Apprendre À Comprendre
Apprendre À Comprendre
Apprendre À Comprendre
« Si l'on n'y prend garde, les élèves, dès leur entrée à l'école, sont plus aisément dans
l'action "spontanée", immédiate, dans la réalisation des tâches scolaires auxquelles ils
sont confrontés sans en comprendre la finalité d'apprentissage et sans la mobilisation
cognitive supposée. N'identifiant pas les tâches en termes d'objet d'apprentissage et de
savoirs à s'approprier, n'allant pas au-delà de la réalisation de la tâche au plus près de la
matérialité de celle-ci, ils "omettent" ainsi de réfléchir pour faire. Il est donc nécessaire de
donner aux enfants "les mots pour identifier les objectifs du travail scolaire, d'une part
en leur donnant des tâches assez complexes pour susciter leur réflexion et, d'autre
part, en pratiquant un questionnement individualisé de l'élève afin de lui permettre
d'expliciter la tâche qu'il doit accomplir. L'expérience montre qu'une telle démarche peut
effectivement transformer les apprentissages des élèves, apprentissages qui sont alors
toujours simultanément langagiers, linguistiques et disciplinaires. Un tel travail se situe
forcément dans l'interaction des domaines du langage, des savoirs, de l'école, des pratiques
sociales. Mais cela signifie sans doute qu'il faut regarder de plus près ce que chaque élève
fait véritablement dans sa classe avec le langage et à propos du langage. »
PREAMBULE
Ce document a été réalisé afin d’aider les collègues dans leur pratique quotidienne de classe. Il pose,
en cohérence avec les programmes, des principes généraux d’action et une démarche visant à rendre
explicite les attentes de l’enseignant pour des jeunes enfants qui découvrent l’école. Ce document se
veut à la fois support de réflexion et support opérationnel pour une mise en œuvre pratique d’une
pédagogie de la réussite. Les différentes facettes de cette approche figurent dans le schéma ci-
dessous.
Pédagogie
de l’explicite
de la réussite
de la clarté cognitive
STRUCTURE DU DOCUMENT
I – APPRENDRE A COMPRENDRE L’ECOLE, COMPRENDRE A L’ECOLE
1. Constats : hétérogénéité des élèves lors de la première scolarisation, certains élèves ont une expérience qui
leur permet une adaptation rapide et aisée, d’autres sont en position d’insécurité et vulnérables
2. Orientations : 3 impératifs, permettre à l’enfant à devenir élève, impliquer les parents, construire une
pédagogie de l’explicite, de la réussite et de la clarté cognitive
3. Démarche : De type « recherche action ». S’appuyer sur des données de la recherche pour construire une
pratique maîtrisée et efficace
4. Expérimentation : formuler les apprentissages et les représenter pour les identifier et se les approprier dans
un processus transparent.
IV - LA DEMARCHE
3. Mettre en œuvre :
Avant l’activité : présenter les apprentissages visés, les formuler, les représenter
Pendant l’activité : accompagner l’élève dans la réalisation des tâches et l’identification appropriation des
capacités, mis en place d’une évaluation formatrice qui associe l’élève au repérage de ses progrès
Après l’activité : associer les élèves au bilan, évaluer les acquis, identifier les progrès, pointer les
réussites
4. Synthèse de la démarche
V – CONCLUSION PROVISOIRE
1 - constats
Quand les enfants entrent à l’école maternelle, ils ont déjà un vécu de trois ans qui leur a permis de commencer
à comprendre, à penser et à « parler » le monde dans lequel ils vivent. Certains ont une expérience réduite à la cellule
familiale, d’autres, gardés chez une nourrice, connaissent une petite communauté plus élargie, d’autres encore qui ont
fréquenté une structure d’accueil comme la crèche ont déjà une expérience de la vie en collectivité. Quel que soit le
monde dans lequel ils auront déjà vécu, quelles que soient leurs expériences, quelle que soit leur langue et la maîtrise
qu’ils en ont, tous les enfants auront à comprendre l’école pour pouvoir apprendre à l’école, pour pouvoir apprendre de
l’école. Certains possèdent déjà les moyens de s’adapter rapidement à l’univers scolaire, d’autres moins familiers des
usages langagiers et de l’univers scolaires se trouvent d’emblée dans une position d’insécurité qui compromet leurs
chances d’une adaptation réussie.
Comprendre l’école maternelle ? Un jeu d’enfant ! répondront maints adultes. Mais à y regarder de plus près, qui
se souvient de son expérience scolaire à la maternelle, des apprentissages acquis, de la façon dont ils ont été appris.
