2016 Gérard Bitters

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REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE

Union-Discipline-Travail
Ministère de l’Enseignement supérieur et
de la Recherche Scientifique

UFR des Sciences de la Nature

MEMOIRE DE MASTER
Filière : Botanique et Phytothérapie

Année universitaire: 2014-2015

THEME :

Etude ethnobotanique des plantes employées dans la


confection des «bitters», macération alcoolique
traditionnelle, chez les Agni-Ndenye et les Agni
Sanwi (Est et Sud-Est de la Côte d'Ivoire)

Présenté par KOUASSI Kouassi Gérard

Soutenu publiquement le 27 /01/2016 devant le Jury composé de :

Président de jury : M. BAKAYOKO Adama, Maître de Conférences, Université Nangui Abrogoua


Directeur scientifique : M. MALAN Djah François, Maître de Conférences, Université Nangui Abrogoua
Examinateur : M. KONE Moussa, Maître de Conférences, Université Nangui Abrogoua
Examinateur : M. KOUAKOU Kouakou Léandre, Maître de Conférences, Université Nangui Abrogoua
TABLE DES MATIERES Page

DEDICACE ............................................................................................................................... iii


REMERCIEMENTS ................................................................................................................. iv
LISTES DES FIGURES…........................................................................................................ vi
LISTE DES TABLEAUX ......................................................................................................... vi
RESUME.................................................................................................................................. vii
INTRODUCTION ...................................................................................................................... 1
1- GENERALITES…………………………………………………………………….. .......... 3

1.1-Localisation géographique des zones d’étude .............................................................. 3


1.2-Caractéristiques physiques des sites d’étude ................................................................ 4
1.2.1-Climat ..................................................................................................................... 4
1.2.2- Relief et sols .......................................................................................................... 4
1.2.3- Végétation ............................................................................................................. 4
1.3-Milieu humain............................................................................................................... 5
2-MATERIEL ET METHODES……………………………………………………….. .......... 6

2.1-Matériel ......................................................................................................................... 6
2.1.1- Matériel technique ................................................................................................ 6
2.1.2- Matériel biologique ............................................................................................... 6
2.2-Méthodes d’enquête ethnobotanique ............................................................................ 6
2.2.2- Méthode du «porte-à-porte» ................................................................................. 6
2.2.3- Méthode du «Walk-in the- woods»....................................................................... 7
2.3- Méthodes d’analyses et des traitements des données ethnobotaniques ....................... 9
2.3.1- Evaluation des connaissances locales ................................................................... 9
2.3.1.1- Fréquence de citation des plantes ou « bitters » ............................................. 9
2.3.1.2- Indice de Smith............................................................................................... 9
2.3.2- Fréquence d’occurrence ...................................................................................... 10
2.3.3- Corrélation entre connaissance-âge et connaissance-genre sur les « bitters » .... 10
3- RESULTATS ET DISCUSSION…………………………………………………… ........ 11

3.1-Résultats………………………………………………………………………………......12

3.1.1- Inventaire des différents types de « bitters » ...................................................... 11


3.1.2- Espèces végétales entrant dans la préparation des « bitters ». ............................ 12
3.1.3-Types morphologiques ......................................................................................... 18

i
3.1.4-Parties utilisées dans la fabrication des « bitters » dans les deux zones .............. 18
3.1.5-Importance des espèces récoltées......................................................................... 19
3.1.6. Consensus des informateurs sur les plantes utilisées pour la préparation des
« bitters » ....................................................................................................................... 21
3.1.7-Fréquence d’occurrence (FO) des espèces les plus utilisées ............................... 22
3.1.8-Corrélation entre âge et connaissance des « bitters »…………………………...22
3.2-DISCUSSION……………………………………………………………………… ........ 24

CONCLUSION ........................................................................................................................ 28
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................. 29
ANNEXES ............................................................................................................................... 36

ii
DEDICACE

Je dédie ce mémoire à ma grand-mère feue N’GUESSAN Amoin Félicité;

A ma mère, KOUADIO Amoin;

A mon père, KOUASSI Kouassi Fréderic;

A la famille EPONOU pour leur accueil chaleureux ;

A tous mes frères et sœurs.

iii
REMERCIEMENTS

L’information et la formation ne sont que directives mais le fruit et l’épanouissement en


sont la résultante.

Ce travail de Master a atteint son terme grâce à l’assistance et à la collaboration de


nombreuses personnes. Nous profitons de cette occasion de gratitude et de reconnaissance pour
remercier tous ceux qui de loin ou de près y ont contribué à la réalisation de ce mémoire.
Nous voulons exprimer notre reconnaissance et notre profonde gratitude au Dr
MALAN Djah François, Maître de Conférences, Enseignant-chercheur à l’Université Nangui
Abrogoua qui en plus de ses sages conseils et de son entière disponibilité pour ce travail, a
guidé nos pas dans la recherche scientifique. Au-delà du savoir scientifique inestimable que
vous nous donnez, nous avons appris auprès de vous, que la recherche scientifique, plus qu’une
vocation, est un sacerdoce. Docteur, merci pour vos leçons de rigueur, de ponctualité,
d’humilité, de savoir-vivre. Que Dieu vous bénisse dans tout ce que vous entreprenez et vous
accorde la santé.
Nous remercions le Dr TIHO Seydou, Maître de Conférences, Doyen de l’Unité de
Formation et de Recherche (UFR) des Sciences de la Nature (SN) de l’Université Nangui
Abrogoua.
Nous remercions également au Dr BAKAYOKO Adama, Maître de Conférences,
Enseignant-chercheur et Responsable de la filière Botanique et Phytothérapie à l’Université
Nangui Abrogoua.

Nous disons merci aux Dr NEUBA Danho (Maître de Conférences), Dr KONE


Moussa (Maître de Conférences) et Dr KOUADIO Yao Lambert (Maître-assistant) qui ont
chacun, à un moment ou à un autre, contribué efficacement à notre formation.

Merci à Mme KOFFI Epouse Eponou Ayah Léonie Pélagie, pour son aide et son
soutien inébranlable.

Une vive reconnaissance doit être manifestée à ses majestés Nanan EHOUE Aka,
chef canton de la tribu Yakassé Feyassé et au chef de village d’Assouba, Nanan ANVO
Simon pour leur importante contribution à l’élaboration de ce document, pour leur soutien
logistique, leurs orientations et leurs sages conseils.
Nous avions eu la chance de connaître des hommes et des femmes à Yakassé-Féyassé
(Abengourou) et Assouba (Aboisso) qui nous ont aidés dans le travail pratique. Merci au

iv
président des jeunes de Yakassé-Féyassé M. LASSO et à tous les habitants de ces deux régions
pour leur accueil si chaleureux. Merci à N’GOUAN Gaston et à son frère, N’GOUAN Souamé
dit JKK, pour leur grande disponibilité. Merci particulier à AGO Marie pour sa cuisine
inégalable. Ces mots ne sauraient traduire ce que nous ressentons pour vous. Nous voudrions
dire grand merci à la famille MALAN à Yakassé-Féyassé et la famille KOULOU à Koffikro
pour leur accueil, leur disponibilité et leur détermination pendant nos travaux sur le terrain.
Nous disons encore grand merci à Ms. ANDON Kouadio Ernest, ADOU Koffi,
KOUA Yamien, AMANGRAH Clément, KOUADIO Konan Dominique et ALLOU
Lazare pour leur collaboration et leur soutien durant nos travaux sur le terrain.
Nous ne saurions terminer cette liste de remerciements sans exprimer à l’endroit de nos
amis étudiants notre gratitude pour leurs diverses contributions à la réalisation de ce travail.
Que KOUAKOU Yao Bertin, AMANI Jean-Paul Aristide, DIOP Lamine, EHILE Ehilé
Hervé, LITTA Amani Léopold, GUITA André Cyril et TIBE bi Tibé jude trouvent ici
l’expression de notre reconnaissance et de notre amitié. Que nos liens se resserrent davantage.
Merci à tous les étudiants de la Botanique et Phytothérapie (BP).

v
LISTES DES FIGURES Page
Figure 1: Carte montrant les différentes zones d’études…………………………………….....3
Figure 2: Répartition par classe d’âge et par sexe de la population d’enquête ......................... 7
Figure 3: Deux étapes de l’enquête ethnobotanique : «porte à porte» (a et b) et «walk-in-the-
woods» en compagnie d’informateurs clé (c et d)……………………………………………..8

