Juste La Fin Du Monde Lagarce Fiche de Lecture

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Juste la fin du monde, Lagarce : fiche de lecture

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Par Amélie Vioux

Voici une fiche de lecture complète


(résumé et analyse) sur Juste la fin du
monde de Jean-Luc Lagarce, au
programme du bac de français.

Juste la fin du monde est entrée au


répertoire de la Comédie- Française en
2008.

Cette pièce est particulièrement


intéressante car elle ne suit pas les étapes
traditionnelles de l’action dramatique, avec
un nœud, des péripéties et un
dénouement.

Dans le théâtre de Lagarce, c’est la parole


qui tient lieu d’action.

Les scènes apparaissent comme des


juxtapositions de tableaux et de soliloques qui se font écho et qui donnent peu à peu accès à
l’intériorité des personnages.

Fiche de lecture en vidéo

Watch Video At: https://youtu.be/vAMXra3OTzU

Lectures linéaires sur Juste la fin du monde :

1/7
Juste la fin du monde, prologue
Juste la fin du monde, partie I scène 1
Juste la fin du monde, partie I scène 2
Juste la fin du monde, partie I scène 3
Juste la fin du monde, partie I scène 8
Juste la fin du monde, partie I scène 9
Juste la fin du monde, partie I scène 10
Juste la fin du monde, partie II scène 1
Juste la fin du monde, partie II scène 2
Juste la fin du monde, partie II scène 3
Juste la fin du monde, épilogue

Dissertation :
L’étymologie grecque du mot crise, Krisis, vient du verbe Krinein qui signifie discerner,
juger, décider. En quoi cette étymologie éclaire-t-elle votre lecture de Juste la fin du
monde ?

Qui est Jean-Luc Lagarce ?


À la fois comédien, metteur en scène, directeur de troupe, dramaturge et même éditeur,
Jean-Luc Lagarce touche à tous les métiers du théâtre. Il écrit ses propres pièces et met
en scène Marivaux, Labiche, Ionesco.

En 1988, il apprend qu’il est atteint du sida et se sait condamné. Au printemps 1990, il
reçoit une bourse de la Villa Médicis et part 3 mois à Berlin pour rédiger Juste la fin du
monde.

Malgré sa mort prématurée en 1995, à l’âge de 38 ans, Jean-Luc Lagarce laisse derrière
lui plusieurs dizaines de pièces qui rencontreront un succès posthume.

Comment résumer Juste la fin du monde ?


La pièce s’ouvre sur un prologue : Louis, 34 ans, s’exprime seul sur scène : il va mourir et
décide de retourner dans sa famille pour annoncer la nouvelle.

Dans la première partie, Louis est accueilli par les membres de sa famille : sa mère, sa
sœur Suzanne, son frère Antoine et Catherine, la femme de son frère.

La mère se rend compte que Louis ne connaît pas Catherine.

Suzanne reproche à Louis de ne pas l’avoir prévenue de sa venue et évoque le vide de sa


vie.

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Catherine parle de ses enfants et du choix du prénom de son fils Louis. La mère raconte sa
vie familiale et ses souvenirs (le père, la voiture familiale, le rapport entre Louis et Antoine)
et demande l’âge de Louis. Catherine décrit la vie banale de son mari Antoine. Suzanne
dépeint Catherine. Chaque personnage est ainsi l’objet du discours d’un autre.

Les rapports entre les personnages sont tendus et des disputes éclatent. Antoine
notamment s’emporte contre Louis au sujet du motif de sa venue.

Suzanne reproche à Louis de s’être absenté pendant douze ans, sans jamais leur rendre
visite.

Dans un long monologue, Louis évoque la façon dont il a essayé de fuir la mort, de lui
résister pour finalement s’y abandonner.

Dans la deuxième partie, Louis décide de partir sans révéler sa mort prochaine.

L’annonce de son départ crée de vives tensions. Antoine veut en effet raccompagner Louis
à la gare mais Suzanne se propose également, provoquant la colère d’Antoine qui reproche
à sa sœur de vouloir tout le temps changer de plan.

