Japon
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Japon
Lycée de Thiaroye
Leçon 10 : Le Modèle économique japonais caractéristiques et problèmes
Introduction
Le Japon, 3epuissance économique mondiale derrière les USA et la Chine ( PIB de 5383 milliards de
dollars en 2021(6% du PIB mondial), une croissance du PIB prévue de 3,8% en 2022/2023), la 2e asiatique
derrière la Chine, est un des pôles de la Triade. Pour autant le Japon ne dispose d'aucun des facteurs
traditionnellement reconnus de la puissance d'un Etat : superficie réduite, poids démographique
moyen, une population vieille, une dépendance énergétique, aucune richesse naturelle abondante,
un territoire aux contraintes naturelles fortes, le Japon interpelle par sa réussite économique.
I°)- Les caractéristiques du modèle économique japonais
Les instruments du succès économique japonais :
1°)- Le rôle de l’Etat
Depuis « l’ère Meiji » (1868-1912), l’état japonais s’est engagé comme principal acteur dans la modernisation
et le développement de l’économie. Il est à la fois pilote et régulateur grâce à des structures de production
comme le MITI = (Ministry of International Trade and Industry), actuellement le METI (le Ministère de
l’Economie du Commerce Extérieur et de l’Industrie du Japon), la banque du Japon et le ministère des finances
qui assure la compétitivité par l’allègement de la fiscalité et qui apporte son soutien au secteur bancaire, la
réduction des dépenses militaires et sociales. L’état entretient des liens privilégiés avec les milieux d’affaires,
dominés par de puissants groupes d’entreprises, les Keiretsu, organisés à partir de capitaux croisés d’origine
bancaire. Ces Keiretsu ont eu une influence déterminante sur l’essor économique du pays. Ces groupes
disposent de sociétés de commerce, les sogo shosha, qui prospectent les marchés et contrôlent une grande
partie du commerce extérieur japonais (exportations comme importations). Ils contrôlent également une partie
de la distribution intérieure du Japon, rendant plus difficile la pénétration dans ce pays des produits étrangers
qui concurrencent les produits de leurs maisons mères. Ils s’appuient sur un réseau de PME ou PMI très
dynamiques, sous-traitantes et parfois familiales. La concertation est de mise entre les entreprises et entre le
pouvoir politique et les entreprises à travers la définition des stratégies économiques.
2°)- Le dualisme économique
Il se traduit par la coexistence entre les puissants conglomérats et les petites et moyennes industries (P.M.I) et
petites et moyennes entreprises(PME). Ces deux acteurs opposés, organisent la production. Nés du
démantèlement et de la réforme des Zaibatsu, les conglomérats ou Keiretsu regroupant chacun plusieurs
sociétés pilotées par une puissante banque qui assure la survie du groupe. C’est l’exemple de Mitsubishi,
Mitsui, Sumitomo, Yasuda, Honda, Toyota, Nippon Steel. Chaque conglomérat contrôle un pôle commercial,
les Sogo Shosha leaders japonais de l’Import-Export. Les PME sont des entreprises qui ont moins de 300
salariés. Elles sont très dynamiques car elles emploient 75% des effectifs réalisant plus de la moitié de la
production manufacturière concentrant 90% de l’activité industrielle et constituant les sous-traitants des
grands groupes. Leur service dépend de leur faculté à s’adapter aux fluctuations du marché et de l’économie.
3°)- Une société originale
Le Japon compte 126 266 457 d’habitants (2022) dont les 80% s’entassent avec des activités sur le littoral
dans un espace très réduit (60 000 km²). Ce processus de littoralisation des hommes et des activités
correspond à un choix de société liée aux conditions naturelles. La cohabitation est facilitée par des rapports
sociaux hiérarchiques fondés sur le modèle familial hérité de la religion shintoïste. C’est ce qui explique
l’attachement du japonais à son entreprise et l’ambiance qui règne dans le travail. La société japonaise est très
bien formée avec un système éducatif très élitiste. L’école est, au Japon, très prestigieuse, et le métier
d’enseignant très considéré, les élèves, ont beaucoup de travail, aucune coupure pour les vacances d’été :
diverses obligations pour se rendre régulièrement à l’école, c’est pourquoi au Japon 90% des jeunes ont un
diplôme équivalant au baccalauréat. L’ardeur au travail caractérise aussi la main d’œuvre japonaise. On peut
même parler de «religion du travail» se manifestant par de nombreuses heures supplémentaires et seulement
20 jours de congés payés par an contre 36 en Allemagne. L’éthique du travail au Japon est une réalité avec un
sens de la perfection, une passion de l’excellence. Par ailleurs la société japonaise a un niveau de vie parmi les
plus élevés du monde comme en atteste le taux d’épargne qui constitue 13% du revenu annuel. La combinaison
de ces différents éléments a permis au japon de se hisser au 3 e rang mondial 40 ans après les bombardements
d’Hiroshima et de Nagasaki
ll. L’efficacité du système économique japonais
La puissance japonaise se manifeste à travers ses performances industrielles, commerciales et financières.