Figure 4: Quelques types de « bitters » avec leurs indications : a) antipaludique, b) trouble


gastrique et constipation, c) mixte……………………………………………………………12

Figure 5: Proportions des types morphologiques rencontrés à Yakassé-Féyassé et Aboisso dans


la fabrication des « bitters »…………………………………………………………………18

Figure 6 : Proportions des organes utilisés à Yakassé-Féyassé et Aboisso dans la fabrication


des « bitters »…………………………………………………………………………………19
Figure 7: Indices de Smith des espèces utilisées dans les deux zones d’études ………………20

Figure 8: Turraea heterophylla Sm.et un « bitter » à base de sa racine………………………..21

Figure 9: Classes d’âge ayant des connaissances sur les « bitters »…………………………...23

LISTE DES TABLEAUX


Tableau 1: Différents types de « bitters » répertoriés…………………………………………11

Tableau 2: Liste des espèces entrant dans la confection des bitters à Yakassé-Féyassé et
Aboisso….................................................................................................................................13

Tableau 3: Catégories de « bitters », le nombre d’espèces par catégorie et leur ICF dans les
deux régions…………………………………………………………………..........................22

vi
RESUME
Le « bitter » est une pratique peu connue dans la littérature pourtant, elle n’est pas
anodine et constitue même une activité économique en Afrique de l’ouest. L’objectif de cette
étude est d’approfondir les connaissances ethnobotaniques liées à la macération alcoolique dans
l’aire culturelle Agni, précisément à Aboisso et Abengourou. Pour ce faire, différentes
méthodes d’enquêtes ethnobotaniques ont été utilisées (Porte-à-porte et Walk-in-the-woods).
Les investigations ont permis d’avoir neuf types de « bitters » selon leur indication
thérapeutique. Ces types de bitters ont été regroupés en cinq catégories en fonction des maladies
traitées dont les plus citées sont les « bitters » mixtes à Yakassé-Féyassé avec une fréquence de
citation (Fc) = 65,38% et les « bitters » aphrodisiaques avec Fc = 55,26% à Aboisso. En outre,
les populations sont en accord pour ce qui est des plantes utilisées dans la fabrication des
« bitters » aphrodisiaques et des « bitters » contre les troubles gastriques et la constipation. Au
total 68 espèces ont été recensées qui se répartissent en 61 genres et 31 familles. La famille des
Apocynaceae est la plus représentée. Les racines constituent les organes les mieux utilisés.
Cette étude a aussi permis de calculer l’indice de Smith (S) des espèces les plus utilisées. Parmi
lesquelles, les plus importantes sont Turraea heterophylla (S= 0,58, Fc = 74,1%), Xylopia
aethiopica (S = 0,36 et Fc = 63%) à Yakassé-Féyassé et à Aboisso nous avons, T. heterophylla
(S= 0,38 et Fc = 50%) et E. angolense (S= 0,30 et Fc = 39,3 %). Cette étude montre que cette
pratique est bien établie et donne l’importance des espèces utilisées dans ces deux zones pour
la confection des bitters.
Mots clés: Ethnobotanique, Bitters, Aboisso, Abengourou, Côte d’Ivoire.

vii
INTRODUCTION
Les espèces végétales sont très riches du point de vue de leur nombre et de leur diversité
(Spichiger et al., 2000). Outre leur rôle dans l’équilibre de l’écosystème, les végétaux offrent à
l’homme des ressources naturelles indispensables pour sa survie et son développement. De plus,
les relations entre les plantes et les hommes existent depuis l’aube de l’humanité (Baytop,
1999;Diatta et al., 2013). Depuis bien longtemps, les hommes ont su distinguer les plantes utiles
des plantes toxiques pour assurer leur bien-être. Les plantes médicinales constituent donc un
patrimoine précieux pour l’humanité, et plus particulièrement, pour la majorité des
communautés démunies des pays en développement, qui en dépendent pour assurer leurs soins
de santé primaire (Ody, 1993; Salhi et al., 2010).
Par ailleurs, en Afrique, les soins de santé dépendent beaucoup des plantes médicinales
et des connaissances locales qui leur sont associées (Sinsin et al., 2002 ; Fyhrquist, 2007). Cela
explique l’intérêt de la recherche dans le domaine du savoir local (Wezel, 2002). Il est donc
nécessaire d’entreprendre des études ethnobotaniques en vue de mieux appréhender les
utilisations traditionnelles des espèces végétales (Betti, 2001 et 2004). L'ethnobotanique, qui
est en fait l'étude de la façon dont les communautés d'une région particulière emploient des
espèces végétales pour s’alimenter, se vêtir, se soigner et d'autres activités (Aiyeloja & Bello,
2006), donc une documentation sur les différentes activités est cruciale pour la conservation et
l'utilisation de ces ressources biologiques. De plus, l’ethnobotanique contribue par ses diverses
approches à préserver et promouvoir les connaissances traditionnelles (Alexiades, 2003).
Cependant, la plupart des études ethnobotaniques en général, et ethnomédicinales en
particulier, mettent l’accent sur l’inventaire et l’analyse des usages des plantes sans
suffisamment relever les pratiques associées, qui passent ainsi sous silence. Par exemple, Malan
et Neuba (2011), lors d’une étude ethnomédicinale réalisée chez les Agni-Ndenye (Est de la
Côte d'Ivoire), ont montré que le repas thérapeutique au cours de la grossesse était une pratique
médicinale largement répandue dans la communauté mais très peu signalée par les recherches
ethnobotaniques.
Une autre pratique peu mentionnée dans la littérature est la macération alcoolique,
couramment appelée «pitess» dérivé de «bitters», qui signifie «boisson amère». C’est une
préparation traditionnelle populaire qui consiste à mettre divers organes d’une ou de plusieurs
plantes (fraiches ou séchées) à macérer dans de l’alcool. Le macéré obtenu est utilisé pour
diverses indications telles que le paludisme, l’asthénie générale ou sexuelle (Tinde et al., 2012;
Kouassi, 2015). Cependant, très peu d’études scientifiques ont porté sur la typologie et la

1
composition des «bitters» (Vandebroek et al., 2010) à cause notamment de la difficulté
d’identification des fragments d’organes végétaux utilisés (Tinde et al., 2012). Pourtant, cette
pratique n’est pas anodine et constitue même une activité économique importante en Afrique
de l’Ouest (Volpato et al., 2009 ;Tinde et al., 2012). Ce travail vise donc à approfondir les
connaissances ethnobotaniques liées à la macération alcoolique dans l’aire culturelle Agni,
précisément dans les régions du Sud-Comoé et de l’Indénié-Djuablin. De façon spécifique, ce
travail vise à :
 déterminer les différents types de «bitters» avec leur indication thérapeutique;
 inventorier les espèces végétales et leurs proportions dans les bitters;
 vérifier l’importance des espèces utilisées, pour la confection des «bitters».
Outre l’introduction et la conclusion, ce mémoire se subdivise en trois grandes parties. La
première partie présente les généralités sur le milieu d’étude. La deuxième partie présente le
matériel utilisé et expose l’approche méthodologique suivie dans le cadre de cette étude. La
troisième partie présente les résultats et leur discussion. Enfin, les références bibliographiques
et les annexes achèvent ce document.

2
1- GENERALITES

1.1-Localisation géographique des zones d’étude


L’enquête ethnobotanique a été menée dans les villages de Koffikro, Assouba, et
Yakassé Feyassé (figure 1). Koffikro et Assouba appartiennent au Département d’Aboisso
(région du Sud-Comoé) et sont localisés sur l’axe Abidjan-Aboisso, respectivement à 23 km et
5 km de la ville d’Aboisso. La Sous-préfecture de Yakassé-Feyassé appartient au Département
d’Abengourou (région de l’Indénié-Djuablin), localisé à 30 km au nord de la ville
d’Abengourou, sur l’axe Abengourou-Agnibilékrou.

Figure 1: Localisation géographique des sites d’étude

3
1.2-Caractéristiques physiques des sites d’étude

1.2.1-Climat
Le Département d'Aboisso bénéficie d'un climat chaud et pluvieux de type équatorial
(climat Attiéen). Selon Koua (2007), ce département est caractérisé par l'abondance des
précipitations avec une hauteur moyenne d'environ 1500 mm de pluie sur les dix dernières
années, une forte humidité atmosphérique (moyenne annuelle 85%) et des températures élevées
mais pas excessives (avec une moyenne de 25°C et amplitude thermique inférieure à 5°C). Le
régime pluviométrique est de type bimodal avec deux périodes arrosées (mars-juillet et octobre-
novembre), insérant deux périodes de faible pluviosité appelées saisons sèches (décembre-
février et août-septembre).
Les régimes climatiques du département d’Abengourou sont le régime de type
équatorial de transition atténué dans le nord et équatorial de transition dans l’extrême sud
(Bettié). Ces climats sont marqués par quatre saisons avec une précipitation moyenne annuelle
de 1241 mm et une température moyenne annuelle de 27°C (Aka et al., 2013).

