Pi Women's Leadership Participation Overview 070208 FR

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1.

Leadership et
participation
des femmes
Vue d’ensemble
Introduction
Pourquoi soutenir la participation et le leadership des
femmes ?
Partout dans le monde, le fardeau de la pauvreté est porté de
façon disproportionnée par les femmes. Cette pauvreté se
traduit au niveau matériel, mais aussi en termes de
marginalisation : les personnes qui vivent dans la pauvreté
n’ont généralement pas (ou peu) d’opportunités d’influencer les
processus politiques, économiques et sociaux, ainsi que les
institutions qui contrôlent et façonnent leur vie et les enferment
dans le cycle de la pauvreté.
Pour les femmes pauvres, l’expérience de la marginalisation est
double. Appartenant à des communautés « en marge de la
société », les femmes se voient en outre refuser la parole au sein
des États, des marchés, des communautés et des ménages où
elles vivent. Ces structures restent en effet dominées par les
hommes et leurs intérêts. La faible voix des femmes constitue
un facteur important du maintien de l’inégalité de genre et de la
pauvreté car elle empêche les femmes d’accéder aux processus
de décision et d’établissement de l’agenda. Cette situation
contribue à l’invisibilité des femmes en tant qu’acteurs publics
et constitue une négation de leurs droits à la participation. Cet
état de fait maintient un processus décisionnel qui représente
moins les intérêts des femmes et qui ne possède donc ni la
vision ni l'ambition de défier ou de changer les relations de
genre inégales dans la société.
La participation et le leadership des femmes à tous les niveaux et
dans tous les secteurs sont donc fondamentaux pour lutter contre la
pauvreté liée au genre. Afin de défier les systèmes économiques et
sociaux inégaux non durables dans lesquels nous vivons, et pour
sécuriser les ressources essentielles dont les femmes ont besoin pour
jouir d'une vie digne et gratifiante, il a été déclaré que les femmes ont
besoin… « d’être politiquement visibles en tant que femmes et d’être
habilitées à agir à ce titre, car… elles… ont des besoins et des
attitudes en ce qui concerne des problèmes vitaux différents de ceux
des hommes 1 . » La présence des femmes dans un nombre
considérable de corps élus et d’institutions économiques pourrait
donner lieu à des résultats politiques plus équitables car cela
encouragerait les décideurs politiques à prêter plus d’attention aux
problèmes qui touchent les femmes, tels que les salaires, les
conditions de travail, la prise en charge des enfants, la violence et le
travail non salarié 2 . Les politiques économiques peuvent également
reconnaître la valeur du travail social non rémunéré (effectué en
grande partie par les femmes) comme un atout à maintenir et
développer.
En Norvège, les femmes parlementaires sont à l’origine des
« politiques de prise en charge » qui obligent l’État à augmenter les
services publics de prise en charge des enfants, à accroître les congés
parentaux et les horaires souples, et à améliorer les droits à la pension
pour les travailleurs sociaux 3 . En Afrique du Sud, les femmes
parlementaires ont lancé, pour la première fois au monde, un
processus d’élaboration du budget selon le genre afin d’analyser les
dépenses de l’État dans une perspective de genre et d’allouer des
ressources pour les besoins des femmes 4 . Le seul fait qu’un nombre
croissant de femmes occupent une position de leadership ne garantit
pas automatiquement que les préoccupations des femmes figurent à
l’agenda. Toutefois, lorsqu’un nombre critique de femmes – plus d’un
tiers – se retrouvent au pouvoir, les intérêts communs des femmes en
tant que femmes se font davantage entendre, comme l’illustrent les
deux exemples ci-dessus 5 .
La participation et le leadership des femmes sont une condition
essentielle à la réduction de la pauvreté et à la lutte contre l’inégalité
de genre. Mais il s'agit aussi, et surtout, de droits humains
fondamentaux. Les traités et les conventions internationaux sur les
droits humains – tels que la Convention sur l’élimination de toutes
formes de discriminations à l’encontre des femmes (CEDAW) 6 , le
Programme d’action de Pékin 7 et le troisième objectif du Millénaire
pour le développement sur l’égalité de genre – reconnaissent que les
femmes ont le droit de participer sur un pied d’égalité avec les
hommes à tous les niveaux et aspects de la vie publique et aux prises
de décisions, qu’il s’agisse de décider comment dépenser le revenu
du ménage ou gouverner un pays. De telles conventions engagent les
signataires à atteindre cet objectif.

1 Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
En dépit des engagements de promotion de l’égalité de genre au sein
des structures formelles de représentation et de prise de décision, les
femmes continuent d'être sous-représentées dans tous les secteurs
décisionnels. Elles font encore et toujours face à des barrières
importantes à leur participation pleine et égale aux structures et
institutions qui gouvernent et affectent directement leur vie.
En quoi la participation et le leadership des femmes sont-ils
essentiels au travail d’Oxfam GB ?
Oxfam GB est une organisation humanitaire, de développement et de
campagne qui fonde son travail de lutte contre la pauvreté et la
souffrance sur le respect des droits. En association avec d’autres
organisations, Oxfam GB a depuis de nombreuses années cherché à
assurer le respect du droit des femmes à une participation égale dans
l’élaboration et la mise en place des programmes. Ceci est nécessaire
pour que les femmes jouissent d’une plus grande influence sur les
décisions qui touchent leur vie. Mais il existe une tendance croissante
à aller plus loin et à soutenir le leadership des femmes dans les
institutions et processus qui perpétuent les inégalités de genre en
matière de richesses et de pouvoir – et qui renforcent dès lors la
négation des droits des femmes. Ce travail passe notamment par un
soutien et un encouragement particuliers à un leadership visant
explicitement à faire cesser ces inégalités.
Ce recueil d’articles sur le programme de leadership et de
participation des femmes distille les leçons tirées de programmes
soutenus à travers le monde par Oxfam GB et ses partenaires. Des
études de cas menées aux Philippines, en Israël et au Royaume-Uni
détaillent les projets de soutien des femmes au sein des organisations
de la société civile afin d'accroître leur participation et leur leadership
dans la sphère économique. Quatre articles – sur la Sierra Leone, le
Honduras, le Cambodge et Haïti – décrivent les programmes mis en
place pour encourager la participation politique des femmes dans les
structures formelles du gouvernement. Enfin, l’étude de cas du Chili
souligne le lien important qui existe entre la visibilité croissante des
femmes dans les secteurs socio-économiques et la promotion du droit
à l’emploi au niveau politique.
Les activités décrites ci-dessus ont été menées à tous les niveaux : du
travail communautaire avec des femmes marginalisées en Grande-
Bretagne aux représentants et ministres élus en Sierra Leone, au
Honduras et en Haïti afin que ceux-ci incorporent une analyse de
genre et de pauvreté. Une conclusion ressort clairement de toutes ces
études : partout où ces activités sont menées apparaît le besoin de
surmonter les stéréotypes, attitudes et croyances qui continuent à
limiter les possibilités des femmes de développer leur potentiel en
tant que citoyennes actives et dirigeantes. Si toutes les femmes sont
touchées par ces stéréotypes, ce sont surtout celles qui vivent dans la
pauvreté qui font face aux principaux préjugés. Et ce non seulement à

Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble 2


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
cause de leur identité sexuelle, mais aussi à cause de leur classe (ou
caste), niveau d’éducation, de leur identité raciale ou ethnique qui les
rendent, aux yeux des élites, « inaptes » pour des positions de
leadership et d’influence. Ces préjugés doivent être combattus à tous
les niveaux, y compris auprès des femmes qui réussissent à atteindre
des positions formelles de pouvoir et d’influence. Il ne suffit pas de
« faire accéder les femmes au pouvoir » : une fois en place, celles-ci
ont besoin de soutien et d’encouragement pour agir dans le meilleur
intérêt de toutes les femmes, d’en être tenues pour responsables et
d’influencer leurs pairs masculins à en faire de même.
Il ne s’agit pas ici de présenter des « solutions miracles » ayant des
impacts immédiats. Les changement s’effectuent progressivement,
par un soutien aux (futures) dirigeantes afin qu'elles s’engagent et
participent aux processus de décision qui permettent de lutter contre
les inégalités et l’injustice. Bon nombre de programmes présentés ici
ne sont pas en mesure de montrer concrètement comment la
participation et le leadership croissants des femmes ont amené des
changements positifs pour les femmes pauvres au-delà d'un niveau
très local (dans les études de cas d’Israël et du Cambodge, par
exemple). Ceci dit, ces études de cas présentent quelques exemples
utiles de « travaux en cours » destinés à rendre possible la
participation de femmes de tous horizons aux structures de décision
et à renforcer leur leadership afin d'opérer un changement réel et
positif pour les femmes pauvres et marginalisées.

Coup d'oeil sur la participation et leadership


des femmes dans le monde
Les institutions économiques
Dans le domaine de l’économie et des finances, les femmes
continuent à être fortement sous-représentées dans les institutions
locales, nationales et internationales. Au niveau des États, à peine
14% des ministres des finances sont des femmes (28 pays sur 193) 8 .
Les institutions internationales qui façonnent les politiques
économiques et sociales dans les pays en développement comptent
également peu de femmes dirigeantes : la Banque mondiale et le
Fonds monétaire international, par exemple, ne comptent que 20% de
femmes dans leurs équipes dirigeantes, et moins de 10%
d’administratrices 9 . Les femmes sont en outre terriblement absentes
des plus hauts niveaux dans les entreprises – seules 25 des 1.000
entreprises multinationales de haut niveau sont dirigées par des
femmes 10 . Le rôle croissant du secteur privé dans le développement
ne montre donc pas de signes prometteurs au niveau du
renforcement du pouvoir des femmes.
En dépit de l'implication des femmes dans de nombreux secteurs
économiques autrefois dominés par les hommes, la division du
travail selon les sexes est toujours bien réelle, que ce soit dans ou en

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Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
dehors du foyer et de la communauté. Au sein du ménage, les
femmes portent le fardeau du travail reproductif non rémunéré et du
travail social. Ce fardeau affecte leurs capacités à être actives en
dehors du foyer et à influencer les décisions économiques à l'intérieur
de celui-ci. Dans de nombreux foyers ruraux et pauvres, le rôle des
femmes dans l'exploitation et la production agricoles est souvent
méconnu et sous-estimé. De plus, lorsque les femmes travaillent en
dehors du foyer, elles ont souvent un statut inférieur et des emplois
informels offrant peu d'avantages et de protection. Même dans le
secteur formel, les femmes gagnent encore et toujours nettement
moins que les hommes : si elles représentent près de 40% de la force
de travail rémunérée mondiale, elles ne gagnent que 26% du revenu
mondial 11 . Et avec peu ou pas de voix dans les organisations et
institutions qui régulent ou contrôlent le secteur économique, ce
statut des femmes ne risque pas d'être contesté...
Point positif, le revenu des femmes et le choix de leurs carrières se
sont considérablement accrus durant les dernières décennies. Les
femmes font preuve d’un succès spectaculaire en ce qui concerne la
direction de leurs propres entreprises à travers le monde. En dépit de
cela, les femmes ne sont que rarement directrices ou propriétaires
d'entreprises.
Même les syndicats, coopératives et autres associations de
producteurs – qui sont supposés soutenir et représenter les droits de
tous les travailleurs – ne comptent que peu de femmes aux postes
décisionnels (à moins qu’il ne s’agisse de coopératives se consacrant
aux femmes). Les syndicats sont particulièrement dominés par les
hommes. Les besoins et les priorités des travailleuses sont donc
souvent ignorés. Les types de travaux effectués par les femmes et la
fréquente précarité de leur emploi freinent également leur capacité
d'influence sur les politiques des syndicats traditionnels.
Les institutions politiques
Aujourd'hui, les femmes ont obtenu le droit de vote dans la majorité
des pays. Cependant, seule une scandaleuse minorité de femmes
accèdent à des positions de leadership politique. À l’échelle
mondiale, seuls 17,4% des représentants politiques nationaux sont
des femmes, et à peine 15 pays ont atteint le seuil de 30% de femmes
au sein des gouvernements nationaux 12 . De plus, seuls 3,5% des
postes ministériels supérieurs sont occupés par des femmes dans le
monde. Dans les hautes sphères du gouvernement, les femmes n’ont
donc que peu d’opportunités de façonner les politiques 13 . Dans les
sphères inférieures – les institutions gouvernementales régionales et
sous-régionales jouant souvent un rôle dans l’accès aux services
essentiels et aux ressources – les femmes brillent aussi par leur
absence. Les femmes des milieux pauvres ou appartenant à des
ethnies ou groupes minoritaires (basés par exemple sur leur identité
sexuelle, leur (in)capacité, ou leur séropositivité) sont

Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble 4


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
particulièrement sous-représentées dans les structures politiques
formelles.
Il existe cependant des signes d’amélioration. Depuis 1995, la
proportion moyenne de femmes dans les assemblées nationales a
presque doublé. Des progrès considérables ont été faits dans certaines
parties d’Afrique. Six pays africains ont aujourd'hui de meilleurs
profils que l'Europe et que les pays de l’OSCE (Organisation pour la
Sécurité et la Coopération en Europe) en matière de représentation
des femmes, à l'exception notable des pays scandinaves 14 . La récente
arrivée au pouvoir de chefs d’État comme Ellen Johnson-Sirleaf au
Liberia et Michelle Bachelet au Chili indique également une
acceptation croissante de la légitimité des femmes dirigeantes.
L’élection de Bachelet est particulièrement porteuse d'espoir vu que
sa campagne se basait sur l’égalité en matière de genre et sur les
droits des femmes. Cet agenda est actuellement transposé en
décisions politiques concrètes renforçant les droits des femmes au
Chili, telles que l’augmentation des services de garde d’enfants pour
les femmes à faibles revenus et la l'autorisation de l’accès aux
contraceptifs d’urgence.
Les institutions de la société civile
L'absence historique de femmes dans les gouvernements formels et
les barrières structurelles auxquelles elles font face ont poussé de
nombreuses femmes à se tourner vers des postes de direction dans les
organisations de la société civile afin d'obtenir les changements et les
réponses à leurs questions 15 . En Israël et dans les Territoires
palestiniens occupés, les femmes pauvres sont marginalisées au sein
de leurs propres communautés et de la société israélienne en général.
Mais elles ont néanmoins réussi à exercer une influence grâce à leur
activisme au sein des organisations actives sur la question des droits
des sans emploi.
Cependant, même au sein des ONG et des organisations de la société
civile (qui se veulent représentatives de « la communauté »), les
femmes sont moins enclines que les hommes à occuper des postes de
direction. Leurs intérêts sont donc ici aussi moins présents à l’agenda.
Les organisations de la société civile risquent également d'être
dominées par les intérêts des membres plus puissants et plus riches
de la communauté , marginalisant une fois encore les priorités et les
expériences des femmes les plus pauvres. En réponse à cela, les
femmes ont fondé leurs propres organisations, mais celles-ci sont
souvent écartées des processus politiques et peuvent en outre refléter
les intérêts de femmes jouissant de postes relativement influents et
puissants, plutôt que ceux des sphères sociales inférieures.

5 Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
Obstacles à la participation et au leadership
des femmes et stratégies pour les surmonter
De nombreux facteurs limitent la capacité des femmes à participer et
à occuper des postes de direction sur un pied d’égalité avec les
hommes. Ces facteurs affectent toutes les femmes, pauvres ou non.
Mais leur impact est toujours plus profond sur les femmes pauvres.
L’inégalité institutionnelle entre les femmes et les hommes ainsi que
la façon dont s’organisent les systèmes politiques et économiques
constituent un défi pour toutes les femmes qui luttent pour une
participation égale et souhaitent occuper des postes de direction. Le
scepticisme et la méfiance quant à la capacité des femmes à diriger –
ainsi que les stéréotypes et préjugés quant à leur rôle dans la société
et à leur manque de qualités pour les postes de direction – sont des
défis majeurs pour toutes les femmes.
Les femmes qui vivent dans la pauvreté font face à une série
d'obstacles supplémentaires. Le manque d’éducation et les faibles
taux d’alphabétisation rendent l’accès à l’information difficile et
mettent généralement à mal la confiance et le savoir-faire nécessaires
pour entrer dans la vie publique (que ce soit dans un village, dans
une communauté, au niveau local ou national). Le manque de
ressources financières limite les opportunités et la confiance des
femmes pauvres à revendiquer et garder des postes de direction.
Leur pauvreté ne leur permet pas non plus de se payer des aides
pour s'occuper des personnes à charge, élément crucial pour
conjuguer vie publique active et vie privée. Les femmes disposent
généralement de moins de réseaux, contacts et expériences sociales et
professionnelles attendus de la part de dirigeants. Les femmes qui
vivent dans la pauvreté portent le lourd fardeau du travail
reproductif au sein de la famille ; dans de nombreux contextes, cela
inclut la collecte de combustibles et d’eau, et la culture de subsistance
pour nourrir la famille. Le temps est donc une ressource critique :
pour les femmes pauvres, participer à des prises de décision au-delà
de leurs besoins immédiats représente un « fardeau »
supplémentaire. Les restrictions de mobilité des femmes – qu’elles
soient culturelles, légales ou le résultat de la peur de la violence et du
harcèlement en quittant la communauté – peuvent rendre les voyages
très difficiles pour les femmes (assister aux réunions, à des groupes
de discussion...). Cela limite également les possibilités des femmes à
mener campagne lors d'élections à des postes formels de pouvoir.
Enfin, les femmes qui vivent dans la pauvreté sont plus exposées à
certains risques et vulnérabilités liés au genre comme le VIH, le
handicap ou la violence. Ces divers éléments exacerbent l'incapacité
des femmes à participer à la vie en société sur un pied d’égalité avec
les hommes.
De ce fait, les audits-genre s'avèrent être un outil important. Ils
permettent d'évaluer les facteurs qui restreignent les opportunités de

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Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
participation des femmes dans un contexte particulier, et de trouver
des manières de surmonter ces obstacles. L’étude de cas menée aux
Philippines se penche ainsi sur l'impact de la libéralisation du
commerce sur le bien-être des femmes. De même, en Israël, le
partenaire d'Oxfam GB (Sawt el-Amel) a mené une évaluation des
besoins participatifs afin de déterminer comment les femmes sont
touchées par le Plan Wisconsin, un nouveau programme « d’aide
sociale au travail ».
D'une façon générale, trois domaines doivent faire l'objet d'une
attention particulière :
• surmonter les barrières structurelles ;
• encourager et soutenir les femmes afin que celles-ci accèdent à
des postes de direction ou participent aux prises de décisions
sur un pied d’égalité avec les hommes ;
• encourager les femmes et les hommes à occuper des postes de
direction qui leur permettent de reconnaître et promouvoir les
droits des femmes et de lutter contre les inégalités de richesse
et de pouvoir.
Ces domaines vont à présent être examinés en profondeur. Les
exemples sont tirés d’études de cas inclus dans ce recueil.
Surmonter les barrières structurelles à la participation et au
leadership des femmes
La réforme législative
Dans la sphère politique, la façon dont les élections sont organisées
ou menées – en particulier en matière de sélection des candidats –
pose des problèmes particuliers aux femmes, qu’il s’agisse du fait
d’être choisi pour des élections par circonscription ou d'apparaître
sur une liste de candidats. Le manque de connaissances, d’accès aux
réseaux de patronage ou de soutien financier ainsi que les préjugés à
l’encontre des femmes candidates forment des barrières à la
participation des femmes lors d'élections à des postes publics, et ce à
tous les niveaux de représentation. En Sierra Leone, par exemple, les
femmes candidates ont rapporté que les partis politiques retiraient
souvent les femmes des listes en dernière minute, les remplaçant par
des candidats masculins qui, disent-ils, étaient plus enclins à gagner
un siège.
Dans ces conditions, les réformes électorales peuvent fournir de
nouvelles opportunités pour les femmes qui souhaitent occuper des
fonctions dirigeantes dans l’arène politique. La mise en œuvre de
quotas et de réservation de sièges a été un instrument clé pour la
représentation politique croissante des femmes, et plus de 40 pays ont
adopté des règles de quotas 16 afin de réguler la sélection ou l’élection
de femmes à des postes politiques. Dans plusieurs exemples inclus
dans ce recueil – Sierra Leone, Haïti, Honduras – informer les

