Chapitre 6 Anomalies de L'équilibre Acido-Basique

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CHAPITRE

6
Anomalies de l’équilibre
acido-basique

PLAN DU CHAPITRE
j Rappels physiologiques
� Notions de base
� Définitions des troubles de l’équilibre acido-basique
j Les acidoses métaboliques
� Définition
� Conséquences cliniques
� Étiologie
� Traitement
� Arbre diagnostique
j Les alcaloses métaboliques
� Définition
� Conséquences cliniques
� Étiologie
� Traitement
� Arbre diagnostique
j Les acidoses respiratoires
� Définition
� Conséquences cliniques
� Étiologie
� Principes thérapeutiques
j Les alcaloses respiratoires
� Définition
� Conséquences cliniques
� Étiologie
� Principes thérapeutiques

Les troubles hydro-électrolytiques faciles


© 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
114 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

j Troubles complexes de l’équilibre acido-basique


� Généralités
� Principales causes des troubles complexes

Rappels physiologiques
Notions de base
pH extracellulaire
Le pH artériel normal est compris entre 7,38 et 7,42 (le pH intracellulaire est plus
bas : voisin de 7,20) et correspond à une concentration d’ions H+ de 37 à 43 nmol/l
(soit 0,000037 à 0,000043 mmol/l).
La norme du pH est très étroite :
j toute augmentation du pH de 0,3 correspond à une diminution de moitié de
la concentration d’ions H+ ;
j toute diminution du pH de 0,3 correspond à un doublement de la concen-
tration d’ions H+.
Le système bicarbonate (HCO−3 )/acide carbonique (H2CO3), dont le pK est de 6,1,
est le principal tampon extracellulaire.
La PaCO2 (pression partielle de dioxyde de carbone dans le sang artériel, ou
capnie) correspond à la quantité résiduelle de dioxyde de carbone dans le sang
artériel après élimination de l’excès de dioxyde de carbone par le poumon. Elle est
comprise entre 35 et 45 mm Hg.
Le pH est défini par l’équation d’Henderson-Hasselbalch :
[HCO3− ] [HCO3− ]
pH = 6,1 + log10 = 6,1 + log10 .
H2 CO3 0,03 x PaCO2
[Avec les concentrations en mmol/l et PaCO2 en mm Hg.]

Définition
Valeurs normales dans le sang artériel :
j
pH = 7,38 à 7,42.
j
[HCO3–] = 22 à 27 mmol/l.
j
PaCO2 = 38 à 42 mm Hg.
Valeurs normales dans le sang veineux :
j
pH = 7,32 à 7,38.
j
[HCO3−] = 23 à 27 mmol/l.
j
PCO2 = 42 à 50 mm Hg.

L’équation d’Henderson-Hasselbalch exprime les relations entre les différents


acteurs du tampon des bicarbonates, dont la fonction est de titrer l’excès de pro-
tons H+ selon l’équation suivante :
Anomalies de l’équilibre acido-basique 115

H+ + HCO−3 ⇆ H2CO3 ⇆ H2O + CO2


L’efficacité du tampon des bicarbonates repose sur les fonctions :
j ventilatoires (élimination par les poumons du CO2 produit) ;
j rénales (régénération par le rein des bicarbonates consommés).

Production acide
Acides volatils
Chaque jour, il faut éliminer la production acide, qui provient essentiellement
du métabolisme des glucides et des lipides, dont l’oxydation complète — en
aérobiose, c’est-à-dire lorsque la perfusion tissulaire est normale — produit du
CO2 et de l’eau. Dans les conditions normales, ce CO2 est entièrement évacué par
les poumons et n’entre pas en compte dans l’équilibre acide-base.
Cette production d’acides dits « volatils » est de 15 000 mmol de CO2 par jour.
Acides non volatils, ou fixes
Les acides « non volatils » résultent :
j d’apports alimentaires (alimentation riche en phosphates) ;
j du métabolisme des protides, qui génère des acides minéraux fixes :
Ÿ métabolisme des acides aminés contenant des sulfates (cystéine, méthio-
nine), qui aboutit à la production d’acide sulfurique H2SO4 ;
Ÿ métabolisme de la lysine, de l’arginine, de l’histidine, qui aboutit à la produc-
tion d’acide chlorhydrique HCl ;
j de la faible production d’acide lactique et d’autres anions organiques : acides
organiques non métabolisés fixes.
C’est cette production d’acides non volatils quotidienne que le système des bicarbo-
nates tamponne continûment, en consommant du HCO−3 et en produisant du CO2.
Trou anionique plasmatique
Le trou anionique plasmatique mesure la différence de concentration entre les
anions et les cations contenus dans le plasma.

À savoir
Pour le physiologiste, le trou anionique plasmatique est estimé en mEq/l et
non en mmol/l, car il concerne des charges.
j
1 mmol/l de Na+ correspond à 1 mEq/l
j
1 mmol/l de Ca++ correspond à 2 mEq/l

Dans le plasma, la concentration des cations en mEq/l est égale à celle des anions
(électroneutralité).
Le calcul du trou anionique plasmatique (TAP), à partir des données du iono-
gramme sanguin, utilise la formule :
TAP = Cations dosés – Anions dosés = (Na+ + K+) – (Cl– + HCO3−).
116 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

La concentration de potassium variant peu, le potassium est, le plus souvent, non


pris en compte dans le calcul du TAP, d’où :
TAP = Na+ – (Cl– + HCO−3 ).
Sa valeur normale est 12 ± 4 mEq/l.
(Si le potassium est pris en compte, la valeur normale du TAP est alors de
16 ± 4 mEq/l.)
Cette valeur positive est due au fait que les analyses biologiques de routine
mesurent la plupart des cations mais un nombre plus restreint d’anions (le « trou
anionique ») (figure 6.1).
Les principaux anions indosés expliquant le TAP sont :
j les protéines (15 mEq/l) ; de ce fait, le TAP doit être ajusté aux valeurs de l’albuminé-
mie (TAP diminué de 4 mmol/l pour chaque diminution de l’albuminémie de 10 g/l) ;
j les phosphates (2 mEq/l) ;
j les sulfates (1 mEq/l) ;
j les acides organiques (5 mEq/l).
La figure 6.1 schématise le TAP normal et en cas d’acidose métabolique.

A. Situation B. Acidose C. Acidose


normale métabolique avec métabolique
surcharge acide hyperchlorémique
150 = 150
mEq/l mEq/l

Na+ Cl– Cl– Cl–


Seuil des cations indosés

HCO–3
HCO–3
TAP HCO–3
TAP TAP
K+ normal normal

Cations Anions Anions Anions


indosés indosés indosés indosés

Figure 6.1. Le trou anionique plasmatique (TAP) correspond à la différence entre


les anions indosés et les cations indosés.
A. Situation normale. B. Acidose normochlorémique par envahissement de la colonne
des anions par des acides organiques au détriment des bicarbonates. C. Acidose
hyperchlorémique par perte de bicarbonates avec envahissement de la colonne
des anions par le chlore.
(Pour simplifier le schéma, les cations Ca++ et Mg++ n’apparaissent pas).
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)
Anomalies de l’équilibre acido-basique 117

Excrétion nette d’acides, trou anionique urinaire

Il est important de comprendre qu’au niveau de l’organisme, la consomma-


tion d’un ion bicarbonate est équivalente à la production d’un ion H+, et
inversement. C’est pourquoi, dans les conditions normales d’équilibre acide-
base, il y a égalité entre :
j
la production nette d’acides non volatils, titrés immédiatement par le
tampon des bicarbonates, en consommant des HCO3– (≈ 60 mmol par
jour) ;
j
et l’excrétion nette acide par le rein, qui excrète des ions H+ tout en régé-
nérant les HCO3– de novo (≈ 60 mmol par jour).
NB : Le stock plasmatique total d’environ 350 mmol de bicarbonates ne suffi-
rait théoriquement que pour 5 ou 6 jours s’il n’était pas renouvelé constam-
ment par le rein (cf. infra).