1.2.2- Relief et sols

Le relief du Département d'Aboisso est très accidenté, notamment dans la partie Nord
Est (dans les S/P d'Ayamé et de Bianouan) et à l'Est (dans la s/p de Maféré). Les sols
appartiennent au groupe des sols ferralitiques fortement lessivés en base sous forte pluviométrie
(Koua, 2007).
Le relief du Département d’Abengourou est relativement plat, mais comporte des collines
escarpées à faible hauteur. On note par endroits (Yakassé-Feyassé par exemple) une altitude se
situant entre 130 et 450 m. Le sol par endroit granitique et ferralitique comprend des zones de
bas-fonds et de marécages, propices aux cultures pérennes, maraîchères, rizicoles et bananières
(Aka, 2010).
1.2.3- Végétation
Le Département d’Aboisso appartient au secteur ombrophile du domaine guinéen
(Guillaumet & Adjanhoun, 1971). Les formations naturelles de cette zone sont dominées par la
forêt dense sempervirente à Eremospatha macrocarpa et Diospyros mannii. On y retrouve aussi
des formations hydromorphes composées de forêts marécageuses et de mangroves occupant les
vallées et les bas-fonds. En revanche, la végétation de la Sous-préfecture de Yakassé Feyassé
appartient au secteur mésophyle de Guillaumet & Adjanohoun (1971) et se caractérise par les
forêts denses humides semi décidues à Celtis spp. et Triplochiton scleroxylon (Koné et al.,
2013).

4
1.3-Milieu humain
La population du département d'Aboisso est de 307852 habitants (INS, 2014), répartis
en 8 sous-préfectures sur une superficie de 4662 Km², soit une densité de population de 48
habitants/Km² équivalent à celle trouvée au niveau national. La forte pression démographique
est due à la concentration de la main d'œuvre agricole autour des importantes entreprises
agricoles et agro-industrielles. Le département d'Aboisso a une population majoritairement
constituée d’autochtones que sont les Agni du royaume Sanwi. En plus de cette population, il y
a une population très hétérogène composée d'allochtones, les Baoulé et d'allogènes: Burkinabés,
Ghanéens, Togolais, Nigériens et Nigérians qui s'adonnent à diverses activités économiques
dans la région (Koua, 2007).

La population du canton Féyassé, quant à elle, est estimée à 36838 habitants en 2014.
Les autochtones Agni représentent 50% de la population totale. L’autre moitié de 50% regroupe
les allogènes composés de Senoufo, de Malinkés, de Baoulé, d’Attié, d’Abron, de Ghanéens,
de Burkinabé, etc (Aka, 2010).

5
2-MATERIEL ET METHODES

2.1-Matériel

2.1.1- Matériel technique


Le matériel technique utilisé dans le cadre de l’étude est composé d’un sac de récolte en
plastique pour le transport des échantillons végétaux, d’un scotch à papier, un stylo et un bloc-
notes pour prendre les informations, des chemises cartonnées pour faire des étiquettes, des
fiches d’enquêtes, une machette et un sécateur pour le prélèvement des échantillons. Un
appareil photo numérique de marque Sony pour la prise d’images.

2.1.2- Matériel biologique


Le matériel biologique est essentiellement constitué d’espèces végétales faisant l’objet
de cette étude. Les échantillons récoltés seront séchés avant leur transport sur Abidjan pour leur
identification à l’Université Nangui Abrogoua, puis au Centre National de Floristique
d’Abidjan.

2.2-Méthodes d’enquête ethnobotanique


L’enquête ethnobotanique a été faite pendant les mois de septembre et octobre 2015. La
réalisation de cette enquête a suivi deux approches : le « porte-à-porte » et le « walk-in-the-
woods » (Figure 3).

2.2.2- Méthode du «porte-à-porte»


Cette approche consiste à interroger des hommes et des femmes à l’aide d’un guide
d’entretien à leur domicile (annexe 1 et 2). Cette première partie de l’enquête a permis de
collecter des listes libres ou ouvertes des plantes entrant dans la préparation des « bitters » ainsi
qu’une liste d’experts reconnus spécialistes des « bitters ». La technique des listes libres est une
méthode ethnobotanique bien établie, utilisant les citations spontanées (Smith et Borgatti, 1998;
Quinlan, 2005; Thompson & Zhang, 2006). Elle repose sur le principe que les plantes
employées, les plus significatives sont mentionnées par plusieurs informateurs et obtiennent
ainsi un rang élevé (Malan et al., 2015). Lors de cette étape, 68 personnes (20 femmes et 48
hommes) ont été interrogées à Yakassé Feyassé et 71 (22 femmes et 49 hommes) dans les
villages de Koffikro et Assouba. Une liste de 10 experts a été établie dont 6 parmi eux ont été
choisis (3 à Yakassé et 3 à Aboisso en fonction de leur disponibilité). Ils ont été interviewés
selon l’approche du walk-in-the-woods. La figure suivante donne la répartition par sexe et par
classe d’âge de la population d’enquête des deux régions.

6
Classe d'âge

>60

]40-60]

]20-40]

≤ 20

0 5 10 15 20 25
Nombre
Aboisso Hommes Aboisso Femmes Yakassé Hommes Yakassé Femmes

Figure 2: Répartition par classe d'âge et par sexe de la population d'enquête

2.2.3- Méthode du «Walk-in the- woods»


Cette méthode consiste à marcher avec les informateurs clés dans les zones où ils
a) récoltent habituellement leurs plantes médicinales, comme le recommandent Philips et Gentry
(1993). Les informations sur les noms locaux de plantes et leurs usages ont été recueillis. Cette
étape a permis de constituer un herbier déposé à l’Université Nangui Abrogoua pour
l’identification scientifique. La nomenclature de base suit le système APG III (APG, 2009). Les
a)
noms scientifiques ont été actualisés à l’aide de la base de données APD (African Plants
Database version 3.4.0).

7
a) b)

c) d)

Figure 3:Deux étapes de l’enquête ethnobotanique: «porte à porte» (a et b) et «walk-in-the-


woods» en compagnie d’informateurs clé (c et d).

8
2.3- Méthodes d’analyses et des traitements des données ethnobotaniques

2.3.1- Evaluation des connaissances locales


2.3.1.1- Fréquence de citation des plantes ou « bitters »

La fréquence de citation permet d’évaluer la crédibilité des informations reçues et le niveau


de connaissances des plantes de la population d’enquête (Malan & Tra Bi, 2007 ; Betti, 2004).
Elle se calcule selon la formule :

𝑛
𝑓𝑐 = × 100
𝑁

n est le nombre de personnes interrogées ayant cité la plante et N le nombre total de personnes
interrogées au cours de l’enquête. Une valeur élevée de la fréquence indique que l’espèce est
connue par la population enquêtée et une faible valeur montre que l’espèce n’est pas connue
par la communauté enquêtée. Cependant, cet indice ne prend pas en compte le rang d'apparition
d'une espèce dans la liste des citations Pour cela, l'indice de Smith a été calculé.

2.3.1.2- Indice de Smith


L’indice de Smith (S) est une moyenne de l’inverse du rang d’une plante entre plusieurs
listes libres, pondéré par le nombre d’espèce par liste. Une grande valeur de cet indice montre
que l’espèce est importante pour les personnes interrogées. L’indice de Smith se calcule suivant
cette formule revue par Sutrop, (2001).

𝑆 = {𝛴[(𝐿𝑖 − 𝑅𝑗 + 1) / 𝐿𝑗]} / 𝑁

Où S est l’indice de Smith, Li la longueur d’une liste de citations et Rj le rang d’une citation
dans la liste. L’indice de Smith varie de 0 à 1 (importance maximale). Une valeur égale à 0
montre que l’espèce n’a pas d’importance pour la communauté enquêtée par contre une valeur
de 1 indique que la plante est très importante pour cette communauté. La fréquence, le rang
moyen et l’indice de Smith de chaque espèce ont été calculés à l’aide du logiciel ANTHROPAC
(Borgatti, 1996). Cet indice ne donne pas d’accord sur la composition des plantes utilisées pour
fabriquer les « bitters » par les personnes enquêtées, par conséquent le facteur de consensus a
été calculé.

