Chapitre 7 - Tumeur Osseuse - 2018 - Guide Pratique D Irm

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CHAPITRE

7
Tumeur osseuse

POINTS FORTS
Objectifs
j
En cas de tumeur osseuse primitive maligne, l’IRM fait partie du bilan
diagnostique initial et constitue l’examen de première intention dans le
bilan d’extension régionale et locorégionale avant traitement. Lorsqu’une
chimiothérapie est réalisée avant l’exérèse chirurgicale, l’IRM permet
d’évaluer en cours et en fin de chimiothérapie la réponse au traitement.
Enfin, l’IRM est l’examen de référence pour le suivi post-thérapeutique à
la recherche d’une récidive tumorale.
Technique
j
Le bilan local (analyse de la tumeur, extension et rapports aux structures
anatomiques adjacentes) nécessite des coupes frontales et/ou sagittales
T2 en saturation du signal de la graisse, coupes axiales T1, T2 en satura-
tion du signal de la graisse, coupes axiales, frontales et sagittales T1 avec
injection de gadolinium et saturation du signal de la graisse.
j
Le bilan locorégional nécessite une augmentation du champ d’explo-
ration sur la totalité de l’os concerné par la tumeur. Ce bilan est fait le
plus souvent dans un second temps, après confirmation du diagnostic de
tumeur primitive maligne par une biopsie.

Points d’interprétation
1. Localisation
Diaphysaire, métaphysaire, épiphysaire ou sur plusieurs de ces trois segments.
Intramédullaire.
Corticale.
Sous-périostée.

C’est globalement le centre de la lésion qui détermine son point de départ.

Guide pratique d'IRM


© 2018, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
130 Squelette périphérique

2. Extension intramédullaire et taille de la tumeur


La plupart des lésions osseuses présentant un hyposignal T1, le contraste avec la
moelle osseuse (en hypersignal T1) permet de définir l’extension intramédullaire
de la tumeur. On détermine ainsi la taille de la composante intramédullaire de
la tumeur et les éventuelles métastases intramédullaires à distance (skip métas-
tases). La taille de la tumeur doit être mesurée dans les trois plans de l’espace. Les
lésions ostéolytiques tendent à fragiliser l’os. On considère que le risque fracturaire
est augmenté si l’ostéolyse intéresse plus des deux tiers de la surface axiale du fût
diaphysaire.
3. Matrice tumorale
C’est l’étude du signal intralésionnel sur les différentes séquences. Il faut faire la
correspondance exacte entre le T1, le T2 et le T1 après injection de gadolinium
sur la même coupe. C’est parfois difficile quand la tumeur présente un signal très
hétérogène.
On recherche des éléments sémiologiques caractéristiques qui permettent d’évo-
quer une gamme diagnostique. Un hyposignal T2 lésionnel est fréquemment
observé dans les lésions fibreuses.
Images kystiques
Hyposignal T1, hypersignal T2 liquidien, absence de prise de contraste.
Graisse
Hypersignal T1, hyposignal T2 (sur les séquences en annulation du signal de la
graisse) et absence de prise de contraste.
On peut se référer au signal de la graisse sous-cutanée.
Dérivés sanguins
Hypersignal T1 et hypersignal T2 avec des régions en asignal, sans prise de
contraste.
Cartilage
Hyposignal T1, hypersignal T2 intense.
Présence au sein de la matrice cartilagineuse d’images rondes, arciformes ou puncti­
formes en asignal correspondant à des zones de condensation osseuse autour des
lobules cartilagineux reproduisant l’aspect radiologique ou tomodensitométrique
caractéristique des tumeurs cartilagineuses.
Niveau liquide-liquide