1. une industrie très présente
La manifestation la plus évidente de la puissance japonaise est la place de son industrie qui fournit plus de 20%
de la production industrielle mondiale, emploie 24,2% des actifs et constitue plus de 28,7% du P.I.B. Dans
beaucoup de domaines, le japon a un palmarès exceptionnel grâce à des productions massives et de qualité. Le
secteur industriel est très diversifié : le Japon fabrique des produits de base : acier, papier, il est le leader
mondial de la sidérurgie, de la construction navale (45% de la production mondiale), de la robotique, de la
biotechnologie, de la nanotechnologie, des énergies renouvelables. Le japon est très présent dans la
pétrochimie (2e rang mondial) et dans la construction automobile. D’ailleurs, la construction automobile
japonaise a occupé la première place de 1980 à 1994. Parmi les grandes firmes automobiles on peut citer
Toyota (1errang mondial) et Nissan (4 e) dans le domaine des textiles synthétiques, le japon a également réussi
des percées remarquables. Ces performances ont parmi au japon d’atteindre un taux de croissance moyenne
comprise entre 10 et 15% par an jusqu’au premier choc pétrolier (1973). Ces industries « énergétivores » qui
dopaient la croissance sont alors sévèrement touchées. La réorientation parait indispensable pour relancer
l’économie. Ainsi les industries pollueuses sont en partie délocalisées dans la sous-région surtout en chine. Les
industries de pointe et de haute technologie constituent l’orientation essentielle pour ce troisième millénaire :
construction électrique et électronique, informatique, robotique, biotechnologies. Dans ce domaine on peut
citer de grands groupes de renom comme Sony, Toshiba, Hitachi…. L’industrie automobile a subi des
modifications. Elle s’est fortement installée à l’étranger et s’est associée avec d’autres groupes exemple :
Toyota- Renault. Une bonne partie des bénéfices générés par ces industries sont alloués à la Recherche-
Développement (dépenses de R-et-D comptent pour 3,6% du PIB contre 2,6% (USA) et 2,1¨(France). Les
entreprises japonaises y contribuent à hauteur de 77% contre 49% aux Etats Unis et 70% en Allemagne. La
majeure partie de la production est destinée à la vente, ce qui fait du japon une puissance commerciale.
2°)- Le commerce et les finances des secteurs clés
Le japon est la 4e puissance commerciale mondiale après les Etats Unis, l’Allemagne et la Chine. Contrairement
aux USA, le japon réalise le premier excédent commercial du monde ; mais maintenant son solde commercial
est déficitaire (-69.6 milliards de dollars). Pour 2021 par exemple, la balance commerciale du japon affiche un
déficit de 1,47 mille milliards de yens (11,2 milliards d’euros) alors qu’elle était excédentaire l’année
précédente. Les exportations portent exclusivement sur les produits industriels comme les automobiles, les
navires, les textiles, les produits électriques et électroniques ainsi que l’immatériel comme les jeux électriques
et les bandes dessinées (les Mangas) où le japon assure 60% des programmes mondiaux. Les denrées
alimentaires, les matières premières et énergétiques, des équipements et autres machines occupent les
importations. Le japon se présente comme «un vendeur surdoué et agressif » grâce à des sociétés de
commerce, le sogo shosha qui se constitue le fer de lance du commerce nippon. En outre, le consommateur
japonais a un comportement très nationaliste, c'est-à-dire une habitude de consommer d’abord japonais. Le
japon est une grande puissance financière symbolisée par la bourse de Tokyo. Onze des plus grandes banques
mondiales sont japonaises comme en témoignent les investissements directs à l’étranger (IDE) ; selon les
derniers chiffres de l’OCDE, au premier semestre 2021, les entrées d’IDE au Japon se sont élevées à
16,8 milliards de $. Cela est lié sans doute à l’épargne exceptionnelle aux excédents commerciaux
systématiques et une bonne cotation du Yen. Malgré la crise qu’il traverse, le japon demeure le 2 e créancier du
monde, le 1e pays donateur d’aide publique au développement surtout en Asie où il accroit son influence.
