Fatigue Des Materiaux 2
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Fatigue Des Materiaux 2
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sous la direction de
Claude Bathias
André Pineau
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Géomatériaux
Matériaux de construction
Matériaux et métallurgie
Matériaux fonctionnels
Mécanique des fluides
Méthodes numériques en mécanique
Physique et mécanique des surfaces
Les savoirs, théories et méthodes rassemblés dans chaque ouvrage ont été
choisis pour leur pertinence dans l’avancée des connaissances ou pour la
qualité des résultats obtenus.
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Liste des auteurs
Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
Paul C. PARIS
Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249
Although fatigue of materials has been studied for over 150 years many
significant approaches were developed after the first one 100 years had past. In the
1950s especially the Coffin-Manson “plastic strain cycling approach” for low cycle
failures and later the beginning of the “damage tolerance approach” through the
fracture mechanics correlation of crack growth rates were suggested. Indeed those
fracture mechanics methods were shown applicable in the late 1950s but were
frequently ignored for many years until the failure of an F-111 aircraft in December
1969 convinced the US Air Force to develop and use damage tolerance methods on
all aircraft. The US Federal Aviation Agency was soon to follow requiring similar
methods of assuring a sufficient crack growth life to permit setting adequate
inspection intervals on critical structural parts. Earlier in the 1960s Westinghouse
and others made use of fatigue crack growth testing to assure sufficient life for
various power generating systems. Since that time many new applications of these
newer methods have been developed. Still more recently Bathias and others have
shown that the “traditional fatigue limit stress” below which failures were regarded
as not occurring have been shown to be not safe for “very high cycle fatigue” of the
order 108 to 1010 to cycles of loading. This is accomplished by ultrasonic testing at
20 to 30 kHz. This field is still rapidly developing but thoroughly covered herein.
Further discussion of the historical aspects are detailed in the Introduction, Chapter 1.
16 Fatigue des matériaux et des structures 2
The second volume contains further new analysis methods, as well as, many
topics associated with critical applications such as high temperature thermal effects,
notch effects, contact effects, etc. as they occur in practice. They fully supplement
the fundamentals of the first volume.
As a veteran of this field allow me to point out the excellence of the work of
some of the outstanding young stars of this field, such as Sylvie Pommier and
Thierry Palin-Luc, who contributed Chapters 9 and 12. Although these volumes will
present the up to date and current state of understanding, this field has many such
outstanding young researchers who will develop new approaches as time passes.
However these volumes stand as a full exposition of the current “state of the art” in
understanding fatigue phenomena.
Paul C. PARIS
Chapitre 7
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7.1. Introduction
Ces divergences ont des conséquences sur le plan pratique. La plus grande partie
de la durée de vie des pièces en service est consommée dans le régime des fissures
courtes, en particulier dans le domaine des grands nombres de cycles. Les durées de
vie prédites par des méthodes de calcul basées sur la MLER surestimeront donc les
durées de vie réelles si l’on veut prendre en compte des défauts initiaux de petite
taille. D’autre part, l’amplitude de contrainte au seuil de propagation sera inférieure
à la résistance en fatigue mais aussi à la valeur calculée avec le seuil des fissures
longues, Δ Kth.
sont attribuées, selon les cas, à une ou plusieurs des conditions suivantes, qui
remettent en question le principe de similitude à la base de la MLER :
– la fissure est de taille comparable à la taille du grain ou à une autre dimension
caractéristique de la microstructure ; sa propagation est très sensible à
l’hétérogénéité de la microstructure ; la mécanique des milieux continus n’est pas
applicable à cette échelle ;
– la condition de plasticité confinée en fond de fissure n’est plus respectée. A
cause d’un niveau de contrainte élevé, proche de la plasticité généralisée, ou d’une
entaille qui cause une concentration de contrainte, la fissure courte peut être
entourée d’une zone plastique de dimension comparable ou supérieure à sa taille ;
– même en régime élastique, les champs de contrainte et de déformation au fond
d’une fissure dont la profondeur tend vers zéro ne sont plus décrits par le terme
singulier en r-1/2 qui définit le facteur K ;
– la fissure courte a un sillage limité et les mécanismes de fermeture n’ont pas
encore pu se développer, notamment la fermeture induite par la déformation
plastique résiduelle sur les lèvres de la fissure.
Les auteurs utilisent une terminologie variée pour distinguer différents types de
fissures courtes. Nous utiliserons ici le terme de fissure « microstructurellement
courte » lorsque la première condition est évoquée et celui de fissure
« mécaniquement courte » pour les trois autres conditions, tant qu’elles relèvent de
considérations mécaniques macroscopiques. Notons aussi d’autres termes utilisés
dans la documentation, par exemple [CLU 92, EVI 98] :
– fissure « physiquement courte » pour évoquer la quatrième condition ;
– « petite fissure » (small crack) au lieu de « fissure courte » (short crack) pour
préciser que la fissure est petite dans les deux dimensions (profondeur et largeur) ;
– fissure « chimiquement courte » lorsque les effets d’environnement sont
amplifiés aux faibles profondeurs de fissure.
Afin de mieux éclairer le lecteur non familier avec le sujet, nous présentons
d’abord quelques considérations théoriques qui mettent en évidence les limites de la
MLER à décrire le comportement des fissures courtes, depuis un bord lisse ou
depuis un fond d’entaille. Nous effectuons ensuite une revue des observations
Propagation des fissures courtes 19
SΔ =So Δ C te =
a2 = 10 d [7.2a]
a2 = 10 rp [7.2b]
σyc étant la limite d’élasticité cyclique du matériau. L’équation [7.2b] est une
condition de confinement de la plasticité en fond de fissure : la longueur de fissure
doit être un ordre de grandeur plus élevée que rp pour que la plasticité reste confinée
dans la singularité élastique. Cette condition revient aussi à borner le niveau de
contrainte nominale Δ S par rapport à la limite d’élasticité. En effet, l’équation [7.3]
peut se mettre sous la forme :
Propagation des fissures courtes 21
2
rp Y2 Δ S ⎛ ⎞
= ⎜ ⎟⎟
a 3 2 σ yc⎜
⎝ ⎠ [7.4]
où HV est la dureté Vickers du matériau et aire (μm) est la racine carrée de l’aire
du défaut projetée sur le plan perpendiculaire à la contrainte appliquée.
L’augmentation correspondante du seuil de propagation est donnée par :
Des résultats expérimentaux, dont nous discuterons plus loin, montrent que les
fissures courtes au fond d’entailles suffisamment sévères se propagent à des vitesses
initialement décroissantes, avant de réaccélérer et rejoindre la tendance des fissures
longues où da/dN est une fonction croissante de Δ K. Cependant, les fissures peuvent
devenir non-propageantes si le niveau de contrainte nominale est trop faible. Il
semble que ce soit Frost [FRO 59] en 1959 qui ait le premier mis en évidence ce
comportement, non prédictible par la MLER puisque Δ K croît toujours avec la
longueur de fissure si l’amplitude de contrainte nominale Δ S reste constante. A
l’aide d’éprouvettes en acier doux entaillées en V et soumises à la flexion rotative
(R= -1), il a montré que des fissures pouvaient s’amorcer mais qu’elles s’arrêtent
ensuite si le rayon de courbure ρ était suffisamment petit (voir figure 7.2 ; kt > 2.5
correspond à ρ < 600 μm).
22 Fatigue des matériaux et des structures 2
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Smith et Miller [SMI 78] ont proposé une interprétation théorique simple de ce
résultat expérimental. Considérons la situation d’une entaille de profondeur D
constante. Le facteur de concentration kt reste variable selon le rayon de courbure
choisi en fond d’entaille. La condition d’amorçage d’une fissure s’écrit :
Δ S0 [7.7]
SΔ ≥
kt
et est représentée par l’hyperbole sur la figure 7.2. D’autre part, le facteur d’intensité
de contrainte d’une fissure ayant dépassé le champ de l’entaille tendra rapidement
vers celui d’une fissure de profondeur D+a. Pour avoir rupture complète, cette
fissure devra aussi vérifier la condition de propagation :
Y S π ( DΔ a) K + Kth ≥ Δ ≥ Δ
soit :
Δ K th
SΔ ≥ [7.8]
Y πD
Propagation des fissures courtes 23
Y Δ S0⎛ ⎞
kt* = πD [7.9]
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⎜ ⎟
Δ K th ⎝ ⎠
Dans ce domaine, la contrainte nominale est suffisante pour que la fissure puisse
s’amorcer [7.7], mais elle est insuffisante pour qu’il y ait propagation jusqu’à la
rupture complète [7.8].
Notons aussi que, si D est variable alors que kt est constant, la contrainte de
propagation est supérieure à la contrainte d’amorçage lorsque l’entaille n’atteint pas
une certaine profondeur :
D* = kt2 a0 [7.10]
Des divergences entre les vitesses de propagation des fissures courtes et celles
des fissures longues ont été observées pour la première fois par Pearson en 1975
[PEA 75] dans un alliage d’aluminium. Il a trouvé que des fissures de surface de
taille comparable à la taille moyenne de grain se propageaient plus rapidement que
les fissures longues lorsque le paramètre de corrélation était Δ K. Plus tard, ce
phénomène a été rapporté pour différents matériaux et géométries, et ce, même au-
delà de l’échelle de la microstructure. Parfois cependant aucun écart notable entre
les vitesses des fissures longues et celles des fissures courtes n’est observé, comme
par exemple dans un superalliage à base de nickel et dans des aciers trempés et
revenus [LAN 85].
Pour un même matériau, les évolutions des petites fissures en surface présentent
beaucoup de dispersion. Les courbes A à E à la figure 7.3 sont une compilation
schématique de nombreux essais effectués par Lankford [LAN 85] sur la propagation
des fissures à l’échelle de la microstructure dans un alliage d’aluminium : vitesses
de propagation jusqu’à deux ordres de grandeur plus élevées que celles prédites par
24 Fatigue des matériaux et des structures 2
Les vitesses moyennes des fissures courtes sont sensibles au niveau de contrainte
appliqué puisque la pente des courbes S-N peut être très faible dans le domaine des
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Δ K , MPa m 1 / 2
Les fissures qui se propagent depuis le fond des entailles présentent des
divergences similaires sur un diagramme da/dN-Δ K (voir figure 7.4) mais les
mécanismes responsables sont différents. L’influence d’une entaille sera abordée au
paragraphe 7.3.4.
Propagation des fissures courtes 25
Δ K , MPa m 1 / 2
de façon monotone mais elle ne se comporte pas encore nécessairement comme une
fissure longue (voir paragraphes 7.3.3. et 7.4.2).
Des ralentissements et des arrêts ont été aussi observés sur la surface à l’intérieur
du grain. Ceux-ci ont été attribués à l’interaction entre la fissure et une discontinuité
de la microstructure sous la surface [LUD 03], à la variation de la forme du front de
fissure [PIN 86, TOK 87] et à la déviation de la fissure à l’intérieur du grain
produite par le changement d’orientation des bandes de glissement [GRA 92,
PED 88]. D’un autre côté, des fissures peuvent traverser un joint de grain sans
présenter aucune décélération (voir figure 7.3, courbe E). Le mécanisme de blocage
aux joints de grain est fonction des angles d’inclinaison et de rotation que font les
plans de glissement des grains adjacents avec le plan de la fissure [ZHA 05]. La
fissure passe d’un grain à l’autre seulement là où l’angle de rotation est très faible
[LUD 03].
K.J. Miller [MIL 93] montre comment la résistance en fatigue des échantillons
lisses et des pièces faiblement entaillées est contrôlée par les barrières
microstructurales du matériau. La résistance Δ So (voir figure 7.1a) correspond au
niveau de contrainte nécessaire pour qu’une fissure puisse franchir la plus forte
barrière. Sous ce niveau les fissures pré-existantes deviennent non propageantes et
ne sont donc pas dommageables [MUR 02]. Cependant la longueur a1 à la
figure 7.1(a) peut être supérieure à la taille de grain car les joints de grain peuvent ne
pas être les seules ni les plus fortes barrières ; la distribution d’une deuxième phase
dure peut réduire ou supplanter l’effet de la taille de grain. Dans les aciers ferrito-
perlitiques par exemple, les fissures traversent facilement les joints de grain α
jusqu’à ce qu’elles doivent interagir avec une bande de perlite [DAV 06, MUR 02].
d’autres matériaux (Ti-8.6 Al, acier à bas carbone) et elle est prédite par plusieurs
modèles du comportement des fissures courtes qui prennent en compte l’entrave de
la propagation par les joints de grain (voir paragraphe 7.5.1). Cependant, l’évidence
expérimentale n’est pas concluante. Aucun effet de la taille de grain n’a été observé
dans un alliage de titane Ti- 6Al-4V α/ß. Enfin, on a constaté une légère diminution
de la vitesse de propagation lorsque la taille de grain a augmenté de 12 à 130 μm
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dans un alliage d’aluminium 7075-T6 et une diminution plus importante dans l’acier
A533B [JAM 89].
La transition stade I-stade II a lieu en général aux tous premiers joints de grain
[EVI 98] mais des fissures cristallographiques présentant des interactions marquées
avec la microstructure (ralentissements aux joints de grain, front irrégulier) ont été
observées dans certaines conditions jusqu’à dix fois la taille de grain [RAV 97,
ZHA 02]. Un environnement inerte favorise une « longue » propagation en stade I
tandis qu’une contrainte moyenne de tension peut résulter en une transition stade I-
stade II plus rapide et même à une disparition du stade I [EVI 98, PAT 99]. Comme
pour les fissures longues, la transition aurait lieu à une longueur de fissure telle que
la taille de la zone plastique excède la taille de grain [HAL 99, LAN 85]. Dans ce
cas, la fissure ne se comporte plus comme dans un monocristal. On peut
effectivement concevoir que plusieurs systèmes de glissement doivent être activés
dans des grains adjacents pour que leurs déformations soient compatibles.
certaines études, elles semblent rejoindre la courbe da/dN-Δ K des fissures longues
[NEW 00]. Mais d’autres études montrent qu’elles peuvent être encore supérieures
aux vitesses des fissures longues à la même valeur de Δ K [ESP 95, LUO 04]. A
l’aide d’une technique indirecte exploitant la réponse de jauges de déformation
miniatures, Espinosa a effectué le suivi de fissures semi-elliptiques (0,7 < a/c <1,1)
se propageant entre 100 et 500 μm de profondeur à la surface d’un acier de
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construction offshore [ESP 95, VER 97]. Sur un graphe da/dN - Kmax, les vitesses de
ces fissures à R = 0 et R = -1 apparaissent entre une et deux décades au-dessus de
celles de fissures longues se propageant à bas niveau de contrainte (voir figure 7.5).
Outre les effets de fermeture qui seront abordés au paragraphe 7.4.2, de telles
divergences sont compréhensibles puisque, pour pouvoir appliquer la MLER, la
plasticité doit être confinée en fond de fissure (rp/a << 1) et être complètement
bridée par une région élastique. Or, comme il a été discuté dans le paragraphe 7.2.1,
cette condition n’est plus remplie aux hautes valeurs de contrainte nominale nécessaires
pour faire propager la fissure courte. La fissure est dite « mécaniquement courte ».
rapport de 1/4. Dans un article récent, Davidson résume les différences importantes
observées entre fissures courtes et fissures longues [DAV 04]. Il souligne qu’au
voisinage du seuil, le CTOD et la déformation en fond de fissure sont plus élevés
pour les fissures courtes que pour les fissures longues à la même valeur de Δ K, ceci
à cause de l’absence de la triaxialité des contraintes. Alors que les fissures longues
sont en déformation plane, les fissures courtes subissent un état de contrainte à peu
près plan tant qu’elles ne constituent qu’une petite perturbation dans un champ
uniaxial.
Les calculs par éléments finis montrent aussi que les zones plastiques se
développent plus facilement lorsque la fissure est courte, et qu’elles atteignent la
surface libre à charge élevée [CHI 82, ESP 95, RIT 87]. A la même valeur de Δ K, la
zone plastique d’une fissure courte a été huit fois plus grande que celle d’une fissure
longue [RIT 87], et des déformations plastiques plus importantes devant les fissures
courtes ont été rapportées [CHI 82, ESP 95]. La majoration de la déformation
plastique devant les fissures courtes, associée à des niveaux d’ouverture négatifs
(voir paragraphe 7.4.2), permet de concevoir des dommages plus importants et donc
des vitesses de propagation plus élevées. Espinosa [ESP 95] souligne le fait que la
déformation plastique devant les fissures courtes s’étale plus loin que devant les
fissures longues. L’endommagement pourrait donc commencer lorsque les éléments
de matière sont plus loin du fond de fissure. Un modèle de fissuration fondé sur le
cumul du dommage pourrait être une avenue de recherche intéressante.
7.3.3.2. La contrainte T
Un autre type d’idées a été avancé par certains auteurs pour expliquer le
comportement différent des fissures mécaniquement courtes. Même en élasticité
pure, le terme singulier en r-1/2 qui donne origine à K n’est plus suffisant pour décrire
les champs de contrainte et de déformation en fond de fissure. Il est nécessaire de
considérer aussi un second paramètre, la contrainte T, qui correspond au terme
d’ordre supérieur dans le développement de Williams de ces champs [LIN 95] :
K
σij r , ( ) f ij θ ( = ) T 1i 1j θ+ δ[7.11] δ
2π r
Propagation des fissures courtes 31
Par ailleurs, des analyses numériques [BLO 90] et des résultats de photoélasticité
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[SMI 88] pour des fissures de surface et des fissures bandes montrent la perte de la
dominance de la singularité en racine carrée des champs des contraintes et des
déformations dans l’intersection de la fissure avec la surface libre. Blom et
Anderson [BLO 90], en élasticité isotrope, montrent que cette situation persiste sous
la surface jusqu’à une profondeur d’environ 2,5 % l’épaisseur. Cette zone peut
contenir une fraction importante du régime des fissures courtes.
variable. A l’aide d’un microscope optique, ils ont observé des fissures bandes
pouvant présenter des comportements anormaux jusqu’à 8 mm de profondeur.
Cependant, aucune décroissance initiale de la vitesse n’est enregistrée dans les
entailles les plus douces, ni lorsque le rapport R est augmenté ;
– Espinosa et Verreman [ESP 95, VER 97] ont sollicité à R = 0 et R = - 1 des
échantillons d’acier doux de grande épaisseur qui permettent d’approcher un état de
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déformation plane. Leur profil est cruciforme où l’entaille est une marche en forme
de L ayant deux rayons de courbure possibles : 0.1 et 3 mm. Le champ d’entaille a
une faible profondeur, de l’ordre du millimètre, mais la majeure partie de la vie
totale est consommée à la traverser. Dans les échantillons à faible rayon de courbure,
ils ont observé des fissures bandes ou des fissures semi-elliptiques allongées se
propageant plus vite que les fissures longues et présentant des décélérations à R = -1
jusqu’à 0,3 mm de profondeur. Les échantillons de rayon de courbure 3 mm ont, en
revanche, un comportement s’approchant plus de celui observé sur bord lisse :
fissure unique à fort rapport a/c, vitesses de propagation élevées mais continuellement
croissantes (voir figure 7.5).