4. Prise de contraste
La prise de contraste tumorale peut être classée en périphérique, hétérogène,
homogène, septale. Les régions prenant le contraste correspondent aux régions
Tumeur osseuse 131

vascularisées de la tumeur. Dans le suivi sous traitement, l’évaluation de la prise


de contraste est très importante car le pourcentage de nécrose tumorale après
chimiothérapie est un facteur pronostique (bon ou mauvais répondeur).
5. Extension corticale et réaction périostée
Certaines tumeurs intramédullaires entraînent une ostéolyse corticale facilement
analysable en IRM : en regard de la tumeur, on observe un amincissement ou
une interruption de l’asignal normal de la corticale. Dans les lésions d’évolution
très lente, la rupture de la corticale osseuse s’accompagne d’un remodelage des
contours osseux et parfois d’une corticale épaissie. Dans certaines tumeurs, la
destruction lente de la corticale osseuse s’accompagne d’une réaction périostée
compacte (coque périostée) qui tend à former une nouvelle corticale. L’extension
de la lésion osseuse à la corticale augmente le risque fracturaire.
6. Extension dans les parties molles et extension aux paquets
vasculonerveux
On visualise directement en IRM l’extension dans les parties molles d’une tumeur
osseuse par la différence de signal entre la tumeur et les parties molles sur les
séquences T1, T2 ou T1 après injection de gadolinium.
7. Extension articulaire
L’extension articulaire est primordiale pour prévoir l’exérèse de la tumeur et les
possibilités de reconstruction. On utilise surtout les séquences en T1 après injec-
tion de gadolinium, à la recherche d’une masse prenant le contraste, en continuité
avec la tumeur osseuse, franchissant la corticale et le cartilage articulaire ou une
extension tumorale dans un récessus articulaire.

L’existence d’un épanchement articulaire ou d’une synovite n’est pas syno-


nyme d’envahissement articulaire. Cependant, l’absence d’épanchement
articulaire a une bonne valeur prédictive négative pour éliminer un envahisse­
ment articulaire tumoral.
132 Squelette périphérique

Encoche endostéale.
On observe une lésion intramédullaire de l’extrémité supérieure de l’humérus
(flèche) présentant une matrice cartilagineuse typique avec des critères d’agressivité :
taille supérieure à 6 cm, amincissement important de la corticale osseuse avec des
encoches endostéales et une interruption focale de la corticale osseuse permettant
une extension de la tumeur dans les parties molles et compliquée d’une fracture
pathologique.

Extension articulaire des lésions osseuses focales.


Sur cette séquence T1 après injection de gadolinium et saturation du signal de la
graisse, on observe une lésion intramédullaire prenant le contraste et s’étendant
en avant du condyle fémoral dans la graisse préfémorale et dans le récessus
sous-quadricipital (flèche). L’existence d’une extension intra-articulaire empêche la
réalisation d’une chirurgie conservatrice.
Tumeur osseuse 133

Extension dans les parties molles d’une lésion


osseuse.
On observe ici une lésion intramédullaire
diaphyso-métaphyso-épiphysaire envahissant
les parties molles en avant et en arrière du fût
diaphysaire fémoral en regard d’une corticale
amincie et mitée (flèche). En arrière, on voit
que la tumeur a pénétré les parties molles à
travers la corticale postérieure du condyle puis
est remontée le long de la corticale fémorale
sans que celle-ci soit détruite complètement
(flèche). Le remplacement de la graisse
rétrofémorale et préfémorale par un tissu en
hyposignal T1 en continuité avec la tumeur
intramédullaire signe l’extension aux parties
molles.

Fibrome non ossifiant.


Sur cette coupe sagittale T1, on observe une
lésion osseuse focale adossée à la corticale
postérieure de fémur, métaphysaire, bien
limitée par un liséré en hyposignal identique
à celui de la corticale osseuse, et présentant
un signal hétérogène, majoritairement
graisseux, avec de petites régions en hyposignal
correspondant à des zones fibreuses. La
corticale postérieure du fémur est épaissie et
déformée en raison du caractère lentement
évolutif de la lésion. L’image est caractéristique
d’un fibrome non ossifiant. Noter également un
petit îlot condensant bénin juste en dessous du
fibrome.
134 Squelette périphérique

Fracture pathologique.
On observe une fracture transversale de la diaphyse humérale centrée sur une
lésion ostéolytique intramédullaire. On voit bien la réaction périostée unilamellaire
compacte autour de la fracture témoignant d’une lésion bénigne (dysplasie fibreuse).

