Arganier 009019
Arganier 009019
Arganier 009019
Synthèse et recommandations
Prof. Mohamed BADRAOUI
Directeur de l’INRA-Maroc et Président du comité scientifique du congrès
1. Introduction
Le premier congrès international de l’arganier a été tenu, du 15 au 17 décembre 2011 à Agadir
sous la présidence de Monsieur le Ministre de l’Agriculture et de la Pêche Maritime et Monsieur le
Haut Commissaire aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la Désertification. Il avait pour objectifs de
faire l’état des lieux des connaissances et des acquis scientifiques sur l’arganier et de proposer
des perspectives de travaux de recherche scientifique et technologique pour la conservation et la
valorisation de cette ressource.
Après deux conférences d’ouverture, les interventions ont été réparties en quatre thématiques.
La première regroupe tout ce qui se rapporte à l’arganier en tant qu’espèce dans son écosystème, la
deuxième a trait à l’itinéraire technique de la production des plants et du développement des espaces
boisés en arganier, la troisième rassemble les acquis en matière de la valorisation des produits issus
de l’arganier et la quatrième thématique compile le savoir relatif à la structure et le fonctionnement
de l’écosystème de l’arganier. Le présent document fait la synthèse des interventions orales et
affichées et des discussions tenues durant les trois jours du congrès.
En effet, le Maroc est le dépositaire universel de l’arganier. Cet arbre, d’affinité tropicale,
remonte aux paléoclimats ante-pliocènes, précédant l’installation du Sahara Arabo-Africain.
Actuellement, il assure un des boucliers biotiques les plus efficients contre la désertification.
L’arganier, profondément adaptée à usages multiples et ancré dans la tradition, constitue le matériel
biotique et l’entité culturelle de choix, à même de structurer une sorte d’institutionnalisation nationale
du développement durable. Ainsi, sur proposition des pouvoirs publics marocains, l’Unesco avait
labélisé l’aire de répartition de l’Arganier en tant que Réserve de Biosphère de l’Arganeraie (RBA),
en 1998.
La RBA se propose de réaménager son équilibre naturel, ainsi que de tester son approche
économique participative, en utilisant le Parc National du Souss-Massa (PNSM), qui en est la
principale aire centrale, comme un banc d’essai parfaitement approprié. Un effort considérable est
consenti pour maîtriser la régénération de l’arganier, avec un succès croissant concernant les
programmes de reboisement opérés par le Haut Commissariat aux eaux et Forêts et à la Lutte Contre
la Désertification. Les choix en sont devenus crédibles du fait de la valorisation ingénieuse des
produits de l’écosystème, qui puise ses origines dans la tradition locale, et qui a été puissamment
fondée, encouragée et diversifiée grâce à la recherche scientifique et technique et à des essais
remarquables en matière de transformation et de commercialisation saine et équitable.
Les écosystèmes de l’arganier s’étendent sur une grande portion de l’écorégion macaronésienne,
entre Safi et Smara. Ainsi, ces écosystèmes dégradés peuvent être réhabilités par des travaux de
restauration écologique, en favorisant la succession des groupements végétaux, soit par la mise en
défens, soit par la réintroduction des espèces autochtones. Les plantes dites nurses peuvent jouer
un rôle fondamental dans la réussite de cette action. Par la suite, ces forêts restaurées, doivent
être soumises aux systèmes de gestion écologiquement appropriée, socialement bénéfique et
économiquement viable.
L’arganeraie des Haha, pour sa part, connaît une dynamique de changement à long terme corollaire
d’une dynamique démographique, sociale et économique favorable à sa préservation. Néanmoins, elle
souffre d’une dégradation qualitative de ses attributs et un dysfonctionnement des processus naturels
(absence de régénération naturelle par semis, strates de végétation fort simplifiées, perturbation
profonde du cycle de l’eau), rendant discutable la fiabilité de la forêt paysanne ou domestique et de
sa durabilité.