Cette proposition de Smith et Miller est a priori soutenue par certains résultats
expérimentaux. Leis a trouvé grosso modo une correspondance un pour un entre
l’étendue de la zone plastique et la longueur de transition où les fissures rejoignent
le comportement MLER, pour plusieurs géométries d’entaille, matériaux et niveaux
de chargement, les longueurs de fissure concernées variant de 50 μm à 12 mm
[LEI 82]. Verreman a aussi montré que la longueur de transition des fissures se
propageant au raccordement de joints soudés relaxés augmente avec le niveau de
chargement et se compare bien avec la taille de la zone plastique de l’entaille
[VER 86]. Par contre, d’autres auteurs ont rapporté que l’effet de fissure courte peut
persister au delà de cette zone [SHI 88]. Espinosa et Verreman [ESP 95, VER 97]
ont calculé avec précision par éléments finis 3D l’écoulement plastique autour de
Propagation des fissures courtes 33
leur entaille en forme de L : sa profondeur n’atteint guère plus de 0,1 mm aux plus
hauts niveaux de contrainte, alors qu’ils observent des décélérations de la
propagation jusqu’à 0,3 mm.
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Figure 7.6. Vitesse de propagation d’une fissure depuis le fond d’une entaille, d’après Smith
et Miller [SMI 78]. La force motrice est la somme des contributions de la plasticité de
l’entaille et de la plasticité de la fissure
U 0,5= 0, 4 R + [7.14]
Newman [NEW 81] a développé une méthode semi analytique pour calculer la
fermeture induite par la plasticité en fonction de R, du niveau de contrainte nominale
et de la triaxialité des contraintes. La méthode est basée sur un modèle de Dugdale
modifié pour laisser des étirements plastiques résiduels dans le sillage de la fissure.
La fermeture est plus importante en contrainte plane qu’en déformation plane mais
elle disparaît dans tous les cas à R suffisamment élevé (voir figure 7.7). Aussi, le
Propagation des fissures courtes 35
A l’heure actuelle, la méthode des éléments finis est un outil de plus en plus
utilisé pour modéliser la fermeture induite par la plasticité [SOL 04]. Des problèmes
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plus complexes ont été analysés (par exemple. influence de la géométrie, influence
de la consolidation) mais des progrès restent encore à faire (propagation d’une
fissure semi-elliptique, chargement d’amplitude variable).
Dans les échantillons lisses où la contrainte nominale est plus élevée, U reste
toujours égal à 1 à R = 0 et il est toujours supérieur à 0.5 à R = - 1, quelle que soit la
longueur de fissure. Ce comportement est prévisible par calcul (voir figure 7.7). Il
explique que la vitesse de propagation soit un ordre de grandeur plus élevée que
celle des fissures longues en plasticité confinée (voir figure 7.5).
36 Fatigue des matériaux et des structures 2
Contrainte plane
Déformation plane
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a)
b)
Figure 7.7. Effets du niveau des contraintes et du rapport R sur la fermeture induite par la
plasticité en contrainte plane et en déformation plane [NEW 81] ; a) niveau d’ouverture
relatif ; b) fraction effective du cycle en fonction de Smax/σf ; σf = (σy+ σUTS)/2
D’une façon générale, les études disponibles montrent que les fissures courtes
s’ouvrent initialement à des niveaux proches de la charge minimale (des valeurs
négatives à R négatif et proches de zéro à R = 0). Lors de la propagation, il y a une
augmentation progressive du niveau d’ouverture pour arriver à un niveau stabilisé
égal ou inférieur à celui des fissures longues en plasticité confinée. Cette période transitoire,
Propagation des fissures courtes 37
présentées à la figure 7.8 pour des entailles sévères à R = - 1 ont permis à l’auteur
d’expliquer :
– des vitesses de propagation initiales de plus d’un ordre de grandeur supérieures
à celles des fissures longues au même Δ K ;
– des décroissances de la vitesse de propagation : même si Δ K croît avec la
longueur de fissure, la décroissance de U est suffisamment importante pour entraîner
aussi celle de Δ Keff ;
– l’existence d’une fissure non-propageante au plus bas niveau de contrainte
nominale (Smax = 98 MPa).
De plus, l’effet de fissure courte a été moins prononcé lorsque de plus faibles
variations de U ont été enregistrées à R = 0, et l’inverse s’est produit à R = - 2
[VER 87].
Dans les entailles sévères, le facteur Δ Keff est minimal lorsque le niveau
d’ouverture atteint son maximum ou qu’il s’en approche. Plusieurs auteurs ont
associé ce moment à celui où la vitesse de propagation est minimale [TAN 83,
VER 86, SHI 88, VER 97]. Cet accord démontre le rôle de la fermeture dans le
comportement des fissures courtes. Cependant, l’utilisation du facteur Δ Keff comme
paramètre de corrélation est discutable. Pour des fissures de plus en plus courtes, sa
valeur doit diminuer pour tendre vers zéro à a = 0 ; et la notion de facteur d’intensité
de contrainte n’a théoriquement plus de signification lorsque la plasticité n’est pas
confinée en fond de fissure. Sur le plan expérimental, des divergences ont été
signalées par certains auteurs. Par exemple, Jono et Sugeta [JON 96] ont corrélé
avec Δ Keff les vitesses de propagation des fissures courtes et longues dans un acier
HT80, mais ils ont observé des divergences pour un alliage de titane.
deux surfaces de rupture pendant la décharge, ce qui entraîne un très haut niveau de
fermeture lorsque le COD est petit. Ce mécanisme de fermeture a été identifié
comme étant la cause de l’effet de la taille de grain sur le seuil de propagation.
reste à peu près constant autour de 0,4, même aux plus faibles longueurs de fissure
[DAV 04]. Des mesures effectuées au MEB lors d’essais in situ suggèrent de
combiner les fermetures induites par la plasticité et par la rugosité pour appréhender
le comportement des fissures courtes, par exemple [ZHA 97].
Plusieurs modèles ont été proposés pour décrire la propagation des petites
fissures encore à l’échelle de la microstructure (voir paragraphe 7.3.2), en tenant
compte notamment de l’entrave des joints de grain et des autres barrières
microstructurales.
mm/cycle (voir figure 7.10). De façon plus générale, Brown représente sur le plan
Δ S-a d’autres iso-vitesses plus élevées, et il y distingue différents régimes de
comportement. Le diagramme montre en particulier que, sous chargement
d’amplitude constante, une fissure peut s’amorcer au-dessous de Δ S0, mais qu’elle
devient non propageante comme on l’observe expérimentalement.
microstructure
barrière de la
Figure 7.9. Modèle de Hobson et al. [HOB 86] du comportement des fissures microstructurellement
courtes. Vitesse de propagation en fonction de la longueur de fissure pour trois niveaux de
contrainte appliquée. Dans le domaine 2 intermédiaire, les équations [7.12] et [7.13]
s’ajoutent.
Yates et Grabowski [YAT 90] ont étendu le modèle de Hobson pour décrire la
propagation de la fissure au-delà du premier grain. La fissuration dans le stade I est
caractérisée par l’équation [7.15], exprimée en termes de déformation, mais cette
Propagation des fissures courtes 41
da 2k 1 − n 2
f =. CTSD
Δ avec CTSD Δ = Sa Δ [7.17]
dN G n
Turnbull et de los Rios comparent les données da/dN-a d’un alliage d’aluminium
commercialement pur avec les prédictions des modèles de Navarro-Rios et de
Hobson [TUR 95]. Ils obtiennent de meilleures prédictions des durées de vie avec le
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modèle de Navarro-Rios qui n’a pourtant que deux constantes ajustables au lieu de
quatre pour le modèle d’Hobson. Hussain a aussi fait des comparaisons entre
différentes données expérimentales et les prédictions des modèles de Navarro-Rios
et de Hobson [HUS 97]. Il propose une variante du modèle de Navarro-Rios où les
décélérations/accélérations de la fissure cessent de se produire après 3-4 grains, tel
qu’observé expérimentalement.
glissement conjugués) [POT 04], puis d’un modèle tridimensionnel (12 systèmes de
glissement) [JOH 06]. Ces études mettent en évidence combien la forme et l’étendue
de la zone plastique, les déplacements en fond de fissure et les niveaux d’ouverture
varient en fonction de l’orientation du grain.
da / dN D= S n aΔ [7.18]
devrait être égal à 2 pour une fissure longue en plasticité confinée, l’exposant n varie
de 3 à 8.5 selon les matériaux.
K εΔ E = ε (a Δπ a0 ) + [7.19]
SΔ = K th Δ/ π (a a0 ) + [7.20]
KΔ = th Δa /(a a0 )
K + [7.21]
L’approche d’El Haddad permet aussi de rendre compte de vitesses plus élevées
pour les fissures courtes mais son utilisation est discutable pour décrire leur
décélération en fond d’entaille (voir paragraphe 7.3.3.3) Il convient aussi de noter
que le facteur de correction géométrique Y dans l’expression de ao (voir équation
[7.1]) est omis par simplicité ; il n’est pas nécessairement égal à 1.
où U est la fraction effective du cycle. On peut aussi prédire le seuil des fissures
courtes en introduisant un seuil effectif :
KΔ = eff ,thΔ / U
K [7.23]
Quelques auteurs ont utilisé la méthode des éléments finis en deux dimensions
pour calculer l’évolution du niveau d’ouverture d’une fissure se propageant depuis
un fond d’entaille (voir figure 7.8). Différentes configurations géométriques ont été
étudiées [CLU 92, SAN 02, SUN 90]. Citons par exemple Sun et Sehitoglu qui ont
développé un modèle en contraintes planes pour la propagation d’une fissure à partir
d’entailles latérales sévères (3 ≤ kt ≤ 7 ; 0,4 ≤ Smax/σy ≤ 0,8). Ce modèle permet de
prévoir les conditions qui favorisent la décroissance rapide du facteur U, donc le
ralentissement de la propagation et la possibilité de fissures non-propageantes :
– petite échelle de la pièce (U est fonction de a/D, où D = profondeur de
l’entaille) ;
– kt élevé (profondeur D élevée et rayon de courbure ρ faible) ;
– Smax/σy faible ;
– R de plus en plus négatif.
Δ Seff 2 1.02 ⎡ ⎤
J effΔ 1.24= Seff+ εp ,eff⎢ .Δa Δ [7.24] ⎥
E n′ ⎢⎣ ⎥
⎦
7.5.2.4. Une nouvelle approche pour la prédiction de la vie des pièces entaillées
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Même si certaines méthodologies ont été mises au point dans des cas particuliers
[NEW 00], l’application de la mécanique de la rupture à la prédiction de la vie
consommée dans le régime des fissures courtes n’est pas chose facile. L’intégration
d’une relation telle que l’équation [2.2] comporte plusieurs inconnues ou incertitudes :
dimensions initiales de la fissure, évolution du facteur de forme a/2c, solutions de K
ou de J en fonction de a, évolution de U en fonction de a, etc.
à R = -1 dans le domaine des grands nombres de cycles [LAU 06, VER 97]. Qu’il
s’agisse d’un échantillon lisse ou d’une entaille sévère, la durée de vie
« d’amorçage » macroscopique NI (définie ici pour une profondeur de fissure
aI = 0.5 mm) représente la plus grande partie de la durée de vie. Cependant les
parts relatives de la durée de vie d’amorçage microscopique N0 (fissures
microstructurellement courtes) et de la durée de vie de propagation Np (fissures
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mécaniquement courtes jusqu’à 0.5 mm) sont très différentes. Dans l’échantillon
lisse, la plupart de la vie NI est passée en amorçage et propagation de microfissures
(NI ≅ N0 ; Np ≅ 0) tandis que l’inverse a lieu au fond d’une entaille sévère (NI ≅ Np ;
N0 ≅ 0). Dans le cas général d’une entaille de sévérité quelconque, la durée de vie se
décompose en deux parties non négligeables chacune :
NI N 0= Np + [7.27]
Diviser la courbe S-N d’un échantillon lisse par kt conduira alors à surestimer
l’effet d’entaille. La vie passée à l’amorçage est la même puisque la contrainte
locale vaut kt.S, mais la durée de vie de propagation sera plus longue que dans le cas
de l’échantillon lisse. Il en résulte une vie totale plus longue et donc une courbe S-N
plus haute que celle obtenue en divisant par kt ; d’où un facteur kf inférieur à kt.
0.5
Vie d’amorçage conventionnelle :
NI = N(a I = 0.5 mm)
0.4
Profondeur de fissure a, mm
0.3
entaille sévère
0.2
échantillon
0.1 lisse
0.0
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
propagation (kf < kt) selon la sévérité de l’entaille (rayon et taille) et les résistances
du matériau à l’amorçage et à la propagation à la durée de vie considérée. Les deux
résistances sont déterminées respectivement par une courbe S-N mesurée sur un
échantillon lisse, et une autre mesurée sur un échantillon comportant une entaille
très sévère (ρ → 0). Cette nouvelle approche basée sur la notion de facteur
d’intensité de contrainte de l’entaille a deux intérêts :
– comprendre l’effet d’entaille en fonction des mécanismes physiques mis en jeu
(amorçage et propagation des fissures courtes) ;
– faire une prédiction globale de la durée de vie passée à fond d’entaille sans
devoir faire une description élastoplastique de la propagation des fissures courtes
(tant que la zone plastique est confinée dans la singularité de l’entaille).
7.6. Conclusion
La propagation des fissures courtes est un sujet important en fatigue car elle
représente souvent la plus grande partie de la durée de vie des pièces en service,
notamment dans le domaine des grands nombres de cycles. De plus la résistance en
fatigue peut être contrôlée par une condition de propagation d’une fissure courte.
Des prédictions fiables de la fatigue nécessitent donc une bonne compréhension du
comportement des fissures courtes et des modélisations appropriées.
A l’étude depuis environ trente ans, le comportement des fissures courtes est
toujours un domaine de recherche très actif. De nombreux résultats expérimentaux
ont été accumulés dans une vaste gamme de conditions et de nouveaux concepts ont
été adoptés par la communauté, comme l’interaction des fissures avec les barrières
microstructurales, ou encore le développement de la fermeture des fissures à fond
d’entaille.
Sur le plan quantitatif cependant, la grande majorité des modèles sont encore
limités à une ou deux dimensions et ne prennent pas en compte la réalité
tridimensionnelle de la propagation des fissures. Plusieurs aspects doivent être
mieux compris, comme l’évolution irrégulière du front de fissure, la transition stade
I-stade II et, à l’échelle du milieu continu, la déformation plastique cyclique autour
du front d’une fissure semi-elliptique.
Propagation des fissures courtes 51
Enfin l’étude des fissures courtes doit être étendue dans le contexte de la fatigue
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Remerciements
L’auteur remercie le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie
(CRSNG) du Canada pour le soutien financier de ses travaux.
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Chapitre 8
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8.1. Introduction
Dans les années 1960, c’est-à-dire, cent ans après les premiers travaux de
Wöhler, les progrès de la microscopie tant optique qu’électronique associés au
polissage électrolytique ont permis de révéler l’existence d’une zone plastifiée à
fond de fissure de fatigue. A partir de ce moment, les mécanismes de fissuration ont
pu être compris et des modèles théoriques avancés, afin de compléter des approches
paramétriques dont la plus connue est celle de Paris. Une nouvelle étape importante
a vu le jour avec les moyens de calcul numérique dans les années 1980.
Le chapitre 8 est fortement lié aux chapitres 6,7 et surtout 9, ce dernier écrit par
Sylvie Pommier, qui aborde le même sujet mais avec une approche plus mécanique
que physique. Nous développons successivement les principaux aspects des mécanismes
de la fissuration par fatigue, en insistant sur le rôle de la déformation plastique, du
point de vue microstructural des arrangements de dislocations et du point de vue
mécanique de l’ouverture du fond de fissure, dans la propagation de la fissure.
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da
= C.Δ K m [8.1]
dN
L’inconvénient de cette représentation est que l’influence des paramètres mécaniques
usuels tels que le module d’Young, le coefficient d’écrouissage ou la limite
d’élasticité ne peut pas être mise en évidence facilement.
Dans les deux cas, la connaissance de la zone plastifiée à fond de fissure est utile
mais, évidemment, c’est lorsque l’on considère que la progression de la fissure
dépend d’une fatigue plastique localisée, que la détermination de la forme de la zone
plastifiée et du profil des déformations aboutit le plus directement à une meilleure
compréhension du phénomène.
KI θ θ3 ⎛ θ ⎞
σ1 Cos 1= sin sin ⎜ + ⎟ [8.2]
2π r( )2
1/2
2 2⎝ ⎠
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où :
– K = facteur d’intensité de contrainte ;
– θ, r = coordonnées polaires d’un point en avant de la fissure.
KI
σ1 = [8.3]
2π r( )
1/2
K
1 σ y= σ I= 1/2 [8.4]
2π r( )
soit :
K I2
r= [8.5a]
2πσ y2
Irwin définit ainsi le rayon (r) d’une zone plastifiée à fond de fissure, dans le
mode I, et en contrainte plane.
KI2
r= [8.5b]
6πσy2
qui montre que la zone plastifiée est plus petite en déformation plane qu’en
contrainte plane. C’est ce que l’on vérifie au cœur et à la surface d’une éprouvette.
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La forme de la zone plastifiée n’est pas aussi simple que celle prévue par cette
approche élémentaire. En réalité, dans le mode I, la zone plastifiée est constituée de
deux ailes qui sont déterminées par le calcul, à l’aide de la méthode des éléments
finis [LEV 71], figure 8.1.
Dans le mode II, la zone plastifiée est allongée dans la direction de propagation
de la fissure, le mode III étant le seul où la forme circulaire est effectivement
rencontrée.
On voit donc que le modèle d’Irwin, très clair pour introduire la notion de
plastification à fond de fissure est mal adapté pour faire une étude précise du
phénomène.
Figure 8.1. Contour de la zone plastifiée à fond de fissure calculé par Rice
pour un solide élastoplastique sans consolidation
Pour ce qui est du mode I, il semble que le modèle le plus crédible proposé à
l’heure actuelle soit celui de Rice [LEV 71]. Les deux ailes de la zone plastifiée
peuvent être déterminées par les coordonnées rx et ry, rx étant la dimension dans la
direction de fissuration et ry celle dans la direction perpendiculaire.