Toutefois le rôle du yen reste limité, car les USA y veillent. Dans les années 80, ils forcent le japon à réévaluer
sa monnaie car il utilisait sa sous-évaluation pour faciliter ses exportations. Ces performances spectaculaires à
la fois séduisantes et inquiétantes n’ont pas été réalisées sans incidents, montrant ainsi les limites de la
puissance et du modèle économique japonais.
lll°)- Les limites de la puissance et du model économique japonais
1-Un espace déséquilibré
Parmi les «caractères géographiques dominants » du Japon, il faut retenir :
L’insularité : l'archipel de 377 800 km², se compose de 6852[] îles dont les quatre principales sont
(Hokkaido= 79 000 km²), (Honshu= 228 000 km²), (Shikoku=19 000 km²) et (Kyushu=36 000 km²),
s'étirant sur plus de 2500 km du nord au sud avec 97% du territoire à elles seules. Cette insularité
pose le problème des communications d'où la création d'un tunnel sous-marin de 54 km reliant
Honshu à Hokkaido notamment ou de ponts géants.
L’exiguïté : les îles sont montagneuses (71% du territoire contre 29% de plaines) et laissent peu de
place aux plaines littorales. Cela explique en partie les contrastes de peuplement entre la mégalopole
et les montagnes. Si les plaines littorales ne sont pas absentes du « Japon de l'envers » (le Nord du
Japon), les densités de population y sont faibles du fait de la rudesse des hivers et de l'absence de
site portuaire favorable.
Le milieu naturel du japon est donc caractérisé par l’exigüité (étroitesse) des terres et la rigueur des
manifestations climatiques (froid, neige au nord en hiver et typhons les côtes en été) sismiques et volcaniques.
Par exemple, le tremblement de terre de Kobe en janvier 1995 a fait 5500 morts et 28 000 sinistrés. Le
caractère montagneux de l’archipel japonais limite les terres cultivables. Ainsi, l’espace agricole ne suffit pour
satisfaire les besoin d’une population nombreuse et de la forte poussée urbaine. Le Japon peut donc être
considéré comme une terre violente, hostile à l’implantation humaine et aux activités économiques. En raison
de ces contraintes naturelles, l’organisation de l’espace japonais est déséquilibrée. On distingue : d’un côté, le
japon de « l’endroit » sur la côte pacifique, correspondant au poumon économique, la mégalopole Tokyo-
Nagoya -Kobe ; Tokyo est efficacement reliée aux métropoles mondiales (1 er ensemble portuaire et 2e aéroport
du monde, concentre des pouvoirs mondiaux, 2/3 des sièges sociaux des grandes entreprises japonaises, 85%
des établissements financiers étrangers, 2e place financière du monde, 1/3 de la production industrielle, la
concentration des hommes et des activités est fortement liée à l'exiguïté du territoire, la mégalopole
concentre plus de 100 millions d'habitants c'est-à-dire environ 85 % de la population japonaise sur un
ruban de 1300 km.
). De l’autre côté, le japon de « l’envers » sur la côte de la mer du japon qui fait figure de désert humain et
économique. Cette forte concentration des hommes et des activités entraine une dégradation et la saturation
du littoral posant des problèmes écologiques, environnementaux et sanitaires. L’état s’est engagé dans un
vaste programme de désengorgement de la mégalopole afin de rééquilibrer l’espace.