D’ailleurs les parents pensent-ils que leurs enfants vont acquérir des savoirs, des attitudes et des comportements
scolaires dès la maternelle ? Les enfants comprennent-ils qu’en utilisant les mêmes jeux, les mêmes outils, les mêmes
objets culturels que ceux qu’ils peuvent posséder à la maison ou qu’ils ont découverts à la crèche, ils vont s’approprier
les savoirs indispensables pour un parcours scolaire de réussite. Comment l’enseignant peut-il accompagner et aider
l’enfant dans cette conquête du statut et du métier d’élève qui conditionnent son avenir scolaire ?
2 – orientations
Pour répondre à ces questions, trois impératifs ont guidé notre réflexion et constituent le fil rouge du document :
o Comme le précisent les programmes de 2008, « Les enfants doivent comprendre progressivement les
règles de la communauté scolaire, la spécificité de l’école, ce qu’ils y font, ce qui est attendu
d’eux, ce qu’on apprend à l’école et pourquoi on l’apprend. Ils font la différence entre parents et
enseignants. Progressivement, ils acceptent le rythme collectif des activités et savent différer la
satisfaction de leurs intérêts particuliers. Ils comprennent la valeur des consignes collectives. Ils
apprennent à poser des questions ou à solliciter de l’aide pour réussir dans ce qui leur est
demandé. Ils établissent une relation entre les activités matérielles qu’ils réalisent et ce qu’ils en
apprennent (on fait cela pour apprendre, pour mieux savoir faire). Ils acquièrent des repères
objectifs pour évaluer leurs réalisations ; en fin d’école maternelle, ils savent identifier des erreurs
dans leurs productions ou celles de leurs camarades. Ils apprennent à rester attentifs de plus en plus
longtemps. Ils découvrent le lien entre certains apprentissages scolaires et des actes de la vie
quotidienne. »
Construire une pédagogie de l’explicite, une pédagogie de la réussite, une pédagogie de la clarté
cognitive :
o Pédagogie de l’activité. La pédagogie de la maternelle prend d’abord en compte les besoins affectifs,
moteurs, sociaux et cognitifs des enfants. Simultanément, elle s’appuie sur la connaissance des
processus de développement et la connaissance des stratégies d’apprentissage spécifiques aux jeunes
enfants, en respectant les stratégies d’apprentissage naturelles qu’ils mettent spontanément en
œuvre. Elle utilise leur curiosité pour le monde environnant qui met la pensée en mouvement, qui
déclenche l’action et l’exploration tâtonnante du réel pour concevoir et conduire les activités scolaires.
Ainsi, l’école maternelle met-elle les enfants « en situation de faire », « en situation d’agir » d’où des
programmes structurés en domaines d’activité, à l’école maternelle, on parle de pédagogie de
l’activité. Conception qui conduit à bien des dérives en ce qu’elle peut laisser penser qu’il suffit d’agir pour
découvrir et apprendre. C’est d’ailleurs un reproche qui est fait à notre école maternelle. On a bien mis en
évidence que la multiplication des expériences et la succession des activités, conçues pour éviter la
routine et l’ennui ne garantissent en rien que l’enfant fasse des apprentissages. On a souligné
l’inconvénient des pédagogies par projets qui parient trop souvent sur des apprentissages incidents et
aléatoires. Pédagogie de l’invisible, pédagogie du vide largement critiquées parce qu’elles se contentent
de faire vivre, sans expliciter, sans identifier les savoirs, sans les formuler, sans se soucier de
progressivité, sans prendre en compte la logique des parcours et la nécessaire complexification des
situations, des supports et des tâches. Activités qui intéressent et qui mobilisent les enfants, activités qui
plaisent aux enfants mais activités fugitives qui n’apprennent rien ou trop peu aux enfants.
o Le projet ambitieux de l’école maternelle N’importe quelle garderie, n’importe quel centre aéré peut
faire cela, à savoir mettre les enfants en situation d’agir. Le projet de l’école maternelle est beaucoup plus
ambitieux. Il s’agit de mettre les élèves en situation de faire plus et mieux. C'est-à-dire que l’on va
conduire les élèves, avec des moyens et des stratégies adaptées à percevoir et comprendre qu’il y a
quelque chose au-delà du faire. Qu’au-delà de l’action, qu’au-delà de la réussite de l’action il y a
quelque chose à comprendre et à apprendre quelque chose qui n’est pas évident, qui n’est pas visible à
première vue et qui implique d’adopter une posture cognitive seconde, donc n’être pas seulement dans
le coup de l’action, mais aussi dans l’après-coup de cette action. Être capable non seulement de dire
ou de raconter ce que l’on a fait, mais aussi d’identifier et de formuler ce que l’on a appris. Il faut aider les
élèves à dire ce qu’ils ont fait, comment et avec quoi ou avec qui ils l’ont fait, bien sûr, c’est incontournable
et cela suppose un travail langagier particulier.
