Le Spiritisme Dans La Perspective Laïque Et de Libre Pensée

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Le spiritisme dans

la perspective laïque
et libre-penseuse
Milton Rubens Medran Moreira
Salomão Jacob Benchaya

Le spiritisme dans la perspective


laïque et libre-penseuse

COLLECTION DE LA LIBRE PENSÉE:


UN SPIRITISME POUR LE XXIE SIÈCLE

Série 1 - Livre1

2023
Organisateurs de la Collection:
Ademar Arthur Chioro dos Reis, Mauro de
Mesquita Spínola e Ricardo de Morais Nunes
Translation:
Tainá Camilo Rodrigues Chella
Design Graphique, Couverture et Mise en Page:
Magda Zago
Révision Orthographique:
Néventon Vargas
Révision finale:
Wilson Garcia

Données internationales de catalogage avant publication (CIP)


Angelica Ilacqua CRB-8/7057

Moreira, Milton Rubens Medran


Le spiritisme dans la perspective laïque et libre-penseuse
[livre éléctronique] / Milton Rubens Medran Moreira, Salomão
Jacob Benchaya. -– [S.l.]: CPDoc; CEPA, 2023.
3 Mb; PDF (Collection de la libre pensée: un spiritisme pour
le xxie siècle; Série 1; Livre 1 / organisé par Ademar Arthur Chioro
dos Reis, Mauro de Mesquita Spínola, Ricardo de Morais Nunes)

ISBN 978-65-89240-26-6

1. Spiritualisme 2. Spiritualisme - Philosophie 3. Kardec, Allan,


1804-1869 - Doctrine I. Titre II. Benchaya, Salomão Jacob III. Reis,
Ademar Arthur Chioro dos IV. Spínola, Mauro de Mesquita V.
Nunes, Ricardo de Morais VI. Série

20-6400 CDU 133.7


CDD 133.9
PRÉSENTATION

“(…) La libre pensée relève la dignité de


l’homme ; elle en fait un être actif, intelligent,
au lieu d’une machine à croire.”
Allan Kardec (La Revue Spirite, févrie 1867)

L’association spirite internationale (CEPA) et le


Centre de recherche et de Documentation Spirite
(CPDoc) ont l’honneur de présenter au public spirite
et non spirite la Collection de la libre pensée: un
spiritisme pour le XXIe siècle.
La première série de cette collection de la libre
pensée a pour objectif de présenter de manière
synthétique, mais sans préjuger de l’exactitude
conceptuelle, les positions théoriques du spiritisme
qualifié de laïque et de libre penseur, qui s’est
développé dans plusieurs pays, dans les Amérique et
en Europe ces dernières années.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 3


Édité en quatre langues – portugais, espagnol,
anglais et français – elle a pour objectif de faire
connaitre le plus largement possible le spiritisme
laïque et libre penseur.
Cette perspective se caractérise par un autre
regard sur le spiritisme fondé par Allan Kardec
en 1857, à partir de la publication de son œuvre
magistrale, Le Livre des Esprits, institutionnalisée et
popularisée dans diverses régions de la planète.
Au fur et à mesure qu’il s’est répandu, le spiritisme
a connu un processus d’intégration et de métissage
avec l’ensemble des connaissances et pratiques reli-
gieuses et sociales spécifiques du contexte historique
et culturel de chaque pays et à chaque époque.
Dans certains pays, comme le Brésil par exemple,
le processus historique et culturel de caractère
catholique retrouvé par le spiritisme, donna lieu à
la formation d’une religion chrétienne de plus, au
détriment des principes rationnels et de libre pensée
proposés par Allan Kardec dans les premiers temps du
spiritisme.
Ce phénomène de syncrétisme a eu lieu avec le
spiritisme dans plusieurs pays, le transformant en une
religion mineure, le déplaçant de son positionnement
épistémologique naturel, en lui faisant perdre son

4 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


potentiel d’ouverture sur des perspectives dans le
champ de la connaissance, particulièrement dans les
domaines de la science et de la philosophie.
À partir de là, les spirites réunis au nom de la
CEPA et du CPDoc, ont eu la nécessité d’une relecture
de la pensée spirite, pour tenter de revenir à la
proposition généreuse d’Allan Kardec, qui cherchait à
construire une philosophie spiritualiste, laïque, de libre
pensée, humaniste et progressiste, caractéristiques
fondamentales pour que le spiritisme puisse accom-
pagner le progrès de la connaissance, l’éthique et la
spiritualité dans le monde contemporain..
La Collection de la libre pensée: un spiritisme
pour le XXIe siècle souhaite, par conséquent,
présenter au lecteur quelques thèmes fondamentaux
du spiritisme à partir de la perspective de cette
relecture, avec ainsi pour objectif d’éclairer le public
spirite en général et ceux qui s’intéressent à la
thématique spirite.
Elle présente et développe dans cette série 1, un
ensemble de thèmes fondamentaux, qui permettront
une compréhension globale dans une vision non
hégémonique, une vision différente de celle de la
pensée spirite prédominante dans les mouvements
spirites du Brésil et du monde.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 5


Tous les thèmes ont été développés à partir
d’une approche qui cherchait la clarté, la concision
et la précision, dans le but de fournir une information
liminaire fondamentale, quant au spiritisme et au
mouvement spirite, dans une perspective laïque et
de libre pensée.
La Collection de la libre pensée: un spiritisme
pour le XXIe siècle a aussi pour objectif d’offrir aux
personnes qui étudient et diffusent le spiritisme,
ainsi qu’à celles qui se consacrent à l’organisation
de cours, conférences et coordination de groupes
d’étude, un matériau de référence et de soutien
aux activités didactiques menées à bien dans les
associations spirites en général.
Nous pensons que cette initiative contribuera à
un débat sain sur les thèmes importants du spiritisme
pour que nous puissions tous faire grandir nos
réflexions sur cette transcendante philosophie fondée
par Allan Kardec.
Les auteurs de cette série I – Thèmes fonda-
mentaux – de la Collection de la libre pensée: un
spiritisme pour le XXIe siècle sont des intellectuels
provenant des mouvements spirites d’Argentine, du
Brésil, d’Espagne et du Venezuela qui ont développé
les thèmes suivants:

6 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


• Le spiritisme dans la perspective laïque et de
libre pensée
Milton Rubens Medran Moreira (Brésil) et
Salomon Jacob Benchaya (Brésil)
• L’immortalité de l’âme
David Santamaria (Espagne)
• Médiumnité : l’échange entre deux mondes
Ademar Arthur Chioro dos Reis (Brésil) et
Yolanda Clavijo (Venezuela)
• Réflexions sur l’idée de Dieu
Ricardo de Morais Nunes (Brésil) et Dante Lopes
(Argentine)
• La réincarnation: un paradigme existentiel
révolutionnaire
Mauro de Mesquita Spinola (Brésil)
• L’évolution des esprits, la matière et les mondes
Gustavo Molfino (Argentine) et Reinaldo di Lucia
(Brésil)
• Spiritisme, éthique et morale
Jacira Jacinto da Silva (Brésil) et Milton Rubens
Medran Moreira (Brésil)
• Allan Kardec: fondateur du spiritisme
Matheus Laureano (Brésil) et Wilson Garcia (Brésil)

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 7


Le spiritisme, selon les mots de l’important
écrivain et philosophe spirite brésilien José Herculano
Pires continue d’être le grand inconnu. Planent
encore sur lui les ombres de l’incompréhension, qui
empêchent que l’on voie son éclat initial comme une
proposition philosophique sans précédents révélant
les horizons de l’esprit selon les critères des progrès
de la pensée moderne, qui souligne l’importance de
la raison et des faits.
La Collection de la libre pensée: un spiritisme
pour le XXIe siècle veut, par conséquent, appor-
ter quelques lumières sur la proposition philoso-
phique spirite, avec pour objectif de clarifier sa
compréhension pour les spirites et les non spirites
et aussi dans le but de lui redonner son potentiel
révolutionnaire contribuant à une nouvelle vision de
l’être humain et du monde.
C’est une tâche audacieuse mais nécessaire.

Ademar Arthur Chioro de Reis


Mauro de Mesquita Spínola
Ricardo de Morais Nunes
Organisateurs

8 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


CEPA – ASSOCIATION SPIRITE
INTERNATIONALE

Dans cette Collection de la libre pensée: un


spiritisme pour le XXIe siècle, la CEPA se déploie
dans les divers volumes qui composent la série 1,
qui traite des thèmes fondamentaux du spiritisme,
comme aussi dans ceux qui suivront et traiteront des
thèmes d’actualité de même importance pour la vie
en société.
La CEPA – Association Spirite Internationale, est
née en 1946, en Argentine, fortement influencée par
la tradition de libre pensée, qui était apparue dans le
mouvement spirite espagnol, peu après l’avènement
de la philosophie spirite en France, au milieu du XIXe
siècle, sous la conduite d’Allan Kardec.
Des spirites argentins, dont la caractéristique
principale était la défense du caractère progressiste,
laïque et libre penseur du spiritisme, eurent un rôle

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 9


prépondérant sur le fond de la pensée qui a toujours
guidé les membres de la CEPA.
Depuis sa fondation, la CEPA, appelée initialement
Confédération Spirite Panaméricaine a travaillé à
la construction et la consolidation du caractère
philosophique et scientifique du spiritisme, comme
l’avait annoncé son fondateur lui-même, Allan Kardec.
En tant qu’interprète du spiritisme initial, elle le défi-
nit comme “science qui traite de la nature, de l’origine
et de la destinée des esprits, ainsi que de leurs
relations avec le monde corporel” et comme “philo-
sophie spiritualiste aux conséquences morales”.
Sa nature est aujourd’hui celle d’une Association
Spirite Internationale composée de personnes et
d’institutions spirites de différents continents. Elle se
caractérise par un regroupement de personnes et
d’institutions autour du même idéal libre penseur,
non compatible avec les organisations verticales et
autoritaires à l’intérieur du mouvement spirite.
Ses principaux objectifs sont:
a) Promouvoir et diffuser la connaissance du
spiritisme, à partir de la pensée d’Allan Kardec,
dans une vision laïque, de libre pensée, huma-
niste, progressiste et pluraliste;
b) Promouvoir et stimuler les efforts visant à
l’actualisation permanente du spiritisme;

10 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


c) Promouvoir l’intégration entre spirites et
institutions spirites de tous les continents qui
s’identifient selon les mêmes objectifs.
Des chercheurs de valeur et des penseurs,
réunis autour de la CEPA, ont étendu la portée de
la philosophie spirite, regroupant leurs efforts pour
rétablir son sens progressiste initial, malheureusement
minimisé, quand elle devint à tort, dans sa con-
ception, une doctrine religieuse.
Le spiritisme sans adjectifs est une philosophie
universaliste avec un potentiel libérateur, raison de
l’attachement de la CEPA à ses postulats d’origine,
respectant le contexte historique en vigueur au
moment de sa naissance.
L’association de personnes autour de l’étude du
spiritisme, dans sa plus pure expression, a permis
l’expansion de la philosophie spirite elle-même,
qui peut servir à tous indépendamment de leurs
croyances et visions du monde.
En l’honneur du travail et du dévouement des
auteurs, j’invite chaleureusement le lecteur à lire
ce travail et à en faire l’analyse critique, comme un
authentique libre penseur.
Jacira Jacinto da Silva,
Présidente de la CEPA

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 11


CPDOC – CENTRE D’INVESTIGATION
ET DE DOCUMENTATION SPIRITE

Le CPDoc est actuellement un des centre


d’investigation du spiritisme les plus ancien en fonction
au Brésil. Son objectif principal est le développement et
la diffusion des études et recherches sur la thématique
spirite, en utilisant la méthodologie adéquate pour
chaque thème avec le concours des divers domai-
nes de la connaissance. Il désire contribuer par consé-
quent à l’amélioration de la connaissance dans son
ensemble, et du spiritisme en particulier.
Le CPDoc est né à Santos (SP) en 1988, fruit d’un
rêve de jeunes gens soucieux d’améliorer les études
spirites. Aujourd’hui il compte des participants de
plusieurs états brésiliens et d’autres pays. Les travaux
sont publiés sur son site, dans des livres, dans la
presse et en divers évènements, en particulier au

12 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Symposium Brésilien de la Pensée spirite et aux
Congrès et Conférences de la CEPA, entité qu’il a
rejoint en 1995.
À ce jour, le CPDoc a dans sa collection les livres
suivants, publiés ou en voie de l’être:
• Magnetismo e vitalismo e o pensamento de
Kardec, par Ademar Arthur Chioro dos Reis
• Um Blues no meio do caminho, par Paulo
Cesar fernandes
• Centro espírita: uma revisão estrutural, par
Mauro de Mesquita Spinola
• Teleco, by Geraldo Pires de Oliveira
• Igualdade de direitos e diferença de funções
entre o homem e a mulher, par Marissol
Castello Branco
• Mecanismos da mediunidade: Processo de
comunicação mediúnica, par Ademar Arthur
Chioro dos Reis
• Criminalidade: educar ou punir, par Jacira
Jacinto da Silva
• Ensaio sobre o Humanismo Espírita, par
Eugênio Lara
• Os espíritos falam: Você ouve?, par Wilson
Garcia

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 13


• Doca e o menino – O laço e o silêncio, par
Wilson Garcia
• Perspectivas contemporâneas da reencarnação
(several authors), organisé par Ademar Arthur
Chioro dos Reis and Ricardo de Morais Nunes
• Os livros dos espíritos, par luís Jorge Lira Neto
• Collection de la libre pensée: un spiritisme
pour le XXIe siècle (plusieurs auteurs) organisé
par Ademar Arthur Chioro dos Reis, Ricardo de
Morais Nunes et Mauro de Mesquita Spinola
Le CPDoc a aussi un site de cours en ligne qui
présente le spiritisme dans une vision laïque de libre
pensée, en utilisant les techniques modernes de
formation à distance.
Toutes les personnes intéressées par la recherche
peuvent participer au CPDoc, ayant simplement
une connaissance des bases du spiritisme et étant
présentées par les membres du groupe.
Les informations, les articles publiés, les
évènements promus par le CPDoc et les cours en
ligne, sont disponibles sur le portail du groupe:
http://www.cpdocespirita.com.br.
Wilson Garcia
Président du CPDoc

14 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


PRÉFACE

Pour vous permettre d’apprécier pleinement le


livre que vous êtes sur le point de lire, je voudrais faire
quelques observations afin que vous, cher lecteur,
puissiez contextualiser ses auteurs et son contenu.
Il convient en premier lieu de préciser que j’ai
connu Salomão et Milton par le biais de leurs articles,
bien avant de les rencontrer personnellement.
C’était en 1984 et la CEPA avait organisé dans
la ville de Foz de Iguaçu une Conférence Régionale
pendant la Présidence de notre compatriote Hermas
Culzoni. Là se trouvait, en tant qu’orateur célèbre,
Divaldo Pereira Franco, à l’époque Premier Vice-
Président de la CEPA, et qui a fait partie des membres
de la CEPA pendant un certain temps.
Les présences du président de la FEB de
l’époque, Francisco Thiesen, et de son vice-président

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 15


Altivo Ferreira ont donné à l’événement un caractère
de rapprochement fraternel entre le spiritisme
religieux représenté par la FEB et le spiritisme laïc
de la CEPA, qui s’étaient éloignés depuis 1953,
lorsque la représentation du Brésil s’est retirée de la
Confédération, alarmée par sa claire vocation laïque.
Dans ce contexte, nous avons eu entre les mains
un magazine que je conserve encore comme une
relique: «Réincarnation» en était le titre principal.
Puis, sur la même couverture, on pouvait lire:
«SPIRITISME: SCIENCE ET PHILOSOPHIE... DANS
QUELLE MESURE S’AGIT-IL D’UNE RÉLIGION?»
Les membres de la jeunesse militante avec
laquelle j’étais engagé à l’époque étaient très
heureux de trouver cet exemplaire, que nous avons
acheté et dévoré avec avidité pour le contenu des
articles signés par un certain Maurice Herbert Jones,
un autre appelé Salomon Benchaya et un troisième
signant sous le nom de Milton Medran Moreira.
En tant que leaders de la Fédération Spirite du
Rio Grande do Sul (FERGS), ils ont osé remettre en
question l’incontestable pour le spiritisme religieux
et, après l’élection de la liste concurrente en 1987, ils
ont cherché leur propre voie, selon leurs convictions
sur la nature laïque du spiritisme. Nous avons appris