Lésion fibreuse en hyposignal T2.


On observe une lésion soufflante de l’extrémité inférieure du radius avec des plages en
hyposignal T2 (et hyposignal T1) très évocatrices de lésion fibreuse (dysplasie fibreuse)
(flèche).
Tumeur osseuse 135

Lipome intraosseux.
Les lipomes intraosseux sont des lésions à prédominance graisseuse mais pouvant
contenir des images de signal bas en T2 correspondant à des calcifications ou des
images kystiques intralésionnelles. Sur cette image pondérée T1, on observe une
perte de la trabéculation normale de la tête humérale liée à la présence d’une lésion
purement graisseuse bien limitée caractéristique d’un lipome (flèches). Au sein du
lipome, les anomalies focales en hyposignal correspondent à des calcifications. Les
lésions osseuses pouvant contenir de la graisse sont nombreuses : lipome intraosseux,
hémangiome, infarctus médullaire, maladie de Paget, dysplasie fibreuse et fibrome
non ossifiant en voie de régression.

Lyse corticale dans les processus


intraosseux expansifs.
Sur cette coupe axiale T1, on
observe une disparition focale
de l’asignal normal de la corticale
postérieure du tibia en regard d’une
lésion osseuse intramédullaire
(flèche). Cette anomalie évoque
une lésion agressive et doit faire
rechercher sur les séquences T2
et les séquences après injection
de gadolinium une extension de
la tumeur osseuse dans les parties
molles.
136 Squelette périphérique

Dans certaines lésions intraosseuses très agressives et très infiltratives, on


peut observer une corticale mitée avec une masse des parties molles adja-
centes. Cet aspect a la même signification qu’une lyse corticale focale et
témoigne d’un processus encore plus agressif.

Maladie de Paget.
L’IRM montre ici les signes
caractéristiques de la maladie de Paget
du fémur : augmentation de taille de
l’os, épaississement et raréfaction des
travées osseuses et dédifférenciation
corticomédullaire (flèches). On voit
bien la différence de structure de l’os
spongieux et des corticales en comparant
le fémur touché par la maladie de Paget
avec le tibia qui est épargné par la
maladie.

Matrice cartilagineuse et enchondrome.


La minéralisation d’une tumeur cartilagineuse peut se faire par un phénomène
d’ossification enchondrale avec formation d’image de densité calcique, en anneau
ou en arc, ou par un processus de calcification directe avec formation d’images
en piqueté ou en grains grossiers de taille irrégulière. Cette minéralisation calcique
s’observe en IRM sous la forme d’images en asignal, de signal identique à la corticale
osseuse, formant des arcs, des anneaux ou un piqueté intratumoral. Ces zones de bas
signal alternent avec des zones de signal très élevé sur les séquences pondérées T2,
correspondant à la matrice cartilagineuse non encore ossifiée ou calcifiée.
Tumeur osseuse 137

Niveau liquide-liquide.
On observe une lésion intramédullaire diaphysaire (humérus) (flèche) qui présente
deux composantes de signal différent, mais homogènes, dont l’interface est rectiligne
et perpendiculaire à la force de gravité (l’image est présentée en position anatomique
en respectant le haut et le bas, mais dans l’IRM le bras est à l’horizontale). Cet aspect
est non spécifique et correspond à des sédimentations différentes de produits dérivés
d’une hémorragie intratumorale. Sur les séquences T1, le surnageant peut être
de signal inférieur ou supérieur au sédiment. Sur les séquences T2, le surnageant
est en général en hypersignal et le sédiment de signal intermédiaire.