o Maîtriser les usages de la langue. Mais ce n’est pas suffisant. Il faut aussi promouvoir une réflexion sur
l’activité qui permette à l’élève de dire ce qu’il pense avoir appris, dire ce qu’il pense savoir, dire ce qu’il
pense de ce qu’il a fait. Aider l’enfant à comprendre ce qui est en jeu dans l’activité en termes de savoirs,
ces savoirs étant le plus souvent implicites pour les élèves. Les élèves agissent mais n’apprennent rien
parce qu’ils n’identifient pas les apprentissages en jeu dans les activités, plus encore si ces activités sont
calquées sur des pratiques sociales et culturelles. On ne jardine pas à l’école maternelle pour jardiner, on
jardine pour construire des savoirs dans le domaine de la biologie végétale… comme on ne fabrique pas
des confitures seulement pour le plaisir de les manger ou apprendre la recette, on découvre un procédé
de conservation des fruits lié au fait que les fruits mûrissent, se gâtent et pourrissent… Dans cette
approche pédagogique le maître doit s’efforcer, pour chaque situation de distinguer ce que l’on fait de ce
que l’on apprend, ce que l’on fait c’est le moyen, ce que l’on apprend, c’est l’objectif. Distinguer le temps
de l’action du temps de la réflexion sur l’action. Cette distinction impose de manipuler consciemment trois
types de langage :
- le langage comme moyen de dire et comme moyen de faire (langage de l’action, langage
d’accompagnement de l’action, moyen d’influencer les comportements) Temps de l’action, des
consignes, des commentaires, des citations.
- le langage comme système linguistique (langage objet d’observations et de manipulations, de
reformulations, de comparaison de différentes manières de dire)
- le langage comme manière de penser et de construire un univers de référence (mise à distance,
effort d’énonciation et de structuration de la pensée)
o Il faut donc conduire les situations en aidant les élèves à circuler dans ces modes de parler/dire/penser
différents. Il doit donc y avoir un va et vient constant entre la langue comme moyen de dire, comme moyen
d’apprendre et de penser et comme objet d’analyse. Les deux dimensions, système linguistique (formes
discursives, lexique, syntaxe) et manière de penser (connaissances sur le monde, savoirs encyclopédiques)
sont certainement les moins investies. Il faut donc penser la langue comme un moment et un moyen d’avancer
dans la structuration des activités d’élaboration et d’appropriation des savoirs. Cela implique d’aider les élèves
à mobiliser un oral moins centré sur la communication et les échanges spontanés en mettant en
évidence petit à petit que les usages et les formes du langage ne sont pas indépendants des
expériences de vie et ne sont pas indépendants non plus des univers de connaissance que l’on
explore. L’école ne doit pas isoler la maîtrise de la langue des domaines de connaissances qu’elle investit et
elle doit faire découvrir ces univers de référence et de connaissance sans lesquels la langue ne peut se
construire.
Langage objet
Langage d’action d’observations Langage manière de penser
Usage spontané en contexte Attention portée aux Mise à distance, effort d’énonciation
Usages communicatifs et différentes manières de dire, et de structuration de la pensée
expressifs manipulations, Élucidation des savoirs scolaires
reformulations
Projet/Situation/Tâche Code élaboré
Code restreint Structuration de l’oral,
Langage formel
Langage commun dimensions métalinguistique
Indépendant du contexte
Dépendant du contexte et métacognitive. Stratégies et
universaliste
Particulariste matériau linguistiques.
