Hypothyroidies
Hypothyroidies
Hypothyroidies
LADJOUZE 2016
HYPOTHYROÏDIES DE L’ENFANT
INTERET ET OBJECTIFS DU COURS:
- L’hypothyroïdie congénitale constitue la première cause de retard mental évitable.
- Nécessité de savoir reconnaitre une hypothyroïdie congénitale dès les premiers jours de vie et
de mettre en place un traitement substitutif le plus rapidement possible.
1. INTRODUCTION :
Les hypothyroïdies de l’enfant regroupent des pathologies congénitales et des pathologies acquises.
Après le Diabète de type I, l’hypothyroïdie est la seconde endocrinopathie la plus fréquente chez
l’enfant, puisqu’elle concerne 1 sur 3000 à 1 sur 3500 enfants. L’hypothyroïdie congénitale est la
principale cause de retard mental évitable dans le monde. Effectivement, les hormones thyroïdiennes
jouant un rôle fondamental dans le développement du Système nerveux central, leur déficit sur le
cerveau en développement entraine un retard mental définitif. C’est pour cette raison qu’un dépistage
de cette pathologie à la naissance a été mis en place dans la plupart des pays développés. En l’absence
de dépistage néonatal systématique, comme c’est le cas en Algérie, il est important de reconnaitre très
tôt les signes de l’hypothyroïdie congénitale afin d’établir un diagnostic le plus rapidement possible et
de mettre en route un traitement le plus rapidement possible, car tout retard dans la mise en route du
traitement entrainera une diminution du Quotient intellectuel de l’enfant.
2. DEFINITIONS
L’hypothyroïdie est définie par une diminution des taux circulants d’hormones thyroïdiennes dans le
sang. Cela peut être dû à un dysfonctionnement de la thyroïde elle-même (hypothyroïdie primaire ou
périphérique) ou à une anomalie de stimulation hypophysaire par la TSH (hypothyroïdie secondaire ou
périphérique).
3. EPIDEMIOLOGIE :
L’hypothyroïdie congénitale concerne 1pour 3500 naissances. En dehors des troubles de
l’hormonosynthèse, il existe une légère prédominance féminine. Celle-ci est encore plus importante en
ce qui concerne les hypothyroïdies acquises d’origine auto-immune.
4. ANATOMIE
[HYPOTHYROÏDIES DE L’ENFANT] Dr A.LADJOUZE 2016
La thyroïde est une glande endocrine située dans la région cervicale médiane basse, formée de deux
lobes reliés par un isthme, pesant entre 15 et 30 g chez l’adulte, chez l’enfant le poids varie selon l’âge.
Elle a une forme caractéristique en H : 2 lobes latéraux unis par une partie médiane. A sa partie
postérieure, on retrouve 2 glandes parathyroïdes de chaque côté : supérieure et inférieure. La thyroïde
et les glandes parathyroïdes sont très différentes, à la fois embryologiquement que sur le plan
fonctionnel. Le rapport anatomique fondamental de la thyroïde est celui des nerfs laryngés récurrents
qui se trouvent à la face postérieure de la glande. La thyroïde est palpable, superficielle. En réalité, il est
difficile de la palper si son volume et sa consistance sont normaux car elle est dépressible. Cependant,
les éléments pathologiques (hypertrophie, nodules...) seront palpables. Elle est mobile à la déglutition
car adhérente au plan de la trachée cervicale. Lors de la déglutition, la trachée et le larynx sont
ascensionnés, la thyroïde est donc embarquée vers le haut.
5. EMBRYOLOGIE DE LA THYROÏDE
La glande thyroïde nait d’une prolifération de l’endoderme sur la ligne médiane à la jonction entre le
premier et le deuxième arc. Ce bourgeonnement s’invagine dans le mésenchyme sous-jacent sous la
forme d’un diverticule dont l’extrémité se développe pour donner l’ébauche thyroïdienne principale.