2.3.1.3- Facteur de consensus d’utilisation ou Informant Consensus Factor (ICF)


Le facteur de consensus d’utilisation ou Informant Consensus Factor(ICF) a été utilisé pour
apprécier le niveau d'homogénéité entre les informations fournies par les différents

9
informateurs sur la composition des « bitters »rapportée pour chaque catégorie d’utilisation.
L’ICF est calculée selon la formule suivante (Teklehaymanot, 2009):

𝑛𝑢𝑟 − 𝑛𝑡
𝐼𝐶𝐹 =
𝑛𝑢𝑟 − 1

 Nur désigne le nombre de citation d’utilisation de chaque catégorie ;


 Nt le nombre total des espèces utilisées.

L’ICF varie entre 0 et 1. Une faible valeur, proche de 0 indique que les informateurs sont en
désaccord sur les compositions des « bitters » proposées pour la catégorie de maladie donnée
et une valeur égale à 1 indique un accord sur la composition de ce « bitter» pour cette catégorie
de maladie (Canales et al., 2005).

2.3.2- Fréquence d’occurrence


La fréquence d’occurrence est le quotient du nombre de bitters dans lequel une espèce
(Pi) a été retrouvée par le nombre total de « bitters » (Dajoz, 2000). Elle s’exprime en
pourcentage du nombre total de « bitters » collectés sans prendre en compte l’abondance de
l’espèce dans ces « bitters ». Sa formule est la suivante :
𝑃𝑖
𝐹𝑜 = 𝑋100
𝑃𝑒
Où :
Pi = nombre de « bitters » contenant l’espèce (i)
Pe = nombre total de « bitters » collectés
La fréquence d’occurrence peut prendre les valeurs suivantes :
- Fo comprise entre 85% et 100%, l’espèce est « très fréquente »
- Fo comprise entre 60% et 85 %, l’espèce est « fréquente »
- Fo comprise entre 50% et 60%, l’espèce est « constante »
- F comprise entre 25% et 50%, l’espèce est « accessoire »
- F inférieure à 25%, l’espèce est « accidentelle ».

2.3.3- Corrélation entre connaissance-âge et connaissance-genre sur les « bitters »


Le test de corrélation de Spearman a été utilisé pour vérifier d’une part s’il y a une
corrélation entre le sexe et le niveau de connaissances sur les « bitters » et d’autre part tester si
la connaissance sur les « bitters » est liée à l’âge. Le logiciel R (R DEVELOPMENT CORE
TEAM, 2006) a été utilisé pour ce test.

10
3- RESULTATS ET DISCUSSION

3.1- Résultats

3.1.1- Inventaire des différents types de Bitters


Au total, neuf différents types de « bitters » ont été répertoriés dans les deux régions,
dont 7 à Aboisso et 8 à Yakassé (tableau 1). Parmi ces 9 types, les plus cités à Yakassé-Féyassé
sont les « bitters » mixtes (Fc= 65,38%), antipaludique (Fc= 46,15%), aphrodisiaque (Fc=
38,46%) et contre «plaie de ventre» (Fc = 30,76%). A Aboisso, les plus citées sont les « bitters »
aphrodisiaques (Fc= 55,26%), contre «plaie de ventre» (Fc= 52,63%), antipaludique (Fc=
28,94%) et «mixte» (Fc= 26,31%). Ces différents types de « bitters » ont été regroupés en 5
catégories: aphrodisiaque, contre fatigue générale et douleurs lombaires, antipaludique, contre
troubles gastriques et constipation et mixtes. La figure 4 indique quelques exemples de
« bitters ».

Tableau 1: Différents types de bitters répertoriés

Fréquence de citation (%)

Type de « bitters » Yakassé –Feyassé Aboisso

Mixtes 65,38 26,31

Paludisme 46,15 28,94

Aphrodisiaque 38,46 55,26

Plaie de ventre 30,76 52,63

Hémorroïdes 26,92 10,52

Douleurs lombaires 11,53 5,26

Fatigue générale 7,69 _

Prostate 3,84 _

Constipation _ 2,63

11
a b c

Figure 4: Quelques types de « bitters » avec leurs indications: a) aphrodisiaque, b) troubles


gastriques et constipation, c) «mixtes».

3.1.2- Espèces végétales entrant dans la préparation des « bitters ».


L’exploitation des données de l’enquête a permis de recenser soixante-huit espèces
utilisées dans les deux zones pour la fabrication des bitters. Parmi ces espèces, 21 sont
spécifiques à Yakassé et 25 rencontrées uniquement à Aboisso. Cependant, 24 espèces sont
utilisées dans ces deux zones. Ces espèces sont classées en 31 familles et 61 genres. Les familles
les plus importantes sont les Apocynaceae (7 espèces), les Fabaceae (6 espèces), les Rubiaceae
(5 espèces) et les Annonaceae (5 espèces). La liste des espèces entrant dans la confection des
bitters à Yakassé-Féyassé et Aboisso est consignée dans le tableau 2.

12
Tableau 2: Liste des espèces entrant dans la confection des « bitters » à Yakassé-Féyassé et Aboisso

Espèces Région Indication Partie utilisée


Aphrodisiaque, plaie de ventre,
Aframomum melegueta (Roscoe) K. Schum Aboisso et Yakassé hémorroïdes, paludisme, adjuvant Graine
Albizia adianthifolia (Schumach.) W.WIGHT Yakassé Hémorroïdes et plaie de ventre Ecorce de tige
Alchornea cordifolia (Schumach. & Thonn.) Müll. Arg. Aboisso et Yakassé Plaie de ventre, hémorroïdes Racine
Allium sativum L. Aboisso Plaie de ventre Bulbe
Alstonia boonei De Wild. Aboisso Paludisme Ecorce de tige
Annickia polycarpa (DC.) Setten & Maas Aboisso et Yakassé Paludisme Ecorce de tige
Anthocleista nobilis G. Don Yakassé Paludisme Ecorce de tige
Baphia nitida Lodd. Aboisso Douleurs lombaire Racine
Borassus aethiopum Mart. Yakassé Aphrodisiaque Racine
Bridelia grandis Pierre ex Hutch Aboisso Hémorroïdes et plaie de ventre Ecorce de tige
Carica papaya L. Aboisso et Yakassé Aphrodisiaque Racine
Carpolobia lutea G. Don Aboisso Aphrodisiaque Racine
Citrus limon (L.) Burm. f. Aboisso Hémorroïdes Racine
Cleistopholis patens (Benth.) Engl & Diels Aboisso et Yakassé Paludisme Ecorce de tige
Cocos nucifera L. Aboisso Aphrodisiaque Racine
Combretum paniculatum Vent. Yakassé Aphrodisiaque et Paludisme Racine

13
Suite du tableau 2

Espèces Région Indication Partie utilisée


Combretum zenkeri Engl. & Diels Yakassé Hémorroïdes Racine
Cymbopogon citratus (DC.) Stapf Yakassé Aphrodisiaque Racine
Cyperus esculentus L. Yakassé Aphrodisiaque Racine
Dioclea reflexa Hook. f. Yakassé Prostate Racine
Discoglypremna caloneura (Pax) Prain Aboisso Aphrodisiaque Racine
Elaeis guineensis Jacq. Yakassé Aphrodisiaque Racine
Paludisme, aphrodisiaque, plaie de
Entandrophragma angolense (Welw.) C. DC. Aboisso et Yakassé ventre ; hémorroïdes Ecorce de tige
Euadenia eminens Hook. f. Yakassé Paludisme, aphrodisiaque Racine
Aphrodisiaque, paludisme, fatigue
Garcinia afzelii Engl. Aboisso et Yakassé générale, plaie de ventre Racine
Aphrodisiaque, hémorroïdes, plaie de Racine, graine et
Garcinia kola Heckel Aboisso et Yakassé ventre, paludisme, douleurs lombaires écorce de tige
Gossypium barbadense L. Yakassé Hémorroïdes Racine
Guilandina bonduc L. Yakassé Aphrodisiaque et prostate Racine
Hallea ledermannii (K. Krause) Verdc. Aboisso Paludisme Ecorce de tige
Harungana madagascariensis Lam.ex Poir Aboisso Paludisme Ecorce de tige
Hoslundia oppposita Vahl Aboisso Paludisme et aphrodisiaque Racine
Illigera pentaphylla Welw. Yakassé Paludisme Racine

14
Suite du tableau 2

Espèces Région Indication Partie utilisée


Khaya ivorensis A. Chev. Aboisso Paludisme et plaie de ventre Ecorce de tige
Landolphia hirsuta (Hua) Pichon Yakassé Plaie de ventre, hémorroïdes, Ecorce de liane