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Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
électrices des changements législatifs et faire pression pour la mise en
œuvre ou l’extension de quotas pour les candidates ont été des
activités centrales du programme de participation et de leadership
des femmes. Cependant, les intérêts des femmes en tant que groupe
collectif n’ont pas nécessairement progressé grâce aux quotas. Les
femmes qui accèdent aux postes de dirigeants peuvent en effet ne pas
être au courant (ou ne le veulent pas) du besoin de défendre les droits
des femmes et d’influencer leurs homologues masculins à en faire de
même. Les quotas risquent de subir des manipulations politiques ou
de n'avoir qu'un pouvoir transformatif limité 17 s'ils sont utilisés
isolément ou considérés comme suffisants pour amener une plus
grande égalité. Si la volonté politique manque pour mettre en œuvre
des quotas et si aucun mécanisme n’existe pour imposer leur respect,
les partis politiques et les structures de l’État les ignoreront tout
simplement, comme l’illustre l’exemple du Honduras.
Les politiques de décentralisation ont été particulièrement
importantes pour accroître la représentation des femmes au niveau
local. Ces politiques donnent aux gouvernements locaux et régionaux
(plutôt qu’au gouvernement central) le pouvoir de prendre des
décisions concernant les services locaux tels que la santé, l’éducation
et l’hygiène. Puisqu'il est plus facile pour les femmes d’être élues au
niveau local, la décentralisation peut leur donner une véritable
influence sur des décisions qui ont un impact direct sur la vie des
membres de leur communauté. L’introduction de politiques de
décentralisation au Cambodge et en Sierra Leone ont donc poussé
Oxfam GB et ses partenaires à soutenir les femmes candidates lors
des élections locales.
Augmenter la visibilité dans le secteur économique
Dans la sphère économique, la sous-représentation des femmes aux
postes de direction contribue : à la sous-estimation et au manque de
reconnaissance de leur contribution à l’économie (rémunérée ou
non) ; à l'imposition de conditions de travail et de processus de
production qui ne répondent pas à leurs besoins ; au manque d’accès
et de contrôle sur les ressources économiques ; à la concentration des
femmes sur le dernier maillon de la chaîne de rentabilité, ne leur
fournissant que de faibles bénéfices économiques.
Rendre visible la contribution des femmes dans le secteur
économique est un premier pas important pour renforcer leurs
opportunités de participation aux prises de décisions et leur accession
aux postes de direction dans ce secteur. Aux Philippines et au Chili,
Oxfam GB et ses partenaires ont mis en évidence les contributions
vitales des femmes dans le secteur de la pêche et de l’exportation
agricole. Aux Philippines, les « audits-genre » ont permis d'évaluer la
contribution des femmes à l’industrie de la pêche et ont mis en
lumière la façon dont les organisation de travailleurs freinaient la
participation active des femmes. Cela a révélé le besoin de créer des

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Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
structures de gestion plus inclusives et de dispenser des formations
au leadership pour permettre aux femmes de participer plus
efficacement. Afin de représenter et défendre les femmes
travailleuses au Chili, Oxfam GB a soutenu un réseau de travailleuses
agricoles et a facilité le lien entre les organisations actives sur les
droits des femmes, les syndicats et les principales organisations de la
société civile. Cela a suscité une plus grande prise de conscience de la
présence des femmes dans l’industrie de l’exportation agricole, ainsi
que de la vulnérabilité et de l’exploitation auxquelles les femmes sont
confrontées. Ces alliances ont ensuite fait pression, avec succès, pour
changer la législation nationale afin de protéger les droits des
travailleuses.
En Israël, l’introduction du Plan Wisconsin – un programme
impopulaire « d’aide sociale au travail » – a poussé les femmes de la
minorité arabe à agir. Ce plan avait en effet un impact négatif sur les
femmes et mettait en péril le bien-être des familles. Pour de
nombreuses femmes, c’était la première fois qu’elles prenaient part à
une quelconque activité publique. En agissant de la sorte, elles ont
libéré leur énorme potentiel de leadership et d’activisme, et se sont
rendues visibles au public en tant que groupe collectif. Ce fait fut pris
en compte par l'organisation de travailleurs Sawt el-Amel, partenaire
d’Oxfam GB : pour la première fois, les femmes sont maintenant
intégrées dans les structures de direction de cette organisation.
Changer les attitudes en faveur du leadership et de la participation
des femmes
Les attitudes traditionnelles et les croyances sur le rôle des femmes
dans la société continuent à alimenter les a priori des hommes et des
femmes en ce qui concerne la capacité de ces dernières à participer
pleinement à la vie publique. Ces attitudes incluent des stéréotypes
présentant les femmes comme dépendantes et inaptes au leadership
institutionnel et à la prise de décisions stratégiques. Certains mettent
même en question le « caractère moral » des femmes souhaitant
accéder à des postes de direction. En Sierra Leone, de nombreuses
femmes candidates ont déclaré avoir été confrontées à l’hostilité
d’électrices qui leur disaient de « rentrer chez elles, là où elles ont leur
place ». Dans bon nombre de contextes conservateurs, on interdit
fermement aux femmes de s’engager dans des activités en dehors du
foyer.
Lors du travail mené avec des femmes dans l’industrie de la pêche
aux Philippines, Oxfam et ses partenaires ont constaté qu'un obstacle
majeur à la participation et au leadership des femmes réside dans
l'acceptation, par ses dernières, de l’existence des rôles de relations de
genre. En réponse à cela, Oxfam GB a encouragé les femmes de
l’industrie de la pêche à reconnaître qu’elles ont le droit d’être elles
aussi dirigeantes et à reconsidérer les perceptions de genre sur « ce
qui fait un bon dirigeant ». Au Royaume-Uni, les femmes inscrites