Mécanisme de la déformation plastique 63
K I2
ry = 0,15
σ y2
[8.6]
2
KI
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rx = 0,036 2
σy
Les dimensions de la zone plastifiée calculées par Rice sont assez voisines de
celles mesurées expérimentalement, comme on le verra plus loin. Toutefois, le
coefficient d’écrouissage, c’est-à-dire l’aptitude du métal à la consolidation, a une
influence sur la forme de la zone plastifiée. Lorsque ce coefficient augmente, les
deux ailes ont tendance à se redresser. La direction moyenne de l’aile par rapport à
la direction de fissuration est de 60° dans le modèle de Rice. Des expériences
montrent qu’elle varie de 44 à 30° lorsque le coefficient d’écrouissage passe de 0,25
à 0,07 [MAI 73]. D’autres facteurs, comme le critère de plasticité choisi ou la
configuration de la fissure peuvent avoir une influence sur la forme de la zone
plastifiée [LAL 77, LAR 73].
Signalons enfin que le calcul (voir figure 8.1), montre que la plastification se
développe principalement de part et d’autre et en avant de la fissure mais, dans une
certaine mesure aussi, en arrière de la fissure.
Partant du modèle proposé par Rice pour un changement monotone nous allons
voir maintenant comment on peut le transposer au cas d’un chargement cyclique.
rayon de la zone plastifiée périphérique est de la forme (Kmax/σy)2 alors que celui de
la zone centrale est en (Δ K/2 σy)2.
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Mécanisme de la déformation plastique 65
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périphérique doit être par conséquent à peu près uniforme dans une direction
perpendiculaire au plan de la fissure. Il n’en est évidemment pas de même dans la
direction de propagation de la fissure.
Parmi les tentatives expérimentales les plus anciennes il y a lieu de citer les
travaux de Hahn et Rosenfield sur un acier à 3 % de silicium [HAH 72]. A l’aide
d’une attaque métallographique appropriée ils ont pu non seulement déterminer la
forme et les dimensions de la zone plastifiée encadrant la fissure de fatigue mais
aussi évaluer le taux de déformation. Les dimensions de la zone périphérique
mesurées sont voisines des dimensions calculées par Rice. De plus, le nombre de
cycles nécessaires pour décrire la zone plastifiée est en bon accord avec celui prévu
par la loi de Coffin dans le domaine de déformation considérée. Cette observation
montre bien que la propagation de la fissure peut être considérée comme une fatigue
oligocyclique localisée.
théorie a été vérifié sur plusieurs points : l’existence d’une double zone plastifiée,
l’uniformité de la déformation plastique dans la zone périphérique, la forme et les
dimensions de cette zone.
Dans tous les cas, la zone périphérique est caractérisée par un palier de dureté.
Des exemples sont donnés dans les figures 8.4, 8.5 et 8.6.
Rayon monotone (µm)
Différentes techniques utilisant les rayons X ont été essayés pour mesurer la
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taille des zones plastifiées et évaluer les déformations. La plus classique consiste à
suivre l’évolution des diagrammes de Debye et Scherrer. La continuité des anneaux
observés sur des diagrammes en retour dépend de la déformation des grains et on
repère la limite de la zone plastifiée par l’apparition de taches discontinues. Ce
procédé exige de prendre de nombreux diagrammes mais il a été expérimenté avec
succès sur des aciers [FEL 56].
Une autre technique est fondée sur l’évolution de diagrammes de Lauë. Lorsque
les grains atteignent un diamètre de l’ordre de 0,1 mm, on peut avoir une idée de la
taille de la zone plastifiée à l’aide d’un seul diagramme [LAT 73]. Pour les alliages à
petits grains, on doit prendre plusieurs clichés et un revenu préalable est nécessaire
pour réarranger la structure de la zone plastifiée et discriminer les taches de Lauë.
Un procédé par moiré a été utilisé par Liu dans un alliage léger et un acier pour
mesurer la zone plastifiée [LIV 69]. D’autres mesures ont été réalisées avec la même
technique par A. Ohta et al. dans un acier microallié où il trouve que la déformation
au voisinage du fond de fissure de fatigue est de l’ordre de 4 % [OHT 77]. Enfin,
D.L. Davidson et J. Lankford utilisent le contraste cristallographique du microscope
à balayage [DAV 76].
Sur le plan cristallographique, des études ont été menées tant par microscopie
électronique par transmission que par microscopie optique.
vraisemblablement dans les autres alliages à haute énergie de faute. Dans les aciers
inoxydables austénitiques [BAT 72] à plus faible énergie de faute, la zone centrale
est occupée principalement par des macles mécaniques ou des lamelles de martensite
(voir figures 8.7 et 8.8).
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70 Fatigue des matériaux et des structures 2
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Figure 8.7. Zones plastifiées sous une cassure dans un acier extra-doux (cellules)
et dans un acier inoxydable 25-20 (macles)
J.P. Baïlon et al. [BAI 96] ont mesuré dans du cuivre des cellules de dislocations
à fond de fissure dont le diamètre est de 1 à 10 µm. Ils montrent que pour une même
sollicitation les cellules formées au cours d’une fissuration dans le vide sont plus
petites que dans l’air. Enfin, à partir de la taille des cellules, la déformation plastique
Mécanisme de la déformation plastique 71
est évaluée à moins de 1 % sur la cassure avec sans doute une incertitude due au
gradient de déformation près de la fissure.
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sont pas toujours observables pour plusieurs raisons. Il convient d’abord de noter
que dans certains alliages, les aciers à haute résistance par exemple, les stries sont
mal définies et par conséquent difficilement observables. Il faut ensuite souligner
que pour les vitesses de fissuration les plus élevées des décohésions statiques, telles
que clivages et cupules, se produisent de préférence à la formation des stries.
Il semble que ce soit Zapffe qui ait découvert le premier l’existence des stries en
1945, par observation au microscope optique, avant que plusieurs chercheurs
décrivent les faciès à stries observés au microscope électronique. Mais ce n’est que
vingt ans plus tard que Pelloux prouve qu’une strie se forme au cours d’un seul
cycle.
En 1961, Forsyth montre l’existence de deux types de stries, des stries ductiles et
des stries fragiles [FOR 61] (voir figures 8.9 et 8.10).
Mécanisme de la déformation plastique 73
En bref, cette morphologie est caractérisée par le fait que les stries sont arrangées
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La direction des stries est liée à l’orientation cristallographique des grains. Dans
l’alliage 2 024 comme dans les alliages de cuivre, le plan de rupture est voisin d’un
plan (100) et les stries sont parallèles à une direction (110) [PEL 69]. Les stries de
l’acier inoxydable austénitique ont également un caractère cristallographique très
marqué [BAT 72].
En revanche, il semble que ce caractère soit affaibli dans les aciers au carbone.
En effet, dans les aciers doux, les stries ne changent pas d’orientation au passage
d’un joint de grain [POM 70].
Notons enfin que le profil des stries ductiles est en principe une dent de scie plus
ou moins aplatie : le fond de la strie est souvent marqué par une microfissure. Il
semble bien que dans les alliages cubiques à faces centrées, les flancs de la dent de
scie soient orientés dans des plans (111).
Figure 8.9. Faciès de rupture par fatigue d’un acier inoxydable 25-20 et dans un acier
ferritique (X 5000) [BAT 73]
Mécanisme de la déformation plastique 75
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5µ
Figure 8.10. Stries fragiles dans un alliage 7 075 fissuré dans une solution contenant
3,5 % de chlorure de sodium, pour ΔK = 22 MPa÷m. La ligne sombre marquant
chaque strie représente la marche forcée pendant la partie décroissante du cycle de
contrainte [PEL 70].
Dans les aciers au carbone, on trouve également une corrélation entre stries et
parois de dislocations [BAT 72], alors que dans les aciers inoxydables austénitiques
ce sont les macles ou les lamelles de martensite qui sont liées aux stries [BAT 72]
(voir figure 8.11).
Dans le laiton α, les stries sont corrélées à des bandes de déformation constituées
par des empilements de dislocations selon le plan bissecteur des plans de glissement
faciles (111) [NEU 74].
a) microscopie optique
b) microscopie électronique
Figure 8.11. Cassure de fatigue dans un acier doux après polissage et attaque électrolytique.
Réseau de parois de dislocations perpendiculaires à la direction de propagation
indiquée par la flèche (X 1600 et 2500)
Figure 8.12. Macles mécaniques émergeant à la surface d’une cassure par fatigue
dans un acier inoxydable austénitique 25-20 (1600)
Mécanisme de la déformation plastique 77
L’un des deux principaux modèles théoriques pour exprimer la croissance des
fissures est fondé sur l’ouverture à fond de fissure [CLI 63, CLI 67]. Dans ce
modèle on fait l’hypothèse que la fissure de fatigue progresse par glissement du fond
de fissure dans des directions orientées à 45° par rapport à la direction de
propagation [PEL 69]. Le modèle de formation des stries proposé par Pelloux
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Δ K2
δc = [8.7]
4 Eσ y
d’où :
da 1 Δ K 2
= [8.8]
dN 8 Eσ y
da 1 Δ K 2 σ y
= x [8.9]
dN 8 σ 2y E
A la différence de la relation de Paris, cette théorie implique que da/dN est une
fonction de Δ K 2 au lieu de Δ K 4.
Il est intéressant de souligner que la loi qui gouverne la vitesse microscopique est
une fonction de (Δ K2) comme prévue par l’équation [8.8], la valeur de l’exposant de
Δ K s’écartant assez peu de sa valeur théorique de 2. En revanche, il n’en est pas de
même pour la vitesse macroscopique, qui répond à une fonction de (Δ K)m dans
laquelle m prend des valeurs comprises entre 2 et 10 pour les aciers [CLA 70] et 3 à
5 pour les alliages légers.
Des tentatives pour corréler m à la ténacité exprimée par le facteur KIC n’ont pas
donné entièrement satisfaction [BRO 72]. En général, on trouve qu’une valeur
élevée de m correspond à une faible valeur de KIC, mais des exceptions telles que les
aciers austénitiques montrent que la propagation des fissures en régime monotone ne
permet pas de prévoir la propagation en régime cyclique.
Mécanisme de la déformation plastique 79
Une autre façon d’exprimer la croissance des fissures de fatigue est de considérer
que la zone en avant du fond de fissure est le siège d’une fatigue oligocyclique
localisée.
⎛R ⎞
ε e ⎜ = 1⎟ε −
p
⎝ r ⎠ [8.10]
1ρ
N εp⎛ ⎞
∫O
4 ⎜
εf ⎜⎝
dN =⎟ 1
⎟ [8.11]
⎠
da 7,5 Δ K 4
= [8.12]
dN 16 εf E 2 σ
2
y ρ
80 Fatigue des matériaux et des structures 2
R [8.13]
=ε e ε
r+ c
p
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εe
dans laquelle c = R . Si on admet, qu’à la limite pour r = 0, on a :
εf
εp = εf [8.14]
εe ρ ⎛ R⎞
R log = 1⎜ 0, 7ε e + = [8.15] ε
p
ρ c ⎝ ρ⎠⎟
2+ S
Δ K⎛ ⎞
R= α ⎜ ⎟⎟ [8.16]
σ y ⎜⎝ ⎠
que :
1/ β
da 0,ρ 7 ⎛ 1 ⎞)
2 + S( / β α
= 4 =(i + s ) ⎜ K ⎟Δ [8.18]
N dN E y σ f ⎜⎝ εΔ 1
1/3
ρ ⎠⎟ −
Le modèle proposé par Tomkins [TOM 73] diffère des deux premiers par les
hypothèses de calcul. Il considère que l’endommagement se produit dans deux
Mécanisme de la déformation plastique 81
Δ εe Δ ε
[8.19]
δ Rd p= ∫ Cdε e + ∫ ε
p
0 0
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avec :
εe
C=
εf
da δ
= [8.20]
dN 2
σΔ k =εpn Δ [8.21]
2
da 5⎛
π2 ⎞ ⎡ Δ εp εe Δ εe ⎤ ⎛ ⎞
⎜⎜ = σ a ⎟⎟ ⎢
2
Δ ⎥ ⎜⎜ ⎟⎟ [8.23] +
dN 8 2 2 y⎝ ⎠ ⎢⎣ 2n + 1( σ f 6) ⎥⎦ ⎝ ⎠ ε
2 n + 1( 2 )
da π2 k ⎛ Δ εp ⎞
= ⎜⎜ ⎟a [8.24]
dN 8 2 2σ y⎝ 2n + 1( ⎠⎟ )
82 Fatigue des matériaux et des structures 2
2
da 2
1 ⎛ εe Δπ 3 a⎞ σ
= ⎜ ⎟ [8.25]
dN 48 2 2 y⎜⎝ σ f E ⎠⎟ ε
Elber [ELB 71] a montré qu’une fissure de fatigue dans une tôle d’aluminium
peut se fermer lorsque l’ensemble de l’éprouvette se trouve encore soumis à une
traction. Des contraintes de compression sont créées autour de la fissure lorsque la
charge tend vers zéro [RIC 67]. Il en conclut qu’une fissure de fatigue diffère d’une
fissure mécanique idéale parce qu’elle crée une zone de déformations résiduelles
lors de sa propagation. L’ouverture théorique de la pointe de la fissure (CTOD) se
trouve donc diminuée.
Elber a effectué des essais où il fait varier les paramètres tels que longueur de
fissure, facteur d’intensité de contrainte et rapport R de façon à observer leur
influence sur l’efficacité de la sollicitation définie par le rapport U :
K max − K op
U= [8.26]
ΔK
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Seul le rapport R paraît avoir une influence significative sur le rapport U. Elber a
trouvé une relation linéaire entre ces deux paramètres s’exprimant par la fonction
U = 0,5 + 0,4 R, avec - 0,1 < R < 0,7, pour l’alliage d’aluminium 2024-T3,
expliquant ainsi l’influence du rapport R sur la vitesse de propagation des fissures de
fatigue dans cet alliage. Notons enfin que les résultats d’Elber sont essentiellement
obtenus dans des conditions de contrainte plane. Des vérifications expérimentales
montrent que U peut varier de 0.4 à 0.75 pour R = 0, selon la géométrie et l’alliage.
L’ouverture du fond de fissure est de ce fait plus précoce à cœur qu’en surface.
Lorsque la force appliquée à l’éprouvette augmente, on observe initialement les phases
décrites par Elber, en contrainte plane, jusqu’à l’ouverture au centre de l’éprouvette.
Mais entre ce moment et l’ouverture en surface, il existe, pour le cas de la fissuration
en déformation plane, une phase transitoire au cours de laquelle l’ouverture de la
fissure progresse de l’intérieur vers l’extérieur, en même temps que la fissure change
de configuration (voir figure 8.15). La définition de Δ Keff peut paraître ambiguëe
puisque en toute rigueur celui-ci varie sur le front de la fissure. En première
approximation, on doit calculer Δ Keff à partir de l’ouverture en surface. On observe,
dans ces conditions, que DKeff augmente avec l’épaisseur de l’éprouvette [SCH 77].
Plusieurs auteurs dont Lindley, McEvily, Pineau, Schijve, [LIN 74, EVI 77,
SCH 77], ont montré expérimentalement que le fond de fissure est plus fermé en surface
qu’à cœur en pratiquant des coupes métallographiques ou des dissolutions de la surface.
Mécanisme de la déformation plastique 85
cause par exemple de la formation d’un film d’oxyde isolant. Il est donc
recommandable de considérer la mesure extensométrique comme référence. Encore
faut-il avoir présent à l’esprit que la mesure d’ouverture en surface donnera une
information précise mais localisée et que la mesure du bâillement de l’entaille
donnera une information moins précise mais plus complète sur l’évolution de
l’ouverture le long du fond de la fissure en déformation plane [BAT 78, BRO 72,
GAR 77, SHI 77].
86 Fatigue des matériaux et des structures 2
Wheeler et Willenborg [WHE 70, WIL 71] considèrent que la longueur de fissure
affectée par la surcharge est égale au trajet nécessaire pour que la zone plastifiée à
fond de fissure vienne tangenter celle produite par la surcharge. Cette hypothèse
peut constituer une approximation grossière pour les plaques minces en état de
contrainte plane mais elle est insuffisante en déformation plane.
Des mesures de zones plastifiées ont confirmé que leur dimension dans la
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plastiques [CHA 77]. Il en résulte que le facteur d’intensité de contrainte efficace est
fortement affecté par les contraintes résiduelles qui sont de compression après une
surcharge en traction [SCH 77]. La réduction du facteur d’intensité de contrainte
efficace explique mieux le ralentissement.
a)
b)
Dans les plaques épaisses le problème est plus difficile. Selon l’épaisseur de
l’éprouvette, les fortes intensités de surcharge provoquent une déchirure en forme de
croissant et de ce fait, modifient le profil quasi rectiligne du front de fissure ; il est
donc vraisemblable que les variations relatives de Kefficace à cœur et en surface de
90 Fatigue des matériaux et des structures 2
Immédiatement après une surcharge intense. Kefficace est donc plus faible à cœur
qu’en surface ; après un nombre de cycles suffisant, le front de fissure tend à
reprendre sa forme initiale, Kefficace devenant alors plus grand à cœur qu’en surface ;
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8.7. Conclusion
8.8. Bibliographie
[ANT 75] ANTOLOVICH S.D., SAXENA A., CHANANI G.R., « A model for fatigue crack
propagation », Eng. fract. mech., 1975, vol. 7, p. 649-652.
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[BAT 72] BATHIAS C., PELLOUX R.M., 15e colloque de métallurgie de Saclay, 1972.
[BAT 72] BATHIAS C., De FOUQUET J., DE LEIRIS. C.R.A.S., t. 274, p. 867-870, mars 1972.
[BAT 72] BATHIAS C., Thèse d’état, Université de Poitiers, juin 1972.
[BAT 73] BATHIAS C., PELLOUX R.M., « Fatigue crack-propagation in martensitic and
austenitic steels », Metallurgical trans., vol. 4, 5, p. 1265-1274, mai 1973.
[BAT 78] BATHIAS C., CLERIVET A., Séminaire E.F.Q.F., 1978.
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propagation in aluminium alloys », Eng. fracture mech, vol. 10, p. 409-424, 1978.
[BRO 72] BROEK D., BOWLES C.Q., « On the formation of fatigue striations », Int. J. of fract.
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92 Fatigue des matériaux et des structures 2
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specimen geometry on small-scale yielding at crack tips in elastic-plastic materials », J. of
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[PEL 69] PELLOUX R.M., « Mechanisms of formation of ductile fatigue striations », Trans. of
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[PLU 77] PLUVINAGE G., ROBIN C., DOMINIAK S., « Variation of crack opening-load diagram
with fatigue crack growth rate », Mat. sci. eng, vol. 29, p. 145-150., 1977.
[POM 70] POMEY G., Rev. de métallurgie, p. 327-341, avril 1970.
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[TOM 73] TOMKINS B., Fatigue 1973, University of Cambridge, mars 1973.
[WHE 70] WHEELER O., General Dynamics Report, FZM 5602, 1970.
[WIL 71] WILLEMBOURG, ENGLE, WOOD, Rapport AFFD, TM, FRB, janvier 1971.