Excrétion nette d’acides


Le rôle du rein est double :
j le rein réabsorbe 100 % des bicarbonates filtrés, soit environ 4 500 mmol par
jour ; à l’état normal, la bicarbonaturie est quasiment nulle ;
j le rein élimine les ions H+ dans l’urine, tout en régénérant de novo des bicar-
bonates.
La charge acide quotidienne à éliminer (acides non volatils, cf. supra) est d’environ
1 mmol/kg par jour. Pour un individu de 60 kg, l’excrétion nette d’acide est donc
de 60 mmol par jour.
L’élimination de cette charge acide correspond à l’équation suivante, qui semble
complexe mais est en fait relativement simple :
Excrétion nette d’acides = Ammonium (NH+4 ) + Acidité titrable (AT)– Bicar-
bonaturie.
Ainsi, pour un individu de 60 kg, l’excrétion nette d’acide est de 60 mmol par jour,
avec environ 40 mmol excrétés sous forme de NH+4 , 20 mmol d’AT et une excrétion
urnaire de bicarbonates nulle.
Ces paramètres ne sont pas mesurés en routine, d’où l’importance de la mesure
du trou anionique urinaire, qui permet une estimation indirecte du NH+4 urinaire
éliminé (cf. infra).
j L’acidité titrable AT correspond aux protons tamponnés surtout par les phos-
phates, mais aussi par la créatinine, le citrate :
Ÿ elle est appelée ainsi car elle est quantifiée par titration de l’urine, jusqu’à un
pH de 7,40 qui est le pH plasmatique ;
Ÿ elle correspond à l’excrétion de 35 à 40 % de l’élimination des acides non
volatils.
j L’ammoniurie est la forme la plus importante d’élimination des ions H+ :
118 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Ÿ elle correspond à l’excrétion de 60 à 65 % de l’élimination des acides non


volatils ;
Ÿ surtout : elle est modulable.
j Enfin, la bicarbonaturie est nulle à l’état normal, puisque le rein réabsorbe la
quasi-totalité des bicarbonates.
L’ammoniurie est donc le mécanisme principal régulé de l’acidification de l’urine.
Le tableau 6.1 résume les points importants concernant l’ammoniogenèse et les
figures 6.2 et 6.3 le comportement rénal de l’ammonium.

Tableau 6.1. Ammoniogenèse.

Génération d’ammoniac • Synthèse de NH3/NH+4 dans le tube contourné proximal à


(NH3)/d’ion ammonium partir de la glutamine
(NH+4 ) • Sécrétion dans la lumière du tubule contourné proximal
• Puis diffusion passive du NH3 et accumulation dans l’inter-
stitium rénal médullaire
• Dans la branche large ascendante de l’anse de Henlé, l’ion
ammonium NH+4 est activement réabsorbé, participant à
l’accumulation médullaire
• Passage (favorisé par le gradient de concentration médullaire)
du NH3 dans la lumière du tube collecteur, où sont en outre
sécrétés les ions H+
• Élimination des ions H+ sous forme de NH+4
Facteurs stimulant • Acidose métabolique
l’ammoniogenèse • Aldostérone
• Hypokaliémie
Estimation • Mesure non faite en routine
de l’ammoniurie • Estimation par le calcul du trou anionique urinaire (+++)
• Selon la formule : (Na+ + K+) – Cl–
• Utile en cas d’acidose métabolique avec TAP normal (cf. infra)
Anomalies de l’équilibre acido-basique 119

Lumière tubulaire

NH+4 NH3 + H+

Glutamine
Na+ Na+

NH+4 NH3 + H+
Glutamine
HCO–3

Glutamine Na+ 3HCO–3 3 Na+ 2 K+

Capillaire péritubulaire

Figure 6.2. Synthèse et sécrétion d’ammonium par le tubule proximal.


Synthèse de NH3/NH+4 à partir de la glutamine dans le tube contourné proximal. 100 % de
l’ammonium excrété dans l’urine est sécrété par le tubule proximal. Créé en même temps
qu’un ion H+ au cours de l’ammoniogenèse proximale (équilibre acido-basique inchangé),
un ion bicarbonate est réabsorbé via un transporteur basolatéral. Canaux apicaux :
échangeur NHE3 en vert clair ; H+-ATPase en bleu. Canaux basolatéraux : cotransporteur
Na+-3 HCO3− en vert foncé ; Na+/K+-ATPase en rouge.
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)
120 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Glutamine
NH+4

Cor
H+ NH3 tex
NH3 Mé
H+ dull
aire
NH+4 NH+4

NH3 H+

NH3
Accumulation
médullaire NH+4

Ammoniurie

Figure 6.3. Comportement rénal de l’ammonium.


Transport rénal de l’ammonium (NH3/NH+4 ) le long du néphron avec, en particulier,
diffusion passive de NH3 dans l’interstitium médullaire, création d’un gradient et
diffusion dans la lumière tubulaire au niveau du tube collecteur (cf. tableau 6.1).
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)

Trou anionique urinaire


Le calcul du trou anionique urinaire (TAU) est une méthode indirecte pour
estimer la quantité de NH+4 urinaire éliminée (indosé), et donc pour évaluer la
réponse rénale à l’acidose.
TAU = (Nau+ + K u+ ) – Clu− .
Le trou anionique urinaire est physiologiquement discrètement positif.
Son calcul n’a d’intérêt qu’au cours des acidoses métaboliques avec TAP normal
(+++) (cf. infra).
La figure 6.4 résume les différentes situations :
+
j un TAU négatif signifie une excrétion importante de NH4 , excrétion traduisant
une réponse rénale adaptée et donc une acidose secondaire à des pertes digestives ;
+
j à l’opposé, un TAU positif correspond à une faible excrétion de NH4 , et donc
à une réponse rénale inadaptée comme observé au cours des acidoses métabo-
liques de cause rénale.
Anomalies de l’équilibre acido-basique 121

B. Acidose métabolique C. Acidose métabolique


A. Situation normale avec TAP normal de avec TAP normal de
cause digestive cause rénale

Na+ Cl– Na+ Cl–


(150 (200
mmol/l) mmol/l)
Na+ Cl–

K+

K+ TAU
(80 <0
mmol/l) TAU K+
= + 30
NH+4 TAU
>0
NH+4 (80
NH+4
(40 mmol/l) mmol/l) (30 mmol/l)

Anions Anions Anions


indosés indosés indosés
Figure 6.4. Trou anionique urinaire.
A. En situation normale, le TAU est faiblement positif (ici, environ 30 mEq/l). B. En cas
d’acidose métabolique avec TAP normal (dite hyperchlorémique) de cause digestive,
le rein s’adapte en augmentant la quantité de NH+4 urinaire. Le TAU devient négatif
(habituellement entre – 20 et – 50 mEq/l). C. En cas d’acidose métabolique avec TAP
normal (dite hyperchlorémique) de cause rénale, la production de NH+4 est diminuée
(réponse inadaptée à l’acidose) et le TAU est positif.
(Pour simplifier le schéma, les cations Ca++ et Mg++ n’apparaissent pas).
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)

Rôle du rein : réabsorption de bicarbonates, sécrétion d’ions H+ et


régénération du tampon des bicarbonates
Bicarbonates
La majeure partie des bicarbonates HCO−3 filtrés est réabsorbée le long du néphron
(figure 6.5) :
j 80 % dans le tube contourné proximal ;
j 10 % dans la branche large ascendante de l’anse de Henlé ;
j 10 % au niveau des segments plus distaux (tube contourné distal et tube col-
lecteur).
Cette réabsorption est encore augmentée en cas d’hypovolémie (avec alcalose
dite de contraction).
Ions H+
La sécrétion tubulaire d’ions H+ qui a lieu au niveau des cellules intercalaires de
type A (ou alpha) du tube collecteur cortical est stimulée par l’aldostérone.
122 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Génération
Réabsorption d’HCO–3 de novo
complète des couplée à l’excrétion des
HCO–3 filtrés ions H+, régulée par
80 % l’aldostérone
6%

HCO–3 filtrés 4%
( 4 500
mmol/j) 10 %

H+ HCO–3

< 0,1 % (Bicarbonaturie nulle)

Figure 6.5. Transport rénal du bicarbonate.


