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Analyse 2 - Le - Dormeur - Du - Val

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Cahiers de Douai 1870- RIMBAUD (1854-1891)

Objet d’étude : la poésie – parcours : l’émancipation créatrice


2e thème : la GUERRE ou s’émanciper pour dénoncer…
Corpus : Le dormeur du Val
Parcours associé : critique de la politique de Napoléon III et de la guerre : Morts
de Quatre-vingt-douze et Quatre-vingt-treize ; Rages de César ; Le mal et L’écla-
tante Victoire de Sarrebrück.

INTRODUCTION :

(présentation)Daté d’octobre 1870, « le Dormeur du Val » est un sonnet en


alexandrins d’Arthur Rimbaud qui fait partie des poèmes recopiés par l’auteur
dans le manuscrit des Cahiers de Douai. Ecrit à peine trois mois après la décla-
ration de guerre de l’empereur Napoléon III au royaume de Prusse, il décrit un
jeune soldat, « étendu sur l’herbe ».

(projet de lecture ou problématique)» : En quoi ce sonnet bucolique se révèle-t-il


être une dénonciation de la guerre ?

(Plan ou mouvement du texte) :


- 1er quatrain : un décor paradisiaque et bucolique
- puis 2e quatrain et 1er tercet : description du jeune homme ;
- enfin 2e tercet : retournement de situation ou envers du décor.

1ere partie : UN DECOR PARADISIAQUE sorte de « locus amoenus »

Dans ce premier quatrain, le décor évoque une sorte de paradis terrestre. Il


s’agit d’un endroit isolé : « un petit val » (donc inconnu et isolé), idyllique par la
présence de la rivière et de la nature : « verdure » ; « herbes » ; « soleil », « mon-
tagne » ; Les sens (présence de la synesthésie) sont agréablement stimulés : bruit
de la rivière, eau et lumière sont mêlées. Présence de personnifications pour la ri-
vière qui « chante » et la montagne « fière » : la nature est épanouie, heureuse, et
animée par la joie.
En revanche, on note la présence de rejets aux vers 3 et 4 : au vers 3 pour mimer
le débordement joyeux de la rivière ; au vers 4, pour créer un effet de prose
presque intime.

Ainsi, ce premier mouvement (ou cette première partie) crée un effet bucolique, de
paix, de paradis, de couleurs et d’intimité. Peut-être de déséquilibre annonçant
un peu la chute ? Elle est le cadre, ou le décor du deuxième et du troisième mou-
vement.

2e partie : UN JEUNE HOMME « étendu sous la nue »

Tout d’un coup, rétrécissement de champ : le poète nous présente le sujet prin-
cipal de ce cadre : un jeune homme entrain de dormir. Ce sommeil renforce le
sentiment de sérénité heureuse , la nature lui fait un lit vert ». Cette harmonie
est soulignée par les assonances en « ê » : « tête » ; « baignant dans le frais cres-
son » ; « herbe » ; « vert » et « lumière ». Mais la bouche ouverte du jeune homme
et sa pâleur perturbent l’impression d’un tableau idyllique. Le rythme des
vers aussi déstabilise par les constants enjambements (v1-2) et les rejets (v3
et 4) . On peut remarquer que le deuxième quatrain n’est composé que d’une
seule phrase et elle est construite avec un rythme très irrégulier : le vers 5 : ter-
naire avec 5 pieds, puis 4, puis 3. Le vers 6 : pas de rupture ce qui rend la chute
de la phrase d’autant plus abrupte avec « dort » au vers 7, isolé puisque rejeté.
Le poème insiste tellement sur le sommeil du soldat (le verbe dormir est anapho-
rique), que le mot « lit » peut être l’indice d’un sommeil plus profond comme celui
de la mort. Au vers 8, « la lumière pleut » forme un tableau saisissant où la lu-
mière, humide, doit produire une sorte d’arc en ciel qui pourrait faire référence à
Dieu : Larmes du Ciel ? Le verbe « pleut » rime avec « bleu » qui évoque la fin de
l’activité sanguine dans le corps. Le lecteur peut commencer à percevoir que le
jeune homme n’est pas dans son état normal.