Catherine dit qu’Antoine est « brutal » : ce mot déchaîne la colère de son mari qui devient
violent à l’égard de Louis.

Antoine revient sur ses souvenirs d’enfance et reproche à son frère de s’être toujours plaint
de ne pas recevoir assez d’amour.

Dans l’épilogue, Louis, post mortem, évoque une promenade nocturne au cours de laquelle il
n’a pas poussé « un grand et beau cri » comme il l’aurait souhaité : c’est son seul regret.

N.B : Juste la fin du monde a été adaptée au cinéma par Xavier Dolan en 2016. Tu peux
bien entendu regarder le film mais attention : il ne suit pas fidèlement l’œuvre de Lagarce et
plusieurs scènes, ajoutées par Xavier Dolan, ne figurent pas dans la pièce. Il ne faudra donc
pas confondre la pièce avec le film le jour du bac !

Quels sont les thèmes importants dans Juste la fin du monde ?

La famille

Dans Juste la fin du monde, la famille occupe une place centrale.

Ironiquement, Lagarce souligne que la scène se déroule un « dimanche, évidemment »,


moment symbolique de la réunion familiale.

Cependant, il y a un grand absent : le père. Louis et Antoine, les deux hommes de la famille,
semblent vouloir s’approprier cette place du père, mais la mère domine en chef de famille.

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On découvre que trois hommes de trois générations successives portent le prénom de
Louis comme dans la royauté française. La mère, dont le sentiment maternel est peu
perceptible (elle a oublié la date de naissance de son fils Louis), s’apparente à une régente
détentrice d’une couronne dont ses fils ne parviennent pas à se saisir.

La famille est ainsi présentée comme une cour parodique.

La difficulté à se comprendre

Les personnages ne parviennent pas à communiquer et les malentendus et quiproquos


provoquent des disputes, comme l’emportement d’Antoine sur le mot « brutal ».

Le plus souvent, les personnages soliloquent et le langage est fermé sur lui-même, en
forme de chiasme (A-B-B-A): « Ce n’est pas bien que tu sois parti, parti si longtemps / ce
n’est pas bien » ou « Je suis mal à l’aise / excusez-moi (…) excusez-moi / Je suis mal à
l’aise »

L’épanorthose, figure de style qui consiste à corriger ou nuancer une affirmation, est
abondamment utilisée.

Les personnages poursuivent une quête obsessionnelle du « mot exact », mais


ironiquement, cette quête ne porte pas ses fruits : les personnages tournent autour du réel,
sans parvenir à le nommer.

Le conflit

Lagarce met en scène la difficulté à communiquer, mais il montre aussi le culte de la


complication, la recherche de la crise pour la crise comme si c’était la seule manière
d’exister.

L’obsession psychologique des personnages qui se disputent sur chaque mot prête parfois
à sourire alors que la mort, elle vraiment tragique, n’émerge pas sur scène. Les
personnages se déchirent pour des broutilles tout en passant à côté de l’essentiel.

Le jugement
La famille est un véritable tribunal comme en témoigne le champ lexical du droit qui
parsème le texte (« m’accuser », « m’accable », « droit », « juste », « crimes »).

Catherine dit elle-même : « “je ne voudrais pas avoir l’air de vous faire un mauvais procès” »
tandis que Louis accepte d’endosser la culpabilité : «“et ces crimes que je ne me connais
pas, je les regrette, j’en éprouve du remords ”» (2e partie, scène 1).

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Louis est manifestement accusé de s’être absenté durant douze ans. Mais ce tribunal
familial juge de manière expéditive. Louis ne parvient pas à dire ce qui lui tenait à cœur et
les membres de la famille préfèrent le sacrifier pour retrouver leur équilibre familial.

Le temps et la mort

Le temps travaille et dévore les personnages.

Ainsi, ils répètent les verbes à des temps différents comme Catherine : « “Nous vous
avions, avons envoyé une photographie d’elle” » ou Louis : « “Cela me fait plaisir, je suis
touché, j’ai été touché” ».