Oral scriptural
horizontal « parler écrit »
Discours vertical
Maître
Élèves
3 - démarche
• « Apprendre à l'école, apprendre l'école » du groupe Escol sous la direction d'Élisabeth Bautier
• « Comment l'enfant devient élève » de Marie-Thérèse Zerbato-Poudou»
• « Apprentissages progressifs de l'écrit à l'école maternelle » et « première maîtrise de l'écrit CP/CE1/
classes spécialisées » du groupe de recherche PROG piloté par Mireille Brigaudiot
• des pratiques quotidiennes « efficaces » avec des outils créés pour éclairer les apprentissages
• un dialogue permanent avec les élèves toujours axé vers la compréhension de ce qu'ils viennent apprendre à
l'école et la nécessaire distinction entre ce qu’ils font et ce qu’ils apprennent
• L'évaluation positive et formatrice de leurs résultats : «maternelle = école de la réussite »
• La posture: adopter, contrôler et maîtriser une posture d’étayage c’est-à-dire une posture qui offre aux élèves
un soutien qui les mènera graduellement à une plus grande autonomie ; (une posture attentive, exigeante, qui
stimule, sollicite, encourage, aide, une posture qui s’intéresse à ce que font, disent et expriment plus ou moins
explicitement les élèves, une posture attentive aux émotions et aux ressentis.
• Les échanges dialogiques : pour encourager les élèves à dire ce qu’ils pensent à échanger, à exprimer des
doutes ou des certitudes
Afin de
Construire une culture commune, maîtriser des codes tant en compréhension qu’en production, s’approprier des usages
de langue, s’approprier des connaissances, développer la pensée, conquérir de la langue, devenir élève… Pouvoir
apprendre, pouvoir dire ce que l’on a appris, savoir montrer que l’on sait.
4 - expérimentation
Le but de cette expérimentation est de réussir à développer une pédagogie de l’explicite pour « identifier et formuler ce
qu’il faut apprendre », pour « apprendre à apprendre », « apprendre à comprendre ce qu’on apprend » et « apprendre à
montrer que l’on a compris et ce que l’on a compris ».
Notre pédagogie s’efforce de faire la différence entre l’objectif visé, les capacités définies par les programmes, les
compétences du socle et les tâches lors de la phase de conception. Dans la mise en œuvre, elle s’efforce de rendre
lisibles pour les élèves, les apprentissages visés au cœur d’une activité ou d’une tâche. Pour aider les élèves à identifier
et à formuler les savoirs nous travaillons à rendre explicite et compréhensible notre propos d’enseignant. Dans cette
perspective, avec les élèves, nous avons conduit systématiquement un travail d’identification et de formulation des
apprentissages visés sous forme de petites vignettes repères.
L’expérimentation vise à évaluer l’impact de cette approche de clarification sur les apprentissages et les
capacités des élèves. Dans cette perspective un travail de hiérarchisation des savoirs a été effectué afin de
sélectionner ceux qui nous apparaissaient comme « incontournables », « stratégiques », « déterminants de la
réussite scolaire à l’école élémentaire » et par conséquent prioritaires dans notre approche.
Une des premières choses que l’on découvre dans la pratique de la classe, c’est la nécessité de bien distinguer une
tâche scolaire des savoirs, des capacités et des attitudes qui permettent de la réaliser :
savoirs conceptuels
savoirs procéduraux
capacité à gérer la tâche, à réguler son comportement, à demander de l’aide
capacité à comprendre les consignes
capacité à utiliser des outils, tels que les outils scripteurs, les ciseaux, la colle…
capacité à se concentrer sur la tâche et à la conduire à son terme
Dans notre approche pédagogique nous avons eu le souci de distinguer ces différentes composantes de toute situation
scolaire qui imposent des usages spécifiques du langage, pour formuler des consignes, désigner des actions, formuler
des savoirs, réguler des comportements, reformuler des propos, préciser, expliciter…
le temps d’avant l’action qui doit permettre à l’élève de comprendre ce qu’on attend de lui, qu’il se représente la
tâche, à quoi elle sert, ce qu’elle va lui permettre de découvrir, d’explorer, d’apprendre, de conforter, de
développer…
le temps de l’action qui mobilise une stratégie, une procédure, du temps, des supports et des outils
le temps de l’après-action qui doit permettre un retour sur ce qui a été fait avec le souci de ne pas confondre
ce que l’on a fait, comment on l’a fait avec ce que l’on a appris et ce que l’on ne savait pas
Dans cette approche, l’évaluation constitue un élément essentiel et ses différents aspects, finalités et modalités de mise
en œuvre, doivent faire l’objet de précisions :
les attendus :
ils sont définis par le socle commun en termes de connaissances et compétences, par les programmes
de 2008 en termes de capacités (être capable de…)
les exigences restent à définir dans le cadre du conseil de maître, elles concernent les indicateurs et
les critères de réussite ainsi que la réflexion sur le fait que tous les élèves sont concernés
On n’évalue que ce qu’on a permis d’apprendre et de construire, qui suppose une articulation claire et précise
entre le moment de l’évaluation et la durée, la chronologie des temps d’apprentissage.