16 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


cela bien plus tard, lorsque Milton Medran Moreira
est venu à Buenos Aires en 1996 pour participer au
Congrès que nous avons organisé à l’Asociación
Espiritista Constancia à l’occasion de la célébration du
50ème anniversaire de la CEPA.
Il y avait Milton et soixante autres spirites
brésiliens provenant du spiritisme religieux et attirés
par une «Lettre au spiritisme Brésilien» que Jon
Aizpúrua avait signée en tant que président de la
CEPA quelques années auparavant.
Pourquoi est-il important de raconter cette
petite histoire? Pour que vous sachiez, cher lecteur,
que ceux qui écrivent ce livre n’improvisent pas
des concepts appris dans la vaste bibliographie
spirite, mais sont des personnes ayant une longue
expérience dans le domaine spirite et qui ont connu
et souffert personnellement de la différence entre
religion et laïcité.
De cette expérience de vie découle la force des
concepts présentés dans ce livre, qui se basent sur
une longue et fructueuse vie intellectuelle consacrée
à l’étude et à la recherche des religions comparées,
de la philosophie et de l’histoire, mais aussi de la
théorie et de la pratique spirite, tant institutionnelle
que personnelle.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 17


Milton, lui aussi, a étudié pendant son adolescence
dans un séminaire catholique pour devenir prêtre,
formation qu’il a abandonnée avant son terme.
Salomon, quant à lui, est issu d’une famille juive. En
somme, ils savent très bien ce qu’ils écrivent.
Ainsi, lorsque le lecteur plongera dans le texte, il
trouvera une véritable exégèse de la Doctrine Spirite,
une analyse détaillée, qui constitue le cœur de
l’interprétation analytique et rationnelle, méthodique,
comme le mérite une Science d’Observation et une
Doctrine Philosophique, telle que le Spiritisme a été
défini par son fondateur.
Le lecteur se sentira transporté dans le temps
jusqu’au XIXe siècle, où est né le spiritisme, car,
comme les auteurs le soulignent bien, il doit d’abord
être compris dans ce contexte, où l’influence de
la culture judéo-chrétienne de la culpabilité et du
châtiment était une pratique courante, et où élever la
voix pour exprimer son désaccord était parfois cause
de punition, allant même jusqu’à la mort.
La compréhension de cette réalité élève la
proposition spirite à des niveaux audacieux pour
ce cette époque. La lutte a été acharnée, mais on
comprend que c’était le moment précis de l’évolution
humaine où il a été possible d’entrevoir un espoir de

18 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


liberté de conscience pour l’humanité, et Denizard
Rivail était là pour l’offrir.
Les spirites ont passé une grande partie du XXe
siècle à débattre pour savoir si le spiritisme était
une trilogie définie comme «Science, Philosophie et
Religion», afin d’assurer la continuité des concepts
dogmatiques et autoritaires que les religions ont
signifié, ou s’il s’agissait de «Science, Philosophie et
Morale», afin de s’éloigner des dogmatismes religieux
et de commencer à encourager chaque individu à
prendre en main sa propre évolution.
À la fin du siècle dernier et au début du siècle
actuel, cette dichotomie a cessé d’avoir un sens. Nous
ne discutons plus des dénominations, ce n’est pas
nécessaire. Pendant que nous discutions, la Science
s’est rapprochée de la spiritualité, la Psychologie
est devenue transpersonnelle et les physiciens ont
accepté Dieu.
Le spiritisme est né révolutionnaire, il est innovant,
il libère la conscience, brise la dualité entre l’humain
et le divin et, comme le disent les auteurs de ce livre :
il rend le surnaturel naturel.
Nous allons vers un monde où la Science et la
Spiritualité se donneront la main, où les étiquettes et
les hiérarchies n’auront pas d’importance, l’essentiel

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 19


étant ce que chacun pourra faire pour l’évolution
personnelle et collective.
Dans cette Spiritualité sans Religion proposée
par le spiritisme, il y a la possibilité de surmonter les
grands maux qui affligent l’Humanité: le fanatisme, le
sectarisme, l’extrémisme et le fondamentalisme. C’est
la proposition que nous font Milton et Salomon dans
ce texte bref, condensé, intense et brillant.
Comme je l’ai dit au début, je les ai d’abord connus
en tant que rédacteurs d’une revue religieuse spirite.
Maintenant que je les connais personnellement, leurs
écrits prennent une dimension bien plus grande, car
je sais qu’ils sont cohérents avec leurs connaissances
et leurs vies. L’affection, l’honnêteté et la loyauté de
chacun envers leurs principes sont irréprochables.
Merci Milton et Salomon, d’avoir définitivement
fait entrer le spiritisme dans le XXIe siècle.

Dante López
Sociedad Espiritismo Verdadero (Argentine)
Ancien président de la CEPA

20 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


REMERCIEMENTS

Le Conseil Exécutif de la CEPA – Association Spirite


internationale pour le soutien inconditionnel au projet
Collection de la libre pensée: un spiritisme pour le XXIe
siècle;
Aux membres du Centre d’Investigation et de
Documentation Spirite (CPDoc) pour la lecture critique
et les suggestions qui nous ont permis de mener à bien
notre travail;
À Wilson Garcia pour la révision finale;
À Néventon Vargas pour la relecture orthographique.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 21


SOMMAIRE

CAPÍTULO 1. LE SPIRITISME LAÏC? POURQUOI? 25


CAPÍTULO 2. COMMENT EST NÉ LE COURANT
LAÏQUE ET LA LIBRE PENSÉE 40
CAPÍTULO 3. LES DIFFÉRENCES ENTRE LA RELIGION
SPIRITE ET LE SPIRITISME LAÏC 56
CAPÍTULO 4. PROGRESSION DE LA DOCTRINE ET
ACTUALISATION PERMANENTE DU SPIRITISME 77
CAPÍTULO 5. PERSPECTIVES POUR LE SPIRITISME
LAÏC ET LIBRE-PENSEUR 90
SUGGESTIONS DE LECTURES INTERESSANTS 100
SUGGESTIONS DE SITES INTERESSANTS 101
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 102
A PROPOS DES AUTEURS 106

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 23


1 LE SPIRITISME LAÏC? POURQUOI?
Milton Rubens Medran Moreira

A première vue, cet adjectif pourrait même


sembler inutile: spiritisme laïc. Après tout, le
spiritisme n’est-il pas qu’une chose? Dans l’importante
bibliographie qu’il nous a laissée, Allan Kardec, son
fondateur, ne nous aurait-il pas légué, avec une clarté
méridienne, sa position sur la nature du spiritisme, en
le conceptualisant comme il se doit?

Allan Kardec: sous ce pseudonyme,


le professeur français Hippolyte Léon
Denizard Rivail (1804/1869) pose les
bases du spiritisme, avec le lancement,
à Paris, du «Livre des Esprits» (1857).

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 25


Voyons:
Dans un livre publié en 1859, à Paris, sous le titre
«Qu’est-ce que le spiritisme?», Kardec prit soin d’en
formuler une définition, et il ne le fit pas sans exposer
au préalable cette brève considération:
«Le spiritisme est à la fois une science d’observation
et une doctrine philosophique. En tant que science
pratique, elle consiste dans les relations qui peuvent
s’établir avec les Esprits; en tant que philosophie,
elle comprend toutes les conséquences morales qui
résultent de ces relations»1 (p.44).
Les deux domaines dans lesquels le fondateur du
spiritisme souhaitait le placer étaient ainsi délimités:
celui de la science et celui de la philosophie. Dans
la science, suggérant une approche méthodique et
sérieuse d’un phénomène qui a toujours été présent
dans la culture humaine, mais qui a été, de tout temps,
relégué dans le domaine du mystère, du surnaturel,
donnant lieu à des mythes, des croyances et des
superstitions: la soi-disant communication avec les
morts. Dans celle de la philosophie, parce que cette
dernière est responsable de l’étude théorique de
l’éthique. Et, sans aucun doute, l’existence des esprits et
leur relation avec le monde matériel, une fois avérées,
ouvrent une perspective beaucoup plus large sur
l’homme et le monde, avec des répercussions sur le

26 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


comportement humain, sur la vision que le sujet a de la
vie, de vous-même et l’autre. En effet, des principes tels
que l’immortalité de l’esprit, sa communicabilité et son
évolution, bases théoriques de la proposition spirite,
examinés non pas comme de simples croyances, mais
comme des réalités inhérentes à la vie, produisent
inévitablement des conséquences éthiques et morales.
Ayant situé le champ où il entendait insérer le
spiritisme, Kardec pouvait alors, synthétiquement,
le conceptualiser, ce qu’il fit, dans «Qu’est-ce que le
spiritisme?», en complément du passage retranscrit
ci-dessus:
«Le spiritisme est une science qui traite de la nature,
de l’origine et de la destinée des esprits et de leurs
relations avec le monde matériel»1 (p.4 4).
Tout au long de son œuvre, Kardec
a toujours insisté pour maintenir
le spiritisme précisément dans le
champ de la science, c’est-à-dire de la
connaissance. Le mot science, du latin
sciencia, a justement cette étymologie:
connaissance (le verbe scire se traduit
par savoir). Dans le même opuscule où il
a proposé cette définition du spiritisme, “Qu’est-ce que
Allan Kardec, de manière didactique, leParis,
spiritisme?”
1859.
reproduit un dialogue hypothétique

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 27


et long avec un prêtre. Celui-ci insiste sur le fait que
le contenu de la proposition spirite était, au fond, le
même que celui des religions : existence de Dieu, survie
de l’esprit après la mort et son destin après celle-ci.
Le fondateur du spiritisme est d’accord avec lui, mais
il soutient que chacune de ces questions devait être
déduite de l’expérimentation scientifique et provoquer
des réflexions basées sur la raison, puisqu’elles sont
toutes «dans la Nature». En les abordant de cette
manière, les chercheurs les déplaceraient du terrain du
surnaturel et des croyances vers celui de la connaissance
rationnelle. Le spiritisme, soulignait-il, repose «sur des
principes indépendants des questions dogmatiques».
C’est pourquoi «son véritable caractère est celui d’une
science et non d’une religion»1 (p. 103).
Kardec, d’ailleurs, va plus loin et ira même
jusqu’à dire, dans un discours prononcé à la
Société parisienne des études spirites2 (première
société spirite de l’histoire légalement constituée et
présidée par lui-même) le 1er novembre 1868, que
le spiritisme n’a «rien de commun avec les caractères
d’une religion» et qui, s’il était venu «se parer» de ce
titre, «se serait forcément trompé».
En approfondissant un peu cette réflexion , il sera
aisé de conclure que le spiritisme, tel que conçu par
son fondateur, relève du domaine du laïcisme.

28 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


LE SAVIEZ VOUS?
Allan Kardec, le fondateur du spiritisme, dans la
Revue Spirite de décembre 1868, a défendu que
«Le spiritisme n’ayant aucun des caractères d’une
religion, au sens usuel du mot, il ne pouvait
ni ne devait se parer d’un titre dont la valeur,
inévitablement, aurait été méconnue. C’est pourquoi
on l’appelle simplement: doctrine philosophique et
morale»2 (p. 357).

Mais qu’est-ce que le laïcisme exactement?


Herivelto Carvalho (2019), faisant référence au
terme «laïc», nous informe que
«Cet adjectif vient du terme grec laikós qui signifie
‘du peuple’ ou, à d’autres occasions, “banal”. Dans
les écrits chrétiens, dès le IIIe siècle, il fut largement
utilisé dans le but de qualifier les fidèles qui n’étaient
pas dotés du savoir sacré des clercs. Dans d’autres
contextes, le terme laikós était utilisé en opposition
à hagios (sacré), désignant tout ce qui avait un
caractère profane. Dans l’Europe du XIXe siècle,
l’adjectif laïque a pris une signification équivalente
à la manière dont il est compris actuellement: la
qualification d’une activité humaine qui n’a aucune
implication directe avec les questions religieuses ou
les questions dogmatiques de quelque foi que ce
soit.»3

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 29


Pour ce penseur spirite, pendant plus d’un siècle
après le début du spiritisme, l’association de l’adjectif
laïque à la Doctrine spirite s’est rarement produite:
«Les premières mentions de cette association
remontent aux années 1860, lorsque le spirite
français Charles Fauvety crée l’épithète «religion
laïque» en référence à la capacité du Spiritisme à
favoriser l’expérience d’une spiritualité laïque.»3
Il affirme en outre que:
«Certaines publications doctrinales de cette période
ont également fait état cette qualification, comme,
par exemple, lorsque le Français Jules-Jacques-
Toussaint Lessard, rédacteur en chef du journal
L’Anti-matérialiste, de Nantes, rapporte dans l’édition
de novembre 1883 du Spiritist Magazine qui avait
tenu une conférence sur «la supériorité de la morale
laïque du spiritisme sur la morale du catholicisme»,
ou même dans un message d’auteur spirituel,
psychographié par un médium identifié seulement
comme «N. M., publié dans l’édition d’août 1888 de
la Revista de Estudios Psicológicos, à Madrid, où il
est lu que: “L’enseignement collectif du spiritisme est
laïque, car il enseigne, comme Jésus, que celui qui
veut être le premier, sera le dernier et le serviteur de
tous, fait unique qui donne la supériorité morale.»3
D’après Carvalho, c’est après la publication
du livre «Spiritisme laïc» de David Grossvater, en

30 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Juif polonais, il a vécu quelques années au Brésil (à
Porto Alegre, Rio Grande do Sul) où il a découvert
le spiritisme. Par la suite, il s’est installé au Venezuela
où il a fondé, à Maracay, la revue El
Espiritista et le Centre de Recherches
Métapsychiques et Affines (C.I.M.A).
À partir de 1980, ce centre a pris le
nom de Mouvement de Culture
Spirite CIMA. En 1966, il a publié
l’ouvrage «Spiritisme laïc» qui a
fini par populariser l’expression
«spiritisme laïc». Ce penseur et
David Grossvater leader spirite est parmi les plus
(1911-1974) respectés au sein de la CEPA.

