en augmenter d’un facteur multiplicatif de 0–16%
Suisse : suivant les crues).
LHB: HYDROSCIENCE JOURNAL 9

Figure 10. Courbes de tarage à Maxau sur la période 1815–1946 : courbes BaRatin avec intervalle de confiance à 95% et courbes
officielles reconstituées.

L’incertitude finale uQ� sur les débits corrigés Q � Au final, les valeurs retenues pour les incerti­
est obtenue en supposant que les variables Q et c sont tudes sur les débits sont résumées dans le
indépendantes et suivent une loi normale : Tableau 5.
� � � �2 !� �
uQ� 2 uc uQ 2
¼ 1þ 4. Tests sur l'homogénéité des séries de crue
EðQ�Þ 1 þ EðcÞ EðQÞ
� �2 Après avoir estimé l’incertitude sur les débits de crue à
uc
þ (2) Bâle (1225–2017) et Maxau (1815–2018), nous allons
1 þ E ð cÞ
vérifier l’homogénéité de ces deux longues séries.
(E espérance mathématique) Comme les valeurs de débit ont été corrigées pour
10 M. LANG ET AL.

Tableau 5. Incertitudes multiplicatives sur les valeurs de crue du Rhin.


Série de crues du Rhin à Bâle (1225–2017)
Période 1225–1713 1714–1807 1808–1866(*) 1867–1889 1890–1909 1910–1933 1934–1993 1994–2017
Incertitude uQ ±40% ±40% ±22% ±19% ±19% ±9% ±20% ±7%
Correction c −20% −15% −15% −15% 0 0 0 0
Incertitude uc ±50% ±50% ±50% ±50% 0 0 0 0
Incertitude uQ* ±48% ±41% ±24% ±21% ±19% ±9% ±20% ±7%
Série de crues du Rhin à Maxau (1815–2017)
Période 1815–1839 1840–1890 1891–1946 1947–1968 1969–1976 1977–2018
Incertitude uQ ±42% ±32% ±32% ±5% ±3% ±3%
Correction c 16% 16% 10% 10% 10% 2.5 à 20%
Incertitude uc ±100% ±100% ±70% ±70% ±70% ±50%
Incertitude uQ* ±45% ±35% ±33% ±9% ±8% ±5%
(*) avec la correction n°1 (laminage maximal de 600 m3/s)

raisonner sur un même état de référence « 1977 » du nombre cumulé mt de crues sur un intervalle [0 ; t]
Rhin et tenir compte des aménagements réalisés au en fonction de la date t, et à vérifier son position­
cours du temps, les tests d’homogénéité seront nement par rapport à l’intervalle de confiance à
appliqués sur les séries « brutes » (sans correction) et 90%. Nous avons considéré 9 configurations : date
les séries « corrigées » (état de référence « 1977 »). Une de début de la série : 1225, 1714 (dérivation de la
procédure de segmentation mise au point par Kander) ou 1808 (début des enregistrements
Darienzo et al. (2021) sera appliquée, en exploitant systématiques) ; série brute ou avec correction n°1
les incertitudes sur les débits de crue qui viennent ou n°2 (pour ramener le débit des crues antérieures
d’être calculées (Tableau 5). aux aménagements de 1714 et 1890 à la situation
actuelle).
Sur la période 1225–2017, on dispose de 27 crues avec
4.1. Test sur le processus de Poisson pour les
un débit Q > 4911 m3/s sur 1268–1713, 11 crues avec un
valeurs de crue du Rhin à Bâle supérieures à un
débit Q > 4322 m3/s sur 1714–1807 (Section 2.1), et 210
seuil
valeurs maximales annuelles sur 1808–2017 (OFEV).
Nous avons appliqué un test d’homogénéité sur la Pour mémoire, les seuils de 4911 et 4322 m3/s correspon­
série de crues historiques à Bâle (Figure 11). Le dent aux crues extrêmes recensées par Wetter et al.
principe du test (Lang et al., 1999) consiste à repor­ (2011), et qui inondé le centre ancien de Bâle (Section
ter sur un graphique la courbe expérimentale du 3.2.2 : quai « Blumenplatz » et place « Fischmarkt »).