La réabsorption de HCO3− a lieu majoritairement dans le tubule proximal, pour partie dans la
branche ascendante de l’anse de Henlé et quelques pourcents dans le tubule distal. Dans les
conditions normales, la réabsorption est complète. En outre, des ions HCO3− « nouveaux »
sont régénérés dans le tube collecteur, phénomène couplé à l’excrétion d’ions H+.
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)

L’aldostérone joue donc deux rôles importants au niveau des segments dis-
taux du tubule : elle stimule la sécrétion des ions K+ (cf. chapitre 5) mais aussi
celle des ions H+.
Les mécanismes de sécrétion d’ions H+ dans le tube collecteur, où ils sont fixés
puis excrétés sous forme d’ions NH+4 , sont représentés dans la figure 6.6 : pour
chaque ion H+ excrété dans le tube collecteur, un ion bicarbonate est généré
de novo et rejoint la circulation sanguine où il reconstitue la réserve de tampon
des bicarbonates, compensant leur consommation par les acides non volatils.

Pour aller plus loin


Rôle des phosphates urinaires
Une autre composante de l’excrétion des ions H+ est, selon le même prin-
cipe, leur fixation dans la lumière du tube collecteur par les ions phos-
phates (pourvoyeurs de l’acidité titrable AT) ; cette modalité d’excrétion
n’est toutefois pas modulable et est rapidement saturée lors d’une acidose,
contrairement à l’ammoniurie.

En cas de trouble acido-basique, la régulation rénale met quelques jours à se


mettre en place.
Anomalies de l’équilibre acido-basique 123

A. Tube Lumière tubulaire Figure 6.6. Rôles du rein :


contourné
proximal HCO–3 filtré réabsorption des bicarbonates,
H2O + CO2
AC
H2CO3 excrétion des ions H+ sous forme
+
H
de NH4+ , régénération des ions
bicarbonates.
IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII
IIIIIIIII A. Dans le tube contourné
Na+
proximal a lieu la réabsorption
des ions bicarbonates issus de la
H+
AC
filtration glomérulaire : un ion
H2O + CO2 H2CO3
H+ transporté (par un échangeur
HCO–3 Na+/H+) dans la lumière tubulaire
réagit avec le bicarbonate, ce qui
Cl– crée du CO2 et de l’eau ; arrivés
dans la cellule par le pôle apical,
CO2 et H2O sont reconvertis en
2 K+ 3 Na+ Na+ H+ et bicarbonate par l’anhydrase
HCO3–
réabsorbé
Pendrine carbonique intracellulaire : le
bicarbonate est réabsorbé au pôle
basolatéral par un échangeur
anionique, tandis que le proton
Capillaire péritubulaire sort de nouveau de la cellule.
On notera que, lors de cette
étape dans le tubule proximal,
le bicarbonate est simplement
réabsorbé (d’un ion luminal, on
obtient un ion interstitiel) et
qu’aucun proton n’est excrété
(puisque les ions H+ suivent un
B. Tube Lumière tubulaire
collecteur cycle avec passages successifs du
(cellule de NH3
type A) Excrétion
NH4+
milieu intracellulaire à la lumière
urinaire
H+ excrété tubulaire) : le bilan est neutre
pour l’équilibre acide-base.
B. L’excrétion des ions H+ a lieu
majoritairement via l’excrétion
K+
urinaire de NH+4 au niveau des
cellules intercalaires de type A
H+
H2O AC (ou alpha) du tube collecteur. La
+
CO2
H2CO3 sortie de protons dans la lumière
HCO3– se fait grâce à la H+/K+-ATPase
(en rouge) et à la H+-ATPase (en
K+ Cl– Cl– bleu, stimulée par l’aldostérone),
situées au pôle apical. Le NH3
accumulé dans l’interstitium
Pendrine HCO–3 NH3
médullaire diffuse selon son
CO2 de novo médullaire gradient de concentration et
atteint la lumière, fixant alors l’ion
H+ sous forme de NH+4 , excrété
dans l’urine. Lors de la réaction
Capillaire péritubulaire
mettant en jeu l’anhydrase 
124 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

 C. Tube Lumière tubulaire carbonique, un ion bicarbonate


collecteur
(cellule de est généré de novo, qui rejoint
type B) HCO–3 la circulation sanguine par
excrété
transport au pôle basolatéral,
Pendrine Cl– renouvelant le tampon des
bicarbonates consommé. C. Les
cellules intercalaires de type B
(ou bêta) du tube collecteur
HCO–3
jouent un rôle important
H2O
+
AC
H2CO3
en cas d’alcalose : la pompe
CO2
H+
H+-ATPase, localisée au pôle
basolatéral, sécrète les ions H+
dans le liquide interstitiel, tandis
que la protéine pendrine, un
échangeur anionique, excrète
les ions bicarbonates au pôle
Cl– H+
apical en échange de chlore
CO2
de novo urinaire. On peut considérer leur
fonction comme miroir de celle
des cellules de type A.
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)
Capillaire péritubulaire

Rôle du poumon
En cas de surcharge acide, les ions H+ favorisent la transformation des ions bicar-
bonates HCO3− en acide carbonique H2CO3 (cf. supra, réactions du tampon des
bicarbonates).
L’H2CO3, très volatil, est dissocié en CO2 et H2O au niveau des alvéoles pulmo-
naires, l’ion H+ disparaissant sous forme d’H2O et le CO2 étant éliminé par le pou-
mon (système ouvert), ce qui entraîne une diminution de la PaCO2.
Le système tampon des bicarbonates-poumons, ouvert, est indispensable au
maintien du pH extracellulaire : il réagit instantanément et continûment.
Au cours de cette réaction, un ion HCO3− est consommé et doit être régénéré par le rein.

Pour comprendre
Acidose mixte
Au cours d’une acidose métabolique, l’hyperventilation avec pour consé-
quence la baisse de la PaCO2 est relativement prévisible et peut être esti-
mée par la formule de Winter :
PaCO2attendue = 1,5 × [HCO3−] + 8 ± 2.
[Avec PaCO2 en mm Hg, [HCO−3] en mmol/l.]
Si la PaCO2 observée est supérieure à la PaCO2 attendue, il existe une
composante ventilatoire à l’acidose (acidose mixte).
Cette formule est utile en cas de suspicion de trouble mixte (cf. infra).
Anomalies de l’équilibre acido-basique 125

Définitions des troubles de l’équilibre acide-base


Les troubles de l’équilibre acido-basique sont définis dans le tableau 6.2 et la
figure 6.7.
En pratique, la mesure de la bicarbonatémie se fait par colorimétrie.
NB : C’est en fait le CO2 total qui est mesuré (incluant le CO2 dissout qui est égal
à 0,03 × PCO2), ce qui ajoute 1 ou 2 mmol/l à la concentration de HCO3− — cette
différence étant considérée comme très modeste pour l’analyse clinique.