1966, que l’expression «spiritistes laïcs» est devenue


populaire. Toutefois, le lien entre le spiritisme et le
laïcisme remonte à ses origines.
Comme le souligne bien Jon Aizpúrua dans l’article «La
CEPA et le laïcisme», publié dans le livre «Spiritisme:
La Pensée Actuelle de la CEPA», le premier Congrès
International de Spiritisme, en 1888, a
recommandé «la diffusion du laïcisme
dans tous les domaines de la vie».5
Le livre “Espiritismo: O Pensamento Atual
da CEPA” est disponible à l’adresse suivante:
https://vdocuments.com.br/cepa-espiritismo-
o-pensamento-atual-da-cepa.html

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 31


Comme l’explique très bien Salomon Jacob
Benchaya dans son livre “De la Religion Spirite au
Laïcisme - La Trajectoire du Centre Culturel Spirite
de Porto Alegre”, “le laïcisme est une doctrine
philosophique qui prône l’autonomie des activités
humaines par rapport à la religion”6 (p. 133). Ce
principe, qui a atteint son apogée dans la seconde
moitié du XIXe siècle, à l’époque de l’émergence
du spiritisme, visait à mettre un terme définitif à
l’ingérence de l’Église dans les affaires de l’État. Il ne
visait absolument pas une prédication antireligieuse,
mais simplement areligieuse. Benchaya rappelle
judicieusement la définition donnée par le Dictionnaire
Aurélio de l’adjectif laïc, c’est-à-dire: «ce qui vit
dans, ou est propre au monde, au siècle, séculier
(par opposition à ecclésiastique)». Le substantif
correspondant, «laïcisme», y est défini comme la
«doctrine qui proclame la laïcité des institutions
sociopolitiques et de la culture, ou qui, du moins,
réclame pour celles-ci l’autonomie vis-à-vis de la
religion».7
C’est précisément cette autonomie par rapport
aux questions autrefois figées dans les dogmes
religieux, dans le mystère, dans le surnaturel, que
le spiritisme revendique depuis ses origines. Les
thèmes fondamentaux de la nature humaine et de

32 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


la réflexion philosophique autour de celle-ci, tels que
l’existence de l’âme ou de l’esprit, son immortalité, sa
communicabilité et son processus évolutif, devraient
être traités de manière rationnelle, selon Kardec,
même si les religions continuaient à les considérer
comme des articles de foi et même si beaucoup de
personnes préféraient les maintenir dans le domaine
des croyances avec tous les enveloppements créés
par les religions, tels que les cultes, les hiérarchies
sacerdotales et institutionnelles, les actes liturgiques,
etc. Pour celles-ci, le spiritisme serait un auxiliaire,
apportant de la rationalité à leurs croyances.
Sans prétention à devenir une nouvelle religion, le
spiritisme se proposait d’agir en tant qu’ «alliance entre
la science et la religion», comme le proposait Allan
Kardec dans le livre «L’Évangile selon le Spiritisme»8,
se plaçant comme un lien entre ces deux courants. La
foi religieuse, grâce à la science expérimentale et à la
rationalité appliquées aux questions fondamentales
du spiritualisme, se transformerait en foi raisonnée.
Il est donc clair que le spiritisme est né comme
une proposition laïque, sans aucune connotation
religieuse. Autrement dit, comme l’a souligné
son fondateur, bien qu’elle aborde des questions
historiquement traitées par les religions, la nouvelle
science les aborderait sous un autre angle, les

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 33


soumettant, en tant que faits présents dans la nature,
à parcourir les chemins menant à la connaissance.
Les conséquences morales résultant de ces principes
ne découleraient pas d’impositions de la foi ou de
normes d’ordre religieux ou surnaturel, mais de la
conviction personnelle, libre et autonome, du sujet
capable d’assimiler ces connaissances et qui, ainsi,
conclurait en adoptant des orientations éthiques
compatibles avec celles-ci.
«La foi inébranlable n’est celle qui peut faire face
à la raison, à toutes les époques de l’humanité.»8
(p. 243).
Allan Kardec - L’Évangile Selon le Spiritisme

Les véritables spirites, donc, ne devraient pas se


classer dans la catégorie des «croyants», mais plutôt
dans celle des «libres penseurs». Et, tout comme il
avait été catégorique pour situer le spiritisme comme
une proposition aujourd’hui comprise comme laïque,
Kardec l’a été tout autant pour le désigner comme
une philosophie libre-penseuse.
Dans un article publié dans la Revue Spirite de
janvier 1867, Allan Kardec, en parfaite harmonie avec
les tendances de la nouvelle époque qui affirmait
l’autonomie de la pensée, saluait l’avènement d’une
«nouvelle dénomination par laquelle on désigne
ceux qui ne se soumettent pas à l’opinion de

34 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


personne en matière de religion et de spiritualité,
qui ne se considèrent pas liés par le culte
dans lequel la naissance les a placés sans leur
consentement, ni par l’observation de pratiques
religieuses quelconques»9 (p. 6).
Cette nouvelle catégorie d’hommes et de
femmes, selon lui, étaient les «libres penseurs Et c’est
là qu’il place les vrais spirites, en expliquant: «Tout
homme qui ne se guide pas par la foi aveugle est, de
ce fait même, un libre penseur», pour ajouter: «À ce
titre, les Spirites sont aussi des libres penseurs» (p. 6).
Avec ces brèves, mais très claires conceptualisations
du fondateur du spiritisme, il semble ne pas y avoir
de place pour le doute que Kardec concevait la
doctrine qu’il a systématisée, à partir du large échange
maintenu avec les esprits, comme une proposition:
a) laïque, c’est-à-dire non religieuse; et
b) libre-penseuse, c’est-à-dire issue de l’expérience
et de la raison, et non imposée par qui que ce
soit.
Une chose, cependant, serait la proposition
théorique d’Allan Kardec, un pédagogue respecté et
libre-penseur, inséré dans les idées des Lumières et
révolutionnaires de la pensée, venant du XVIIIe siècle
et mûries au XIXe siècle; une autre serait la manière
dont ces idées seraient assimilées par l’Occident

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 35


chrétien. Du fait que ces questions, au cours de toute
la soi-disant «civilisation chrétienne», relevaient du
domaine exclusif de la religion, il deviendrait difficile
pour l’homme ordinaire de les en retirer pour les
situer dans le champ du sécularisme et du laïcisme.
En effet, en raison de la prédication religieuse du
clergé, préoccupé par l’avancée du rationalisme,
de la libre pensée et du laïcisme, ces mouvements
d’idées étaient, à ce moment précis, délibérément
confondus avec l’athéisme et l’antireligion. Il n’était
certainement pas dans l’intérêt de la religion -
comme cela ne l’est toujours pas - de perdre le
contrôle exclusif qu’elle avait jusqu’alors exercée sur
le terrain du spiritualisme.
En résumé: les idées d’une explication rationnelle
pour l’existence de Dieu, de l’esprit, ainsi que, et
surtout, pour la possibilité de la communication
de l’esprit avec le monde matériel et son évolution,
par le processus de la réincarnation, ont été bien
accueillies dans de larges secteurs de l’Europe et,
par conséquent, des Amériques. Mais il ne sera pas
facile de les dissocier de la religion. Il s’agit d’un
phénomène culturel trop profondément ancré dans
l’esprit de la plupart des gens.
Ainsi, certains ont pensé qu’il fallait former la
«religion spirituelle», ce qui était très éloigné de la

36 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


pensée de son fondateur. Quoi qu’il en soit, c’était le
moyen de faire décoller le spiritisme, de progresser
parmi les crédules, de gagner de l’espace et de la
respectabilité dans le domaine du sacré, où, en
opposition au profane, se situent toutes les religions.
Un nouveau chemin était ainsi tracé pour le
mouvement spirite. Sans aucun doute, ce nouvel
aspect, le religieux, ajouté aux deux autres conçus par
Allan Kardec - le scientifique et le philosophique/moral
-, aurait des conséquences sur son développement
et son identité dans les pays où il commençait à être
connu. Le Brésil, avec ses fortes racines catholiques
héritées des colons portugais, a exercé une influence
particulière sur la formation de la «religion spirite».
Ce symbole sera également adopté par certains
segments spirites dans les pays hispanophones, bien
que l’Espagne, dans les décennies suivant le décès
de Kardec, ait été un bastion solide de résistance
aux tendances mystiques et religieuses émergentes
au sein du mouvement. En accord avec la pensée
de la CEPA - Confédération Spirite Pan-Américaine,
fondée en Argentine en 1946 (aujourd’hui CEPA –
Association Spirite Internationale) et allant à l’encontre
de larges secteurs du spiritisme lui-même, nous
estimons que ce virage visant à sa vulgarisation a
divergé de la proposition de Kardec et, d’une certaine

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 37


manière, a nui à l’assimilation progressive, en termes
de contemporanéité du projet qu’il avait rêvé. Kardec
était en avance sur son temps et était conscient du
déclin croissant des religions, dans les segments
les plus cultivés de la société, de la laïcisation de la
culture occidentale et de la recherche d’une nouvelle
spiritualité non soumise aux hiérarchies religieuses.
En analysant ce phénomène, le philosophe spirite
brésilien, José Herculano Pires, malgré l’identification
d’un aspect religieux dans le
spiritisme, a reconnu:
«Ce qui a empêché l’expansion
du spiritisme en Europe au siècle
dernier (XIXe siècle), de manière
à pouvoir renouveler l’ancienne
conception du monde encore
dominante, a été simplement
son aspect religieux. Comme le José Herculano
christianisme primitif, le spiritisme Pires
a été accueilli avec empressement (1914/1979)
par les couches pauvres de la Philosophe et
population, qui l’ont converti écrivain spirite de
partout en une nouvelle secte São Paulo.
chrétienne.» (p. 79)
10

Cette brève analyse nous permet de commencer à


formuler des réponses ou, du moins, des hypothèses
explicatives à la question initialement posée:

38 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Mais alors, pourquoi un «spiritisme laïc»? Existe-
t-il donc plusieurs formes de spiritisme? Ou bien le
spiritisme est-il effectivement et uniquement celui
dont les orientations et l’identité ont été définies dans
l’œuvre de son fondateur? Est-il juste de le considérer
comme une religion?
Même si les pages suivantes de ce petit livre,
exposant et contextualisant des aspects historiques
et culturels de ce parcours, ne sont pas capables
de formuler des réponses définitives à cette
question présente dès les débuts de la formation
du mouvement spirite, nous avons au moins la
prétention de justifier nos positions, non pas au
mépris de la soi-disant «religion spirite», mais en
signe de respect pour Allan Kardec et par fidélité au
grand projet qu’il a lancé au milieu du XIXe siècle.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 39


2 COMMENT LE COURANT HE
A-T-ELLE EMERGÉE?
Salomão Jacob Benchaya

Bien que le spiritisme soit né en tant que doctrine


spiritualiste non religieuse - Kardec a toujours affirmé
qu’il ne s’agissait pas d’une religion - il n’a pas fallu
longtemps pour qu’il soit confondu avec une secte.
La première accusation selon laquelle le spiritisme
était apparu comme une nouvelle religion est venue
de l’Église elle-même, en la personne de l’abbé
François Chesnel, avec qui Kardec a polémiqué à
travers le périodique «L’Univers».11
La publication des ouvrages qui ont suivi «Le
Livre des Esprits12» et «Le Livre des Médiums13» -
notamment «L’Evangile selon le Spiritisme8», «Le Ciel

40 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


et l’Enfer14» et «La Genèse», qui mettent tous l’accent
sur une relation étroite entre la révélation spirite et le
christianisme - a contribué, d’une certaine manière, à
la formation d’un mouvement à caractère religieux,
notamment au Brésil, où la nouvelle doctrine a
trouvé un terrain fertile pour sa diffusion.
Il convient toutefois de souligner que, dans
certains pays, en particulier les pays hispanophones,
une conception spirite laïque et libre-penseuse s’est
développée, comme l’explique le chercheur Herivelto
Carvalho dans son travail «De l’Espagne aux Amériques:
la trajectoire de la tradition spirite libre-penseuse», dont
je voudrais souligner les passages suivants:
«Nous pouvons affirmer que l’émergence de la
tradition spirite libre-penseuse a eu lieu à la fin
du XIXe siècle, lorsque les œuvres d’Allan Kardec
se sont popularisées en Espagne. Ses premiers
représentants furent Alverico Perón, Fernandez
Colavida, Torres-Solanot et Amalia Domingo Soler.
Cette tradition acquiert ses propres caractéristiques
non pas parce qu’elle rompt avec la pensée
kardéciste, mais plutôt en raison de la méthode
de développement adoptée et de la manière d’agir
dans son contexte social, qui se distinguait de la
manière dont les spirites français pratiquaient
et diffusaient le spiritisme. (...) Ce mouvement
a développé une grande unité et une action

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 41


dans la société espagnole, dont la proposition
philosophique se présentait comme le dépassement
des religions positives. Cette forme moderne de
spiritualisme rejetait les éléments de dogmatisme
existant dans les religions du passé et cherchait à
développer une nouvelle spiritualité rationnelle,
capable de se relier à la philosophie et à la science.
Par les particularités qu’il a développées, il a formé
une école de pensée dont l’attribut principal est
l’interprétation du Spiritisme comme un système
d’idées ouvert, progressif, non dogmatique et lié
à la libre pensée, constituant ainsi, dans un sens
philosophique, une tradition. (...) Bien que les
idées de laïcité, de libre-pensée et de mise à jour
constante soient pratiquées par les spirites latino-
américains et espagnols depuis les dernières
décennies du XIXe siècle, au fil des ans, au sein du
mouvement spirite panaméricain, la connaissance
de ce fait est devenue perdue, au point que de
nombreux membres de ce mouvement croient que
ces idéaux se sont consolidés après la fondation de
la Confédération Spirite Panaméricaine en 1946.
En réalité, la CEPA devait récupérer cette manière
d’aborder le spiritisme, comme nous le verrons ci-
dessous. En Amérique latine, le segment laïc est
particulièrement important en Argentine et au
Venezuela, ainsi qu’au Brésil.

42 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


LE SAVIEZ VOUS?
La CEPA - Association Spirite Internationale
(anciennement appelée Confédération Spirite
Panaméricaine) est une organisation fondée le
05/10/1946 en Argentine, qui défend et diffuse
le spiritisme sous une perspective laïque, libre-
pensante, progressiste, humaniste et pluraliste.

Selon Jon Aizpúrua17, l’expression « Spiritisme laïc


» englobe
«diverses nuances parmi ses adeptes, promoteurs
ou représentants, selon les époques et les pays.
Cependant, il y a quelques lignes directrices qui
peuvent être considérées. Par exemple, au Venezuela,
on peut mentionner deux moments fondamentaux:
en 1958, la fondation du CIMA sous le nom de Centre
de Recherches Métapsychiques et Affines, reconstitué
en tant que Mouvement de Culture Spirite CIMA à
partir de 1974. Le fondateur de cette institution était
David Grossvater, auteur de livres tels que «Pour les
privilèges de l’esprit» (1954), «Raisonnements spirites»
(1961), «Recherches sur la psychologie de l’esprit»
(1955), «Psychologie de l’esprit» (1961), «Gnoséologie
spirite» (1961) et « Spiritisme laïc».
Ce dernier livre a été publié en 1966 et c’est
certainement à partir de celui-ci que l’expression «
spiritisme laïc » est devenue populaire.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 43


Psychologue et professeur
d’université, écrivain et conférencier
international, successeur de David
Grossvater, président du Mouvement
de Culture Spirite CIMA du
Venezuela, ancien président de la
CEPA et actuel conseiller en relations
Jon Aizpúrua internationales de l’organisation.

«L’autre moment fondamental», affirme Aizpúrua:


«était la fondation en 1960 à Maracaibo de la
Fédération Spirite Vénézuélienne (FEV), qui s’est
constituée sur des bases nettement kardécistes et
laïques, regroupant environ 20 sociétés spirites du
Venezuela, bien que tous ces centres n’étaient pas
nécessairement identifiés idéologiquement avec
une vision libre-pensante. L’inspirateur et principal
dirigeant de la FEV était l’avocat et professeur
universitaire Pedro Barboza de la Torre, auteur de
plusieurs œuvres spirites, telles que «Répertoire
expérimental pour la médiumnité» et «De l’ombre
du dogme à la lumière de la raison». La FEV s’est
dissoute en 2002 après le décès de Barboza.»17
Selon Aizpúrua:
«En Argentine, il existe une longue tradition
de laïcité dans l’environnement spirite, malgré
certaines nuances. Des leaders historiques tels

44 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


que Cosme Mariño et Felipe Senillosa, ainsi que
d’autres personnalités de l’Asociación Espiritista
Constancia, pourraient être affiliés à cette ligne.
Mais c’est avec Manuel Porteiro que sera établie
une position idéologique claire dans ce pays, à
partir de son action au sein de la Confederación
Espiritista Argentina (CEA), comme le reflètent les
éditoriaux et les articles de la revue La Idea. La CEA
a été l’entité promotrice de la création de la CEPA
en 1946. Plus tard, dans les années 80, la CEA a
complètement changé d’orientation, s’est dissociée
de la CEPA et s’est intégrée au CEI-Conseil Spirite
International de la FEB.»
«Après le départ de la CEA, des spirites plus
progressistes, appartenant principalement à la
Sociedad Espiritismo Verdadero de la ville de
Rafaela, ont fondé le Conseil de Relations Spirites
d’Argentine (CREA) et ont regroupé plusieurs
sociétés spirites argentines qui sont restées alignées
sur la CEPA.»
«À Cuba, il y avait une longue tradition de
spiritisme laïc et libre-pensant, où s’est distingué
le grand penseur et promoteur Salvador Molina.
La Confédération Spirite de Cuba (CEC), pendant
plusieurs décennies du XXe siècle, a eu une activité
intense et adoptait ouvertement dans ses résolutions
une position laïque, humaniste et progressiste. La CEC
a participé activement à la CEPA et en 1953, a organisé
à La Havane le IIIe Congrès Spirite Panaméricain.»