Ostéochondrome ou exostose.
On observe ici une excroissance osseuse, pédiculée, constituée d’un os identique
à l’os médullaire normal, recouvert par une corticale normale, se prolongeant avec
la corticale de la diaphyse fémorale inférieure (flèche). L’excroissance est recouverte
par une coiffe cartilagineuse dont le signal est identique au cartilage articulaire, ici
en hypersignal T2. Chez l’adulte, elle est en général d’épaisseur inférieure à quelques
millimètres, voire absente.
138 Squelette périphérique

Une coiffe cartilagineuse de plus de 10 mm chez l’adulte est suspecte de


transformation chondrosarcomateuse.

Un ostéochondrome peut se compliquer d’une bursite par conflit méca-


nique avec les muscles adjacents. Dans le cas présenté, la coiffe cartilagi-
neuse refoule et déforme le muscle vaste interne.

Ostéome ostéoïde.
Sur cette coupe axiale T2 avec saturation du signal de la graisse passant par le tibia,
on observe un épaississement très important de la corticale postéromédiale du
tibia correspondant à une réaction périostée unilamellaire compacte, une image
ronde millimétrique intracorticale correspondant au nidus d’un ostéome ostéoïde,
et une réaction inflammatoire des parties molles et du périoste (flèche). L’image est
suffisamment caractéristique pour poser le diagnostic.

Plasmocytome.
Coupe axiale pondérée en T1 passant au niveau de l’omoplate et montrant une
lésion osseuse en hyposignal T1, homogène, entraînant une déformation des
contours osseux avec formation d’une coque périostée discontinue (flèches). La
tumeur ne laisse pas d’os sain autour d’elle et ses contours polylobés évoquant des
circonvolutions cérébrales sont assez caractéristiques d’un plasmocytome.
Tumeur osseuse 139

Prise de contraste septale.


Sur cette coupe frontale T1 avec injection de
gadolinium, on observe une lésion de la diaphyse
humérale, diaphyso-métaphyso-épiphysaire,
avec une prise de contraste hétérogène réalisant
un réseau intralésionnel plus ou moins régulier
évoquant l’existence de septums intralésionnels.
Ce type de prise de contraste n’est pas
spécifique, mais il est fréquemment observé
dans les chondrosarcomes (cas présenté), les
enchondromes, les chondroblastomes.

Skip métastase.
On observe ici une volumineuse tumeur osseuse primitive de la métaphyse supérieure
du tibia s’étendant dans les parties molles avec des remaniements hémorragiques
et des anomalies focales de signal, rondes, en hyposignal T1, situées à distance de la
lésion primitive (flèches). Il s’agit de métastases locorégionales intraosseuses ou skip
métastases. Noter qu’une de ces métastases, localisée au condyle fémoral latéral,
a « traversé » l’articulation du genou. Les skip métastases sont observées dans environ
20 % des ostéosarcomes, mais aussi dans d’autres tumeurs osseuses primitives, comme
les sarcomes d’Ewing.
140 Squelette périphérique

