Droit Constitutionnel 1
Droit Constitutionnel 1
DU DROIT CONSTITUTIONNEL
C’est une branche du droit public interne, qui a pour objet l’encadrement juridique de la création de
l’organisation et de l’expression du pouvoir politique (organisation politique de l’état).
La politique est définie comme Aristote comme l’art de gouverner la cité. Cette politique a
progressivement été encadrée par le droit, afin de fixer les règles fondamentales relatives au mode
de gouvernement de la société politique, des règles concernant l’exercice du pouvoir de
commandement au sein de la cité ainsi que l’organisation des rapports entre gouvernants et
gouvernés.
Le pouvoir politique est exercé dans le cadre de l’état, paradigme classique proposé pour l’étude du
droit constitutionnel. Les notions et fondements essentiels s’y rattachent (le peuple, la souveraineté,
l’état de droit, la constitution, la démocratie…).
Cependant, le droit constitutionnel ne peut être appréhender de la même façon qu’il y a cent, voire
deux cents ans, car le droit à évolué.
Trois étapes se distinguent:
- le droit constitutionnel classique, essentiellement institutionnel: jusqu’à la seconde guerre
mondiale (IIIème République), le droit constitutionnel est enseigné comme la partie du droit
public qui s’attraie à l’organisation de l’état. Il s’enseignant donc comme du droit institutionnel
(enseignement des institutions).
- Le droit constitutionnel de l’après guerre: caractérisé par l’arrivée de la science politique.
Après la 2GM, des critiques se lèvent sur la façon d’enseigner la droit c, considérée comme
strictement juridique. L’idée est qu’on ne peut pas comprendre une constitution en se limitant au
texte, seulement avec une approche juridique. Il faut aussi tenir compte de la pratique politique.
L’enseignement se transforme donc en science politique, mettent en lumière que le
fonctionnement politique d’un régime ne peut pas exclure son fonctionnement concret.
Cependant, l’un n’exclut pas l’autre, les textes ressent fondamentaux.
- Le droit constitutionnel contemporain: il a encore évolué pour quatre raisons essentielles. La
première est la désacralisation de la loi. Les terribles expériences fascistes et nazies ont démontré
que la loi pouvait mal agir (loi anti-juives, fascistissimes). Cela a changé la vision du système,
changeant ainsi l’enseignement. La seconde est l’expansion du nombre de constitutions dans le
monde, notamment liée au processus de décolonisation qui favorise l’expansion du
constitutionnalisme. Le troisième élément est la diffusion internationale de l’idéologie des droits
de l’homme, avec la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (1948, dans le cadre de
l’ONU) et la Convention Européenne des Droits de l’Homme (1950, validée par le conseil de
l’Europe). Enfin, l’apparition de la justice constitutionnel a progressivement juridicisé le droit
constitutionnel, le non-respect de ce droit est désormais sanctionné.
Le droit a beaucoup évolué, on peut aujourd’hui le définir comme l’ensemble des règles
juridiques qui détermine les relations entre les pouvoirs publics, les droits et libertés
fondamentaux ainsi que la création et le régime des normes juridiques qui en sont issues. Cette
définition moderne recouvre les trois objets du droit constitutionnel.
Le droit constitutionnel au sens moderne recouvre trois objets: les institutions, les sources et les
libertés.
Ces objets s’exercent aussi en dehors du cadre étatique, à un niveau supra national. Il s’exerce à
l’échelle régionale (Europe) et internationale. Il faut donc tenir compte du contexte international
dans lequel s’exerce de puis 30 ans la garantie des droits. C’est pour cette raison que le droit
constitutionnel tend à s’élargir aux règles européennes et internationales au sens constitutionnel. Il
prend en charge l’articulation entre les différents ordres juridiques.
Il faut rappeler enfin que certains juristes s’intéressent aux effets de la globalisation sur le droit
constitutionnel, tandis que d’autres s’interrogent si il est possible de penser le droit constitutionnel
sans état (réflexion autour de la constitutionnalisation de l’Union Européenne, voire un droit
constitutionnel mondial).
Depuis des siècles, l’état constitue le cadre privilégié de l’exercice du pouvoir politique.
Aujourd’hui, l’état est la forme la plus répandue d’organisation des sociétés humaines, on compte
environ 200 états à travers le monde. Les hommes souhaitant se doter d’un pouvoir indépendant sur
un territoire donné et qui souhaitent maîtriser leur destin, leur projet commun, revendiquent la
création d’un état. Les deux notions d’état et de pouvoir sont donc intimement liées, sans pour
autant se recouvrir totalement. En ce sens, on dira que l’état constitue un cadre du pouvoir, à savoir
la capacité d’organiser et de conserver une société. L’état offre des prérogatives telles qu’il est un
cadre privilégié du pouvoir politique.
Une autre des caractéristiques est qu’il a une portée globale, le pouvoir politique s’étend sur
l’ensemble du territoire et concerne toutes les activités de la société. En cela, il se distingue des
autres phénomènes d’autorité, qui concernent toujours des groupes restreints, qui n’ont pas cette
vocation globale. L’état assure la permanence du pouvoir politique duquel procèdent les institutions
politiques et les règles de droit qui régissent la société.
1. La notion d’état
D’innombrables définitions de l’état ont été proposées.
L’anarchiste Bakounine: « l’état est un immense cimetière dans lequel viennent s’enterrer toutes les
manifestations de la vie individuelle »
Mussolini: « L’état est l’absolu devant lequel les individus et les groupes ne sont que les relatifs. »
Juriste français Burdeau: « L’état est une idée, ce n’est pas une réalité concrète. »
Louis XIV: « L’état, c’est moi. » = idée patrimoniale et personnelle de l’état, sous la monarchie
absolue
Dans un second temps, l’état produit du droit, des normes juridiques qui gouvernent les
rapport sociaux sur des territoires étatiques. En même temps, il se soumet lui-même au droit.