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 45


Selon Aizpúrua:
«Malheureusement, le régime marxiste qui s’est
installé à Cuba depuis 1959 a persécuté toutes
les institutions qui ne partageaient pas l’idéologie
matérialiste et athée, dont les sièges ont été fermés et
les activités poursuivies. La CEC s’est dissoute en 1962
lorsque de nombreux dirigeants avaient déjà quitté
leur corps physique ou étaient partis en exil forcé.»17
Selon l’ancien président de la CEPA:
«À Porto Rico, il y a également eu une longue
histoire de spiritisme laïc. L’ancienne Confederación
de los Espiritistas de Puerto Rico, qui a regroupé
des centaines de sociétés spirites, était très radicale
dans ses positions contraires aux tendances
chrétiennes ou mystiques, comme en témoigne sa
prestigieuse revue mensuelle «Cosmos». À Porto
Rico et à New York, l’un des penseurs spirites les
plus importants d’Hispano-Amérique a agi: William
Colón. Auteur de plusieurs ouvrages et conférencier,
sa vision spirite laïque assumait parfois des formes
très radicales d’antireligiosité et d’anticléricalisme,
raison pour laquelle il a été très critiqué.»
Il convient de mentionner que le modèle kardécien
n’a pas connu d’expansion dans les pays anglo-saxons
où prédomine le new spiritualism, fortement axé sur
les phénomènes et l’organisation religieuse avec une
présence de professionnalisme religieux.

46 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Au Brésil, de nombreux premiers dirigeants
spirites provenaient des rangs du catholicisme, mais
les admirateurs de l’œuvre dissidente «Les Quatre
Évangiles» de Jean-Baptiste Roustaing ont fini par
façonner un «spiritisme brésilien». À Bahia, où est né
le premier centre spirite et le premier journal spirite
au Brésil – «L’Écho de l’Au-delà» - son fondateur, Luiz
Olímpio Teles de Menezes, fervent catholique et ami
de Roustaing, converti au spiritisme, a écrit, dans une
polémique avec le Père Juliano José de Miranda de
l’archevêché de Salvador, que
«le Spiritisme et le Catholicisme sont la même Église
de notre SEIGNEUR JÉSUS CHRIST: seulement les
temps et les mots ont changé; Le Spiritisme est
le fidèle traducteur, par les envoyés de Dieu, des
doctrines de l’Évangile»19 (p. 89).
Tout au long de l’œuvre psychographique de
Francisco Cândido Xavier, la prédication évangélique
des esprits communicants est évidente, en harmonie
avec la position extrêmement religieuse du médium.
Son guide spirituel Emmanuel, prêtre dans une
incarnation précédente, est par ailleurs l’auteur du
livre «La religion des esprits»20.
La première tentative de récupération du caractère
non religieux du spiritisme au Brésil est venue d’Afonso
Angeli Torteroli, avocat, journaliste et professeur, fondateur

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 47


du Centre de l’Union Spirite du Brésil le 06/09/1881, la
première institution unificatrice du mouvement spirite
national, de courte durée, au milieu d’une discussion
idéologique existant entre les «mystiques» et les
«scientifiques». Torteroli a participé à la fondation de la
Fédération Spirite Brésilienne (FEB) le 01/01/1884. En août
1897, sous sa direction, les «scientifiques» du Centre
de l’Union Spirite de Propagande au Brésil ont lancé la
triade SCIENCE-PHILOSOPHIE-MORALE dans la «Revue
Spirite du Brasil»21
Avec l’arrivée de Bezerra de Menezes, membre
du groupe des «mystiques», à la présidence de la
FEB lors de deux mandats - en 1889 et 1895 -, l’idée
que le spiritisme était une religion a peu à peu été
acceptée par le mouvement spirite.
Selon Quintella (2020), en 1929, Carlos Imbassahy
déclare: «Il faut considérer le spiritisme sous ses
trois aspects: celui de la science, de la philosophie
et de la religion»21, forgeant ainsi la trilogie Science-
Philosophie-Religion qui serait par la suite réaffirmée
dans l’œuvre O Consolador (1940), par l’esprit
Emmanuel, publiée par la FEB. Dans le chapitre
introductif du livre, Emmanuel affirme:
«Nous pouvons prendre le Spiritisme, symbolisé
de cette manière, comme un triangle de forces
spirituelles. La science et la philosophie lient cette

48 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


figure symbolique à la Terre, mais la religion est
l’angle divin qui la relie au Ciel » (p.19).
Carlos Imbassahy renforce l’aspect religieux du
spiritisme dans son livre «Religion» (1942), également
publié par la FEB.23

LE SAVIEZ VOUS?
Il est à noter que l’ouvrage «Religion» de Carlos
Imbassahy est apparu comme une contestation
des arguments utilisés par le Directeur de
l’Enseignement de São Paulo, le Dr. Almeida Jr., dans
son avis pour refuser l’autorisation d’enseigner le
spiritisme aux enfants du groupe scolaire d’Itobi.
Dans son avis, le directeur affirmait que le spiritisme
n’était pas une religion. Imbassahy, en défense du
spiritisme, faisait valoir que cette mesure aurait
pour conséquence de restreindre la liberté religieuse
garantie par la Constitution aux autres cultes.

De 1961 à 1973, la laïcité de l’ésotérisme est


de nouveau débattue par les spirites du MUE-
Mouvement Universitaire Spirite de São Paulo. À la
fin des années 1960, le MUE, déjà diffusé dans tout le
pays, commence à afficher un caractère plus social et
politique, sous l’influence de la pensée philosophique
des penseurs argentins Humberto Mariotti (1905 - 1982)
et sa «Parapsychologie et Matérialisme Historique»24,

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 49


et Manuel S. Porteiro (1881 - 1936) avec son livre
«Spiritisme Dialectique»25, ainsi que d’autres influences
marxistes, comme David Grossvater et son «Spiritisme
laïc»4, Eusínio Lavigne e Souza do Prado avec l’œuvre
«Les spirites et les questions sociales», et Jacob Holzmann
Netto (1934 – 1994) avec «Spiritisme et Marxisme». Ces
œuvres ont servi d’inspiration pour le discours critique,
laïc et politisé des étudiants spirites de l’époque.28
Cependant, au Brésil, c’est en 1978 que la défense
du caractère laïc du Spiritisme réapparait avec plus
de vigueur et de qualification grâce au soi-disant
«groupe de Santos», principalement à travers du journal
«Spiritisme et Unification», organe officiel de l’UMES -
Union Municipale Spirite de Santos et de LICESPE-Éditeur.
Ce groupe, dirigé par le journaliste et psychologue Jaci
Régis, comprenait également José Rodrigues, Egydio
Régis, Henrique Diegues et d’autres. Plusieurs d’entre eux
étaient membres de l’UMES, étaient très actifs au sein
de l’USE-SP - Union des Sociétés Spirites de São Paulo
et ont lancé la campagne appelée «spiritualisation»
du mouvement, en luttant contre l’ecclésialisation du
spiritisme et en promouvant la culture spirite.
En 1986, certains membres de ce groupe se
présentent à la présidence de l’USE - Union des
Sociétés Spirites de l’État de São Paulo avec la liste
Unification, mais sont battus par la liste conservatrice.

50 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Journaliste, économiste et psychologue
originaire de l’État de Santa Catarina, au
Brésil, il a dirigé le Centre Spirite Allan
Kardec, la Communauté d’Entraide Spirite
Maison Veneranda, l’Union Municipale
Spirite de Santos, fondé la maison d’édition
Divulgation Culturelle Spirite (Dicesp) et le
journal Spiritisme et Unification. Après
s’être séparé du mouvement religieux,
il a fondé le journal «Ouverture», la
Jaci Régis Librairie Culturelle Spirite (Licespe) et
(1932-2010) l’Institut Culturel Kardéciste de Santos.

La même année, la Fédération Spirite du Rio


Grande do Sul (FERGS), dirigée depuis 1978 par
le groupe issu de la S.E. Lumière et Charité (SELC),
aujourd’hui Centre Culturel Spirite de Porto Alegre
(CCEPA), composé de Maurice Herbert Jones,
Salomon Jacob Benchaya et Milton Rubens Medran
Moreira, entre autres, lance en 1986 le «Projet:
Kardequiser», révélant une certaine harmonie avec
la campagne pour la «spiritualisation» initiée par Jaci
Régis et son groupe.6
En octobre 1986, avec la sortie de l’édition n° 402
de la revue «La Réincarnation», publiée par la FERGS,
dont la couverture portait la mention «Spiritisme:
Science et Philosophie. Dans quelle mesure s’agit-il

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 51


d’une religion?», une forte réaction
conservatrice se produit et, lors de
l’élection suivante, une nouvelle
direction prend les rênes de la
Fédération et réaffirme le caractère
religieux de la Doctrine Spirite.
Il convient de souligner, dans le
cadre de la consolidation du courant laïc et libre-
penseur spirite au Brésil, la promotion du Symposium
Brésilien de la Pensée Spirite (SBPE), conçu par Jaci
Régis et organisée tous les deux ans de 1989 à 2017
par l’Institut Culturel Kardéciste de Santos (ICKS).
Cet événement a contribué au retour de la
Confédération Spirite Pan-américaine (CEPA) au
Brésil, dont elle était absente depuis 1949, après la
tenue de son IIe Congrès Pan-américain à Rio de
Janeiro, avec le soutien de la Ligue Spirite du Brésil. À
cette occasion, la Fédération Spirite Brésilienne (FEB),
rassemblant quelques dirigeants des fédérations
d’État présents à l’événement panaméricain, instaure
le «Pacte d’Or», formulé dans une charte qui guide le
mouvement spirite fédéré au Brésil.
La CEPA s’est toujours tenue à l’écart de la
religiosité qui régnait dans le spiritisme brésilien. La
FEB, quant à elle, n’a jamais accepté de s’affilier à une
organisation spirite internationale, mais a participé au

52 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


IIIe Congrès de la CEPA, organisé à Cuba en 1953. Lors
de ce congrès, la CEPA a affirmé sa position laïque et
non-religieuse, ce qui a conduit la FEB à se retirer de
cet événement et de ceux organisés ultérieurement
par la CEPA. C’est lors du IIIe SBPE, en 1993, que
Salomon Benchaya et Milton Medran Moreira,
dirigeants du Centre Culturel Spirite de Porto Alegre
(CCEPA), présents sur place, reçoivent l’invitation de
Jon Aizpúrua, récemment élu président de la CEPA,
pour que le CCEPA rejoigne cette confédération.6
En 1994, la CEPA adresse la Circulaire n° 004 au
Mouvement Spirite Brésilien, manifestant sa volonté
de resserrer les liens entre toutes les Sociétés et
Fédérations Spirites du continent américain et les
invitant à adhérer institutionnellement. Cette circulaire
a provoqué une vive réaction de la part de la FEB qui
publie dans «Reformador», en 1994, l’éditorial «L’Ivraie
et le Blé». Ci-dessous, l’extrait final de cette déclaration:
(...) Il y a encore très peu de temps, le Mouvement
Spirite brésilien a subi une agression injustifiable,
proférée par une institution qui prétend diriger le
mouvement spirite dans les Amériques, mais qui
agit de manière autoritaire et contraire à l’éthique,
en défendant une interprétation restrictive de la
Doctrine.
Les spirites sincères, les spirites chrétiens, ne
peuvent échapper à la réalité de l’existence des

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 53


cultivateurs prétentieux du “moi” au sein du
Mouvement. C’est un obstacle de plus à surmonter.
[...] La vigilance devient alors impérative, surtout
face à ces compagnons imprudents qui nuisent
énormément à la Doctrine et à son mouvement. Il
faut apprendre à coexister avec eux, tout comme
le blé qui pousse avec l’ivraie, sans pour autant se
mélanger»29 (p.6).

Avec l’affiliation du CCEPA à la CEPA en 1995, l’axe


São Paulo - Rio Grande do Sul se structure pour soutenir
le retour de la CEPA au Brésil. Ce fait se concrétise en
2000, lors de la tenue du XVIIIe Congrès Spirite Pan-
américain, à Porto Alegre, lorsque le siège de la CEPA
est transféré au Brésil, avec l’élection du journaliste et
avocat Milton
Rubens Medran
Moreira, du
Centre Culturel
Spirite de Porto
Alegre, en tant
que président
de la CEPA.
En 2003, l’Association Brésilienne des Délégués
et Amis de la CEPA (actuellement CEPA Brasil) est
fondée sous le nom de CEPAmigos (CEPAmis). Son

54 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


action marque le processus de consolidation du
segment spirite laïc et libre-penseur au Brésil.
De son côté, la CEPA, lors du XXe Congrès Spirite
Pan-américain à Rosario, Argentine, répondant aux
appels insistants, principalement de la communauté
spirite d’Europe, a modifié ses statuts, se transformant
en CEPA - Association Spirite Internationale, tout en
conservant l’acronyme original
et devenant principalement
un mouvement d’idées.

https://cepainternacional.org/

Définitivement, l’existence et la croissance d’un


segment laïc et libre-penseur au sein du mouvement
spirite est aujourd’hui une réalité.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 55


3 LES DIFFERENCES ENTRE LA
RELIGION SPIRITE ET LE
SPIRITISME LAÏC
Salomão Jacob Benchaya

L’utilisation de l’expression «spiritisme laïc»


découle de la nécessité d’identifier le segment
constitué par les spirites qui ne considèrent pas le
spiritisme comme une religion et le diffusent selon
une vision humaniste, libre-penseuse, progressiste,
pluraliste et altéritaire. L’idéal serait de ne pas qualifier
le spiritisme. Ni spiritisme laïc, ni spiritisme chrétien.
Cependant, il est pratiquement impossible d’ignorer
ses différentes facettes interprétatives, en particulier
en ce qui concerne la question religieuse, comme
nous le verrons dans ce chapitre.

56 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Le «spiritisme laïc» s’oppose, sans prétention
hégémonique, au modèle dominant de «spiritisme
religieux, chrétien et/ou évangélique». Il est vrai qu’au
Brésil, dès ses débuts, le mouvement spirite se divisait
déjà entre «mystiques» et «scientifiques», et qu’à
partir de la gestion de Bezerra de Menezes à la tête
de la FEB, en particulier à partir de 1895, le format
de la religion spirite est devenu prédominant. Alors
que le spiritisme religieux prône la triade science-
philosophie-religion, les laïcs considèrent le spiritisme
comme science-philosophie-morale, bien qu’Allan
Kardec n’ait jamais établi cette division tripartite.

LE SAVIEZ-VOUS?
À la fin du XIXe siècle, le mouvement spirite
au Brésil était déjà divisé entre «mystiques» et
«scientifiques», les premiers étant dirigés par
Bezerra de Menezes et les seconds par Afonso
Angeli Torteroli.