Hémorroïdes Ecorce de la liane


Landolphia owariensis P. Beauv. Aboisso
Plaie de ventre, hémorroïdes, Ecorce de la liane
Landolphia sp Aboisso et Yakassé aphrodisiaque, constipation
Lophira alata Banks ex C. F. Gaertn. Aboisso Douleurs lombaires Ecorce de tige
Manotes expansa Sol. ex Planch. Yakassé Plaie de ventre Racine
Mezoneuron benthamianum Baill. Yakassé Aphrodisiaque Racine
Mondia whitei (Hook. f.) Skeels Yakassé Aphrodisiaque Racine
Monodora myristica (Gaertn.) Dunal Aboisso et Yakassé Fatigue générale, aphrodisiaque Graine
Ecorce de tige et
Paludisme
Morinda lucida Benth Aboisso et Yakassé racine
Morinda morindoides (Baker) Milne-Redh. Yakassé Paludisme Racine
Nauclea diderrichii (De Wild. & T. Durand) Merr. Aboisso et Yakassé Paludisme et douleurs lombaires Ecorce de tige
Ocimum gratissimum L. Aboisso Plaie de ventre Tige et feuille
Olax subscorpioidea Oliv. Yakassé Aphrodisiaque, hémorroïdes Racine
Palisota hirsuta (Thunb.) K. Schum. Aboisso Aphrodisiaque Feuille

15
Suite du tableau 2

Espèces Région Indication Partie utilisée


Paullinia pinnata L. Aboisso et Yakassé Aphrodisiaque Racine
Phyllanthus amarus Schumach. & Thonn. Aboisso Plaie de ventre et diabète Feuille
Phyllanthus muellerianus (Kuntze) Exell Aboisso et Yakassé Douleurs lombaires et hémorroïdes Racine
Picralima nitida (Stapf) T. Durand & H. Durand Aboisso et Yakassé Paludisme, aphrodisiaque Graine
Aphrodisiaque, plaie de ventre,
Piper guineense Schumach. & Thonn. Aboisso et Yakassé hémorroïdes, paludisme, adjuvant graine et liane
Piptadeniastrum africanum (Hook. f.) Brenan Aboisso Paludisme Ecorce de tige
Psydrax subcordata (DC.) Bridson Aboisso Paludisme Ecorce de tige
Rauvolfia vomitoria Afzel. Aboisso et Yakassé Paludisme, douleurs lombaires Racine
Ecorce de tige et
Plaie de ventre, hémorroïdes
Ricinodendron heudelotii (Baill.) Pierre ex Heckel Aboisso et Yakassé racine
Sarcocephalus latifolius (Sm.) E.A. Bruce Aboisso Paludisme Ecorce de tige
Sphenocentrum jollyanum Pierre Aboisso et Yakassé Aphrodisiaque Racine
Tapinanthus pentagonia (D.C) Tiegh. Aboisso Aphrodisiaque Tige
Terminalia ivorensis A. Chev. Aboisso et Yakassé Paludisme Ecorce de tige
Theobroma cacao L. Aboisso Hémorroïdes Racine
Tiliacora leonensis (Scott-Elliot) Diels Yakassé Aphrodisiaque Racine

16
Suite et fin du tableau 2

Espèces Région Indication Partie utilisée


Aphrodisiaque, plaie de ventre,
Turraea heterophylla Sm. Aboisso et Yakassé hémorroïdes, paludisme Racine
Uvaria afzelii Scott-Elliot Aboisso Aphrodisiaque, paludisme, hémorroïdes Racine
Aphrodisiaque, plaie de ventre,
Xylopia aethiopica (Dunal) A. Rich. Aboisso et Yakassé hémorroïdes, paludisme, adjuvant Fruit
Zanthoxylum gilletii (De Wild.) P .G.Waterman Yakassé Aphrodisiaque, plaie de ventre Racine
Racine et écorce de
Zanthoxylum zanthoxyloides (Lam.) Zepern. & Timler Aboisso Plaie de ventre tige
Aphrodisiaque, constipation, plaie de
Zingiber officinale Roscoe Aboisso et Yakassé ventre, hémorroïdes, paludisme, adjuvant Rhizome

17
3.1.3-Types morphologiques
Tous les types morphologiques sont représentés (figure 5), avec une forte prévalence
des arbres et arbustes (58,6% à Yakassé-Féyassé; 73% à Aboisso), suivis par les espèces
lianescentes (32,61% à Yakassé-Féyassé; 11,11% à Aboisso) et enfin les espèces herbacées
(8,6% pour Yakassé-Féyassé et 15,6% à Aboisso). La figure 5 montre ces différents types
morphologiques

80
Proportion en %

70
60
50
40
30
20
10
0
Arbre Liane Herbe
Type morphologique

Yakassé-Féyassé Aboisso

Figure 5: Proportions des types morphologiques rencontrés à Yakassé-Féyassé et Aboisso

3.1.4-Parties utilisées dans la fabrication des « bitters » dans les deux zones
Diverses parties de plantes entrent dans la fabrication des différents « bitters » (Figure
6). Les racines sont majoritairement utilisées (54,87% à Yakassé et 38,68% à Aboisso), ensuite
viennent les écorces de tige (29,92% à Aboisso et 15,59 % à Yakassé), enfin les graines (23,39%
à Yakassé et 18,24% à Aboisso). Pour certaines plantes comme Garcinia kola presque toutes
les parties sont utilisées (racines, écorces de tige et graines).

18
Proportion en %
60

50

40

30

20

10

0
Racine Ecorce Graine et Rhizome Feuille Liane Bulbe
fruit
Organe utilisé

Yakassé-Féyassé Aboisso

Figure 6 : Proportions des organes utilisés à Yakassé-Féyassé et Aboisso dans la fabrication


des « bitters »
3.1.5-Importance des espèces récoltées
L’analyse des listes libres montre que les populations de ces deux zones ont une bonne
connaissance sur les plantes utilisées pour fabriquer les « bitters ». En effet, la longueur
moyenne des listes des plantes varie de 2 à 22 plantes et avec un rang moyen de 7,85 plantes
par liste à Yakassé-Féyassé et 4,67 plantes par liste à Aboisso. Par ailleurs, les longueurs
fréquentes des listes de plantes sont de 4 plantes par liste (32,14% des répondants), 3 plantes
par liste (17,51% des répondants) et enfin 5 plantes par liste (14,28% des informateurs) à
Aboisso. A Yakassé-Féyassé, les longueurs de liste les plus importantes sont de 4 plantes par
liste (22,22% des répondants), 5 plantes par liste (18,51% des répondants) et 10 plantes par liste
(11,11% des répondants).
En ce qui concerne les plantes les plus importantes pour la population enquêtée dans les deux
zones, huit espèces ont été obtenues (4 à Yakassé-Féyassé et les 4 à Aboisso). A Yakassé-
Féyassé, les plantes les plus utilisées pour la confection des bitters sont Turraea heterophylla
(indice de Smith (S)= 0,589, une fréquence de citation (Fc) = 74,1%) (Figure 7), Xylopia
aethiopica (S = 0,365 et Fc = 63%), Entandrophragma angolense (S= 0,307 et Fc = 44,4%) et
enfin Mezoneuron benthamianum (S= 0,282 et Fc = 40,76%). Dans la zone d’Aboisso, T.
heterophylla (avec S= 0,386 et Fc = 50%,) est également la plante la plus importante, suivent
Entandrophragma angolense (S= 0,307 et Fc = 39,3 %), Garcinia kola (S= 0,225 et Fc =
39,3%) et enfin Xylopia. aethiopica (S= 0,197 et Fc= 32,1%) (Figure 8).

19
Espèces
Indice de Smith(S)
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7
Turraea heterophylla
Xylopia aethiopica
Entandrophragma angolense
Mezoneuron benthamianum
Piper guineense
Morinda lucida
Garcinia kola
Alchornea cordifolia
Monodora myristica
Euadenia eminens
Garcinia afzelii
Zingiber officinale
Sphenocentrum jollyanum
Landolphia sp.
Cocos nucifera
Tiliacora leonensis
Paullinia pinnata
Guilandinia bonduc
Annickia polycarpa
Rauvolfia vomitoria
Mondia whitei
Aframomum melegueta
Combretum zenkeri
Olax subscorpioidea
Landolphia hirsuta
Ricinodendron heudelotii
Picralima nitida
Phyllanthus muellerianus
Carica papaya
Albizia adianthifolia
Dioclea reflexa
Terminalia ivorensis
Zanthoxylum gilletii
Borassus aethiopum
Illigeria pentaphylla
Cyperus esculentus
Eleais guineensis
Gossypium barbadense
Combretum paniculatum
Cleistopholis patens
Morinda morindoides
Nauclea diderrichii
Manotes expansa
Cymbopogon citratus
Anthocleista nobilis
Zanthoxylum zanthoxyloides
Uvaria afzelii
Sarcocephalius latifolius
Carpolobia lutea
Alstonia boonei
Baphia nitida
Bridelia grandis
Discoglypremna caloneura
Harungana madagascariensis
Khaya ivorensis
Phyllanthus amarus
Lophira alata
Piptadeniastrum africanum
Ocimum gratissimum
Psydrax subcordata
Landolphia owariensis
Citrus limon
Hoslundia opposita
Allium sativum
Hallea ledermanii
Theobroma cacao
Palisota hursita
Tapinanthus pentagonia Smith Yakassé F Smith Aboisso

Figure 7: Indices de Smith des espèces utilisées dans les deux zones d’études

20
.

b
a) b)

Figure 8 : Turraea heterophylla Sm. et un « bitter » fabriqué à partir de sa racine (a et b).