Tableau 6.2. Troubles acido-basiques simples.


pH [HCO3− ] PaCO2
Acidose métabolique ↓ ↓ ↓
(Cause) (Compensation)
Alcalose métabolique ↑ ↑ ↑
(Cause) (Compensation)
Acidose respiratoire ↓ ↑ ↑
(Compensation) (Cause)
Alcalose respiratoire ↑ ↓ ↓
(Compensation) (Cause)

Compensation Cause
Acidose Acidose
respiratoire
H+ + HCO–3 H2CO3 H2O + CO2
Acidose
métabolique
pH Cause Compensation

pH Cause Compensation
Alcalose
métabolique
H+ + HCO–3 H2CO3 H2O + CO2
Alcalose
Alcalose respiratoire
Compensation Cause

Figure 6.7. Chaque trouble acido-basique simple est caractérisé par une cause
et un phénomène compensateur attendu.
Ces deux composantes sont représentées en se fondant sur le sens attendu (selon la loi
d’action de masses) des réactions du tampon des carbonates. On constate, par exemple,
que si la baisse de la bicarbonatémie est un phénomène commun à l’acidose métabolique
et à l’alcalose respiratoire, elle est cause de la première et compensatrice dans la seconde
— ce sont les gaz du sang, indispensables, qui permettent de porter le diagnostic.
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)
126 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Tests utiles à l’analyse d’un trouble acido-basique


j
Gaz du sang artériel le plus souvent (mais les gaz du sang veineux sont
suffisants en l’absence d’hypoxémie).
j
Natrémie, kaliémie, chlorémie et bicarbonatémie.
j
Natriurèse, kaliurèse et chlorurie sur échantillon urinaire.
j
Selon le contexte clinique : glycémie, lactates, etc.

Les acidoses métaboliques


Définition
L’acidose métabolique est définie par :
j
un pH artériel < 7,38, ou un pH veineux < 7,32 ;
j
et une bicarbonatémie HCO3−< 23 mmol/l.

Conséquences cliniques
L’acidose métabolique est mise en évidence :
j soit dans une situation clinique favorisant ce trouble, en particulier les états de
choc ;
j soit devant la découverte d’une diminution de la bicarbonatémie.

Attention
La diminution de la bicarbonatémie pouvant correspondre aussi bien à une
acidose métabolique qu’à une alcalose ventilatoire, la mesure du pH est
indispensable au diagnostic.

En cas d’acidose métabolique aiguë, le signe principal est l’hyperventilation :


j prouvée par l’hypocapnie documentée sur les gaz du sang ;
j et parfois traduite par une polypnée ample (dyspnée de Kussmaul) ;
j avec examens pulmonaire et cardiaque normaux, en dehors :
Ÿ des cas où une pathologie pulmonaire est associée ;
Ÿ des acidoses métaboliques sévères au cours desquelles une défaillance
myocardique peut survenir (effet direct de l’acidose, résistance aux catéchola-
mines endogènes…).
En cas d’acidose métabolique chronique, le principal système tampon n’est plus
le poumon, mais essentiellement l’os. On peut observer les signes suivants :
j néphrocalcinose et lithiases ;
j ostéomalacie ;
j retard de croissance…
Anomalies de l’équilibre acido-basique 127

Les acidoses métaboliques peuvent, inconstamment, s’accompagner d’une hyper-


kaliémie de transfert (notamment les acidoses à trou anionique plasmatique nor-
mal, cf. infra) : les ions H+ en excès pénètrent dans les cellules, phénomène qui est
compensé par une sortie de potassium intracellulaire vers le secteur extracellulaire.
Cette hyperkaliémie tend à entretenir l’acidose car elle induit une diminution de
l’ammoniogenèse rénale — la glutaminase est inhibée par l’hyperkaliémie — et
donc une diminution de l’élimination rénale des ions H+.

Étiologie
Pour s’orienter, le calcul du TAP est utile : l’augmentation du TAP permet de déce-
ler la présence d’anions organiques dans le plasma, traduisant le reflet de l’accu-
mulation d’acides non volatils dans l’organisme (lactates, phosphates, sulfates,
corps cétoniques, acides organiques d’origine toxique).
La figure 6.8 résume les principaux mécanismes responsables d’acidose métabolique.

Acidoses métaboliques avec charge acide et trou anionique


plasmatique augmenté
Ces acidoses ont en commun un TAP souvent > 25 mEq/l et un pH urinaire < 5,5.
On distingue trois causes principales (figure 6.8) :
j l’acidocétose diabétique ;
j l’acidose lactique ;
j certaines intoxications aiguës.

Filtration et régénération des ions HCO–3

Secteur extracellulaire
pH < 7,38
H+ > 42 nmol/l

Production acide augmentée Pertes Diminution de l’excrétion acide


- Acidose lactique de bases - Insuffisance rénale
- Acidocétose - Hypoaldostéronisme
- Causes toxiques - Acidose tubulaire distale

Dans les selles : Dans l’urine :


diarrhées acidose tubulaire
proximale
Figure 6.8. Mécanismes impliqués dans la survenue d’une acidose métabolique.
L’acidose métabolique peut être la conséquence d’une surcharge acide (flèche rose), d’une
perte de bases (flèches vertes) ou d’une diminution d’excrétion des acides (flèche bleue).
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)
128 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Acidocétose diabétique
j Souvent inaugurale du diabète, elle résulte de l’accumulation d’acides céto-
niques (acide 3-hydroxybutyrique, acide acéto-acétique).
j Cétonémie et cétonurie sont associées.
j L’acidose métabolique est sévère avec parfois pH sanguin < 7,0.
j Il y a déshydratation extracellulaire secondaire aux pertes éventuelles digestives
et à la diurèse osmotique (cf. chapitre 2).

Rappel
En dehors du diabète, le jeûne et la prise excessive d’alcool sont également
des causes d’acidocétose.
Acidose lactique
L’acidose lactique est caractérisée par une lactacidémie > 4-6 mmol/l.
Les mécanismes cellulaires de l’hyperlactacidémie sont les suivants :
j hyperproduction à partir du pyruvate (en cas d’anaérobiose), par exemple au
cours des états de choc ;
j défaut du métabolisme normal des lactates lors de la néoglucogenèse hépa-
tique et rénale (insuffisance hépatocellulaire…).
Il existe trois grandes causes :
j l’hypoxie tissulaire (états de choc +++) ;
j l’insuffisance hépatocellulaire ;
j les causes toxiques : la metformine, certains antiviraux comme les analogues
nucléosidiques, l’acide valproïque, l’isoniazide, le zyvoxide, etc.
Le tableau 6.3 résume les principales causes d’acidose lactique, qui sont classique-
ment divisées en :
j acidose lactique de type A (diminution de l’oxygénation des tissus, en particu-
lier des mitochondries) ;
j acidose lactique de type B dans les autres situations.

Certaines intoxications aiguës


j Méthanol (alcool frelaté), avec accumulation d’acide formique : situation grave
avec risque de cécité et nécessité d’hémodialyse en urgence.
j Éthylène glycol (antigel) avec accumulation d’acide oxalique et insuffisance
rénale aiguë.
j Acide acétylsalicylique avec acidose métabolique et alcalose ventilatoire, et
donc pH variable, parfois proche de la normale.
j Isopropanol présent dans certaines solutions de nettoyage.

