Mada Etude-Paysage-Media 09302021

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Etude sur le paysage

médiatique à Madagascar
Septembre 2021

Thibault Chapoy
Table des Matieres

Acronymes 2

Introduction 3

Au sujet d’Internews 3

Objectif de cette étude 3

Méthodologie : 4

Résumé exécutif 5

Cadre juridique et liberté de la presse 8

Evolution du cadre juridique 8


Dégradation de la liberté de la presse ? 10
Sujets et thèmes tabous 15

Présentation du paysage médias 16

Manque de données et « assainissement » du paysage médiatique 16


Propriété et indépendance des médias 17
Espace polarisé reflet des tensions politiques 20
Presse écrite 22
Radios 26
TV 35
Médias en ligne et réseaux sociaux 38

Capacités et autres besoins du secteur 42

Profil des journalistes et perception de la profession 42


Formations et besoins des formations des journalistes 44
Associations professionnelles des médias 46
Besoins d’information et Relations avec les communautés 48
Fausses informations et fact checking 52
Impact du Covid 53

Conclusions 54

Annexe 1 : Notices biographiques 57

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 1


Acronymes
Centre de commandement opérationnel (CCO)
Centres régionaux de commandement opérationnel de lutte contre le Covid 19 (CRCO)
Centre hospitalier universitaire (CHU)
Centre de Recherches en Communication (CERCOM)
Communication, Médiation, Médias, Organisations (COMMO)
Communication Idea Development (CID)
Coronavirus disease 2019 (COVID-19)
Ecole Supérieure Spécialisée du Vakinankaratra (ESSVA)
Feo Mazava Atsinanana (FMA)
Friedrich-Ebert-Stiftung (FES)
Juniors Reporters Clubs (JRC)
Malagasy Broadcasting System (MBS)
Multiple Indicator Cluster Survey (MICS)
Ministère de la Culture et de la Communication (MCC)
Observatoire de la vie publique (SeFaFi)
Ordre des Journalistes de Madagascar (OJM)
Organisations Non Gouvernementales (ONG)
Plate-Forme Nationale des Organisations de la Société civile de Madagascar (PFNOSCM)
Radio Don Bosco (RDB)
Radio Nasionaly Malagasy (RNM)
Radio Tsioka Vao (RTV)
Reporters Sans Frontières (RSF)
Sekoly Ambony momba ny Ita sy ny Serasera / École Supérieure d’Information et de
Communication (SAMIS-ESIC)
Télévision Numérique Terrestre (TNT)
Televiziona Malagasy (TVM) Télévision nationale
Unité́ Monitoring des Médias (UMM/INCIPALS)

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 2


Introduction

Au sujet d’Internews
Internews est une organisation non gouvernementale qui se consacre au développement
des médias dans plus de 120 pays. En partenariat avec les médias locaux et la société
civile, Internews améliore l’accès et la qualité de l’information disponible localement.
Dans un esprit d’innovation et d’entreprise, Internews facilite l’adaptation des médias
classiques et nouveaux aux besoins en information des populations vivant dans un
environnement difficile. En Afrique subsaharienne, Internews met en œuvre plus d’une
trentaine de programmes dans le domaine des médias et de la participation citoyenne,
notamment celle des femmes, la liberté de la presse et l’accès à l’information, la formation
de journalistes, les initiatives de vérification des faits et lutte contre la désinformation, le
renforcement des capacités des entreprises médiatiques notamment sur leurs modèles
économiques et la mise en place d’échanges d’information entre décideurs publics,
journalistes, organisations de la société civile et citoyens.

Objectif de cette étude


Cette étude a été réalisée par l’équipe régionale d’Internews, de janvier à août 2021, sous
la direction du Directeur régional Afrique d’Internews, Brice Rambaud. Nous sommes
particulièrement reconnaissant des contributions des organisations suivantes, l’Ordre des
journalistes de Madagascar (OJM), Ilontsera, la Coalition des radios Madagascar,
Communication Idea Developement (CID) Madagascar, le département de régulation des
médias du ministère de la Culture et de la Communication et tous les médias qui ont
participé à cette étude. Le but de cette évaluation est de fournir des informations
actualisées sur l'état du secteur des médias à Madagascar, et chercher à explorer les
questions de recherche suivantes :

• Quels sont les besoins des médias et des professionnels des médias pour favoriser
la pratique d’un journalisme de meilleure qualité répondant aux besoins
d’information des Malgaches et enjeux de développement du pays ?
• Dans quelle mesure les cadres juridiques et réglementaires des médias sont-ils
favorables aux médias et aux journalistes ?
• Quels sont les facteurs et conditions qui pourraient favoriser un écosystème de
l’information plus sain à Madagascar ?
L'évaluation fournit des informations sur les forces organisationnelles des médias, les
faiblesses et les besoins ; la capacité des organes médiatiques à collecter et diffuser des
informations et du contenu à son public et comment ils répondent à leurs divers besoins
d’information ; la capacité professionnelle des journalistes, des rédacteurs en chef et des
gestionnaires ; le cadre juridique et réglementaire ; l’impact du COVID-19 sur le

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 3


fonctionnement des médias. La présente étude aspire à identifier des domaines
d'intervention qui permettraient l’émergence d’un secteur médiatique plus dynamique
répondant aux besoins d’information des Malgaches.

Méthodologie :
Cette étude a employé une méthodologie mixte intégrant conjointement des éléments
quantitatifs et qualitatifs. Pour les aspects qualitatifs, la recherche a réalisé des entretiens
avec des informateurs clés, des discussions de groupe, des observations dans le cadre de
visites de terrain et une recherche documentaire approfondie. Les méthodes qualitatives
ont fait appel à des outils flexibles (guide d’entretien semi-structuré, check-list,
questionnaire ouvert). Pour la méthode quantitative, deux enquêtes structurées sur les
besoins des radios et des professionnels des médias ont été réalisées.

Entretiens qualitatifs
25 entretiens qualitatifs ont été réalisés, afin d'obtenir davantage d'informations de la part
des acteurs de l'industrie. Parmi eux, 13 étaient des professionnels des médias
(journalistes, correspondants étrangers, caricaturistes, rédacteurs et directeurs), 7 acteurs
de la société civile dans le secteur des médias, 2 représentants du secteur académique, 2
spécialistes et observateurs des médias, et 2 régulateurs. Neuf personnes interrogées
sont des femmes. Un échantillonnage raisonné a été utilisé pour sélectionner des
représentants des principales institutions médiatiques et des journalistes ainsi que des
représentants de la société civile pour participer à cette évaluation.

Discussions de groupe
En raison des restrictions sanitaires, Internews a conduit un seul groupe de discussion
avec les représentants (journalistes, animateurs et rédacteurs en chef) des radios de la
ville de Fort Dauphin et de la province d’Anosy (10 participants).

Observation
Des visites dans les différents types de médias ont été réalisées afin d’observer
l’environnement et les conditions techniques dans lesquels les médias opèrent. 18 visites
et observations de terrain ont été réalisées (1 média en ligne, 2 organes de la presse
écrite, 3 chaînes de Télévision et 12 stations de radio). Les visites et les observations
étaient semi-structurées et guidées par une check-list. L'observation donne une
connaissance de première main et permet de corroborer certaines informations
collectées au cours des entretiens qualitatifs.

Recherche documentaire
Internews a mené une recherche documentaire extensive sur le paysage médiatique
malgache et son cadre juridique. Cela comprenait une revue de littérature et un état des
lieux des sources en ligne. La recherche documentaire a servi de base solide pour poser
le contexte avant les entretiens qualitatifs et la collecte des données mais aussi à

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 4


comprendre les évolutions historiques et transformations du secteur médias sur ces dix
dernières années. Une notice biographique se trouve en Annexe 1.

Enquêtes
Deux enquêtes ont été réalisées pour comprendre les enjeux, les obstacles, les
opportunités et les besoins des professionnels des médias et des stations de radio. 27
stations de radio ont participé à l’enquête sur les besoins des radios. 26 professionnels
des médias (dont 7 femmes) ont répondu à l’enquête sur les besoins des journalistes. Ces
enquêtes ont permis de dégager des éléments statistiques mais aussi de compléter et
confirmer certaines tendances relevées par les méthodes qualitatives et ce malgré les
limitations posées par la taille de l’échantillon et le nombre de répondants.

Résumé exécutif
A Madagascar, les médias et les journalistes se confrontent à un cadre juridique ambigu
qui garantit et limite à la fois l’exercice de la liberté d’expression. Certaines notions
« d’atteintes à la sécurité de l’Etat », "diffamation", "diffusion de fausses nouvelles" ou
encore « incitation à la haine » sont bien souvent laissées à l’appréciation du juge et
utilisées à l’encontre des journalistes. L’Etat continue d’utiliser un arsenal de mesures de
rétorsion (Emprisonnement de journalistes, suspension de publications, intimidations et
pressions, etc.) à l’encontre des journalistes et des médias.

L’état général de la liberté de la presse et d’expression est faiblement documenté et


monitoré. L’autocensure reste la norme dans la pratique d’un journalisme contraint par
des lignes éditoriales très directives. Le harcèlement en ligne par des sympathisants du
pouvoir ou d’autres factions politiques semble être aussi un phénomène émergeant qui
nuit à la protection des journalistes qui n’ont aucune notion de sécurité digitale. De
nombreux sujets et thèmes tabous sur la gouvernance, les cas de corruption, le trafic de
ressources naturelles sont difficiles à aborder pour les journalistes. Avec l’état d’urgence
décrété dans le cadre de la riposte sanitaire contre le Covid 19, les autorités malgaches
ont pris des mesures parmi les plus contraignantes pour les médias en Afrique.

Selon les estimations, il y aurait une quarantaine de journaux quotidiens et de


magazines, plus de 300 radios, une trentaine de chaînes de télévision ainsi qu’une
dizaine de médias en ligne. Le ministère de la Culture et de la Communication (MCC)
serait sur le point de mettre en place l’Autorité Nationale de Régulation de la
Communication Médiatisée et de lever la suspension de la délivrance de nouvelles
licences d’exploitation effective depuis 2010. La grande majorité des médias
appartiennent à des hommes politiques ou à des partis politiques dont ils reflètent les
intérêts. Un phénomène de concentration de la propriété se manifeste et s’accélère avec
l’apparition de grands groupes médias. Cette configuration du paysage médiatique se
traduit par un contrôle des patrons de presse qui imposent leur ligne éditoriale et par
une polarisation exacerbée qui divise de façon quasi-manichéenne la presse

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 5


d’opposition et la presse pro-gouvernementale. Le début de l’année 2021 a connu une
crispation inquiétante des tensions politiques qui se sont transposées dans les contenus
bellicistes des médias. Il est inquiétant de constater cette détérioration alors que la
prochaine élection présidentielle se déroulera seulement fin 2023. Plusieurs observateurs
du paysage médiatiques soulignent le manque d’opportunités de débats et d’espaces de
dialogue dans les médias.

La presse écrite reste cantonnée à la capitale et l’apanage de l’élite politique et


économique de la ville. Les journaux restent marginaux dans les villes en province du fait
des difficultés et retards de distribution. Selon le sondage MICS Madagascar 9%
d’hommes et 8% de femmes sont exposés aux journaux. Elle est le média par excellence
vecteur d’intérêts politiques et économiques et faiseur d’opinion. La presse écrite n’a
que timidement amorcé une transition numérique.

Le paysage radiophonique se partage entre la radio nationale Radio Nasionaly Malagasy


(RNM) qui a l’exclusivité de la couverture nationale, les radios commerciales,
associatives et confessionnelles qui sont limitées officiellement dans leur couverture
locale à 150km. Il n’existe pas de radios communautaires avec un statut juridique propre.
Au même titre que les autres médias, la radio est utilisée comme un instrument de
propagande politique et nombreux sont les notables et politiciens locaux qui sont
propriétaires d’une station. Malgré cela le paysage radiophonique demeure par bien des
aspects le seul espace où des médias indépendants peuvent opérer. La radio reste la 1ère
source d’information pour les Malgaches et surtout la plus accessible en province et en
milieu rural. D’après MICS, 49% d’hommes et 41% de femmes déclarent être exposés à la
radio. La majorité des radios opèrent avec des équipements rudimentaires qui
rencontrent de nombreux dysfonctionnements, sans pouvoir compter sur des techniciens
qualifiés.

D’après MICS, l’exposition à la télévision touche moins d’un quart des hommes ou des
femmes (23% de femmes et d’hommes). S’il reste le média le plus suivi au niveau de la
capitale, la télévision est une source d’information marginale en province. A bien des
égards, la télévision partage les mêmes contraintes que les radios en termes de difficultés
de maintenance, du manque d’équipements et de compétences des techniciens. C’est
aussi un média hautement politisé.

Pour le moment le paysage des médias en ligne reste très embryonnaire avec très peu
d’acteurs que l’on pourrait qualifier de ‘pure players’. La nouvelle loi sur la
communication médiatisée de 2020 consacre l’existence juridique des médias en ligne.
Les initiatives de médias citoyens demeurent à la fois marginales et précaires. Il existe
néanmoins dans le paysage Internet de nombreux blogs, influenceurs et pages Facebook
très suivies. La pénétration d’Internet est limitée (De 7 à 14% selon les estimations) sur
Madagascar mais plusieurs facteurs pourraient favoriser l’émergence de nouveaux
médias en ligne indépendants.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 6


Les conditions de travail des journalistes sont extrêmement précaires en termes de
rémunération, valorisation du métier, moyens techniques à leur disposition, contraintes
de temps et pressions dont ils font l’objet par les patrons de presse et les politiques. Ces
conditions de travail constituent l’un des obstacles au développement d’une presse libre
et indépendante. La profession n’est pas valorisée et beaucoup de journalistes
choisissent la profession comme un moyen temporaire pour servir leurs ambitions
politiques. Les médias malgaches emploient deux fois moins de femmes que d’hommes,
et généralement elles travaillent à des postes administratifs ou commerciaux. Toutefois, la
situation des femmes journalistes et professionnelles n’a jamais été étudiée de façon
spécifique, notamment leurs problèmes de protection. La population malgache a une
perception négative des médias et des journalistes. Nombreux sont les journalistes qui
n’ont aucune formation en journalisme ou en communication et sont formés sur le tas au
sein de leur média. S’il y a beaucoup d’engouement autour du journalisme
d’investigation, les besoins les plus urgents semblent plutôt se situer autour de la
déontologie, les notions de bases et les fondamentaux du journalisme ou sur des
domaines thématiques particuliers.

Les journalistes ne se conforment pas toujours aux normes professionnelles et la


diffusion d'informations non vérifiées est courante. Avec le recrutement de nombreux
journalistes mal ou pas formés, la maîtrise de la qualité des messages reste un enjeu
majeur. Les médias sociaux sont les fournisseurs d'information qui exposent le plus la
population et les jeunes aux fake news et rumeurs. Malgré la prolifération des fausses
nouvelles, il n’existe pas vraiment de site web spécialisé dans leur traitement ou
d’initiative de factchecking.

La grande majorité des journalistes interrogés (88%) sont convaincus qu’ils répondent aux
besoins d’informations des Malgaches. Ils citent plusieurs mécanismes pour collecter le
retour de leur audience, téléphone, SMS, emails, réseaux sociaux et visites. Pourtant
plusieurs sondages et enquêtes semblent démontrer qu’il y a une crise de confiance
entre les Malgaches et les médias. Aucune étude sérieuse et exhaustive n’a analysé en
profondeur les besoins d’information des différentes populations. Les initiatives restent
encore limitées en termes de rapprochement des médias et des communautés (comme
la mise en place de mécanismes de retour et l’implication des communautés dans la
production de contenus). Il existe pourtant plusieurs opportunités avec les vidéo clubs, le
cinéma mobile, les caricatures et le photojournalisme pour engager les communautés et
le public sur différentes problématiques.

