Chap10-Cours Applications Linéaires en Dimension Finie

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Applications linéaires en dimension nie

Table des matières

1 Rang d'une application linéaire 2


2 Applications linéaires et familles de vecteurs 3
2.1 Images de familles de vecteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
2.2 Espaces isomorphes et dimension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
3 Théorème du rang 5
3.1 Énoncé du théorème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
3.2 Théorème du rang et bijections . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
4 Formes linéaires 6

1
Dans tout le chapitre, K désignera R ou C.
1 Rang d'une application linéaire

Proposition (Image d'une base par une application linéaire).


Soit E et F deux espaces vectoriels. On suppose que E est de dimension nie n ∈ N et on note (e , . . . , e ) ∗

une de ses bases. Alors une application linéaire f de E dans F est dénie de manière unique par la donnée
1 n

de la famille :
(f (e1 ), . . . , f (en )).

(démonstration à connaître) Soit (e , . . . , e ) une base de E et (f , . . . , f ) une famille d'éléments de


F . On va montrer qu'il existe une unique application linéaire f telle que pour tout i ∈ [[1, n]], f (e ) = f .
Démonstration. 1 n 1 n

 Analyse : on suppose qu'il existe une telle application f . Soit x = P x e ∈ E. Alors, par linéarité de f ,
i i
n
i=1 i i
n
X n
X
f (x) = xi f (ei ) = xi fi .
i=1 i=1

Ce qui dénit entièrement f .


 Synthèse : soit f l'application de E dans F qui associe à tout vecteur x = P x e le vecteur f (x) = P x f . n n

Soit i ∈ [[1, n]], comme e = 0e + · · · + 0e + 1e +P0e + · · · + 0e P, on a f (e ) = f . MontronsPmaintenant que i=1 i i i=1 i i

f est linéaire : soit λ ∈ K et (x, y) ∈ E avec x = x e et y = y e . Alors λx + y =


i 1 i−1 i i+1 n i i
2 n n n
(λx + y )e
et donc : i=1 i i i=1 i i i=1 i i i

X n X X n n
f (λx + y) = (λxi + yi )fi = λ xi fi + yi fi = λf (x) + f (y).

Donc f satisfait bien les conditions demandées.


i=1 i=1 i=1

D'où l'existence d'une unique application f qui convient.


Exemple 1. Déterminer l'unique application linéaire f de R dans R qui vérie f ((1, 0)) = (2, 1) et f ((0, 1)) = (1, 1).
2 2

Soit (x, y) ∈ R , la linéarité de f donne :


2

f ((x, y)) = f (x(1, 0) + y(0, 1)) = xf ((1, 0)) + yf ((0, 1)) = x(2, 1) + y(1, 1) = (2x + y, x + y).

Proposition (Famille génératrice de Im(f )).


Soit E et F deux espaces vectoriels et f une application linéaire de E dans F . On suppose que E est de
dimension nie et on note (e , . . . , e ) une de ses familles génératrices. Alors :
1 n

Im(f ) = Vect(f (e1 ), . . . , f (en )).

SoitPy ∈ Im(f ). Il existe x ∈ E tel que y = f (x) et comme la famille (e , . . . , e ) est génératrice de E
on peut écrire x = x e . On a donc, par linéarité de f :
Démonstration. 1 n
n
i=1 i i
n n
!
X X
y = f (x) = f xi ei = xi f (ei ).
i=1 i=1

Donc y ∈ Vect(f (e ), . . . , f (e )) et Im(f ) ⊂ Vect(f (e ), . . . , f (e )). L'inclusion réciproque étant évidente, on obtient
l'égalité des ensembles.
1 n 1 n

2
Remarque. C'est en particulier vrai lorsque (e , . . . , e ) est une base de E.
1 n

Exemple 2. Soit f dénie de R dans R par ∀(x, y) ∈ R , f ((x, y)) = (4x − 6y, 2x − 3y). Déterminer Im(f ).
2 2 2

(1, 0) et (0, 1) forment une base de R , donc 2

Im(f ) = Vect (f ((1, 0)), f ((0, 1))) = Vect ((4, 2), (−6, −3)) = Vect ((4, 2)) ,

où la dernière égalité provient de la relation (−6, −3) = − (4, 2). 3


2

Dénition (Rang d'une application linéaire).


Soit E un espace vectoriel de dimension nie et F un espace vectoriel. Soit f une application linéaire de
E dans F . On appelle rang de f , et on note rg(f ) la valeur :

rg(f ) = dim (Im(f )) .