Bezerra de Menezes Afonso Angeli Torteroli

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 57


Pour l’observateur moins attentif, il semblerait
qu’il n’y ait presque aucune différence à considérer
ou non le spiritisme comme une religion. Cependant,
en fonction de l’environnement - laïc ou religieux -
que l’on observe, on peut percevoir des différences
significatives, des caractéristiques propres à chacun
des côtés, tant dans l’interprétation de la doctrine que
dans les attitudes comportementales des adeptes
ou dans les pratiques des maisons spirites. On peut
remarquer qu’Allan Kardec, bien qu’ayant affirmé à
plusieurs reprises que le spiritisme est une Science
Philosophique de conséquences morales - et non
une Religion - semble avoir laissé la place à ce qu’il
soit considéré comme tel en établissant un lien avec
la tradition judéo-chrétienne et en le classant comme
3ème Révélation Divine et Consolateur Promis,
consacrant trois de ses ouvrages – L’Évangile Selon le
Spiritisme8, Le Ciel et l’Enfer14 et La Genèse, les Miracles
et les Prédictions selon le Spiritisme15 – à l’étude et à
l’interprétation spirituelle du Nouveau Testament. Ce
fait a probablement découlé de l’influence importante
de l’eurocentrisme chrétien dans la culture occidentale
et de l’effort incontestable de Kardec pour démontrer
que le spiritisme n’était pas antireligieux.
Il convient ici de préciser qu’à l’époque de Kardec,
il était légitime de classer le spiritisme comme une

58 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


science et une philosophie – une science morale
et philosophique, comme l’indique le chercheur
Paulo Henrique de Figueiredo (2019) dans son
ouvrage «Autonomia: a história jamais contada do
espiritismo30» (Autonomie: l’histoire inavouée du
spiritisme) – car la Science était spiritualiste sous la
tutelle du spiritualisme rationnel en vigueur dans
les universités européennes. On affirmait dans ce
contexte que «l’homme était une âme incarnée».
Aujourd’hui, il est difficile de classer le spiritisme dans
le domaine des sciences en raison du paradigme
matérialiste qui guide la connaissance scientifique.
En quoi le spiritisme - une science philosophique
aux conséquences morales - est-il incompatible avec
une conception religieuse? Il convient de préciser
que bien que Kardec ait proposé une alliance entre
la Science et la Religion, le spiritisme ne devrait pas,
dans sa conception, assumer le rôle de la Religion,
mais plutôt celui de trait d’union entre ces deux
domaines de la connaissance, en les confortant dans
ce qui leur fait défaut, à savoir les données offertes
par le spiritisme.
La science et la religion, considérées en elles-
mêmes, reflètent des visions contradictoires. La religion
porte des vérités immuables et incontestables, car elle
les considère, prétentieusement, comme étant d’origine

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 59


divine. La science, quant à elle, doute, enquête,
questionne et offre des éléments de conviction. Elle
suppose qu’il n’y a pas de vérités définitives. La religion
impose la croyance aveugle, a des certitudes et
abhorre le doute, d’où ses dogmes. Cela est d’autant
plus vrai que la prétendue origine divine confère à la
religion un caractère de supériorité et d’exclusivité,
ce qui implicitement nie le dialogue et l’inclusion. Par
conséquent, cela s’oppose au caractère progressif,
interrogatif et dynamique inhérent au spiritisme.
La mentalité religieuse porte en elle une série de
caractéristiques nuisibles, en particulier l’immobilité et la
rigidité dogmatique, l’orgueil salvateur et le sectarisme,
que la perspective laïque surmonte en donnant au
spiritisme les conditions de permanence et de survie. En
tant que religion et donc objet de croyance, le spiritisme
ne peut pas avoir sa place dans les discussions
académiques, donc dans la science et la philosophie.
Il est vrai que pour beaucoup, le spiritisme
ne remplit pas aujourd’hui les critères pour être
considéré comme une science ou une philosophie,
comme l’indique l’écrivain et chercheur spirite Paulo
Henrique de Figueiredo (2018):
«à l’époque de Kardec, on considérait comme
positive la science qui avait pour objet de découvrir
les causes et les lois des phénomènes et des faits,

60 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


en les étudiant par des méthodes d’observation,
d’expérimentation et d’induction, à partir desquelles
on pouvait déduire leurs lois» (...) «Allan Kardec,
en qualifiant le Spiritisme parmi les Sciences
philosophiques et psychologiques et en élaborant
une méthode scientifique propre à l’étude des faits
spirites, l’a inséré, de manière adéquate, parmi les
sciences positives acceptées à son époque.»31 (p. 48)
L’argument selon lequel Kardec a affirmé, quelques
mois avant sa désincarnation, que le spiritisme était
une religion d’un point de vue philosophique, n’est
pas utilisé correctement, car le fondateur du spiritisme
ne faisait pas référence au concept populaire de
la religion - la relation entre l’homme et Dieu, issue
de l’Église et qui renvoie à la théologie de la chute
des anges et de l’involution -, mais à l’idée qu’il avait
développée au début de son discours du 2 novembre
1868, concernant le «lien» et la «communion de
pensées» qui se forment entre les personnes, c’est-
à-dire un lien social, horizontal, «un phénomène de
grégarisme, d’union des affinités».32
Cela étant dit, nous examinerons ci-après, sans
aucun sentiment de supériorité et avec le respect dû
à nos compagnons qui militent dans d’autres courants
du spiritisme, certaines caractéristiques et idiosyncrasies
qui distinguent ce que nous appelons le «Spiritisme
Religieux» du «spiritisme laïc et libre-penseur».

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 61


Regardez: En 1985, le penseur spirite
Krishnamurti de Carvalho Dias a publié
le livre «Le Lien et le Culte: le spiritisme
est-il une religion?» (O Laço e o Culto:
é o espiritismo uma religião?), qui a
déclenché d’intenses discussions sur le
caractère religieux du spiritisme.
Le discours d’Allan Kardec dans lequel
il indique clairement que le spiritisme
n’est pas une religion peut être lu dans
son intégralité dans la «Revue Spirite»
de décembre 1868 et peut être consulté à l’adresse suivante:
https://kardecpedia.com/roteiro-de-estudos/ 902/
revistaespirita-jornal-de-estudos-psicologicos-1868/6330/
dezembro/sessao-anual-comemorativa-dos-mortos.

Ainsi, dans l’œuvre d’Allan Kardec, nous trouvons des


affirmations telles que «le spiritisme est la résurrection
du christianisme», «la 3ème Révélation Divine, le
Consolateur Promis par Jésus», largement prêchées
dans le segment religieux et généralement évitées
dans le segment laïc en raison du caractère sectaire
et excluant de ces affirmations. De telles conceptions,
défendues par les spirites religieux et compréhensibles
dans le contexte culturel dans lequel Kardec a vécu, sont
devenues obsolètes du point de vue de la laïcité. De tels
attributs, applicables dans un contexte religieux, sont
absolument incompatibles avec le caractère de science
philosophique visé par la doctrine spirite.

62 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Il y a une tendance parmi les spirites religieux à
attribuer au spiritisme, de manière orgueilleuse, une
condition de complétude et de domination exclusive
de la vérité qui le place au-dessus de la science. En
revanche, dans une vision laïque, le spiritisme est
un domaine de connaissance en développement
qui a beaucoup à apprendre d’autres disciplines,
ainsi qu’à contribuer à celles-ci; il ne s’agit pas d’une
révélation au sens théologique, ni au-dessus de toute
connaissance humaine.
D’un point de vue religieux, la doctrine spirite
est dictée par des «esprits supérieurs», Kardec
n’étant qu’un secrétaire qui organise et publie les
informations reçues. Dans une lecture non religieuse,
le spiritisme résulte d’un partenariat entre des êtres
humains, incarnés et désincarnés, avec la figure du
professeur Rivail comme fondateur de la Philosophie
Spirite, en raison de l’originalité, de l’importance
et de la complexité de son travail ainsi que de la
méthodologie qu’il a adoptée pour sa systématisation,
reflétant clairement sa condition de pédagogue et
d’humaniste rationnel. Ce n’est pas seulement le
«secrétaire» des esprits: c’est le systématisateur, auteur,
codificateur et fondateur du spiritisme. Minimiser
son rôle et exalter les mentors spirituels est une
manœuvre visant à écarter la possibilité d’un échec.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 63


En le caractérisant comme un acteur secondaire, il est
possible de diviniser et sacraliser la révélation spirite,
la rendant inattaquable.
À ce stade, Kardec a été catégorique, refusant
l’immobilisme de la Doctrine Spirite, lorsqu’il affirme,
dans un texte des Œuvres Posthumes, intitulé
«Constitution du Spiritisme – Des Schismes», qu’
«Il ne lui appartient pas de fermer la porte à aucun
progrès, sous peine de se suicider. En assimilant
toutes les idées reconnues justes, de quelque ordre
qu’elles soient, physiques ou métaphysiques, elle ne
sera jamais dépassée, constituant ainsi l’une des
principales garanties de sa pérennité.»33 (p.349)
Un point sur lequel le Spiritisme laïc et la
Religion Spirite divergent profondément concerne la
nécessité de la mise à jour doctrinale. À cet égard,
les religieux ne tiennent apparemment pas compte
des recommandations de Kardec, contenues dans
«La Genèse»15 et «Œuvres Posthumes»33, concernant
l’harmonie du spiritisme avec le progrès, préférant
attendre que les « esprits supérieurs», s’ils le jugent
nécessaire, viennent mettre à jour la Doctrine, ne
reconnaissant pas l’autorité et la compétence des
hommes pour ce faire. Cette attitude n’est pas celle
des laïcs et des libres penseurs qui, sans accorder
aucune prérogative d’exclusivité ou d’étiquetage

64 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


institutionnel à leurs études et propositions, offrent des
contributions qui constituent clairement des avancées
et même des révisions de l’œuvre du fondateur,
ainsi que par rapport aux distorsions introduites
par des esprits, des médiums ou des institutions
prétendument spirites. À cet égard, l’initiative de la
CEPA est à souligner, qui lors de son XVIIIe Congrès,
tenu du 11 au 15 octobre 2000 à Porto Alegre, a
débattu de la question de la mise à jour doctrinale
sous le thème «Le Spiritisme doit-il se mettre à jour?».
Pour en savoir plus:
Consultez les principaux travaux présentés lors du XVIIIe
Congrès de la CEPA, disponibles à l’adresse suivante:
https://pt.scribd.com/document/13797500/CEPA-A-Cepa-e-
a-Atualizacao-do-Espiritismo

Alors que dans les centres spirites d’orientation


religieuse, il est courant de trouver la «prédication
morale-évangélique», où prédomine l’utilisation de
«L’Évangile Selon le Spiritisme»8 en tant qu’œuvre
de base principale, à laquelle est même dédié un
«Culte de l’Évangile au Foyer», les spirites laïcs et
libres penseurs préfèrent une étude réflexive à partir
de «Le Livre des Esprits»12 et «Le Livre des Médiums»13,
sans négliger les autres œuvres, parmi lesquelles la
collection de la Revue Spirite. Les réunions organisées
dans le cadre domestique sont simplement des

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 65


réunions d’étude du spiritisme, sans aucun rituel,
avec ou sans la manifestation d’esprits.
Pour le courant laïc et libre-penseur, le concept de
morale autonome prédomine (comportement guidé
par l’utilisation de la raison et du libre arbitre), tandis
que pour le courant religieux, le concept de morale
hétéronome prévaut (soumission, obéissance à des
normes et des règles imposées de l’extérieur). Dans
la morale hétéronome, la logique de la culpabilité et
de la punition ressort, dans une déformation de la loi
de cause à effet.
Il est courant de constater que, dans de nombreuses
maisons spirites à caractère religieux, les habitués de ces
lieux sont généralement traités comme des «assistés»,
ce qui caractérise la fonction thérapeutique de ces
institutions. Dans la majorité des cas, les personnes qui
fréquentent ces maisons le font à la recherche d’un
“traitement” et sont reçues à ce titre. Dans les quelques
institutions laïques, sans cesser d’offrir réconfort et
secours à ceux qui en ont besoin, l’environnement est
propice à la participation de personnes intéressées
à connaître le spiritisme, où les réunions d’étude et
de débats deviennent plus importantes, avec moins
d’accent sur les activités d’aide et thérapeutiques,
comme c’est le cas des séances de passes magnétiques,
de prières, d’irradiations et de désobsession. Non pas

66 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


que, momentanément, elles ne soient pas utiles, tant
qu’elles ne caractérisent pas un processus de création
de dépendance externe. S’il y a des activités spécifiques
pour les enfants et les jeunes, elles constitueront
des groupes d’éducation pour enfants, des groupes
de jeunes, etc., mais elles ne sont pas destinées à
«l’évangélisation des nouvelles générations», qui est
la mission des catholiques et des protestants. Sous le
couvert de la religion, la tâche principale du spiritisme et
des spirites est «d’évangéliser» l’humanité contrairement
à ce qui avait été défini par Kardec – démontrer la réalité
de l’esprit et réfléchir aux conséquences morales qui
en découlent. Pour le spiritisme laïc, la transformation
morale de l’Homme serait le résultat de son effort
conscient et libre, auquel la connaissance du spiritisme
contribuerait grandement.
Dans cette logique, une autre expression, très
courante parmi les religieux - le «pentateuque
kardécien» -, est évitée dans le milieu laïc. Expression
inappropriée, car elle se réfère, étymologiquement,
aux cinq premiers tomes de la Bible sacrée, attribués
à Moïse, et parce qu’elle limite l’ensemble de l’œuvre
du fondateur du spiritisme, qui compte plus de deux
douzaines de volumes, à seulement cinq livres, parmi
lesquels figurent «Qu’est-ce que le Spiritisme?»1 et les
douze volumes de la Revue Spirite.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 67


Il convient également de noter que si la
«religion spirite» rassemble une grande partie de
ses institutions au sein du mouvement fédératif ou
d’unification, dont l’orientation est fondée sur l’œuvre
de fiction littéraire médiatique «Brésil: Coração do
Mundo, Pátria do Evangelho» (Cœur du Monde,
Patrie de l’Évangile), éditée par la FEB34, dans le
segment laïc et libre-penseur prédomine l’aspect d’un
mouvement d’idées, de caractère diversifié et pluriel,
dont l’unité repose sur des principes doctrinaux
fondamentaux, dans le respect de l’examen libre et
dans la coexistence fraternelle et altéritaire.
Le mouvement «d’Unification» d’orientation
religieuse cherche à préserver une prétendue «pureté
doctrinale», dans le respect des normes directrices et
d’un discours unique et exclusif, au sein d’une structure
organisationnelle complexe et lourde. Dans le
segment laïc, les congrès, conférences et symposiums
sont principalement des forums de discussion, de
débat et d’échange d’expériences. Par exemple, la
CEPA garantit à toutes les personnes et institutions qui
lui sont liées le droit inaliénable à la liberté de pensée,
d’expression, de débat et de critique. Une institution
affiliée à la CEPA n’est pas soumise aux règlements
d’obéissance aux normes émanant de celle-ci. C’est
un type de relation qui se produit par l’identité

68 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


(communion) de pensées, fraternelle, démocratique
et de coopération mutuelle entre les institutions et
les personnes qui en font partie. La CEPA évite de
proposer des programmes, des directives ou des
manuels de procédures pour les institutions affiliées,
laissant à celles-ci une totale liberté d’action.
Sous la perspective laïque du spiritisme, il n’est
pas approprié de qualifier les centres spirites de
temples, sanctuaires, synagogues, maisons de prière
ou toute autre appellation similaire.
Dans le domaine de la médiumnité, les activités
à caractère de sauvetage et thérapeutique sont
prédominantes dans le milieu religieux. La grande
majorité des centres spirites maintiennent comme
activité prédominante la transmission de passe
magnétique, ce qui assure une plus grande
présence du public lors des réunions. Il n’est pas
rare non plus que certaines maisons organisent des
séances de traitement spirituel ou de désobsession,
certaines étant transformées en véritable processus
d’initiation pour les adeptes. Les réunions d’échange
médiumnique sont principalement axées sur la
doctrine des esprits nécessiteux – autrefois appelées
«séances de charité». Il y a des maisons qui organisent
des réunions exclusivement pour la prière pour les
nécessiteux – les sessions de prières et d’irradiations.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 69