Stratégie diagnostique
Quel examen d’imagerie ?
j La radiographie simple reste l’examen de première intention dans la recherche
d’une lésion osseuse. Si elle est négative, la poursuite des investigations dépend
de l’évolution de la symptomatologie clinique, du terrain et de la localisation
des douleurs. Par exemple, au niveau du squelette axial ou des os plats, certaines
lésions osseuses ne sont détectées que par le scanner, l’IRM ou la scintigraphie
osseuse. Lorsque la radiographie simple montre une lésion osseuse, la corrélation
des données radiologiques, de l’âge et des antécédents du patient et de la sympto­
matologie clinique permet souvent d’évoquer un diagnostic.
j Soit il s’agit d’une lésion certainement bénigne (fibrome non ossifiant, dys-
plasie fibreuse, ostéochondrome, chondrome, kyste osseux simple, angiomes
vertébraux) et on évite la biopsie ; soit il s’agit d’une probable métastase osseuse
et on complète le bilan en fonction de l’état carcinologique du patient et des thé-
rapeutiques envisageables ; soit il s’agit d’une tumeur maligne primitive et l’IRM
est l’examen de première intention avant la biopsie. Enfin, certains diagnostics
sont difficiles et l’étude de la matrice tumorale, l’analyse de la corticale osseuse,
de la réaction périostée ou la recherche d’anomalie des parties molles peuvent
apporter des éléments indispensables au diagnostic. Dans ces cas, on s’aide du
scanner et de l’IRM.
j Dans le suivi sous traitement, l’imagerie a pour but d’évaluer l’efficacité du trai-
tement. Sur les radiographies et le scanner, la diminution de la taille de la tumeur,
sa meilleure limitation et son ossification sont de bons indicateurs d’un traite-
ment efficace. L’IRM donne une idée plus précise du volume tumoral. Surtout, on
cherche des critères d’appréciation directe de l’efficacité du traitement. On a ainsi
proposé la diminution de signal sur les séquences pondérées en T2, traduisant
plus de tissu fibreux dans la lésion, et les modifications de la lésion après injection
de produit de contraste : le tissu nécrotique est directement visible, ne modifiant
pas son signal après injection. Les méthodes d’imagerie fonctionnelle, utilisant
la cinétique du produit de contraste, sont très séduisantes : la partie viable de
la tumeur prend le contraste rapidement (dans les deux premières minutes), les
réactions fibreuses induites par le traitement le prennent de façon retardée.

Quelle technique d’imagerie ?


j On utilise l’antenne adaptée (épaule, genou, rachis, antenne corps, antenne
souple de surface) pour étudier la tumeur et les articulations adjacentes. En effet,
l’imagerie a un but diagnostique mais surtout un but préthérapeutique : localisa-
tion de la tumeur, extension locale (intramédullaire, extension aux parties molles
et extension articulaire) et recherche de métastases osseuses locorégionales
ou skip métastases. Ainsi, il peut être nécessaire de changer d’antenne en cours
Tumeur osseuse 141

d’examen. Par exemple, une tumeur métaphysaire de l’extrémité inférieure


du fémur peut nécessiter une étude locale en antenne genou et une étude de
l’ensemble du fémur en antenne corps.
j En plus de la technique de routine, on réalise parfois une angio-IRM pour
étudier l’extension vasculaire de la tumeur et une séquence T1 après injection
de gadolinium avec étude dynamique de la prise de contraste en utilisant une
séquence d’acquisition rapide.

Comment interpréter ?
Si d’une façon générale, une tumeur bien limitée, de petite taille (< 6 cm) avec
un liséré périphérique en hyposignal T1 et T2 (témoignant d’une condensation
osseuse périphérique), avec un signal homogène en T2, sans prise de contraste
après injection de gadolinium et sans atteinte de la corticale ou des parties molles
est probablement bénigne, ces éléments ne suffisent pas à l’affirmer. Certaines
tumeurs bénignes ont cependant des caractéristiques IRM suffisantes pour poser
le diagnostic. Il s’agit parfois de lésions de découverte fortuite, d’où la nécessité de
connaître leur aspect typique.

1. Tumeurs osseuses bénignes


Enchondrome
C’est une tumeur cartilagineuse. L’enchondrome correspond à environ 12 % des
tumeurs osseuses bénignes. Il se localise préférentiellement aux mains (50 %) et
aux os longs dans la région métaphysaire ou métaphysodiaphysaire. L’IRM est
caractéristique : image bien limitée, de signal hétérogène et de contours polylo-
bés. Le cartilage matriciel présente un hyposignal T1 modéré et un hypersignal T2
franc. Au sein du cartilage, on observe des images en asignal dessinant des lobules
de petites tailles dans la tumeur et des images punctiformes correspondant aux
zones d’ossification enchondrale. Les gros enchondromes peuvent entraîner une
déformation des contours osseux. On les observe fréquemment de façon fortuite
sur les IRM du genou. Les signes d’agressivité devant faire envisager une trans-
formation en chondrosarcome sont : une taille supérieure à 6 cm, une encoche
endostéale supérieure aux deux tiers de l’épaisseur normale de la corticale osseuse
ou une rupture de la corticale osseuse, une extension dans les parties molles et
une symptomatologie douloureuse.
Ostéochondrome ou exostose
Il correspond à environ 35 % des tumeurs osseuses bénignes. Il s’agit d’une lésion
osseuse bénigne, habituellement découverte entre l’âge de 10 et 15 ans. La crois-
sance de l’ostéochondrome s’arrête à la soudure des cartilages de croissance. Il
s’observe à la métaphyse des os longs sous la forme d’une excroissance osseuse
perpendiculaire au grand axe de l’os. Il est corticalisé sur ses contours et contient
142 Squelette périphérique