On évalue ce qui est déterminant : Tout n’est pas au même niveau, il faut faire des choix, des choix cohérents
avec nos objectifs.
Quels outils ?
Pour prendre la mesure des acquis : Recourir aux épreuves / situations / exercices étalonnés, validés
(Banqoutils - Eduscol)
Inventer localement des situations / exercices ou-et guides / grilles d’observation (MUTUALISER)
Pour garder trace : un « tableau de bord » pour la classe ; les livrets scolaires pour les élèves; un livret de
réussite pour les élèves, ou un livret de progrès, différence entre parcours d’apprentissage et bilan.
Quels dispositifs ?
Objets, dates, supports à l’évaluation possiblement variables selon les enfants mais l’appréciation des élèves
dépend des « observables » et des critères retenus.
Observation dans les situations naturelles de classe (à quelles conditions cette observation peut -elle être
support à l’évaluation?) ou avec une tâche conçue pour évaluer.
Evaluation spécifique ou « globale ».
Evaluation individuelle ou en groupe.
Evaluation « institutionnelle » ou propre à la classe voire à un élève.
L’illusion de l’exhaustivité.
Les limites des épreuves papier-crayon: peu pertinentes notamment pour le langage sauf pour évaluer la
compréhension (par exemple, images, dessins) ou les découpages en syllabes, le repérage de sons.
Des précautions
L’évaluation est un point d’appui de l’école maternelle mais ne doit pas devenir envahissante et prendre le
temps de l’apprentissage.
Evaluer ce qu’il faut, ce qu’on peut, quand il le faut, quand on le peut.
Pour cela, il faut maîtriser le programme et avoir des repères sur le développement des enfants : savoir à quoi
il importe d’être attentif, pouvoir capter les signaux positifs et repérer les points d’alerte en situation.
L’évaluation comme accompagnement de l’apprentissage pour permettre à l’enseignant de mieux enseigner et
à l’élève de mieux apprendre
L’école maternelle doit recourir à des situations, des démarches d’évaluation qui lui sont propres, ne pas «
primariser » l’évaluation.
Il vaut mieux multiplier les prises d’indices en « situation écologique » que créer des situations factices.
Au-delà des résultats obtenus à une évaluation, leur interprétation est déterminante.
Un élève peut ne pas satisfaire à une évaluation sans être en difficulté encore moins en échec ( Pb de
l’interprétation, la communication)
Différencier clairement difficulté et besoin.
Il(Elle)doit nécessairement penser en amont tout ce qui va se dérouler dans sa pratique quotidienne de la classe :
Dans la conception de ses programmations, il lui faut différencier programmation d’objectifs et programmation
d’activités :
Les programmations d’objectifs sont référées aux référentiels de compétences (socle commun) et des capacités
(programmes pour l’école maternelle). Ces programmations doivent permettre d’organiser les parcours d’apprentissage
selon une logique de complexification et de progressivité. Les programmations d’activités d’articulent avec les
programmations d’objectifs et listent les situations adaptées à mettre en œuvre successivement en œuvre pour
permettre une réelle appropriation des capacités dans les différents domaines.
1 Les capacités du devenir élève dans tous les domaines (pour dire ce qu’il apprend)
2 Les capacités qui relèvent d'un projet de classe
3 Les capacités visées plus particulièrement sur une période (en particulier les domaines « Découverte du monde » et
« Langage oral et écrit »)
Sa tâche consiste ensuite à créer, des instruments de planification sous forme de tableaux, de schémas et d’élaborer
des outils de repérage pour les élèves (avec des vignettes, ses outils) : (voir partie pratique « Amener les élèves à
comprendre : les différentes étapes chronologiques en classe. »)
Parallèlement à ce travail avec ses élèves, l'enseignant(e) met en place la communication de cette organisation aux
parents :
• Il paraît important, en tout début d'année, lors de la réunion de rentrée de les informer en leur présentant
quelques-unes des vignettes qui seront utilisées, ainsi qu'un exemple de tableau présentant les
apprentissages, un schéma de projet et une grille d'évaluation telle qu'ils la retrouveront dans les cahiers de
leurs enfants à chaque fin de période avec l'explicitation du codage « positif » qui sera mis en place. Il est à
noter que si nous avons opté pour cette solution, c'est parce-que les « smileys » ou autres « feux tricolores »
utilisés auparavant sur ces évaluations étaient tellement dénaturés par certaines familles qu'ils créaient un
stress chez les élèves en début de période (« mes parents, ils m'ont dit : on veut que des feux verts, la
prochaine fois ! »)
• Ensuite, lorsque le programme des apprentissages a été présenté aux élèves, l'enseignant(e) l'affiche dans le
couloir à leur intention, ce qui donne lieu à discussion entre parents et enfants à l'entrée ou à la sortie de la
classe. Cela permet de leur donner des points de repère pour comprendre les étapes que vont franchir les
élèves (apprentissages progressifs).