Figure 11. Test de Poisson sur l’homogénéité de la série de débits de crue du Rhin à Bâle supérieurs à un seuil : a) données brutes ;
b) correction n°1 ; c) correction n°2.
LHB: HYDROSCIENCE JOURNAL 11

Tableau 6. Contrôle d’homogénéité sur les valeurs maximales annuelles de crue du Rhin (p-value p pour le test de Pettitt).
Série Période Données Test de Pettitt Procédure de Darienzo
Bâle 1890–2017 Brutes p = 2E-3 ; rupture en 1933 Rupture vers 1929–1930
1808–2017 Brutes p = 2E-4 ; rupture en 1933 Rupture vers 1930–1933
Corrigées (1714 et 1890) p = 1E-3 ; rupture en 1964 Rupture 1966 ou 1976
Maxau 1815–2018 Brutes p = 2E-3 ; rupture en 1976 Rupture en 1976
Correction n°1 Pas de rupture Pas de rupture (*)
Rupture en 1976 (**)
(*) Procédure de Darienzo appliquée en considérant que les débits de crue sont connus exactement
(**)Procédure de Darienzo appliquée en considérant que les débits de crue ont une incertitude (Tableau 5)

Figure 12. Résultats de la procédure de segmentation de Darienzo et al. (2021) sur la série corrigée de débit maximum annuel : a) à
Bâle (1808–2017) ; b) et c) à Maxau (1815–2018) sans/avec incertitudes sur les débits ; avec la date de rupture la plus probable
(maxpost, trait vertical pointillé en bleu), la densité de probabilité de la date de rupture (en-dessous en bleu), la valeur moyenne
par période (trait horizontal en rouge), et les incertitudes paramétrique et totale (bandeaux rouge et rose).
12 M. LANG ET AL.

Sur la Figure 11a (gauche), avec 39 crues supérieures contre, en incluant les incertitudes calculées
à 4911 m3/s sur 1225–2017, on observe davantage de précédemment (Tableau 5), une rupture est
crues sur la période 1651–1764 et une sortie de l’inter­ détectée vers 1976 avec la procédure de Darienzo
valle de confiance. En raisonnant avec la correction n°1, (Figure 12c).
le seuil de 4911 m3/s est réduit à 4041 m3/s (correction Au final, les corrections apportées sur les séries de
du Jura et dérivation de la Kander). On comptabilise 45 Bâle et Maxau permettent d’améliorer l’homogénéité
crues ayant dépassé 4041 m3/s, et la série apparaît des séries. Il subsiste toutefois une rupture sur les
comme homogène (Figure 11b, gauche). Avec la correc­ deux séries, vers 1966 ou 1976, qui ne peut être
tion n°2 (Figure 11c, gauche), la série reste hétérogène. expliquée par un changement métrologique. Nous
Le test de Poisson a également été appliqué sur les n’avons pas connaissance d’aménagement de grande
périodes 1714–2017 et 1808–2017 (Figure 11, milieu et ampleur du territoire qui puisse expliquer cette rupture.
droite). On retrouve le même comportement, avec une Brönnimann et al. (2019) pointent en Europe centrale
série brute considérée comme hétérogène, de même une période plus intense de crues au XIXe siècle, et une
que la série modifiée avec la correction n°2 (CECR, période moins active 1943–1970 (« flood-poor period »,
1978). La série issue de la correction n°1, qui prend en Figure 11b, Brönnimann et al., 2019), qui induit que la
compte par modélisation hydraulique (Wetter et al., période après 1970 a bien été plus active qu’avant 1970.
2011) l’effet des aménagements réalisés en 1714 et Schmocker-Fackel et Naef (2010a, 2010b) mentionnent
1890, peut être considérée comme homogène. également un accroissement de la fréquence des crues
A noter que le diagnostic réalisé sur la série brute en Suisse à partir des années 1970 (Figure 5,
1808–2017 (Figure 11a, droite) n’est pas forcément Schmocker-Fackel & Naef, 2010a, Schmocker-Fackel
très robuste, vu le faible nombre de valeurs de crues & Naef, 2010b). Des investigations complémentaires
avec un débit supérieur à 4322 m3/s (seulement 8 sont nécessaires pour attribuer une cause à la rupture
crues). C’est pour cette raison que le diagnostic sur la constatée vers 1966–1976, mais l’origine climatique
période 1808–2017 est approfondi dans la section sui­ semble la plus vraisemblable, même si ce point mérite
vante, en raisonnant sur les valeurs maximales d’être approfondi.
annuelles.