Afin d’éviter que ces organes de gouvernement n’exercent des abus, un pouvoir absolu et arbitraire,
l’état s’auto-limite. Il se soumet à des principes supérieurs et intérieur à lui, il se fixe des règles à
respecter sous la forme de lois ou d’une constitution, écrite ou coutumière. Il devient donc un état
de droit selon une conception moderne de l’état. On parle de Reichstat en Allemagne, de Rule of
Law au Royaume-Uni.
L’état occupe une place centrale dans les réflexions politique, sociologiques, philosophiques,
juridiques. La grande division est entre ceux qui considèrent l’état comme un phénomène volontaire
(théories du contrat social, 1) ou comme un phénomène de force (2)
Les théories de l’origine volontaire de l’état se déclinent en deux courants théoriques: l’état avec
une origine contractuelle et l’état avec une origine institutionnelle.
Thomas Hobbes (1588-1679), Leviathan (1651): un des pères de l’absolutisme. Les hommes, à
l’état de nature, vivent dans une situation chaotique, d’anarchie, dans laquelle chacun cherche à être
le plus fort et à opprimer et asservir les autres. Son idée de départ est très pessimiste. Chacun est en
guerre contre tous, seuls les plus forts sont libres, au détriment des plus faibles. Il expose que le
désir de puissance fait partie de la nature humaine.
Pour faire face à cet état de nature, Hobbes expose que les hommes ont créé un contrat et se sont
soumis à un pouvoir tiers (l’état) à qui ils ont confié toutes leurs libertés. Les hommes créent l’état
dans un seul but: la paix et la sécurité. L’état possède donc le pouvoir absolu, tous les pouvoirs sans
aucune limite, il est omnipotent. Le contrat social qui fait naitre l’état fonde une aliénation totale et
un pouvoir totalitaire. Le symbole est le Léviathan, ce monstre biblique qui doit protéger ses sujets
soumis. L’origine contractuelle du pouvoir fonde la monarchie absolue.
John Locke (1632-1704), Essai concernant l’extension du gouvernement civil: considéré comme le
père du libéralisme politique. À l’opposé de Hobbes, l’origine contractuelle de l’état fonde un état
libéral, qui a pour but de protéger les libertés. Dans l’état de nature, les hommes ne se laissent
pas dominer par leur passion, ils obéissent à leur raison qui les incitent à jouir paisiblement de leurs
droits naturels, le premier étant le droit de propriété. Or, les violations de ces droits existent. Afin
d’éviter que la justice soit faite de manière privée, les hommes décident de sortir de leur état de
nature pour rechercher une justice mieux organisée. Ils sortent volontairement de leur état de nature
pour mieux vivre et s’organiser. L’état de nature n’est donc pas insupportable, les hommes décident
de souscrire au contrat après mure réflexion, ils abandonnent leur état de nature mais conservent un
résidu de leur liberté native. Ce résidu constitue la base des droits individuels que l’état doit
respecter. Cette liberté native reste chez les hommes, elle est le fondement des droits de l’homme.
Les hommes ne transfèrent à l’état que les droits nécessaires pour une société meilleure
(essentiellement le droit de rendre justice).
Pour Locke, tout ce processus est rationnel, il n’est pas produit par des passions. « Les hommes
sortent de l’état de nature et forme une société civile lorsqu’ils instituent un juge qui a autorité pour
relier les litiges et réparer les tords. Les droits de l’individu sont donc la base de la construction
de l’état, ils apparaissent à la foi comme la justification de l’état mais également la limite du
pouvoir. Il aura une influence pour la révolution américaine.
Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), Le Contrat Social (1762): il a une vision très optimiste de la
société. Dans l’état de nature, les hommes étaient libres et heureux. Mais suite au développement
des inégalités, les rapports entre les hommes se sont peu à peu dégradés. Pour récupérer l’égalité
perdue et vivre heureux, ils décident de faire un contrat social dans lequel ils s’engagent à obéir non
pas à un individu, mais à la volonté générale. L’homme n’a donc pas perdu sa liberté, mais elle a
changé de nature. Il obéit à la volonté générale, mais il participe aussi à son élaboration. La volonté
générale s’exprime par la loi, qui traduit l’intérêt général. Le pouvoir politique s’exprime donc par
la loi, produite par tous les citoyens réunis dans une assemblée générale, sans intermédiaire: c’est la
démocratie directe, absolue, car les hommes sont soumis à la volonté de la majorité. C’est une
constitution montagnarde publiée en 1793, avec le suffrage universel masculin. Elle ne sera jamais
appliquée, et restera au stade utopique.
À partir de la fin du XIXème siècle, des théories se développent chez de nombreux juristes, français
notamment, chez lesquels on s’interroge sur la nation, partie intégrante de la notion d’état, et sur
l’état comme institution.
Au delà des théories qui considèrent l’état comme un phénomène volontaire et positif pour
l’homme, d’autres courants de pensées estiment que l’état est un phénomène de force, ou en tout
cas, qui nait spontanément et qui n’est donc pas le fruit d’un acte de volonté délibéré des hommes.
Ces thèses semblent plus réalistes. L’état est une sorte de conséquence inéluctable du
développement de l’évolution naturelle de la société et des rapports de forces qui s’y exercent.
Les groupes humains s’organisent de manière naturelle afin d’améliorer la vie en société et en
communauté. Spontanément, les hommes vont choisir leurs dirigeants, établir des règles de vie
communes, s’allier ou rivaliser avec des individus: cela conduit naturellement à la création d’un
état. Ce processus se déroule par étapes successives sous l’influence de phénomènes ponctuels
violents ou pacifiques (guerre), ainsi que des phénomènes plus lents (création d’une identité
nationale, industrialisation, aménagement du territoire, naissance des classes sociales qui
représentent un rapport de force).
Dans cette optique, l’état apparait comme le cadre du bon développement de la société. Cependant,
il peut être perçu comme l’instrument des dérives de la société.
Carré de Malberg, juriste de la fin du XIX et début du XX, Contribution à la théorie générale de
l’état (1920): un des pères du constitutionnalisme. Selon lui, l’état est un organisme naturel et
spontané produit de la force des choses. Il offre à la société un cadre, une structure qui lui permet de
mieux s’organiser. Sa vision est positive.