Acidoses métaboliques avec perte de bicarbonates et trou anionique


plasmatique normal
Deux mécanismes sont en cause (figure 6.8) :
j les pertes digestives de bicarbonate de sodium ;
j les pertes rénales de bicarbonates.
Anomalies de l’équilibre acido-basique 129

Tableau 6.3. Causes d’acidoses lactiques.


Acidose lactique Causes
Type A • États de choc (+++)
• Arrêt cardiaque
• Anémie très sévère
• Hypoxémie sévère
• Intoxication au CO
• Convulsions
• Exercice physique extrême
Type B • Certains sepsis en l’absence d’hypotension artérielle
• Déficit en thiamine
• Hypoglycémie
• Rares maladies génétiques
• Causes toxiques (+++) :
– éthanol
– metformine (+++)
– zidovudine (AZT)
– lamivudine (Zeffix©)
– intoxication aux salicylés
– propofol (Diprivan©)
– isoniazide
– cocaïne
– linézolide (Zyvoxid©)…
Autres • Insuffisance hépatocellulaire
• Alcalose respiratoire ou métabolique sévère

On parle aussi d’« acidoses hyperchlorémiques » : les pertes rénales ou digestives


de bicarbonates sont compensées par une augmentation proportionnelle du Cl–,
maintenant l’électroneutralité plasmatique.
Pertes digestives de bicarbonates
j Diarrhées aiguës essentiellement (+++), fistules digestives.
j Dans ces situations :
Ÿ le TAP est normal ;
Ÿ le pH urinaire est < 5,5 ;
Ÿ le TAU est négatif.
Pertes rénales de bicarbonates : acidose tubulaire proximale (ou de type 2)
j Le TAP est normal.
j La capacité maximale de réabsorption tubulaire proximale des bicarbonates
est diminuée à 15-16 mmol/l, pour une normale à 26-27 mmol/l — le rein normal
réabsorbe tous les bicarbonates jusqu’à une concentration de bicarbonates de
26-27 mmol/l.
130 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

j Il y a hyperchlorémie (cf. figure 6.1).


j L’ammoniurie est insuffisante (défaut de production d’ammoniac dans le tube
contourné proximal), avec TAU positif (cf. figure 6.4).
j Le pH urinaire reste < 6 car la bicarbonatémie étant basse, il n’y a pas de bicar-
bonaturie.
j L’excrétion fractionnelle des bicarbonates est > 15 %.
j Le plus souvent, l’acidose tubulaire proximale s’intègre dans le cadre d’un syn-
drome de Fanconi (cf. chapitre 5 « Anomalies du bilan du potassium » et cha-
pitre 10 « Anomalies du bilan de l’acide urique »), associant :
Ÿ hypokaliémie ;
Ÿ hypo-uricémie ;
Ÿ hypophosphatémie ;
Ÿ amino-acidurie ;
Ÿ glycosurie sans hyperglycémie.
Les principales causes des acidoses tubulaires proximales sont listées dans le
tableau 6.4.

Acidoses métaboliques avec diminution de l’excrétion rénale des ions


H+ et à trou anionique variable selon la cause
Quatre situations doivent être envisagées :
j l’insuffisance rénale chronique ;
j l’insuffisance rénale aiguë ;
j l’acidose tubulaire distale hypokaliémique (dite de type 1) ;
j l’acidose tubulaire distale hyperkaliémique (dite de type 4).

Insuffisance rénale chronique


L’acidose métabolique est secondaire à deux mécanismes :
j la réduction du débit de filtration glomérulaire (DFG) avec rétention d’acides
organiques et minéraux ;
j la réduction de la production d’ammoniac (secondaire à la réduction du nom-
bre de néphrons fonctionnels).
Avant le stade terminal, l’acidose métabolique est le plus souvent modérée
(pH = 7,33-7,35).
Le TAP est classiquement augmenté par défaut d’élimination acide.
Dans certaines néphropathies où l’acidose tubulaire de type 4 est au pre-
mier plan avec réduction majeure de l’ammoniurie, le TAP peut être normal
(tableau 6.4).
L’acidose chronique a un retentissement osseux :
j les ions H+ en excès vont mobiliser les tampons osseux ;
j il y a formation de phosphates acides et libération de carbonate de calcium par
l’os ;
j l’activité ostéoclastique et l’ostéomalacie sont ainsi favorisées.
Anomalies de l’équilibre acido-basique 131

Tableau 6.4. Principales causes des acidoses tubulaires rénales.


Acidose tubulaire proximale Acidose tubulaire distale Acidose tubulaire distale
hypokaliémique (type 2) hypokaliémique (type 1) hyperkaliémique (type 4)
• Myélome (+++) • Lupus érythémateux • Uropathies obstructives-
• Cystinose disséminé bilatérales
• Syndrome de Sjögren • Syndrome de Sjögren • Hyporéninisme et
• Maladie de Wilson • Cirrhose biliaire hypoaldostéronisme (en
• Causes toxiques (ifos- primitive particulier au cours des
famide, oxiplatine, • Amphotéricine B néphropathies diabétiques
ténofovir, aminosides, • Causes génétiques et interstitielles)
plomb…) • Drépanocytose
• Causes toxiques (ciclospo-
rine, tacrolimus, amiloride,
spironolactone, AINS…)

Insuffisance rénale aiguë


Elle provoque la rétention d’acides minéraux et organiques secondairement à la
diminution de la filtration glomérulaire.

Le TAP est constamment augmenté.

L’acidose métabolique est particulièrement marquée :


j dans les insuffisances rénales aiguës anuriques ;
j au cours des rhabdomyolyses ;
j dans les insuffisances rénales aiguës obstructives ;
j dans les intoxications à l’éthylène glycol.

Acidose tubulaire distale hypokaliémique (type 1)


Relativement rare chez l’adulte, elle est rapportée à un défaut de sécrétion des
ions H+ dans le tube collecteur.
Elle est caractérisée par :
j un TAP normal ;
j une ammoniurie basse et donc un TAU positif ;
j une hypokaliémie avec kaliurèse inadaptée ;
j une hypercalciurie ;
j une hypocitraturie.
Au long cours, on observe :
j une néphrocalcinose ;
j une déminéralisation osseuse ;
j les conséquences d’une hypokaliémie chronique (cf. chapitre 5 « Anomalies du
bilan du potassium »).
Les principales causes sont listées dans le tableau 6.4.
132 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Acidose tubulaire distale hyperkaliémique (type 4)


C’est de loin la plus fréquente des acidoses tubulaires rénales et c’est la seule qui
soit hyperkaliémique (+++).
Il y a un défaut d’excrétion des ions H+ et des ions K+ dans le tubule collecteur.
L’ammoniogenèse est diminuée par des lésions tubulaires localisées, responsables
d’un hyporéninisme-hypoaldostéronisme. L’acidose et l’hyperkaliémie sont secon-
daires à l’hypoaldostéronisme.
Les signes sont :
j TAP normal ;
j kaliémie > 5,5 mmol/l ;
j pH urinaire < 6 ;
j défaut d’ammoniogenèse et donc TAU positif (cf. figure 6.4).
Les principales causes des acidoses tubulaires figurent dans le tableau 6.4.