Les modèles économiques des médias sont assez classiques, dépendant principalement
de la publicité. Il y a peu de diversification de sources de revenus. La crise sanitaire a eu
un impact économique sur les médias qui s’est manifestée par des cessations ou des
baisses d’activités, des licenciements et des réductions de salaire. Il est trop tôt pour
mesurer l’impact sur le long terme alors que de nombreux médias souffrent d’une
réduction importante des revenus publicitaires.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 7


Cadre juridique et liberté de la presse

Evolution du cadre juridique


Depuis la fin du monopole d’Etat sur la presse en 1989, Madagascar s’est doté d’un grand
nombre de textes juridiques relatifs à la liberté d’expression, conformes aux standards
internationaux. La Constitution de la IVème République de Madagascar du 11 décembre
2010 garantit la liberté d’expression à travers son article 10. Madagascar a ratifié la
plupart des instruments régionaux et internationaux sur la liberté d’expression et la liberté
de la presse. La transposition de ces instruments a été effectuée dans la législation
nationale mais l’administration garde certaines latitudes d’appréciation dans leur
application. La plupart des analystes soulignent que le cadre juridique dans son
ensemble garantit et limite à la fois l’exercice de la liberté d’expression.

Madagascar disposait de la loi n° 2016-029 du 14 juillet 2016 portant Code de la


communication médiatisée qui garantissait la liberté d’expression en prévoyant tout de
même quelques limitations, notamment sur les questions de droit à l’image ou sur les
plafonds des amendes. Cette loi vient d’être modifiée par la loi n° 2020-006 du 1er
septembre 2020 sur la communication médiatisée. Ces réformes successives consacrent
en partie la dépénalisation des délits de presse et complètent l’amendement de l’article
20 de la Loi sur la Cybercriminalité, enlevant les peines de prison prévues pour les
infractions de presse. Cependant la loi comporte toujours des plafonds d’amendes
particulièrement élevés :

• Publications interdites et publications nécessitant une autorisation préalable (Art


16, 17), de 1,000,000 à 6,000,000 d’Ariary (De 220 à 1,300 EUR)
• Atteinte à la vie privée (Art 20), de 1,000,000 à 6,000,000 d’Ariary
• Atteinte au droit à l’image (Art 21), de 1,000,000 à 6,000,000 d’Ariary
• Délits contre les personnes (Diffamation) (Art 23), de 1,000,000 à 6,000,000
d’Ariary ; (Injures), de 5,000,000 à 10,000,000 d’Ariary
• Provocation aux crimes et aux délits (Art 26-31), de 1,000,000 à 10,000,000
d’Ariary
• Publication, diffusion et production de manière délibérée d’informations
mensongères (Art 30), de 5,000,000 à 10,000,000 d’Ariary
Les lois ne sont pas en soi contraignantes mais le danger vient de leur application et de
leur appréciation. Par exemple, la notion de l’atteinte à la sûreté de l’Etat est laissée à
l’appréciation du juge qui n’est pas toujours indépendant. Les concepts de « raison d’Etat
», « d’intérêt national » et de « nécessité nationale » sont souvent évoqués pour justifier

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 8


des actes du Gouvernement et des gouvernants, notamment des restrictions aux libertés
publiques exercées par l’Administration ».1

D’autres textes comme ceux relatifs à la sécurité de l’Etat et aux situations exceptionnelles,
sont plus restrictifs, posant de sérieuses entraves à cette liberté fondamentale. Dans la
pratique, l’indépendance éditoriale n’est pas respectée et les journalistes subissent les
conséquences de la non-application du cadre juridique existant. En outre aucune
disposition ne garantit explicitement l’autonomie de l’organe de régulation des médias,
qui n’a par ailleurs toujours pas été mis en place.

Enfin, si la dépénalisation des délits de presse fait désormais l’objet d’un consensus
auprès des acteurs médiatiques, l’étude de l’UNESCO et d’autres analyses concluent
« que les journalistes ne seront pas mieux protégés sans l’adoption de textes
d’application précis, rédigés clairement et diffusés auprès de tous sous une forme
explicite »2. Il est important de noter que le ministère de la Culture et de la
Communication (MCC) a fait des efforts pour publier la nouvelle loi en livret afin de le
distribuer aux journalistes. A ce stade, il n’y a pas encore de recul nécessaire sur le
nouveau cadre juridique et les pratiques qui vont en découler. Jusqu’à présent, aucune
analyse des réformes et état des lieux du cadre juridique n’a été réalisée pour
comprendre les besoins d’adoption de textes d’application afin d’écarter certaines
marges d’appréciation. Malgré ce cadre non liberticide, l’Etat continue d’utiliser un
arsenal de mesures de rétorsion (Emprisonnement de journaliste, suspension de
publications, etc.) à l’encontre de journalistes et de médias qui gênent ses intérêts
politiques.

Les sources d’information sont protégées par le Code de la communication à travers les
articles 7 à 13. Dans les faits, dans des situations spécifiques, le parquet exerce des
pressions sur les journalistes pour qu’ils dévoilent leur source et parfois les journalistes
révèlent leurs sources par méconnaissance de leurs droits. L’article 7 introduit également
une nouvelle limite avec l’interdiction de publication des séances et débats
parlementaires à huis clos.

Lois d’accès à l’information


La majorité des journalistes consultés se plaignent des difficultés d’accès à l’information
auprès des ministères et pouvoirs publics. Il est très difficile pour un journaliste d’obtenir
des informations sur les données des ministères et administrations et sur l’action des
pouvoirs publics. Depuis le début de la crise sanitaire, les organisations de la société
civile réclament plus de transparence de la part de l’Etat. Elles multiplient les
interpellations à l’endroit du gouvernement pour que les citoyens soient informés des
actions du pouvoir public. « Vu le contexte actuel, il est d’une importance vitale pour le
pays l’adoption rapide d’une loi sur l’accès à l’information », ont réclamé des organisations

1 UNESCO, Etude sur le développement des médias à Madagascar, 2017


2 Ibid

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 9


de la société civile dans une lettre ouverte adressée au ministère de la Communication et
de la Culture3. Le projet de loi serait actuellement en discussion au niveau du parlement
mais certaines organisations de la société civile se plaignent du manque de consultations.
Certains acteurs de la société civile dont Transparency International Madagascar ont
cependant été associés aux travaux sur le nouveau projet de loi.

Dégradation de la liberté de la presse ?


En 2021, Reporter sans Frontières classe Madagascar au 57ème rang mondial sur 180 en
termes de liberté de la presse (un recul de 3 places comparé à 2020 et 2019). Ce
classement est resté stable sur les 5 dernières années mais représente une nette
amélioration comparaît au contexte en 2009 lorsque le pays était classé 134ème sur 175.
Cependant, cette appréciation de la situation de la liberté de la presse ne correspond pas
toujours à la perception des journalistes malgaches assez divisés sur le sujet. Si une
majorité de 50% des journalistes4 consultés estiment que la situation de la liberté de la
presse est en progrès, 40% des journalistes considèrent que la liberté de la presse se
dégrade.

Appréciation de la situation de la liberté de la presse par les journalistes


Satisfaisant 12%
En progrès 50%
En nette dégradation 31%
Très menacé 8%

Dans son rapport de 2019, le baromètre des médias africains souligne que le panel
d’experts consultés s’inquiète « du recul ressenti et constaté du droit à la liberté
d’expression. Les citoyens et les journalistes exercent leur droit avec appréhension et
prudence ».5 L’état général de la liberté de la presse et d’expression est faiblement
documenté et monitoré. Certains procès ou cas de violation n’ont pas été médiatisés et il
n’existe pas de mécanisme de veille effectif faisant un monitoring systématique des
attaques contre la liberté de presse, produisant des alertes et des rapports réguliers
utilisés comme un outil de plaidoyer par les associations professionnelles de médias et les
défenseurs des droits de l'homme. L’article 54 de la loi n°2020-006 sur la communication
médiatisée précise que l’Ordre des journalistes de Madagascar (OJM) a pour mission de
réguler l’exercice de la profession de journaliste. A cet effet, il est chargé de :

• Protéger le journaliste contre toute atteinte ou abus dont il fait l’objet dans
l’exercice du métier de journaliste

3 Midi Madagasikara, Loi sur l’accès à l’information : la société civile interpelle le gouvernement, 12/06/2020
4 Dans le cadre de cette étude, 25 journalistes (Radio, presse écrite, TV et médias en ligne) ont répondu à un
questionnaire au mois d’Avril 2021
5 Friedrich-Ebert-Stiftung (FES), Baromètre des médias africains, Madagascar 2019

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 10


• Assister les journalistes devant les autorités politiques, administratives et/ou
juridictionnelles
• Veiller au respect des droits et obligations du journaliste
Si l’OJM remplit sa mission d’assistance judiciaire et de suivi des cas d’atteinte à la liberté
de la presse, ses membres et son bureau sont bénévoles et manquent de ressources et
de capacités pour faire un monitoring systématique. Les rapports d’organisation de
défense de la liberté de la presse comme ceux de Reporters sans frontières restent
vagues sur le contexte à Madagascar.

D’autre part, l’OJM et d’autres observateurs estiment que le ministère de la Culture et de


la Communication (MCC) cherche à contrôler l’Ordre des journalistes en modifiant
certains articles qui régissent l’OJM et le mode désignation de son bureau à travers un
mode de scrutin à liste unique bloquée et sans panachage qui favoriserait la
représentation des journalistes des médias étatiques jugés plus proche du pouvoir. Selon
l’OJM, « Le MCC confond vraiment l’OJM avec un parti politique et la velléité de politiser
l’OJM est flagrante. L’État à travers le MCC veut maîtriser le journalisme, son emprise et
dans ce sens, un retour à la censure n’est pas à écarter »6. Cette tentative de prise de
contrôle de l’OJM est comparée à la manière dont les autorités ont instrumentalisé le
défunt syndicat des journalistes actifs jusqu’en 2016.

Les journalistes interrogés rapportent avoir été confrontés aux situations suivantes dans
l’exercice de leur métier.

Situations auxquelles les journalistes ont été confrontées


Autocensure 81%
Intimidation 31%
Interpellation 27%
Poursuites judiciaires 15%
Pressions pour divulguer des sources 27%
d'informations

Récents cas d’attaques sur des journalistes et impacts du Covid-19


Selon le baromètre médias de 2019, « les journalistes, aussi bien ceux de la presse
d’opposition, de la presse privée, que des médias publics, doivent faire attention à ce
qu’ils disent, à ce qu’ils publient ou ce qu’ils expriment sur la place publique et dans leurs
organes respectifs ».7

En 2019, d’après l’OJM, 12 journalistes au moins ont été auditionnés par la Police
judiciaire et le Parquet et 2 d’entre eux sont passés en procès. L’Etat a porté plainte contre

6 No comment, Tribune : Ordre des journalistes de Madagascar : En toute indépendance ? 06/11/2020


7 Friedrich-Ebert-Stiftung (FES), Baromètre des médias africains, Madagascar 2019

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 11


eux pour « diffamation ou diffusion de fausses nouvelles ». En 2020, le contexte s’est
caractérisé par la crise sanitaire du Covid-19 et les velléités des autorités de contrôler
toutes les informations relatives à la pandémie et la réponse des autorités. D’après
Reporters sans frontières (RSF), « les autorités malgaches ont pris des mesures parmi les
plus contraignantes pour les médias en Afrique »8. Les stations de radio et les chaînes de
télévision sont obligées de diffuser les informations officielles sur le coronavirus sous
peine de sanction. Les programmes de libre antenne donnant la parole aux auditeurs ont
également été interdits dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. Dans le cadre de l’état
d’urgence sanitaire, les journalistes et les médias font partis des services essentiels
réquisitionnés. La réquisition d’office des médias découle de la loi n°91-011 du 18 juillet
1991 sur la situation d’exception.

La réquisition s’est traduite par une restriction des libertés publiques et une
intransigeance des autorités. Plusieurs journalistes ont été l’objet de convocations, mise
en garde et détention préventive. Dans son rapport succinct sur l’année 2020, RSF note
que « la crise sanitaire a aussi été l’occasion d’un tour de vis sur le débat public, avec
l’interdiction des interventions en direct des auditeurs et l’obligation pour tous les médias
audio-visuels privés de diffuser les émissions consacrées à la pandémie sur les antennes
et les ondes des médias publics. Ceux qui n’ont pas respecté cette injonction ont été mis
en demeure ».

Arphine Helisoa,9 directrice de publication du journal "NyValosoa" a été envoyée en


détention préventive, le 4 avril 2020 ; Elle a été accusée de diffusion de fausses nouvelles
et d'incitation à la haine envers le président Andry Rajoelina. Le 8 avril 2020, une
animatrice TV de la télévision nationale a été placée en détention provisoire pour avoir
été soupçonnée de propagation de fausses nouvelles sur les réseaux sociaux concernant
le nombre de cas de coronavirus. Au même titre que Radio Soleil et Radio AZ, un média
proche de l’opposition, Real TV a été mis en demeure par le ministère de la
Communication et de la Culture, notamment pour ne pas avoir relayé en direct les
bulletins d’information sur l’épidémie diffusés par les médias publics. La sanction visant
Real TV serait liée également à l’interview de l’ancien président, Marc Ravalomanana qui
avait tenu des propos critiques sur la réponse sanitaire des autorités. Le MCC avait
qualifié l’intervention de Marc Ravalomana d’incitation à la haine et à la désobéissance
civile."10

8 RSF, Coronavirus à Madagascar : une chaîne de télé victime d’un acte de sabotage, 15/04/2020
9 Amnesty International, Madagascar : Sur fond de Covid-19, Une journaliste se retrouve en détention préventive alors
que les autorités continuent d’intimider la profession , 08/04/2020
10 RSF, Coronavirus à Madagascar : une chaîne de télé victime d’un acte de sabotage, 15/04/2020

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 12


Avec l’arrivée de la deuxième vague de Covid-19 et du variant Sud-africain, les autorités
en ont profité pour renforcer le verrouillage de la liberté d’expression. Le 22 avril 2021,
neuf émissions de radio et de télévision diffusées par 14 médias, ont été suspendues du
fait de leur caractère “susceptible de troubler l’ordre et la sécurité publiques et nuire à
l’unité nationale ». Les programmes visés proches du pouvoir et de l’opposition (des
débats politiques ou faisant intervenir des auditeurs ou téléspectateurs en direct), ont été
suspendus à titre préventif dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. Du fait des
nombreuses critiques envers cette décision, le MCC est revenu partiellement sur cette
mesure en autorisant certains médias à diffuser leur émission, après avoir signé une lettre
d’engagement, dans laquelle ils assurent que leur émission “ne comportera pas
d'incitation qui pourrait nuire à l'unité nationale, ni troubles à l'ordre public, ni incitation à
la révolte“. Certains médias d’opposition comme la chaîne MBS ont contesté la
suspension au niveau de la
justice. A cette occasion,
plusieurs journalistes
contactés par RSF ont
rapporté avoir beaucoup
de difficultés à couvrir ce
sujet sensible. Obtenir le
détail des chiffres
concernant les victimes ou
les malades et accéder aux
établissements de santé
mobilisés pour faire face à
l’épidémie demeurent
compliqué. Plusieurs
sources ont
Dessin de POV illustrant la suspension des 9 émissions dans le cadre
également peur de parler.11 de l’état d’urgence sanitaire, 23/04/2021, page Facebook de POV.

Auto-censure
Les limites de la liberté des journalistes se manifestent principalement par l’auto-censure.
Les médias appartiennent dans leur grande majorité à des dirigeants politiques et des
groupes économiques soutenant certaines tendances politiques. Plusieurs rapports ont
mis en lumière cette concentration de la propriété des médias alignés sur des intérêts
politiques. Les patrons de presse dictent leurs lignes éditoriales, la manière et l’angle
avec lesquels certains sujets doivent être abordés et les lignes rouges à ne pas dépasser.
Cette ligne éditoriale s’impose très clairement aux journalistes.