3.1.6. Consensus des informateurs sur les plantes utilisées pour la préparation des
« bitters »
Le calcul du degré de consensus effectué avec les spécialistes donne deux grands
groupes : les catégories de « bitters » avec un ICF de faible valeur (<0,5) et les « bitters » avec
une bonne valeur d’ICF (>0,5). Les « bitters » où le consensus est faible entre les spécialistes
sont : les « bitters » contre fatigue générale et douleurs lombaires (ICF = 0,17 à Yakassé-
Féyassé et 0 à Aboisso), les « bitters » antipaludiques (ICF = 0,43 à Yakassé-Féyassé et 0,25 à
Aboisso) et les « bitters » mixtes (ICF = 0,63 et 0,4 à Aboisso). Cela indique que nos
spécialistes ne sont pas unanimes sur la composition en espèces de ces catégories de « bitters ».
Par contre les « bitters » ayant des bonnes valeurs d’ICF sont : les « bitters » aphrodisiaque
(ICF= 0,62 à Yakassé-Féyassé et 0,588 à Aboisso) et troubles gastriques et constipation ICF =
0,54 à Yakassé-Féyassé et 0,56 à Aboisso). Le tableau ci-dessous montre les catégories de
« bitters », le nombre d’espèces et leur ICF dans les deux régions.

21
Tableau 3: Catégories de « bitters », le nombre d’espèces par catégorie et leur ICF dans les deux
régions.
Yakassé-Féyassé Aboisso
Nombre Nombre
Types de « Bitters » d’espèces ICF d’espèces ICF
Aphrodisiaque 30 0,62 21 0,58
Troubles gastriques et constipation 15 0,54 16 0,56
Mixtes
25 0,63 15 0,4
Paludisme 21 0,43 15 0,25
Fatigue générale et douleurs lombaires 14 0,17 6 0

3.1.7-Fréquence d’occurrence (FO) des espèces les plus utilisées

L’analyse des fréquences d’occurrence des espèces utilisées pour la confection des
différents types de « bitters », montre qu’une seule espèce est «fréquente» Turraea heterophylla
(avec FO = 61,90%) qu’on trouve dans la catégorie « bitters » aphrodisiaque. Cela traduit que
cette espèce est reconnue pour ces propriétés aphrodisiaques.
Par ailleurs, pour le reste des catégories de « bitters », nous ne constatons que la présence
d’espèces « assessoires » et « accidentelles ».

3.1.8-Corrélation entre âge et connaissance des « bitters »

Les investigations menées dans ces deux régions ont permis de mettre en évidence les
tranches d’âges qui ont une forte connaissance sur les différents types de « bitters ». Comme
l’illustrent la figures 9, ce sont par exemple les classes d’âges compris entre 30- 60 ans à
Yakassé-Féyassé et 40-60 ans à Aboisso qui ont plus de connaissances sur les « bitters ». Or,
l’analyse statistiques des données de notre étude avec le test de corrélation de Spearman a donné
un P-value = 0,56 à Aboisso et P-value = 0,59 à Yakassé-Féyassé. Ces différents P-values
observés sont supérieurs à P = 0,005, par conséquent il n’y a pas eu de corrélation entre l’âge
et connaissance des « bitters ». Ces figures ci-dessous montrent les classes d’âges ayant des
connaissances sur les « bitters ».

22
Nombre de citation
7

0
20-30 ans 30-40 ans 40-50 ans 50-60 ans 60 ans plus Classe d'âge
Aphrodisiaque antipaludique contre MG et C Contre Fg et Dl Mixte (a)

12
Nombre de citation

10

0
20-30 ans 30-40 ans 40-50 ans 50-60 ans 60 ans plus

Classe d'âge
Aphrodisiaque Antipaludique

Contre troubles gastriques et constipation Contre fatigue génerale et douleurs lombaires

Mixte (b)

Figure 9: Connaissance des « bitters » en fonction des classes d’âge à Yakassé-Féyassé (a) et
Aboisso (b).

23
3.2-DISCUSSION
La présente étude a consisté à inventorier les différents types de macéré alcoolique
appelé « bitters » et de connaitre leurs effets thérapeutiques dans nos deux régions d’études.
Les résultats de cette étude montrent que cette pratique est bien connue par la population de
Yakassé-Féyassé et d’Aboisso. En effet, en un mois de présence dans ces deux localités, nous
avons inventorié 9 types de « bitters » ont été inventoriés et les plus importants sont les
« bitters » mixtes à Yakassé-Féyassé et « bitters » aphrodisiaque à Aboisso. Les résultats ont
révélé une diversité dans l’indication thérapeutique des « bitters ». Une telle diversité dans
l’indication thérapeutique des « bitters » a été observée par Vandebroek et al. (2010). Selon cet
auteur, un « bitter » connu sous le nom mamajuana est utilisé en République Dominicaine pour
traiter plusieurs maladies. De même Volpato et al. (2009) révèlent qu’à Cuba un « bitter » du
nom Tifey est préparé en fonction des propriétés médicinales désirées. Ces résultats sont
contraires à ceux présentés par Tinde et al. (2012). En effet, ces auteurs ont focalisé leurs
travaux sur les « bitters » aphrodisiaques, car à l’origine ils étaient utilisés pour améliorer la
vigueur sexuelle. Mais, au-delà de l’aphrodisiaque, cette étude a révélé une diversité dans leur
usage.
Il ressort de notre travail que 68 espèces ont été recensées dans les deux zones pour la
confection de ces « bitters ». Parmi ces espèces, quatre familles sont les mieux représentées
dans la fabrication des « bitters ». Ce sont les Apocynaceae (7 espèces), les Fabaceae (6
espèces), les Rubiaceae et les Annonacaea (5 espèces chacune). Cette représentativité a
également été observée, à quelques différences près, au cours des enquêtes
ethnopharmacologiques réalisées par Tinde et al. (2012). Ces auteurs ont mentionné dans leurs
travaux que les familles ayant plusieurs espèces utiles pour la fabrication des bitters sont les
Fabaceae, Rubiaceae, Apocynaceae et Annonaceae. La prédominance de ces 4 familles
(Annonaceae, Apocynaceae, Rubiaceae et Fabaceae) montre qu’elles renferment beaucoup
d’espèces médicinales. Selon (Aké-Assi, 1984) cité par N’guessan et al. (2009), ces familles
sont les plus importantes de la flore ivoirienne en termes de nombre d’espèces qu’elles
comptent.
Il ressort de la présente étude que les types biologiques les plus représentés sont les
plantes ligneuses. Ces observations ont été faites par Malan & Tra Bi. (2007) et Zerbo et al.
(2007). Selon ces second auteurs, le caractère pérenne de ces espèces ligneuses permettrait de
disposer d’au moins un organe en chaque saison d’où la forte utilisation en pharmacopée
traditionnelle. Ce qui pourrait justifier cette sollicitude dans la fabrication des « bitters » dans
le cas de cette étude.