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Chapitre 9
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9.1. Introduction
KI θ⎛ θ 3θ ⎞ [9.1]
σxx = cos ⎜1 − sin sin ⎟ + T
2πr 2⎝ 2 2 ⎠
KI θ⎛ θ 3θ ⎞ [9.2]
σ yy = cos ⎜1 + sin sin ⎟
2πr 2⎝ 2 2 ⎠
KI θ θ 3θ [9.3]
σxy = cos sin cos
2πr 2 2 2
3
σeq2 = s:s
2
avec :
Trσ
s= σ− 1
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[9.5]
3
2
1 − 2ν( )
2
⎛KI ⎞
rY = ⎜
⎜σ ⎟⎟ [9.6]
2π ⎝ Y ⎠
Ensuite, pour calculer la dimension rp de la zone plastifiée, Irwin [IRW 60], fait
les hypothèses suivantes. Entre r = 0 et r = rY, le matériau est plastifié et la contrainte
normale σyy est bornée et égale à σY/(1-2ν). Par conséquent les efforts se
redistribuent au-delà de r = rY. Entre r = rY et r = rp, cette redistribution permet au
matériau d’atteindre sa limite d’élasticité. Au-delà de rp, le matériau reste élastique,
les champs élastiques sont supposés être identiques à ceux d’une fissure plus longue
que la fissure réelle d’une quantité rY. La redistribution des efforts, illustrée sur la
figure 9.1, permet alors de calculer la dimension de la zone plastifiée [9.8] :
r= ∞ r= ∞
KI KI
∫
r= 0 2πr
dr = rpσ f + ∫
r = rY 2π r − rY(
dr
)
[9.8]
98 Fatigue des matériaux et des structures 2
2
1 − 2ν( ⎛ K I )
2
⎞
rp = 2rY = ⎜⎜ ⎟⎟ [9.9]
π ⎝ σY ⎠
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a) b)
Par comparaison avec des calculs par éléments finis en élasto-plasticité parfaite,
cette méthode simplifiée estime finalement assez bien le niveau de contrainte σyy
Approche locale de la fissuration par fatigue 99
atteint dans la zone plastique, en contrainte plane comme en déformation plane, ainsi
que l’étendue de la zone plastifiée en contrainte plane. En revanche, ce calcul sous
estime la taille réelle de la zone plastifiée en déformation plane. En effet, en
déformation plane, l’étendue de la zone plastifiée est maximale sur un axe incliné à
environ 70° du plan de la fissure et pas en θ = 0.
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a) b)
Figure 9.2. Dimension de la zone plastique d’Irwin avec contrainte T adimensionnée par
celle calculée pour T=0 ; a) En fonction du rapport entre la contrainte T et la limite
d’élasticité du matériau σY ; b) En fonction de a, pour σY = 400 MPa, KI =15MPa.m1/2 et pour
une fissure de longueur 2a dans un milieu infini sous chargement uniaxial.
rY T( ) 2 [9.11]
=
rY T = 0( ⎛ T)
2
⎞ ⎛T ⎞ ⎛T ⎞
2
2− ⎜
⎜σ ⎟⎟ + ⎜
⎜ ⎟⎟ 4 − 3⎜
⎜σ ⎟⎟
⎝ Y ⎠ ⎝ σY ⎠ ⎝ Y ⎠
n− 1
3 1 ⎛σeq ⎞
ε ≈ ε p = α⎜ ⎟ s [9.12]
2 E ⎜⎝ σo ⎟⎠
par des considérations énergétiques basées sur l’intégrale J, puis déterminent, dans
un second temps, les fonctions angulaires. Les champs asymptotiques de contraintes
en pointe de fissure prennent la forme suivante [9.13]. Le coefficient In ainsi que les
fonctions angulaires sont des fonctions de l’exposant d’écrouissage, solutions
d’équations différentielles complexes. Des solutions tabulées peuvent être trouvées
dans [SHI 83] :
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1 1
⎛ 1 ⎞ n+ 1 ~ ⎛ J ⎞ n+ 1
σ = σo ⎜⎜ ⎟⎟ σ n θ( ⎜) ⎟ [9.13]
⎝ ασoεo I n ⎠ ⎝ r⎠
Par ailleurs, Rice et al. [RIC 68] présentent une figure sur laquelle est tracée la
forme de la frontière approximative entre les zones plastiques et élastique en pointe
de fissure (figure 9.3). Il est très net sur cette figure que la forme de la zone plastique
est très fortement dépendante de l’écrouissage. Située à peu près autour de l’axe y en
déformations planes et pour un comportement plastique parfait, cette zone plastique
s’incline vers l’arrière lorsque l’écrouissage du matériau augmente (figure 9.3). Des
calculs numériques par éléments finis ont permis de confirmer ces résultats.
Figure 9.4. Rapports entre εxx et εyy ou entre σxx et σyy sur le plan de la fissure à 100 μm et
200 μm de son extrémité, la dimension de la zone plastique d’Irwin étant de l’ordre de 130
μm. Les calculs ont été effectués par éléments finis, avec une loi de comportement
élastoplastique présentant de l’écrouissage isotrope (Re=350 MPa, Rm=700 MPa) et une
taille d’éléments de 10 μm.
Les champs HRR ont été établis pour traiter les problèmes de plasticité étendue
en pointe de fissure pour lesquels il est possible de négliger la déformation élastique
devant la déformation plastique. Ce n’est pas le cas lorsque la déformation plastique
reste confinée, ce qui est le cas en fatigue.
Par exemple, sur la figure 9.4, les contraintes et les déformations calculées par
éléments finis dans la zone plastique sont tracées pour un comportement
élastoplastique parfait en traction simple en fonction du facteur d’intensité des
Approche locale de la fissuration par fatigue 103
Ainsi le rapport entre εyy et εxx change t’il de signe lorsque la déformation
plastique augmente. Le même effet est observé pour les contraintes. Ces
changements de trajet, provenant de la compétition entre la compressibilité élastique
du milieu et l’incompressibilité de la déformation plastique, sont non négligeables
en fatigue parce que la déformation élastique n’est pas négligeable devant la
déformation plastique dans la majeure partie de la zone plastique à l’extrémité de la
fissure.
X = 98 MPa
Après une excursion en compression à εp = - 0.9 %, X se situe alors vers - 100 MPa.
Cet effet dit « effet Bauschinger » ou « écrouissage cinématique » est couramment
observé dans les matériaux métalliques.
Figure 9.6. Simulation d’essais de traction-compression avec deux lois matériau, l’une (loi 1)
présentant de l’écrouissage cinématique et l’autre (loi 2) de l’écrouissage isotrope. Les deux
lois se comportent de manière identique en traction uniaxiale monotone. Modèle de
Chaboche [CHA 77].
Ces deux lois ont été utilisées dans un calcul numérique par éléments finis de la
déformation plastique en pointe de fissure. Les calculs ont été effectués en déformation
plane. Pour ces calculs le facteur d’intensité des contraintes nominal maximum était
de 42 MPa.m1/2. Lors de la décharge une zone d’environ 400 μm se trouve soumise à
des contraintes résiduelles compressives. Sur la figure 9.7, l’évolution de la contrainte
σyy est tracée en fonction de la déformation εyy à 62 μm de l’extrémité de la fissure.
Cette figure appelle deux remarques. Premièrement, même à une faible distance de
l’extrémité de la fissure la déformation élastique n’est pas négligeable devant la
déformation plastique. Deuxièmement, le niveau de contrainte résiduelle atteint
après décharge de la pièce dépend fortement du comportement du matériau.
Les profils de contraintes résiduelles après décharge sont tracés sur la figure 9.8.
On constate que si le matériau présente de l’écrouissage de type cinématique (loi 1)
la zone plastifiée est plus étendue mais les contraintes résiduelles dans cette zone
sont plus faibles que pour un écrouissage isotrope (loi 2). Enfin, les contraintes
résiduelles sont nettement multiaxiales. Par exemple, dans toute la zone plastique, le
rapport entre σxx et σyy est proche de 1.
Les contraintes résiduelles dans la zone plastique en pointe de fissure sont donc
dépendantes du comportement du matériau et fortement multiaxiales.
Approche locale de la fissuration par fatigue 107
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Figure 9.7. Simulation numérique, en déformation plane, d’une traction uniaxiale à Kmax=42
MPa.m1/2 suivie d’une décharge complète par éléments finis avec les deux lois de comportement
matériau présentées sur la figure 9.6. Tracés de l’évolution de la contrainte σyy (normale au
plan de la fissure) en fonction de εyy sur le plan de la fissure à 62 μm de son extrémité, c’est-
à-dire à environ un septième de la dimension de la zone plastique.
Figure 9.8. Simulation numérique, en déformation plane, d’une traction uniaxiale à Kmax=42
MPa.m1/2 suivie d’une décharge complète par éléments finis avec les deux lois de comportement
matériau présentées sur la figure 9.6. Tracés des profils de contrainte résiduelle σyy et σxx
pour chacune de ces lois en fonction de la distance à son extrémité.
108 Fatigue des matériaux et des structures 2
Sur la figure 9.9 est tracée par exemple l’évolution de la longueur de fissures de
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fatigue mesurée lors d’essais sur un acier ferrito-perlitique pour une sollicitation à
amplitude d’effort fixée, sans application de surcharge ou bien après l’application
d’une surcharge unique d’un facteur 1.5 ou d’un facteur 1.8 [HAM 07]. Après
l’application d’une surcharge, la vitesse de fissuration diminue significativement
tant que son extrémité se propage à travers la zone plastique de la surcharge (ici sur
environ 0.5 mm pour une surcharge d’un facteur 1.8). Puis la vitesse augmente
progressivement jusqu’à retrouver le niveau qu’elle aurait eu en l’absence de
surcharge. Dans le cas présent, la fissure doit se propager sur plus de 4 mm après
une surcharge d’un facteur 1.8 pour que l’effet de la surcharge ne soit plus sensible.
Figure 9.9. Résultats d’essais de fissuration sur un acier ferrito-perlitique à 0.48 %C.
Eprouvette de type CCT. Amplitude du chargement appliqué Δσ =100 MPa, rapport de
charge R = 0.05. Surcharge isolée de 150 MPa ou de 180 MPa. En trait pleins, simulation
avec le modèle LMT [HAM 07].
Cet effet de retard après une surcharge a été associé très tôt à la plasticité en
pointe de fissure. Les modèles de Wheeler [WHE 72] et Willenborg [WIL 71] lient
Approche locale de la fissuration par fatigue 109
⎛ da ⎞ ⎛ da ⎞ [9.14]
⎜⎜ ⎟⎟ = φ ⎜⎜ ⎟⎟
⎝ d N ⎠retardé ⎝ d N ⎠non retardé
mW
⎛ ZP ⎞
φ = ⎜⎜ i
⎟⎟ [9.15]
⎝ surch
a + ZPsurch( − ai ⎠ )
Le modèle de Willenborg [WIL 71] est également lié à la dimension de la zone
plastique, estimée à l’aide de la méthode d’Irwin, mais applique l’effet retard sur le
facteur d’intensité des contraintes. Ces modèles lient plasticité et effet d’histoire en
fissuration mais n’expliquent cependant pas pourquoi la vitesse de fissuration reste
inférieure à celle observée en l’absence de surcharge bien après que la fissure soit
sortie de la zone plastique laissée par la surcharge.
A peu près à la même époque, Elber [ELB 71] a introduit le concept d’effet de
fermeture des fissures par plasticité. Le principe de cet effet de fermeture est le
suivant. Après l’application d’une surcharge, des contraintes résiduelles de compression
apparaissent dans la zone plastique de la surcharge. Lorsque la fissure se propage à
travers cette zone plastique, ces contraintes résiduelles maintiennent la fissure
fermée pendant une portion du cycle de fatigue. La sollicitation n’est alors efficace
qu’au-delà d’un facteur d’intensité des contraintes seuil Kouv. La vitesse de
propagation des fissures se calcule alors comme suit :
On peut, par exemple, placer un capteur d’ouverture de part et d’autre des lèvres
de la fissure et relever la courbe effort-déplacement, puis calculer la rigidité de
l’éprouvette lorsque la fissure est complètement ouverte ou lorsqu’elle est
complètement fermée. L’écart entre le déplacement mesuré et le déplacement
calculé à l’aide de cette rigidité permet de définir un offset (figure 9.10a). Un critère
sur cet offset permet de définir le seuil d’ouverture et son évolution par exemple
après une surcharge. Des résultats d’essais reportés sur la figure 9.10b montrent
ainsi que le seuil d’ouverture se trouve aux alentours de 30 % de Kmax, juste avant la
surcharge, puis augmente fortement 5 000 cycles après la surcharge, avant de
redescendre 10 000 cycles après cette surcharge.
a) b)
a)
b)
c)
fissure et zp la taille de sa zone plastique. Pour une fissure traversante dans un milieu
infini soumis à une contrainte σ à l’infini le facteur d’intensité des contraintes
appliqué se calcule comme suit :
K I σ( = ) σ π a + z p( ) [9.17]
⎛ ⎛ ⎞⎞
) Y ⎜⎜1 − 2 arcsin⎜⎜ a ⎟⎟ ⎟⎟ π a + z p(
K I σY( = − σ ) [9.18]
⎝ π ⎝ a + z p ⎠⎠
2
π ⎛ K I σ( ⎞)
K I = K I σY( + K I) σ = 0( ⇒ z) p ≈ ⎜
*
⎟⎟ [9.19]
8⎜⎝ σY ⎠
Le facteur d’intensité résultant KI* est calculé par superposition (figure 9.11).
Comme la singularité disparaît à l’extrémité de la fissure, du fait de la plasticité, on
détermine la valeur de zp qui permet d’annuler KI* [9.19]. Pour une fissure
traversante dans un milieu infini, les calculs se mènent aisément et la dimension de
la zone plastique obtenue est très proche de celle d’Irwin. Ensuite, on calcule le
déplacement à une distance zp de l’extrémité de la fissure fictive, c’est-à-dire à
l’extrémité de la fissure réelle, en utilisant le champ de déplacement correspondant
au facteur d’intensité des contraintes appliqué [9.20] :
1 K I2
δ= [9.20]
E σY
r
uy = δ [9.21]
zp
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a) b) c)
Figure 9.12. Méthode des Strip Yield ; a) Zone plastifiée devant l’extrémité de la fissure ;
b) Sillage plastique se formant lors de la propagation de la fissure ;
c) Idem mais après refermeture de la fissure
La simulation de la fissuration par fatigue avec effet d’histoire requiert donc une
bonne modélisation de la plasticité cyclique en pointe de fissure. La méthode des
éléments finis permet de prendre en compte des lois de comportement élaborées
pour le matériau et de tester des configurations très variées. Cependant, les calculs
par éléments finis restent encore lourds, aussi une démarche de changement
d’échelle a-t-elle été proposée.
9.4.1. Démarche
Par ailleurs, on introduit une loi de fissuration qui lie la vitesse de création d’aire
fissurée par unité de longueur de front de fissure (da/dt) à la vitesse (dρI/dt) de
variation du facteur d’intensité de la partie plastique du champ de déplacement.
L’intérêt de cette démarche est de combiner les avantages des approches locales
et globales, à savoir une description fine des effets liés au comportement du matériau,
une campagne d’essai réduite pour l’identification et des temps de calcul réduits lors
des simulations [HAM 07, POM 07].
u x , t( ≈ k I ) t u x( ( + ) ρI) ( t ) u ( x )
e c
[9.22]
u xc r, θ( = [9.23]
π κ + 1( )
Fermeture
Les calculs par éléments finis, avec ou sans libération d’éléments, permettent
d’identifier des lois d’évolutions empiriques pour ces variables internes [9.25],
[POM 07] pour chaque matériau :
∂X c ∂X c ∂R c ∂R c ∂X m ∂X m ∂R m ∂R m [9.25]
, , , , , , ,
∂ρI ∂a ∂ρI ∂a ∂ρI ∂a ∂ρI ∂a
Sur la figure 9.14 sont tracées, par exemple, les évolutions de ρI calculées pour
les deux lois de comportement de la figure 9.6 et pour deux cycles de traction-
décharge. On voit nettement l’effet du comportement du matériau sur l’évolution de
ρI. Lorsque le matériau présente un écrouissage de type cinématique (loi 1), de la
plasticité cyclique se produit à chaque cycle, tandis que lorsque l’écrouissage est
isotrope, la bouche est fermée (loi 2).
dρI
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da
= α [9.26]
dt dt
où α est une constante à identifier. Cette dernière hypothèse est cohérente avec un
ensemble d’observations antérieures, [CLI 67, LAI 67] qui ont montré que, dans le
régime de Paris, la vitesse de fissuration macroscopique est proportionnelle au pas
de strie, ce pas de strie étant lui-même proportionnel au niveau de déformation
plastique en pointe de fissure. Naturellement cette équation peut être modifiée, par
exemple pour tenir compte d’effets de corrosion qui dépendent également du temps
[RUI 06].
9.4.3. Application
Le modèle a été identifié [HAM 07] pour un acier à 0.48 % de carbone employé
pour la réalisation de roues de train. Le comportement du matériau des roues a été
identifié à l’aide d’essais de traction-compression cycliques sur éprouvettes
cylindriques. On lui a associé un comportement élastoplastique à trois écrouissages
cinématiques non-linéaires et un écrouissage isotrope non-linéaire. La procédure de
changement d’échelle décrite plus haut a alors permis d’identifier le modèle de
plasticité cyclique pour la région en pointe de fissure en s’appuyant sur des calculs
par éléments finis. Enfin, l’équation [9.26] permet de calculer la vitesse de fissuration
par fatigue.
Ce modèle a ensuite été employé pour simuler des essais de fatigue à amplitude
constante et à R = 0 (figure 9.15). Les résultats ont été tracés dans un diagramme de
Paris. On constate que la vitesse de fissuration simulée est une droite dans le
diagramme de Paris, en accord avec les résultats expérimentaux. L’exposant de la loi
de Paris, proche de 3, ne dépend pas de la valeur choisie pour α, mais du modèle de
plasticité cyclique identifié pour la région en pointe de fissure. Enfin, on ajuste le
coefficient α de manière à avoir le meilleur accord possible entre la simulation et un
résultat d’essai de fissuration à R = 0 (figure 9.15).
Approche locale de la fissuration par fatigue 119
a)
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b)
Figure 9.15. a) Essai de fissuration par fatigue à amplitude constante et à R=0 et simulation
pour diverses valeurs de α (voir l’équation [9.26]) ; b) Comparaison essais/simulations pour
des essais par blocs de 100 cycles contenant 1 % ou 10 % de surcharges d’un facteur 1.5. Les
simulations sont en traits pleins.
niveau est 1.5 fois supérieur aux cycles de base. Les surcharges ont été appliquées
au début de blocs de 100 cycles de base. Simulations et expériences sont en bon
accord. D’autres validations ont également été effectuées (figure 9.9).