Remarque. La fonction nulle est la seule application de rang 0.


Remarque. Si (e , . . . , e ) est une base de E , Im(f ) = Vect(f (e ), . . . , f (e )) d'après ce qui précède et on a en
particulier rg(f ) = rg(f (e ), . . . , f (e )).
1 n 1 n
1 n

2 Applications linéaires et familles de vecteurs

2.1 Images de familles de vecteurs

Proposition (Image d'une famille libre par une application injective).


Soit E et F deux espaces vectoriels et f une application linéaire injective de E dans F . L'image par f
d'une famille libre de E est une famille libre de F .

Remarque. Ce résultat ne nécessite pas de supposer que E est de dimension nie. Le cas E = {0} est par contre un
peu particulier, puisqu'il n'existe alors pas de famille libre de E.
Soit (e , . . . , e ) une famille libre de E, et f une application linéaire injective de E dans F . Montrons
que (f (e ), . . . , f (e )) est une famille libre de F . Soit (λ , . . . , λ ) ∈ K , on suppose que
Démonstration. 1 n
n
1 n 1 n

n
X
λi f (ei ) = 0F .
i=1

On a alors, par linéarité P de f , f (


P
λ e ) = 0 , càd
n P
λ e ∈ Ker(f ). Comme f est injective, Ker(f ) = {0 },
n

ce qui nous donne λ e = 0 . Et comme (e , . . . e ) est une famille libre de E, les λ sont tous nuls. Donc
i=1 i i F i=1 i i E
n

(f (e ), . . . , f (e )) est libre dans F .


i=1 i i E 1 n i
1 n

Proposition (Image d'une famille génératrice par une application surjective).


Soit E et F deux espaces vectoriels de dimension nie et f une application linéaire surjective de E dans
F . L'image par f d'une famille génératrice de E est une famille génératrice de F .

3
Soit (e , . . . , e ) une famille génératrice de E et f une application linéaire surjective. Soit y ∈ F .
Comme f est surjective, y ∈ Im(f ) etPil existe x ∈ E tel que f (x) = y. Et comme (e , . . . , e ) est génératrice de E, il
Démonstration. 1 n

existe (x , . . . , x ) ∈ K tels que x = x e . Ce qui donne :


1 n
n n
1 n i=1 i i

n n
!
X X
y = f (x) = f xi ei = xi f (ei ).
i=1 i=1

Or ∀i ∈ [[1, n]], f (e ) ∈ F . Donc la famille (f (e ), . . . , f (e )) est génératrice de F .


i 1 n

Proposition.
Soit E et F deux espaces vectoriels de dimension nie n ∈ N et f une application linéaire de E dans F .

Alors :
 Si f est bijective, l'image par f de toute base de E est une base de F .
 S'il existe une base de E dont l'image par f est une base de F , alors f est bijective.

 Le premier point est une conséquence directe des deux résultats précédents.
Démonstration.

 Réciproquement, supposons qu'il existe une base (e ,P. . . , e ) de E dont l'image est une base de F .
 Soit x ∈ Ker(f ), alors x ∈ E et on peut écrire x = x e (puisque (e , . . . , e ) est une famille génératrice
1 n
n

de E). Par linéarité de f , on obtient : i=1 i i 1 n

n n
!
X X
0F = f (x) = f xi e i = xi f (ei ).
i=1 i=1

Or les f (e ) sont une famille libre de F . Donc les scalaires x sont tous nuls. Donc x = 0 et Ker(f ) ⊂ {0 }.
La deuxième inclusion étant évidente, on en déduit que f est injective.
i i E E

 Soit y ∈ F , alors on peut écrire y = P y f (e ) (puisque (f (e ), . . . , f (e )) est une famille génératrice de


n

F ). Alors, par linéarité de f ,


i=1 i i 1 n

n n
!
X X
y= yi f (ei ) = f yi ei .
i=1 i=1

Donc y ∈ Im(f ) et F ⊂ Im(f ). La deuxième inclusion étant évidente, on en déduit que f est surjective.
Donc f est bijective.
2.2 Espaces isomorphes et dimension

Proposition.
Soit n ∈ N . Un K-espace vectoriel est de dimension n si et seulement si il est isomorphe à K .
∗ n

 Soit E un K-espace vectoriel de dimension n. Alors il possède une base (e , . . . , e ).


Démonstration.

Soit ϕ l'application linéaire qui à tout e associe le i-ème terme de la base canonique de K . L'application ϕ est
1 n
n

linéaire par construction, et l'image de la base (e , . . . , e ) est la base canonique de K . Donc par le résultat
i
n

précédent elle est bijective. Donc E est isomorphe à K .