un os trabéculaire normal. Il peut être pédiculé ou sessile. Le signal de l’exostose


est identique à celui de l’os trabéculaire. À son extrémité, l’IRM montre parfaite-
ment la coiffe cartilagineuse (signal cartilagineux), dont l’épaisseur doit être mesu-
rée. En effet, si cette coiffe cartilagineuse dépasse 10 mm d’épaisseur chez l’adulte
et 20 mm chez l’enfant en période de croissance, il faut suspecter une transfor-
mation maligne en chondrosarcome de bas grade (rare dans l’exostose solitaire).
Dans ce cas, l’exostose est souvent symptomatique et on observe des anomalies
des parties molles adjacentes à la coiffe cartilagineuse. Dans certains cas, l’exostose
entraîne des phénomènes compressifs sur les parties molles adjacentes pouvant
aboutir à des déchirures musculaires, des bursites, des compressions vasculaires
et neurologiques.
Îlot condensant bénin ou énostose
Ils sont très fréquemment observés sur les IRM articulaires, en particulier au niveau
du genou et de la cheville. Ce sont de petites lésions, très bien limitées, souvent
multiples, inférieures au centimètre, en asignal. Lorsqu’ils sont plus grands, les îlots
condensants bénins ont des contours spiculés.
Ostéome ostéoïde (12 % des tumeurs osseuses bénignes)
Il est très fréquent à l’extrémité supérieure du fémur (face interne du col fémoral)
et du tibia. Les autres localisations sont le rachis (arc postérieur), l’humérus, l’omo-
plate. Il peut être cortical, sous-périosté, médullaire ou intra-articulaire. Le nidus
s’observe sous la forme d’une image ronde en hyposignal T1 et hypersignal T2,
dont la taille est inférieure à 15 mm, avec un centre en asignal lorsqu’il est calcifié.
Ce nidus est entouré d’une condensation osseuse en asignal plus ou moins éten-
due suivant l’ancienneté de la tumeur. L’ostéome ostéoïde se caractérise égale­
ment par une réaction inflammatoire très importante entraînant un œdème
osseux et des parties molles qui peut faire errer le diagnostic.
Cortical defect et fibrome non ossifiant
Ce sont des lésions fibreuses pseudotumorales siégeant à la métaphyse des os
longs, observées très fréquemment chez les enfants et les adolescents. Ce sont
des lésions bien limitées adossées à une corticale. Le signal lésionnel est variable
suivant la quantité de tissu fibreux. La lésion est caractérisée par ses limites nettes
et l’existence d’un liséré périphérique en asignal correspondant à une condensa-
tion osseuse. Elle peut déformer la corticale qui est souvent épaissie en regard de
la lésion.
Dysplasie fibreuse
Lésion bien limitée, parfois de grande taille, diaphysométaphysaire, présentant un
hyposignal T1 et un hypersignal T2. Le signal est parfois hétérogène en raison de
l’existence de cloisons osseuses ou de zones kystiques ou fibreuses. La lésion est
Tumeur osseuse 143