Cette ébauche migre en direction caudale pour venir se placer à la 7ème semaine de gestation au niveau
de la face antérieure du cou, en avant du cartilage thyroïde. L’ébauche se développe de chaque côté
pour donner les lobes thyroïdiens grâce à une prolifération de cellules endodermiques qui vont donner
des cordons cellulaires qui se fragmentent vers la 10ème SG en amas pour donner les vésicules
thyroïdiennes. Les cellules thyroïdiennes deviennent fonctionnelles vers la fin de la 11ème SG (présence
de thyroglobuline et premières sécrétions hormonales). Les cellules C se développent en périphérie des
vésicules à partir des cellules des crêtes neurales incluses dans la paroi de l’intestin pharyngien. Pendant
cette migration, l’ébauche thyroïdienne reste reliée au plancher de l’intestin pharyngien par le canal
thyréoglosse. Normalement ce canal disparait, seuls persistent l’extrémité distale qui donne le lobe
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pyramidal de la thyroïde et son orifice proximal sous la forme d’une fossette borgne à la pointe du V
lingual : le foramen caecum.
6. HISTOLOGIE
La thyroïde est organisée en follicules d'un diamètre moyen de
l'ordre de 200 micromètres (50 à 500). Les follicules sont formés par un
épithélium simple de cellules folliculaires (thyréocytes) délimitant une
cavité (l’espace folliculaire) contenant la substance colloïde. Les
thyréocytes, responsables de la synthèse des hormones thyroïdiennes,
représentent plus de 99 % des cellules de la glande. Il s'agit de cellules
bipolaires (pôle basal et pôle apical) à double fonctionnement : exocrine
vers la qualité folliculaire et endocrine vers la circulation sanguine. La
thyroïde comporte par ailleurs des cellules claires ou para folliculaires
responsables de la synthèse de thyrocalcitonine. FIGURE 3: HISTOLOGIE THYROIDIENNE
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Le pôle basal des thyréocytes repose sur la lame basale du follicule, leur pôle apical présente des
microvillosités se projetant dans la colloïde, et leurs faces latérales sont réunies à celles des cellules
folliculaires adjacentes par des complexes jonctionnels de type gap. Ces jonctions permettent la
coordination de l'activité des cellules folliculaires au sein d'un même follicule. Les thyréocytes possèdent
un noyau basal ou central, des mitochondries, un réticulum endoplasmique granulaire riche et des
ribosomes abondants, un appareil de Golgi à localisation supranucléaire et de nombreux lysosomes,
phagosomes (« gouttelettes de colloïde ») et phagolysosomes, présents essentiellement à leur pôle
apical. Ces caractéristiques morphologiques peuvent varier en fonction du degré d'activité des
thyréocytes. Ainsi, en cas d'hyperactivité, ils augmentent de volume, deviennent prismatiques et sont le
siège d'un développement considérable de leurs organites de synthèse protéique (REG et Golgi);
conjointement, la colloïde diminue de volume et peut même disparaître intégralement. A l'inverse, en
cas d'hypoactivité, les thyréocytes diminuent de taille, deviennent cubiques voire aplatis, présente une
diminution de la richesse en REG et en Golgi alors qu'en parallèle la colloïde augmente de volume.
Fonctions : les cellules folliculaires synthétisent et le relarguent dans le sang les hormones T3 et T4 en 4
temps :
1) capture et transport actif des iodures sanguins depuis les capillaires vers la colloïde
2) synthèse et sécrétion vers le pôle colloïdal d'une glycoprotéine, la thyroglobuline.
3) incorporation de l'iode à la thyroglobuline et formation des hormones T3 et T4.
4) catabolisme des iodo-tyrosines
7.2. L’HORMONOSYNTHESE
L'iode est un oligo-élément rare, dont les réserves sont faibles dans l'organisme (10 à 20 mg dans la
thyroïde)
- La première étape est la capture d’iodures circulants grâce à une pompe spécifique, un
mécanisme actif, ATP-dépendant saturable (NIS), avec un co-transport sodique.
- L'organification (oxydation) de l'iode s’effectue grâce à une enzyme spécifique liée à la
membrane, la thyroperoxydase (TPO), dont l'activité requiert la présence d’H2O2.
- L'iode oxydé se lie aux résidus tyrosyl de la thyroglobuline (Tg), donne naissance aux précurseurs
des hormones thyroïdiennes : mono-iodo-tyrosine (MIT) et des di-iodo-tyrosine (DIT).
- L’iodation de la Tg se fait au niveau du pôle apical des thyréocytes, dans la colloïde.
- La thyroperoxydase intervient dans le couplage des précurseurs.
- La thyroglobuline porteuse d'hormones thyroïdiennes est stockée dans la cavité colloïde.
- La sécrétion des hormones thyroïdiennes se fait après hydrolyse lysosomiale.