Karl Marx, Critique du roi politique Hegelien (1843): si l’état est à l’origine d’un processus
naturel qui fait partie de l’évolution naturelle de la société, il devient l’instrument de la classe qui
possède les moyens de production, bourgeoise, pour entretenir sa domination sur la classe qui
ne possède rien, les ouvriers qui n’ont pour possession que la force de leurs bras. Selon lui, l’état
doit disparaitre à terme, pour une société sans classe et sans état. L’état est donc un phénomène
négatif.
Doctrine Marxiste: s’inscrit dans l’idée de la spontanéité de l’état. Pour Marx, l’état est un
phénomène spontané qui nait dès l’évolution de la société et des rapports de forces, c’est un mal
provisoire appelé à disparaitre. Il est donc devenu un instrument de la classe bourgeoise, qui détient
les moyens de production, de contrôle et de soumission du prolétariat. Il reconstitue toute l’historie
de l’évolution de la société humaine, il reprend la dialectique de ceux qui possèdent et ceux qui ne
possèdent pas (l’histoire s’est construit dans cette logique). L’état est un instrument d’oppression au
service de la classe dominante. Plutôt que de penser qu’il faut supprimer tout de suite l’état, il faut
le conduire vers un état prolétarien, une dictature du prolétariat pour sortir du système capitaliste.
Ce n’est que dans un second temps que les classes sociales doivent disparaitre; ainsi, l’état n’aura
plus lieu d’être.
Doctrine normativiste, rattachée au juriste Hans Kelsen: l’état est un ordre juridique.
Définition de l’état par Carré de Malberg dans Contribution de la théorie générale de l’état,
1920: « communauté d’hommes, fixée sur un territoire et possédant une organisation d’où résulte
pour le groupe envisagé dans ses rapports avec ses membres une puissance supérieure d’action, de
commandement et de coercition »
Coercition: pouvoir de contraindre
Les deux notions d’état et de pouvoir sont intimement liées sans se recouvrir complètement. L’état
est le cadre privilégié du pouvoir, car il possède trois prérogatives essentielles: la légitimité, la
permanence (institutionnalisation) et une situation de monopole (souveraineté). C’est une forme
d’agacement de rationalisation du pouvoir.
Juridiquement, l’état est une personne morale de doit public, territoriale et souveraine.
En droit, il y a des personnes physiques (humains, individus) et des personnes morales (groupe de
personnes). Les personnes morales peuvent être de droit privé (entreprises) et de droit public
(collectivités territoriales, établissements publics, État). La seule personne territoriale et souveraine
est l’état.
Plus précisément, il faut que trois caractéristiques objectives soient réunies pour que l’on puisse
parler d’état. Il est aussi nécessaire qu’il y ait une reconnaissance des autres états sur le plan
international, pour qu’il puisse exister.
- le territoire
Pour parler d’un état, il faut qu’il y ait un territoire, cadre de ses compétences. Tous ceux qui y
habitent sont donc soumis à sa souveraineté. Il ne peut exister un état sans territoire (alors qu’il peut
exister des territoires sans états, comme l’atlantique ou l’espace extra-atmosphérique). L’assise
territoriale peut être plus ou moins étendue, il suffit que ses contours soient précis. Peu importe la
taille du territoire, ce qu’il compte, c’est qu’il soit délimité des autres états. Les frontières de l’état
peuvent être terrestres, maritimes et aériennes. Le territoire est également la surface qui permet à
l’état de s’affirmer indépendant par rapport aux autres états, un moyen de repousser l’intervention
des puissances étrangères. Enfin, le territoire d’un état ne correspond pas forcément au territoire
d’une nation.
- la population
On ne peut pas parler d’état que si un ensemble d’hommes et de femmes est soumis à un ordre
juridique déterminé à l’exclusion de tout autre. Il n’y a pas d’état sans population, sans cette
dimension humaine. C’est la fondation sociale de l’état. La population peut être homogène ou
hétérogène.
Juridiquement, les individus, les personnes morales, les bateaux et les avions sont rattachés à un état
par un lien de nationalité. Le lien de nationalité est le lien politique en vertu duquel un individu fait
partie des éléments constitutifs de l’état.Chaque état octroie le lien de nationalité selon ses propres
règles, soit en privilégiant le droit du sang, soit en favorisant le droit du sol. Le choix n’est pas
neutre et dépend de l’histoire du pays.
Ex: l’italie est un pays d’émigration, le pays privilégie donc le droit du sang; la France est un pays
d’immigration, elle favorise donc le droit du sol
Ce lien de nationalité apporte des conséquences importantes: le droit de vote, lien politique entre
l’individu et l’état; les obligations militaires, la protection diplomatique.
Qu’est-ce qu’une nation?
Groupement d’hommes ayant entre eux des affinités tenant à des éléments communs à la fois
objectifs (race, langue, religion, mode de vie) et subjectif (souvenirs communs, sentiments de
parenté spirituelle, désirs de vivre ensemble) qui les unissent et les distinguent des hommes
appartenant aux autres groupements nationaux.
L’état est toujours la personnification de quelque chose. Lorsqu’il est apparu d’un point de vue
historique, il est vu comme un instrument d’unification et de personnification de la nation (ex:
naissance de l’État Français).
Mais dans d’autres cas, il est apparu comme le moteur de la création d’identité nationale (ex: USA,
Canada). Dans d’autres cas, c’est la conséquence de l’unité nationale (ex: Italie unifiée en 1860,
Allemagne).
Il existe cependant des états sans nation, car la population n’est pas arrivée à un certain niveau
d’unité (ex: Inde, Brésil) ou qu’ils sont un simple support à une indépendance ou une certaine
souveraineté (ex: Monaco, Vatican). Il existe des états multinationaux (Fédération de Russie, états
multiconfessionnels).
Il existe également des états purement confessionnels (Israel) ou encore des nations sans état (ex: la
Palestine).