Traitement
Le traitement des acidoses métaboliques aiguës dépend de la cause et ne sera pas
traité ici, du fait de la prise en charge spécifique à chaque situation (cf. Recom-
mandations formalisées d’experts, SRLF-SFMU, 2019).
En cas d’acidose métabolique chronique, le traitement repose sur l’apport de
bicarbonate de sodium per os :
j soit en gélules (apports de 2 à 4 g par jour, par préparation officinale en
l’absence de spécialité commercialisée) ;
j soit par eau de Vichy (contenant 3 à 4 g par litre).
Dans le cas particulier des acidoses tubulaires distales de type 1 (avec hypoci-
traturie et hypokaliémie), on peut prescrire une préparation officinale de citrate
de potassium à la dose de 4 à 6 g par jour.
Dans tous les cas, il est nécessaire de traiter les troubles ioniques associés : hypo-
kaliémie, hyperkaliémie (+++).

Arbre diagnostique
Il est représenté dans la figure 6.9.

Les alcaloses métaboliques


Définition
L’alcalose métabolique est définie par :
j
un pH artériel > 7,42 ;
j
et une bicarbonatémie HCO3− > 27 mmol/l.
Anomalies de l’équilibre acido-basique 133

Acidose métabolique

TAP = Na+ – (Cl– + HCO–3 )

Acidocétose
Surcharge acide diabétique
TAP augmenté
pHu < 5,5
Intoxications
(métanol,
éthylène-glycol)

Acidose lactique

États Insuffisance Causes


de choc hépatocellulaire toxiques

TAP normal Pertes de HCO–3 TAU = (Na+u + K+u) – C–u

TAU négatif TAU positif


pHu < 6 pHu < 6

Diarrhées Ac. tubulaire


proximale

TAP variable Diminution de l’excrétion des ions H+

Ac. tubulaires distales IRA IRC


avec TAP avec TAP
Type 1 Type 4 augmenté augmenté
TAP normal TAP normal
ou normal
TAU positif TAU positif
Hypokaliémie Hyperkaliémie

Figure 6.9. Arbre diagnostique devant une acidose métabolique.


Les causes des acidoses métaboliques avec TAP augmenté apparaissent en rose, celles
avec TAP normal en bleu et celles avec TAP variable en vert.
Ac., acidose ; TAP, trou anionique plasmatique ; TAU, trou anionique urinaire ;
IRC, insuffisance rénale chronique ; IRA, insuffisance rénale aiguë.
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)
134 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Attention
Une alcalose métabolique sévère (pH > 7,60) engage le pronostic vital et
nécessite la prise en charge en réanimation.

Au cours des alcaloses métaboliques, l’hypochlorémie est constante (+++).


Il est nécessaire de se poser deux questions devant toute alcalose métabo-
lique :

j Quelle est la cause responsable du gain d’ions HCO3 ou de la perte d’ions
H+ ?
j Qu’est-ce qui empêche le rein d’éliminer cette surcharge alcaline ?
La physiopathologie de l’alcalose métabolique prend donc en compte deux
facteurs :
j la création de l’alcalose métabolique :
Ÿ par gain d’ions HCO3− (apport excessif en bicarbonates) ;
Ÿ ou par perte d’acides non volatils (typiquement, la perte d’acide chlorhy-
drique au cours des vomissements ou des aspirations gastriques) ;
j l’entretien de cette alcalose, maintenue par des mécanismes qui empêchent le
rein d’éliminer normalement les ions HCO3− .
Ces deux mécanismes et leurs conséquences sont décrits figure 6.10, en prenant
l’exemple des vomissements.

L’entretien de l’alcalose métabolique peut être secondaire à :


j
une déshydratation extracellulaire : diminution de la filtration gloméru-
laire, augmentation de la réabsorption proximale des bicarbonates ; c’est
l’alcalose dite de contraction (cf. infra) ;
j
l’activation du système rénine-angiotensine-aldostérone secondaire à
la déshydratation, l’aldostérone favorisant l’élimination des ions H+ au
niveau des cellules intercalaires de type A du tube collecteur et entrete-
nant l’hypokaliémie ;
j
une déplétion en chlore : diminution de l’activité du cotransporteur
Na-K-2Cl dans la branche large ascendante, altération de la sécrétion
compensatrice distale des HCO3− par la pendrine (cf. infra) : l’urine reste
acide ;
j
une déplétion en potassium par perte de K+ et augmentation de l’aldos-
térone : augmentation de la production de NH3 (la glutaminase est stimu-
lée par l’hypokaliémie) et donc augmentation de l’excrétion des ions H+ ;
j
une augmentation de la PaCO2 : augmentation de la sécrétion tubulaire
d’ions H+ dans le tube collecteur.

L’alcalose de contraction est aussi appelée alcalose sensible au chlore. En effet,


l’apport de chlore sans apports de sodium (sous forme de KCl) corrige l’alcalose
induite par la déplétion en chlore.
Anomalies de l’équilibre acido-basique 135

Création de l’alcalose
Vomissements
métabolique

Modifications ioniques

Cl– Na+ K+ H+

Perte de Cl– Perte de Na+ Perte de K+ Perte de H+

Hypo- Hypo- pH
DEC
chlorémie kaliémie HCO–3

Réabsorption Réabsorption Production


distale proximale de NH3
de HCO–3 de HCO–3

Activation
du SRAA

Aldostérone Sécrétion distale


de H+

Entretien de l’alcalose métabolique

Figure 6.10. Création et facteurs d’entretien de l’alcalose métabolique : exemple


des vomissements.
L’alcalose métabolique est causée par les vomissements et la perte d’ions H+ (en
bleu). Les facteurs d’entretien (en blanc) sont l’hypochlorémie, la déshydratation
extracellulaire (DEC), l’activation du système rénine-angiotensine-aldostérone
(SRAA) et l’hypokaliémie. On rappelle que, dans cette situation, la chlorurie est
basse (< 20 mmol/l) et que la kaliurèse est > 20 mmol/l (kaliurèse associée à la
bicarbonaturie).
(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)
136 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Pour aller plus loin


Rôle de la pendrine
La pendrine est un échangeur anionique Cl–/HCO3− localisé au pôle apical
des cellules intercalaires de type B du tube collecteur (cf. figure 6.6C) ;
elle joue un rôle clé en cas d’alcalose métabolique puisqu’elle a pour
fonction d’excréter dans l’urine les bicarbonates en excès (en échange
de chlore luminal) — jouant ainsi le rôle inverse des échangeurs anio-
niques basolatéraux des cellules de type A, qui réabsorbent les bicar-
bonates.
Toutefois, dans les situations de déplétion en chlore (alcalose hypochloré-
mique), la fonction de la pendrine est altérée : à cause de la chlorurie basse,
l’échangeur ne fonctionne pas correctement et le rein n’excrète pas l’excès
de bicarbonates comme attendu (acidurie paradoxale).

Conséquences cliniques
Les signes n’apparaissent que pour des alcaloses métaboliques sévères.
L’alcalose métabolique peut être suspectée cliniquement (vomissements abon-
dants), mais elle est le plus souvent diagnostiquée devant une bicarbonaté-
mie > 27 mmol/l.
L’hypoventilation alvéolaire compensatrice s’accompagne d’une hypoxémie et
peut aggraver une insuffisance respiratoire (++).

L’alcalose peut être grave car :


j
elle déprime la respiration (+++) ;
j
elle diminue l’oxygénation tissulaire (effet Bohr : courbe de dissociation
de l’hémoglobine) ;
j
elle est un puissant vasoconstricteur ;
j
elle favorise la survenue d’arythmies cardiaques.