Par peur des représailles, beaucoup de journalistes et de rédacteurs pratiquent


l’autocensure. Pour les articles qui traitent des sujets épineux, on préfère choisir la voix du
conditionnel. A cause de cette crainte de répercussions négatives, la plupart des
journalistes se contentent de rapporter les faits sans aller au fond des dossiers. Parfois, les

11 RSF, Covid-19 à Madagascar : RSF appelle les autorités à laisser les journalistes travailler librement , 29/04/2021

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 13


patrons de presse indiquent clairement les informations à publier ou à ne pas traiter. La
crainte de perdre des annonceurs limite aussi les marges de manœuvre au sein des
organes de presse. Cette autocensure peut aller jusqu’à la rétention d’informations qui
seraient utiles pour la société et pour le grand public. Le baromètre des médias africains
montre que le problème d’auto-censure s’est aggravé depuis les précédents rapports de
2012 et 2016. Le pays ne répond pas à l’indicateur « Les journalistes et les rédacteurs ne
pratiquent pas l’autocensure dans l’audio-visuel privé et dans la presse écrite privée ». 54
% des journalistes consultés dans le cadre de cette étude affirme que l’auto-censure
s’exprime au quotidien.

« Au sein des médias, deux types de pratiques coexistent : l’autocensure par le journaliste
et la censure par la hiérarchie (rédacteur en chef ou patron de presse).12 L’auto-censure
est mentionnée comme un leitmotiv par la majorité des professionnels des médias. Elle
concerne tous les types de médias basés à Antananarivo, dans les autres centres urbains
et en zone rurale. Certains médias indépendants, en province, ont confié ne plus faire
d’information et ne plus diffuser de journal de peur de rencontrer des problèmes et
s’exposer dans un milieu isolé où il est facile de s’en prendre à un journaliste.

Harcèlement et intimidation sur les réseaux sociaux


A Madagascar, une équipe de surveillance dédiée aux réseaux sociaux, la cellule contre la
cybercriminalité, a été mise en place par le ministère de la Communication et de la
Culture (MCC), afin d’accroître la surveillance des contenus, notamment sur les réseaux
sociaux, et de veiller au respect de la loi sur la cybercriminalité. De nombreux journalistes
et membres de la société civile consultés rapportent toutefois que cette cellule
superviserait des « trolls » ou « sympathisants du pouvoir » afin de perturber les débats et
discussions sur les réseaux sociaux mais aussi attaqués directement des journalistes et
activistes. Ces attaques impliqueraient des diffamations, insultes, menaces et messages
d’intimidation.

La pression sur les activistes et les journalistes sur les réseaux sociaux est davantage
accrue, à cause de l’agressivité des défenseurs du camp du pouvoir omniprésents sur les
réseaux sociaux. Certains activistes ont même subi des menaces réelles, d’autres ont dû
endurer une intrusion dans leur vie privée. Par exemple, les citoyens qui osent critiquer
les actions du gouvernement ou le président de la République subissent les critiques
acerbes des « sympathisants » de l’Administration. Certains dossiers personnels sont
lâchés sur la place publique. Une activiste qui a publié le programme de voyage du
Président de la République a été placée en détention provisoire.13 38% des journalistes
consultés ont rapporté avoir déjà été l’objet de harcèlement sur Internet.

L’association des femmes journalistes n’a pas évoqué la question du harcèlement en ligne
comme un problème identifié de protection pour les femmes journalistes mais a estimé

12 UNESCO, Etude sur le développement des médias à Madagascar, 2017


13 Friedrich-Ebert-Stiftung (FES), Baromètre des médias africains, Madagascar 2019

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 14


qu’il serait pertinent d’étudier la question qui reste totalement inexplorée. Il faut
reconnaître qu’il y a en général à Madagascar une absence totale de sensibilisation aux
questions de sécurité digitale.

Difficulté d’accès aux sources d’information


Le climat de méfiance autour de la liberté d’expression rend dans de nombreux cas
difficiles l’accès à des sources d’information et de nombreuses personnes ressources sont
réticentes à se confier et transmettre des informations à des journalistes. Dans la plupart
des cas, ces sources d’informations préfèrent rester anonyme et il est commun de
retrouver dans des articles des mentions se référant au caractère anonyme de la source.
L’anonymisation des sources affaiblit dans certains cas la crédibilité d’articles et
reportages. De nombreux journalistes émettent des doutes sur les garanties autour de la
protection des sources d’information. 27% des journalistes interrogés affirment avoir
déjà subi des pressions pour révéler leurs sources d’information. 42% des journalistes
expriment des difficultés à accéder à des sources crédibles d’informations ou des
experts.

Sujets et thèmes tabous


Au cours de la crise sanitaire de Covid-19, l’Etat a démontré sa volonté de contrôler
l’information et de couper court aux critiques relatives à la riposte des autorités ou
contestation des statistiques et des bilans chiffrés quotidiens de l’épidémie. Il n’y a pas de
transparence sur la question du Covid. En dehors des bilans officiels, les journalistes n’ont
eu aucun accès aux institutions de la riposte gérant la pandémie, Centre de
commandement opérationnel (CCO), Centres régionaux de commandement
opérationnel de lutte contre le Covid 19 (CRCO) et les Centres hospitaliers universitaires
(CHU). Certains journalistes ont essayé de croiser les bilans officiels avec les statistiques
des centres hospitaliers et ont été empêchés de poursuivre leurs démarches.

Plusieurs journalistes ont mentionné le fait que les autorités avaient également cherché à
contrôler l’information au cours de précédentes crises sanitaires comme l’épidémie de
peste en 2017. La crise du Kéré14 dans le Sud est également une situation de crise qui
donne lieu à certains bridages et contrôle de l’information (Comme l’ont démontré les
attaques à l’encontre de la correspondante internationale Gaëlle Borgia). Le but est de
taire toute critique contre l’action et la gestion de la crise par les autorités. D’après RSF, la
corruption, notamment dans le secteur des ressources naturelles ou de l’environnement,
reste un sujet difficile à traiter. Les journalistes consultés ont évoqué différents sujets
sensibles. Les cas de corruption et les intérêts des patrons de presse ressortent comme
les sujets les plus délicats.

14 « kéré », un mot du dialecte antandroy (l'ethnie qui peuple cette région) qui signifie « être affamé » et désigne plus
généralement la famine qui sévit régulièrement sur la Grande Île.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 15


Sujets et thèmes tabous difficiles à aborder
Covid 19 23%
CVO (Covid Organics) 19%
Kéré (Famine dans le sud) 15%
Cas de corruption 58%
Intérêts des patrons de presse 42%
Droits de l'homme 15%
LGBT 19%
Autorités locales 4%
Foncier 4%
Opposition/Politique 19%

A l’initiative de l’Unesco et de l’OJM, une publication centrée sur le journalisme


d’investigation, « Tandraka » a été lancée mettant à contribution des journalistes
malgaches de différents organes de presse. La revue a fusionné avec un autre réseau de
journalistes d’investigations malgaches portés par Transparency International initiative
Madagascar, Malina. De nombreux journalistes considèrent la publication Tandraka
comme l’unique espace de liberté où ils peuvent traiter de tous les sujets en profondeur
et exercer librement leur métier de journalisme sans contrainte. La revue bimensuelle est
gratuite et différents bailleurs de fonds soutiennent financièrement des enquêtes pour
chaque numéro. Transparency International cherche actuellement des pistes pour assurer
la pérennité de la revue et du réseau de journalistes d’investigation mais aussi une façon
de diffuser les contenus d’investigation dans d’autres formats notamment
radiophoniques.

Présentation du paysage médias

Manque de données et « assainissement » du paysage


médiatique
Depuis la fin de la censure et la libéralisation du paysage médiatique, le nombre
d’organes de presse, de titre et de stations se sont multipliés. Les estimations15 parlent
d’une quarantaine de journaux quotidiens et de magazines, plus de 300 radios, une
trentaine de chaînes de télévision ainsi qu’une dizaine de principaux sites « pure-players »
et blogs, qui sont actifs avec des audiences respectables. Il est cependant difficile
d’obtenir des chiffres exacts que cela soit auprès de l’OJM ou du département régulation

15 Friedrich-Ebert-Stiftung (FES), Baromètre des médias africains, Madagascar 2019 ; UNESCO, Etude sur le
développement des médias à Madagascar, 2017

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 16


des médias du ministère de la Culture et de la Communication (MCC). Le MCC a déclaré
que des données précises seront disponibles sur le paysage des médias à l’issue de
l’opération « d’assainissement » du secteur en cours.

En 2020, le département du ministère a lancé une « opération d’assainissement » qui


devait se en 2021 avec la publication d’un rapport final. Toutes les sociétés audio-
visuelles et les stations de radios et télévisions doivent procéder à une déclaration des
preuves de l’accomplissement des formalités légales et réglementaires relatives à la
création et à l’exploitation de ces stations-radios et télévisions. Ces formalités concernent
essentiellement l’attribution de licences d’exploitation et l’autorisation d’extension entre
les mains des responsables de ces stations. Les irrégularités administratives éventuelles
constatées, contraindront le ministère à prendre des mesures conformément à la
législation et allant jusqu’à la fermeture de ces médias.

Il est difficile pour le moment d’anticiper le fait que cette initiative répète les finalités
politiques des opérations d’assainissement passées. Dans un article du 15 octobre 2010,
RSF écrivait : « sous couvert d’une opération dite “d’assainissement du paysage
audiovisuel”, le Gouvernement malgache fait le grand ménage et censure une multitude
de petites stations privées, toutes créées depuis 200916 ».

Jusqu’à ce que cette opération d’assainissement soit effective, la suspension de la


délivrance de nouvelles licences d’exploitation de stations audio-visuelles privées ne sera
pas levée. Ce gel des licences est effectif depuis 2010 même si cette situation donne lieu
en parallèle à des transferts et trafics de licences existantes. De plus, le ministère attendra
également la fin de l’opération d’assainissement pour instituer la mise en place de
l’Autorité Nationale de Régulation de la Communication Médiatisée qui sera en charge
entre autres d’octroyer ou de retirer les licences d’exploitation.

Propriété et indépendance des médias


La grande majorité des médias appartiennent à des hommes ou à des partis politiques.
« Quand ils appartiennent à des hommes d’affaires ou à des sociétés anonymes, les
journaux, radios et télévisions ont toujours tendance à défendre des intérêts politiques et
des intérêts privés ».17

Nom du groupe18 Médias Appartenance / affiliation


GROUPE ECO Quotidien : L’Express de Edgard Razafindravahy a été
PRINT, propriété de Madagascar – Ao Raha – candidat aux présidentielles de
Edgard L’Hebdo de Madagascar – 2013. Il est l’un des fervents
Razafindravahy Revue Essentielle – Business défenseurs du Mouvement pour

16 RSF, Près de 80 stations audiovisuelles fermées depuis la fin de l’été | RSF, 15/10/2010
17 Friedrich Ebert Stiftung, Les impacts de la structure de la propriété des médias sur la couverture médiatique, la
représentation politique et le travail du journaliste, 2019
18 ECES/PEV Madagascar, étude sur la propriété des médias, 26/09/2020 (Actualisé au contexte de 2021)

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 17


Mag ; Radio Antsive ; RTA la Refondation de Madagascar.
télévision (Proche du Président Rajoelina)
La Vérité – Madagascar Mamy Ravatomanga (L’un des
SMC PRESSE ou
Matin – Inona no Vaovao – plus puissants opérateurs
GROUPE SODIAT,
Ino Vaovao –www.matin.mg économiques du pays) est un
propriété de Mamy
– www.laverite.mg; radio proche du président Andry
Ravatomanga
M3FM ; Télévision M3TV Rajoelina.
Ancien ministre des Affaires
ULTIMA MEDIA, Taratra - Les Nouvelles –
étrangères, maire
propriété de Naina Bôjy - Newsmada – Radio
d’Antananarivo ; proche d’Andry
Andriatsitohaina Alliance 92 FM
Rajoelina
Groupe TV Plus,
propriété de Jean www.tvplusmadagascar.com Sénateur proche d’Andry
Paul Nicolas ; Radio plus; TV plus Rajoelina
Rabemananjara
Viva Media Actuel Président de la
Viva radio ; Télévision Viva
Andry Rajoelina République
GROUPE FREE,
Actuel ministre de la Culture et
propriété de Quotidien Freenews ; Free
de la Communication ; proche du
Lalatiana FM
Président
Rakotondrazafy
Hajo Andrianainarivelo est
Groupe Kolo, Hajo Actuellement ministre de
Kolo FM, Kolo TV
Andrianainarivelo l’Aménagement du territoire et
proche du Président
Marc Ravalomanana a gouverné
le pays jusqu’en 2009. Il a été
candidat aux élections
Groupe MBS
présidentielles de 2018. La
propriété de Marc Radio et Télévision MBS
station MBS dispose d’antennes
Ravalomanana
dans les provinces de
Madagascar telles qu’à
Antisrabe, Toamasina, etc.
Guy Rivo Randrianarisoa est
GROUPE EVITRAS, député issu du parti TIM. Le parti
Ny Valisoa, Takotitsika, Diva,
propriété de Guy TIM ‘appartient’ à Marc
Basy Vava
Rivo Randrianarisoa Ravalomanana.

Fredy Rajaofera-Andriambelo est


GROUPE MA-TV, un ancien candidat aux
Madagascar-Laza – Zay Zany
propriété de Fredy législatives de 2013. Il est le fils
– Ma-Hery, Radio Ma FM,
Rajaofera- du couple Willy et Marthe
Télévision Ma Tv
Andriambelo Andriambelo, propriétaires du
Groupe WM.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 18


Le média n’affiche aucune
obédience politique a priori.
Le couple de propriétaire
GROUPE WM,
n’affiche aucune obédience
propriété de Willy et Midi Madagasikara –
politique a priori, de même que
Marthe Gazetiko – Imprimerie SNIC
le média semble politiquement
Andriambelo
neutre, en général.

Un phénomène de concentration de la propriété se manifeste et s’accélère avec


l’apparition de grands groupes médias et de patrons de presse possédant plusieurs
médias. Les groupes les plus importants et influents ne cessent d’étendre le nombre de
titres et de stations constituant leurs activités de médias et de communication. Ces grands
groupes sont également impliqués dans d’autres secteurs de la vie économique. Le
paysage médiatique se caractérise par un niveau élevé de concentration qui nuit au
pluralisme et à la diversité. Il n’existe aucune réglementation cohérente sur la propriété
des médias à Madagascar — ce qui ne favorise pas la transparence. Si en province, les
radios ont moins tendance à se transformer ou se réunir en grands groupes médiatiques,
les hommes politiques et notables locaux investissent dans les stations de radio pour
conquérir leur électorat.

« En même temps, les alliances entre les grands groupes se multiplient. Cette structure de
propriété renforce le déséquilibre entre les médias, et constitue une menace sur le
pluralisme et la diversité des points de vue, ainsi que sur le professionnalisme des
journalistes. En effet, ces groupes étant la propriété de personnalités politiques et
économiques influentes ayant des visées politiques, les journaux en deviennent
complaisants, tandis que les journalistes deviennent manipulateurs, partisans ou
dépendants. Les informations sont généralement couvertes de manière superficielle,
partiale et parfois dramatique ».19

Dans son étude sur l’impact de la propriété des médias, FES relève plusieurs impacts liés
à cette concentration extrême des médias :

• Tendance au monopole du marché́ publicitaire et des informations publiques


• Des journaux complaisants vis-à-vis des annonceurs
• Menace envers le pluralisme et le professionnalisme
• Une couverture médiatique superficielle, partiale et dramatisante
• Des journalistes partisans, dé- pendants et manipulateurs
Dans le paysage médiatique, il est difficile d’identifier des médias qui pourraient être
qualifiés d’indépendants. L’écrasante majorité des chaînes de TV et de la presse écrite
sont affiliés à des personnalités politiques ou des acteurs économiques servant des
intérêts politiques. Parmi les radios se démarquent une minorité de radios commerciales,

19 Ibid ; UNESCO, Etude sur le développement des médias à Madagascar, 2017

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 19


associatives et confessionnelles qui ne sont pas partisanes mais qui pour la plupart sont
relativement isolées et exposées à l’exception du réseau de radios catholiques. Les
médias en ligne embryonnaires où il y a très peu de pure players n’ont pas encore été
réellement investi par les forces politiques et quelques médias indépendants comme
2424.mg s’y démarquent.