Les données de télédétection multi sources ont été essayées pour cartographier l’utilisation du
sol et la densité du couvert arboré. Bien que les résultats ne puissent être considérés que pour les
surfaces peu accidentées et de diamètre de couronnes d’arbres du même ordre que la résolution des
images, une relative stabilité du couvert arboré a été rapportée. L’évaluation de la dynamique des
rejets dans différentes stations d’arganier a été entreprise dans la province d’Essaouira. Le nombre
moyen des rejets par souche est sous l’influence majeure de l’altitude. En effet, si la régénération
par rejets de souches de l’arganier ne pose pas de problèmes dans l’ensemble de la forêt d’Ida ou
Throuma, elle est toutefois meilleure en basse et moyenne altitude de la région, notamment dans les
formations à Chamaerops humilis, Ononis natrix et Teucrium polium.
L’analyse de la végétation dans le plateau des Haha a permis de distinguer trois groupements
floristiquement différents selon l’altitude, la pente et l’influence océanique. Le premier
Groupement comprend des relevés effectués dans l’arganeraie de moyenne et haute altitude dans
la région de Smimou, rattaché à l’association des Tetraclino-Arganietum spinosae. Généralement, cet
ensemble indique des milieux difficiles sur des fortes pentes et des sols squelettiques faisant affleurer,
par endroit, la roche mère calcaire. Le deuxième Groupement constitué de relevées effectuées dans
les forêts de Tamanar regroupe l’espèce Olea europea associée à Periploca laevigata et Lavandula
multifida ainsi que d’autres thérophytes indicatrices des milieux relativement dégradés et ouverts.
Cette unité correspond à l’association Argania spinosa- Tetraclinis articulata avec Periploca laevigata.
Le troisième Groupement intègre des relevés effectués dans les forêts d’Essaouira, situés en basse et
moyenne altitude. Cet ensemble correspond au groupement d’Argania spinosa-therophytes et faisant
partie de la classe des Théro-Brachypodietea.
3.1.2. L’Arganier
Par ailleurs, une autre collection d’arganier composée de 150 accessions, issues des régions
situées entre 109 et 988 m d’altitude, réparties dans cinq provinces est en cours d’étude. Un total
de 24 traits qualitatifs et quantitatifs et douze acides gras libres ont été utilisés pour initier le niveau
et l’organisation de la diversité génétique. Les résultats préliminaires montrent des différences
significatives entre les génotypes pour la majorité des acides gras libres. Onze « Simple Sequence
Repeat » (SSR) des loci sélectionnés à partir d’argan sont communs à toutes les accessions.
- Implication des parties prenantes dans la planification et la mise en œuvre des plans de
conservation et de développement de l’écosystème arganier.
La régénération naturelle de l’arganier est très, faible, lente voir même inexistante dans les
conditions actuelles. Le ramassage systématique des fruits, le surpâturage et les modes d’utilisation
du sol, sont en grande partie à l’origine du vieillissement des peuplements. Pour palier à cette
problématique, les gestionnaires forestiers ont eu recours à la régénération artificielle par plantations
selon un programme ambitieux. Cependant, ces efforts de reboisement sont souvent confrontés aux
difficultés de reprise des plants sur le terrain. Les taux de réussite demeurent relativement faibles
par rapport aux objectifs. La multiplication par voie végétative de l’arganier est l’une des alternatives
de production de plants conformes aux plants mères sur le plan génétique. Ce qui suppose pouvoir
disposer de clones ayant des caractères répondant aux besoins de la sylviculture et de la conduite
arboricole. Toutefois, la réussite de la multiplication par bouturage à un niveau reproductible et
rentable, nécessite une maitrise des conditions intrinsèques et extrinsèques du processus.
Quatorze arganiers âgés de 200 à 400 ans environ ont été sélectionnés pour prélever les boutures.
Les essais de multiplication végétative (bouturage et greffage) ont été réalisés. Les boutures ligneuses
et semi ligneuses récoltées sur les arbres adultes n’ont réagi à aucun traitement et le pourcentage
d’enracinement demeure très faible. L’enracinement de boutures issues d’arbres adultes dépend
des souches. S’ils ne dépassent pas 1% pour la plupart des arbres dans ces essais, il a atteint 45% pour
l’un des arbres sélectionnés. L’enracinement des boutures d’arganier varie avec le type de bouture,
leur âge et la période d’enracinement. Il y a lieu de signaler que l’enracinement des boutures juvéniles
est peu dépendant du traitement hormonal, par contre, la qualité des racines en dépend. Les différents
substrats utilisés dans ces essais n’ont eu qu’une influence limitée sur le taux d’enracinement.