Si l’état n’est pas toujours la personnification d’une nation, la nation occupe tout de même une
place très importante car elle fonde dans la quasi totalité des cas la légitimité profonde d’un état.
- la souveraineté
Pour qu’il y ait juridiquement état, il doit exister une puissance publique qui s’exerce
supérieurement à tous les individus. La souveraineté est un attribut exclusif de l’état. Elle désigne le
caractère suprême du pouvoir étatique, « suprême en ce que ce pouvoir n’est admet aucun autre au
dessus de lui ni au dessus de lui. » CdM
La souveraineté est un monopole, « le monopole de la contrainte organisée » selon Max Weber. Seul
l’état a le pouvoir d’édicter des règles de droit et de les faire respecter. Il n’y a que l’état qui
possède le droit de rendre justice (prison, policiers…). La souveraineté est donc une puissance
indépassable qui s’exerce sur tous les individus qui sont soumis à ce pouvoir. Cette puissance
publique doit être organisée. Cette organisation a pour but de créer une volonté capable de prendre
des décisions pour le compte de la population et ainsi poursuivre les intérêts généraux. Il faut donc
un appareil gouvernemental disposant du monopole de commandement et de coercition sur les
territoires et la population. Cet appareil gouvernement a le pouvoir de fixer les règles de
comportement des individus, c’est ce que l’on appelle le pouvoir normatif. Il dispose aussi du
pouvoir de fair respecter ces règles, d’en imposer le respect. Seul l’état détient l’usage légitime de la
force, à savoir l’administration, les forces armées et la police. Lorsque les individus ont besoin de
faire respecter un droit, ils doivent avoir recours à l’état (les règles qu’ils ont eux-même fixé dans le
cadre d’un état démocratique).
La souveraineté peut être définie comme la source du pouvoir dans l’état. Plusieurs théories ont été
élaborées en ce qui concerne les titulaires de la souveraineté. Depuis la révolution, la France oscille
entre souveraineté nationale et souveraineté populaire. AU final, elle est parvenue à combler les
deux dans la constitution de 1958.
Les exercices du pouvoir politique et l’attribution du droit de vote dépendent de ces choix, cela
n’est donc pas anodin.
L’état est une personne morale juridique souveraine. Le fait qu’il possède une personnalité juridique
ne permet en rien de le distinguer des autres sujets de droit. Ce qui fait de lui un sujet de droit à part,
unique, c’est qu’il est le seul détenteur de la souveraineté. En tant que souverain, l’état ne reconnait
aucun pouvoir au dessus de lui au concurrent. Le pouvoir souverain est le plus élevé qui soit.
« La souveraineté, c’est le caractère suprême d’un pouvoir (sulma protestas): sup^reme en ce que ce
pouvoir n’en admet aucun ni au dessus de lui ni en concurrence avec lui) - Carré de M
En ce sens, la souveraineté de l’état s’affirme aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur. On parle de
souveraineté interne ou externe.
- La souveraineté interne
Georges Vedel: « La souveraineté interne recouvre l’hypothèse où le pouvoir n’a point d’ego mais
seulement des subordonnés »
Dans la sphère interne, l’état détient une puissance qui ne peut être égalée par aucun autre pouvoir,
il n’a que des « soumis », des subordonnés.
On trouve au sein de cet état des fonctions régaliennes (appartenant au roi à l’époque) comme le
maintien de l’ordre (police, armée, défense), le fait de battre la monnaie, la détention de la justice.
Seul l’état souverain peut exercer ces fonctions.
- La souveraineté externe
Elle se comprend au regard des autres états. On parle de souveraineté externe entendue dans le sens
d’indépendance de l’état à l’égard des autres états: il n’est assujetti à aucune autre puissance. Dire
qu’un état est souverain ne signifie pas l’état est supérieur aux autres états. Cela signifie qu’en vertu
de son pouvoir suprême, l’état n’admet aucune autorité au dessus de lui. Il n’existe pas de lien de
subordination entre lui et les autres états, et que tous les liens que l’état pourrait mettre en place ne
sont que des liens librement choisis par lui.
Dans le cas de l’Union Européenne par exemple, c’est l’État qui choisit volontairement de renoncer
à une partie de ses fonctions régaliennes pour la création d’une monnaie commune gérée par l’état.
La souveraineté externe de l’état rencontre des limites sur le plan international. La première limite
est, de fait, la souveraineté des autres états. Il y a ensuite les conventions que l’état accepte de
conclure, et enfin les transferts de compétences auquel il consent.
La souveraineté désigne la source du pouvoir dans l’état. Il reste donc à déterminer quelle est cesse
source, qui est le souverain, le titulaire légitime de la puissance d’état. En France, à partir de la
période révolutionnaire où fut abattue la souveraineté royale de droit divin, plusieurs théories ont
été élaborées et confrontées afin de substituer la souveraineté de la nation à la souveraineté royale,
celles du peuple ou de la nation.
Pour éviter toute confusion concernant ces théories, il faut faire une distinction claire entre le
souverain lui-même, source de pouvoir, et le ou les organes chargés d’exercer le pouvoir.
Jean Bodin, Les six livres de la république, 1576, est considéré comme le théoricien de la
souveraineté royale et du pouvoir absolu. En s’inspirant de Machiavel, il rationalise et théorise cette
souveraineté. Pour lui, la source de cette souveraineté est Dieu, elle est confiée au Prince qui est
soumis seulement aux lois divines et naturelles. Il a donc le pouvoir absolue. Cette souveraineté est
définie comme une puissance « absolue et perpétuelle ».
Le régime correspondant est la monarchie absolue de droit divin, à savoir l’Ancien Régime.
Au XVIIIème siècle, les philosophes libéraux réfléchissent au moyen de mettre fin à l’absolutisme
royal en différenciant la fonction monarchique de la souveraineté. Ils dissocient donc la personne du
roi du pouvoir de commander.
Mais si le roi n’est pas le souverain, au nom de qui la puissance publique est-elle exercée, quelle est
la source naturelle du pouvoir? Le peuple ou la nation? Les deux réponses sont proposées par les
théoriciens.