Mais du coup cette configuration du paysage médiatique se traduit par un règne des
patrons de presse qui imposent leur ligne éditoriale et forcent les journalistes à
l’autocensure. Les propriétaires tiennent des réunions avec les responsables de rédaction
pour leur transmettre les directives politiques. A titre d’exemple, un journaliste du
groupe appartenant au Maire d’Antananarivo, affirme qu’il est impossible de traiter de
sujets qui remettent en cause la gestion municipale comme par exemple la mauvaise
gestion des ordures. Il est impossible de traiter des sujets sous un angle qui nuit aux
intérêts directs du patron de presse. De nombreux journalistes le vivent comme une
contrainte qui dénature l’exercice du métier, empêche les journalistes de traiter des sujets
en profondeur et avec professionnalisme. L’angle de traitement des sujets reste
généralement très descriptif, parfois sans approfondissement. Les sujets sont abordés de
manière superficielle et expéditive. Cette véritable ingérence des patrons de presse est
plus intense au niveau de la presse écrite, de la télévision et des grandes radios
nationales mais elle est moins accrue au niveau des stations de radio dans les provinces.
Les journalistes naviguent dans un système où information et propagande se
confondent.20

Espace polarisé reflet des tensions politiques


L’autre caractéristique du paysage médiatique Malgache mais qui découle en partie de la
structure de la propriété des médias, c’est une polarisation exacerbée. L’espace
médiatique est clivant et se divise de façon quasi-manichéenne entre presse
d’opposition et presse pro-gouvernementale. Ainsi dans le cadre des crises politiques,
les médias d’opposition deviennent des cibles pour les dirigeants, tandis que les médias
affiliés au pouvoir sont tout simplement la proie des colères populaires. Durant les crises
politiques, les médias proches du pouvoir sont victimes de pillages et d’incendies. « C’est
ce qu’il s’est passé en 2002 pour la chaîne pro-Ratsiraka Radio Tsioka Vao (RTV) et en
2009 contre la radio et la télévision nationales, puis contre les chaînes du groupe MBS de
Marc Ravalomana21 ». Les médias sont un bon baromètre des tensions politiques et dans
les périodes précédents les crises, les propos des médias se font plus agressifs vis-à-vis
du camp adverse. Les médias aussi bien du camp gouvernemental que de l’opposition
font usage d’un journalisme particulièrement agressif et belliqueux. Il n’existe pas au sein
des médias malgaches de démarche apaisante faisant place au débat. Plusieurs
journalistes et analystes du secteur comme l’équipe d’Ilontsera ont mentionné cette

20 Ibid ;
21 Ibid

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 20


absence de débat, de présentation neutre de perspectives et de points de vue différents.
Il y a un grand besoin d’apporter des espaces apaisés de débat et de dialogue.

Au cours de la période du 10 au 30 juillet 201522, l’Unité́ Monitoring des Médias de l’ONG


Communication Idea Development (CID) a recensé des appels à la violence, des
stéréotypes sexistes contre des femmes politiques, et des propos diffamatoires de
journalistes à l’égard de personnalités politiques accusant ces derniers d’actes illicites :
utilisation des biens publics à des fins personnelles, organisation de troubles en vue de
coup d’Etat, corruption, vente de biens domaniaux aux étrangers, exploitation clandestine
de bois de rose, fraudes et achat de voix dans le cadre des élections communales, dérives
mafieuses et actes frauduleux. L’Unité́ de Monitoring des Médias de l’ONG
Communication Idea Development (CID) a également réalisé un monitoring sur l’attitude
des médias face aux foyers de tensions électorales et classé les médias en fonction de
leurs attitudes.

Indépendance / objectivité / pluralisme


1 4
TV Plus Radio Plus Les
RDJ
Nouvelles
RDB Madagascar-
tribune.com

Ma- Midi
LAZA L’Express

Apaisement Alarmisme
Rassurant Amplification
Faible
Médiation
médiation

Antsiva
RNM Kolo FM

Inona no Vaovao
I-BC TV
Ligne de Mire
KOLO TV
Tia
La Gazette Tanindrazana
TVM
La
Vérité 2 VIVA Radio 3 Madagate.org

Free FM Free News

Orientation politique / Partial / Faible pluralisme

Cartographie de l’attitude des médias pendant les élections23

22 Communication Idea Development (CID)/PEV Madagascar, Les médias Malgaches face aux défis de
l’indépendance et de l’apaisement, Février 2018
23 Ibid

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 21


Les échéances électorales exacerbent naturellement les tensions politiques et donc les
attaques par médias interposés et la polarisation du paysage médiatique. Le début de
l’année 2021 a connu une crispation inquiétante des tensions politiques qui pourrait
s’expliquer par la pandémie de Covid 19 et les mesures sanitaires et qui se sont traduites
par des discours particulièrement virulents contre l’opposition et le pouvoir dans les
médias. Les radios de l’opposition (MBS, AZ, SOA radio, etc) se sont coalisées autour de
l’émission quotidienne Miara Manonja diffusée à la même heure sur les ondes des radios
de l’opposition. Le programme se focalise sur la critique agressive de l’action
gouvernementale et des membres de la majorité. En réponse, le camp du pouvoir a lancé
son propre programme, Tambatra, animé par la ministre de la Culture et la
Communication et diffusé par une coalition de radios (Viva Radio, Viva TV, Free FM,
Alliance FM, Taratra FM, Kolo TV, Kolo FM, etc). Tambatra défend les idées du pouvoir et
attaque le camp de l’opposition. Plusieurs directeurs de radios ont rapporté avoir reçu
des sollicitations écrites et orales de collaboration de la part du MCC afin de diffuser sur
leurs ondes le programme Tambatra. Ces sollicitations sont souvent perçues par les
directeurs de stations comme de la persuasion déguisée. Au-delà de ces deux émissions,
c’est presque tout le paysage médias qui se trouve polarisé. En avril 2021, les autorités
ont suspendu temporairement 9 émissions jugées clivantes dont Miara Manonja et
Tambatra. Avant cette mesure et en marge des appels à manifestation de l’opposition, les
autorités avaient déjà menacé de mettre un terme à la diffusion de Miara Manonja. Cette
confrontation du pouvoir et de l’opposition coalisés autour de plusieurs médias n’est que
la réitération de confrontations politiques passées s’affrontant par médias interposés.
L’émission Miara Manonja était apparue une 1ère fois avant de disparaître au cours d’une
précédente période de tensions politiques, en 2018.

Ainsi illustrés par la journaliste Lova Rabary-Rakotondravony, « Au-delà de la polarisation,


les propos relayés se durcissent progressivement, privilégiant parfois les attaques
personnelles, dans une logique de surenchère perpétuelle. Le ton employé représente un
risque de radicalisation des partisans »24. Mirana Razafindrazaka, de l’ONG
Communication Idea Development (CID) confirme cette exacerbation de la polarisation et
estime que le ton utilisé nuit à la crédibilité des médias et indique craindre que cela ne
conduise vers de nouvelles tensions, la diffusion se faisant à grande échelle. Il est
inquiétant de constater cette détérioration alors que la prochaine élection présidentielle
se déroulera seulement fin 2023 et qu’il est à craindre que les tensions et radicalisation
des médias ne cessent de s’intensifier à l’approche de cette échéance électorale.

Presse écrite
La presse écrite est forte d’une quarantaine de titres. Quatre grands quotidiens en
français ou bilingue tirent à environ 10 000 à 20 000 exemplaires (Midi Madagasikara,
L’Express de Madagascar, La Gazette de la Grande île, Les Nouvelles) et concentre la
majorité des revenus publicitaires. De nombreux quotidiens au tirage plus faible ont vu le

24 Studio Sifaka, « …Présenter les faits tels qu’ils sont et non les biaiser » - Les journalistes au-devant de leurs
responsabilités - Studio Sifaka - Actu, musique, conseils et débats pour les jeunes à Madagascar

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 22


Kiosque à Journaux, Antananarivo

jour après 2009 pour porter les tendances politiques qui ne sont pas affichées par les
grands quotidiens.

Des gratuits commencent à faire leur apparition : le mensuel culturel No Comment. Des
journaux régionaux ont vu le jour éphémèrement avant de disparaître comme la Tribune
de Diégo et la Dolphin Gazette à Fort Dauphin. Ino Vaovao a des éditions décentralisées
avec des informations régionales (Mahajanga, Toamasina, etc) mais éditées à
Antananarivo. Il existe également des revues de qualité financées par des bailleurs
internationaux comme Tandraka et Politika25 qui font la part belle à des dossiers
thématiques et des investigations.

La presse écrite reste l’apanage de l’élite politique et économique de la ville. Même si


chaque jour les kiosques de journaux attirent des lecteurs (Vendeurs de rues, passants,
etc.) qui lisent les unes des différents journaux et ces lectures de kiosque reste un
phénomène très populaire. Le sondage MICS Madagascar reste sans appel 9% d’hommes
et 8% de femmes sont exposés à des journaux26. Le niveau d’exposition aux médias
traditionnels et à la presse écrite demeure faible chez les femmes comme chez les
hommes. Le taux d’alphabétisme serait de 74.8% selon les données UNESCO. Une autre
enquête réalisée par Stileex sur la presse écrite et couvrant uniquement la capitale

25 Politika est une revue financée et publiée par Friedrich-Ebert-Stiftung


26 MICS, Mass Media, Communication and Internet, Madagascar 2018, MICS6-Madagascar-2018-Media.pdf

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 23


Antananarivo estime que 42% des habitants de la capitale lisent les journaux (Chiffre qui
semble exagéré et doit comprendre les nombreux lecteurs occasionnels des kiosques).
Le sondage comprend un classement des journaux les plus lus et les critères qui dictent
les choix des lecteurs vers tel ou tel organe de presse. Enfin l’intérêt des lecteurs de la
presse écrite porte principalement sur l’actualité (47%), Jeux et divertissement (19%),
politique (10%), faits divers (7%), etc. Toutefois si ces chiffres donnent des tendances, ils
sont à prendre avec des pincettes et jusqu’à présent aucune enquête poussée n’a été
initiée sur l’audience des médias et les besoins d’information.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 24


Autocentré sur la capitale
La distribution de la presse écrite reste confinée dans les grandes villes et sur la capitale
plus particulièrement. L’état du réseau routier rend difficile la distribution des journaux et
bien souvent les journaux du jours sont disponibles en fin de journée ou le lendemain sur
Toamasina ou Antsirabe et quelques jours après sur Fianarantsoa, Toliara, Mahajanga ou
Antsiranana. Dans d’autres capitales provinciales comme Fort Dauphin, les journaux sont
totalement absents. Mais en général même dans les grandes villes en dehors
d’Antananarivo, la presse écrite est très marginalement disponible et suivie.

Il s’ensuit que la presse écrite est d’autant plus autocentrée sur la capitale dans sa
couverture et son analyse ce qui ne fait que renforcer la perception négative de ce média
en province. Les différents journaux comptent un nombre limité de correspondants en
province et les sujets qui traitent de questions en dehors de la capitale sont bien souvent
traités de façon superficielle et en distanciel. D’une certaine manière la barrière
linguistique joue également un rôle, les populations sont moins francophones en
province et ne s’identifient pas toujours avec le malgache Merina de la capitale qu’ils
comprennent parfois de façon limitée.

Vecteur d’intérêts politique et économique


Si de manière générale, les médias sont pour la plupart des vecteurs d’intérêts politiques,
c’est un fait encore plus prononcé pour la presse écrite où l’ingérence et le contrôle du
patron de presse, l’imposition d’une ligne éditoriale sont plus poussés. Les journalistes de
la presse écrite ont une plus grande tendance à se dire contraint par l’auto-censure. Cela
pourrait s’expliquer par le fait que la presse écrite s’adresse pour de nombreux titres aux
élites ou à des partisans d’une tendance politique. Elle est un média qui se veut faiseur
d’opinion.

Dans l’hyperpolarisation des médias de ce début d’année 2021, il est intéressant


d’observer que les principaux titres (Midi Madagasikara, L’Express de Madagascar, Les
Nouvelles) sont alignés avec le camp du pouvoir et tirent à boulet rouge sur l’opposition.
Si Midi Madagasikara arrive à maintenir une ligne relativement neutre même si plutôt pro-
régime, l’Express a tenu des propos particulièrement agressifs à l’encontre de
l’opposition. L’image de la presse écrite ressort écornée par cette polarisation politique et
les Malgaches éprouvent une certaine méfiance à l’égard des journaux.

Modèles économiques désuets réticents aux changements et


passage au numérique
Les recettes des journaux malgaches proviennent essentiellement des recettes
publicitaires, les ventes présentent une moindre partie et les abonnements sont
quasiment nuls. Cependant comme mentionné plus haut, les quatre principaux titres
monopolisent les recettes publicitaires. Le modèle économique de la presse écrite n’a
guère évolué et n’a que timidement amorcé pour certains titres ou groupes de presse une

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 25


transition vers le numérique. En effet, les principaux groupes de presse se sont dotés d’un
site internet qui ne fait que reproduire les articles de la version papier. Les sites des
différents médias sont pour la plupart désuets dans leur design et ergonomie.

Au début de la pandémie de Covid-19 et pendant le confinement du pays, pendant


plusieurs mois, les journaux ne sont plus parus et ont été publiés exclusivement sur leur
site internet. Cependant, cela ne s’est pas traduit par un investissement sur les sites
internet des groupes de presse et sur un changement de stratégie numérique. L’un des
freins au changement est la structure de la propriété de la presse qui fait que les titres
sont principalement considérés comme des outils d’influence politique dont on ne
cherche pas en priorité la rentabilité.

Comme partout en Afrique, la pandémie a eu un fort impact économique sur le secteur


des médias avec la disparition de certains titres, des licenciements de journalistes et des
restrictions de salaire. Par exemple, le groupe Eco print27 a été contraint de supprimer
trois titres (L’hebdo, l’Essentiel et le Business Mag) et licencier une dizaine de journalistes.
Le groupe Matv s’est résigné à payer à moitié la majorité de ses journalistes. Mais tous les
groupes et médias dans leur ensemble ont subi l’impact de la crise économique et
sanitaire.

Radios
Plus de 300 radios seraient actives à
Madagascar. La radio nationale Radio
Nasionaly Malagasy (RNM) a l’exclusivité de
la couverture nationale et diffuse des
programmes en malgache et en français. La
RMN dispose de stations officielles
régionales et d’un réseau d’une centaine
d’antennes locales (Bon nombre d’émetteurs
et d’antennes ont régulièrement des
dysfonctionnements qui ne permettent pas
une pleine couverture du réseau). En tant
que média d’Etat, la RMN sert la propaganda
étatique et défend l’action du gouvernement.
La radio nationale (Anciennement Radio
Tananarive) vient de fêter ses 90 ans et dans
le sillage de son jubilé la RMN prévoit de se
doter d’un site internet et d’une webradio. Le
reste du paysage radiophonique se partage Tamatave, local de la RMN

entre les radios commerciales, associatives et confessionnelles qui sont limitées dans leur
couverture locale. Les radios privées ne peuvent légalement émettre au-delà de 150 km
et n’ont pas le droit d’utiliser des émetteurs de plus de 500 Mega Watts. Plusieurs

27 Il s’agit du groupe comprenant l’Express Madagascar, Radio Antsiva

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 26


universités (Antananarivo, Fianarantsoa, Toilara, etc) disposent également de radios
universitaires qui émettent des programmes autour de la vie des campus, des activités
universitaires et font également de la vulgarisation scientifique. Ces radios sont des outils
d’éducation intéressants où souvent des étudiants en communication et journalisme font
leurs 1ères armes.

Avec son réseau RESAT qui


regroupe 16 radios
catholiques diocésaines, la
Radio Don Bosco catholique
(RDB) dispose du seul réseau
de radios privé ayant une
couverture nationale. Le
réseau de radios est considéré
comme une source fiable et
indépendante d’information
qui traite de tous les sujets
avec un angle local et
communautaire. Les Nations
Unis avec l’appui de la
fondation hirondelle avaient Radio Campus Rofia, Université de Fianarantsoa
pour projet de monter une
radio à couverture nationale pour encourager la cohésion sociale et l’accès à une
information impartiale mais les autorités ont bloqué le projet en raison du monopole de la
RMN et du fait du gel des licences.