La comparaison des différents types de boutures a montré que le bouturage réalisé sur des
rameaux portant une épine terminale est inadéquat. De même, les rameaux à épine terminale, verts ou
trop lignifiés, ne sont pas aptes à produire des racines. Par contre, un meilleur enracinement peut
être obtenu à partir de rameaux semi lignifiés avec au moins un bourgeon et d’une longueur
comprise entre 8 et 12 cm. Des techniques de greffage ont été essayées en testant différentes
origines et diamètres variables des greffons. Cependant, les résultats obtenus ne sont pas répétitifs.
De même, l’application de différents traitements hormonaux sur les boutures herbacées n’a pas donné
les résultats escomptés. Trois autres types de matériel végétal ont été utilisés dans une vingtaine
d’essais d’enracinement: boutures semi ligneuse et ligneuses issues d’arbres adultes sélectionnés,
boutures semi ligneuses et ligneuses issues d’arbres âgées d’une dizaine d’années, boutures semi
ligneuses issues de plants de 6 ans en conteneurs. Les résultats obtenus n’ont pas été concluants.
Par ailleurs, trois catégories de plants à feuilles persistantes, feuilles moitié persistantes et moitié
caduques et feuilles caduques, réparties respectivement en type I, type II et type III, âgés de 18 mois,
ont été testés en essais de plantation. La reprise a été de 88% tout type confondu. A ce stade de l’essai
et pour les caractères étudiés, on peut dire que le type I et le type II sont les plus recommandés.
Les résultats des travaux sur la multiplication végétative par bouturage et greffage sont parfois
contradictoires, mais montrent un potentiel important. La standardisation du matériel de départ
et des conditions de multiplication mérite des efforts encore plus importants.
La culture in vitro constitue une voie prometteuse pour la multiplication en masse de cette
espèce. En effet, la multiplication par organogenèse est basée sur le développement des milieux de
culture qui favorisent l’initiation, la multiplication de bourgeons ainsi que l’enracinement de vitro
plants obtenus à partir des explants étudiés (jeunes pousses, boutures herbacées, inflorescence,
bourgeons terminaux et apicaux…). Le potentiel de régénération in vitro des plants d’Argania spinosa
a été étudié. Les cultures initiales ont été établies sur différents types d’explants en utilisant des
milieux de culture qui différent aussi bien par leurs compositions minérale que par l’apport en
régulateurs de croissance. L’étude établie sur les boutures (herbacés et semis ligneuses) a conduit à
divers types de réponses en fonction de l’apport auxine/cytokinine. Les résultats obtenus pour la
phase d’induction et de prolifération sont encourageants mais des efforts restent à fournir en
vue d’assurer l’enracinement et la survie des vitro plants.
L’effet d’une mycorhization contrôlée sur la croissance de jeunes plants d’arganier issus de
semis de graines a été évalué dans une perspective d’application en pépinière. L’inoculation par une
souche de Glomus intraradices a montré un effet bénéfique sur la croissance des plants cultivés
dans un substrat inerte (argile calcinée). Après neuf mois de croissance, l’indice de dépendance
mycorhizienne relative (IDMR) est de 48 %. L’utilisation d’un inoculum commercial a confirmé l’intérêt
d’une mycorhization précoce des plants avec des souches sélectionnées sur leur efficacité, même dans
un substrat contenant du sol (et donc une flore mycorhizienne naturelle).
L’effet très net, quatre mois après le semis, tend à s’estomper avec le temps mais reste significatif après
12 mois, bien que les systèmes racinaires des traitements inoculés et non inoculés soient tous deux
mycorhizés. Ces expérimentations confirment la forte dépendance mycorhizienne de l’arganier
et justifient l’inoculation par des souches sélectionnées le plus précocement possible, au
stade pépinière.
La conduite en vergers arboricoles (domestication) de l’arganier permettrait d’en faire une culture
oléagineuse. Ainsi, à côté de l’arganeraie naturelle (espace à protéger et à développer en priorité), les
plantations d’arganiers sous forme de vergers oléagineux associant l’arganier à d’autres cultures
permettent d’envisager une meilleure productivité et une constance de la qualité. Les arganiers seront
produits en s’appuyant notamment sur des plants de bonnes qualités sanitaire et génétique avec un
bon suivi du système racinaire : conteneur, substrat, mycorhization par un inoculum sélectionné,
vitroplants. La domestication de l’arganier ouvre des perspectives économiques intéressantes pour le
Maroc car elle devrait permettre de faire face à une demande croissante en huile d’argane et réduire
la pression sur les peuplements naturels.