5. Conclusions
4.2. Test de segmentation sur les valeurs Les longues séries de débit de crue sur le Rhin à
maximales annuelles du Rhin à Bâle et Maxau Bâle (1225–2017) et Maxau (1815–2018) ont fait
Nous avons appliqué le test de Pettitt (1979) et une l’objet d’une analyse des incertitudes à l’aide du
procédure de segmentation (Darienzo et al., 2021) sur modèle BaRatin. L’exploitation des données dispon­
les séries de crues maximales annuelles à Bâle (1808– ibles en hydrométrie (hauteurs d’eau, jaugeages,
2017) et Maxau (1815–2018). Le test permet de géométrie de la section, profils en long, lignes
rechercher une rupture dans une série et indique le d’eau) et d’études hydrauliques (modélisation des
rang de l’échantillon associé à cette rupture. La crues) montre que la qualité de reconstitution des
procédure recherche de façon itérative N ruptures débits de crue au XIXe siècle est meilleure à Bâle
dans une série et fournit pour chaque rupture détectée qu’à Maxau (respectivement ± 20% et ± 40%), du
la densité de probabilité de la date de rupture. fait d’une meilleure stabilité du lit du Rhin à Bâle.
On peut noter dans le Tableau 6 qu’aucune rup­ Les débits de crue récents sont très bien connus (±
ture n’est détectée dans la série brute à Bâle en lien 5–7%) et les débits de crue anciens sont plus diffi­
avec les travaux de correction des eaux du Jura en ciles à estimer (± 45–48%).
1890. Une rupture est positionnée plutôt vers 1930– Les séries de débits corrigés des effets des
1933, qui pourrait correspondre au déplacement de aménagements hydrauliques sont de meilleure qualité
la station de Schifflände à Rheinfelden et d’un nou­ que les séries brutes. Elles peuvent être considérées
veau mode de calcul des débits. La série corrigée de comme homogènes, à l’exception d’une rupture vers
Bâle est considérée comme hétérogène, avec une 1966–1976, qui semble d’origine climatique. Ces deux
date de rupture vers 1964–1966 ou 1976 longues séries de débits critiquées et validées ont pu être
(Figure 12a), sans explication physique connue. La exploitées pour apporter une réponse sur la qualifica­
série brute de Maxau est considérée comme tion en fréquence du débit de débordement du Rhin
hétérogène par les deux approches statistiques. Le supérieur en aval de Strasbourg (Lang et al., 2021).
test de Pettitt conduit à accepter l’hypothèse
d’homogénéité de la série corrigée, de même que la
Disclosure statement
procédure de Darienzo (Figure 12b) si on néglige le
fait que les débits de la série ont une incertitude. Par No potential conflict of interest was reported by the author(s).
LHB: HYDROSCIENCE JOURNAL 13

ORCID HKV. (2011). Fichier Daten_Basel_Maxau.xlsx. Profils en


travers, profil en long et coefficients de Strickler utilisés
Michel Lang http://orcid.org/0000-0003-1417-1495 pour la modélisation hydraulique des crues du Rhin.
Matteo Darienzo http://orcid.org/0000-0002-9184-4131 IWG. (2010). Détermination des débits extrêmes pour les
Jérôme Le Coz http://orcid.org/0000-0003-1243-6955 biefs de Gambsheim et d’Iffezheim. Univ. Karlsruhe. 49
Benjamin Renard http://orcid.org/0000-0001-8447-5430 p. + annexes.
Lang. (2020). Expertise sur l’hydrologie du Rhin sur les biefs
de Gambsheim et Iffezheim (pp. 101). INRAE.
Disponibilité des données Lang, M., Le Coz, J., Renard, B., & Darienzo, M. (2021, juin
22-24). Design flood assessment on the upper Rhine
Les données relatives aux résultats de cette étude sont dispon­ using historical data and accounting for discharge
ibles auprés de l’auteur, Michel Lang, suivant une requête uncertainty. FLOODrisk 2020 – 4th European
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