Les Nations Unies et la Fondation Hirondelle ont donc finalement eu recours à la création
du Studio Sifaka avec la production de programmes radiodiffusés par un réseau de radios
partenaires. En dehors du réseau RESAT, il existe également de nombreuses radios
évangéliques et des radios musulmanes qui s’implantent dans les villes du Nord. Les
radios privées sont plus ou moins généralistes et privilégient le divertissement. La
musique et les émissions de divertissement dominent la grille des programmes. Au même
titre que les autres médias, la radio est aussi instrumentalisée par les notables et
politiciens locaux à des fins de propagande politique. De nombreux députés ou notables
locaux sont propriétaires d’une station. Malgré cela le paysage radiophonique demeure
par bien des aspects le seul espace d’opportunités où des radios indépendantes peuvent
opérer.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 27


La radio reste le principal média des
Malgaches et surtout le plus accessible
en province et en milieu rural. D’après
MICS, 49% d’hommes et 41% de femmes
déclarent être exposés spécifiquement à
la radio. La radio fournit le principal
accès, et est prise comme la source
d’information la plus fiable pour la
majorité de la population rurale. 49%
des ménages malgaches disposeraient
d’un poste radio (Avec des grands écarts
entre notamment la région
d’Antananarivo avec 70% et la région
d’Androy avec 15%). En 2008, selon une
évaluation du PNUD, la radio était la
source principale d’information (71%).28

A Antananarivo, la radio se classe


deuxième après la télévision en termes
d’audience. D’après Stileex29, 63% des
habitants d’Antananarivo écoutent la Radio Catholique Haja, Antsirabe, Réseau RDB)
radio. Les radios les plus écoutées dans
la capitale sont la radio Don Bosco (18%), Radio ACEEM (17%), la Radio des jeunes-RDJ
(9%), la Radio Nationale (7%), Skyone (6%), Radio record (5%), Radio Vaovao Mahasoa
(3%) et radio Antsiva (3%). Les programmes les plus appréciés sont la musique (32%), les
Tantara (Feuilletons radiophoniques) (23%), l’actualité (12%), les programmes religieux
(11%), les débats (8%), etc.

28 UNDP/UNDEF, La communication pour l’empowerment à Madagascar, Une évaluation des besoins communautaires,
2008
29 Stileex, Audience radio Madagascar, 06/12/2019

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 28


L’un des grands absents du
paysage médiatique à
Madagascar sont les médias
communautaires. Faute de
législation appropriée, il n’y
a pas de radios
communautaires et celles
qui ont été initiées sont
devenues de fait des radios
privées associatives.
Comme relevé par l’Unesco,
« A Madagascar, la loi n’a
pas prévu de statut ni de
fréquences réservées aux
médias communautaires.
Radio, Antsirabe L’Etat n’apporte pas d’appui
spécifique, telles que des
subventions ou une détaxation, ni de traitement de faveur aux radios communautaires ou
associatives »30. Rien ne les distingue juridiquement des radios privées.

Au milieu des années 1990, la coopération Suisse a soutenu la création de plusieurs


radios rurales communautaires dans les régions d’Imerina, Menabe et Betsileo. Ces radios
ciblent notamment le milieu paysan dans les zones rurales reculées. La coopération suisse
a notamment permis la mise en place des radios Mampita de Fianarantsoa et Magneva de
Morondava. Toutefois, ces radios au fonctionnement associatif et communautaire sont
minoritaires. Le réseau des radios rurales de Madagascar qui avait été mis en place il y a
de cela quelques années n’a plus d’activités.

Programmes
En majorité, les radios
consacrent une grande
partie de leurs grilles des
programmes à la musique
et au divertissement mais le
journal reste un
programme central où l’on
couvre principalement
l’actualité locale mais aussi
nationale et plus
marginalement
internationale. En dehors
(L’équipe de la radio associative Mampita, Fianarantsoa)
de l’actualité locale et

30 UNESCO, Etude sur le développement des médias à Madagascar, 2017

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 29


nationale, les sujets clés abordés par les radios sont l’éducation et la santé qui sont les
thèmes qui selon les radios intéressent le plus leurs auditeurs.

Principaux programmes des radios


Musique 52%
Libre antenne 48%
Journal actualité 74%
Divertissements 33%
Publicité 22%
Programmes religieux 33%
Débats 11%
Dédicaces, annonces 11%

Comme relevé par des professionnels du secteur, il y aurait beaucoup à faire pour
améliorer la qualité des programmes des radios, s’assurer qu’elles répondent aux besoins
d’informations des communautés et que leurs programmes touchent à des questions clés
de développement. De nombreuses thématiques de gouvernance ou liées aux questions
de l’environnement et du foncier ne sont pas abordées. Les problématiques des paysans
et du développement rural sont aussi marginalement abordées. La majorité des
journalistes des radios n’ont pas la maîtrise des notions basiques du journalisme. Le
manque de formation des journalistes (code éthique des médias et réflexe de vérification
de l'information par exemple), les difficultés économiques et techniques ainsi que le
manque d'infrastructure sont des obstacles majeurs rencontrés par les journalistes des
radios. Les journalistes ne se conforment pas toujours aux normes professionnelles et la
diffusion d'informations non vérifiées est courante sur les radios qui sont également un
vecteur de rumeurs et fausses informations. Pour attirer et fidéliser les auditeurs, certaines
stations de radio réalisent des émissions interactives et donnent aux auditeurs l'occasion
d'exprimer leurs opinions et leur expérience sur différents thèmes et sujets. Même si cela
répond à un besoin de la population, cette activité parfois mal maîtrisée ouvre une
fenêtre pour la diffusion de fausses informations et de rumeurs.

Besoins et défis techniques


Les journalistes de radios consultés ont exprimé les besoins suivants :

Besoins des radios


Equipements 96%
Formations 78%
Maintenance 48%
Aide financière 67%
Moyens de transport 67%

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 30


Connexion Internet 59%
Communications 30%

Les radios sont principalement


confrontées aux défis techniques qui
menacent leur bon fonctionnement. La
majorité des radios opèrent avec des
équipements rudimentaires qui
rencontrent de nombreux
dysfonctionnements (Microphones,
équipements de montage, tables de
mixage et ordinateurs usagés, etc). Les
radios ont plus particulièrement des
difficultés à entretenir leurs émetteurs.
La grande majorité des radios ont
plusieurs salariés dont des techniciens
en charge de l’entretien des
équipements. Mais ces techniciens ont
été formés sur le tas, n’ont pas eu de
formations techniques adéquates et
même s’ils réalisent bien souvent des
prouesses, ils se retrouvent impuissants
à réparer certaines pannes. Ils
fonctionnent au système D. Les radios Immeuble des radios sur Tamatave abritant une
sont dans de nombreux cas obligées de dizaine de radio et TV locales

faire venir des techniciens depuis


Antananarivo pour réparer leurs émetteurs ce qui représente un coût mais aussi du temps
où la radio ne peut opérer normalement.

La majorité des acteurs consultés dans le cadre de cette étude s’entendent sur le fait que
les compétences techniques pour la maintenance des radios font défaut sur Madagascar
et il n’existe aucune formation appropriée ou organisme qui propose des formations
pertinentes pour former des techniciens radios. L’absence de fédération de radio ne
facilite pas la mobilisation de réseau et de ressources pour s’assurer que les radios
puissent avoir accès à de bons appuis techniques. Même si c’est l’une des aspirations de
la Coalition des radios de Madagascar. Les radios consultées sont unanimes sur les
besoins de leurs techniciens en outils et en formation.

L’instabilité de l’alimentation en électricité (Jirama) avec de nombreuses coupures,


délestages et variations d’amplitudes posent de réels problèmes pour la détérioration de
l’équipements des radios. La plupart des radios ne sont pas équipées d’ondulateurs pour
palier à ces problèmes et pratiquement aucune radio n’a d’équipements solaires alors
même qu’en dehors des salaires, l’électricité représente leur coût de fonctionnement le

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 31


plus important. L’option solaire pourrait offrir d’importantes opportunités pour les radios
et un bon retour sur investissement.

En dehors de ces aspects techniques, les radios sont également demandeurs de


formations pour leurs journalistes et animateurs qui pour la plupart ont appris le métier au
sein de la radio sans avoir été toujours accompagné par une personne d’expérience.

Besoins des journalistes radios


Formations 93%
Equipements 56%
Essence et frais de transport 85%
Crédits de communication 78%

Les formations en notions basiques de journalisme, en journalisme d’investigation mais


aussi en animation, organisation de débat, production de théâtre radiophonique, talk-
show et émission de radios en tout type de formats ont été mentionnés par les différentes
radios consultées. Les journalistes ont également besoins de frais de transports et de
communication pour couvrir les zones rurales.

Présence sur les réseaux sociaux


La majorité des radios interrogés affirment avoir accès à un Internet (67%) même si pour
la plupart la qualité de la connexion Internet n’est pas fiable. En dehors des intervenants
extérieurs et membres de la communauté, les journalistes dépendent beaucoup
d’Internet comme source d’informations. L’accès à une meilleure connexion à Internet
figure en bonne place parmi les besoins exprimés par les radios.

Sources d'informations
Intervenants/ membres de la communauté 85%
Internet 59%
Presse écrite, médias en ligne 41%
Auditeurs 74%
Autres radios 19%
Descente de terrain 7%

La majorité des radios (83%) disposent d’une Page Facebook. Si la plupart des radios ont
une utilisation relativement basique de Facebook, certaines sont plus avancées et
alimentent leurs pages en contenus et postes qui leur permet d’engager leur audience.
Certaines radios utilisent des soundclouds et ont leur programmes radios disponibles sur
des sites internet. Nombreuses radios bénéficieraient d’un accompagnement dans leur
transition et stratégie numérique, avec une utilisation plus ciblée des réseaux sociaux afin

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 32


de créer une communauté numérique autour d’une page Facebook mieux fournie.
Certaines radios pourraient également être formées dans l’utilisation de Podcast.

Engagement avec leur audience


Dans leur ensemble les radios utilisent plusieurs canaux afin de dialoguer et engager
leurs audiences. Les canaux privilégiés sont le téléphone (Phoning), les visites et les SMS.
Les radios sont généralement unanimes pour affirmer que ces échanges avec leurs
auditeurs permettent d’améliorer la qualité de leurs programmes, d’avoir une meilleure
visibilité mais aussi de sourcer de l’information auprès de leurs auditeurs. Quelques
radios estiment également que c’est un moyen de mieux comprendre les besoins
d’informations des communautés. Certaines radios consultées affirment recevoir plus
d’une centaine de coups de téléphone et de SMS de leur audience chaque semaine mais
également de nombreuses visites.

Moyens de communication des radios avec les auditeurs


Téléphone 100%
SMS 81%
Réseaux sociaux 7%
Clubs d'écoute 15%
Visite 93%

A la différence d’autres pays de l’Afrique subsaharienne, le concept des clubs d’écoute,


groupes de fans ou d’auditeurs est assez marginal à Madagascar et rares sont les radios
qui ont mis en place des réseaux de clubs d’écoute. Pourtant plusieurs projets à travers la
coopération suisse, ALT Madagascar et la fondation hirondelle ont cherché à introduire la
méthodologie sans réel succès et les clubs d’auditeurs n’ont jamais vraiment réussi à
s’implanter. Le fait que les radios commerciales dominent le secteur et qu’il n’existe que
peu de radios associatives et communautaires pourraient expliquer en partie le manque
d’engouement et d’enracinement des clubs d’écoute. En Afrique, la pratique des clubs
d’écoute est également fortement encouragée par les fédérations des radios qui
structurent et auto-régulent le paysage radiophonique. L’un des grands vides à
Madagascar est l’absence de structure d’auto-régulation pour les radios. La coalition des
radios de Madagascar qui regroupe une cinquantaine de radios pourrait jouer ce rôle
mais elle manque d’appui et de soutien pour notamment renforcer ses capacités et
affirmer son mandat.

L’existence des clubs d’écoute permettrait une interactivité accrue et de qualité entre les
radios et leurs publics, la mise en place d’espaces de dialogue et de réflexion sur les
problèmes des communautés et leurs besoins en information et de stimuler des
engagements divers dans l’espace public (Participation aux débats publics, mobilisations
citoyennes et sociales, pratiques de médiations communautaires et sociales, etc). Ces
clubs auraient également une grande utilité dans des contextes humanitaires comme

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 33


dans le sud où sévit de manière récurrente le kéré, la famine afin de relayer les besoins
des populations et les activités des agences humanitaires. Les clubs d’écoute pourraient
également étendre la couverture des radios à des zones reculées faisant parti des
nombreux déserts de l’information. Ces clubs seraient également l’opportunité de créer
des programmes plus interactifs comme des débats ou des émissions co-produites par
les auditeurs.

Modèles économiques des radios


Le paysage radiophonique étant majoritairement dominé par des radios privés, les
modèles économiques des radios suivent le modèle classique des radios commerciales.
Les principaux coûts des radios sont liés aux salaires et ressources humaines suivi par les
frais en électricité. La majorité des radios disposent d’un local dont ils sont propriétaires
ou dont ils disposent gratuitement. En ce qui concerne les sources de revenus, les radios
dépendent principalement de la publicité qui est la source principale de revenus suivi des
annonces et dédicaces des auditeurs. Les autres sources de revenus sont plus marginales.
La plupart des stations compte sur des agences de communication basées sur
Antananarivo pour les mettre en contact avec des annonceurs. Les dédicaces et annonces
de particuliers représentent une source secondaire de revenus. Pour certains analystes,
les dédicaces prennent une part significative des grilles de programmes de beaucoup de
radios ce qui nuit à la qualité de leur programme. Les autres sources de revenus sont plus
marginales.

Principales sources de revenus


Financement personnel 30%
Publicité 100%
Dédicaces, annonces 81%
Communications institutionnelles 22%
ONGs 30%
Diocèse 11%
Donation communautaire 7%

Certaines radios arrivent à couvrir leurs coûts même si la pandémie de Covid 19 a


entraîné une diminution des revenus publicitaires obligeant certaines radios à
compresser certains coûts et réduire à minima leurs coûts opérationnels, ce qui pour
certaines radios les placent à la limite de la cessation d’activité. Pour les radios privées
liées à des notables et hommes politique, le financement personnel permet de maintenir
un équilibre budgétaire. Les radios confessionnelles ont la possibilité de compter sur les
diocèses ou réseaux religieux. Les ONGs qui pour des fins de visibilité et de
sensibilisation achètent des plages de programmes ne représentent qu’une source de
revenu secondaire. Nombre de radios (39%) affirment ne pas avoir de contacts avec des
ONGs et une majorité (83%) n’a jamais eu de financements d’ONGs. 56% des radios

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 34


mettent à la disposition des ONGS des plages de diffusion payante. Il serait intéressant de
mieux comprendre en profondeur le modèle économique des radios notamment
associatives et indépendantes, les possibilités d’améliorer leur modèle économique et de
diversifier leurs revenus pour améliorer leur situation financière.

TV
Il existe environ une trentaine de chaînes de télévision majoritairement basées sur
Antananarivo et dotées pour certaines de branches régionales. Les stations de télévision
restent généralement concentrées à Antananarivo mais via la diffusion satellitaire payante
(TNT), elles peuvent atteindre techniquement les zones les plus reculées. Il existe
plusieurs bouquets TNT avec Canalsat Madagascar et Blueline TV et Le bouquet de Canal
+ intègre des chaînes nationales. Derrière les chaînes, des hommes politiques se profilent
dans la plupart des cas.

La télévision commerciale Tv Plus Madagascar garde depuis plusieurs années l’une des
plus larges audience (Sondages mensuels Capsule et ATW) et a créé des agences dans
plusieurs villes (Antsirabe, Mananjary, Toamasina, Toliara et bientôt Fianarantsoa) avec
des opérateurs locaux. La chaîne TV plus bénéficiait d’une bonne réputation par le passé
avec l’organisation de débats ouverts avant que son propriétaire soit nommé sénateur et
transforme la chaîne et sa radio en instrument de propagande du pouvoir.