9 Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
aux formations de participation économique et politique ne
ressentaient pas vraiment de sentiment de solidarité en tant que
femmes. Ce n'est finalement qu'en rencontrant d'autres femmes, en
identifiant et en discutant de problèmes communs, que les femmes
ont réalisé qu'elles faisaient face aux mêmes problèmes et que bon
nombre de ceux-ci étaient le résultat d’inégalités de genre et de
stéréotypes à l’égard de comportements masculins et féminins
« acceptables ». Ces exemples rappellent que tout travail dans le
domaine doit prévoir des activités qui questionnent les propres
perceptions des femmes en ce qui concerne leurs qualités de
leadership.
Encourager les hommes à être plus réceptifs à l’idée que des femmes
occupent des postes de pouvoir est également fondamental pour
s'attaquer à l’inégalité et à la discrimination. En Sierra Leone, le 50/50
Group (un partenaire d’Oxfam GB) dispense des formations au genre
aux politiciens et aux dirigeants, et cherche à identifier des
« champions » masculins en position d’autorité prêts à prendre la
parole en faveur du droit des femmes au leadership et à la
participation politique. Selon le 50/50 Group, de tels « champions »
sont cruciaux pour changer les attitudes des hommes et pour
encourager ceux qui rejettent la prédominance masculine et
soutiennent une participation et un leadership plus égaux à se faire
entendre.
Il est également vrai que les actes sont plus éloquents que les paroles.
Les femmes des communautés arabes d’Israël se sont ainsi mobilisées
contre l’impopulaire Plan Wisconsin. Au départ, quelques hommes se
sont opposés à la participation de leurs femmes et de leurs sœurs aux
manifestations publiques. Mais aujourd’hui, les hommes de ces
communautés se sont rendu compte des bénéfices apportés par
l’activisme et le leadership des femmes. La plupart se montrent
coopératifs et même contents de suivre le leadership des femmes
dans cette campagne. Dans une société où les rôles liés au genre sont
vus d’une façon très traditionnelle et où la mobilité et l’activité des
femmes sont contrôlées de près par les parents masculins, cette
évolution représente un changement radical dans les relations de
pouvoir de genre.
Faire face aux contraintes de temps et de mobilité des femmes
Parmi les nombreuses barrières auxquelles sont confrontées les
femmes qui désirent jouer un rôle plus actif dans le secteur politique,
économique et de la société civile, le manque de temps n'est pas le
moins important. Il existe un a priori « masculin » dans la culture du
travail de nombreuses institutions. La plupart favorisent les
dirigeants qui jouent un rôle traditionnel « masculin » dans la vie de
famille, aux dépens des personnes ayant un travail social non
rémunéré. Les femmes sont ici désavantagées car on attend
généralement d’elles qu’elles prennent en charge l’ensemble des

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Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
tâches domestiques et gardent les enfants, souvent en plus d’un
travail rémunéré en dehors du foyer. Les femmes mariées et plus
jeunes, en particulier, seront plus enclines à souffrir d'une « pauvreté
de temps » car elles sont responsables des soins à fournir à leurs
propres enfants, à leur époux et aux membres des familles étendues
de ce dernier. Dans de nombreux contextes, cette responsabilité
comprend aussi la collecte de combustible et d’eau et la production
de nourriture pour la famille.
Le manque de contrôle des femmes sur le fait d’avoir des enfants – et
quand les avoir – les empêchent de planifier leur participation aux
concours ou aux élections à des postes de leadership, et souligne
l’importance des droits reproductifs dans la participation et le
leadership. Les femmes qui ont réussi en tant que dirigeantes n’ont
généralement pas eu de personnes à charge, étaient suffisamment
riches pour payer la prise en charge des enfants (ainsi que d’aides
ménagères) ou ont eu la possibilité de déterminer la période et le
nombre d’enfants voulus. À long terme, les attitudes doivent
changer, et les tâches ménagères doivent être réparties de manière
plus égale entre tous les membres du foyer. À court terme, bon
nombre de programmes décrits dans ces études de cas ont fait en
sorte que la formation au leadership n’alourdisse pas le volume de
travail déjà important des femmes. Aux Philippines et au Honduras,
les femmes qui ont reçu une formation au leadership ont bénéficié de
gardes d’enfants gratuites ; au Royaume-Uni, la formation était
proposée pendant les jours d’école, et de telle façon que les
participants ne perdent pas l’accès aux prestations d’État.
Les restrictions de mobilité des femmes représentent également un
important obstacle à la pleine participation et à l’accès aux postes de
direction. Dans de nombreux cas, ces limitations sont culturelles.
Dans les communautés arabes d'Israël, par exemple, le fait que les
femmes soient actives en dehors du foyer n’est généralement pas
accepté, ce qui souligne l’importance de leur implication dans la
campagne contre le Plan Wisconsin. Dans d’autres contextes, ces
limitations peuvent être d’ordre pratique et économique, et sont
souvent liées au besoin de soins pour les jeunes enfants et à
l’incapacité de payer le transport et/ou la garde des enfants. Les
limitations peuvent aussi être le résultat du manque de confiance en
soi et d’expérience face aux voyages ou à la prise de parole en public.
Au Honduras, les partenaires d’Oxfam GB ont fourni aux femmes des
communautés pauvres et rurales des transports gratuits afin de
prendre part aux réunions avec les candidats aux élections et de
participer aux processus démocratique. Des gardes d’enfants
gratuites ont également été proposées aux femmes indigènes et
rurales qui participaient aux formations au leadership dans une
« école de plaidoyer ». Au Royaume-Uni, en plus du transport et du
logement gratuit, les partenaires d’Oxfam GB s’assuraient que les

11 Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
femmes voyageaient et participaient aux réunions à deux afin qu’elles
ne se sentent pas seules.
Faire face aux inégalités de richesses et de pouvoir
À tous les niveaux – des foyers au gouvernement national – les
relations de pouvoir inégales ont un impact sur la capacité des
femmes à participer pleinement à la vie publique et à accéder à des
postes de direction. Il existe de nombreuses manières de maintenir
cette inégalité de pouvoir, par exemple à travers : l’utilisation (ou la
menace) de la violence contre les femmes ; les restrictions sur les
activités, sur le code vestimentaire ou sur les mouvements (punis par
la culture ou la religion) ; les stéréotypes de genre présentant la
position inégale des femmes dans la société comme « naturelle » et
« normale » ; les systèmes et réseaux de soutien dominés par les
hommes et leurs intérêts.
Aux Philippines, l’expérience de Developers (une organisation
partenaire d’Oxfam GB) démontre qu’encourager les participantes à
analyser et à discuter de leurs expériences de violence intra-familiale
permet aux femmes de comprendre l’impact de la violence sur leur
capacité à participer aux processus décisionnels en dehors du foyer.
Les participantes ont ensuite élargi cette prise de conscience à leur
communauté et défendu des plans de développement locaux destinés
à faire face à la violence fondée sur le genre.
Le manque d’argent est un obstacle important qui ressort de la
plupart des études de cas. Ce n’est évidemment pas une surprise.
Découlant de leur statut inégal dans la société (et y contribuant), la
pauvreté affecte les femmes de manière disproportionnée. Cette
pauvreté peut également s’expliquer par le manque d'appui des
partis politiques qu’elles soutiennent pourtant. En Sierra Leone, les
femmes qui se sont présentées aux élections locales de 2004 ont
constaté que les petites subventions accordées par le 50/50 Group
(partenaire d’Oxfam GB) ont fait la différence en leur permettant de
payer les voyages et autres dépenses durant la campagne. Le fait
d’allouer un financement de la sorte n’est toutefois pas idéal : il ne
s’agit que d’une solution à court terme qui, en outre, pourrait être
perçue comme une atteinte à la neutralité des projets élaborés pour
soutenir les femmes candidates. C’est pourquoi le 50/50 Group
plaide pour la réduction des montants financiers exigés des candidats
pour pouvoir se présenter aux élections. Au Honduras, les
organisations partenaires d’Oxfam GB font pression pour une
réduction de la durée de campagne car cela réduirait le montant que
les femmes candidates devraient dépenser. Mais il est clair qu’en
définitive, la seule vraie solution durable est une amélioration du
statut économique de toutes les femmes.

Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble 12


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
Encourager et soutenir les femmes à pleinement occuper des
postes de direction
Dispenser des formations ciblées aux femmes qui désirent assumer
des postes de direction est un des moyens permettant à un plus grand
nombre de femmes d’influencer les processus décisionnels. Plusieurs
articles de ce recueil donnent des exemples de femmes ayant décidé
de se présenter aux élections et bénéficiant de formations liées, selon
le contexte, aux activités de leadership et de campagne, à
l’apprentissage des systèmes et structures politiques, au
développement et à la présentation d’agendas de défense des droits
des femmes. Les formations portent aussi sur les aspects juridiques,
sur la conscientisation des électeurs, sur la mobilisation des femmes
aux élections et sur l’exigence de redevabilité de la part des
représentants élus. De telles campagnes sont souvent vitales dans des
contextes où les femmes – et en particulier les femmes pauvres –
connaissent mal leurs droits en tant qu’électrices et citoyennes. Une
situation rendue possible par le faible taux d’alphabétisation et à
l'exclusion des canaux d’information. En Sierra Leone, certaines
dirigeantes de la communauté ayant pris part à la formation n’étaient
même pas au courant qu’elles avaient le droit de voter, et à plus forte
raison de participer aux élections.
Un important défi se pose pour des organisations comme Oxfam GB
et ses partenaires : assurer l’appui le plus impartial possible afin de
montrer qu’un soutien à l’augmentation de la participation des
femmes ne signifie pas un soutien d'intérêts politiques particuliers.
Un autre défi est de s’assurer que les femmes des divers horizons –
origine ethnique, âge, niveau d’éducation, (in)capacité, statut socio-
économique – soient bien inclues dans les activités de formation. Cet
élément a été couronné de succès variables au cours des programmes.
La formation et le soutien sont donc importants pour les femmes qui
veulent accéder à des positions de pouvoir. Mais trop souvent, une
fois élues à un poste de direction, les femmes ont le sentiment d’être
« abandonnées à leur propre sort » dans un environnement pouvant
être hostile. Dans le projet Women In Leadership (WIL), le premier pas
du travail d’Oxfam GB et de 50/50 Group en Sierra Leone fut de
préparer les femmes aux élections, la plupart d’entre elles venant de
milieux pauvres et n’ayant pas d’expérience en matière de direction
formelle. Une fois élues, de nombreuses conseillères se sentent mal
armées et dépassées par les tâches à effectuer, souvent à cause de
problèmes de lecture et d’écriture – en particulier lorsqu’il s’agit de
travailler en anglais. La seconde étape du travail, le projet Promoting
A Culture of Equal Representation (PACER), consista donc à fournir un
encadrement aux femmes conseillères et aux membres du Parlement
afin de les aider à assumer au mieux leurs fonctions.
En Haïti, l’organisation Fanm Yo La – partenaire d’Oxfam GB –
soutient les femmes qui se présentent aux élections et dispense des

13 Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
formations aux conseillères, sénatrices et députées. En outre, la
« Women in Politics School » encourage les femmes à entrer en
politique et à occuper des postes de direction. Au Cambodge, Women
For Prosperity, également partenaire d’Oxfam GB, a mis en place des
Forums de Conseillères (FCF) réguliers où les conseillères peuvent
acquérir de l’expérience afin de prendre la parole en public et tirer les
leçons d’autres conseillères ayant surmonté la discrimination et
d’autres problèmes. Les bénéfices de cette expérience sont tangibles.
Les participantes affirment d’ailleurs qu’elles se sentent plus à l’aise
dans leurs contributions aux débats, dans leur lutte contre les
discriminations et dans la gestion de responsabilités complémentaires
telles que la direction de comités.
Le travail d’Oxfam GB au Royaume-Uni ne se concentre pas sur la
préparation des femmes à exercer des postes formels de direction. Il
s’agit plutôt d’encourager les femmes qui vivent dans la pauvreté à
entrer en contact avec les institutions qui prennent des décisions
affectant leur vie. Il est ici essentiel de renforcer la confiance en soi et
d’encourager les femmes à reconnaître qu’elles ont le droit de
contester des situations et des décisions qui leur semblent injustes ou
ayant un impact négatif. Un autre aspect important consiste à
travailler avec les femmes qui occupent des positions de pouvoir afin
qu’elles soient prêtes à réellement écouter ce que les femmes ont à
dire. Ce volet est nécessaire pour rendre les échanges aussi dignes
d’intérêt que possible pour les deux parties.
Au-delà du développement des capacités des femmes à diriger, il faut
également transformer les modèles de développement de leadership
afin que ceux-ci soient plus réceptifs en matière de genre et incluent
des questions telles que la gouvernance participative et le dialogue
inclusif. Cette nécessité est bien démontrée dans l’étude de cas menée
aux Philippines. Ce domaine de réflexion, relativement nouveau, a un
potentiel énorme pour le renforcement du leadership en matière de
droits des femmes.
Encourager les femmes et les hommes à occuper des postes de
direction qui reconnaissent et promeuvent les droits des
femmes
Si l’amélioration de la place des femmes dans les postes de direction
veut entraîner des effets positifs pour les femmes pauvres, ce travail
doit être lié à un processus plus large de promotion des droits et des
initiatives des femmes afin de combattre la pauvreté. Dans plusieurs
études de cas, l’accroissement du nombre de femmes dans des
positions de pouvoir a eu un impact direct et bénéfique sur le bien-
être de celles vivant dans la pauvreté au niveau local. Ainsi, au
Cambodge, les conseillères élues lors des élections locales ont fourni
une aide ciblée aux membres les plus pauvres et les plus marginalisés
de leur communauté, comme les personnes touchées par le VIH.

Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble 14


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
Mais tous les mécanismes formels d’amélioration de la place des
femmes ne fournissent pas toujours de tels résultats. L’étude de cas
du Honduras montre que si la réforme électorale a permis à un plus
grand nombre de femmes d’être élues, bon nombre de ces nouvelles
députées venaient de milieux conservateurs et religieux et
appartenaient à l’élite économique et culturelle du pays. Ces femmes
ont ainsi soutenu une législation régressive, limitant les droits des
femmes et les opportunités de faire progresser l’égalité entre les
sexes, comme l’interdiction faite aux écoles de dispenser une
éducation sexuelle sensible au genre. Les femmes qui occupent des
postes formels de pouvoir n’agiront donc pas nécessairement dans
l’intérêt d’autres femmes, des pauvres ou d’autres groupes
marginalisés. Il est faux de penser que toutes les femmes politiques
progressistes seront automatiquement « sensibles au genre » et
incluront les droits et les questions d’égalité à leur agenda.
Pour répondre à ce problème, les partenaires d’Oxfam GB au
Honduras ont, depuis les élections, appuyé la construction d’alliances
entre les députées enclines à promouvoir les droits des femmes et
l’égalité entre les genres, et les organisations de défense des droits
des femmes. Ce type d’alliance est bénéfique pour les deux parties :
les organisations sont en mesure de plaider directement auprès des
élues, et ces dernières reçoivent des informations et des idées
permettant de faire pression au Parlement afin d'obtenir une
législation progressiste en matière d’égalité des sexes et de droits des
femmes. Partout ailleurs, en Haïti, en Sierra Leone et au Cambodge,
les femmes politiques élues ont reçu une formation afin de pouvoir
identifier les problèmes d’inégalité clés qui touchent leurs électeurs et
électrices.
Une autre approche visant à encourager les candidat(e)s progressistes
à intégrer le genre et la pauvreté dans leurs agendas consiste à
adopter des « pactes » locaux ou « protocoles ». En Haïti et au
Honduras, les organisations partenaires d’Oxfam GB ont facilité les
rencontres entre électeurs et candidats. Au cours de ces rencontres,
les électeurs ont eu l’opportunité de faire entendre leur voix,
d'exprimer leurs craintes et leurs exigences. Des représentantes
d'organisations des droits des femmes étaient également invitées à
participer. À la fin des réunions, les candidat(e)s ont officiellement
signé un pacte (au Honduras) ou un protocole (à Haïti), par lequel ils
s’engageaient à rendre des comptes à leur électorat, à répondre aux
priorités identifiées par leurs électeurs et à promouvoir les droits des
femmes et l’égalité entre hommes et femmes.

Conclusion
Les programmes visant à renforcer le leadership et la participation
des femmes auront des impacts limités si les structures qui
soutiennent l’inégalité hommes-femmes (ainsi que d’autres formes

15 Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
d’inégalités) ne changent pas. Outre les projets qui soutiennent
directement les femmes à participer aux secteurs économiques,
politiques et de la société civile, de nombreux programmes décrits
dans les études de cas ont cherché à mettre en cause: les systèmes
non-représentatifs de gouvernance et d’élection qui ne rendent pas de
comptes aux électeurs ; les structures organisationnelles qui
renforcent le contrôle et l’influence des hommes ; et la discrimination
économique à laquelle font face les femmes. Afin que ces problèmes
soient résolus, les hommes doivent accepter l’idée que les femmes
occupent des positions de pouvoir à tous les niveaux. Ils doivent les
soutenir en ce sens et collaborer avec elles afin d’élaborer des agendas
collectifs qui défendent les droits des femmes.
Certains principes devant guider ce travail ont émergé lors de la mise
en œuvre des programmes :
• le besoin de se concentrer tout particulièrement sur la
participation et le leadership des femmes qui vivent dans la
pauvreté ou qui souffrent de discriminations liées aux aspects
de leur identité sociale tels que le handicap, l’origine ethnique,
la classe, la caste, la séropositivité, la religion ou l’âge.
• l’appui au leadership des femmes ne fera progresser les
intérêts des femmes pauvres que s’il s’accompagne d’un
soutien à long terme des actions de revendication et d’exercice
de leurs droits dans d’autres domaines tels que l’accès et le
contrôle des ressources, l’accès aux services publics (dont
l’éducation et la santé) ou la protection contre la violence.
• tout soutien fourni aux femmes politiques (futures ou élues)
doit être mis en œuvre dans une optique aussi impartiale que
possible.
Une dernière leçon concerne le besoin de baser tout programme sur
une compréhension approfondie des problèmes de genre auxquels
sont confrontées certaines communautés ou organisations, et de bien
saisir les barrières spécifiques à la participation et au leadership des
femmes dans ce contexte. Qu’il s’agisse des « audits-genre » dans
l’étude de cas des Philippines, de l’évaluation des besoins
participatifs mis en oeuvre en Israël et dans les Territoires
palestiniens occupés, ou de la recherche menée par les
« observatoires » de la société civile au Chili, tous ont servi
d'information aux programmes et stratégies de plaidoyers ultérieurs
ayant eu des impacts positifs sur les femmes pauvres.
Dans le combat contre l’inégalité de genre et les autres formes de
discriminations qui enferment les femmes dans la pauvreté, un
intérêt particulier doit être porté au travail mené par les
organisations féministes et de défense des droits des femmes dans la
formulation des besoins des femmes pauvres et dans la promotion de
leurs intérêts. Le travail de quelques-unes de ces organisations – le

Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble 16


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
Movimiento de Mujeres por la Paz et le Centro de Estudios de la
Mujer au Honduras, le Fanm Yo La à Haïti, Women for Prosperity au
Cambodge, le 50/50 Group en Sierra Leone, et le Women’s Budget
Group au Royaume Uni – est détaillé dans les études de cas de ce
recueil. Qu’ils agissent au niveau local ou national, ces groupes –
formés d’individus ayant démontré qu’ils peuvent être des dirigeants
efficaces – permettent aux femmes d’avoir davantage de contrôle sur
leur vie et de s’engager au sein de leur communauté en tant que
citoyennes actives.