1 n
n

4
 Réciproquement, soit E un espace vectoriel isomorphe à K . Il existe donc un isomorphisme ϕ de K dans E.
n n

Comme ϕ est bijective, l'image par ϕ de la base canonique de K est une base de E. Donc E possède une base
n

à n éléments et dim(E) = n.
Corollaire.
Soit E et F deux espaces vectoriels de dimension nie. Ils sont isomorphes si et seulement si
dim(E) = dim(F ).

3 Théorème du rang

3.1 Énoncé du théorème

Théorème (Théorème du rang).


Soit E et F deux espaces vectoriels et f une application linéaire de E dans F . On suppose que E est de
dimension nie, alors dim(E) = dim(Ker(f )) + dim(Im(f )), c'est-à-dire
dim(E) = dim(Ker(f )) + rg(f ).

(démonstration à connaître) Ker(f ) ⊂ E qui est de dimension nie, donc c'est également un espace
de dimension nie. Soit (e , . . . , e ) une base de Ker(f ) (dans le cas où Ker(f ) 6= {0 }). C'est une famille libre de
Démonstration.

E , donc (théorème de la base incomplète) on peut la compléter en une base (e , . . . , e ) de E (si Ker(f ) = {0 },
1 k E

on prend directement une base de E). On sait alors que (f (e ), . . . , f (e )) est génératrice de Im(f ). Et comme
1 n E

f (e ) = · · · = f (e ) = 0 (ces éléments étant dans le noyau de f ), on obtient que (f (e ), . . . , f (e )) est génératrice


1 n

de Im(f ). Il nous reste maintenant à montrer que cette famille est libre pour pouvoir conclure que c'est une base. Soit
1 k F k+1 n

(λ , . . . , λ ) des scalaires, on suppose que


k+1 n
n
X
λi f (ei ) = 0F .
i=k+1

Comme f est linéaire, on en déduit que f Pn


λ e = 0 . Donc
 P n
i=k+1 λi ei , dont une base est
∈ Ker(f )
(e , . . . , e ), et il existe des scalaires (α , . . . , α ) tels que :
i=k+1 i i F
1 k 1 k

n
X k
X
λi ei = αi ei .
i=k+1 i=1

Comme (e , . . . , e ) est une base de E, et en particulier une famille libre, on en déduit que tous les λ et α sont nuls.
On a donc montré que (e , . . . , e ) est une base de Ker(f ), et (f (e ), . . . , f (e )) est une base de Im(f ). Ce qui nous
1 n i i

donne que dim(Ker(f )) = k, dim(Im(f )) = n − k et en particulier :


1 k k+1 n

dim(E) = dim(Ker(f )) + dim(Im(f )).

5
3.2 Théorème du rang et bijections

Proposition.
Soit E et F deux espaces vectoriels de dimension nie tels que dim(E) = dim(F ) et f une application
linéaire de E dans F . Alors :
f est injective ⇐⇒ f est surjective ⇐⇒ f est bijective ⇐⇒ rg(f ) = dim(F ).

Démonstration. Le théorème du rang donne


dim(Ker(f )) + dim(Im(f )) = dim(E) = dim(F ).

En particulier,
 Si f est injective, dim(Ker(f )) = 0, donc dim(Im(f )) = dim(F ). Or Im(f ) ⊂ F , donc Im(f ) = F et f est
surjective.
 Si f est surjective, dim(Im(f )) = dim F , donc dim(Ker(f )) = 0, càd Ker(f ) = {0 } et f est injective. Donc f
est bijective.
E

 Si f est bijective, Im(f ) = F et donc rg(f ) = dim(F ).


 Si rg(f ) = dim(F ), alors dim(Ker(f )) = 0, càd Ker(f ) = {0 } et f est injective.
On a ainsi montré toutes les équivalences.
E

Corollaire.
Soit E et F deux espaces vectoriels de dimension nie tels que dim(E) = dim(F ), f une application linéaire
de E dans F et g une application linéaire de F dans E. Alors :
 Si f ◦ g = Id , f est bijective et f = g.
−1

 Si g ◦ f = Id , f est bijective et f = g.
F
−1
E

(démonstration à connaître)
 On suppose que f ◦ g = Id . Soit x ∈ F , alors f ◦ g(x) = x, donc f (g(x)) = x. Donc x admet un antécédent (en
Démonstration.