Dream’In et RTA visent un public jeune et elles ont aussi installées des agences à
Mahajanga, Toamasina et Antsirabe. De nouveaux opérateurs, essentiellement

Studio de la TVM, Tamatave)

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 35


généralistes, rachètent les licences des radios en cessation d’activité et intègrent aussi le
marché de la télévision. L’Etat exerce son contrôle sur la télévision nationale, Televiziona
Malagasy (TVM), qui couvre théoriquement toute l’île et dispose d’antennes régionales.
C’est le plus grand bénéficiaire des recettes publicitaires, notamment pendant les
événements mondiaux ou régionaux (Mondial de football, jeux olympiques, jeux des îles,
…31). IL existe aussi quelques chaînes de TV locales notamment des chaînes qui sont des
extensions des radios confessionnelles et privées.

Real TV fait figure de nouveau venu mais a tout de suite gagné une audience importante
du fait de sa relative liberté de ton et des programmes ouverts sur les débats qui ont su
attirer un public jeune.

Pénétration et audience
D’après MICS, L’exposition à la télévision touche moins d’un quart des hommes ou des
femmes (23% de femmes et d’hommes). 20% des ménages possèdent un poste de
Télévision avec des grandes disparités entre des régions urbaines comme celle
d’Antananarivo (Anamalanga) 54% et des régions rurales marginalisées comme Androy
où seulement 2% des ménages ont un poste. Si la Télévision est une source marginale
d’information dans une grande partie du pays, elle serait la 1ère source d’information sur la
région d’Antananarivo.

Un sondage Stileex32 centré sur Antananarivo montre une baisse du nombre de


téléspectateurs qui regarde des chaînes de TV malgaches. Seulement 55% des
Tananariviens regarderaient les chaînes de télévision malgaches.

Les quatre programmes favoris des téléspectateurs d’Antananarivo sont l’actualité (64%),
les films (44%), les programmes musicaux (36%) et les programmes de divertissement
(36%).

D’après le sondage, les chaînes de TV les plus appréciées par les habitants
d’Antananarivo sont :

31 UNESCO, Etude sur le développement des médias à Madagascar, 2017


32 TV Audiometry in Madagascar 2019, https://stileex.xyz/en/madagascar-tv-audimetry-2019/

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 36


• Dream’in 20%
• TV plus Madagascar
16%
• Real TV 15%
• i-BC 13%
• Viva TV 8%
• Record TV 7%
• MBS et Kolo TV 5%
• La7 et Amitié TV 2%
Les programmes les plus
populaires sont TV plus La radiotélévision locale Catholique Masova, Tamatave
Madagascar newscast
(27%), Realt TV (19%),
Dream’in Jité (13%), Malagasy reality TV programmes (25%), programmes locaux (22%),
débats (20%), documentaires (18%), séries (18%), dessin animés (13%), programmes
religieux (7%), Jeux TV (5%) et sport (5%).

73% des personnes sondées sur Antananarivo considèrent la TV comme le média le plus
fiable devant la radio (15%), les journaux (8%), et les sites internet (2%).33

Contraintes
A bien des égards, la
télévision partage les
mêmes contraintes que
les radios en termes de
difficultés de
maintenance, du
manque d’équipements
et de compétences des
techniciens. La majorité
des techniciens sont
formés sur le tas et les
problèmes techniques
sont fréquents.

Radiotélévision indépendante FMA, Tamatave

33 Information in Madagascar: Do Tanarivians trust the medias? 20/11/2018, https://stileex.xyz/en/trust-media-madagascar/

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 37


Médias en ligne et réseaux sociaux

L’environnement numérique et l’omniprésence de Facebook


La pénétration d’Internet (De 7 à 14% selon les estimations) est limitée sur le territoire
national et se concentre principalement sur Antananarivo. D’après MICS, seulement 5%
des Malgaches ont un ordinateur et 13% ont accès à Internet à domicile. L’utilisation
d’Internet s’est cependant développée avec l’utilisation du mobile ; 52% des Malgaches
ont un téléphone mobile.

Selon les statistiques,34 l’utilisation d’Internet et des réseaux sociaux est plus concentrée à
Antananarivo et ses environs. 42,23% de la population de la région Analamanga (Région
d’Antananarivo) utilisent Facebook. « Cet indicateur écarte les comptes fake. En 2019,
Facebook aurait assaini son réseau et supprimé entre 300 000 et 400 000 faux comptes
identifiés. L’apparition de ces faux comptes a augmenté durant la période de l’élection
présidentielle de 2018 ».35 Le taux de pénétration de Facebook de 64,48 % dans la région
Analamanga si l’on ne considère que la population de plus de 14 ans. Au niveau national,
selon le chiffre officiel de Facebook en août 2020, la taille de l’audience à Madagascar est
de 2,8 millions de personnes. Ainsi, le taux de pénétration réel de Facebook est
de 17,76% pour les plus de 14 ans.

En ce qui concerne les sites malgaches les plus visités, Orange.mg serait en première
position, suivi de Moov.mg, Portal job, Bet261 et Midi Madagasikara. Parmi les médias
étrangers, Le Monde et le Parisien seraient les sites préférés des internautes malgaches.

Les statistiques numériques évoluent très rapidement et malgré la fracture numérique et


d’autres contraintes, le secteur du numérique présente certaines opportunités à venir
pour les médias en ligne. L’un des freins au développement de la transition numérique et
des médias en ligne reste les coûts élevés des données Internet (La grande majorité des
gens se connectent avec leur appareil mobile). Le coût d’1GB de données à Madagascar
est de 8.81 USD ce qui en fait l’un des plus chers d’Afrique et du monde (42 sur 50 pays
Africains, 193 -ème au classement mondial).36 Ces données ont été contestées par les
opérateurs mobiles à Madagascar. L’Alliance for Affordable Internet classe Madagascar
au 57ème rang sur 72 pays37 et constate que les opérateurs historiques ont réservés des
tranches importantes du spectre sous-utilisées afin d’évincer les concurrents potentiels.
De manière contradictoire, Madagascar dispose du plus haut débit du continent (22ème
rang mondial) avec une moyenne de vitesse de téléchargement de 24.97 Mbps. Cette
belle performance du pays découlerait de l’amélioration de ses capacités data par

34 https://malagasy.tech/chiffre-cle/
35 Ibid
36 https://www.agenceecofin.com/internet/0505-76313-classement-des-pays-africains-selon-le-cout-moyen-d-1gb-mobile-
la-somalie-devance-tout-le-monde
37 https://1e8q3q16vyc81g8l3h3md6q5f5e-wpengine.netdna-ssl.com/wp-
content/uploads/2021/04/3522_RegionalReport_Africa.pdf

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 38


l’opérateur Telecom Malagasy (Telma) et des différents systèmes sous-marins de fibre
optique.38

Par ailleurs, en 2018, la première école digitale, Sayna Madagascar, a été lancée
proposant des formations en développeur Web, mobile, ingénieur données et marketing
digital. Madagascar est également en train de devenir un important hub du business
process outsourcing avec de nombreux sous-traitants proposant des services de centres
d’appels, services de développement numérique, traitements de données, animations,
développements web et autres services informatiques. Plusieurs Start-up à succès ont
également vu le jour.

Quelques rares pure players


Pour le moment le paysage des médias en ligne est très embryonnaire avec très peu
d’acteurs que l’on pourrait qualifier de pure player. La plupart des sites d’informations
sont les portails des principaux groupes de presse qui se contentent de mettre en ligne
leurs articles parus dans la presse traditionnelle. Les groupes investissent dans des sites
agrégateurs comme Newsmada qui regroupent les contenus des principaux médias du
groupe, Les Nouvelles, Le Courrier et Taratra.

Les principaux sites d’informations sont :

• Tribune Madagascar.com, https://www.madagascar-tribune.com/


• NewsMada, (Portail du groupe Ultimedia/Les nouvelles),
https://www.newsmada.com/
• 2424.mg, https://2424.mg/
• Mada-Actus.info (Blog), https://mada-actus.info/
• Madagate, https://www.madagate.org/index.php
• Actu Orange, https://actu.orange.mg/
• Moov.mg (Telma), https://www.moov.mg/actualites
• Sobika, http://www.sobika.org/
• Gasy patriote, Accueil (gasypatriote.com)
Sans que l’on puisse les considérer comme des pure players, les opérateurs
téléphoniques se sont également mis à investir l’actualité en ligne. En février 2009,
l'opérateur en télécommunication Orange Madagascar recrute des journalistes et lance
son propre fil d'actualité sur son site internet. Le média se professionnalise, et
devient Orange actu. Le contenu éditorial du média est mis à jour quotidiennement et
diffuse principalement des dépêches à la minute et de courts articles et reportages.
Comme mentionné ci-dessous, c’est l’un des sites les plus consultés pour l’actualité qui
diffuse de l’actualité brute et il est particulièrement apprécié par les expatriés. En mai

38 https://www.agenceecofin.com/internet/1907-58726-classement-des-pays-africains-selon-la-vitesse-de-telechargement-
madagascar-largement-en-tete-cable-co-uk

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 39


2009, le premier portail internet de Madagascar, Moov, lié à l’opérateur téléphonique
Telma se lance également dans la production de fils d'actualité. Son contenu éditorial est
en parti produit en interne, l'autre partie reprend des articles du quotidien Midi
Madagasikara.

Il existe plusieurs sites


d’actualités hybrides qui
mélangent l’approche blog
d’actualité et reprennent des
articles en ligne d’autres sites ou
médias : Tananews, Madagascar
Tribune, etc. Les initiatives de
médias citoyens comme
l’association Malagasy Bloggers,
le « Best of Malagasy blogs
(Bombs) » et Factivistes
demeurent à la fois marginales et 2424.mg Salle de rédaction
précaires. Ces initiatives
manquent de constance dans
leurs productions et de visibilité. Il existe néanmoins dans le paysage Internet des blogs,
influenceurs et pages Facebook assez suivies et qui deviennent parfois des médias
refuges pour les jeunes générations qui s’écartent des médias traditionnels.

En 2018, un nouveau venu fait son apparition, 2424.mg, prônant une ligne éditoriale
indépendante et neutre. Le site dispense des contenus multimédias, multi-supports
(Cross-média), avec des articles, des
reportages vidéo, des couvertures
commerciales ou culturelles. La démarche de
2424.mg est singulière puisque le média s’est
attaché les services de jeunes sans formation
en journalisme ou expérience passée dans un
organe de presse. La volonté de 2424.mg était
de rompre avec le formatage de la profession
et de former ses journalistes en interne sur la
pratique d’un journalisme indépendant ouvert
sur le journalisme mobile et conforme à la
déontologie du métier. 2424.mg a su
construire une solide réputation notamment
sur la fiabilité de ses informations et son
approche innovante du journalisme, il et a su
capturer une audience conséquente (Plus de
300,000 followers sur sa page Facebook).
2424.mg studio

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 40


Les médias en ligne ne sont pas complétement à l’abris d’une récupération politique
comme l’illustre le rachat de sobika.com par un proche du président Rajoelina.

Une nouvelle existence légale


Jusqu’à très récemment, à Madagascar, la presse en ligne était libre sur internet sans
encadrement juridique. La nouvelle loi sur la communication médiatisée de 2020
consacre l’existence juridique des médias en ligne dans son chapitre V (De la
communication médiatisée en ligne). Pour les médias en ligne, les conditions relatives à
l’ouverture et l’exercice de la presse classique s’appliquent désormais (Obligations
légales d’inscription, enregistrement et dépôt des statuts auprès de l’Autorité nationale
de régulation de la communication médiatisée, obligation de dépôt légal). Toute
entreprise de presse en ligne doit avoir un directeur de publication.

L’organe de presse en ligne est soumis également aux conditions cumulatives suivantes :

• Les contenus en ligne font l’objet d’un renouvellement régulier qui doit être daté
• Les contenus doivent présenter un caractère d’intérêt général et ne pas porter
atteinte à la dignité, la décence ou encourager à la violence
• Mettre à disposition un contenu en lien avec l’actualité ayant fait l’objet de
traitement journalistique notamment en termes de vérification et mise en forme de
ces informations
• Ne pas avoir pour objet principal de diffuser des messages publicitaires ou
d’annonces
• Sur les espaces de contribution personnelle des internautes, l’éditeur met en
œuvre des dispositifs appropriés de lutte contre les contenus illicites
• Dispose d’archives numériques d’une durée minimale de trois mois
• Un média en ligne doit employer à titre régulier au moins un journaliste
professionnel légalement inscrit au tableau de l’Ordre des Journalistes (OJM)
Il est trop tôt pour mesurer les implications de cette reconnaissance légale des médias en
ligne et d’analyser la pratique de la mise en œuvre de la nouvelle loi. La nouvelle loi a tout
d’abord le mérite de mettre les médias en ligne au même rang que les médias
traditionnels alors que la profession et le public ont tendance à déconsidérer ce type de
médias comme manquant de professionnalisme, véhiculant des fausses informations en
les mettant dans le même sac que les réseaux sociaux.

Les médias en ligne seront certainement amenés à se développer dans un avenir très
proche et représente comme dans de nombreux pays d’Afrique des opportunités de voir
émerger des organes de presse en ligne plus indépendants et des initiatives de
journalisme citoyen. Il y a en tout cas un réel potentiel et contexte favorable pour faire
émerger cela. Le contexte de la pandémie de Covid-19 a notamment donné lieu à une
augmentation de la consommation d’information en ligne à l’échelle globale.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 41


La recherche d’un business model
Il est difficile de parler de modèles économiques pour les médias en ligne alors que le
paysage des médias en ligne demeure très embryonnaire et qu’il existe peu de pure
players. Les médias en ligne restent pour le moment relativement alignés aux modèles
économiques des médias traditionnels reposant principalement sur les recettes
publicitaires. Cependant si les médias en ligne commencent à attirer plus d’annonceurs,
la majorité des recettes publicitaires vont toujours vers les organes de presse
traditionnels. Les principaux freins pour le développement des médias en ligne sont :

• Un manque de maîtrise et de savoir-faire en termes de journalisme mobile (Qui


pourrait réduire certains coûts et rendre les contenus plus attractifs)
• D’importantes faiblesses en termes de marketing digital et référencement sur
Internet
• Manque de connaissance sur les opportunités en termes de monétisation des
contenus
• Méconnaissance des notions de base de sécurité digitale
Depuis l’apparition de Madonline, en 1988, environ 50% des médias en ligne ont disparu
en raison de la fragilité de leur modèle économique et des difficultés à attirer des revenus
publicitaires.39

Capacités et autres besoins du secteur

Profil des journalistes et perception de la profession


Les conditions de travail des journalistes sont extrêmement précaires en termes de
rémunération, valorisation du métier, moyens techniques à leur disposition, contraintes
de temps et pressions dont ils font l’objet par les patrons de presse et les politiques.
Comme relevé par la Fondation Friedrich Ebert Stiftung (FES)40, ces conditions de travail
constitue l’un des obstacles au développement d’une presse libre et indépendante. Les
journalistes consultés dans le cadre de cette étude mentionnent les obstacles suivants
dans l’exercice de leurs métiers :

Difficultés dans la pratique du métier


Manque d'équipements 81%
Difficulté pour se déplacer 77%
Trouver des sources crédibles 38%
Accéder à des experts 42%

39 Politika 23, La faim des médias, Randy Donny, Aout 2021, FES-PK-23-1.pdf
40 La protection du journaliste (fes.de)

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 42


Recouper les sources 46%
Manque de temps 38%
Ligne éditoriale contraignante 19%

En moyennes les radios réénumèrent 200,000 Ar / mois (43 Euros) pour un ‘simple’
journaliste, 250–300,000 AR (54 à 64 EUR) pour un journaliste ‘senior’ et 350,000 Ar (75
EUR) pour un rédacteur en chef. Pour rappel, le salaire minimum est passé en Septembre
2019 à 200,000 Ariary. Les salaires pour les journalistes sur Antananarivo avoisinent les
300,000 Ariary. Du fait des niveaux de rémunération, la pratique de felaka est très
courante (Paiement d’une enveloppe à un journaliste pour qu’il vienne couvrir un
événement ou pour qu’il soit complaisant). Le felaka semble être devenu une pratique
normale et acceptée car pratiquée même par les institutions d’Etat comme une marque
de reconnaissance envers les journalistes qui se sont déplacés. Si le Felaka nuit à
l’impartialité de l’information, dans la plupart des cas il sert uniquement à payer les frais
des transports des journalistes et leur permettre de couvrir un événement. Du fait des
niveaux de salaires très bas, la profession n’est pas valorisée et beaucoup de journalistes
choisissent la profession comme un instrument temporaire pour servir leurs ambitions. Le
métier est considéré comme un tremplin qui permet d’accéder à des postes politiques ou
d’autres opportunités. L’absence d’une charte éthique ou d’un code de déontologie de la
profession ne facilite pas l’adoption de principes de base du journalisme.