Il nait un véritable clivage entre ceux qui pensent que la source du pouvoir est le peuple et ceux qui
pensent que c’est la nation. Ce clivage se manifeste dès les premières constitutions révolutionnaires
en France.
- La souveraineté populaire
Dans l’antiquité grecque, on retrouve les prémices de l’idée selon laquelle le peuple est la source de
pouvoir. Mais cette idée est officiellement théorisée par Rousseau au XVIIIème siècle. Cette idée
est reprise par les révolutionnaires les plus dogmatiques.
Selon cette théorie, le peuple, composé de personnes physiques qui vivent sur le territoire de l’état,
est la source de la souveraineté. Chaque individu, citoyen qui compose le peuple, en détient une
fraction, une parcelle dans une parfaite égalité. Cela lui permet donc de participer à l’élaboration de
la volonté générale, à travers la loi ou la constitution. Pour autant, la souveraineté demeure
indivisible, elle appartient à tous les citoyens. Les organes chargés de l’exercice du pouvoir doivent
émaner du peuple souverain. En principe, c’est l’assemblée des citoyens qui gouverne directement,
sur le modèle de la cité grecque. Mais pour des raisons pratiques, les citoyens peuvent décider de
transmettre, confier l’exerciez du pouvoir à des délégués qui l’exercent au nom du peuple. Ces
délégués doivent être réunis en assemblée unique. Qu’il s’agisse de citoyens ou de délégués, ils
représentent l’assemblée populaire
Le régime correspondant est la démocratie directe, ou du moins, la démocratie semi-directe. Dans le
cadre de la démocratie directe, les citoyens élaborent eux-même les lois et prennent les décisions
nécessaires pour l’ensemble de l’état. Les pouvoirs sont réunis, alors ils exécutent également ces
lois. Mais si le territoire de l’état est trop étendu ou les questions trop complexes, il faut
s’accommoder de la délégation des pouvoirs. Les citoyens confient aux délégués le soin de parler en
leur nom pour faire surgir l’assemblée générale. Cependant, le peuple conserve la possibilité de
s’exprimer par le biais de référendums. Étant donné que la souveraineté est indivisible, Jean-
Jacques Rousseau ne conçoit ni représentation ni séparation des pouvoirs. Les délégués reçoivent un
mandat impératif, ils sont soumis aux instructions du peuple et ils peuvent être révoqués par la
révocation populaire. Les délégués sont élus dans le cadre de l’électorat de droit. Le vote est un
droit que possèdent tous les citoyens car ils disposent d’une parcelle de souveraineté. Le suffrages
donc universel car tous les citoyens hommes sont égaux.
Le régime correspondant à cette théorie, avec un pouvoir concentré dans les mains de l’assemblée,
est celui de la convention en 1792, qui met en place la théorie de Jean-Jacques Rousseau. On
retrouve ce type de régime dans la constitution montagnarde jamais appliquée de 1793. Des
mandats impératifs pouvant être révoqués, une assemblée monocamérale, une absence de séparation
des pouvoirs…
- la souveraineté nationale
La théorie de la souveraineté nationale est éllaborée au XVIIIème siècle par l’abbé Sayès, à partir
des idées de Montesquieu. Cette théorie a permis aux révolutionnaires modérés de justifier
l’abolition de monarchie absolue en dissociant la puissance de l’état de la personne du roi, mais
sans pour autant confier le pouvoir au peuple, car on s’en méfie, compte tenu de sons absence de
culture civique. Une entité abstraite et fictive est conçue: la nation, afin de donner une permanence
au pouvoir et soustraire la souveraineté étatique aux lois.
La nation est la source de la souveraineté, au nom de laquelle le pouvoir doit être exercée. La nation
est une entité abstraite, collective, indivisible et distincte des individus qui la composent. Elle est la
source du pouvoir. Selon l’abbé Sayès, la nation est une personne morale dotée de sa propre
volonté. La souveraineté est unique, inaliénable (elle ne peut être cédée), indivisible et
imprescriptible (on ne peut pas la retirer). En tant qu’entité abstraite, la nation a forcément besoin
de s’exprimer par ses représentants qui sont des personnes physiques, qui parlent et décident en son
nom. Donc, les représentants de la nation sont les organes chargés d’exercer les pouvoirs. La nation
est représentée par des députés réunis à l’assemblée nationale (qui vient de nation) et par un organe
chargé du pouvoir exécutif qui pourrait être un président dans le cadre d’une république ou un roi
dans le cadre d’une monarchie. En effet, la souveraineté nationale s’accommode de la monarchie,
contrairement à la souveraineté populaire, mais cette monarchie ne peut être absolue.
Le régime correspondant est forcément un régime représentatif. Ce ne peut être un régime directe
dans le sens où la nation est une idée abstraite. Les députés, élus pour représenter la nation en
fonction de leurs compétences, n’ont de compte à rendre qu’à la nation et ne peuvent pas être liés
par des obstructions ou des directives de leurs électeurs. C’est donc un mandat représentatif, et non
impératif. Il n’y a pas de révocation. Ce régime suppose la séparation des pouvoirs, qui peut prendre
la forme d’une république ou d’une monarchie.
Dans le cas d’une monarchie, le choix des représentants exécutifs se fait au hasard par la règle de
l’hérédité, tandis que le corps législatif est élu. Ici, c’est un électorat de fonction, l’objectif est de
choisir les meilleurs pour représenter la nation, il doit s’agir d’individus éclairés. Cette fonction
peut être confiée à tous les citoyens par le suffrage universel, ou à certains citoyens seulement, avec
un suffrage restreint. Deux critères peuvent entrer en compte pour choisir les électeurs, les
compétences (utilisé sous le directoire, on parle de suffrage capacitaire) ou la fortune (le suffrage
censitaire).
Ces deux théories concernant la source du pouvoir s’opposent depuis la révolution, mais la
constitution de 1958 représente un compromis.