9.4.4. Extensions
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On s’est par exemple attaché à étudier l’effet de la contrainte T par cette méthode
et on a pu montrer que le comportement élastoplastique de la région en pointe de
fissure dépend significativement de cette contrainte T [HAM 05, THI 07]. Il est
alors possible d’inclure l’effet de la contrainte T dans le modèle et de simuler la
propagation des fissures dans des éprouvettes de type CT ou CTT pour lesquelles la
contrainte T est de signe opposé à même valeur de K. Une légère différence de
vitesse de fissuration (un facteur 1.25) est observée dans les essais et reproduite par
le modèle.
9.5. Conclusion
en pointe de fissure.
9.6. Bibliographie
[BUD 78] BUDIANSKY B., HUTCHINSON. J.W., « Analysis of closure in fatigue crack growth »,
J. of applied mech., vol. 45, p. 267-276, 1978.
[CHA 77] CHABOCHE J.L., « Viscoplastic constitutive equations for the description of cyclic
and anisotropic behaviour of metals », Bulletin de l’Académie Polonaise des sciences,
vol. 25, 1, p. 33-41, 1977.
[CLI 67] MCCLINTOCK F.A., Discussion to C. Laird’s paper « The influence of metallurgical
microstructure on the mechanisms of fatigue crack propagation », Fatigue crack
propagation, ASTM STP 415, p. 170-174, 1967.
[DEK 81] DE KONING A.U., « A simple crack closure model for prediction of fatigue crack
growth rates under variable amplitude loading », Fracture Mechanics, 13th conference,
ASTM STP 743, p. 63-85, 1981.
[DUG 60] DUGDALE D.S., « Yielding of steel sheets containing slits », J. of the mech. and
phys. of sol., vol. 8, p. 100-108, 1960.
[ELB 71] ELBER W., « The Significance of fatigue crack closure », ASTM STP 486, p. 230-
242, 1971.
[FLE 88] FLECK N.A., NEWMAN J.C, « Analysis of crack closure under plane strain
conditions », Mechanics of fatigue crack closure, ASTM STP 982, p. 319-341, 1988.
[FOR 67] FORMAN R.G., KEARNEY V.E., ENGLE R.M., « Numerical analysis of crack
propagation in cyclic loaded structures », J. of basic eng., vol. 89, p. 459-64, 1967.
[HAM 05] HAMAM R., POMMIER S., BUMBIELER F., « Mode I fatigue crack growth under
biaxial loading », Int J. of fatigue, vol. 27, 10, p. 1342-1346, 2005.
[HAM 07] HAMAM R., POMMIER S., BUMBIELER F. « Variable amplitude fatigue crack
growth, experimental results and modeling », Int. J. of fatigue, vol. 29, p. 1634-1646,
2007.
[HUT 68] HUTCHINSON J.W, « Singular behaviour at the end of a tensile crack in a hardening
material », J. mech. phys. solids, vol. 16, p. 13-31, 1968.
122 Fatigue des matériaux et des structures 2
[IRW 60] IRWIN G.R., « Plastic zone near a crack and fracture toughness », Proc. of the 7th
Sagamore Ordnance Materials Conference, vol. 4 p. 63-78, Syracuse University, New York,
1960.
[LAI 67] LAIRD C., « The influence of metallurgical structure on the mechanisms of fatigue
crack propagation », ASTM STP 415, p. 131-168, 1967.
[LEM 83] LEMAITRE J., CHABOCHE J.L., Mécanique des matériaux solides, p. 213-234,
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[THI 07] THIEULOT-LAURE E., POMMIER S., FRECHINET S., « A multiaxial fatigue failure
criterion considering the effects of the defects », Int J. of fatigue, vol. 29, p. 1996-2004,
2007.
[WHE 72] WHEELER O.E., « Spectrum loading and crack growth », J. of basic eng., vol. 4,
p. 181, 1972.
[WIL 71] WILLENBORG J., ENGLE R.M., WOOD H.A., « Crack retardation model using an
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Fatigue-corrosion
10.1. Introduction
Bien que l’expression « fatigue corrosion » ait été utilisée auparavant par Mc
Adam [MAC 26] en 1926, ce n’est qu’en 1971 que s’est tenue à Storrs, Connecticut,
USA, une conférence internationale [DEV 72] sur la fatigue corrosion pour passer
en revue et analyser ce problème complexe. Une vingtaine d’années plus tard, la
conférence de Kohler [GAN 90], Wisconsin, USA, fait de nouveau le point sur les
avancées en fatigue corrosion et propose de nouvelles directions de recherches.
Certaines des publications passent en revue les théories actuelles, et en soulignent
les faiblesses ou qualités en fonction du matériau considéré. Les comptes-rendus
expérimentaux s’articulent autour des deux grands mécanismes de la fatigue
corrosion, c’est-à-dire la fragilisation par l’hydrogène et la théorie de dissolution/
repassivation.
Ce chapitre sera fondé sur les publications de cette conférence et les avancées
des 10 dernières années. Nous examinerons et discuterons les connaissances
courantes des mécanismes d’amorçage et de propagation de fissure par fatigue
corrosion. Les théories seront présentées avec quelques détails mais une attention
particulière sera portée aux exemples qui illustrent la complexité de la synergie entre
fatigue et corrosion.
dans les deux phases. Cependant, du fait de la limite de détectabilité, qui introduit de
facto une longueur de fissure arbitraire, il est agréable de continuer à utiliser
l’ancienne terminologie, en introduisant toutefois le concept de fissures courtes entre
amorçage et propagation.
qu’un film d’oxyde est aussi formé. Les durées de vie sont augmentées aussi
longtemps que la fragilisation à l’hydrogène n’intervient pas. La figure 10.1 montre
l’effet de la polarisation cathodique sur la durée de vie totale. Le problème de la
fragilisation à l’hydrogène sera abordé en détail lors de l’étude de la propagation des
fissures.
Figure 10.1. Influence de l’application d’un potentiel cathodique sur la durée de vie
d’un acier 4140 (Rc 52) en présence d’une solution 3 % NaCl aérée (141 ksi, 25˚C).
R =-1, [LEE 72]
De même, T. Magnin [REB 90] a montré que l’on pouvait distinguer jusqu’à
trois modes d’amorçage de la fatigue corrosion (3.5 % NaCl) dans un alliage Al-Li-
Cu (8090). Au fur et à mesure que décroît la vitesse de déformation, on passe de la
Fatigue-corrosion 129
d’amorçage.
Les piqûres de corrosion ont reçu une attention particulière du fait de leur
importance dans les applications industrielles. Les premières tentatives de modélisation
considèrent les piqûres comme des fissures traversantes de même profondeur que la
piqûre originelle. Un facteur d’intensité de contraintes est ainsi associé à la piqûre. Il
traduit l’effet d’entaille. La transition entre piqûre et fissure est supposée se produire
130 Fatigue des matériaux et des structures 2
c = C p t1/3 [10.1]
4
π ⎞ ⎛⎜1.12Δ σ ⎞⎟
2
dc 1 3 − 1⎛
= Cp f ⎜
⎜ Q ⎟⎟ ⎜ Δ K ⎟ [10.2]
dN 3 ⎝ ⎠ ⎝ eq ⎠
Il est connu depuis longtemps que la présence d’un environnement gazeux réduit
fortement la durée de vie en fatigue par rapport à la fatigue dans le vide ou dans un
gaz inerte.
Une autre théorie [SHE 66] propose que la formation d’un film d’oxyde
empêche l’échappement des dislocations à la surface libre. Sous le chargement
cyclique, des lacunes et des vides voient le jour et donnent finalement naissance à
des fissures.
La vapeur d’eau est un contributeur majeur dans l’amorçage des fissures dans les
alliages d’aluminium. Le mécanisme est soit un renforcement de l’irréversibilité du
glissement, soit une fragilisation à l’hydrogène.
Dans le cas des fissures courtes, l’environnement n’est pas très différent entre
l’ouverture de la fissure sur l’extérieur et le fond de fissure où le processus de
fatigue corrosion se produit.
Ainsi, l’étape limitant le processus n’est pas la même dans le cas des fissures
longues (limitées par les phénomènes de transport par exemple) et les fissures
courtes (limitées par les phénomènes mécaniques ou les réactions électrochimiques).
Cet effet a été remarqué pour la première fois sur de l’acier 4130 par Gangloff
[GAN 85]. A l’atmosphère ambiante, les fissures courtes (0.1-0.8 mm) et longues
Fatigue-corrosion 133
prédictible que celle des fissures longues. En ce qui concerne l’aluminium 2024,
Piasick et Willard [PIA 94] ont montré qu’il n’y avait aucun effet de fissure courte
en ce qui concerne les vitesses de propagation. En particulier en eau de mer
synthétique, la similitude est conservée pour les fissures courtes de longueur
supérieure à 100 micromètres. Seul le seuil de fatigue disparaît. Il est suggéré que la
fermeture est le paramètre contrôlant la propagation des fissures courtes de longueur
supérieure à 100 micromètres. Pour des longueurs inférieures à 100 micromètres, les
fissures se propagent de manière intergranulaire contrairement aux fissures longues
qui suivent une voie transgranulaire. Il n’est donc pas étonnant que le principe de
similitude ne s’applique plus car il y a un net changement de mécanisme de
propagation.
Les courbes da/dN-Δ K ne suivent pas en général une loi de Paris unique sur tout
le domaine de Δ K. Localement, une loi de Paris est applicable. Pour les alliages
d’aluminium, Piasick et Gangloff [GAN 23] ont montré que ces changements de
pente correspondaient à des changements dans le mode de fracture (voir figure 10.5).
Le type 3 est caractéristique des matériaux qui possèdent un seuil bien défini de
corrosion sous tension. Au-dessus de ce seuil, la corrosion sous tension est active.
Ce phénomène étant fonction du temps, une diminution de la fréquence se traduit
immédiatement par une augmentation de la vitesse de fissuration par cycle. Cet effet
est illustré à la figure 10.8. Une diminution de fréquence peut aussi résulter en une
136 Fatigue des matériaux et des structures 2
lorsque l’on décroît la fréquence. Un effet de saturation est cependant noté à basse
fréquence.
1 in = 25,4 mm
)
(recuit)
cycle sinusoïdal
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1 in = 25.4 mm
Vitesse de fissuration, da/dN (inch par cycles)
En ce qui concerne les aciers en environnement gazeux, il a été montré que les
aciers type 4340 [JOH, NEL 89] sont susceptibles à la fatigue corrosion dans les gaz
donneurs d’hydrogène (hydrogène et vapeur d’eau). L’addition d’hydrocarbures
insaturés diminue la susceptibilité à la fatigue corrosion car leurs molécules sont des
accepteurs d’atomes d’hydrogène [GAN 90]. Les hydrocarbures saturés n’ont aucun
effet sur le processus. La présence d’impuretés telles que CO ou O2, diminue aussi
la susceptibilité à la fatigue corrosion [JOH, NEL 89]. Il est suggéré que ces atomes
138 Fatigue des matériaux et des structures 2
Pour les alliages d’aluminium, Wei [WEI 80] a montré que les vitesses de
fissuration étaient fonction d’un paramètre caractérisant l’exposition de la pointe de
fissure à l’environnement. Pour la vapeur d’eau, ce paramètre est le produit de la
pression partielle et de la fréquence de test. Bradshaw et Wheeler [BRA 69] ont
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vide
2.75
Longueur de fissure (mm)
2.00
0.50
Recuit
Cycle sinusoïdal
1 in = 25,4 mm
)
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Figure 10.11. Effet du pH de la solution NaCl (0.6M) sur les vitesses de fissuration
en fatigue-corrosion, pour des fréquences de 1 et 10 Hz.
Ti-6Al-6V-2Sn, laminé à chaud
Ces modèles [GAN 90] prédisent avec succès l’effet de la fréquence de test, du
potentiel d’électrode, de la composition de l’environnement et de l’activité des gaz.
Cependant, ces modèles présentent toujours des incertitudes dues aux mécanismes
d’endommagement du fond de fissure et des mécanismes fondamentaux de la
fragilisation par l’hydrogène. Un modèle pour décrire une zone d’endommagement
en avant de la fissure n’existe pas encore en fatigue corrosion. L’effet de la limite
d’élasticité, du facteur d’intensité de contraintes et de la microstructure ne peut donc
pas être prédit.
L’hydrogène est absorbé dans le métal et y diffuse. Deux écoles sont présentes.
L’une est fondée sur la production d’hydrogène comme étape limitante. L’autre
Fatigue-corrosion 143
suppose que la diffusion de l’hydrogène est l’étape limitante. Dans ce cas, l’hydrogène
est supposé diffuser par l’intermédiaire des grains, joints de grains ou dislocations
générées au fond de fissure. Malheureusement, ces modèles ne possèdent pas de
critère d’endommagement qui permettrait de relier le facteur d’intensité de
contraintes à la production ou diffusion de l’hydrogène. En ce sens, ils ne peuvent
pas prédire la vitesse de fissuration.
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Bien entendu, les équations présentées ici ne s’adressent qu’aux phases aqueuses.
Pour plus de détails, nous conseillons au lecteur le livre de J.S. Newman intitulé
Electrochemical Systems [NEW 91]. A la figure 10.14 est schématisée une fissure de
fatigue corrosion. Des réactions électrochimiques s’y produisent, notamment la
dissolution du métal. Des hydroxydes sont aussi formés. Ces ions vont se déplacer
sous un gradient de concentration et un gradient de potentiel j. L’ouverture et la
fermeture périodique de la fissure introduisent des phénomènes de convection qui
participent bien entendu au transport des espèces chimiques.
zjF
J j = − D j∇ C j − D j C j ∇ ϕ+ C j V [10.3]
RT
∂C j
= div J + S j [10.4]
∂t
144 Fatigue des matériaux et des structures 2
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∑ zi Ci = 0 [10.5]
i
De plus, les flux ioniques et le courant électrochimique sont reliés par la relation
suivante :
id = ∑ zi J i [10.6]
i
Ces équations s’appliquent en théorie aux solutions diluées, c’est-à-dire que l’on
ne tient pas compte des coefficients d’activité. Le couplage de ces équations avec un
mécanisme de fissuration est censé donner la vitesse de fissuration.
10.5. Conclusion
10.6. Bibliographie
[BAR 85] BARDAL E., Fatigue handbook, dans A.A Naess (dir.), Tapir, p. 291-312, 1985.
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146 Fatigue des matériaux et des structures 2
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Fatigue-corrosion 147
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[WEI 80] WEI R.P., PAO P.S., HART R.G., WEIR T.W., SIMMONS G.W., « Fracture mechanics
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Chapitre 11
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Effet de l’environnement
11.1. Introduction
Cet effet néfaste est illustré dans la figure 11.1 où sont comparées les durées de
vie en fatigue d’un alliage Al-4 % Cu alloy sollicité sous contrainte cyclique
alternée à l’air ambiant et sous vide poussé (<10-4 Pa), ce dernier environnement
étant considéré comme une référence sans effet du milieu environnant. A l’air
ambiant le nombre de cycles à la rupture s’avère beaucoup plus faible que sous vide
[BOU 76]. La figure 11.2 montre dans un diagramme bi logarithmique la vitesse de
propagation d’une fissure par fatigue, da/dN, (a étant la longueur de la fissure et N le
nombre de cycles), en fonction de l’amplitude cyclique du facteur d’intensité de
contrainte, Δ K, lors de la fissuration sous sollicitation alternée d’un acier inoxydable
type 304.
170
150 Air
Vide
Contrainte (MPa)
130
110
90
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70
50
104 105 106 107
NNf (cycles)
f
(cycles)
La fissuration à l’air s’avère bien plus rapide que sous vide, et le seuil de
propagation sous air plus faible que sous vide. Ces deux exemples illustrent
typiquement l’effet de l’environnement atmosphérique observé sur la plupart des
matériaux métalliques.
Figure 11.3. Courbe de Whöler du laiton sous atmosphères gazeuses [GOU 32]
11.2.2. Mécanismes
Pour expliquer l’effet de l’air atmosphérique sur la tenue en fatigue des métaux
et alliages, Thompson et al. [THO 56] furent les premiers à évoquer les mécanismes
d’adsorption chimique pouvant se produire sur une surface fraîchement créée,
induisant une fragilisation du métal par l’oxygène (figure 11.4a).
Suite à une première hypothèse tentant d’expliquer les durées de vie plus longues
sous vide par un mécanisme de recollement, [THO 56, WAD 58], de nombreux
auteurs raisonnent en comparant le vide à l’air (ce qui présuppose que le comportement à
l’air serait une référence et non l’inverse) ; cependant l’existence de ce type de
mécanisme a été clairement infirmée de longue date [LAI 63, MAR 68].
Des études fines ont, par la suite, été conduites sur monocristaux [GRO 66], et
sur du cuivre, [HUN 88, WAN 84] montrant un développement très comparable des
bandes persistantes de glissement à l’air et sous vide (figure 11.5).
Effet de l’environnement 153
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a)
b)
a) b)
Figure 11.6. Détermination par EBSD de l’orientation des grains au voisinage des bandes
persistantes de glissement dans un acier inoxydable. Définition des angles ; Φ : normale plan
de glissement/axe de chargement ; λ : normale plan de glissement/normale surface ; α :
direction glissement/axe de chargement ; β : direction glissement/normale surface [VIL 06].
Effet de l’environnement 155
K.U. Snowden [SNO 64] montra le premier sur le plomb (figure 11.7) une
évolution dite en S des courbes de durées de vie en fonction de la pression d’air
selon l’amplitude de sollicitation. Il a défini un seuil de pression critique d’air Pcr au
niveau du point d’inflexion des courbes qui correspond au maximum de sensibilité
aux variations de pression. Des évolutions analogues ont ensuite été observées sur
divers matériaux [HUD 76], précisant que l’effet de la fréquence observé à l’air
[ACH 68, HOR 66, SHE 66], n’existe pas sous vide [COF 72, DUQ 78] et que la
divergence des courbes exprimant le nombre de cycles en fonction du niveau de
contrainte entre air et vide est moins prononcée pour les fortes contraintes et les
faibles durées de vie.
Il ressort de l’ensemble de ces résultats que pour une fréquence donnée, lorsque
la pression du gaz environnant P>>Pcr l’effet de l’environnement est maximum et
insensible aux variations de pression, tandis que lorsque P<<Pcr l’effet de
l’environnement est inexistant comme sous vide. Les variations de pression sont en
revanche très sensibles dans un intervalle de pression d’un ordre de grandeur de part
et d’autre de Pcr. A pression constante, on peut de la même façon définir une
fréquence critique, l’effet de l’environnement devenant négligeable à très haute
fréquence et saturant à très basse fréquence.
N .P
ni = [11.1]
2π MRT
10-4 10-2
Figure 11.7. Durée de vie du plomb en fonction de la pression d’air [SNO 64]
Cet exemple illustre bien les interactions complexes existant entre microstructure,
environnement atmosphérique et température. Il est donc nécessaire d’avoir une
connaissance précise des différents mécanismes et effets mis en jeu avant toute
modélisation réaliste qui ne devra pas faire l’impasse sur les effets d’environnement,
notamment ceux induits par l’air atmosphérique. On peut aussi dire qu’une
modélisation qui ne prend pas en compte les effets d’environnement ne peut être
validée qu’à partir d’essais conduits en milieu inerte tel que le vide.