Dans le souci de venir en aide aux grandes masses
de personnes qui, confrontées à la pénurie et à la
précarité des services publics, notamment au Brésil, se
rendent dans les centres spirites, certains sont devenus
des méga-institutions avec des milliers de travailleurs
et de personnes aidées dans leurs salles et couloirs.
La pratique laïque cherche de préférence à récupérer
le rôle de la médiumnité dans la recherche et la
démonstration de l’immortalité de l’âme, selon des
critères rationnels, de préférence en petits groupes,
comme recommandé par Kardec, et non seulement
comme instrument de secours pour les esprits affligés
ou de guérison des maladies psychosomatiques.
En ce qui concerne l’enseignement du spiritisme
dans les maisons spirites laïques - qui sont peu
nombreuses au Brésil, comme nous l’avons déjà dit
- leurs réunions mettent l’accent sur la recherche et
la diffusion de la connaissance spirite. Les réunions
d’étude, les cours, les séminaires et les activités
médiumniques sont prédominants, axés davantage
sur la recherche et l’étude que sur l’aide et les
traitements. Dans les réunions publiques, il n’est pas
courant d’utiliser des prières pour l’ouverture et la
clôture des travaux. En raison de cela, les statistiques
de fréquentation sont plus modestes. Ce modèle
correspond au Centre Culturel Spirite de Porto

70 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Alegre (CCEPA), dont les auteurs de cette étude sont
d’anciens présidents. Les réunions sont exclusivement
axées sur l’étude et les débats et il n’y a pas de
séances de passes magnétiques ou de traitement
spirituel. Les groupes d’étude sont constitués de
participants issus de cours de spiritisme ouverts
à la communauté. Aucune de leurs réunions ne
comporte de prédications à caractère évangélique-
moral. Elles sont toutes de nature réflexive, ouvertes
au questionnement et même à la critique du texte
doctrinal. Toutefois, l’utilisation de thérapies spirituelles
telles que les passes magnétiques et la désobsession
dans des institutions laïques est circonstancielle et
n’est jamais prioritaire parmi leurs activités.
En adéquation avec sa posture religieuse, le
mouvement spirite hégémonique assume souvent un
caractère salvateur, fanatique et sectaire. «Le Spiritisme
et les Spirites ont pour mission de transformer
l’Humanité, car elle est la Troisième Révélation Divine».
«La science atteindra un jour ce que le spiritisme
affirme». «Le spiritisme n’a pas seulement un aspect
religieux; il est ‘la’ religion!». Ces affirmations reflètent
un regard de supériorité et de mépris que la Religion
Spirite étend sur ceux qui pensent différemment. La
CEPA et ses membres ont même été considérés dans
certains secteurs comme non spirites. En revanche,

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 71


dans la branche laïque, du moins dans le cadre de la
CEPA, prédomine l’idée que le spiritisme interagit avec
toutes les branches de la connaissance, y contribue et
en absorbe les connaissances, comme toute science.
La CEPA, fidèle à la pensée de Kardec, défend et
adopte une position humaniste, progressiste, pluraliste
et altéritaire, cherchant ainsi constamment un dialogue
ouvert et fraternel entre les spirites et les autres écoles
de pensée.
D’autres concepts du spiritisme sont traités selon
des points de vue différents, dans la vision religieuse
et dans la perspective laïque. Voyons donc:
Il est très courant, parmi les religieux, sous l’influence
de la culture judéo-chrétienne, de considérer la
réincarnation comme un moyen de racheter les dettes
du passé et les souffrances humaines résultant de fautes
antérieures, avec le châtiment divin comme ingrédient
pour l’évolution de l’Esprit. Dans cette conception, on
en arrive à l’absurdité d’attribuer les décès collectifs
lors de catastrophes ou de phénomènes naturels
au paiement de dettes contractées collectivement
dans des vies antérieures. Dans une lecture non
religieuse, les décès prématurés, collectifs ou non,
peuvent simplement être des accidents, comme le
répète régulièrement Maurice Herbert Jones lors
des réunions d’étude du CCEPA, constituant des

72 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Président du Centre Culturel Spirite de
Porto Alegre (CCEPA) pour plusieurs
mandats, ancien président de la FERGS,
brillant penseur spirite de la CEPA et l’un
des créateurs de l’ESDE (étude systématisée
de la doctrine spirite), Maurice H. Jones
affirme souvent lors des réunions d’étude:
«Les accidents arrivent. La douleur n’est pas
toujours le résultat de fautes passées. Les
Maurice décès prématurés, individuels ou collectifs,
Herbert Jones peuvent ne pas avoir été programmés.»

épreuves dans le processus d’apprentissage de l’Esprit


sans nécessairement résulter du paiement de fautes
antérieures. Bien sûr, il ne faut pas exclure les situations
où les souffrances du présent ont leurs racines dans des
comportements fautifs du passé, mais leur fonction est
pédagogique, éducative et non punitive. Le spiritisme
laïc n’attribue pas à Dieu une fonction de surveillance
et de punition, et a une vision optimiste de l’homme
et de son potentiel évolutif. De plus, il partage l’idée de
l’évolution naturelle de l’humanité et ne soutient pas les
conceptions de la culpabilité, du péché et de la punition
qui imprègnent le spiritisme chrétien.
En ce qui concerne la médiumnité, il est très
facile et courant, dans un contexte religieux, de
cultiver l’idolâtrie envers les médiums ou les esprits,

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 73


surtout lorsqu’ils se distinguent par leur travail
social et/ou leur production médiumnique, qui
n’est généralement pas soumise à l’examen du bon
sens et de la raison, comme préconisé par Kardec.
Dans un environnement laïc, en revanche, aucune
autorité particulière ni infallibilité n’est attribuée
aux informations transmises par les médiums. La
médiumnité n’est pas un don divin, une grâce, un
miracle qui rend les porteurs privilégiés, mais une
faculté que tout le monde possède, à un degré plus
ou moins élevé. La production littéraire d’auteurs
incarnés est valorisée, avec des réserves dans le milieu
laïc quant à la production médiumnique abondante
de type «auto-assistance», au détriment d’ouvrages
de nature philosophico-scientifique écrits par des
auteurs spirites incarnés. Les spirites laïcs s’opposent
aux directives et aux comportements artificiellement
établis au travers de médiums renommés et d’esprits
élus comme porte-paroles divins, de la prétendue
«spiritualité supérieure», dont les révélations
deviennent insensibles à toute remise en question,
articulée à la défense d’idées purement moralisatrices.
Il y a également, parmi les laïcs, une remise en
question du concept de «réforme intime», c’est-à-dire
l’engagement des adeptes à effectuer des changements
intérieurs comme objectif de vie, un comportement

74 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


largement répandu dans le segment religieux. Cela
suppose, à tort, l’idée d’une récupération, d’une
réparation, d’une remise en état d’une chose devenue
vieille ou abîmée, d’une récupération d’une chose
perdue, ce qui impliquerait une régression évolutive,
un «retour à la Maison Paternelle», idées incompatibles
avec le concept d’évolution prôné par le spiritisme. En
vue du laïcisme, la croissance de l’Esprit se fait par un
processus d’évolution consciente guidé par une morale
autonome, marquée par la raison et l’utilisation du libre-
arbitre. Le cheminement évolutif de l’esprit implique
naturellement des erreurs, des tentatives de réussite,
dans la recherche inexorable de perfectionnement,
où les âmes affrontent les conflits de la coexistence,
se prédisposant à l’apprentissage du respect, de la
tolérance et de l’amour, selon Maurice Jones.
Une dernière réflexion doit être faite concernant la
figure de Jésus. La position des religieux par rapport
à la figure de Jésus est une véritable christolâtrie.
Dans une exagération de la réponse donnée par les
Esprits à la question 625, dans Le Livre des Esprits12,
«Voyez Jésus» (et non seulement «Jésus», comme
cela apparaît dans certaines traductions), la figure
de Jésus l’emporte littéralement sur celle de Kardec
dans les milieux du Centre Spirite, dans les pièces
promotionnelles des événements spirites, et comme

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 75


nous l’avons déjà dit, il y a plus de prédicateurs de
l’Évangile que d’instructeurs de la Doctrine Spirite.
Contrairement à ce qui a été propagé de manière
erronée au sein du spiritisme religieux, selon lequel
les esprits laïcs rejetteraient la figure de Jésus, ceux-ci
ont généralement réaffirmé l’importance de Jésus de
Nazareth - non pas du Christ mythologique des Églises
- dont les enseignements moraux ont été abordés par
Kardec dans «L’Évangile selon le Spiritisme», et dont la
validité est mise en évidence et développée dans la
troisième partie du «Livre des Spirits».
Dans l’environnement laïc, l’idée d’un Spiritisme
Chrétien n’est pas répandue pour plusieurs raisons,
en particulier parce que l’on comprend que
Kardec, en utilisant cette expression, se référait non
pas au Christ des Églises, mais à la doctrine, aux
enseignements, à la pensée, à la morale universelle
de Jésus de Nazareth.
Dans l’environnement spirite laïc, la vision de la
réincarnation, de l’immortalité, de la responsabilité
pour le progrès individuel et social inspire une
attitude plus engagée en faveur de la démocratie,
de la liberté, de la justice sociale, de la recherche
de régimes économiques, politiques et sociaux plus
compatibles avec la dignité humaine, la préservation
de l’environnement, etc.

76 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


4 PROGRESSION DE LA DOCTRINE
ET ACTUALISATION
PERMANENTE DU SPIRITISME
Milton Rubens Medran Moreira

Concevoir le spiritisme dans une perspective laïque


implique, en premier lieu, de reconnaître qu’il s’agit
d’une œuvre humaine. Cela peut être un peu difficile
pour ceux qui, comme la plupart d’entre nous, ont
assimilé une culture qui situe les phénomènes de la vie
dans deux domaines pratiquement incommunicables
et régis par des lois différentes: le sacré et le profane.
Vus sous cet angle, les valeurs qui guident notre
vie, toutes nos convictions, tout ce qui compose
notre patrimoine matériel, moral et intellectuel,

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 77


doivent être accommodés dans deux domaines
distincts: le divin et l’humain.
Le divin fait partie du domaine sacré. C’est
là que se trouvent les croyances religieuses qui,
nécessairement, n’ont pas besoin d’être conformes à
la raison humaine. Certains ont même prêché que la
foi religieuse est légitimée précisément parce qu’elle
va à l’encontre de la rationalité humaine: «Credo quia
absurdum» ( je crois parce que c’est absurde), disait
Saint Augustin, soutenant le caractère humainement
irrationnel de la révélation religieuse.
Par une simple convention humaine, les
questions liées à la vie après la mort, l’existence de
Dieu et tout ce qui concerne l’âme ou l’esprit ont été
reléguées au domaine du sacré. La métaphysique
elle-même, auparavant considérée comme une
science, a été transférée dans le domaine de la
religion et de ses mystères insondables, à partir du
philosophe allemand Emmanuel Kant (1724-1804).
Ce sont des questions conventionnellement insérées
dans le domaine religieux, bien qu’elles aient été,
tout au long de l’histoire de la pensée humaine,
l’objet de profondes investigations philosophiques.
Plus spécifiquement, la question de «l’esprit» en tant
qu’entité immatérielle inhérente à l’être humain, en
particulier au cours des deux derniers siècles, a fait

78 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


l’objet d’études et d’expérimentations scientifiques
qui suggèrent fortement son existence réelle et
indiquent un champ de recherche et d’expériences
extrêmement riche dans le domaine de la science.
Malgré cela, en raison du mystère entourant ces
thèmes depuis des millénaires par les religions, ils
continuent, dans la culture encore prévalente, d’être
considérés comme intrinsèques à la foi religieuse, et
donc appartenant au domaine du sacré, où la raison
n’a que peu ou pas de valeur.
Ainsi, les dictats de la raison ne s’appliquent qu’à
ce qui est considéré comme humain. Ce qui est divin
reste dans le domaine du surnaturel, du mystérieux,
de l’irrationnel.
La philosophie spirite s’est affranchie de cette
dichotomie entre le sacré et le profane. Ce qui
importe aux Esprits interrogés par Allan Kardec, dans
le cadre de la préparation du «Livre des Esprits»,
c’est ce que l’on appelle la loi naturelle. Pour eux, la
loi naturelle est la «loi de Dieu» même. «Elle est la
seule qui compte pour le bonheur de l’Homme»,
car «elle lui dit ce qu’il doit faire ou ne pas faire»12
(question 614, p. 361). Ils voient dans la Nature et ses
lois la présence de la divinité qui préside à tout en
tant qu’ «intelligence suprême et cause première de
toutes choses», comme stipulé dans la question n°1

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 79


du «Livre des Esprits»12. La loi naturelle, vue sous cet
angle, engloberait tous les phénomènes de l’Univers
et, par conséquent, également les relations entre les
êtres humains et avec la divinité, la soustrayant à ce
qui relève du surnaturel.
Ainsi, ce qui pour la théologie était contenu dans la
révélation sacrée, surnaturelle et non nécessairement
conforme à la raison, pour les Esprits interrogés par
Kardec, était potentiellement accessible par la raison
humaine, car la loi naturelle est inscrite «dans la
conscience» de l’être intelligent (question 621)12.
Cette perspective naturaliste de la loi divine
permettrait à Kardec d’introduire dans son livre La
Genèse (1868) un nouveau concept de «révélation»,
bien différent de ce qu’on appelle la «révélation
religieuse». Celle-ci, selon le fondateur du spiritisme,
«est toujours faite à des hommes privilégiés
désignés sous le nom de prophètes ou de messies,
c’est-à-dire, ‘envoyés’, ‘missionnaires’, ayant la
‘mission’ de la transmettre aux Hommes», ce qui
implique une «passivité absolue», devant être
acceptée «sans contrôle, examen ou discussion»15
(Chap. I, item 7, p. 45).
Il est à noter que, encore aujourd’hui, tant dans
les religions les plus traditionnelles et historiques que
dans celles qui se popularisent grâce à de puissantes

80 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


organisations, leurs leaders s’autoproclament
«missionnaires», «prophètes», «prêtres», «pasteurs»
(chargés de conduire les troupeaux), etc., des titres qui
leur confèrent une autorité directement issue de Dieu,
les habilitant à interpréter pour leurs fidèles la soi-
disant «parole de Dieu».
Ces titres sont incompatibles avec le spiritisme,
précisément parce qu’il n’impose à personne
l’acceptation d’ «articles de foi». Même ses médiums,
aussi qualifiés et respectables soient-ils, ne sont
que des instruments utilisés par les Esprits pour
transmettre leurs sensations et opinions personnelles.
Celles-ci peuvent ou non être acceptées par les
incarnés et, comme le recommande le spiritisme,
seront toujours soumises à des critères de rationalité
et de concordance avec d’autres communications, se
validant ou non, par un examen rigoureux, comparatif
et véritablement scientifique auquel se livrent leurs
interprètes.
La révélation dite «spirite», selon la même
œuvre15, dans son point13, fait également partie
de l’ordre divin, car, comme déjà mentionné, le
concept de divin est le même que celui de naturel.
Cependant, contrairement à la révélation religieuse,
elle s’inscrit dans le domaine scientifique, c’est-à-dire
dans la connaissance construite par l’humanité, du

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 81


fait que «son initiative appartient aux Esprits» (qui ne
sont rien de plus que des êtres humains, libérés de
leur enveloppe charnelle) «et son élaboration est le
fruit du travail de l’homme» (incarné).

LE SAVIEZ-VOUS?
Pour Kardec, la révélation spirite est une révélation
scientifique et non religieuse!