entourée d’un liséré en asignal. Elle entraîne une déformation des contours osseux
avec une corticale épaissie et continue.
Kyste osseux solitaire
C’est une tumeur bénigne qui s’observe dans les deux premières décennies au
niveau de la métaphyse des os longs (humérus, fémur, tibia) ou au niveau du
calcanéum. C’est une lésion bien limitée, avec un contenu de signal liquidien sans
prise de contraste. En cas de fracture, le contenu peut devenir hémorragique avec
un niveau liquide-liquide.
Kyste anévrismal
C’est une lésion métaphysaire siégeant aux os longs ou au niveau de l’arc pos-
térieur des vertèbres dorsales. En IRM, c’est une lésion expansible, érodant et
déformant la corticale osseuse, contenant de multiples collections kystiques avec
des niveaux liquide-liquide. Après injection de gadolinium, on observe une prise
de contraste importante.
Les niveaux liquide-liquide ne sont pas spécifiques du kyste anévrismal et
s’observent aussi dans les tumeurs osseuses suivantes : dysplasie fibreuse, kyste
osseux simple, chondroblastome, tumeurs à cellules géantes, ostéosarcome
télangiectasique.
Lipome intraosseux
Au niveau du squelette périphérique, il siège à la métaphyse des os longs, au calca-
néum, aux mains et aux pieds. C’est une lésion bien limitée de contenu principale­
ment graisseux sans prise de contraste avec parfois des régions intralésionnelles en
asignal (calcifications) ou kystique.
Tumeur à cellules géantes
Elle siège au niveau des os longs, fréquemment à l’extrémité distale du fémur ou
proximale du tibia, chez les hommes entre 20 et 40 ans. Sa localisation est épi-
physaire ou métaphysoépiphysaire. Elle présente un signal non spécifique (hypo-
signal T1, hypersignal T2 et prise de contraste après injection de gadolinium) et
souvent un caractère agressif avec destruction de la corticale osseuse et extension
articulaire. Le diagnostic est fait par la biopsie. Les récidives sont fréquentes après
traitement chirurgical (curetage et comblement).
2. Tumeurs osseuses malignes primitives
Ostéosarcome
C’est la plus fréquente des tumeurs malignes primitives de l’os après le myélome.
Sa survie a été nettement améliorée avec la chimiothérapie agressive, et on peut
espérer guérir plus de 70 % des patients. La chirurgie conservatrice peut aussi être
pratiquée dans plus de deux tiers des cas, permettant de garder une fonction
144 Squelette périphérique

presque normale du membre touché. L’ostéosarcome est une tumeur maligne


primitive qui fabrique de l’os.
L’ostéosarcome conventionnel intéresse la métaphyse des os longs (près des
genoux et loin des coudes) chez les sujets dans la seconde décennie. C’est une
tumeur très agressive, le plus souvent mixte, lytique et condensante.
Sarcome d’Ewing
C’est la tumeur maligne primitive des os la plus fréquente chez l’enfant. Plus de
la moitié des cas est guérie. Le traitement associe une chimiothérapie, un traite-
ment local chirurgical et une radiothérapie ou une association des deux. C’est une
tumeur très agressive, mal limitée, avec destruction de la corticale et appositions
périostées. L’atteinte des parties molles est massive et peut masquer une petite
lésion osseuse. La moitié des sarcomes d’Ewing atteint les os longs, et la moitié est
centrale, ce qui pose des problèmes chirurgicaux très difficiles.
Chondrosarcome
Cette tumeur cartilagineuse maligne atteint surtout l’adulte, pousse lentement et
son traitement est seulement chirurgical. Les deux grands types de chondrosar-
come sont :
j le chondrosarcome conventionnel qui est une tumeur médullaire contenant
des calcifications caractéristiques, annulaires ou en « pop-corn ». Celles-ci corres-
pondent à la calcification des tractus fibreux disposés à la périphérie des lobules
des cartilages. La face interne de la corticale osseuse est érodée par la tumeur. La
corticale peut ensuite être détruite, et les parties molles envahies. En cas de chon-
drosarcome bien différencié, l’IRM montre une matrice cartilagineuse typique et
une prise de contraste septale ;
j les chondrosarcomes secondaires qui se développent sur une exostose. Les
signes de dégénérescence d’une exostose sont une coiffe cartilagineuse d’épais-
seur supérieure à 10 mm chez l’adulte et de 20 mm chez l’enfant, une masse des
parties molles et une ostéolyse de l’exostose.
Adamantinome
C’est une tumeur maligne rare de l’adulte, qui atteint presque uniquement le tibia.
Elle est localement agressive, avec des récidives fréquentes. Les métastases sont en
revanche rares et tardives. L’aspect radiologique est évocateur, avec des zones bien
limitées d’ostéolyse atteignant la diaphyse.
Histiocytofibrome malin et fibrosarcome
Ce sont des tumeurs qui touchent le plus souvent les os longs chez l’adulte. Ce
sont des lésions lytiques, radiologiquement d’agressivité modérée. Le traite-
ment associe chimiothérapie préopératoire, chirurgie et chimiothérapie post-
opératoire.
Tumeur osseuse 145