Des troubles ioniques sont fréquemment associés à l’alcalose métabolique :


j par baisse de la calcémie ionisée du fait de l’élévation du pH, avec retentis-
sement clinique possible (cf. chapitre 7 « Anomalies du bilan du calcium ») ;
j par l’hypokaliémie de transfert (cf. chapitre 5 « Anomalies du bilan du potas-
sium »).
La compensation respiratoire attendue peut être estimée par la formule sui-
vante :
PaCO2 = 0,9 × [HCO3−] + 15 ± 3.
[Avec PaCO2 en mm Hg, la concentration en mmol/l.]
Anomalies de l’équilibre acido-basique 137

Attention
En cas d’alcalose métabolique, il est important de mesurer le chlore urinaire :
j
une chlorurie < 25 mmol/l suggère une contraction du volume extra-
cellulaire et aide au diagnostic étiologique (+++) ;
j
une chlorurie < 15 mmol/l est très évocatrice de vomissements avérés
ou dissimulés.

Étiologie
Les deux causes les plus fréquentes d’alcalose métabolique sont :
j les vomissements (ou les aspirations gastriques) ;
j la prise de diurétiques.
Les causes sont classiquement classées de la façon suivante :
j charge exogène en bicarbonates : cette situation est rare car le rein a une
grande capacité à éliminer les bicarbonates ; elle peut se voir :
Ÿ chez les patients traités par bicarbonate de sodium par voie veineuse (dans
le cadre d’une tubulopathie myélomateuse, par exemple) ;
Ÿ en cas de surcharge en citrate lors de transfusions massives (++) ;
Ÿ au cours de l’exceptionnel syndrome dit des « buveurs de lait » avec
apports lactés excessifs, souvent avec prise d’antiacides et hypercalcémie
secondaire ;
j alcalose métabolique avec volume extracellulaire diminué et hypokalié-
mie ;
j alcalose métabolique avec volume extracellulaire augmenté et HTA.
Les principales causes d’alcaloses métaboliques figurent dans le tableau 6.5.

Tableau 6.5. Causes des alcaloses métaboliques selon l’état du volume


extracellulaire.
Volume extracellulaire Causes
Diminué • Vomissements (+++), aspirations gastriques : pertes digestives
de chlore mais pertes rénales de sodium et de potassium
(associés au bicarbonate)
• Diurétiques de l’anse de Henlé, diurétiques thiazidiques
• Adénome villeux
• Tubulopathies génétiques :
– syndrome de Bartter (qui mime un traitement par
diurétiques de l’anse de Henlé)
– syndrome de Gitelman (qui mime un traitement par
thiazidiques)
• Hypercalcémie
• Achlorhydrie congénitale 
138 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

 Volume extracellulaire Causes


Normal ou augmenté • Hyperaldostéronisme primaire et hyperplasie bilatérale des
surrénales
• Syndromes apparentés (intoxication à la réglisse, déficit en
11β-hydroxylase, etc.)
• Hypercorticismes
• Hyperaldostéronismes secondaires avec HTA (sténose des
artères rénales, HTA maligne ++)
• Excès d’apports alcalins (+++) (apports de bicarbonate de
sodium avant certaines chimiothérapies, excès de citrate après
transfusions massives)
• Alcalose métabolique post-hypercapnie (après ventilation
mécanique, la PaCO2 diminue vite, mais le rein élimine
lentement les bicarbonates accumulés)

Traitement
Le traitement de l’alcalose métabolique est uniquement étiologique :
j réhydratation extracellulaire (NaCl 9 g/l) ;
j arrêt des diurétiques ;
j traitement de la cause des vomissements, inhibiteurs de la pompe à protons ;
j correction d’une déplétion potassique ;
j traitement d’un excès en minéralocorticoïdes…

Arbre diagnostique
Il est représenté dans la figure 6.11.

Les acidoses respiratoires


Définition
L’acidose respiratoire est définie par :
j
un pH artériel < 7,38 ;
j
et une PaCO2 > 45 mm Hg.

Conséquences cliniques
L’hypercapnie traduit une hypoventilation alvéolaire.
L’hypoventilation indique une insuffisance respiratoire aiguë ou chronique avec :
j dyspnée ;
j cyanose ;
j sueurs ;
Anomalies de l’équilibre acido-basique 139

Alcalose métabolique

Contexte iatrogène ?
Excès d’apport
Oui Alcalose post- Cl–u < 20 mmol/l
hypercapnie
Non

HTA ?

Rénine Sténose de Cl–u > 20 mmol/l


haute l’artère rénale
HTA maligne K+u > 20 mmol/l
Oui
Hyperaldo-
Rénine Cl–u > 20 mmol/l
stéronisme I
basse K+u > 20 mmol/l
Réglisse

Vomissements (+++) Cl–u < 20 mmol/l


Diurétiques (+++) K+u > 20 mmol/l

Cl–u > 20 mmol/l


Non Déplétion potassique
K+u < 20 mmol/l

Cl–u < 20 mmol/l


Adénome villeux
K+u < 20 mmol/l

Figure 6.11. Arbre diagnostique simplifié devant une alcalose métabolique.


(Source : Marie-Noëlle Peraldi.)

j HTA ;
j encombrement trachéobronchique ;
j diminution de la contractilité diaphragmatique ;
j voire signes neurologiques : céphalées, obnubilation, encéphalopathie respira-
toire…
La compensation métabolique rénale consiste en une augmentation de la bicar-
bonatémie :
j en cas d’acidose respiratoire aiguë, la compensation rénale est peu efficace car
le rein met un certain temps à s’adapter ;
j en cas d’acidose respiratoire chronique, la compensation rénale est plus effi-
cace.
140 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Application
Chez un patient avec fonction rénale normale :
j
en cas d’acidose respiratoire aiguë, la compensation attendue de la bicarbonatémie
est de 1 à 2 mmol/l (au-dessus de 25 mmol/l) pour une élévation de 10 mm Hg de la
PaCO2 (au-dessus de 40 mm Hg) ;
j
en cas d’acidose respiratoire chronique, la compensation attendue de la bicarbona-
témie est de 3 à 4 mmol/l (au-dessus de 25 mmol/l) pour une élévation de 10 mm Hg
de la PaCO2 (au-dessus de 40 mm Hg).
Par exemple, chez un patient avec bronchopneumopathie chronique obstructive et
PaCO2 à 50 mm Hg, la bicarbonatémie attendue est de 29 mmol/l.

Étiologie
Les principales causes d’acidose respiratoire sont listées dans le tableau 6.6.

Principes thérapeutiques
Le traitement de l’acidose respiratoire est étiologique et ne sera pas détaillé ici.
Dans les situations aiguës graves, la ventilation assistée ou la ventilation non inva-
sive sont souvent nécessaires.

Tableau 6.6. Principales causes d’acidose respiratoire.


Mécanisme Causes
Anomalies • Traumatismes cérébraux
de la commande • Tumeurs cérébrales
neurologique • Lésions du tronc cérébral
• Encéphalites
• Sédatifs, hypnotiques, morphiniques…
• Tétanos
• Parkinson
Anomalies • Myasthénie
neuromusculaires • Myopathies
• Troubles métaboliques (hypokaliémie, hypophosphatémie)
Pathologies • Cyphoscoliose
de la cage thoracique • Spondylarthrite ankylosante
• Épanchement pleural
Hypoventilation • Bronchopneumopathie chronique obstructive
d’origine pulmonaire • Emphysème
• Résection chirurgicale pulmonaire
Anomalies de l’équilibre acido-basique 141

Les alcaloses respiratoires


Définition
L’alcalose respiratoire est définie par :
j
un pH artériel > 7,42 ;
j
et une PaCO2 < 35 mm Hg.