Il convient toutefois de noter que lorsque le


fondateur du spiritisme déclare que l’élaboration
de la proposition spirite «est le fruit du travail de
l’Homme», il fait spécifiquement référence à l’incarné,
indiquant que c’est un travail permanent. En insérant
la «révélation» spirite dans le domaine de la science,
c’est-à-dire de la connaissance, il admet qu’elle est un
ensemble de «principes fondamentaux» destinés à
mettre l’être humain «sur la voie des investigations,
et non à le conduire par la main», comme les
religions ont toujours cherché à le faire. Ces principes
fondamentaux, révélés par les Esprits selon Kardec,
ne sont que des «jalons qui lui montrent l’objectif»,
et il appartient à l’Homme de les «étudier et d’en
déduire leurs applications» (p. 77). C’est pourquoi,
tout au long de son œuvre, Allan Kardec a qualifié le
spiritisme de «science expérimentale».15

82 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Or, l’une des caractéristiques des sciences
humaines est sa progressivité. La connaissance est
progressive. Le principe de l’évolution, auquel adhère
la proposition spirite, et la dite «loi du progrès»,
exposée dans «Le Livre des Esprits», soutiennent ce
caractère de la connaissance, ainsi que des coutumes
et de l’élaboration des normes politiques et de
conduite, applicables à la société et sous la tutelle
de l’État (Loi de Société - 3ème Partie, Chapitre VII)12.
D’où le respect que le spiritisme accorde aux sciences,
qu’elles soient physiques ou humaines. Le progrès
humain se réalise précisément dans la mesure où ses
conquêtes scientifiques, intellectuelles et morales se
rapprochent davantage des lois naturelles.
Cela étant dit, le profond respect que le spiritisme
a voué à la connaissance humaine, à la raison, à la
capacité de l’être humain à avancer sur la voie du
progrès, a été consacré, dès sa naissance en France
au XIXe siècle. Cette caractéristique du spiritisme
est très bien résumée dans cette phrase lumineuse
de Kardec, au chapitre I – «Nature de la Révélation
Spirite», article 55, également dans «La Genèse»:
«En avançant avec le progrès, le spiritisme ne sera
jamais dépassé, car si de nouvelles découvertes
lui prouvent qu’il est dans l’erreur sur un point, il
se modifie sur ce point. Si une vérité nouvelle est
révélée, il l’accepte.» (p. 71).

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 83


C’est donc une doctrine ouverte à de nouvelles
connaissances, tout en conservant des principes
structuraux bien définis qui ont fait l’objet de la
«révélation» des esprits.
Avec cette phrase emblématique, Allan Kardec
prêchait la nécessité d’une mise à jour constante du
spiritisme, même comme condition indispensable à sa
survie dans un monde en constante évolution. Dans
ses «Œuvres Postumes», dans le texte «Constitution
du Spiritisme, Exposé des motifs - Des Schismes», il
écrit: «[Le spiritisme] ne doit fermer les portes à aucun
progrès, sous peine de se suicider»33 (p. 349).
Pour Kardec, «l’une des principales garanties de
la perpétuité du spiritisme» résiderait justement dans
l’assimilation «de toutes les idées reconnues comme
justes, qu’elles soient physiques ou métaphysiques».
Il a exprimé cela dans un document soigneusement
publié dans sa Revue Spirite, en juillet 1868, quelques
mois avant sa mort survenue le 31/03/1869, sous le
titre de «Constitution Transitoire du Spiritisme»35.
Dans ce même projet, il recommande la «réalisation
périodique de congrès spirites», où les avancées
scientifiques reconnues seraient intégrées à la doctrine
spirite. Dans la mesure où le spiritisme mondial a
cependant été fasciné par l’adoption d’un modèle
religieux, où tout aurait déjà été dit sur l’origine, la

84 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


nature et le destin de l’Homme et du monde, ces
recommandations du fondateur du spiritisme ont
été oubliées. La dite «troisième révélation divine»
aurait donné le dernier mot définitif sur toutes les
grandes questions qui ont historiquement tourmenté
l’être humain. Pendant longtemps, les congrès,
qui devraient être, selon Kardec, l’instrument de
propulsion de la mise à jour constante de la doctrine,
ont été condamnés par l’hégémonie religieuse spirite.
Même marginalisé par l’activité hégémonique du
mouvement autoproclamé «chrétien et évangélique»,
la branche laïque et libre-penseuse du spiritisme n’a
jamais cessé d’agir, inspiré, toujours, par les orientations
du maître Kardec. Il n’appartient pas à ce bref essai
d’écrire l’histoire qui, au cours des 150 dernières
années, s’est déroulée, presque toujours en marge des
mécanismes de pouvoir créés par la « religion spirite»,
en particulier dans les pays d’Amérique latine. Mais
un chapitre important de cette réaction fut la création
en 1946, en Argentine, de la CEPA - Confédération
spirite panaméricaine (aujourd’hui CEPA - Association
spirite internationale). Cette entité, dont la vocation
et la structure sont basées sur les recommandations
de Kardec, a toujours donné la priorité aux congrès
spirites, leur réservant les décisions souveraines qui
ont fait et continuent de faire son histoire.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 85


La question de la mise à jour a toujours guidé les
thèmes de tous les congrès de la CEPA. L’un d’entre
eux, celui de l’année 2000 à Porto Alegre, capitale
de l’Etat de Rio Grande do Sul, a justement choisi
comme thème central une question adressée de
manière provocatrice aux positions conservatrices du
mouvement: «Le Spiritisme doit-il se mettre à jour?».

Le livre «La CEPA et la mise à jour


du spiritisme»36, contenant les
principaux travaux présentés au
Congrès de Porto Alegre en 2000,
est disponible sur:
https://pt.scribd.com/
document/13797500/CEPA-A-Cepa-e-a-
Atualizacao-do-Espiritismo.

Évidemment, dans le cadre de la CEPA, la réponse


a été donnée de manière afirmative, mais ce congrès
allait marquer le début d’un effort concret, en élisant
un «modus operandi», un scénario qui identifiait les
principaux thèmes de la mise à jour. À cette occasion,
le travail du penseur spirite Ademar Arthur Chioro
dos Reis, basé à São Paulo, a esquissé un «agenda»
qui suggère les moyens et les contenus à travers
lesquels cette mise à jour pourrait être effectuée:

86 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


«Toute mise à jour que l’on souhaite entreprendre
ne peut toutefois se passer d’une analyse de
contenu, de la constitution d’un programme spirite
identifiant les concepts, les thèmes, les affirmations
et les informations obsolètes face aux nouvelles
connaissances qui n’ont pas été abordées dans
les ouvrages de base ou qui ont été traitées de
manière conditionnelle par Kardec et les Esprits qui
ont construit avec lui le corps doctrinal.»37 (p. 13)
Dans sa proposition plus élaborée, Chioro
suggère depuis «une adaptation sémiotique et la
redéfinition et la mise à jour du langage» allant
jusqu’à une «redéfinition épistémologique», capable
de dissiper «les confusions sur la nature et le caractère
du spiritisme, en particulier sur la manière dont la
pensée spirite a été construite (et donc, sur la manière
dont elle sera construite).37 (p. 31).
Il s’agit d’une tâche qui nécessite, pour son
accomplissement, le concours de spirites du monde
entier, en gardant toujours à l’esprit, cependant,
que l’actualisation ne signifiera pas l’altération des
principes fondamentaux de la doctrine spirite, tels
que l’existence de Dieu, «intelligence suprême
et cause première de toutes choses»; la survie,
l’immortalité et la communicabilité des Esprits; la
pluralité des mondes habités et la réincarnation en
tant qu’instrument d’évolution de l’esprit humain.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 87


Comme l’a justement souligné Jaci Régis,
«L’actualisation est un processus, c’est une
dynamique ouverte, mais avec une base solide
dans la structure fondamentale de la pensée
d’Allan Kardec. C’est une ouverture constante d’un
questionnement séquentiel, continu et équilibré,
fruit de l’étude, de la réflexion et de l’observation.
Elle sera motivée par les nouvelles connaissances,
les découvertes scientifiques, philosophiques et
politiques. Enfin, du fait que la Doctrine a dit le
premier mot et a été élaborée par Allan Kardec
avec une ouverture au progrès, à l’actualisation, au
fur et à mesure des progrès de la société”38 (p. 67).

Pour Allan Kardec, l’actualisation permanente du


spiritisme était une condition indispensable à sa
survie, sinon il se condamnerait à disparaître.

Pour conclure ces réflexions, le caractère


éminemment progressiste du spiritisme et sa mise
à jour constante ne prouvent qu’une chose: qu’il ne
constitue pas une religion et que l’objet d’étude de la
proposition spirite échappe au sacré pour se situer
dans le naturel, dans le domaine du laïcisme.
Dans ce domaine, il n’y a pas de place pour des
vérités toutes faites et définitives. L’infaillibilité est
une caractéristique des religions, de leurs prophètes,

88 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


pontifes et missionnaires. L’ésotérisme a pour point
de départ l’existence de l’ESPRIT, comme «principe
intelligent de l’Univers» (Question 23 de «Le Livre
des Esprits»). Tout ce qui découle de ce principe
fondamental, de nature philosophique, est testable,
modifiable, actualisable, en fonction de l’avancement
des connaissances humaines. C’est en réalité un
univers à découvrir pour les générations de tous les
temps.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 89


5 PERSPECTIVES POUR LE
SPIRITISME LAÏC ET
LIBRE-PENSEUR
Milton Rubens Medran Moreira

Allan Kardec, en systématisant la doctrine spirite,


savait très bien qu’il touchait à des tabous difficiles à
lever. Ramener dans le domaine de la rationalité ce
que les religions ont enfermé dans le domaine du
sacré n’est pas une mince affaire.
Pour cette raison, dans plusieurs de ses écrits,
Allan Kardec a envisagé les phases par lesquelles le
spiritisme devrait passer avant que les principes qu’il
proposait soient universellement acceptés et capables
d’opérer des transformations effectives dans le monde.
Dans l’article intitulé «période de lutte» publié dans la

90 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Revue Spirite en 1863, où il s’est occupé plus en détail
de l’évolution de la pensée spirite et de son influence
sur la Terre, il a identifié comme dernière des étapes
à atteindre par le spiritisme celle de la «Régénération
Sociale». Avant cela, la proposition spirite passerait par
des phases de curiosité, de réflexion philosophique,
de luttes imposées par le dogmatisme réactionnaire,
d’adoption de traits religieux et de transitions internes.
Tout ce cheminement constituerait le processus
dialectique qui la mènerait à l’étape définitive de
régénération. Le monde serait alors touché par une
génération «imprégnée de nouvelles idées», capable
de préparer le chemin du «triomphe définitif de
l’union, de la paix et de la fraternité».
Il est vrai que, dans cette marche envisagée par
Kardec, le spiritisme devrait nécessairement traverser
une période religieuse, mais il est également vrai
qu’il devrait la dépasser, la laisser derrière lui, à la
recherche d’une société humaine axée sur les idéaux
d’union, de pacifisme et de solidarité entre tous.
C’était une proposition philosophique et sociale qui
concrétisait des rêves tels que celui de John Lennon
dans son célèbre poème musical «Imagine».
De manière effective et concrète, la proposition
spirite, pour atteindre des niveaux de globalisation,
devrait concevoir le monde et se concevoir elle-

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 91


même comme «sans religion», comme le rêvait le
célèbre Beatles dans sa chanson à succès sortie un
siècle plus tard.
Il ne s’agit en aucun cas de mépriser les religions
et le rôle qu’elles ont joué dans l’Histoire, mais
dans une communauté planétaire solidement unie,
pacifique et fraternelle, il n’y a plus de place pour
la religion, ouvrant en revanche des horizons plus
vastes et infinis pour la spiritualité.

LE SAVIEZ-VOUS?
Allan Kardec avait prévu pour le spiritisme une
période religieuse, qui, cependant, devrait être
dépassée ! Plus d’informations sur:
https://kardecpedia.com/roteiro-de-estudos/897/revista-
espirita-jornal-de-estudos-psicologicos-1863/5521/
dezembro/periodo-de-luta.

Avec cette position, Kardec se montre résolument


en avance sur son temps.
La spiritualité sans religion est clairement la
perspective du monde contemporain. Celui-ci,
petit à petit, reconnaît les valeurs laïques, nées
et cultivées à partir des Lumières, comme le
chemin pour surmonter les fondamentalismes
politiques, idéologiques et de croyance.

92 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Le laïcisme a connu une augmentation particulière
au XIXème siècle, dans le contexte duquel est apparu
le spiritisme. Allan Kardec voyait dans les idées spirites
le chemin de la transition, suggérant l’alliance entre
science et religion, comme il l’a exposé dans le livre
«L’Évangile Selon le Spiritisme»8. Mais il savait que ce
saut évolutif prendrait du temps. Le monde avait été
imprégné de la dichotomie sacré/profane, imposée
par la religion, comme garantie de réserve de pouvoir
pour elle-même. Il était nécessaire de remplacer ce
modèle manichéen, progressivement, par l’idée du
naturel, dont les lois régissent le divin et l’humain, la
matière et l’esprit, l’univers tout entier, sans que, pour
autant, des dogmes et des rites, vides de rationalité et
d’objectivité, soient nécessaires.
En voyant le spiritisme non pas comme une
réalité prête et achevée, mais, comme le dirait au
siècle suivant, Herculano Pires, «un archétype chargé
d’avenir»40, Allan Kardec savait qu’il devrait passer par
une «phase religieuse», nécessairement surmontable,
pour accomplir sa mission dans le monde. Il était
nécessaire de redonner un nouveau sens à certaines
vérités déformées et cristallisées par les dogmes
religieux pour, ensuite, rendre possible la surmontée
de cette période transitoire. Optimiste qu’il était,
Kardec supposait que cette étape définitive arriverait
déjà au seuil du XXème siècle, lorsque les idées

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 93


spirites devraient atteindre leur apogée, ouvrant le
cycle de la régénération de l’humanité.
Nous avons pris du retard dans ce processus, et
cela n’a été ni par erreur des Esprits, ni de Kardec.
Le spiritisme, grâce à la modélisation que lui
conféreraient les segments humains auto-chargés
de lui donner une forme institutionnelle, a décidé de
se perpétuer comme une religion de plus dans un
monde qui en est déjà saturé. Et, comme Léon Denis
l’a très bien dit, «le spiritisme sera ce que les spirites
en feront»41, et c’est ainsi qu’il a été pratiqué et perçu
par les spirites et, par conséquent, par tous ceux qui
le contemplent de l’extérieur.

Penseur et écrivain français, grand


diffuseur des œuvres de Kardec
dans les années qui ont suivi la
désincarnation du fondateur du
spiritisme.
Léon Denis
(1846-1927)

Cependant, le nombre de courants qui ne


parviennent plus à emprisonner les idées spirites dans
le cercle fermé d’une «religion» augmente à un rythme
accéléré en ces premières décennies du XXIe siècle.