Depuis 1789, les deux théories ont été appliquées et mises en oeuvre en France avec la succession
de régimes politiques différents (Consulat, monarchie constitutionnelle, empire, République). Étant
donné que la théorie de la souveraineté nationale avait été inventée pour reprendre au roi le pouvoir
absolu, c’est cette théorie qui a le plus été mise en oeuvre dans les différents régimes, celle qui a
prévalu en France après la révolution. La déclaration des droits de l’homme et du citoyen reprend
cette théorie dans l’article 3 - le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation.
L’évolution constitutionnelle française aboutira en 1946 avec la IVème République puis en 1958
avec la Vème République, à la combinaison des deux théories, tout en renforçant le poids du
peuple.
L’article 3 de la constitution de 1958 dispose que la souveraineté nationale appartient au peuple qui
l’exerce par ces représentants et par la voix du référendum.
L’article 27 dispose que tout mandat impératif est nul, la souveraineté nationale est donc préservée.
4. La fonction de l’état
L’état ne constitue jamais sa propre finalité, c’est un instrument pour poursuivre le bien commun,
l’intérêt général. C’est une entité abstraite dont les actes sont pris au nom du peuple par les
gouvernants. Il est possible de classer ces actes, une classification par fonction. De manière
classique, on distingue les fonctions de l’état en deux grandes catégories: les fonctions primaires,
qui sont directement attachées à sa nature, à son pouvoir de contrainte, qu’on peut également
appeler fonctions juridiques; et les fonctions secondaires, où l’état agit plutôt comme
administrateur, plus qu’en tant que pouvoir pur, il s’agit des fonctions politico-sociales de l’état.
- L’état gendarme
Cette conception de l’état correspond à la période de l’état libéral, qui débute à la chute de l’empire
et de la restauration et qui se clos à la fin des années 1920. Dans la période terminale, l’Europe
occidentale et les états-unis sont secoués par une crise économique importante: la crise de 1929. La
crise est accompagnée par des changement doctrinaux profonds (doctrines économiques comme
celle de Keynes, des doctrines politiques).
La période est marquée par l’idéologie libérale économique et politique. D’un point de vue éco,
cette idéologie est une réaction contre le mercantilisme protectionniste. Le libéralisme fait
confiance à l’individu, à son ingéniosité, à sa créativité; elle récuse le plus possible l’intervention de
l’état et prône la liberté. Du point de vue des fonctions de l’état, cette théorie met en avant l’état
minimum, gendarme, qui doit être limité à ses fonctions régaliennes (la défense, l’ordre public, les
relations internationales, la battue de la monnaie); il doit intervenir seulement si son action est
indispensable pour assurer le minimum de règles nécessaires à la vie en société. À ce libéralisme
dominant a été associé la consécration du parlementarisme, l’idéologie trouve sa meilleure
expression dans le système représentatif, dans un régime parlementaire. Dans cette période, le
régime est divisé entre l’aristocratie (grandes familles soutenues par le monde paysan) et la
bourgeoisie (industriels et commerçants). L’aristocratie soutien la couronne, l’exécutif, tandis que la
bourgeoisie se range du côté du parlement, élu par le suffrage censitaire.
L’État doit donc assurer les taches régaliennes, rattachées à la souveraineté (maintien de l’ordre à
l’intérieur et à l’extérieur des frontières, relations étrangères…). Cette conception devient
rapidement obsolète car l’état ne peut se contenter d’assurer seulement l’ordre.
Dès le milieu du XIXème siècle, on demande à l’état de corriger les injustices sociales, donc autre
chose, qui sortait de ces fonctions. Dès cette période, l’état commence à accepter certaines missions
qui dépassent ses fonctions régaliennes, telles que l’instruction publique, la santé. Mais ce n’est
qu’au début du XXème siècle, après la 1GM, qu’une autre conception des fonctions de l’état
s’affirme: la conception de l’état providence.
- L’état providence
L’état providence se développe après la 1GM, l’idée est celle d’un état qui s’implique dans la
société et qui intervienne dans tous les domaines pour réduire les abus et injustices sociales, de
compenser les inégalités.
La 1GM, comme tout conflit majeur, a conduit à l’accroissement des dépenses publiques et du rôle
de l’état (donc plus d’impôts). Un état interventionniste succède à l’état libéral, qui a du gérer la
guerre et le redressement économique à la sortie du conflit. L’entre-deux guerres est marqué par de
profonds bouleversements, institutionnels, économiques et idéologiques.
Le libéralisme issu du courant des lumières se trouve confronté au courant marxiste-léniniste (une
doctrine qui place l’homme au centre de la société, supprimant les intermédiaires entre l’homme et
l’état et le plaçant en pièce d’une collectivité).
D’un point de vue constitutionnel, le pouvoir parlementaire va être restreint au profit de l’exécutif,
il perd beaucoup de ses prérogatives, notamment celles concernant les finances. Cela est du à la
faiblesse et la corruption des parlementaires durant la période libérale.
En 1929, l’Europe occidentale et les états-unis connaissent une crise économique majeure, qui a mis
en évidence que si l’état ne s’impliquait pas dans l’économie, laissant jouer la loi du libéralisme de
marché, cela risquait d’entrainer des conséquences dramatiques. Après cette crise, l’état interviendra
de plus en plus massivement dans l’économie. Cela se manifeste par la vague de nationalisation à
partir des années 1930 (aéronautique, transport ferroviaire, banque de France). Après la guerre,
l’état fait un effort pour redresser l’économie à travers cet élan de nationalisation. L’idéologie
socialiste se développe à cette période.
L’idée d’assistance s’étend, l’état prend l’habitude de secourir le peuple, via les hôpitaux, écoles,
hospices. Ce mouvement se poursuit par la mise en place de subvention d’entreprises et
d’allocations pour compenser les injustices. Il intervient dans l’économie à travers une série de
mesures qui ont une véritable incidence.