158 Fatigue des matériaux et des structures 2
5
2 ,5 0 10
316L
-3
Δ ε /2 = 2 x 1 0 a ir
5 p
2 ,0 0 10 vide
v a cu u m
à rupture
failure
5
1 ,5 0 10
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Cycles to
Nombre de cycles
5
1 ,0 0 10
4
5 ,0 0 10
0
0 ,0 0 10
0 100 200 30 0 40 0 500 600 700
T em p er a tu r e (°C )
œil de poisson [MUR 01]. Les raisons de ce comportement dans les très grandes
durées de vie restent à préciser.
Δσ / 2
2
Limite de fatigue
conventionnelle
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106
N
N
b)
Figure 11.10. Courbe schématique selon Murakami [MUR 01]
et Bathias [BAT 01]
Figure 11.11. Influence de l’humidité relative (5, 45, 55, et 85 %) sur l’endurance
d’un acier au chrome à très haute résistance : symboles ouvert pour amorçage en surface
et fermés pour amorçage interne [N0K 01]
Les résultats de Bradshaw and Wheeler [BRA 66] relatifs à un alliage 5070
(figure 11.12) furent les premiers à montrer l’existence d’un intervalle restreint de
pression partielle de vapeur d’eau dans lequel la vitesse de propagation d’une fissure
de fatigue, pour une amplitude du facteur d’intensité de contrainte Δ K donnée, est
fortement influencée par les variations de cette même pression partielle. Comme
pour les durées de vie en fatigue, la vitesse de fissuration est insensible aux
variations de la pression lorsque cette dernière est beaucoup plus grande ou
beaucoup plus petite que les valeurs correspondant à cet intervalle. Dans la
figure 11.12, l’influence de la longueur de fissure correspond en fait à une influence
du facteur d’intensité de contrainte, les essais étant conduits sous chargement
cyclique d’amplitude constante.
Afin de comprendre les effets des différents facteurs, qui peuvent être de nature
intrinsèque (composition chimique, pureté, microstructure) ou de nature extrinsèque
(environnement, température, géométrie des fissures et effets induits dont la
fermeture, condition de chargement dont le rapport de charge), des essais de
référence sous vide poussé sont nécessaires pour servir de référence et pour
découpler les effets qui interagissent entre eux. La confrontation des résultats
obtenus sur divers matériaux, après élimination des effets de fermeture, liés
essentiellement à la ductilité propre du matériau, à la rugosité et au rapport de charge
R, a montré que le comportement « intrinsèque » exprimé en fonction de Δ Keff
pouvait être décrit selon les trois régimes intrinsèques fondamentaux [PET 00a,
PET 03, PET 92] décrits ci-dessous.
Figure 11.14. Stade I intrinsèque sous vide dans un monocrystal d’alliage Al-Zn-Mg
sous revenu (zones GP cisaillables) orienté pour glissement facile (plan (111)
orienté à 45° selon l’axe de chargement horizontal dans cette figure)
La figure 11.16 montre que cette loi rend compte du comportement intrinsèque
de nombreux alliages d’aluminium, aciers et alliages à base de titane [PET 91]. La
faible dispersion sur l’ensemble des alliages résulte de valeurs de D* dépendant peu
de la nature du matériau et très peu de l’état structural.
Effet de l’environnement 165
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Figure 11.15. Stade II intrinsèque sous vide dans un monocrystal d’alliage Al-Zn-Mg
revenu au pic de dureté (précipitation mixte) et orienté pour glissement facile
(axe de chargement vertical dans cette figure)
10 -5
Ref. Alliages
Ref. Al
Al alloys
Ti6246, 500°C
Marval X12, RT
TiAl, 850°C
10 -6 Ti-6Al-4V, 300°C
Ti-6Al-4V, RT
30NCD16, RT
316, RT
-7
10 E460, RT
da/dN (m/cycle)
10 -8
10 -9
10-10
10-11
10 -6 10 -5 10 -4 10 -3
1/2
Δ Keff/E (m )
valeur seuil. Une telle transition peut aussi s’effectuer à l’échelle de chaque grain
dans un polycristal. Ce changement est réversible lorsque Δ K augmente à nouveau
après avoir atteint le seuil. L’amplitude critique de Δ K pour cette transition dépend
donc de l’état microstructural. D’une façon générale, le stade I a ainsi tendance à
devenir prédominant près du seuil.
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Plan (111)
Δσ Δσ
0,5 mm
Seuil
Figure 11.17. Changement de régime de propagation intrinsèque dans un mono cristal Al-Zn-
Mg revenu au pic de dureté et orienté pour le glissement facile : stade II en début de
fissuration près de l’entaille ; stade I à faible Δ K près du seuil ; retour en stade II après seuil
lorsque Δ K augmente au dessus d’une valeur critique.
Ce régime est principalement observé aux faibles vitesses de fissuration dans les
polycristaux, lorsque l’état microstructural favorise la localisation de la déformation,
notamment à l’approche du seuil, ou lors de la propagation initiale des fissures
courtes.
Effet de l’environnement 167
a)
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b)
a b
a) b)
c) c
Figure 11.20. Effet de barrière d’un joint de grain dans un bicristal Al-Zn-Mg
fissuré en fatigue sous vide [PET 06] ; a) et b) blocage de la fissure sur le joint de grain ;
c) faciès de rupture
Effet de l’environnement 169
D’une façon générale, le retard est beaucoup plus accentué sous vide, l’environnement
facilitant le franchissement des joints de grain en favorisant l’activation d’autres
systèmes de glissement. Les bifurcations et branchements accentuent le ralentissement
en écrêtant le facteur d’intensité de contrainte. Il n’existe pas à ce jour de modèle
précis pour rendre compte de ces processus très complexes et typiquement
tridimensionnels.
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La figure 11.21 présente des courbes effectives de propagation à l’air pour une
sélection d’aciers et d’alliages légers. Contrairement à ce qui a été vu sous vide, il
n’y a clairement pas de rationalisation, en particulier pour les alliages légers.
Sur la base des résultats expérimentaux obtenus sur les trois familles d’alliages à
base d’aluminium de fer et de titane, sous vide, à l’air ambiant et sous gaz inerte
contenant des traces de vapeur d’eau bien contrôlées, un modèle descriptif a été
établi par Petit et al. [PET 00a] qui incorpore deux mécanismes complémentaires de
propagation en stade II assistée par l’environnement qui sont décrits schématiquement
en comparaison avec le régime intrinsèque en stade II (voir figure 11.22).
170 Fatigue des matériaux et des structures 2
-5
10
X7075 T7351
7475 T7351
7020 T651
-6 2618 T651
10 30NCD16
E460
METASAFE
316
-7
10 Ti-6Al-4V
da/dN (m/cycle)
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-8
10
-9
10
-10
10
-11
10
-6 -5 -4 -3
10 10 10 10
1/2
Δ Keff/E (m )
Stade II
Régime assisté par intrinsèque
l’Hydrogène
(m=2) Pseudo-
Stade I
(m=4)
Δ Keff / E
La figure 11.23 positionne cette vitesse critique par rapport aux courbes des
régimes de fissuration assistée par l’environnement. Pour décrire la propagation
assistée par l’adsorption de la vapeur d’eau, un modèle a été proposé [PET 00a]
dérivé de celui de la propagation intrinsèque en stade II, et décrit par une relation
similaire à celle donnée précédemment :
F
θ = SN RT Pot [11.5]
o
La relation [11.5] correspond au cas d’une propagation cycle par cycle (domaine
de Paris). Mais près du seuil, la fissure avance pas à pas tous les Ns cycles. Hénaff et
al. [HEN 90], ont proposé une reformulation de l’évolution de θ pour une fissure
quasi stationnaire telle que :
1 Po
αSoθ/4F – N V Log (1 – θ) = 4 N RT t [11.6]
s a o
θ= {X2/(X2+9)}2 [11.7]
avec :
Résultats Expérimentaux
Modélisation Stade II intrinsèque
Modélisation Stade II assisté par l'adsorption
-7
10
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-8
da/dN (m/cycle)
10
-9
10
Stade II intrinsèque
Stade II Adsorption
-10
10
-5
10 1/2 0.0001
Δ Keff / E (m )
Figure 11.24. Transition du stade II intrinsèque à vitesse moyenne vers le stade II assisté
par l’adsorption de la vapeur d’eau près du seuil dans un alliage 2022T351. L’influence
de l’adsorption est prise en compte à l’aide de la relation [11.7] [GAS 06]
2 3
1 4 5
Figure 11.25. 1) Transport des molécules d’eau vers la pointe de fissure ; 2) adsorption
physique ; 3) adsorption chimique et dissociation ; 4) pénétration de l’hydrogène ;
5) diffusion par drainage dans la zone plastifiée
Pour une vitesse de propagation de 10-9 m/cycle, le nombre de cycles par stries
sous air reste de quelques unités tandis que, sous vide, il devient de l’ordre de 1 000
cycles. Une étude plus récente, réalisée sur des aciers austénitiques par Mc Evily et
al, [McE 92], a confirmé cet effet de l’air ambiant sur l’émoussement. Ces
observations convergent dans le sens d’une réduction sous environnement actif des
déformations cycliques plastiques cumulées nécessaires pour provoquer un incrément
176 Fatigue des matériaux et des structures 2
fissure.
2µm
Figure 11.26. Surface de rupture d’un alliage 2024T3 testé sous vide (haut de figure)
et à l’air (bas). La flèche indique la direction de la propagation [MEY 68]
Figure 11.27. Variation de la microdureté dans la zone plastifiée à la pointe d’une fissure
de même longueur et soumise à la même contrainte à l’air (cercles pleins)
et sous vide (triangles) dans un alliage léger Al-4 %Cu [BOU 76]
178 Fatigue des matériaux et des structures 2
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a) b)
Figure 11.28. Microfractographie de la surface d’une fissure se propageant sous vide près
du seuil dans un monocristal Al-Zn-Mg revenu au pic de dureté (profil de fissure dans figure
11.17) ; a) stade I (da/dN~ 1.5x10-11 m/cycle, Δ Keff ~ 0.9 MPa√ m ; b) stade I près de la
transistion stadeI/stade II après seuil (da/dN ~ 10-8 m/cycle,Δ Keff ~ 4.2 MPa√ m).
11.3.5.1. Microstructure
L’influence de la microstructure sur la sensibilité à l’environnement a été mise
en évidence initialement par Wei et al. sur des aciers Maraging [WEI 67] et
Bradshaw et Wheeler [BRA 69] sur des alliages d’aluminium. La sensibilité de
l’effet de l’environnement à l’orientation cristallographique a été montrée sur la
fissuration de monocristaux de cuivre [VIO 79]. L’environnement (air ou vide) peut
Effet de l’environnement 179
contre, sous vide, l’état sous revenu est bien plus résistant à la fissuration que l’état
surrevenu ; en effet, dans ce cas, la localisation de la déformation génère une
propagation cristallographique très retardée comparativement au régime de stade II
intrinsèque de l’alliage surrevenu.
videT651
-7 vide T7351
10
airT651
airT7351
-8
10
da/dN (m/cycle)
7075T651 vide
-9
10
-10
10
7075T7351 vide
-11
10
1 10
1/2
Δ K (MPa. m )
11.3.5.2. Température
L’influence de la température sur l’action de l’oxygène, de la vapeur d’eau ou
bien encore de l’hydrogène en fonction de la pression et de la fréquence en dehors
des domaines où interviennent les processus de corrosion et d’oxydation à chaud, a
été peu étudiée [SMI 71, STE 72].
vapeur d’eau a été mise en évidence, la sensibilité à cette espèce active étant
fortement dépendante à la fois de la température et de la microstructure [GAS 06].
L’alliage de Titane Ti-6Al-4V [SAR 97], assez peu sensible à l’effet de l’air à la
température ambiante, présente un effet très important à 300 °C (voir figure 11.31)
dans le domaine des vitesses de propagation lentes. Le faible effet de l’environnement
pour les vitesses supérieures à 10-8 m/cycle résulte d’une faible accélération induite
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par l’adsorption de la vapeur d’eau à l’air par rapport au stade II intrinsèque sous
vide.
-7
10
100
air
-8
10
da/dN (m/cycle)
-9
10
vide
-10
10
100
-11
10
2 3 4 5 6 7 8 910
1/2
Δ K (MPa m )
eff
Figure 11.31. Vitesse de propagation des fissures dans un alliage de titane TA6V à 300 °C :
sous vide propagation cristallographique retardée en pseudo stade I près du seuil, et à l’air
propagation en stade II accélérée par l’effet d’environnement. L’échelle est indiquée en
microns.
Un alliage léger Al-Cu-Mg type 2022 T351 testé à -50 °C, température régnant à
haute altitude, montre un changement abrupt de régime de propagation entre l’air
ambiant et l’air sec et froid (figure 11.32) pour une large gamme de vitesses de
propagation entre le seuil et 10-6 m/cycle. Une propagation en pseudo stade I à
caractère cristallographique fortement ralentie (environ 20 fois) analogue à celle
sous vide prévaut sous air sec et froid (très basse pression partielle de vapeur d’eau),
contrairement à une propagation plane en stade II à l’air ambiant. La transition entre
les deux régimes correspond à une exposition de 10-2 Pa.s-1.
Figure 11.32. Surface de rupture par fatigue d’un alliage 2022 T351 :
à gauche à l’air ambiant ; à droite, sous air sec et froid [GAS 06]
11.3.5.3. Fermeture
Si la plasticité contrôle généralement la fermeture dans le domaine de Paris, deux
facteurs essentiels conditionnent la fermeture au voisinage du seuil et le niveau de ce
dernier :
– la rugosité des surfaces de fissuration, liée à la fois à l’état microstructural du
matériau, à l’environnement, à la température, éventuellement à la fréquence ;
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L’action conjuguée de ces deux facteurs et donc des divers paramètres qui les
déterminent, est la raison de la multiplicité des comportements constatés selon les
matériaux, les conditions mécaniques de sollicitation et le milieu ambiant.
En particulier, comme nous l’avons vu, les états sous-vieillis des alliages
d’Aluminium ou les états lamellaires dans les alliages de Titane engendrent sous
vide une fissuration en pseudo-stade I avec des surfaces cristallographiques présentant
de fortes aspérités ; ceux-ci provoquent une fermeture anticipée qui réduit l’amplitude
effective de la contrainte appliquée. Les effets de fermeture sont donc modifiés par
le changement de mécanisme de fissuration induit par l’environnement.
-6
10
1/2 Δ CTOD
e/2 (m)
-7
10
Air 35Hz
Air 7Hz
Azote 150ppm H2O 35Hz
-8
10
4 6 8 10 30
1/2
Δ K MPam
104 Pa, induite par la fissuration, a été démontrée sur différents alliages par Swanson
et Marcus dès 1978 [SWA 78].
-7
10
10 -8
da/dN (m/cycle)
10 -9
Vide
10
-10 Air
Azote +150ppm H2 O
10 -11
5 6 7 8 9 10 20 30
Δ K (MPam 1/2)
-6
10
Vide
Air
-7
10
Azo te + 150ppm H O
2
-8
10
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op
K
-9
10
-10
10
-11
10
2 4 6 8 10 30
ΔK
Figure 11.35. Courbes de propagation da/dN-Δ K pour l’acier E460
sous différents environnements à R = 0,7 et 35 Hz
Figure 11.36. Mesure SIMS du taux de surépaisseur χ = e/Δ CTOD de la couche oxydée près du
seuil pour 4 états microstructuraux d’un alliage 7075 : T351 sous revenu, T651 revenu au pic
de dureté, T7351 surrevenu, et fortement surrevenu 24H à 200 °C [PET 82, SUR 84]
Sur un alliage léger 7075 [PET 84], il a été montré que ce mécanisme de
fermeture induite par l’oxydation s’avère très sensible à l’état microstructural
(figure 11.36) l’état surrevenu favorisant une propagation en stade II très plan
Effet de l’environnement 185
La propagation plus rapide des fissures courtes intervenant pour des valeurs du
facteur de contrainte inférieures au seuil des fissures longues a été associée, pour
une large part, à l’absence de fermeture ou une fermeture moins importante de ces
fissures. Les travaux peu nombreux sur l’effet de l’environnement atmosphérique,
[LAN 83, PET 90, ZEG 86], montrent une influence de l’environnement au moins
aussi marquée sur les fissures courtes que sur les fissures longues. Toutefois, l’effet
fissure courte est généralement moins marqué sous vide qu’à l’air (voir figure
11.37). La figure 11.38 montre l’exemple de la propagation de fissures physiquement
courtes en profondeur (fissures 2D) dans un acier à haute limite d’élasticité type
E40. La quasi absence d’effet de fissure courte sous vide fait contraste avec l’effet
de fissure courte très marqué observé à l’air. Cet exemple montre que, sous
environnement actif, la propagation assistée par l’hydrogène dans le domaine des
basses vitesses est accompagnée d’une diminution drastique de la fermeture sur près
de 1mm de profondeur, tandis que, sous vide, la fermeture liée à la plasticité se
développe et se stabilise bien plus rapidement (voir figure 11.38).
-8
10 Air, fiss. courte
Vide, fiss. courte
Air, fiss. longue
Vide, fiss. longue
-9
da/dN (m/cycle)
10
-10
10
-11
10
4 5 6 7 8 9 10
1/2
Δ K (MPa.m )
3.5
3
(MPa. )
1/2
2.5
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2
op
K
1.5 Air
Vide
1
0.5
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4
a (mm)
-9
da/dN (m/cycle)
10
-10
10
-11
10
4 5 6 7 8 9 10
1/2
ΔK (MPa.m )
eff
Figure 11.39. Courbes da/dN en fonction de Δ Keff pour des fissures 2D dans un acier E460
(correspond aux courbes de fissuration nominales de la figure 11.37
et aux variations de fermeture de la figure 11.38) [PET 99]
Effet de l’environnement 187
De nombreuses études ont été réalisées pour caractériser les facteurs influant sur
le comportement en fatigue sous chargement uniaxial d’amplitude variable, ou sous
spectre de charge représentatif des conditions réelles [GEA 92, SUR 83].
Koterazawa and Nosho [KOT 92] ont par ailleurs montré que des surcharges
intermittentes après un grand nombre de cycles de sollicitations d’amplitude
constante, induisait des accélérations dont l’amplitude dépendait fortement de
l’environnement. L’accélération la plus faible est observée sous vide et la plus
élevée sous air sec et sous azote contenant des traces d’humidité. Par contre, sous air
humide, une accélération plus réduite que sous air sec est expliquée par la formation
d’une couche d’oxyde qui vient amplifier l’effet de fermeture.