Les femmes sont présentes dans toutes les branches de l’industrie médiatique : audio-
visuel, presse écrite et journalisme en ligne. Les estimations d’UNESCO suggèrent un
déséquilibre important dans la représentation des genres dans le personnel des médias :
38% de femmes journalistes contre 62% d’hommes. Les médias malgaches emploient
deux fois moins de femmes que d’hommes et généralement elles travaillent à des postes
administratifs ou commerciaux41. Toutefois, la situation des femmes journalistes et
professionnelles n’a pas été étudiée et il n’existe pas d’informations précises sur les
discriminations et les problèmes de protection auxquelles elles font face. Par ailleurs,
l’association des femmes journalistes n’est que marginalement engagé sur ces questions.

Dans un sondage réalisé sur Antananarivo,42 71% des personnes sondées estiment que
les journalistes sont sous l’influence de l’argent et des politiques et ne sont pas
indépendants dans l’exercice de leur métier. La population malgache a une perception
négative des médias et des journalistes.

41 UNESCO, Etude sur le développement des médias à Madagascar, 2017


42 Styleex, https://stileex.xyz/confiance-medias-madagascar/, 20/11/2018

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 43


Formations et besoins des formations des journalistes
S’il n’existe pas d’école de journalisme au sens strict, plusieurs cycles universitaires à la
réputation établie constitue une bonne préparation pour faire carrière dans les médias et
le journalisme :

• Université d’Antananarivo, Faculté des Lettres et Sciences Humaines, Mention


Communication, Médiation, Médias, Organisations (COMMO). A l’origine établie
comme une unité de formation en journalisme, la formation s’est élargie sur divers
domaines, notamment sur l’information, sur les médias et la communication. C’est
une formation assez théorique mais qui pose des fondamentaux et offre des
opportunités de stages pratiques aux étudiants. La mention offre également des
options de Master plus spécialisées et des possibilités de recherches avec le
Centre de Recherches en Communication (CERCOM) qui a notamment réalisé
l’étude UNESCO sur le développement des médias à Madagascar.
• Collège St Michel, SAMIS-ESIC (Sekoly Ambony momba ny Ita sy ny Serasera /
École Supérieure d’Information et de Communication), Le parcours
Communication médiatique constitue un cadre de formation et de préparation
pour faire carrière dans le domaine de la Presse écrite, la Radiodiffusion, la
Télévision ou des autres médias de la famille NTIC. A côté des cours théoriques,
les étudiants peuvent pratiquer et produire tout au long de leur cursus grâce aux
matériels et installations mis à leur disposition. Ce cursus est plus porté sur la
pratique et moins sur les fondamentaux.
• L’Ecole Supérieure Spécialisée du Vakinankaratra (ESSVA), Antsirabe, Filière
communication ; L’ESSSVA basé en province offre une formation pratique en
Presse écrite, production vidéo et radiodiffusée, création Web, relations presse et
communication d’entreprises.
Il existe également de nombreuses instituts privées avec des filières communication et
journalisme au niveau inégal. L’offre en matière de formation aux métiers du journalisme
est diverse et variée même si centrée sur la capitale à quelques exceptions près comme
ESSVA. Les formations proposent de bonnes bases théoriques, quelques notions
pratiques mais restent très formatées et manquent surtout d’ouverture vers les nouvelles
formes du journalisme, journalisme web et digital, journalisme mobile, journalisme
données, vérifications des faits, etc. Certaines formations ne couvrent pas certains
fondamentaux du journalisme tels que la déontologie, les techniques d’interview, le
croisement des sources. La pratique est également un point faible de ces formations
même si cela est compensé par des stages et des placements dans des médias. Enfin,
toutes ces formations ne sont pas des écoles de journalisme spécialisées mais des
formations qui mélangent communication et journalisme, ce qui crée une certaine
confusion des genres qui pourraient expliquer certaines dérives du métier.

Dans la réalité, nombreux sont les journalistes qui n’ont aucune formation spécifique en
journalisme ou en communication. La majorité des journalistes ont été formés sur le tas au
sein d’un média. C’est particulièrement le cas pour les radios où les journalistes n’ont pas

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 44


de formations et ont appris le métier directement au sein de la station sans personne
forcément qualifiée pour les aiguiller. Par conséquent, les journalistes radios manquent
certaines notions basiques de journalisme et éprouvent des difficultés pour traiter de
certains sujets par manque de connaissance sur certaines thématiques. Les journalistes
de la presse écrite ont pour la plupart suivi un cursus de communication, de journalisme
ou un autre parcours universitaire pertinent. Les journalistes de la presse écrite sont les
seuls à avoir des spécialisations politiques, économiques, juridiques, environnement ou
faits divers. Ils auraient besoin de formations thématiques plus poussées et de mieux se
familiariser avec la déontologie du métier.

Des formations ponctuelles sont cependant dispensées soit par des journalistes nationaux
reconnus, soit par des experts internationaux sous la houlette d’agences de
développement comme la Fondation allemande Friedrich Ebert Stiftung (FES), UNESCO,
UNICEF, Search for Common Ground, Canal France International, la Fondation
Hirondelle, Transparency International, et d’autres. Ces formations sont pour beaucoup
thématiques comme sur les questions de genre, les droits des enfants mais aussi sur des
formes de journalisme poussées comme le journalisme d’investigation. Il y a un certain
engouement à Madagascar pour le journalisme d’investigation et beaucoup d’attentes
autour de cette forme du journalisme qui semble bénéficier d’un phénomène de mode
ou se confondre avec le journalisme de qualité. Pourtant, les besoins les plus urgents en
termes de formation semblent plutôt se situer sur les notions de bases et les
fondamentaux du journalisme ou sur des domaines thématiques. Il n’en demeure pas
moins que ces formations gratuites donnent des opportunités de développement aux
journalistes notamment des radios malgré leur caractère épisodique. Depuis de
nombreuses années, le ministère de la Culture et de la Communication (MCC) avec
UNICEF a mis en place le système des Juniors Reporters Clubs (JRC) qui propose à des
jeunes intéressés par le journalisme des formations et du coaching dans des médias
locaux. Les JRC sont devenus une sorte d’institution en soi auxquelles les radios en
province sont fières de participer et qui suscitent des nouvelles vocations. La limite des
JRC est que les jeunes reporters se retrouvent souvent encadrés par des journalistes qui
manquent de professionnalisation et de notions de base du journalisme. Le MCC a
également lancé son programme de formations pour les journalistes en exercice avec un
niveau basique et un niveau ouvert sur les spécialisations et souhaite jouer un rôle de
coordination sur toutes les offres de formations pour les journalistes.

Interrogés sur leurs besoins, la majorité des journalistes sont demandeurs de formations
dans plusieurs domaines afin de renforcer leurs compétences. Les journalistes consultées
dans le cadre de cette étude se sont prononcés sur leurs besoins de formation ci-
dessous :

Besoins en formation
Formations de base 27%
Journalisme thématique 54%
Journalisme mobile 38%

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 45


Journalisme de données 38%
Fact checking 31%
Journalisme d'investigation 50%

Les résultats suivants ont été collectés sur les besoins relatifs aux formations thématiques :

Besoins journalisme thématique


Santé 42%
Environnement 54%
Droit de l'homme 38%
Juridique 38%
Economique 38%
Politique 4%
Culturel 4%

Associations professionnelles des médias


Il existe plusieurs associations professionnelles de médias qui jouent un rôle d’auto-
régulation (Ordre des journalistes de Madagascar), ou cherche à encadrer et valoriser la
profession. La plupart de ces organisations professionnelles manquent de ressources et
sont fragilisées par des déficits en termes de capacité institutionnelle. Ces structures
souffrent également de faiblesses en termes de stratégie de plaidoyer et utilisation
d’outils de communication pour de promouvoir leurs actions.

L’Ordre des Journalistes de Madagascar (OJM) joue un rôle central dans l’auto-régulation
du secteur mais son action repose principalement sur la base du volontariat ce qui limite
le rayonnement de son action autant que le bras de fer qui l’oppose actuellement au
ministère de la Culture et de la Communication (MCC). L’OJM reste cependant à l’origine
de nombreuses initiatives comme la revue d’investigation de Tandraka, des formations et
des événements autour du journalisme. L’OJM joue également un rôle actif dans la
promotion de la liberté de la presse et dans la protection des journalistes. Son action est
cependant freinée par un manque de ressources et de capacité institutionnelle.

Il n’existe pas à Madagascar de Fédération ou d’Union des radios qui représente les
intérêts du secteur et structure le paysage des radios comme dans de nombreux pays
africains. Il y a cependant la Coalition des radios Madagascar qui pourrait jouer ce rôle et
favoriser la professionnalisation du secteur radiophonique. La coalition a été créée
initialement, en 2014, dans le cadre d’un projet de Search for Common Ground afin de
rassembler des radios voulant œuvrer pour la paix et la cohésion sociale. La coalition
rassemblerait aujourd’hui 73 radios membres, aussi bien des radios privées, associatives
et confessionnelles. La coalition aspire à favoriser la professionnalisation des métiers de la
radio, la production et le partage de contenus et échange d’expérience, la coordination

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 46


des financements et des programmes de diffusion liés à la communication pour le
développement. La coalition a été à l’origine de plusieurs actions et initiatives notamment
autour du Covid-19 mais reste une structure fragile au même titre que la plupart des
organisations de la société civile du fait des irrégularités de financement.

Il existe plusieurs associations de journalistes qui organisent des formations, des partages
d’expérience et des actions de plaidoyer :

• Association des journalistes environnementaux


• Association des journalistes faits divers
• Groupement des Editeurs de Presse Indépendants de Madagascar
• Association des femmes journalistes de Madagascar
Au niveau des provinces, il existe également des associations de journalistes qui
cherchent à regrouper la corporation mais qui reste pour la plupart informelles.

Les associations de journalistes se caractérisent par une durée de vie assez éphémère, et
des difficultés à maintenir des activités régulières s’inscrivant sur le long terme. Elles
souffrent également d’un déficit en termes de stratégie et de communication. L’accès à
des sources de financements et des modes de fonctionnement plus pérennes demeurent
une difficulté ce qui limite leur apport pour structurer la pratique du métier. Plusieurs
structures comme le Syndicat des journalistes, le réseau des radios rurales de Madagascar
ont fini par disparaître.

Pourtant, il apparaît critique pour le secteur d’avoir des organisations professionnelles


fortes qui rassemblent les acteurs et professionnels des médias, renforcent la
professionnalisation et l’indépendance du secteur et son auto-régulation et défendent les
intérêts de la profession. La plupart des journalistes consultés estiment qu’il est important
de renforcer les organisations professionnelles avec en priorité l’OJM, la coalition des
radios et les associations de journalistes.

Quelles sont les organisations professionnelles clés ?


Coalition radios 69%
OJM 73%
Association des journalistes 77%

Les journalistes se sont également exprimés sur les activités et les types d’interventions
que les organisations professionnelles devaient privilégier et une majorité considère le
plaidoyer et la protection des journalistes comme prioritaire.

Activités prioritaires pour les organisations professionnelles


Monitoring des violations 15%
Protection journalistes 42%

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 47


Déontologie, standards de qualité 27%
Collaboration, échanges 27%
Formations 27%
Cadre juridique 23%
Plaidoyer 38%

Il existe aussi deux structures qui se qualifient comme des observatoires du monde des
médias et qui font de la recherche et des études de qualité sur le paysage médiatique, le
monitoring des contenus mais aussi des actions de plaidoyer, Ilontsera et l’ONG
Communication-Idea-Development (CID).

Les relations entre les médias et la société civile sont ambiguës, faites de méfiance et de
collaboration. Certaines associations professionnelles collaborent activement avec la
société civile afin d’amplifier leur plaidoyer dans une dynamique globale œuvrant pour la
bonne gouvernance. La plate-forme de la société civile Rohy comprend Ilontsera parmi
ses membres qui joue le rôle de point focal sur la question des médias et de la liberté
d’expression. La Plate-Forme Nationale des Organisations de la Société civile de
Madagascar (PFNOSCM) et l’Observatoire de la vie publique (SeFaFi) ont parfois critiqué
certains pratiques journalistiques notamment dans les cadres des élections. Mais la
plupart du temps, la société civile maîtrise mal sa relation avec les médias et appréhende
avec difficulté la manière dont il peut collaborer avec les journalistes pour relayer leur
plaidoyer. En règle générale, les organisations de la société civile souffrent d’un
important déficit en termes de stratégie de plaidoyer et utilisation d’outils de
communication qui les empêchent de promouvoir leurs actions et d’avoir de l’influence.
Leurs actions de plaidoyer sont tournées vers les autorités et n’engagent que
marginalement les communautés par le biais de la sensibilisation.

Une majorité des journalistes consultés (75%) déclarent collaborer avec la société civile et
considèrent principalement les organisations de la société civile comme des sources
d’informations et plus marginalement comme des vecteurs de plaidoyer et des alliés pour
défendre la liberté de la presse.

Nature de la collaboration avec les OSC


Sources 73%
Plaidoyer 31%
Défendre liberté de la presse 35%

Besoins d’information et Relations avec les communautés


La grande majorité des journalistes interrogés (88%) sont convaincus qu’ils répondent aux
besoins d’informations des Malgaches. Les journalistes notamment des radios estiment
tous prendre en considération les retours de leurs audiences afin d’améliorer leurs

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 48


programmes. Ils citent plusieurs mécanismes pour collecter ces retours, téléphone, SMS,
emails, réseaux sociaux et visites. Pourtant plusieurs sondages et enquêtes semblent
démontrer qu’il y a une crise de confiance entre les Malgaches et les médias qui laisse
entendre que l’offre d’information ne répond pas complétements aux attentes du public.
La réalité est qu’aucune étude sérieuse et exhaustive a étudié en profondeur la question
pour déterminer les besoins d’information des Malgaches et des différentes
communautés.

Un sondage de stileex
centré sur Antananarivo
et sur la presse écrite
révèle que les colonnes
les plus appréciés dans
les 3 principaux
journaux sont l’actualité,
le divertissement et la
politique. Cependant,
ce type de tendance ne
donne pas d’indications
au-delà des grandes
rubriques sur les sujets,
l’angle et le format qui
intéressent différentes
audiences.

Les différentes stations


de radios sondées pour
cette étude ont mentionné les thèmes clés qui intéressent leurs auditeurs. Pour autant une
fois de plus, ces tendances générales n’apportent pas l’éclairage nécessaire sur les
besoins d’informations des Malgaches et des communautés.

Thèmes des auditeurs


Sécurité 52%
Actualités locales 41%
Santé 78%
Education 33%
Problèmes de genre 11%
Activités ONG 26%
Recherche personnes disparues 4%
Eau et assainissements 15%
Actions autorités 7%
Météo 4%

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 49


D’après les journalistes, il existe
cependant des groupes et communautés
marginalisés dont les besoins spécifiques
d’informations ne sont pas abordés par
les médias et sont relativement tabous. Il
est intéressant de noter que les
communautés rurales figurent comme
l’un des groupes les plus marginalisés au
même titre que les groupes LGBT. Cela
peut s’expliquer par le fait que les médias
sont perçus comme centrés sur
Antananarivo ou les capitales de
province. Les radios locales ont des
moyens limités notamment pour se
déplacer et couvrir certaines zones
rurales. Il existe à Madagascar
d’importants déserts de l’information non
cartographiés, des zones rurales reculées
qui ne sont couverts par aucun signal
radios et où l’information circule
Radio solaire au bord d’un stand sur la RN7 exclusivement par le bouche à oreille.
Cependant, le phénomène reste peu
étudié.