2) -Le poids de la dépendance et l’endettement
La dépendance se manifeste dans le domaine énergétique ainsi que dans le domaine agricole. En effet le japon
ne possède aucune ressource minière significative, et son agriculture, bien que surprotégée et très coûteuse
est largement déficitaire il doit donc exporter pour payer la facture. Le japon dépend fortement du marché
extérieur notamment américain. L’économique japonaise a donc des liens très étroits avec la conjoncture
mondiale et subit les effets de ses fluctuations à court terme, ainsi, la réévaluation du yen gène énormément
les exportations poussant les firmes à délocaliser vers des pays à bas salaires. Le Japon a le ratio dette/PIB le
plus élevé au monde : estimé à 256,9% du PIB en 2021, il devrait suivre une tendance baissière sur l’horizon de
prévision (252,3% en 2022 et 250,8% en 2023)
Le Japon a une faiblesse quant aux ressources naturelles (absence de pétrole, de gaz, dépendance
agricole...). Le Japon parvient donc à surmonter les handicaps de son territoire signe de sa puissance.
- Mais ces éléments naturels n'ont pas que des côtés négatifs : le volcanisme présent sur l'archipel
permet la géothermie, le tourisme thermal ; les typhons sont autant redoutés qu'espérés car
apportant l'eau nécessaire à la riziculture. Mais surtout la zone d'économie exclusive (ZEE) permet au
Japon de multiplier sa surface par 12 et donne au pays des droits de souveraineté en matière
d'exploitation, de conservation des ressources et d'exploration des eaux des fonds et sous-sols
marins.
3°) -Une société qui s’interroge
La panne de la croissance japonaise, due à des effets conjoncturels, et structurels, a affecté la société. En
premier lieu, le vieillissement de la population pose un problème de pénurie de main d’œuvre. Selon les
projections démographiques de l’institut national de recherche japonais sur la population et la sécurité sociale,
l’Archipel devrait compter moins de 100 millions d’habitants d’ici à 2050 contre 126 millions aujourd’hui. Le
Japon souffre d’un des taux de natalité les plus bas du monde, très en dessous du seuil de renouvellement des
générations. Le pays est actuellement en déclin démographique. En 2022 la population va diminuer de 149 115
personnes (1 047 595 naissances contre 1 .266.213 décès.
L’Archipel a en effet l’une des plus basses fécondités du monde 1,42 enfant en moyenne par femme et
l’espérance de vie la plus élevée de la planète. Plus de 27% de la population ont plus 65 ans contre 21% en
Allemagne. En second lieu, la récession économique fait apparaitre le phénomène de la pauvreté ainsi, les
suppressions d’emplois se multiplient et on observe un taux de chômage de (3,0% en 2020, contre 2,7% en
2021).
4°)- Le Japon une puissance incomplète ?
-Faiblesses militaires, politiques et diplomatiques
L'article 9 de la constitution permet de comprendre la faiblesse de la puissance militaire du Japon
pendant de nombreuses décennies. Cette faiblesse est due à la défaite de 1945 : le japon a été prié
de réduire fortement son armée, il ne peut plus intervenir hors de ses frontières et s’est satellisé
autour de la puissance militaire et diplomatique américaine, donnant ainsi une impression
d’impuissance Aujourd'hui il intervient malgré tout de plus en plus dans le cadre de l'ONU. Mais
malgré sa maîtrise technologique, il ne dispose pas de l'arme nucléaire...
- Si son aide économique aux pays en développement a fortement augmenté, il joue un rôle limité
sur la scène politique internationale : à Tokyo pas de sièges de grandes institutions internationales,
ni de centres de décision stratégiques mondiales contrairement à New York. S'il est membre du G8,
du G20, de l’OCDE, le Japon n'a d'ailleurs toujours pas de siège permanent au conseil de sécurité de
l'ONU ; Pourtant, le japon est le 2e contributeur de L’ONU (19% du budget de L’ONU).
- Son influence culturelle est réduite par rapport à celles des USA malgré le succès de produits
culturels comme les mangas, jeux vidéo et celui de produits culinaires comme les sushis. - Un des
fondements de la réussite est remis en cause avec l'émergence d'un plus grand souci
d'individualisme au sein des jeunes Japonais qui réclament plus de loisirs et remettent en cause le
caractère impitoyable du système éducatif.
Conclusion :
Le Japon demeure encore aujourd’hui une des principales puissances mondiales. Le «pays du soleil
levant» est capable de se reconstruire après la défaite de 1945. Son économie présente cependant
des signes d’essoufflement depuis les années 1990. Sa population vieillissante représente un
véritable défi pour l’économie avec une pénurie de main d’œuvre. La catastrophe de Fukushima
(mars 2011) a remis en cause une partie de son modèle de développement et montre que le Japon
reste une puissance vulnérable.