24
L’analyse des données recueillies au cours de ces travaux montre que les diverses parties
de la plante (racine, écorce de tronc, graine et fruit etc..) sont utilisées pour la fabrication des
« bitters » dans les deux sites. Par ailleurs, les racines et les écorces sont majoritairement
sollicitées dans les deux sites. Cette prépondérance des racines et écorces se justifie par le fait
que ces organes sont présents sur les plantes ligneuses telles tout au long de l’année, ce qui les
rend disponibles à toute période et sont très peu influencés par les saisons contrairement aux
feuilles et aux fruits. En plus, elles sont plus disposées à être conservées pendant longtemps
(Albuquerque, 2006) cité par Adomou et al. (2012).
A cet effet, le prélèvement intense de leurs racines et de leurs écorces pourrait présenter
un danger imminent pour la survie de la plante par rapport aux feuilles et entraîner, de ce fait,
leur raréfaction (Piba et al., 2015). De même, selon Bassirou et al. (2008), l’écorçage nuit à la
survie des plantes lorsqu’ils sont régulièrement pratiqués dans le temps.
Plusieurs plantes sont utilisées pour la fabrication des « bitters », cependant certaines
sont plus mentionnées que d’autres. Ce sont par exemple Turraea heterophylla, Xylopia
aetthiopica, Entandrophragma angolense et Mezoneuron benthamianum pour les spécialistes
à Yakassé-Féyassé. Pour la zone d’Aboisso, les spécialistes utilisent aussi Turraea
heterophylla, Entandrophragma angolense, Garcinia kola et Xylopia. aethiopica. Par ailleurs
ces plantes sont largement utilisées dans les diverses régions ivoiriennes et ailleurs dans le
monde pour soigner diverses maladies. En plus elles ont fait l’objet de plusieurs études
phytochimiques et pharmacologiques qui confirment leurs usages traditionnels.
En Côte d’ivoire, les plantes qui traitent les troubles de l’appareil reproducteur sont d’un
emploi courant. C’est le cas par exemple de Turraea heterophylla, où des études
phytochimiques réalisées sur ces racines ont permis d’identifier des terpènes et des alcaloïdes
qui sont à l’origine du potentiel érectile (Boua et al., 2013) d’où l’emploi récurrent de cette
plante par les guérisseurs dans le traitement traditionnel de l’impuissance en Côte d’Ivoire. Par
ailleurs, des travaux menés en Inde ont attesté son effet aphrodisiaque en association avec la
tige, l’écorce et la graine (Singh et al., 2012). Les travaux de ces auteurs permettent donc de
clarifier l’usage de cette espèce dans la fabrication des produits aphrodisiaques.

Il en est de même pour Garcinia kola où l’espèce est utilisée par les Agni et les Abouré
comme aphrodisiaque (Bouquet et Debray., 1974). Selon ces auteurs cette plante est très riche
en anthraquinones et en flavonoïdes. Les flavonoïdes ont une action tonifiante marquée sur les
vaisseaux sanguins (Paris et Huriabelle., 1981; Bruneton., 1993). Ce qui justifie l’usage
traditionnel dans le traitement des troubles de l’érection.

25
L’utilisation des écorces d’E. angolense dans la fabrication des « bitters » contre les
troubles gastriques est bien connu par les populations de ces deux régions. En effet, selon
Bouquet et Debray., 1974, l’espèce sert à soigner les maux de ventre en Côte d’Ivoire. En plus,
selon Piba et al. (2015), les écorces de cette espèce sont utilisées dans le traitement de l’ulcère.
Par ailleurs des études pharmacologiques et phytochimiques menées sur l’extrait au méthanol
de l’écorce ont montré un effet inhibiteur dose-dépendant sur des ulcères gastriques lors
d’essais sur des rats. Le méthyl angolensate, un triterpénoïde isolé de l’écorce, a provoqué
l’inhibition de l’ulcération gastrique et de l’activité du muscle lisse, et il a réduit l’action
propulsive de l’appareil gastro-intestinal chez des souris. Lors d’essais sur des souris et des rats,
le méthyl angolensate a manifesté une activité sédative (Tchinda., 2008). Tous ces travaux ainsi
mentionnés pourraient expliquer l’usage récurrent de cette espèce dans le traitement des
maladies gastriques.
Quant à Mezoneuron benthamianum, son utilisation n’est pas spécifique au peuple Agni,
ainsi elle est utilisée par le peuple Malinké pour le traitement de l’impuissance sexuelle selon
Adjanohoun et Aké-Assi (1979) et également chez les Oubi comme le mentionne les travaux
de Malan et Tra Bi (2007) pour le même usage. Cet emploi est aussi signalé par Bouquet et
Debray (1974). De plus les études de Békro et al. (2007), réalisées en canton N’gadié sur les
racines, ont permis d’isoler les composés qui sont responsable de cet effet thérapeutique. En
plus de cela au Nigéria, l’espèce est utilisée dans le traitement des hémorroïdes (Olufunke et
al., 2009).
Pour l’espèce Xylopia aethiopica, elle est largement sollicitée dans la confection des
bitters à travers l’arôme qu’elle apporte. Par ailleurs, selon Aké-Assi, (2011), l’espèce est
employée comme adjuvant en médecine de tradition africaine et est aussi utilisée dans la
préparation de plusieurs médicaments. Ces observations ont été également faites par Piba et al.
(2015) qui rapportent que les fruits de cette espèce sont employés comme adjuvant. Comme le
mentionne Bouquet et Debray. (1974), les fruits sont très généralement sont parfois utilisés en
médecine populaire comme reconstituant et vermifuge. Les écorces servent dans le traitement
des affections broncho-pneumoniques et des courbatures fébriles. Au Bénin, ces fruits sont
utilisés comme des ingrédients auxiliaires ou adjuvants, permettant de renforcer l’action
thérapeutique des composantes principales des recettes et permettent aussi de traiter les
symptômes secondaires de la maladie (Joy et al., 2001) cité par Adomou et al.(2012).
En ce qui concerne la fréquence d’occurrence, les résultats ont mentionnés qu’une seule
espèce est fréquente dans les catégories de « bitters ». Cela s’est révélé dans la catégorie de

26
« bitters » aphrodisiaque. Cette présence pourrait s’expliquer par le fait qu’elle est beaucoup
reconnue par les populations pour ces propriétés aphrodisiaques.
Il ressort des investigations deux valeurs d’ICF: des valeurs faibles (ICF˂0,5) et des
valeurs élevées (ICF˃ 0,5). Concernant les ICF faibles, ce résultat pourrait se justifier par le fait
que les informateurs n’ont pas la même connaissance sur les plantes utilisées pour la préparation
de ces « bitters ». A cela pourrait s’ajouter la complexité du domaine de la médecine
traditionnelle où les connaissances secrètes sont le plus souvent transmises oralement, soit de
père en fils, soit auprès des détenteurs qui les confient difficilement (Zerbo et al., 2007). Pour
ce qui est des valeurs élevées, cela se traduit par le fait que les spécialistes contactés sont à peu
près unanimes sur les espèces employées dans la confection de ces « bitters ». A côté de cela,
les connaissances sur les plantes utilisées pour leur préparation sont partagées comme le révèle
Malan et al. (2015).
De cette étude, il ressort qu’il n’y a pas eu de corrélation entre les connaissances sur les
« bitters » et les classes d’âges dans les deux régions. Ce résultat pourrait s’expliquer par le
faite que l’échantillonnage utilisé n’a pas été homogène ou encore la non fixation du nombre
de personnes interrogées par classes d’âges et par sexe. Cependant, le constat fait est que les
connaissances évoluent en fonction de l’âge.

27
CONCLUSION

L’étude effectuée sur les macérés alcooliques traditionnels « bitters » dans le Sud-Est
et l’est du pays avait pour objectif de connaître les différents types des « bitters » et de faire
l’inventaire des espèces utilisées pour leurs fabrications. Nos investigations effectuées en pays
Agni dans les régions d’Aboisso et d’Abengourou ont révélé que le bitter est une pratique bien
connue par ces populations. En effet, nous avons obtenu neuf types de « bitters » en fonctions
des différentes indications thérapeutiques.
Cette étude a permis de recenser 68 plantes appartenant à 61 genres et 31 familles. Les
espèces les plus importantes dans la confection des « bitters » sont Turraea heterophylla,
Xylopia aethiopica Entandrophragma angolense et Mezoneuron benthamianum pour la
population de Yakassé-Féyassé. Quant à celle d’Aboisso, nous avons également T.
heterophylla, E. angolense, Garcinia kola et X. aethiopica. Le consensus sur les plantes
utilisées pour leur préparation a eu un meilleur accord au niveau des catégories aphrodisiaques
et troubles gastriques et la constipation. Chez ces populations, les organes les plus sollicités
sont les racines et les écorces de tige dans la confection des « bitters ».
Pour des études futures :
 Il serait envisageable que cette étude se poursuive dans d’autres villages de ces
différentes régions, dans le but de connaître d’autres types de « bitters » et d’autres
espèces utilisées;
 Il serait souhaitable de mener cette étude chez d’autres groupes d’Agni afin de découvrir
s’il existe d’autres types de « bitters » ainsi que d’autres espèces utiles pour leurs
confection;
 Il serait intéressant d’évaluer la disponibilité des ressources biologiques utilisées pour
la confection de ces « bitters » ;
 Il est encourageant de faire des études pharmacologiques et toxicologiques sur ces
« bitters » en vue de sortir une boisson médicinale.