Groupes marginalisés
Femmes 35%
Jeunes 38%
Communautés rurales 50%
Minorités 31%
LGBT 46%

Cependant, les besoins d’informations de la jeunesse ont été étudiés récemment dans le
cadre de l’étude de base du programme radio Sifaka. Dans le cadre de cette étude, les
jeunes citent le manque d’emploi, la religion, la corruption et le manque de
considération, comme facteurs de blocage dans leur engagement dans les processus de
développement. La télévision et la radio sont les premiers supports d’information pour les
jeunes même si l’étude note une percée des Nouvelles technologies de l’information et
de la communication (Téléphonie mobile, Internet et des chaînes satellitaires). Les jeunes
sont intéressés en particulier par les actualités sociales et regrettent qu’il n’y ait pas plus
d’émission de débat dans les médias. Ils estiment que les médias traditionnels et
notamment la radio ne parlent pas assez de leurs préoccupations et avouent avoir plus de
dialogue constructif au sein de leur famille, cercles d’amis ou à travers les réseaux sociaux

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 50


comme Facebook. Pour les jeunes, les médias peuvent contribuer à l’éducation pour la
paix s’ils font preuve d’une plus grande neutralité et indépendance et garantissent la
fiabilité de l’information.

Les initiatives restent encore limitées


en termes de rapprochement des
médias et des communautés, mise
en place de mécanismes de retour
et implication des communautés
dans la production de contenus.
Plusieurs initiatives ont cherché sans
trop de succès à encourager la mise
en place de clubs d’écoutes pour les
radios avec le studio Sifaka mais
aussi Alt Madagascar qui a
également formé de nombreux
acteurs dans le Sud à la
méthodologie et la production
Les genres d’actualités qui intéressent les jeunes, au
d’émission participative. Il serait niveau des trois provinces
intéressant d’étudier les raisons pour
lesquels les clubs d’écoute ne sont
jamais développés à Madagascar. Mais il existe également d’autres opportunités
d’améliorer l’accès à l’information dans les zones rurales, les déserts de l’information et de
créer également un dialogue participatif autour de sujets et de thèmes d’information. Par
exemple, il existe dans la plupart des villages des clubs vidéo. Un club vidéo est une case
aménagée comme un mini-cinéma mais avec une télévision et un magnétoscope pour
projeter du matériel audio-visuel (Programmes télévisés, films, etc). La majorité des clubs
vidéo montre des films d'action mais des ONGs se sont appuyées sur des clubs vidéo
pour montrer des vidéos éducatives. Comme relevé dans un rapport du PNUD de 2008,
les vidéoclubs et ciné mobiles sont actuellement les moyens les plus accessibles et les
plus évidents pour montrer du matériel audio-visuel aux populations rurales. Les projets
vidéo participatifs pourraient aider à interroger les opinions locaux, modes de vie et défis
autour du développement. Les méthodologies d’organisations comme Filmaid et
Sunshine Cinema seraient pertinentes pour faire de l’engagement communautaire.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 51


Enfin, la culture du dessin
satirique et de la bande
dessinée est très forte sur
Madagascar. L’utilisation
des caricatures est très
populaire et le paysage
médias comprend des
caricaturistes très
talentueux comme Riri,
Ramafa et Pov. La caricature
est un vecteur puissant
d’information, de débat et
d’analyse critique mais aussi
un format attractif qui
permet d’engager des Caricatures de Riri sur la liberté de la presse
publics à risque comme les
jeunes. Un ancien journal satirique Saringotra avait vu le jour éphémèrement et créait un
certain engouement avant de cesser d’être publié du fait de pressions politiques. En
2016, Transparency a organisé un concours de caricatures. La réapparition d’un journal
satirique ou l’organisation d’événements autour des caricatures pourrait être un moyen
intéressant de créer de nouveaux espaces de débats qui font cruellement défaut à l’heure
actuelle. Le documentaire et photojournalisme ont également de solides racines avec des
photographes de renommés internationales comme Dany Be et Rijasolo qui avait
notamment documenté récemment la situation dans les centres de santé Covid. Il existe
également des formats originaux susceptibles d’intéresser des groupes comme la
jeunesse et d’encourager leur participation citoyenne comme les journaux TV rappés avec
notamment Bolo sur TV plus.

Fausses informations et fact checking


Une minorité de journalistes se conforme aux normes professionnelles et la diffusion
d'informations non vérifiées est très courante. Avec le recrutement de nombreux
journalistes mal ou pas formés, la maîtrise de la qualité des messages reste un enjeu
majeur. Les médias sociaux sont les fournisseurs d'information qui exposent le plus la
population et les jeunes aux fake news et rumeurs. Mais les médias professionnels y
compris la radio, la TV et la presse écrite ne sont pas de reste et utilisent parfois les
réseaux sociaux comme une source d’information. Malgré la prolifération des fausses
nouvelles, il n’existe pas vraiment de site web spécialisé dans leur traitement. La chaîne
Real TV disposerait d’un programme qui révèle certaines fausses nouvelles. Il existe
également un réseau de factcheckers amateurs, Factivistes, qui sensibilise sur différentes
plate-formes les jeunes au sujet de la désinformation. D’après certains observateurs du
secteur, les initiatives de vérification des faits pourraient être perçues négativement par
des professionnels des médias comme portant atteinte à la crédibilité des médias et du
travail des journalistes.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 52


Les journalistes et les médias n’ont aucune idée réellement de la manière dont opère un
bureau de vérification des faits et des différentes techniques de factchecking. Aucun
journaliste sur Madagascar n’a été formé sur le factchecking et il est difficile de mesurer
l’ampleur du phénomène de la désinformation. Mais les professionnels des médias
s’accordent tous pour dire que le flot de fausse information est important et qu’il s’est
amplifié notamment avec la pandémie. Les élections, les tensions politiques et les faits
polémiques comme récemment le scandale de la contrebande 73 kg d’or sont des
catalyseurs de rumeurs et de fausses informations. 92% des journalistes considèrent les
réseaux sociaux comme le principal vecteur de fausses informations.

Vecteurs de fausses informations


Radio 15%
TV 12%
Presse écrite 19%
En ligne 19%
Réseaux sociaux 92%

Au début de la pandémie et de la polémique autour du remède CVO Covid Organics, de


fausses déclarations du président Rajoelina annonçant le retrait de Madagascar de l’OMS
ont été largement diffusées dans et en dehors du pays. Un autre incident avec les faux
tests positifs (De nombreux tests auraient été contaminés en amont) de l’institut pasteur a
donné lieu à de nombreuses rumeurs et fausses informations.

La difficulté de la lutte contre la désinformation réside également dans l’utilisation de la


propagation de fausses nouvelles comme un chef d’accusation à l’encontre de
journalistes comme cela a été le cas pour la journaliste Arphine Rahelisoa arrêté pour
avoir critiqué la gestion de la crise sanitaire par le président. Comme évoqué par RSF, au
cours des dernières années, les médias ont été régulièrement intimidés et menacés par le
pouvoir exécutif et les forces de sécurité à Madagascar notamment par le harcèlement
judiciaire et l’usage abusif des délits de "diffamation" ou de l'arbitraire "diffusion de
fausses nouvelles."

Impact du Covid
En 1er lieu, la crise sanitaire a eu un impact économique sur les médias qui s’est manifesté
par des cessations d’activités, des licenciements et des réductions de salaire. Il est trop tôt
pour mesurer l’impact sur le long terme et alors que de nombreux médias souffrent d’une
réduction importante des revenus publicitaires. Mais la pandémie a eu d’autres effets
comme dans de nombreux pays d’Afrique subsaharien, limitation de la liberté
d’expression et prolifération des rumeurs et fausses informations. Les journalistes
consultés se sont exprimés sur les différents impacts du Covid 19 avec au 1er rang les
risques de contamination élevés dans l’exercice de leur métier. Le journalisme a
rapidement été reconnu comme un service essentiel.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 53


Comme de nombreux métiers et secteurs, les journalistes et les médias ont dû s’adapter
au contexte et aux restrictions sanitaires à commencer par le télétravail ce qui relevait
d’un défi à la fois technique et organisationnel. Pour les journalistes, l’impact le plus
important du Covid est sur le changement dans la façon de travailler avec des conseils de
rédaction et autres groupes de travail en ligne. La crainte est de voir s’institutionaliser un
journalisme de bureau qui gère ses sujets à distance avec des sources de seconde main.

Impacts Covid
Licenciement 23%
Réduction des salaires 38%
Liberté d'expression limitation 42%
Augmentation des rumeurs et fausses informations 35%
Risque de contamination journalistes 69%
Changement façon de travailler 69%

Conclusions
Plusieurs interventions touchant au secteur média ont été initiées par le passé proposant
des formations ou stimulant la production de contenus. Pour autant, si l’expertise locale
sur Madagascar est disponible dans de nombreux domaines, les organisations
professionnelles des médias sont fragiles et manquent de capacités institutionnelles pour
aider à structurer le secteur. La plupart de ces organisations pourraient contribuer de
manière essentielle au renforcement du secteur. Ces structures n’ont bénéficié pour la
plupart que de financements épisodiques qui ont eu des effets limités sur le renforcement
de leurs capacités.

Au vu des conséquences de la crise sanitaire sur la liberté d’expression et des clivages et


tensions politiques exacerbées, une intervention centrée sur le secteur des médias
pourrait permettre d’ouvrir des espaces de débats apaisés, d’offrir une plus grande
diversité de contenus de qualité et fondés sur des sources fiables et d’accompagner dans
de meilleures conditions les échéances électorales à venir. Pour répondre aux différents
enjeux de gouvernance à Madagascar, il est incontournable de s’assurer qu’il y ait un
écosystème de l’information sain contribuant au débat démocratique. Toute intervention
devrait s’axer en priorité sur un renforcement des acteurs locaux et des organisations
professionnelles des médias.

Recommandations :
• Lancer une analyse approfondie du cadre juridique afin de mieux comprendre les
textes d’applications qui pourraient consolider la loi sur la communication
médiatisée et une meilleure protection des journalistes ; Accompagner l’adoption

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 54


de la loi sur l’accès à l’information notamment par un travail de sensibilisation
auprès des acteurs ;
• Renforcer les capacités de l’OJM pour la mise en place d’un monitoring
systématique des atteintes à la liberté de la presse, documentant toutes les
violations ;
• Apporter aux journalistes (Notamment les femmes), médias et autres activistes de
la société civile des notions clés de sécurité digitale ;
• Renforcer les capacités et les moyens des médias indépendants existants et
stimuler la production de contenus d’information sur des questions clés de
gouvernance, de genre ou lié à l’environnement et au changement climatique ;
• Encourager et initier des programmes de débats et des espaces de discussions sur
des questions clés de gouvernance et sur des sujets concernant des groupes
marginalisés comme les femmes, les jeunes, les communautés rurales, etc ;
• Dans le contexte des élections à venir, encourager une couverture neutre et
impartiale des campagnes électorales par des activités de formation et de
sensibilisation ;
• Renforcer les capacités des journalistes par la mise en place de
formations/mentoring et de curriculums pratiques sur la déontologie, les notions
de bases et les fondamentaux du journalisme ; Compléter ces formations par des
formations sur le journalisme mobile, le fact-checking et des formations
thématiques ;
• Développer les compétences d’un noyau de techniciens spécialisés dans l’audio-
visuel à même d’assister les radios et les télévisions dans les obstacles techniques
auxquels elles font face ; Encourager des formations techniques existantes à
intégrer cette spécialisation ; Apporter un soutien matériel et en équipements à
des radios ou chaîne de TV indépendantes ;
• Stimuler et appuyer l’émergence d’initiatives de journalistes citoyens en ligne et
hors ligne ;
• Renforcer et appuyer les organisations professionnelles des médias (OJM,
coalition des radios, associations de journalistes, etc) afin qu’elles structurent et
auto-régulent le secteur ;
• Développer une culture du fact checking et initier des initiatives de vérifications
des faits, prévention des rumeurs et discours de haine ;
• Réaliser une étude en profondeur sur les besoins d’information des malgaches et
des différentes communautés ;
• Appuyer des initiatives au niveau communautaire utilisant les vidéo clubs, le
cinéma mobile, les caricatures ou le photojournalisme pour engager les
communautés et le public sur différentes problématiques ;

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 55


• Soutenir des médias indépendant dans le renforcement de leur business model et
de leur résilience économique afin notamment de diversifier leurs sources de
retenus et encourager des business model innovants dans le secteur des médias ;
• Soutenir les médias dans leur transition numérique ;
• Commissionner des enquêtes pour mesurer l’audience des médias et les
habitudes de consommation et assister les médias sur la manière dont ils peuvent
utiliser ces enquêtes ;
• Encourager une meilleure collaboration entre les médias et la société civile
notamment en formant la société civile sur des stratégies de communication,
l’utilisation des réseaux sociaux et des médias.

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 56


Annexe 1 : Notices biographiques
Agence Ecofin, https://www.agenceecofin.com/internet/0505-76313-classement-des-
pays-africains-selon-le-cout-moyen-d-1gb-mobile-la-somalie-devance-tout-le-monde

Agence Ecofin, https://1e8q3q16vyc81g8l3h3md6q5f5e-wpengine.netdna-ssl.com/wp-


content/uploads/2021/04/3522_RegionalReport_Africa.pdf

Alliance for Affordable Internet, Africa Affordability report 2020,


3522_RegionalReport_Africa.pdf (netdna-ssl.com)

Amnesty International, Madagascar : Sur fond de Covid-19, Une journaliste se retrouve en


détention préventive alors que les autorités continuent d’intimider la profession,
08/04/2020

Andrew Lee Trust & Media Support, the contribution of radio broadcasting to the
millennium development goals in Southern Madagascar, January 2007

Communication Idea Development (CID)/PEV Madagascar, Les médias Malgaches face


aux défis de l’indépendance et de l’apaisement, Février 2018

Friedrich-Ebert-Stiftung (FES), Baromètre des médias africains, Madagascar 2019

Friedrich Ebert Stiftung (FES), Les impacts de la structure de la propriété des médias sur la
couverture médiatique, la représentation politique et le travail du journaliste, 2019

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Ilontsera, Evaluation initiale du projet du Studio Sifaka, 03/09/2019

Malagasy tech, https://malagasy.tech/chiffre-cle/

MICS, Mass Media, Communication and Internet, Madagascar 2018, MICS6-Madagascar-


2018-Media.pdf

Midi Madagasikara, Loi sur l’accès à l’information : la société civile interpelle le


gouvernement, 12/06/2020

No comment, Tribune : Ordre des journalistes de Madagascar : En toute indépendance ?


06/11/2020

Politika n°23, Droit de regard sur la presse, Juin-Juillet 2021, FES-PK-23-1-1.pdf

Reporters Sans Frontières, Coronavirus à Madagascar : une chaîne de télé victime d’un
acte de sabotage, 15/04/2020

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 57


Reporter Sans Frontières, Covid-19 à Madagascar : RSF appelle les autorités à laisser les
journalistes travailler librement, 29/04/2021

Reporters Sans Frontières, Près de 80 stations audiovisuelles fermées depuis la fin de l’été
| RSF, 15/10/2010

Stileex, TV Audiometry in Madagascar 2019, https://stileex.xyz/en/madagascar-tv-


audimetry-2019/

Stileex, Information in Madagascar: Do Tanarivians trust the medias? 20/11/2018,


https://stileex.xyz/en/trust-media-madagascar/

Studio Sifaka, « …Présenter les faits tels qu’ils sont et non les biaiser » - Les journalistes au-
devant de leurs responsabilités - Studio Sifaka - Actu, musique, conseils et débats pour les
jeunes à Madagascar

UNESCO, Etude sur le développement des médias à Madagascar, 2017

UNDP/UNDEF, La communication pour l’empowerment à Madagascar, Une évaluation


des besoins communautaires, 2008

Etude sur le paysage médiatique à Madagascar 58

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