ANNEE SCOLAIRE 2010 -2011 13
INSPECTION ACADEMIQUIE DE LA SARTHE - GROUPE DES PEMF « ECOLE MATERNELLE »
Maintenant que l'enseignant (e) sait ce qu’il (elle) attend des élèves, il doit en classe, leur signifier clairement l’objet
d’apprentissage et leur donner les clés pour comprendre.
Dans un premier temps il est donc nécessaire de faire découvrir et d'expliciter avec eux les apprentissages visés au
moyen de vignettes qui serviront de repères. Vient ensuite le moment de leur présenter les « projets d'apprentissages »
et de discuter ensemble de ce qui a été prévu par l'enseignant(e)sur la période qui commence.
À la fin de chaque période, l'enseignant(e) procède à l'évaluation des progrès avec chaque élève. À cette fin, il a
construit sa grille d'évaluation avec certaines des vignettes utilisées pour la présentation des apprentissages de la
période concernée. Elle tient sur une page (on n'évalue que l'essentiel !) et sera collée dans le cahier de l'élève.
IV – LA DEMARCHE
Ce travail est un travail en amont, fait par l’enseignant de la classe, en lien avec les programmations d’école sur le cycle.
C’est indispensable afin que le maître et ses élèves s’imprègnent des objectifs d’apprentissages qu’ils auront à travailler
ensemble. Les projets seront aussi présentés.
La démarche :
A partir des programmations annuelles de l’école, il s’agit de créer des programmations de classe par période au fur et à
mesure du déroulement de l’année, objectifs par objectifs.
La tâche du maître consiste ensuite à créer ses outils, essentiellement sous forme de tableaux et/ou de schémas avec
des vignettes :
• Ceux qui servent à informer les élèves des apprentissages en cours et à venir (apprentissages pour la
période qui débute, projets de classe à réaliser)
• Ceux qui servent à communiquer avec les parents pour leur faire comprendre les objectifs d’apprentissage
du moment (les projets d'apprentissage pour la période x)
• Ceux qui servent à distinguer les tâches scolaires et les apprentissages visés (qu'est-ce que j'apprends en
faisant telle ou telle tâche ? À quoi ça va me servir ensuite ?)
• Ceux qui servent à effectuer les bilans de fin de séance en classe avec les élèves ( qu’avons-nous appris
aujourd’hui ?)
• Ceux qui servent à évaluer avec les élèves leurs progrès (ce que je sais faire, ce que je dois perfectionner
encore)
De cette programmation périodique, le maître doit tirer les activités qui serviront à atteindre les objectifs visés.
…le travail concret avec les élèves commence…
3 - Mettre en oeuvre
Avant l’activité
présenter les apprentissages visés, les formuler, les représenter
Le but du maître à cette étape est de réussir à développer une pédagogie explicite pour « apprendre à apprendre » en
maternelle et « apprendre à comprendre ». (voir les questions théoriques dans la partie « ce qu’en disent certaines
équipes de chercheurs… »)
Dans un premier temps il est nécessaire de présenter et expliciter les vignettes utilisées avec les élèves :
« Cette période, nous allons travailler pour apprendre à….. »
Exemples de vignettes :
Exemple d’utilisation de vignettes pour illustrer un projet (ici, projet « inventer un conte pour les élèves de CP »)
Il existe plusieurs façons de s'y prendre. De manière non exhaustive, voici celles que nous avons expérimentées, en
petit ou grand groupe :
− proposer les vignettes sous forme de jeu de cartes, celles qui sont en liaison avec les apprentissages visés
pour la période : « Cette période nous allons travailler sur.. »
− exposer les projets d'apprentissages sous forme de tableau, (vignettes classées par domaines) et faire décrire
aux enfants chaque dessin pour mieux les expliciter
− lorsqu'il y a « projet » à expliciter, créer devant eux le schéma du projet en y insérant les vignettes que l'on a
préparées (mais encore inconnues des élèves). Laisser affiché ce schéma dans la classe (ou le couloir) à
hauteur des enfants, tout le temps que dure le projet pour que les élèves puissent s'y référer à l'envi.