À cette époque, l’état met en place le système de sécurité sociale, d’assurance vieillesse,
d’allocations familiales: l’état social s’implante. Pour réprimer les injustices sociales, les
législateurs légifèrent en fixant les prix de certaines denrées pendant la guerre, les prix ne sont plus
soumis à la concurrence et à la règle de l’offre et de la demande. Pour réduire ces injustices, l’état à
recours à l’impôt, qui sert non seulement à financer les nouvelles dépense de l’état mais aussi à
inciter certaines activités à intervenir contre les injustices sociales.
Nous assistons à une tendance générale d’élargissement des compétences de l’état, jusqu’au
domaine du divertissement (audiovisuel, art…). Ce processus éloigne la doctrine de l’état
gendarme.
Les fonctions politico-sociales de l’état se sont donc élargies.
- La fonction législative
Def: fonction de faire la loi, d’édicter des mesures qui s’imposent aux individus et qui peuvent
modifier leur situation juridique.
Il existe des situations où le peuple est associé à l’assemblée parlementaire pour la fonction
législative, on parle de gouvernement semi-direct: le peuple est appelé pour les décisions les plus
importantes. Trois méthodes existent: le droit de véto du peuple, l’initiative populaire ou le
referendum. Le veto est l’intervention du peuple durant l’adoption de la loi, qui est élaborée par les
assemblées parlementaires qui peut entrer en application si le peuple n’a pas posé son véto.
L’initiative populaire offre au peuple la possibilité de demander l’adoption d’une loi; dans ce cas là,
les assemblées doivent tenir compte de cette initiative, l’accepter ou la refuser. Enfin, le referendum
est une ameuter dans laquelle un texte est soumis à l’approbation populaire: cela peut être pour
abroger ou adopter une loi élaborée par les chambres. L’initiative et le referendum peuvent se
combiner.
Il arrive que le gouvernement, organe exécutif, puisse assumer un rôle législatif et devenir un
organe législatif partiel. Cela arrive lorsque le consentement du gouvernement est requis pour
l’adoption d’une loi. Aujourd’hui, les exécutifs interviennent dans l’élaboration de la loi avec
l’initiative: on parle de projet de loi (et non pas proposition de loi), un projet de loi dont le
gouvernement est à l’initiative. Il peut également intervenir durant la composition de la loi. Enfin, il
possède également un droit de véto, comme aux États-Unis où le président peut s’opposer à
l’adoption d’une loi.
- La fonction exécutive
La fonction exécutive a beaucoup évolué dans le temps. À l’origine, elle se résumait à une
exécution stricte des lois, le pouvoir exécutif mettait en place des actes individuels, non-généraux et
concrets (à l’inverse des lois générales du corps législatif). Trois raisons ont amené l’évolution.
Avec l’élargissement des fonctions de l’état, les législateurs ont été limité, dans l’impossibilité de
produire toutes les règles nécessaires à l’encadrement de tous les aspects de la société. De plus, le
pouvoir exécutif s’est vu confié certains domaines tels que la conduite des relations internationales,
car elle nécessite de la rapidité et du secret. Il est donc devenu difficile de limiter l’exécutif à sa
fonction d’exécution simple des règles. Enfin, lors du consulat en 1799, le pouvoir exécutif s’est vu
confié l’initiative des lois, car l’exécutif représente la tête de l’administration, il est donc plus à
même de définir les besoins et difficultés de mise en oeuvre des lois, en tenant compte des
contraintes techniques. Le pouvoir exécutif a donc élargi ses compétences; aujourd’hui, lorsqu’on
parle de pouvoir exécutif, on parle d’exécution des lois, de direction d’administration mais aussi de
conduite des relations internationales et d’initiative des lois (90% des textes).
Le pouvoir de l’exécutif s’est considérablement accru au fil des années. Mais dans la hiérarchie des
normes, le pouvoir réglementaire est toujours subordonné au pouvoir législatif (les décrets des
ministres sont toujours soumis à la loi).
Lorsqu’on parle de pouvoir exécutif, on réserve cette expression aux organes suprêmes. Il existe
plusieurs formes de pouvoir exécutif, il peut être moniste ou dualiste.
L’exécutif moniste est un exécutif qui comporte un seul organe (ex: le président des États-Unis, qui
n’a pas de premier ministre). Il existe dans les régimes présidentiels comme le régime des États-
Unis, les autorités sont étroitement soumises au chef de l’état qui encadre le pouvoir exécutif. Les
secrétaires d’état ne sont pas autonomes, ils sont liés au chef de l’exécutif.
L’exécutif dualiste est un exécutif à deux têtes, bicéphale: un chef de l’état et un Premier ministre
avec ses ministres. C’est le cas des régimes parlementaires (France, Italie, Espagne). Ce système est
né lorsque le chef de l’état était un roi et qu’il est devenu un organe législatif partiel, il a fallu
garantir son inviolabilité et son irresponsabilité (il n’est pas politiquement responsable de ces actes),
il a fallu faire endosser cette responsabilité à un nouveau corps: les ministres. L’acte du roi devait
être signé par le roi et par un ministre qui le contre-signe. Ainsi, le roi ne peut pas être renversé. Ce
dualisme est typique du régime parlementaire.
Aujourd’hui, la fonction de ce dualisme permet de garder une certaine continuité à la tête de l’état
malgré les changements de ministère. Le chef de l’état ne change pas alors que le Premier ministre
et son gouvernement peuvent changer. C’est également un moyen de distribuer les taches.
Dans un pays comme la France où la place du chef de l’état a été renforcée au fil du temps, le rôle
du président diffère de celui d’autres républiques comme celle d’Italie.
Dans les organes suprêmes, il y a la tête de l’exécutif et les ministre.
Il existe des organes subordonnés, tels que l’administration, composée essentiellement de
fonctionnaires. Le pouvoir exécutif est un pouvoir unique, cette unité vient de la hiérarchie qui
existe, c’est à dire qu’il y a une hiérarchie entre les organes suprêmes et subordonnés qui sont liés
par un lien à leurs ministres, leur tutelle (ministère d’appartenance). Les professeurs d’université
font exception et sont indépendants, c’est un principe constitutionnel.
Les ministres constituent l’élément suprême de cette hiérarchie, ils sont placé à la tête d’un
ministère spécialisé, leurs décisions et actes doivent être respectés par les organes subordonnés.