Lymphome
Le lymphome osseux primitif des os est caractérisé en IRM par des hyposignaux
T1 et T2 témoignant d’une fibrose et d’une sclérose osseuse (ce sont souvent des
tumeurs condensantes sur les radiographies simples). Ce sont des tumeurs très
agressives avec, au moment du diagnostic, une extension dans les parties molles.
Plasmocytome
Il est caractérisé en IRM par la formation d’une coque périostée plus ou moins
discontinue dont les contours convexes en dehors rappellent les circonvolutions
du cortex cérébral. Les plasmocytomes entraînent une soufflure corticale et une
déformation importante des contours osseux. Bien que la corticale soit souvent
discontinue, il n’y a pas d’extension dans les parties molles.
3. Métastases
Elles peuvent prendre toutes les formes. Elles sont le plus souvent diaphysaires ou
métaphysaires et très rarement épiphysaires. Elles peuvent être corticales. Après l’âge
de 40 ans, c’est avec le myélome la lésion osseuse ostéolytique la plus fréquente.
4. Maladie de Paget
Ce n’est pas une tumeur osseuse mais elle peut se transformer en chondrosar-
come ou en ostéosarcome et présente parfois en IRM un aspect pseudotumoral.
L’IRM montre bien les signes caractéristiques de la maladie de Paget : augmenta-
tion de taille de l’os, épaississement et raréfaction des travées osseuses et dédiffé-
renciation corticomédullaire. On peut également observer au niveau épiphysaire
un aspect hétérogène de la moelle osseuse lié à l’alternance de zones condensées
de petites tailles et arrondies avec des régions graisseuses. Sur cet os d’architecture
modifiée, on observe parfois des fractures pathologiques. L’évolution vers un sar-
come osseux doit être suspectée si on observe une destruction de la corticale et
une masse des parties molles.

Compte rendu
Le compte rendu doit :
j confirmer le diagnostic de tumeur osseuse ou proposer les diagnostics diffé-
rentiels (pseudotumeur, infection) ;
j en cas de tumeur :
ü si la lésion présente tous les caractères de bénignité et un aspect typique :
on peut conclure au diagnostic de tumeur bénigne (enchondrome bénin,
ostéochondrome, fibrome non ossifiant, dysplasie fibreuse, îlot condensant
bénin, kyste osseux simple, etc.) ;
ü si la lésion présente au moins un critère d’agressivité : on doit demander un
avis spécialisé en vue d’une éventuelle biopsie.
146 Squelette périphérique

Point clé
Les lésions diaphysaires sont souvent en limite du champ d’exploration.
Ainsi, on peut découvrir une tumeur de la diaphyse fémorale en limite de
champs d’une IRM du genou ou sur les images de localisation. Il est donc
très important de les analyser quand il y a une discordance entre l’impor-
tance des symptômes cliniques et une IRM qui semble normale (ostéosar-
come de la diaphyse fémorale).

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