− afficher une nouvelle vignette en grand format au tableau, à chaque fois qu'on aborde un nouvel apprentissage
: « alors là, aujourd'hui, en faisant ceci, nous allons apprendre cela (ou nous entraîner à...) ». Laisser les
vignettes affichées grand format au tableau tant que l'apprentissage est en cours et s'y référer à chaque fois
qu'on évoque le dit apprentissage.
Pendant l’activité
accompagner l’élève dans la réalisation des tâches et l’identification appropriation des capacités, mis en place
d’une évaluation formatrice qui associe l’élève au repérage de ses progrès
Pour aider les élèves à comprendre et mémoriser les objectifs de la période, chaque vignette est agrandie, plastifiée.
Certaines vignettes vont servir toute l'année (voire encore les années suivantes avec d'autres enseignants(es)) et seront
bien intégrées par les élèves qui les retrouveront avec plaisir et pour certains avec soulagement (Ouf ! On a du temps
pour apprendre à écrire des mots, en fait !).
D'autres vignettes viendront enrichir ce petit « capital dessins » au fil de l'année scolaire ( et des années de maternelle,
pourvu que l'on commence dès la petite section... Dans l'idéal !). Les élèves les découvrent toujours avec intérêt et
prennent vite l'habitude de les expliciter avec l'étayage de l'enseignant(e). C'est ici qu'« apprendre à comprendre »
prend tout son sens aux yeux des enfants fragiles qui rentrent peu à peu dans leur « habit d'élève » à l'école maternelle.
Il est malgré tout important, surtout avec les plus fragiles, de vérifier régulièrement que les élèves mettent toujours du
sens derrière ces dessins.
Ces vignettes, présentées lors du passage des consignes ou/et lors des synthèses des activités avec les élèves servent
à comprendre dans quel registre d’apprentissage on se situe. (« Lors de cette activité ce matin, vous allez travailler pour
apprendre à … ? » ) Il nous apparaît aujourd'hui nécessaire de ritualiser dans nos classes ce bref moment de réflexion
quotidien.
Le jeu de cartes ainsi créé peut aussi servir de jeu de loto, de mémory ou tout simplement d’aide mémoire lors des
passations de consignes
Cette mise en images aide à la mise en mots puis à l’intégration et à la compréhension des objectifs
d’apprentissage…et plus généralement à la compréhension des enjeux de la maternelle.
Durant toute la période, les élèves auront donc au quotidien, au fil des activités et projets en cours l’occasion de
verbaliser et de mémoriser les objectifs et les compétences mis en avant par les choix du maître.
Pendant l’activité, l’élève fait avec les autres et avec le maître, le but étant que les élèves acquièrent de plus en plus
d’autonomie.
Les élèves sont amenés à travailler deux par deux, voire quatre par quatre, en étant capables de se détacher petit à
petit de l’aide du maître, et en étant capable de comprendre son rôle, les interactions avec les autres, d’avoir un regard
et un recul sur ce qu’il a fait.
Après l’activité, il est nécessaire de faire un retour collectif sur le travail (qu’il ait été individuel ou en groupe). Cette étape
est importante pour qu’il y ait verbalisation et construction collectives des savoirs. Un retour vers les vignettes est parfois
utile. Pour résumer la démarche jusqu’ici exposée, voici un tableau récapitulatif ci-après.
Après l’activité
associer les élèves au bilan, évaluer les acquis, identifier les progrès, pointer les réussites
Pour l’élève :
Les critères d’évaluation sont énoncés en collectif en début de période et repris en individuel ou en petits groupes
pendant les passations de fin de période.
Les vignettes encore une fois servent de support privilégié.
Pour le maître :
Les évaluations négatives et implicites découragent. Il est donc primordial que le regard porté sur l’enfant reste positif. Il
faut donc plutôt insister sur la mise en valeur des résultats déjà atteints plutôt que ses manques, sur la mesure de son
évolution plutôt que son niveau propre.
Les critères d’évaluation sont donc accessibles à tous ; cet affichage devient un lieu d’échange entre les enfants et leurs
parents, et entre les parents et les enseignants.
La feuille d’évaluation individuelle de chaque enfant est mise dans le cahier remis à chaque fin de période. Cette feuille
est à consulter et à signer.