D’autres indices, dans le premier tercet préparant la révélation du second, sont


de plus en plus évidents :
- L’insistance du poète sur l’état ensommeillé (ou comateux?) du jeune
homme avec « il fait un somme » (que l’on a vu déjà dans le second qua-
train) et la présence de glaïeuls, fleurs nobles que l’on trouve souvent dans
les ornements floraux des cercueils.

- La comparaison à « un enfant malade » (du 1er tercet) et le « froid » qui


l’affecte, son absence de sensation (v12) assimilent le soldat à un corps
faible, inerte et peut-être sans vie. L’apostrophe à la nature, dont on re-
marque que le poète la personnifie par l’emploi de la majuscule et de l’im-
pératif poursuit l’effet de la personnification du premier quatrain en lui as-
signant un rôle de protectrice, presque de mère (récurrent dans sa poésie)

- La supplication du poète à la Nature (manifestée par l’emploi de l’im-


pératif « berce-le ») et son explication (manifestée par les deux points du
vers 11) évoquent un état proche de la mort (le refroidissement du corps)

Ainsi, ce deuxième mouvement, se focalisant sur le thème central du tableau , ce


jeune soldat, au début paisible et heureux, ne cesse de présenter des signes in-
quiétants qui frappe le lecteur. La mention de la maladie, le refroidissement du
corps, en sont les manifestations physiologiques, la position très statique, dans
un lit préparé par la Nature, sur lequel pleut la lumière, en sont les signes poé-
tiques : le tableau est soigné et prépare la chute finale.

3e partie : « l’envers » du décor ou la chute présente dans le dernier tercet

Ce dernier tercet va donner la clé de lecture de tout le poème puisqu’il va révéler


le mystère de ce jeune soldat. Toute la force du poème repose sur ce retourne-
ment auquel on ne s’attend pas.
Le vers 12, dont la forme est négative, semble être la volta du poème car il
s’agit d’un changement dans la mesure où, c’est à partir de cette négation que
l’on va comprendre que le soldat est mort. Cette révélation finale, qui induit la
violence, le sang, la tristesse, dans un poème aussi bucolique et charmant est
d’autant plus surprenante par le rejet de « tranquille », au début du vers 14.
La pointe s’apparente donc à une chute « narrative » (dans ce poème descrip-
tif) dans la mesure où elle change ce qui précède et impose une relecture du
poème à la lumière de cette révélation. La pointe (concetto) apporte donc une
dimension nouvelle au poème, qui peut se lire comme une dénonciation de la
guerre.
En effet, l’absurdité et l’horreur de la guerre se traduisent dans le contraste
violent, ménagé par cette pointe entre la nature idyllique, la jeunesse du soldat
et la réalité crue de sa mort qui fait basculer le poème du « trou de verdure », aux
« deux trous rouges » qui le clôturent.

CONCLUSION

(fermeture)
Ménageant ses effets, « le Dormeur du val » est un sonnet qui, bien que légère-
ment irrégulier (rimes croisées dans le quatrain ; volta au vers 12), témoigne d’un
certain classicisme par l’importance de sa pointe finale vers laquelle va le poème
tout entier. Le dernier vers livre la clé, donnant à lire, l’envers du décor et l’hor-
reur de la guerre. On a une construction circulaire du poème avec le mot trou (au
singulier dans le vers 1) à deux trous (dans la chute)
(ouverture)
Cependant, est ce que ce poème est anti-militariste pour autant ? Non, il semble
être indéniablement pacifiste tout en dénonçant la guerre mais sans appeler à
une forme quelconque de résistance. (registre lyrique puis pathétique). Ce n’est
donc pas de la poésie engagée au sens strict du terme, comme dans Les Châti-
ments de Hugo.
Il faut que vous lisiez les poèmes des cahiers qui évoquent le thème de la guerre
(ou de la politique au sens large). Ils sont cités au début du polycopié.

QUESTION DE GRAMMAIRE : les valeurs du présent de l’indicatif

On trouve le présent de l’indicatif dans tout le poème et on peut s’interroger sur


ce temps (à l’exception d’un impératif). Il s’agit donc essentiellement de présent de
description. Mais certains verbes ont une valeur narrative. Ces présents de des-
cription semblent figer la scène que nous découvrons petit à petit.

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