Chap 2:
3. Le principe de constitutionnalité
Charle Eisemann (professeur de droit et consitutionnaliste) utilise pour la première fois le « principe
de consitutionnalisté » dans sa thèse. Son expression sera reprise par de nombreux chercheurs tels
que Luis Favoreux. Il rapproche cette expression de la signification d’égalité.
« Tout comme le prince de l’égalité signifie que seule la loi peut déroger à la loi, le principe de
constitutionnalité signifie que seule une loi constitutionnelle peut déroger à une loi consitutinelle ».
Il lie ce principe à la justice constitutionnelle, comme un juge qui fasse respecter la constitution et
en sanctionne les violations. Sans l’introduction d’une justice constitutionnelle, les règles de la
constitution n’auraient aucune valeur juridique.
Il faut attendre le … siècle
Au États-Unis, dès le XVIIIème, le principe de constitution et de constitutionnalité apparait. En
France, il faudra attendre la constitution de 1958.
La substition du principe de la constitutionnalité par l’égalité s’est faite en Allemagne et en Italie
pour faire rempart contre un retour des totalitarismes. Nous sommes donc passé d’un état légal à un
état de droit.
Mais dans l’état de droit, l’état lui même, le pouvoir, est soumis au droit. Il existe donc un système
de normes suffisamment claires et précises avec au sommet une constitution valide et respectée qui
s’impose non seulement aux gouvernés mais aussi aux gouvernants eux-même. L’État de droit
laisse une marge infime à l’arbitraire et à l’abus.
Le constitutionnalisme rejoint l’idée de l’état de droit, il insiste sur la suprématie de la constituions
et le respect des droits fondamentaux, tandis que l’état de droit se concentre sur l’idée de la
formalisation du droit et insiste sur le contrôle juridictionnel des actes supérieurs par les actes
inférieurs.
Selon cette définition normative, la constitution est la norme suprême. Pour le démontrer, il faut
d’abord revenir sur la notion de norme juridique.
La norme est la signification d’un énoncé prescriptif, et non pas descriptif. Plus exactement, sa
fonction spécifique n’est pas de décrire la réalité, mais de commander ou interdire certains
comportements.
Le système normatif est un système de normes globalement efficaces et sanctionnelles.
Il faut savoir si un système est juridique, si il appartient au droit. Pour considérer qu’un énoncé est
une norme juridique, il faut qu’il appartiennent à un système normatif donné. Il faut donc lui trouver
un critère d’appartenance. L’une des propriétés fondamentales des normes est de ne pas pouvoir être
dérivée de prémices purement factuelles ou descriptives (elles ne peuvent pas dériver des faits).
Il ne peut y avoir de norme que si il existe déjà une autre norme qui lui accorde cette qualité.
On suppose l’existence d’une première norme (on ne peut pas remonter le système à l’infini) d’où
dérive la normativité du système.
Kelsen l’appelle la grande norme, la norme fondamentale, qui a pour objet l’attribution de la
normativité.
Tout système normatif est nécessairement hiérarchisé. Sans cette hiérarchie, il ne serait pas possible
de distinguer les normes valides de celles qui ne le sont pas. Dans cette hiérarchie, il faut trois
niveaux. La constitution est de niveau 1, placée au sommet du système. La loi appartient au niveau
2; les décrets et actes du gouvernement sont de niveau 3.
C. Le contenu du principe de constitutionnalité: la constitution française, le bloc de
constitutionnalité
À l’origine, cette constitution a été adoptée sous la forme de 92 articles précédés d’un cours
préambule. Aujourd’hui elle en comporte 89. Ces articles contient l’organisation des relations et des
pouvoirs, ainsi que la procédure législative des normes, elle partage le domaine de la loi et du
règlement. Elle contient aussi des dispositions relatives aux normes internationales et des normes
relatives à leur insertion.
Ce texte de 1958 rédigé par De Gaulle et Debré était quasiment muet sur les droit fondamentaux.
C’est pas l’oeuvre jurisprudentielle du conseil constitutionnel que la constitution s’est élargie au fur
et à mesure, pour devenir le bloc de constitutionnalité.
Cette expression est doctrinale, forgée par les doyens de Favoreux, qui désigne « l’ensemble des
principes et des règles à valeur constitutionnelle, dont le respect s’impose au pouvoir législatif
comme au pouvoir exécutif, et d’une manière générale à toutes les autorités administratives et
juridictionnelles, ainsi, bien sûr, qu’aux particuliers » - Louis Favoreux
Cet ensemble de normes à valeur constitutionnelle sert de référence au juge constitutionnelle pour
affirmer la conformité de la loi. Le contenu du bloc s’est formé au fur et à mesure par différentes
étapes, sa formation n’est pas arbitraire mais jurisprudentielle.
Une étape décisive est franchie en 1971 grâce à la liberté d’association.
71-44 DC (décision de contrôle de constitutionnalité): liberté d’association
Cette décision est la première décision dans laquelle le conseil contrôle une loi qui violait la liberté
d’association (qui n’était pas contenue dans la constitution de 1958). Elle est très importante dans la
formation du préambule car le conseil affirme que le préambule de la constitution de 1958 possède
une valeur équivalente à tout le reste de la constitution.
Le préambule est composé de deux phrases, dont une qui affirme « le peuple français proclame
solennellement son attachement aux droits de l’homme et au principe de la souveraineté nationale
tels qu’ils ont été définis par la déclaration de 1789, confirmée par le préambule de la constitution
de 1946 »
En visant la constitution et son préambule, et en considérant que la liberté d’association était un
principe fondamental reconnu par les lois de la république, le conseil lui concède une valeur
constitutionnelle à laquelle il se réfère. Dès 1971, on voit apparaître la valeur constitutionnelle du
préambule de 1958 et de 1946 (ce dernier se réfère aussi aux principes fondamentaux de la
république).
La décision de 1971 constitue la première étape et reconnait la liberté d’association comme une
liberté à valeur constitutionnelle