17 Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
Notes
1A.G. Jónasdóttir (1988) ‘On the concept of interests, women's interests and
the limitation of interest theory’, dans K. B. Jones and A. G. Jónasdóttir
(eds.) The Political Interests of Gender, London: Sage Publications.
2 Women’s
Environment & Development Organisation (WEDO),
www.wedo.org (dernière consultation en janvier 2008).
3Women’s Environment & Development Organisation (WEDO) ‘50/50
Campaign Kit’, www.wedo.org/campaigns.aspx?mode=5050campaignkit
(dernière consultation en janvier 2008).
4M.Fleschman (2002) ‘“Gender budgets” seek more equity. Improved
spending priorities can benefit all Africans’, Africa Recovery 16:1,
www.un.org/ecosocdev/geninfo/afrec/vol16no1/161wm.htm (dernière
consultation en janvier 2008).
5Pour un aperçu de la littérature sur la nécessité d’une ‘masse critique’ de
femmes dans les institutions politiques, voir S. Grey (2001) ‘Women and
parliamentary politics. Does size matter? Critical mass and women MPs in
the New Zealand House of Representatives’, Document pour la 51ième
Conférence de la Political Studies Association, 10–12 avril 2001,
Manchester, Royaume-Uni, www.capwip.org/readingroom/nz_wip.pdf
(dernière consultation en janvier 2008).
6Adoptée en 1979 par l’Assemblée générale des Nations Unies, la
Convention sur l’élimination de toute forme de discrimination à l’encontre
des femmes (CEDAW) est souvent décrite comme une déclaration des
droits des femmes. Cette Convention, composée d’un préambule et de 30
articles, définit ce qui constitue la discrimination contre les femmes et met en
place un agenda d'action nationale de lutte contre cette discrimination
(www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/cedaw.htm – dernière consultation en
décembre 2007).
7Signé lors de la quatrième Conférence des Nations Unies sur les Femmes
à Pékin (1995), le Programme d’action de Pékin engage 189 gouvernements
signataires à ‘prendre des mesures afin d’assurer un accès égal pour les
femmes et une participation aux prises de décisions et au leadership… ‘ Ces
mesures incluent ‘[la mise en place] d’objectifs d’équilibre de genre dans les
corps gouvernementaux et comités, ainsi que dans les entités
administratives et judicaires, dont … la mise en place de cibles et la mise en
œuvre de mesures afin d’accroître substantiellement le nombre de femmes
en vue d’atteindre une représentation égale d’hommes et de femmes, si
nécessaire à travers une action positive, pour tous les postes au sein de
l’administration gouvernementale et publique.’
(www.wedo.org/campaigns.aspx?mode=5050campaignkit – dernière
consultation en décembre 2007). Cet engagement fut réitéré en 2005, lors
de la 50ième Commission sur le statut des femmes.
8 ‘African Women Are Ready to Lead’, Africa Renewal, juillet 2006, 7.
9Women’s Environment & Development Organisation (WEDO) ‘The numbers
speak for themselves’, Fact Sheet no. 1,
www.wedo.org/files/numbersspeak_factsh1.pdf (dernière consultation en
janvier 2008).

Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble 18


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
10http://money.cnn.com/magazines/fortune/fortune500/2007/womenceos/

(dernière consultation en janvier 2008).


11Nations Unies (1995) The World’s Women 1995: Trends and Statistics,
New York: United Nations Statistics Division. À l’échelle mondiale, le fossé
des sexes en matière de salaires est difficile à déterminer car il n’existe que
peu de données. Dans le secteur industriel et des services, ce fossé varie
entre 53% et 97%, avec une moyenne de 78% (UNIFEM (2000) ‘Biennial
Report. Progress of the World’s Women, 2000’, New York: UNIFEM).
12Inter-Parliamentary Union (www.ipu.org – dernière consultation en
décembre 2007).
13WOMANKIND (www.womankind.org.uk/statistics.html – dernière
consultation en décembre 2007).
14Par exemple, la chambre basse du Rwanda compte 48% de femmes, le
Parlement d’Afrique du Sud 32,8% et le Mozambique 34,8%. Inter-
Parliamentary Union (www.ipu.org/wmn-e/arc/classif300906.htm – dernière
consultation en décembre 2007).
15S.Clisby (2005) ‘Gender mainstreaming or just more male-streaming?
Experiences of popular participation in Bolivia’, Gender and Development
13(2): 23–35.
16Il existe deux types : les places réservées et les quotas législatifs. La
plupart des quotas instaurés avant les années 1990 furent adoptés sur une
base volontaire par les partis politiques et, en tant que tels, ne concernaient
que les places réservées au sein d’un seul parti à travers les modifications
de sélection. Cependant, au cours de la dernière décennie, un nombre
croissant de législatures nationales ont adopté des quotas législatifs –
révisant les constitutions et les lois électorales – afin que tous les partis
augmentent le pourcentage de femmes nommées lors des élections locales
ou nationales.
17 En Erythrée – un État sans démocratie ou redevabilité – les femmes élues

grâce aux quotas n’ont aucun pouvoir d’influence sur les décisions du
gouvernement et il existe une confusion parmi elles sur le fait de savoir qui
elles représentent réellement. En Tanzanie, le recours aux places réservées
pour les femmes a déclenché des pressions sur les parités politiques afin de
placer des femmes sur les bulletins de vote, mais cette pression peut avoir
érodé le pouvoir des femmes à gagner leurs places au Parlement par les
voies ‘normales’ (E. Ward (2006) ‘Real or illusory progress? Electoral quotas
and women’s political participation in Tanzania, Eritrea and Uganda’,
Trocaire Development Review, 73–95,
http://trocaire.org/pdfs/policy/developmentreview/2006/devrev2006.pdf –
dernière consultation en décembre 2007).

19 Leadership et participation des femmes : vue d’ensemble


Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008
© Oxfam GB, Juin 2008
Cet article a été rédigé par Joanna Hoare et Fiona Gell. Merci à Caroline Sweetman,
Ines Smyth et Anna Coates pour leurs importantes contributions aux version
antérieures. Ce document fait partie d’une série de textes écrits pour informer et
contribuer au débat public sur des problématiques relatives au développement et aux
politiques humanitaires. Le texte peut être utilisé librement à des fins de campagne,
d'éducation et de recherche moyennant mention complète de la source.
Pour toute information supplémentaire, veuillez envoyer un courriel à
[email protected]

Online ISBN 978-1-84814-011-0. Cet article fait partie d’une série intitulée Agir pour
le leadership et la participation des femmes, qui peut être achetée auprès
d’Oxfam Publishing - Hwww.oxfam.org.uk/publicationsH.

Cet article est également disponible en anglais et en espagnol.

Oxfam GB

Oxfam est une organisation de développement, d'aide humanitaire et de


campagne qui collabore avec des partenaires pour trouver des solutions
durables à la pauvreté et à la souffrance dans le monde. Oxfam GB est
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Aperçu de programme, Oxfam GB, Juin 2008

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