Conséquences cliniques
L’hypocapnie traduit une hyperventilation alvéolaire.
Les signes sont :
j ceux liés à la cause pulmonaire (pneumopathie, par exemple) ;
j avec parfois des signes neurologiques liés à la diminution du débit sanguin
cérébral secondaire à l’hypocapnie et des signes associés à l’hypocalcémie ionisée
associée (tétanie) ;
j ou encore la découverte d’une diminution de la bicarbonatémie, qui peut
conduire à tort au diagnostic d’acidose métabolique en l’absence de gaz du
sang.
La compensation rénale repose sur une diminution de l’excrétion nette
d’ions H+ par le rein avec diminution de l’ammoniurie et augmentation de
la bicarbonaturie.

Application
Chez un patient avec fonction rénale normale :
j
en cas d’alcalose respiratoire aiguë, la compensation attendue est une diminution
de la bicarbonatémie de 2 mmol/l (au-dessous de 25 mmol/l) pour une diminution de
10 mm Hg de la PaCO2 (au-dessous de 40 mm Hg) ;
j
en cas d’alcalose respiratoire chronique, la compensation attendue est une diminu-
tion de la bicarbonatémie de 4 mmol/l (au-dessous de 25 mmol/l) pour une diminu-
tion de 10 mm Hg de la PaCO2 (au-dessous de 40 mm Hg).
Par exemple, chez un patient avec fibrose pulmonaire et PaCO2 à 30 mm Hg, la bicar-
bonatémie attendue est de 21 mmol/l.

Étiologie
Les principales causes d’alcalose respiratoire sont listées dans le tableau 6.7.

Principes thérapeutiques
Le traitement est avant tout étiologique et ne sera pas détaillé ici.
142 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

Tableau 6.7. Principales causes d’alcalose respiratoire.


Avec hypoxémie* Sans hypoxémie
• Pneumopathie • Crises d’angoisse, tétanie, panique
• Œdème pulmonaire aigu • Sepsis graves
• Embolie pulmonaire • Fièvre élevée
• Atélectasies • Affections traumatiques ou tumorales du système
• Fibroses pulmonaires nerveux central
• Fausses routes • Grossesse normale
• Mal des montagnes… • Intoxication aux salicylés
• Insuffisance hépatique sévère…
* PaO2 < 85 mm Hg.

Attention
On rappelle que les gaz du sang sont indispensables devant une diminu-
tion des bicarbonates plasmatiques, afin de distinguer acidose métabolique
d’alcalose respiratoire.
En cas d’alcalose respiratoire, l’apport de bicarbonates est potentiellement
dangereux car il vient aggraver les signes neurologiques déjà présents du fait
de l’alcalose respiratoire.

Troubles complexes de l’équilibre


acido-basique
Généralités
Troubles mixtes
Les troubles mixtes associent :
j acidose métabolique + acidose respiratoire ;
j alcalose métabolique + alcalose respiratoire.
Dans ces situations, les mécanismes compensatoires sont insuffisants.

Troubles opposés
Les troubles dits « opposés » associent un trouble métabolique et un trouble res-
piratoire de sens opposé.
Le pH peut être voisin de la normale (+++).

Principales causes des troubles complexes


Le tableau 6.8 illustre certains de ces troubles acido-basiques complexes.
Anomalies de l’équilibre acido-basique 143

Tableau 6.8. Troubles acido-basiques complexes.


Trouble acido-basique Mécanisme Causes
Mixtes Acidoses mixtes • Absence de diminution • Épuisement respiratoire
de la PaCO2 en cas au cours d’une acidose
d’acidose métabolique lactique
• Absence d’élévation de • Détresse respiratoire
la bicarbonatémie en cas aiguë au cours d’une
d’acidose respiratoire insuffisance rénale aiguë
Alcaloses mixtes • Absence d’augmentation • Aspiration gastrique
de la PaCO2 en cas avec ventilation assistée
d’alcalose métabolique et diminution excessive
• Absence de diminution de la PaCO2
de la bicarbonatémie en • Cirrhose hépatique
cas d’alcalose respiratoire décompensée (ascite
avec hyperventilation)
traitée par diurétiques
de l’anse
Opposés Acidose métabo- • Bicarbonatémie et • Intoxication aux salicylés
lique et alcalose PaCO2 toutes deux
ventilatoire diminuées
Acidose • Bicarbonatémie et • Insuffisant respiratoire
respiratoire PaCO2 toutes deux chronique traité par
et alcalose élevées diurétiques de l’anse ou
métabolique thiazidiques

Entraînement

Cas clinique 1
Une femme de 60 ans est conduite aux urgences pour diarrhées abondantes au retour
d’un voyage en Afrique. Les premiers résultats montrent :
j
Gaz du sang : pH = 7,25 ; PaCO2 = 28 mm Hg ; PaO2 = 100 mm Hg.
j
Ionogramme plasmatique : Na+ = 140 mmol/l ; K+ = 2,8 mmol/l ; Cl– = 117 mmol/l ;
HCO–3 = 13 mmol/l.
j
Créatininémie = 85 µmol/l.
j
Glycémie = 5,4 mmol/l.
j
Ionogramme urinaire : Na+ = 30 mmol/l ; K+ = 50 mmol/l ; Cl– = 100 mmol/l.
Comment analyser le trouble acido-basique ?

Cas clinique 2
Un homme de 60 ans suivi pour une bronchopneumopathie chronique obstructive
est hospitalisé pour fièvre et expectoration purulente. Les premiers résultats montrent :
j
Gaz du sang : pH = 7,20 ; PaCO2 = 70 mm Hg ; PaO2 = 40 mm Hg.
144 Les troubles hydro-électrolytiques faciles

j
Ionogramme plasmatique : Na+ = 135 mmol/l ; K+ = 5 mmol/l ; Cl– = 85 mmol/l ;
HCO–3 = 25 mmol/l.
j
Créatininémie = 80 µmol/l.
j
Ionogramme urinaire : Na+ = 30 mmol/l ; K+ = 40 mmol/l ; Cl– = 60 mmol/l.
j
Lactates = 9 mmol/l.
Comment analyser le trouble acido-basique ?

Cas clinique 3
Une femme de 30 ans consulte pour hypokaliémie à 2,5 mmol/l découverte sur un
bilan fait en ville au décours de vomissements. Elle a des signes de déshydratation
extracellulaire. Les premiers résultats montrent :
j
Ionogramme plasmatique : Na+ = 132 mmol/l ; K+ = 2,0 mmol/l ; Cl– = 75 mmol/l ;
HCO–3 = 40 mmol/l.
j
pH veineux = 7,58.
j
Créatininémie = 100 µmol/l.
j
Ionogramme urinaire : Na+ = 40 mmol/l ; K+ = 70 mmol/l ; Cl– = 12 mmol/l.
Comment analyser le trouble acido-basique ?

Bibliographie
Diagnostic et prise en charge de l’acidose métabolique. Recommandations formalisées d’experts, SRLF-
SFMU, 2019.
Finkel KW, Dubose TF. Metabolic acidosis. In: Dubose Hamm TJL, editor. Acid-base and electrolyte
disorders: a companion to Brenner & Rector’s The Kidney. Philadelphia: Elsevier, Saunders; 2002.
p. 55-66.
Hall JE, Guyton AC. Guyton and Hall Textbook of Medical Physiology. 12th edition. Philadelphia PA:
Saunders-Elsevier; 2011.
Koeppen BM, Stanton BA. Renal Physiology. 5th edition. The Mosby Physiology Monograph Series. St.
Louis MO : Mosby-Elsevier ; 2012.
Seifter JL, Chang HY. Disorders of acid-base balance: new perspectives. Kidney Dis 2017;2(4):170-86.

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