Cependant, les acquis sur les techniques avancées de production de plants et de conduite de
peuplements sont fragmentaires et nécessitent une intégration et des compléments pour améliorer le
référentiel technique à adopter sur le terrain :
- L’essentiel des données concernent des observations de fait nécessitant des explications
scientifiques d’où l’intérêt de renforcer et promouvoir la recherche en la matière ;
- Un grand intérêt doit être réservé au mode de restauration écologique des écosystèmes
d’arganier ;
Les principaux enseignements tirés de cet axe peuvent être résumés comme suit :
L’utilisation des feuilles d’argan en fertilisation ont provoqué une phytotoxicité exprimée par
une baisse de croissance aussi bien en hauteur qu’en épaisseur des plants et, une réduction de la
taille des feuilles et par suite une réduction hautement significative de rendement (plus de 60%) par
rapport au témoin. La composition des cires qui sont des métabolites secondaires, pourrait
amener à une sélection clonale pour la tolérance à la sécheresse vue la relation étroite des
cires avec la préservation de l’eau dans les tissus.
En ce qui concerne l’utilisation des sous produits de l’arganier dans l’alimentation animale
il est montré que le rapport cout/bénéfices est largement en faveur de l’utilisation des tourteaux
d’Argan. Les études sur la valorisation de la pulpe des fruits, très limitées montrent par exemple que
la forme des fruits et le degré de leur maturité influencent la composition chimique de la pulpe.
Le profil aromatique de l’huile cosmétique est plus riche en alcools et en cétones que
celui de l’huile alimentaire qui regorge de produits de la réaction de Maillard suite à la dégradation
des sucres et des lipides et de leur interaction. L’huile d’argane alimentaire est plus riche en
composés aromatiques que la cosmétique. De même, celle issue de l’extraction semi-mécanisée en
est plus riche que celle produite de manière traditionnelle.
Le profil olfacto-métrique de l’huile cosmétique est composé essentiellement des notes fruité/
vert/floral. Par contre, l’huile alimentaire présente en plus les sensations noisette/grillé/cacahuète et
caramel/sucre brulé. L’huile traditionnelle a montré plus de fruité et caramel/sucre brulé que l’huile
alimentaire issue du procédé semi-mécanisé.
La meilleure stabilité de l’huile est notée suite à une extraction par des procédés semi-
mécaniques à partir d’amendons torréfiés. En mode traditionnel, la stabilité est affectée par
l’apport d’eau, par le transit des amendons dans le tube digestif de la chèvre, par l’augmentation de
la température, la lumière et le stockage prolongé occasionnant un défaut organoleptique rance. Par
contre, elle n’est pas influencée par l’origine géographique des amendons.
Sous régime équilibré, l’huile d’argan améliore le profil lipidique en augmentant le HDL
et en diminuant le LDL et les triglycérides. Elle est efficace sur le stress oxydatif et sur le taux
de paraxonase, enzyme favorisant le HDL. C’est une huile recommandée en prévention nutritionnelle
des complications cardiovasculaires chez le diabétique de type 2, prouvant par ailleurs son action
antiathérogène. Il a également été montré un effet bénéfique de l’huile d’argan se traduisant par une
augmentation du taux de vitamine E sérique et une tendance à la baisse du cholestérol total, du LDL
et des triglycérides.
Malgré les divers usages, l’arganier demeure insuffisamment exploité car il renferme des
potentialités jusque là inconnues et dont la mise à jour pourrait donner à cet arbre un nouvel
essor dans son contexte socio-économique et culturel. A cet effet, certains aspects méritent d’être
développés:
- L’utilisation des produits de l’arganier, comme la saponine, est très prometteuse pour
la lutte contre les maladies infectieuses aussi bien humaines qu’animale. Un nouvel outil,
la bioinformatique a été présenté pour évaluer l’efficacité de différentes molécules. Ces
recherches sont à leur début et doivent par conséquent être encouragées.
- L’impact de l’infestation des fruits par Ceratitis capitata sur la qualité des
produits de l’arganier n’est pas connu. Des programmes de recherches sur ce ravageur
doivent être développés.