188 Fatigue des matériaux et des structures 2
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Figure 11.40. Vitesse de propagation d’une fissure de fatigue dans un acier 30NCD16 sous
chargement à R = 0,7 à l’air et sous vide ; a) chargement d’amplitude constante avec un
large effet d’environnement près du seuil ; b) chargement variable avec surcharge périodique
tous les 10 000 cycles sur le niveau moyen (R = 0,78) avec effet d’environnement apparemment
réduit près du seuil [PET 03].
Un dernier exemple peut être donné par l’étude de la propagation des fissures
dans un acier à haute résistance sous un rapport de charge élevé (voir figure 11.40),
simulant les surcharges des éléments d’un rotor d’hélicoptère lors d’un virage
[HEN 92b]. Les différences de retard entre air et vide en fonction de l’amplitude du
facteur d’intensité de contrainte et du nombre de cycles entre les périodes de
surcharge, conduit à des courbes de propagation qui peuvent sembler surprenantes.
Mais ces résultats peuvent s’analyser complètement à partir des courbes de
fissuration près du seuil dans cet alliage.
ailleurs l’environnement ambiant est connu pour altérer la tenue en fatigue des
alliages d’Aluminium. La figure 11.41 montre les courbes de propagation da/dN en
fonction de Δ K obtenues à 20 KHz sur un alliage 2024T3, sous air, sous air sec et
sous vide [HOL 04]. Le comportement à haute fréquence est en accord avec celui
observé dans les essais conventionnels. Sous air, la pression de vapeur d’eau est
toujours suffisante pour saturer le processus d’assistance de la fissuration conduisant
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à des vitesses de propagation beaucoup plus élevées que sous vide. Sous air sec à
haute fréquence et pour des vitesses de fissuration supérieures à 10-10 m/cycle, l’effet
d’environnement ne se manifeste pas, car la pression partielle d’eau est suffisamment
basse et l’étendue des surfaces fraîches créées à chaque cycle suffisamment grande
pour qu’une couche monoatomique adsorbée n’ait pas le temps de se former.
Figure 11.41. Courbes da/dN-Δ K pour un alliage 2024-T351 à 20 KHz [HOL 04]
Des résultats comparables ont été obtenus à 35Hz [PET 00a], la transition étant
alors entre 10-8 et 10-7 m/cycle, ce qui est en accord avec une fréquence 570 fois plus
basse. Pour des vitesses inférieures, le processus d’adsorption de la vapeur d’eau
devient actif, et au niveau du seuil les conditions requises pour une saturation
190 Fatigue des matériaux et des structures 2
comparable à celle existant à l’air ambiant sont atteintes. Ceci explique que les
seuils sous air ambiant et sous air sec soient identiques. Le comportement à haute
fréquence est donc en plein accord avec le modèle exposé plus haut.
Des travaux récents sur un alliage de Titane type TA6VA [RIT 99] permettent
de comparer le comportement en fissuration à l’air et sous vide à fréquences
conventionnelles (35Hz à 50Hz) et à 1 KHz sur une machine hydraulique spécifique.
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La figure 11.42 présente les résultats obtenus à hautes fréquences avec un rapport de
charge élevé (0.6 à 0.8) limitant ainsi le rôle de la fermeture, et corrigés de fermeture
pour les essais conventionnels. L’extension de l’exploration du domaine de
fissuration aux vitesses ultralentes apporte des informations essentielles.
(
Δ K MPa m1 / 2 )
Figure 11.42. Influence de l’air ambiant comparativement au vide sur la propagation des
fissures de fatigue dans l’alliage Ti-6Al-4V à des fréquences conventionnelles de 35 et 50 Hz,
à une fréquence élevée de 1à 1,15 KHz. Comparaison avec les régimes intrinsèques en
stade II et pseudo-stade I, et le régime de stade II assisté par l’adsorption de vapeur d’eau
[PET 06, RIT 99].
partielle d’eau dans l’air ambiant est toujours suffisante pour créer une monocouche
adsorbée, comme sur l’alliage léger vu ci-dessus.
11.4. Conclusion
inerte se devraient donc d’être réalisés sous un vide poussé (inférieur à 10-7 torr) en
particulier pour les fréquences inférieures à 1 Hz ;
– l’effet néfaste de la vapeur d’eau atmosphérique a été très largement démontré
à la température ambiante et à température modérée dans les métaux et alliages
métalliques tant sur l’amorçage que sur la propagation des fissures. Cet effet n’exclut
pas un possible rôle d’autres gaz, notamment de l’oxygène. L’effet majeur de ce
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Chapitre 12
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12.1. Introduction
La fatigue des matériaux et des structures est un domaine complexe dans lequel
de multiples facteurs interviennent simultanément avec des couplages plus ou moins
forts. La durée de vie d’une pièce résulte à la fois de sa conception (notamment sa géo-
métrie), sa fabrication (procédé), des caractéristiques et du comportement du matériau
et du chargement au sens large : incluant la température et l’environnement (figure
12.1). Les effets de tous ces facteurs sur la durée de vie des structures sont connus
– au moins qualitativement – mais il est toujours impossible de prévoir de façon fiable
la durabilité des structures sans essais.
Afin d’éviter les défaillances des structures en service liées à la fatigue, les ingé-
nieurs ont mis en place, depuis les premiers problèmes de fatigue connus (Wöhler,
1860), des démarches expérimentales pour tester des éprouvettes et des structures sous
chargements de fatigue. Qu’il s’agisse de certifier la conception d’une structure avant
sa commercialisation ou de valider les prévisions d’une méthodologie de calcul de
durée de vie, il reste aujourd’hui indispensable de réaliser des essais de fatigue dans
des conditions les plus proches possibles de celles que rencontreront le matériau et la
structure au cours de leur utilisation. Prévoir ou estimer la durée de vie des matériaux
et des structures en conditions réelles est un problème complexe et pluridisciplinaire
[SCH 03].
Figure 12.1. Paramètres influençant la durée de vie d’une structure (d’après [BER 02])
essais » pour décrire des essais sur des objets de complexité croissante (de l’éprouvette
de laboratoire à la structure complète grandeur nature en passant par des éprouvettes
technologiques) ; mais ceci se pratique aussi dans la plupart des secteurs industriels
(automobile, ferroviaire notamment). Bien entendu le nombre d’essais est plus impor-
tant sur les structures de la base de la pyramide (car peu onéreux) que sur les essais
sur structures réelles (sommet de la pyramide). De même, les chargements appliqués
doivent être proches des sollicitations réelles (figure 12.3) faute de quoi on risque de
surdimensionner les organes mécaniques [BER 02]. Ce chapitre a pour objectif de
présenter les différentes possibilités actuelles pour déterminer la durée de vie en ser-
vice des matériaux et des structures à l’aide d’essais de simulation. Le lien avec les
méthodes de calcul et de simulation numérique sera également fait dans la dernière
partie de ce chapitre.
Figure 12.2. Evolution de la représentativité des essais de fatigue en fonction du réalisme des
pièces testées (d’après [SCH 94a])
Dans la majorité des cas, les chargements réels appliqués aux structures ne sont
pas cycliques et n’ont pas une amplitude et une valeur moyenne constantes ; ils sont
dits d’amplitude variable ou aléatoires comme l’illustre la figure 12.4. L’étude de la
durée de vie en fatigue d’un matériau ou d’une structure sous sollicitations cycliques
n’est donc pas représentative de la durabilité en environnement réel. Nous verrons
que les moyens d’essais actuels permettent de solliciter les pièces mécaniques par des
chargements enregistrés en service ou par des séquences standardisées représentatives
du service. On parle alors d’essais de simulation.
ni wi ni
di = ⇐⇒ di = [12.1]
Ni wi Ni
Cette loi très simple suppose que l’endommagement s’accumule linéairement avec
le nombre de cycles. Il a été montré dans la littérature que sous des chargements
d’amplitude variable cette loi peut être mise en défaut notamment lorsqu’il y a des
effets de surcharges dans le domaine de la fatigue oligocyclique suivis de cycles de
faible intensité (dans le domaine des grandes durées de vie) ou inversement. On parle
alors d’effet d’histoire [FAT 98, SCH 03]. Il n’en reste pas moins vrai que la règle
de Miner est utilisée dans l’industrie pour estimer la durée de vie de structures sous
sollicitations de service. Cependant, les lacunes de ce modèle conduisent souvent les
ingénieurs à modifier la loi de cumul d’endommagement ou à prendre des précautions
pour deux raisons essentielles :
210 Fatigue des matériaux et des structures 2
– (i) la courbe de Wöhler du matériau doit être utilisée pour connaître la durée
de vie Ni associée à chaque niveau de contrainte σi . Pour tenir compte de l’effet
d’endommagement des cycles inférieurs à la limite de fatigue plusieurs modèles de
courbe S-N sont utilisés : Miner original, Miner modifié, Miner élémentaire (figure
12.6) ;
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2. Ceci illustre la nécessité de progresser dans les modèles de cumul d’endommagement mais
aussi dans l’ensemble de la méthodologie de prévision de la durée de vie des structures.
Fatigue sous chargements d’amplitude variable 211
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Les essais de simulation, encore appelés essais sous spectres de chargement, sont
réalisés afin de se rapprocher autant que possible des sollicitations que rencontrera
réellement la structure au cours de sa vie. Pour les essais sous chargements sinusoi-
daux d’amplitude constante ou d’amplitude variable par blocs, l’évolution temporelle
des efforts ou des moments appliqués est déterministe, c’est-à-dire qu’elle peut être
définie par une relation mathématique explicite.
N0+
I= [12.2]
Ne
Un signal est dit à bande étroite si son facteur d’irrégularité I est proche de 1 (il y
a presque autant de maximums que de cycles), il est dit à bande large si I est voisin
de 0. A titre d’exemple, I = 0, 99 pour le signal de la figure 12.8a alors que I = 0, 74
pour la figure 12.8b. La largeur de bande est aussi parfois quantifiée par le paramètre
(1 − I 2 ).
3. Par exemple, pour une voiture de course, l’enregistrement de la déformation dans une direc-
tion en un point d’un bras de suspension au cours d’un tour de circuit constitue un échantillon
ou encore une réalisation du processus.
Fatigue sous chargements d’amplitude variable 213
a) b)
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Figure 12.8. Exemple de signaux à bande étroite (a) et à large bande (b) (d’après [PIT 01])
Il est important de noter que représenter un processus aléatoire par sa seule DSP
est une représentation incomplète. En effet, une DSP ne contient pas d’information sur
la phase, seule la partie réelle est décrite. On ne peut donc pas reconstruire un signal
temporel par sa seule DSP ; il n’y a pas bijection entre une DSP et un signal temporel.
Pour générer un signal temporel à partir d’une DSP il faut donc faire des hypo-
thèses sur la distribution des phases. Par exemple, pour des signaux ergodiques sta-
tionnaires gaussiens, la phase est uniformement distribuée entre −π et +π radians.
L’algorithme géneralement utilisé pour la génération artificielle de signaux temporels
à partir d’une DSP donnée est basé sur la transformée de Fourier rapide (Fast Fou-
rier Transform ou FFT) et sur la méthode de Monte-Carlo pour le tirage de nombres
aléatoires utilisés pour la phase [PRE 94a, WIR 95].
Il existe aussi des essais de fatigue d’amplitude variable pour lesquels les charge-
ments ne sont pas décrits dans le domaine temporel mais dans le domaine fréquentiel
par leur DSP. Ces essais sont notamment utilisés en aéronautique et dans le domaine
214 Fatigue des matériaux et des structures 2
spatial. On parle alors souvent de fatigue vibratoire mais ce n’est qu’une termino-
logie différente puisqu’il s’agit bien de chargements mécaniques évoluant au cours
du temps et entraînant l’amorçage de fissures de fatigue et leur propagation éventuelle.
Pour connaître les chargements de service, il est nécessaire de réaliser des cam-
pagnes d’enregistrement en service des chargements appliqués sur les composants
mécaniques. Divers capteurs (jauges de déformations, accéléromètres, capteurs de
force ou de déplacement, etc.) sont judicieusement placés sur la structure ; les signaux
qu’ils délivrent sont enregistrés et stockés [LEE 05].
double de la fréquence de l’harmonique de plus haut rang présent dans le spectre fré-
quentiel des signaux, un filtrage analogique passe-bas avant numérisation (avec une
fréquence de coupure égale à la moitié de la fréquence d’acquisition) évite les pro-
blèmes de repliement de spectre pouvant survenir lors d’une analyse fréquentielle des
signaux [BLA 06] après leur enregistrement. Dans tous les cas il convient de s’assu-
rer que les conditions d’enregistrement et de numérisation ne conduisent pas à une
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pics classés par ordre décroissant et des vallées associées par ordre croissant. Une
variante de cette technique permet d’éviter de compter toutes les petites oscillations :
on ne compte alors que les passages par la moyenne du signal (mean peak count).
Fatigue sous chargements d’amplitude variable 217
– Comptage des temps de maintien (time count) : cette technique n’utilise pas la
notion de cycle et repose sur l’estimation de la densité de probabilité du signal. L’évè-
nement statistique compté est le nombre de passages du signal à un niveau donné.
L’application de cette méthode ne doit pas se faire après passage en pics et vallées du
signal d’origine. Pour une séquence de durée T , la densité de probabilité d’un niveau
Ai est exprimée par :
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P
j ∆tj
p(Ai ) = lim [12.3]
Ai →0 Ai T
– Comptage des étendues (simple range count) : dans cette technique, l’évènement
compté est l’étendue définie comme la différence entre deux extréma locaux du signal.
Deux cas de figure se présentent : (i) le premier extrémum est une vallée, alors l’éten-
due sera positive, (ii) le premier extrémum est un pic, alors l’étendue sera négative.
Selon les cas on comptera des étendues positives, ou des étendues négatives, ou bien
les deux. Quand les étendues positives (ou négatives) sont comptées, chaque étendue
définit un cycle. Si les étendues positives et négatives sont comptées, alors chaque
étendue définit un demi-cycle.
– Comptage des étendues appariées (range-pair counting) : seuls les pics et les
vallées du signal sont utilisés par cette technique de comptage. Une paire d’étendues
consécutives (un pic suivi d’une vallée et une vallée suivie d’un pic ou inversement)
de même taille et de signe opposés constitue un cycle. Le comptage est effectué si
l’étendue ei+1 est supérieure ou égale à l’étendue ei ; les points formant l’étendue ei
sont alors enlevés de la séquence et le comptage recommence au début.
– Comptage des dépassements de niveau (level crossing counting) : cet algorithme
de comptage dérive de celui des temps de maintien. Deux techniques du nombre
de dépassement de niveau existent [AST 85, GRÉ 88]. Par exemple, selon l’ASTM
[AST 85] le comptage d’un cycle est effectué chaque fois que le signal dépasse un
niveau de référence (la valeur moyenne de la séquence par exemple) avec une pente
positive. Lorsque le signal est sous le niveau de référence, le comptage est fait chaque
fois que le signal dépasse la classe d’amplitude avec une pente négative. L’utilisa-
tion d’un niveau de référence, rend cette technique inadaptée aux chargements dont
la valeur moyenne fluctue de façon importante (engins de levage, pièces de train de
véhicules automobiles lors de changement brusque de direction, freinage, etc.).
– Comptage Rainflow (AFNOR, ASTM) : cette technique issue de la technique
des étendues appariées est aujourd’hui la plus utilisée [AFN 93, AST 85]. Les tech-
niques Rainflow considèrent un cycle par analogie avec l’aire d’une boucle d’hysté-
résis dans un diagramme contrainte déformation. D’après le résultat d’un comptage
avec la méthode Rainflow (ou de la goutte d’eau) on peut retrouver le résultat de la
méthode des extréma, de la méthode des dépassements de niveaux, de la méthode des
étendues et des étendues appariées. Bien que non normalisée, une technique de comp-
tage Rainflow pour les chargements multiaxiaux a également été publiée [DRE 92].
218 Fatigue des matériaux et des structures 2
Pour des chargements (ou des états de contraintes) multiaxiaux non proportionnels
on applique généralement une méthode de comptage donnée sur une variable scalaire
équivalente. Le choix de cette grandeur équivalente (généralement homogène à une
contrainte ou à une déformation) n’est pas encore bien défini. Wang et Brown, par
exemple, utilisent la méthode de comptage Rainflow appliquée à la déformation équi-
valent au sens de Von Mises [WAN 96a, WAN 96b].
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Figure 12.11. Différence entre les cumulatifs de charge obtenus sur un même signal par la
méthode des étendues appariées (1) et par la méthode des dépassements de niveaux (2)
[GRÉ 88]
de l’ordre d’apparition des niveaux de contrainte. Par contre, dans le domaine de l’en-
durance et de l’endurance limitée l’effet d’histoire reste moins évident [PAL 96].
route de montage, chemin avec mauvais pavés, etc.). Il est nécessaire de respecter le
collectif de charge pour se rapprocher des sollicitations rencontrées en service.
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Figure 12.12. Comparaison d’un cumulatif de charge réel (passage de véhicules sur un pont
métallique, trait plein) avec un cumulatif gaussien (pointillés) [RAB 03]
Si la séquence de chargement est longue (106 cycles et plus) les évènements rares
sont généralement présents (de une à dix fois pour un million de cycles). Par contre
pour des enregistrements en service plus courts que l’on souhaite utiliser pour iden-
tifier expérimentalement les spectres de chargement à appliquer au banc d’essai ou
à prendre en compte dans les calculs de simulation, il est nécessaire de procéder à
222 Fatigue des matériaux et des structures 2
des modifications artificielles. En effet, il faut que les essais de simulation ou bien les
calculs de durée de vie tiennent compte des évènements peu probables [LEE 05]. On
peut par exemple être amené à extrapoler le niveau maximum des signaux les plus
rares (figure 12.13). Il faut cependant veiller à ne pas dépasser des limites physiques
imposées par le fonctionnement du système mécanique ou bien parce qu’au delà une
rupture brutale surviendrait nécessairement.
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Figure 12.13. Modification d’un spectre par extrapolation des évènements les plus rares
[LEE 05]
représente 200. Pour les hélicoptères, Hélix et Félix représentent 140 vols de pales de
rotor (respectivement articulé et fixe). Toujours dans le secteur aéronautique, l’effet
de la température intervient dans Enstaff (version de Falstaff incluant les fluctations
de température).
Dans le secteur offshore, le spectre Wash concerne les effets de la houle, du vent
et des courants sur des structures de plates-formes pétrolières (de la mer du Nord ou
subissant des charges analogues).