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- T3 et T4 diffusent dans le sang. L’iode est détaché des MIT et DIT, l’iode libre est réutilisé pour la
synthèse d’hormones. La désiodation est intra-thyroïdienne (cycle interne de l’iode).
Mobilisation
Sécrétion
Hormonale
En période post-natale, les hormones thyroïdiennes agissent en synergie avec l’hormone de croissance
pour favoriser la croissance osseuse au niveau des chondrocytes. Par ailleurs, la différenciation des
neurones est sous le contrôle des hormones thyroïdiennes: arrêt de la prolifération cellulaire, croissance
des axones et des ramifications dendritiques, formation des synapses, myélinisation. Ce rôle est
essentiel dans les premières semaines de la vie ; il se poursuit jusqu'à l'âge de 18 mois à 2 ans.
Lorsque le début de l’hypothyroïdie n’est pas congénital (hypothyroïdie acquise), les signes
cliniques seront liés à l’âge de début des troubles. On constatera un retard de la vitesse de croissance
contrastant avec une prise de poids importante, et une pseudohypertrophie des mollets. On peut noter
des difficultés scolaires, une asthénie, une frilosité, une dépilation et une infiltration discrètes ainsi
qu’une constipation opiniâtre.
La radiographie du genou est la seule radiographie demandée à la naissance pour évoquer le diagnostic
d’hypothyroïdie congénitale, en effet, les bilans biologiques permettent de confirmer le diagnostic.
Cependant, si le diagnostic n’est pas fait immédiatement, on peut trouver d’autres signes radiologiques
(inutiles à rechercher en pratique clinique)
Chez l’enfant plus grand, elle permettra plus facilement de mettre en évidence du thyroïdien en position
normale et recherchera des signes d’atteinte auto-immune (hypo-échogénicité de la maladie de
Hashimoto)
- Si la loge thyroïdienne est vide et qu’il n’y a aucune fixation, il peut s’agir d’une
athyréose ou d’une anomalie du récepteur de la TSH ou d’une anomalie de captation
- Si la loge thyroïdienne est vide, mais que la fixation se situe ailleurs, il s’agit d’une
thyroïde ectopique.
La scintigraphie doit être faite avant ou dans les premiers jours qui suivent la mise en route du
traitement pour être interprétable. Cependant sa réalisation ne doit en aucun cas retarder la mise en
route d’un traitement. Ainsi, si elle n’a pas pu être faite avant la mise en route du traitement, elle sera
faite après l’âge de 3 ans, après un arrêt de traitement de 1 mois (sans risque pour l’enfant à cet âge).
Un test au perchlorate pourra permettre de confirmer la cause précise en cas de trouble de
l’hormonosynthèse, mais celui-ci n’est pas indispensable.
- dans 2/3 des cas, il s’agit d’une ectopie de la thyroïde (glande ectopique sublinguale, sous
maxillaire…).
- Les autres dysgénésies sont les hémiagénésies de la thyroïde, les hypolasies thyroidiennes.
Il existe des formes familiales (2 %), et des malformations congénitales sont associées dans 9 % des cas.
Les gènes impliqués sont Pax 8, TTF-1, TTF-2 (TTF pour facteur de transcription thyroïdien).
Plus rares sont les résistances aux hormones thyroïdiennes et les anomalies du transport des hormones
thyroïdiennes (mutation MCT8)
12.1. ARMES
La L-Thyroxine (T4l) est disponible sous forme de gouttes dans certains pays (1 goutte=5µg). En Algérie,
la forme en goutte n’est pas disponible, nous disposons de la dorme comprimés dosés à 25, 50, 75 et
100µg.
La forme injectable n’a pas d’intérêt en pédiatrie
14) PREVENTION
Elle consiste à dépister systématiquement l’hypothyroïdie dans la fratrie des enfants atteints,
notamment en cas de trouble de l’hormonosynthèse.
15) BIBLIOGRAPHIE
- Structure et physiologie thyroidiennes, V.Vlaeminck,-Guillem, EMC 2011
- Hyperthyroïdie et hypothyroïdie du nouveau-né et de l’enfant, D.Carranza, G.Van Vliet, M.Polak, EMC
2006
- hypothyroïdie congénitale, D.Carranza, G.Van Vliet, M.Polak, annales d’endocrinologie, 2006
- hypothyroïdie congénitale-mise à jour du diagnostic, du traitement et de la génétique, Paediatrica,
2012