l'occurrence g(x)) par f , et x ∈ Im(f ). Donc F ⊂ Im(f ). L'autre inclusion étant directe, on obtient Im(f ) = F ,
F

donc f est surjective. Par la proposition précédente, puisqu'il y a égalité des dimensions, f est également
bijective. De plus, comme f ◦ g = Id , on trouve en composant par f à gauche que g = f .
−1 −1

 On suppose que g ◦ f = Id . Soit x ∈ Ker(f ), alors f (x) = 0 et g ◦ f (x) = x. Par linéarité de g, on


F

obtient g ◦ f (x) = g(0 ) = 0 . Donc x = 0 . Donc Ker(f ) ⊂ {0 }. L'autre inclusion étant directe, on obtient
E F

Ker(f ) = {0 }, donc f est injective. Par la proposition précédente, puisqu'il y a égalité des dimensions, f est
F E E E

également bijective. De plus, comme g ◦ f = Id , on trouve en composant par f à droite que g = f .


E
−1 −1
E

4 Formes linéaires

Dénition (Forme linéaire).


Soit E un espace vectoriel sur K. On appelle forme linéaire sur E toute application linéaire de E dans
K.

6
Exemple 3. Soit C l'espace vectoriel sur R des fonctions continues sur [0, 1]. L'application f → R 1
0 f (t)dt est une
forme linéaire sur C .
Proposition.
Soit E un espace vectoriel de dimension nie n > 2 et F un sous-espace de E. Alors F est un hyperplan
de E si et seulement si c'est le noyau d'une forme linéaire sur E non nulle.

 Supposons que F = Ker(ϕ), où ϕ est une forme linéaire sur E non nulle. ϕ 6= 0, donc dim(Im(ϕ)) > 1. Comme
Démonstration.

ϕ est une forme linéaire, on a de plus Im(ϕ) ⊂ K, et donc Im(ϕ) = K. Le théorème du rang donne alors :

dim(Ker(ϕ)) = dim(E) − rg(ϕ) = dim(E) − 1.

F est donc un hyperplan de E .


 Réciproquement, supposons que F est un hyperplan de E. Soit (e , . . . , e ) une base de F , c'est une famille
libre de E, on peut donc (théorème de la base incomplète) la compléter en une base (e , . . . , e ) de E. Soit ϕ
1 n−1

l'application linéaire dénie de E dans K en posant ϕ(e ) = 0 si i 6= n etPϕ(e ) = 1. Montrons que F = Ker(ϕ).
1 n

 Soit x ∈ F , alors il existe des scalaires (x , . . . , x ) tels que x = x e . On a alors


i n
n−1
1 n−1 i=1 i i

n−1
X n−1
X
ϕ(x) = xi ϕ(ei ) = xi 0 = 0,
i=1 i=1

donc x ∈ Ker(ϕ). Donc F ⊂ Ker(ϕ).


 Réciproquement, soit x ∈ Ker(ϕ). En particulier, x ∈ E, donc il existe des scalaires (x , . . . , x ) tels que
x e , et
1 n
P n
x= i=1 i i
n
X
0 = ϕ(x) = xi ϕ(ei ) = xn ϕ(en ) = xn .
i=1

Donc x = 0, et x = P x e ∈ F . Donc Ker(ϕ) ⊂ F .


n−1

Par double inclusion, on a bien montré que F = Ker(ϕ). Enn, ϕ(e ) = 1, donc ϕ est non nulle.
n i=1 i i

Rmq : on pouvait également utiliser le théorème du rang à la place de l'inclusion réciproque.


n

Exemple 4. Soit f l'application linéaire dénie de R [X] dans R par : ∀P ∈ R [X],


2 2

f (P ) = P (0).

f est une forme linéaire. Déterminer l'hyperplan qui correspond à son noyau.
Soit P (X) = aX + bX + c ∈ R [X]. On a :
2
2

P ∈ Ker(f ) ⇐⇒ f (P ) = 0 ⇐⇒ c = 0 ⇐⇒ P (X) = aX 2 + bX ⇐⇒ P ∈ Vect(X, X 2 ).

Donc Ker(f ) = Vect(X, X ) = {aX + bX|(a, b) ∈ R }, qui est bien de dimension 2 = dim(R [X]) − 1.
2 2 2

Variantes : on pouvait aussi vérier que X et X sont dans le noyau, donc Vect(X, X ) ⊂ Ker(f ) et utiliser l'égalité
2
2 2

des dimensions pour conclure. Autre possibilité : raisonner par équivalences, mais en passant par une forme factorisée
du polynôme.

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