• FORME DE L’OUTIL :
Une grille (limitée à un tableau d'une seule page et ne comprenant que les vignettes du « Devenir élève », « Découvrir le
monde » et « Langue »), préparée par l'enseignant(e) et reprenant les vignettes-dessins bien connues des élèves en
sera le support.
Seuls deux « codages » nous sont parus essentiels pour mettre en valeur les réussites et rester positif par rapport à ce
qu'il reste à perfectionner. L'enseignant(e) reporte sur chaque grille individuelle le codage devant l'élève :
L’utilisation par les élèves de ces vignettes « j’ai réussi » ou « à poursuivre » pour valider des travaux ou des
recherches faites en binôme est intéressante et sert de point d’appui aux bilans collectifs à la fin de l’activité.
Exemple d’un travail en binôme sur les espaces entre des mots, évalué par les élèves grâce aux vignettes « j’ai réussi !»
ou « à poursuivre… »
À la fin de chaque période, viendra l'évaluation des progrès avec chaque élève. Ce « rituel » de fin de période sera
réalisé la dernière semaine avant les vacances sur la grille présentée plus haut dans « forme de l’outil ».
• Pour les autres, ce moment peut se faire en petits groupes avec lesquels on vérifie rapidement les acquis soit
en manipulant chacun à son tour, soit en posant de petites devinettes, soit en justifiant avec eux les réussites
avec les productions déjà réalisées dans les cahiers ou sur les murs de la classe.
• On peut choisir de remplir les grilles devant eux ou bien, pour aller plus vite, de les collecter sur un tableau à
double entrée de la classe reprenant les vignettes et les prénoms des élèves et se réserver la tâche de les
reporter ultérieurement sur chaque grille.
• Dans chaque cas de figure, il importe que chaque élève soit acteur de son évaluation avec l'enseignant(e) et
qu'il ait intégré que celui-ci respectera le contrat tacite qui a été établi : écrire ce qui a été vraiment testé avec
l'élève, rester positif.
• Même pour les élèves les plus avancés de la classe, il reste toujours des éléments à perfectionner. Il est
important de le leur signifier par écrit.
APPRENDRE A COMPRENDRE
L’ECOLE : comment évaluer ?
Rappeler à l’élève les critères de Evoquer à nouveau les objectifs Une feuille et une seule feuille où Autant de feuilles avec vignettes (cf.
réussite avec l’aide des vignettes. d’apprentissage. les vignettes des objectifs photo n° « inventer un conte » )
Avoir un regard positif sur l’élève Découvrir les critères de réussite de d’apprentissage sont présents. correspondant à autant de projets
4 Mettre en valeur les résultats déjà l’évaluation en individuel ou en petit Des vignettes codages : mis en place dans la classe
atteints plutôt que les manques groupe. « à suivre » … « j’ai réussi » ! La feuille des objectifs
Mesurer l’évolution plutôt que le Découvrir ses capacités puis se d’apprentissage avec le code « à
niveau de l’élève et le lui rendre rendre compte de l’évolution de ces suivre », « j’ai réussi » à signer.
explicite. capacités.
« à suivre » … « j’ai réussi » !
V – CONCLUSION PROVISOIRE
A la lumière de notre expérience pour que les enfants deviennent pleinement élèves, il s’agirait de construire un
cadre scolaire, un « cadre pour apprendre » en aidant les élèves à clarifier l’objet de l’activité et les conditions de sa
réussite. Avec pour l’enseignant à l’esprit que l’objectif de l’école n’est pas de « faire faire », mais de montrer à l’élève
qu’en faisant on apprend.
«Je voudrais quand même souligner combien des évaluations explicites peuvent être utiles et
combien des évaluations implicites peuvent avoir un impact négatif sur le goût d'apprendre et même
sur les apprentissages des enfants. Donc privilégier l'évaluation explicite qui se dit comme telle aux
enfants, prendre aussi les enfants comme acteurs de leurs apprentissages me paraît tout à fait
nécessaire. (…) Satisfaire l'adulte pour un petit, c'est un élément tout à fait important avant qu'il
trouve le goût de réussir pour réussir et pour lui-même. Il se voit compétent dans le regard
d'autrui... les compétences des enfants sont souvent les compétences des adultes à reconnaître les
compétences des enfants.» Agnès Florin
in DVD «Apprendre à parler » Scérén/CNDP, 2010 interview d’Agnès Florin «évaluer les compétences »