- Une révision/actualisation de la norme nationale « caractéristiques chimiques »,
au vu d’une surestimation enregistrée de certains composés susceptibles d’encourager
la fraude.
- Le développement de l’aspect organoleptique de l’huile d’argan renforcerait
l’importance la caractérisation variétale. En outre, la mise en place d’un panel
national est très utile pour l’élaboration d’une norme sensorielle.
- La mise en évidence des principes actifs des différents extraits des parties de la
plante (feuille, pulpe..) est absolument nécessaire pour comprendre les processus et
modes d’action.
- La réalisation d’études sur l’impact du mode d’extraction sur la qualité pour
trancher sur certains résultats contradictoires.
- Les études cliniques doivent être amplifiée à un plus large panel clinique,
gagnerait en significativité. Ces études doivent être étalées sur une plus longue durée
d’étude, nécessite une confirmation statistique plus large pour une confirmation des
résultats préliminaires déjà acquis.
Les facies de dégradation dans l’Arganeraie sont moins prévisibles en relation avec la grande
domestication des peuplements et à la diversité des situations socio-écologiques. Ils sont plutôt liés au
recouvrement arboré, l’abondance des profils arborés dégradés et au mode de gestion coutumier. Les
agdals et les mises en culture sous arganier, qui profitent d’un statut de protection par les usagers,
sont les espaces les moins touchés par la dégradation.
L’arganier a toujours configuré et rythmé la vie des populations locales étant toujours présent
dans leurs activités culinaires, festives ou socioculturelles. Cependant, le boom du marché de l’argan
a engendré de multiples conséquences sur la vie socioéconomique et culturelle de ces populations.
En fait, la marchandisation de l’argan a eu à la fois des retombées positives et des effets négatifs
sur tout l’écosystème. En effet, l’engouement pour les produits de l’arganier et la flambée de leurs
prix (notamment l’huile), ont reconfiguré la vie socio-économique et culturelle locale : de nouveaux
acteurs ont surgi, un marché non structuré et pas assez profitable aux locaux s’est mis en place, le
savoir faire local s’érode, des coutumes et traditions sont en train de s’éroder, de nouveaux modes
d’alimentation ont fait leur apparition. De ces faits, l’intérêt que porte la population à l’arganier
s’est réduit à sa valeur marchande, au détriment des autres valeurs socioculturelles qui lui
étaient depuis longtemps attribuées. Cette évolution des représentations a eu des conséquences
sur le comportement des locaux envers tout l’écosystème Arganeraie.
Les produits à base d’argan constituent un levier du développement dans les régions du Souss-
Massa et Haha. La création des coopératives d’argan a eu, certes des retombées positives sur les
plans social, économique et environnemental ; particulièrement pour la femme rurale. Cependant,
derrière ce succès apparent se cache un certain nombre de contraintes pouvant entraver la durabilité
de l’écosystème. Il s’agit, en l’occurrence de la rareté de la matière première, à laquelle s’ajoutent
la défaillance en matière de gestion et de commercialisation des produits, l’existence d’un marché
atomisé et de l’analphabétisme qui caractérise une partie non négligeable de ces populations. Les
coopératives se trouvent dans l’obligation d’œuvrer pour la certification de leurs produits et services
dans le but d’accéder aux marchés extérieurs, de développer leur label éthique et de stimuler la création
d’associations et de réseaux dans les différentes filières de production et de commercialisation.
Dans les parcelles privées, l’arganier est conduit pratiquement en arbre fruitier. Des cuvettes
sont construites pour recueillir les eaux de ruissellements et les sédiments. Elles sont parfois sarclées,
fumées et irriguées. Les noix sont destinées pour produire une huile de qualité. Sur les terres à usages
privés, les paysans ont développé des pratiques de gestion de l’eau, de la terre et des arbres qui
permettent la conservation des ressources et l’amélioration de la productivité.
Quinze pratiques ont été identifiées et analysées. L’organisation de l’espace selon sa tenure, son
statut foncier, ses potentialités et sa destinée, détermine les usages et les pratiques de gestion des
ressources (pastorales, sylvicoles, agricoles, hydriques) qui façonnent, à des degrés variables, les
arbres, les peuplements et les paysages.