Les spectres Carlos ont été créés par un consortium de constructeurs automobiles
européens associés au FhG-LBF (Fraunhofer-Institut für Betriebsfestigkeit) et à IABG
224 Fatigue des matériaux et des structures 2
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Figure 12.14. Différentes partie de la séquence Hot Turbistan (d’après [HEU 05])
Figure 12.15. Séquences uniaxiales Carlos avec omission des petits cycles [SCH 90]
Fatigue sous chargements d’amplitude variable 225
Selon les moyens d’essais dont on dispose, et l’objectif que l’on se fixe, ces der-
niers peuvent être plus ou moins complexes. Par ordre de complexité croissante, les
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Lors des essais d’amplitude variable, la séquence d’essai est reproduite jusqu’à ce
qu’un critère d’arrêt soit atteint (amorçage d’une fissure de taille fixée, perte de raideur
ou rupture de la pièce en plusieurs parties). Il est nécessaire d’appliquer la séquence
au moins 5 à 10 fois pour que l’essai soit qualifié de représentatif [SON 07].
Depuis la fin des années 1980, les progrès de l’informatique et des systèmes
numériques de pilotage des moyens d’essais servo-hydrauliques permettent de réali-
ser des essais sous des signaux de chargements très proches des signaux enregistrés en
service. Généralement les moyens d’essais servo-hydrauliques actuels sont pilotés par
des cartes à micro-contrôleur dialoguant avec un ordinateur de type PC. Ce dernier
permet de générer les fichiers d’essais (sinus, blocs programmés, pics et vallées,
signaux réels), de définir les conditions d’essais et d’asservissement (déphasage,
décalage temporels, valeur moyenne, tolérance sur les grandeurs asservies), ainsi que
les limites de sécurité et les seuils d’arrêt d’essai sur les diverses grandeurs surveillées
en temps réel. Enfin, il est possible d’acquérir dans des fichiers numériques les
grandeurs asservies et celles mesurées.
La technique des essais par blocs programmés est la plus ancienne ; elle a été
proposée par Ernst Gassner au FhG-LBF à partir de 1939 [GAS 39, GAS 77]. Elle
consiste à reproduire de façon approchée un cumulatif de charge par une succession
de blocs de chargements sinusoïdaux ayant tous la même contrainte moyenne. La
méthode classique comprend 8 niveaux de charges (ou de contrainte) différents. Pour
des raisons techniques pratiques, les blocs sont appliqués par ordre d’amplitude crois-
sante de la plus faible à la plus grande amplitude puis de façon décroissante (figure
12.16).
226 Fatigue des matériaux et des structures 2
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Figure 12.16. Cumulatif de charge de la méthode des blocs programmés (d’après [SON 07])
Selon cette méthode d’essais, la distribution usuelle est gaussienne mais il est pos-
sible de simuler des cumulatifs différents en déformant la distribution (figure 12.17).
La forme du cumulatif peut être définie par le facteur ν selon l’équation :
ν
ln Hi = [1 − (Sai /Samax ) ] ln HO [12.4]
ν Type de chargement
∞ amplitude constante
4 pont routier
2 signal gaussien stationnaire
1 chargement typique dû à la rugosité de la route
0,8 chargement typique dû à la houle ou au vent
Figure 12.18. Procédure pour générer un signal d’amplitude variable (pics et vallées)
d’après une matrice de transitions
contraintes tourne par rapport à la matière, les contraintes principales n’évoluent pas
de façon proportionnelle les unes par rapport aux autres). Dans ces conditions, de
nombreux travaux [DIE 89] ont montré que la durée de vie en fatigue dépend de la
forme du trajet de chargement. Aussi pour tester une éprouvette ou une structure
sous ce type de chargement, il est indispensable de veiller à ce que l’evolution
temporelle des différents efforts appliqués reste, tout au long de l’essai, conforme
aux signaux de commande. En effet, certains systèmes de pilotage n’asservissent
pas l’évolution temporelle de chaque effort, mais uniquement la valeur des efforts
appliqués indépendemment du temps. Dans ce cas, les extréma des signaux (pics
et vallées) sont bien respectés mais pas la non proportionnalité du chargement. Il
convient d’être particulièrement vigilant lors d’essais longs ou très longs (plusieurs
semaines d’essais), faute de quoi les résultats ne sont pas représentatifs des conditions
choisies.
Dans le premier cas, l’essai consiste à répéter une séquence temporelle. On se retrouve
donc dans une configuration analogue à celle d’essais sous séquences standardisées.
Dans le second cas, le chargement temporel évolue en temps réel (il n’y a pas de
répétition de séquence).
Figure 12.19. Génération d’un signal de chargement SX (t) d’après sa DSP [PIT 01]
Figure 12.20. Principe des essais de simulations sous chargements d’amplitude constante ou
variable [SON 07]
Enfin, la fréquence d’essai doit être précisée si celle-ci est constante durant la
totalité de l’essai. Par ailleurs il est bien entendu nécessaire d’indiquer le critère d’arrêt
de l’essai et le nombre de séquences lors de cet arrêt, ainsi que l’environnement qui
peut avoir un effet important sur la durée de vie de la structure (air, brouillard salin,
tempéature, etc.).
5. La comparaison de la forme des cumulatifs de charge d’un même signal obtenu selon la
méthode des dépassements de niveaux et celle des étendues appariées permet de savoir si la
valeur moyenne du signal fluctue ou non [SON 05].
Fatigue sous chargements d’amplitude variable 231
– L’environnement dans lequel les essais ont été effectué doit être précisé : tempé-
rature, humidité (en particulier pour les matériaux composites à matrice organique),
environnement corrosif, etc.
Lors d’essais sur des structures à comportement non linéaire (suspension de véhicule
par exemple), il faut indiquer la densité spectrale de puissance (DSP) des signaux.
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Si les chargements sont multiaxiaux, il convient de documenter les DSP de tous les
efforts, en plus des indications précédentes pour chaque effort. On conservera aussi
avantageusement les enregistrements temporels de tous les efforts afin de connaître
précisément le trajet de chargement (figure 12.21). L’asservissement du déphasage
entre chaque effort est indispensable afin de garantir la constance d’une séquence à
l’autre, de la proportionnalité (ou non) du trajet de chargement. L’illustration de la
non proportionnalité de ce dernier peut se faire dans des diagrammes où l’on trace
l’évolution d’une force en fonction d’une autre (figure 12.22).
Certains auteurs indiquent dans la littérature les premiers moments statistiques des
signaux (valeur moyenne, valeur efficace) ou bien une contrainte équivalente. Rete-
nons que ces indications peuvent compléter les précédentes mais ne sont pas suf-
fisantes. Par exemple, des signaux différents peuvent avoir la même valeur efficace
[SON 89].
essais de simulation sous chargements d’amplitude variable passe donc par la connais-
sance de ces diverses influences afin de pouvoir transposer à la pièce réelle les résultats
obtenus au banc d’essai ou bien par simulation numérique. Ces effets sont également
importants à connaître lorsqu’il s’agit de comparer des solutions technologiques tes-
tées dans des conditions qui ne sont pas strictement identiques.
de propagation de fissure (figure 12.23) [SCH 03, SCH 91] ou bien lors d’essais à
l’amorçage de fissure lorsque les plus grands cycles de chargement correspondent
au domaine de la fatigue oligocyclique. L’étude de la fatigue des structures sous des
chargements couvrant à la fois la fatigue oligocyclique et la fatigue à grande durée de
vie reste actuellement un sujet de recherche.
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Figure 12.23. Effet de l’ordre d’application des niveaux de chargements sur la propagation de
fissure dans des toles en 2024-T3 [SCH 03]
Lors d’essais sous chargements à bande étroite, les variations du facteur d’irrégu-
larité, I, affectent peu la durée de vie aussi bien à l’amorçage de fissure que dans la
phase de propagation. Selon Gassner [GAS 76] ceci est vrai tant que le facteur d’irré-
gularité est compris entre 1 et 0, 85. Ceci est confirmé par [LE 94]. Par contre, pour
des signaux à bande large (c’est-à-dire pour de faibles valeurs de I) la durée de vie
dépend notablement du facteur d’irrégularité.
Ceci s’explique à la fois par l’effet moins endommageant des cycles de faible
amplitude (d’autant plus nombreux que I est petit), mais aussi par l’effet de la valeur
moyenne de ces cycles. Cette dernière fluctue en effet de façon importante dans des
signaux à bande large (figure 12.8, paragraphe 12.2.2.3). Ainsi, entre plusieurs signaux
à même valeur efficace, Jacoby [JAC 70] recommande de choisir les signaux à bande
étroite lors d’essais de validation afin de se placer dans une configuration discrimi-
nante (ou sécuritaire).
Ceci peut avoir des conséquences importantes pour l’allègement d’une structure.
Par exemple sur la figure 12.25, pour garantir une durée de vie de 108 cycles, la section
résistante d’un arbre supportant une même charge axiale variable, pourra être beau-
coup plus petite sous spectre linéaire (1,9 fois sur cet exemple) que sous chargement
d’amplitude constante. Le choix du spectre (c’est-à-dire sa représentativité par rapport
aux chargements de service) utilisé dans des essais de simulation ou bien dans un cal-
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cul de durée de vie est donc fondamental dans une démarche de dimensionnement en
fatigue sous chargement d’amplitude variable.
Figure 12.24. Effet de la forme du spectre sur la durée de vie de joints soudés en acier E36
(d’après [RAB 03])
Compte-tenu de la durée parfois trés longue (d’un jour à plusieurs semaines) des
essais de fatigue sous chargements d’amplitude variable, les ingénieurs ont cherché
Fatigue sous chargements d’amplitude variable 237
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à réduire la durée de ces essais. Plusieurs façons de procéder sont possibles, mais
il convient d’être vigilant sur la représentativité des réductions utilisées. Le retour
d’expérience reste indispensable dans une démarche industrielle prédictive ou de vali-
dation.
Figure 12.26. Différentes façons de réduire la durée des essais (d’après [BER 02])
Récemment Banvillet et al. [BAN 06] ont proposé une technique originale de
réduction de la durée des essais de fatigue multiaxiale sous chargements d’ampli-
tude variable. Elle repose sur le concept d’une amplitude de contrainte seuil, σ ⋆ ,
inférieure à la limite de fatigue conventionnelle et propre à chaque matériau. Selon
cette approche des amplitudes de contraintes inférieures à σ ⋆ n’endommagent pas le
matériau, alors que des cycles d’amplitude supérieure à ce seuil participent à la propa-
gation de l’endommagement mésoscopique si ils sont mélangés à des amplitudes plus
élevées. La limite de fatigue est alors considérée comme une limite de non fissuration
macroscopique, le seuil σ ⋆ est vu comme une limite de non fissuration mésoscopique.
Par l’intermédiaire du travail de déformation fourni au matériau par cycle de charge-
ment, ce seuil est transposable à un état de contraintes multiaxial. Avec cette technique
le nombre de répétition du spectre de chargement est le même avec le signal modifié
qu’avec le signal originel. La durée de l’essai est réduite car la longueur du spectre de
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chargement est plus petite, mais la forme du spectre est modifiée (figure 12.27), sans
choix arbitraire du niveau de filtrage et sans augmentation des contraintes maximales.
Il est par ailleurs intéressant de noter que cette technique n’utilise pas de méthode
de comptage de cycles, son résultat ne dépend donc pas du choix de la technique de
comptage.
L’objectif de cette partie n’est pas de présenter les diverses méthodes de calcul de
durée de vie en fatigue multiaxiale sous chargements d’amplitude variable. Un cha-
pitre de cet ouvrage est consacré à ce sujet qui reste encore ouvert puisqu’aujourd’hui
aucune méthode ne fait l’unanimité. Cette partie présente simplement la méthodologie
générale utilisée par bon nombre de méthodes d’estimation de la durée de vie. Le lec-
teur retrouvera ici plusieurs notions préalablement abordées dans le présent chapitre.
240 Fatigue des matériaux et des structures 2
7. De multiples lois de cumul d’endommagement ont été proposées dans la littérature [FAT 98].
Fatigue sous chargements d’amplitude variable 241
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Figure 12.28. Méthodologie générale de calcul de durée de vie en fatigue sous chargement
d’amplitude variable
242 Fatigue des matériaux et des structures 2
diaire d’une variable de comptage. Il s’agit d’un scalaire (une contrainte équivalente,
la contrainte normale à un plan matériel, une quantité énergétique, etc.). Lorsque les
cycles de contraintes (et/ou de déformations sont extraits) l’endommagement élémen-
taire associé est calculé. Chaque méthode de cumul d’endommagement utilise alors
une variable d’endommagement et une règle de cumul de l’endommagement particu-
lière [FAT 98, SCH 03].
Avec de telles méthodes définir la notion de cycle sous chargements non propor-
tionnels n’est plus nécessaire. Le résultat de la méthode de calcul de durée de vie ne
dépend plus du choix de la technique de comptage. Rappelons que dans la méthodolo-
gie générale décrite précédemment (figure 12.28), comme chaque méthode de comp-
tage compte des cycles différents, le choix de la technique de comptage influence la
durée de vie calculée. Ces raisons font que les recherches actuelles s’orientent vers de
telles approches sans comptage de cycles.
WIR 80] le comptage des cycles peut être effectué de façon approchée dans le domaine
fréquentiel. Les méthodes fréquentielles permettent d’exprimer la durée de vie d’une
pièce à l’aide de la puissance moyenne (au sens du traitement du signal), de la variance
du signal ou d’un moment statistique particulier.
12.6. Conclusion
Bien que complexes, longs et onéreux, les essais de fatigue mutiaxiale sous charge-
ments d’amplitude variable présentent de nombreux avantages encore inaccessibles
(ou de façon trés imparfaite) par les calculs :
– localiser les zones d’amorçage des fissures de fatigue en tenant compte des fac-
teurs extérieurs, notamment ceux liés à la géométrie de la pièce, aux procédés de fabri-
cation, aux interactions entre pièces lorsqu’il s’agit d’ensembles mécaniques (train
avant de véhicule automobile, boîte de vitesses, fuselage d’avion, etc.) ;
– tenir compte des effets de surcharge ou de sous-charge ;
– comparer des solutions technologiques (d’assemblages ou de procédés de fabri-
cation par exemples) pour réaliser une même structure de différentes façons ;
– quantifier la dispersion des durées de vie en service de façon représentative par
rapport à la réalité afin d’éviter des surdimensionnements excessifs ;
– optimiser (pour alléger) la conception d’une pièce par rapport à une conception
sous chargements multiaxiaux d’amplitude constante (plus éloignés de la réalité) ;
– valider un dimensionnement dans un but de certification (par exemple dans le
domaine aéronautique).
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[WAN 96b] WANG C., BROWN M., « Multiaxial random load fatigue : life predictions
techniques and experiments », dans A. Pineau, G. Cailletaud, T.C. Lindley (dir.),
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the Structural Division, vol. ST7, p. 1593-1607, juillet 1980.
[WIR 95] WIRSHING P., PAEZ T., ORTIZ H., Random vibrations, Wiley-Interscience, New
York, 1995.
Index
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dislocations, 42, 60, 68, 73, 75, 76, 127, 135, 140, 141, 143, 145, 149, 160,
131, 143, 152, 157, 162, 173, 176 165, 169, 186, 188, 191
dispersion, 23, 27, 164, 211, 231, 244 effectif, 82, 86, 191
dissolution, 125-129, 141, 143-145 efficace, 82, 89
ductilité, 163 facteur de concentration de contrainte, 22,
Dugdale, 34, 47, 112, 121 23
fatigue
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joint(s) de grain, 25-28, 39, 41, 42, 73, propagation, 17-19, 21-36, 38-44, 46, 48-
132, 143, 154, 167-169 57, 59, 60, 62, 66, 71, 73, 76-79, 81,
82, 84, 88, 90-93, 108, 109, 113, 114,
L 120-122, 125-127, 130, 132, 133, 135,
139, 140, 145, 147, 149, 150, 152,
laiton(s), 72, 75, 151
159-161, 163-177, 179-181, 183-185,
limite de fatigue, 19, 126, 158, 210, 220,
187-197, 198-203
236, 238, 239
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Préface
Paul C. PARIS
et de résultats d’essais
2.4.1.3. Estimation des paramètres µ et σ
2.4.1.4. Conclusions
2.4.2. Méthode de l’escalier
2.4.2.1. Règles d’exécution de la méthode de l’escalier
2.4.2.2. Utilisation des résultats
2.4.2.3. Précisions de m et s
2.4.2.4. Remarque sur l’application pratique de la méthode de l’escalier
2.4.3. Méthode d’itération
2.4.3.1. Règle d’exécution des essais selon la méthode d’itération
2.4.3.2. Estimation de S(p), amplitude de contrainte pour laquelle
la probabilité de rupture est p
2.4.3.3. Conditions et mode d’emploi de la méthode d’itération
2.4.3.4. Précision de l’estimation
2.4.3.5. Exemple d’application
2.4.4. Méthode des K éprouvettes non rompues
2.4.4.1. Principe de la méthode
2.4.4.2. Propriétés statistiques du résultat
2.4.4.3. Exemple d’application
2.4.5. Choix de la méthode d’essais
2.4.5.1. Méthodes d’estimation approchée
2.4.5.2. Méthodes d’estimation de précision moyenne
2.4.5.3. Méthodes précises d’estimation
2.5. Représentations mathématiques et méthodes de tracé de la courbe de Wöhler
2.5.1. Introduction
2.5.2. Représentations mathématiques de la courbe de Wöhler
2.5.3. Méthodes d’ajustement d’une courbe de Wöhler à des résultats d’essais
2.6. Estimation du nombre de cycles N, pour un niveau d’amplitude
de contrainte donnée
2.6.1. Principe
2.6.2. Mise en œuvre
2.6.3. Application
Sommaire du volume 1 255
4.5. Bibliographie
Index
Sommaire du volume 2
TRAITÉS MIM
Les noms qui apparaissent en regard de chaque titre correspondent aux coordonnateurs
des ouvrages.
Comité scientifique
■ GÉOMATÉRIAUX
série dirigée par Félix Darve, INPG ENSHMG
■ MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
série dirigée par Gilles Pijaudier-Cabot, Ecole Centrale de Nantes
■ MATÉRIAUX ET MÉTALLURGIE
série dirigée par André Pineau, Ecole des Mines de Paris
■ MATÉRIAUX FONCTIONNELS
série dirigée par Christian Lexcellent, Université de Franche-Comté
■ MÉCANIQUE DES FLUIDES
■ MÉTHODES NUMÉRIQUES EN MÉCANIQUE
série dirigée par Piotr Breitkopf, Université de Technologie de Compiègne
■ PHYSIQUE ET MÉCANIQUE DES SURFACES
série dirigée par Jamal Takadoum, ENSMM
II Liste des ouvrages du TRAITÉ MIM
Série GÉOMATÉRIAUX
sous la direction de Félix Darve
Sols urbains,
Breysse Denys et Kastner Richard
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Modèles de comportement des sols et des roches Vol.1. Elastoplasticité des sols et
des roches,
Hicher Pierre-Yves et Shao Jian-Fu
Modélisation numérique 1 et 2,
Breitkopf Piotr et Knopf-Lenoir Catherine,
Maillage et adaptation,
George Paul-Louis
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Série POLYMÈRES