28
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35
ANNEXES
Annexe 1: Fiche d’enquête de la communauté villageoise

FICHE D’ENQUETE DE LA COMMUNAUTE VILLAGEOISE

N° de la fiche:1
Date de l’enquête: Le 10 octobre 2015

1- Localisation géographique

Sous-préfecture: de Yakassé-Féyassé

Village: Yakassé-Féyassé

2- Identification individuelle

Nom et prénoms: N’GOUAN Souamé Age: 38 ans Sexe: M

Profession: Planteur

 Connaissez-vous les «bitters»? Oui


 En avez-vous? Oui
 Si oui, à quoi cela sert? Il sert à traiter les plaies de ventre
 Qui l’a préparé? C’est Mr ANDOH Kouadio Ernest
 Connaissez-vous des gens du village qui sont réputés dans leurs fabrications? Oui
 Si oui, pouvez-vous me les indiquer? Ok c’est compris

36
Annexe 2: Fiche d’enquête du fabriquant

FICHE D’ENQUETE DES FABRICANTS


N° de la fiche: 1
Date de l’enquête: 12 Octobre 2015
1- Localisation géographique
Sous-préfecture: Yakassé-Féyassé
Village: Yakassé-Féyassé
2- Identification individuelle
Nom et prénoms: ANDOH Kouadio Ernest Age: 55 ans Sexe : M
Profession: Planteur

 Connaissez-vous les «bitters»? Oui, je connais 6 types de « bitters »


 Quelles sont les plantes qui composent vos «bitters»? Pour le reste, voir tableau
1(Un exemple de bitter)
 Quelles sont les organes des plantes utilisées?
 Quel est l’état des organes utilisés?
 Quelles sont les proportions des plantes dans vos préparations?
 Quel est le rôle de chaque plante dans vos préparations?
 Quelles sont les indications thérapeutiques de vos bitters?
 Quels sont les alcools que vous utilisez?
 Est-ce que d’autres liquides (miel, tonic, etc) sont-ils ajoutés?
 Quel est le goût, l’arôme, le parfum et la couleur des «bitters» que vous préparez ?

37
Annexe 3: Listes des espèces, noms locaux, familles, types morphologiques obtenus au cours
de l’étude.
Types
Noms scientifiques des espèces Nom local en Agni Familles
morphologiques
Aframomum melegueta K. Schum Essa Zingiberaceae Herbacée
Albizia adianthifolia (Schumch.) W. Wight Pambangni Fabaceae Arbre
Alchornea cordifolia (Schumach. &
Djéka Euphorbiaceae
Thonn.) Müll. Arg. Arbuste
Allium sativum L. Djéné Amaryllidaceae Herbacée
Alstonia boonei De Wild Emien Apocynaceae Arbre
Annickia polycarpa (DC.) Setten & Maas Subokorklai Annonaceae Arbre

Anthocleista nibolis G. Don Wowoliwo Gentianaceae Arbre


Baphia nitida Lodd. Srèman Fabaceae Arbuste
Borassus aethiopum Mart. Koubé Arecaceae Arbre
Bridelia grandis Pierre ex Hutch Ekpa Phyllanthaceae Arbre
Carica papaya L. Oflè Caricaceae Arbre
Carpolobia lutea G. Don Sékenoua Polygoniaceae Arbuste
Citrus limon L. waoulé domi Rutaceae Arbuste
Cleistopholis patens (Benth.) Steenis Ehoutié Annonaceae Arbuste
Cocos nucifera L. Kpaco Arecaceae Arbre
Combretum paniculatum Vent. Eflon Combretaceae Liane
Combretum zenkeri Engl. & Diels Eflon Combretaceae Liane
Cymbopogon citratus (DC) Stapf. Douthé Poaceae Herbacée
Cyperus esculentus L. Mbemou Cyperaceae Herbacée
Dioclea reflexa Hook. f. Atè Fabaceae Liane
Discoglypremna caloneura (Pax) Prain Bortigna Euphorbiaceae Arbuste
Eleais guineensis Jacq. Awé Arecaceae Arbre
Entandrophragma angolense (Welw.) C.
Doukouman Meliaceae
DC Arbre
Euadenia emineus Hook. F. Epou ou pouhi Capparaceae Arbuste
Garcinia afzelii Engl. Alakpahidjé Clusiaceae Arbre
Garcinia kola Heckel Kaklan Clusiaceae Arbre

39
Suite de l’annexe 3

Types
Noms scientifiques des espèces Nom local en Agni Familles
morphologiques

Gossypium barbadense L. Djéssé Malvaceae Arbuste

Guilandina bonduc L. Awalé Fabaceae Liane

Hallea ledermannii (K. Krausse) Verdc. Bèya Rubiaceae Arbre

Harungana madagascariensis Lam.ex


Ekossouba Hypericaceae Arbuste
Poir.

Hoslundia oppposita Vahl Anoumanliè Lamiaceae Arbuste

Illigera pentaphylla Welw. Effignaman Hernandaceae Liane

Khaya ivorensis A. Chev Morguèguène (Ashanti) Meliaceae Arbre

Landolphia hirsuta (Hua) Pichon Amalai Apocynaceae Liane

Landolphia owariensis P. Beauv. Djamahaï (Ashanti) Apocynaceae Liane

Landolphia sp Poponé Apocynaceae Liane

Lophira alata Banks ex Gaertn Essorbakah Ochnaceae Arbre

Manotes expansa Sol.ex Planch N'guessiankplakassa Connaraceae Liane

Mezoneuron benthamianum Baill Akobowé Fabaceae Liane

Mondia whitei (Hook. f.) Skeels Douhamer Apocynaceae Liane

Monodora myristica (Gaertn.) Benth. Effouinbah ou fouinbah Annonaceae Arbre

Morinda lucida Benth. Kôya Rubiaceae Arbre

Morinda morindoides (Baker) Milne-Redh. Ewikorklai Rubiaceae Liane

Nauclea diderrichii (De Wild. &


Bossimon Rubiaceae
T.Durand) Merr. Arbre

40
Suite de l’annexe 3

Types
Noms scientifiques d’es espèces Nom local en Agni Familles
morphologiques

Ocimum gratissimum L. Awroman gnrin Lamiaceae Arbuste

Olax subscorpioidea Oliv. Akagnibaka Olacaceae Arbuste

Palisota hirsuta (Thunb.) K. Schum N'guessaï Commelinaceae Herbacée

Paullinia pinnata L. Trondui Sapindaceae Liane

Phyllanthus amarus Schumach. & Thonn. Soumassi Phyllanthaceae Arbuste

Phyllanthus muelleriaus (Kuntze) Exell Oguiniguo Phyllanthaceae Arbuste

Picralima nitida (Stapf) T. Durand & H.


Bissi Apocynaceae
Durand Arbuste

Piper guineense Schmach. & Thonn Essian sian Piperaceae Liane

Piptadeniastrum africanum (Hook. f.)


Dabeman Fabacea
Brenan Arbre

Psydrax subcordata (DC.) Bridson Djédjé bawaka Rubiaceae Arbre

Bakakpé mkpé ou
Rauvolfia vomitoria Afzel. Apocynaceae
bloukoudoua Arbuste

Ricinodendron heudelotii (Baill.) Pierre ex


Api Euphorbiaceae
Heckel Arbre

Sarcocephalus latifolius (Sm.) E.A. Bruce Torlai Rubiaceae Arbuste

Sphenocentrum jollyanum Pierre Tchuatoi Menispermaceae Arbuste

Tapinanthus pentagonia (D.C) Tiegh. Yankandjé Loranthaceae Herbacée

Terminalia ivorensis A. Chev Flaï Combretaceae Arbre

41
Suite et fin de l’annexe 3

Types
Noms scientifiques des espèces Nom local en Agni Familles
morphologiques

Theobroma cacao L. Coco Malvaaceae Arbuste

Tiliacora leonensis (Scott-Elliot) Diels Keniguin Menispermaceae Arbuste

Uvaria afzelii Scott-Elliot Koussougnin Annonaceae Liane

Xylopia aethiopica (Dunal) A. Rich Sidian Annonaceae Arbuste

Zanthoxylum giletii (De Wild.) Waterman Awingué Rutaceae Arbre

Zanthoxylum zanthoxyloides (Lam.) Zepern. &


Tampon Rutaceae
Timler Arbre

42

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