94 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Ils les conçoivent, à juste titre, comme un vaste
et généreux champ de propositions libératrices,
avec des conditions réelles pour vaincre les plus
grands maux du siècle: le fanatisme, le sectarisme,
l’extrémisme et le fondamentalisme.
L’esprit, base concrète et sensible de la proposition
spirite, n’a pas de religion. Il est régi par des lois
naturelles qui tendent vers la perfection, grâce au
développement progressif de la connaissance et
de l’éthique, dans une perspective d’union et de
fraternité avec ses compagnons de route.
Les religions traditionnelles elles-mêmes, partout
dans le monde, se rendent compte de cela et, au fur
et à mesure que le temps passe, elles abandonnent
progressivement les formules, réinterprètent leurs
dogmes et relativisent leurs hiérarchies pour accorder
plus de valeur à la construction pluraliste et conjointe
des valeurs. Des valeurs qui, d’ailleurs, ne sont plus
imposées par des dogmes révélés, mais reconnues
comme étant le fruit de l’expérience humaine, de la
coexistence entre les inégaux et de la source gardée
dans la conscience humaine où, selon la question 621
du Livre des Esprits, s’inscrit la loi naturelle.
Ceci est particulièrement visible dans le discours
assumé par l’Église catholique, le plus important
conducteur de la religiosité en Occident, de l’Antiquité

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 95


à l’époque contemporaine. À chaque instant - non
sans provoquer la réaction de ses ailes les plus
conservatrices et d’autres composantes chrétiennes
fondamentalistes - elle reprend à son compte les
valeurs éthiques dictées par la laïcité, abordant des
sujets tels que la sexualité, les relations sociales et
humaines, la tolérance et le pluralisme. Il convient de
souligner ici le caractère profondément humaniste
du cardinal argentin Jorge Mario Bergoglio, actuel
Souverain Pontife de l’Église romaine. Depuis son
élection au pontificat en 2013, sous le nom de
François, Bergoglio s’est battu vigoureusement pour
l’adoption d’une politique progressiste, fondée sur
ces valeurs de construction laïque.
L’éthique naturelle supplante la morale religieuse.
Celle-ci a vu le jour à une époque où, pour être
valide, il était nécessaire d’avoir la sanction, même
hypothétique, d’un dieu. En revanche, la loi morale, fruit
de la raison et des expériences humaines, préserve la
flamme divine qui lui est intrinsèque, tirée de la «cause
première de toutes choses», telle que Dieu est conçu
dans la question inaugurale de Le Livre des Esprits12.
S’il en est ainsi - et le courant laïc du spiritisme,
dont le CEPA fait partie, comprend que c’est
effectivement le cas - la voie ouverte par Allan Kardec,
lorsqu’il publia «Le Livre des Esprits» en 1857, conduit,

96 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


bien que moins rapidement que son fondateur ne
l’avait imaginé, au renforcement du spiritisme dit laïc
et libre-penseur.
On peut soutenir qu’en cessant d’être considéré
comme une religion, le spiritisme perd un peu de
sa vigueur en tant que mouvement institutionnalisé,
dans des pays comme le Brésil. Ici, plusieurs
recensements statistiques le placent comme la 3ème
religion en nombre d’adeptes, dépassée uniquement
par le catholicisme et les religions évangéliques.
Cependant, à mesure que les propositions spirites
telles que l’immortalité de l’Esprit, la communicabilité
de ceux-ci, les vies successives de l’Esprit, etc., se
popularisent en tant qu’idées naturelles, le véritable
spirite ne devrait pas s’inquiéter outre mesure de
son insertion comme une religion de plus dans le
monde. Si aujourd’hui, par exemple, au Brésil, on
demande aux catholiques s’ils acceptent l’idée de
la réincarnation, un principe popularisé ici par le
spiritisme, la grande majorité d’entre eux diront
probablement oui. Et cela ne les empêchera pas de
se déclarer catholiques, en raison d’une tradition,
d’une culture historique profondément enracinée.
Le spiritisme ne rivalise pas avec les religions. Son
champ d’action est différent. Il se situe dans le domaine
de la philosophie, en tant qu’expression d’une

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 97


rationalité qui fournit des réponses convaincantes sur
la nature, l’origine et la destinée de l’être intelligent.
Il peut dialoguer avec les sciences, dans la mesure
où il propose une méthodologie capable de fournir
un soutien factuel et expérientiel à ces conceptions
philosophiques. Il contribue à l’éthique, en permettant
d’extraire de sa vision de l’homme et du monde des
conséquences comportementales nécessairement
solidaires, égalitaires et fraternelles, capables de
produire du bonheur.
À la question de savoir quelles sont les perspectives
d’un spiritisme laïc et libre-penseur, représenté
aujourd’hui par l’une de ses ailes, encore minoritaire,
il faut nécessairement répondre qu’elles correspondent
à l’attente même de ceux qui l’ont conçu et projeté
dans sa voie naturelle. Le détourner de cette voie,
en le maintenant prisonnier du sectarisme religieux,
dogmatique, immobilisé et antiprogressiste, c’est
attenter à sa propre identité, le pousser au suicide,
comme Allan Kardec lui-même l’a tant de fois mis en
garde.
Au contraire, vu sous cet angle - laïque et libre-
penseur - et non pas comme une religion, l’essence
du spiritisme doit avoir une longue vie. Il se peut
que le spiritisme, en tant que courant philosophique,
cesse même d’exister dans un avenir encore

98 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


lointain, mais théoriquement possible. Cependant,
il subsistera en tant que proposition humaniste,
spiritualiste et libre-penseuse. Il sera alors rappelé
comme un repère historique précurseur d’une
nouvelle ère placée sous l’égide de l’ESPRIT, en tant
que «principe intelligent de l’univers» (question 23
du Livre des Esprits).
Alors, lorsque ses principes seront reconnus
par tous comme des expressions de la loi naturelle
elle-même, et non pas comme une croyance de
quelques-uns, il aura accompli pleinement sa mission.
Ainsi, il n’aura pas besoin de subsister en tant que
courant différencié, qu’il soit religieux, philosophique
ou scientifique, en conservant une dénomination
propre, car ses principes auront acquis une validité
générale et incontestable.
Tant qu’il sera perçu, à la fois en interne et en
externe, comme une religion, le spiritisme ne sera
pas totalement libéré du sectarisme qu’il combat. En
proposant, comme il le fait, l’adoption d’un nouveau
paradigme pour régir la connaissance et l’éthique,
ce n’est que dans une culture entièrement laïque et
libre-penseuse qu’il trouvera le terrain propice à son
plein épanouissement.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 99


SUGGESTIONS DE LECTURES
INTÉRESSANTES
Auteurs divers. Carta de Posicionamentos da CEPABrasil,
documento aprovado em A. Geral, de 05.09.2010, em Bento
Gonçalves-RS. Lien d’accès: https://www.cepabrasil.org.br/portal/
quem-somos/manifestos/cartas/485-carta-de-posicionamentos-
da-cepabrasil.
Auteurs divers. A CEPA e a Atualização do Espiritismo. Porto
Alegre: CCEPA-Centro Cultural Espírita de Porto Alegre - Imprensa
Livre, 2001. Lien d’accès: https://pt.scribd.com/document/13797500/
CEPA-A-Cepa-e-a-Atualizacao-do-Espiritismo.
Auteurs divers. Espiritismo: O Pensamento Atual da CEPA”. Porto
Alegre: CCEPA-Centro Cultural Espírita de Porto Alegre - Imprensa
Livre, 2002. Lien d’accès: https://pt.scribd.com/document/13797629/
CEPA-Espiritismo-O-Pensamento-Atual-da-Cepa.
Aizpúrua, Jon. Os Fundamentos dos Espiritismo. São Paulo:
Editora C. E. José Barroso, 2000.
Régis, Jaci. “Doutrina Kardecista – Modelo Conceitual (reescre-
vendo o modelo espírita)”. Santos: ICKS - Instituto Cultural
Kardecista de Santos, 2008.
Dias, Krishnamurti de Carvalho. O Laço e o Culto. Santos:
DICESP Editora, 1985.
Silva, Gélio Lacerda. Conscientização Espírita. Capivari-SP:
Editora Opinião, 1995.

100 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


SUGGESTIONS DE SITES
INTERESSANTS
https://cepainternacional.org/site/

https://www.autoresespiritasclassicos.com/

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 101


RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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2. —. Revista Espírita: Jornal de Estudos Psicológicos. São Paulo:
Edicel, 1966. Vol. Onzième année: 1868.
3. Carvalho, Herivelto. A laicidade como aspecto inerente do
espiritismo. 272, Porto Alegre: CCEPA, abril de 2019, Opinião,
pp. Lien d’accès: http://ccepa-opiniao.blogspot.com/
(2019/04/jornal-ccepa-opiniao-272-abril-2019.html)
4. Grossvater, David. Espiritismo Laico. s.l.: Editores Mexicanos
Unidos, 1966.
5. Aizpúrua, Jon. A CEPA e o Laicismo. [A. do livro] CEPA -
Confereração Espírita Pan-americana. Espiritismo: o pensa-
mento atual da CEPA. Porto Alegre: Imprensa Livre, 2002.
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mo: a trajetória do Centro Cultural Espírita de Porto Alegre.
Porto Alegre: Imprensa Livre, 2006.
7. Ferreira, Aurélio Buarque de Holanda. Novo Dicionário da
Língua Portuguesa. Rio de Janeiro: Editora Nova Fronteira,
1986. p. 1004.

102 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


8. Kardec, Allan. O Evangelho Segundo o Espiritismo.
São Paulo: FEESP, 1989.
9. —. Revista Espírita: Jornal de Estudos Psiclógicos. São Paulo:
Edicel, 1966. p. 6.
10. Pires, José Herculano. Curso Dinâmico de Espiritismo.
São Paulo: Edicel, 1979.
11. Kardec, Allan. Revista Espírita: Jornal de Estudos Psicológicos.
São Paulo: Edicel, 1967. Vol. Douzième année: 1859 (mai).
12. —. O Livro dos Espíritos. Rio de Janeiro: FEB, 2006.
13. —. O Livro dos Médiuns. Rio de Janeiro: FEB, 1977.
14. —. O Céu e o Inferno. Rio de Janeiro: FEB, 1975.
15. —. A Gênese, os Milagres e as Predições Segundo o
Espiritismo. São Paulo: FEAL, 2018.
16. Carvalho, Herivelto. Da Espanha às Américas: a trajetória
da tradição espírita livre-pensadora. 326, Santos: s.n.,
octobre 2016, Jornal Abertura.
17. Aizpúrua, Jon. O laicismo na história do espiritismo
venezuelano e na América Latina. [e-mail] Caracas,
Venezuela: s.n., 2019.
18. Stoll, Sandra Jacqueline. Espiritismo à Brasileira.
São Paulo: EDUSP - Universidade de São Paulo, 2003.
19. Machado, Ubiratan.Os Intelectuais e o Espiritismo. Rio de
Janeiro: Antares / Instituto Nacional do Livro, 1983.
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Janeiro: FEB, 1978. Vol. dicté par Espírito Emmanuel.
21. Quintella, Mauro. O tríplice aspecto do espiritismo. [Online]
[Citado em: 10 de février de 2020.] https://mauroquintella.blog.
br/2019/05/03/a-construcao-da-teoria-do-triplice-aspecto/.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 103


22. Xavier, Francisco Cândido. O Consolador (espírito
Emmanuel). Rio de Janeiro: FEB, 1985.
23. Imbassahy, Carlos. Religião. Rio de Janeiro: FEB, 1981.
24. Mariotti, Humberto. Parapsicologia e Materialismo Histó-
rico. Edicel: São Paulo, 1983.
25. Porteiro, Manuel S. Espiritismo Dialético. Barcelona:
Edicomunicación, 1990.
26. Lavigne, Eusínio e Prado, Souza do. Os espíritas e as
questões sociais. Rio de Janeiro: Editora Renovação, 1955.
27. Netto, Jacob Holzmann. Espiritismo e Marxismo. Campi-
nas: Edições “A Fagulha”, 1970.
28. Amorim, Pedro Paulo. O Movimento Universitário Espírita
– MUE e suas divergências no interior do Movimento Espírita
Brasileiro, disponível em: http://www.encontro2014.sc.anpuh.org/,
acesso em 10 de fev. 2020.
29. Federação Espírita Brasileira (Editorial). O Joio e o Trigo.
Rio de Janeiro: FEB, novembro de 1994, Reformador, p. 6.
Lien d’accès: http://www.sistemas.febnet.org.br/acervo/
revistas/1994/WebSearch/page.php?pagina=322.
30. Figueiredo, Paulo Henrique de. Autonomia: a história
jamais contada do espiritismo. São Paulo: FEAL, 2019.
31. Kardec, Allan. A Gênese, os Milagres e as Predições
Segundo o Espiritismo. São Paulo: FEAL, 2018.
32. Dias, Krishnamurti de Carvalho. O Laço e o Culto: é o
espiritismo uma religião? Santos: DICESP, 1985.
33. Kardec, Allan. Obras Póstumas. Rio de Janeiro: FEB, 1975.

104 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


34. Xavier, Francisco Cândido. Brasil: Coração do Mundo,
Pátria do Evangelho. Rio de Janeiro: FEB, 1938. Vol. Dicté
par Espírito Humberto Campos (Irmão X).
35. Kardec, Allan. Revista Espírita: Jornal de Estudos Psicoló-
gicos. São Paulo: Edicel, 1966. Vols. Décimo primeiro ano
- julho de 1868.
36. Diversos, Autores. A CEPA e a Atualização do Espiritismo.
Porto Alegre: CCEPA-Centro Cultural Espírita de Porto
Alegre. Imprensa Livre, 2001.
37. Reis, Ademar Arthur Chioro dos. Como? Uma Proposta
Metodológica para o Processo Permanente de Atualização
do Espiritismo. [A. do livro] Autores Diversos. A Cepa e
Atualização do Espiritismo. Porto Alegre: CCEPA - Centro
Cultural Espírita de Porto Alegre. Imprensa Livre , 2001.
38. Régis, Jaci. A Dificuldade de Aceitar o Novo. [A. do livro]
Autores Diversos. Espiritismo: o pensamento atual da CEPA.
Porto Alegre: Centro Cultural Espírita de Porto Alegre.
Imprensa Livre, 2002.
39. Kardec, Allan. Revista Espírita: Jornal de Estudos Psicoló-
gicos. São Paulo: Edicel, 1966. Vol. Sixième année: 1863.
40. Pires, José Herculano. Ciência Espírita e suas Implicações
Terapêuticas. São Paulo: Ed USE, 1995.
41. Denis, Léon. No Invisível. Rio de Janeiro: FEB, 2008.
42. Kardec, Allan. Revista Espírita: Jornal de Estudos Psicoló-
gicos. São Paulo: Edicel, s/d. Vol. Décimo primeiro: 1868.
43. —. Revista Espírita: Jornal de Estudos Psicológicos.
São Paulo: Edicel, 1966. Vol. Deuxième année: 1859.

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 105


À PROPOS DES AUTEURS

Milton Rubens Medran Moreira


Procureur de justice à la retraite de Rio Grande do Sul,
avocat et journaliste. Il a fait partie des cadres dirigeants de la
Fédération Spirite de Rio Grande do Sul, où il a occupé le poste
de Directeur du Département de Communication Sociale,
après avoir dirigé la revue «Réincarnation» de cette fédération.
Depuis 1983, il est membre du Centre Culturel Spirite de Porto
Alegre dont il a été le Président. Il a fondé et dirige depuis
26 ans le journal «CCEPA OPINION»,
organe officiel de cette institution spirite.
Auteur de plusieurs livres spirites,
parmi lesquels «Droit et Justice, un
Regard Spirite», «Si Tous étaient Égaux»,
«L’Esprit d’un Nouveau Temps ou Un
Nouveau Temps pour l’Esprit». Il a
traduit en portugais «Histoire de la
Parapsychologie», de Jon Aizpúrua.
Ancien Président de la CEPA (2000/2008).

106 Le spiritisMe dans la perspective laÏque et liBre-penseuse


Salomão Jacob Benchaya
Économiste, membre du Centre Culturel Spirite de Porto
Alegre (CCEPA) depuis 1974, dont il a été président à plusieurs
reprises. Il a été directeur doctrinal de la FERGS-Fédération
Spirite de Rio Grande do Sul de 1978 à 1987 et son président
de 1984 à 1987, où il a coordonné la création de l’ESDE -
Étude Systématique de la Doctrine Spirite en 1978.
Il est délégué spécial de la CEPA et son Secrétaire Général lors
de la gestion de Milton Medran (2000-2008) et dans la gestion
actuelle de Jacira Jacinto da Silva.
Il a organisé le XVIIIème Congrès de
la CEPA en 2000 à Porto Alegre-RS et
a également coordonné les livres «La
CEPA et l’actualisation du Spiritisme»
et «Spiritisme: La pensée actuelle de
la CEPA». Il est l’auteur du livre «De la
Religion Spirite au Laïcisme: la trajectoire
du Centre Culturel Spirite de Porto
Alegre».

Collection de la LiBre Pensée: un spiritisMe pour le XXIE siÈcle 107


A propos du livre:
Format: 11,5 cm x 16 cm
En typologie: Segoe UI - 11/14
COLLECTION LIBRE-PENSÉE:
LE SPIRITISME AU 21E SIÈCLE
Série 1 - Questions fondamentales

Livre 1 - Le spiritisme dans une perspective laïque et


de libre-pensée
Livre 2 - L’immortalité de l’âme
Livre 3 - Médiumnité: Échange entre deux mondes
Livre 4 - Reflexions sur l’idée de Dieu
Livre 5 - La réincarnation: un paradigme existentiel
révolutionnaire
Livre 6 - L’évolution des esprits, de la matière et des
mondes
Livre 7 - Spiritisme, éthique et morale
Livre 8 - Allan Kardec: fondateur du spiritisme

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