Ces répétitions donnent l’impression que le temps se dilate et échappe aux personnages.
Quant à la mort, elle est le grand non-dit de ce texte : Louis est venu pour annoncer la
sienne mais il repart sans avoir rien révélé.

Quelles sont les caractéristiques de l’écriture de Lagarce ?

Une pièce tragique

Juste la fin du monde est structurée comme une tragédie avec le Prologue de Louis qui fait
songer au chœur tragique annonçant le destin des personnages.

Le prénom Louis porté par trois générations d’hommes inscrit l’histoire familiale dans une
lignée et donne une dimension héréditaire à cette histoire familiale.

La tension entre les deux frères relève de la rivalité fraternelle courante dans les tragédies
ou rappelle les figures de Caïn et Abel.

Quant à Louis, dont la mort est inéluctable, il incarne le héros tragique par excellence,
« L’Homme malheureux » selon Antoine.

Une pièce ironique

Mais on aurait tort de considérer Juste la fin du monde comme une pièce uniquement
tragique. Jean-Luc Lagarce n’est pas sans ironie à l’égard de ses personnages, comme le
souligne le titre de la pièce Juste la fin du monde. Alors que l’expression « La fin du
monde » renvoie à une situation apocalyptique, l’adverbe « juste » ajoute une touche de
distance et d’ironie qui dédramatise la situation.

Louis lui-même fait souvent preuve d’ironie, par exemple lorsqu’il répond à sa famille qui lui
propose de rester plus longtemps : « “Mieux encore […] je renonce à tout, j’épouse ma
sœur, nous vivons très heureux.” »

Une pièce lyrique

5/7
L’écriture de Lagarce est également lyrique. Derrière les répétitions et la parole mécanique,
on entend une musique.

Les retours à la ligne donnent à la parole des personnages une forme versifiée dans laquelle
les effets de rimes internes sont nombreux : « “il a le droit, ne lui dis rien / Je vais bien /
Suzanne et moi / ce n’est pas malin” » (2ème partie, scène 2).

Que signifie le parcours « Crise personnelle, crise familiale » ?


Juste la fin du monde met en scène une crise personnelle et une crise familiale.

Louis traverse tout d’abord une crise personnelle en raison de la mort imminente qui le
menace. C’est cette crise personnelle qui l’amène à revenir dans sa famille.

Mais son retour vient bousculer le quotidien ronronnant d’une famille traditionnelle. Louis
fonctionne comme un catalyseur : sa présence réveille les souffrances et les complexes
de chacun.

Le retour de Louis provoque une crise familiale

Le retour de Louis bouleverse l’équilibre familial et réveille les souffrances de chaque


membre de la famille.

Pour la Mère, c’est le retour du fils prodigue, écrivain, dont on n’a pas vraiment compris le
départ. Pour Antoine, c’est le retour du frère aîné rival qui réactive les complexes, les
passions et la jalousie. Pour Catherine et Suzanne, Louis est un miroir qui les rappelle à la
médiocrité et à la banalité de leur vie.

On comprend dès lors le procès familial fait à Louis, le chef d’accusation étant sa longue
absence. Dans le prénom « Louis », on peut d’ailleurs entendre le pronom « Lui », c’est-à-
dire celui que l’on pointe du doigt et qu’il faut sacrifier. Louis emploie d’ailleurs lui-même le
terme « “je me sacrifie” » (Partie I, scène 10).

La crise familiale qui se déroule prend des formes diverses. Tous les personnages se
disputent : Antoine et Catherine, Antoine et Suzanne, Suzanne et Catherine, La Mère et ses
enfants.

La violence d’Antoine est particulièrement spectaculaire. Tout oppose Antoine et Louis qui
apparaissent comme deux frères ennemis. Louis est écrivain, il a voyagé, tandis qu’Antoine
est ouvrier, père de famille, responsable. Louis est calme, poli ; Antoine est agressif,
« brutal ». Le retour de Louis réactive chez Antoine la jalousie fraternelle, le complexe
d’infériorité. Leurs échanges dégénèrent jusqu’à la menace physique (Antoine : « “Tu me
touches : je te tue” »).

6/7
La crise familiale se traduit également par une crise du langage. Les personnages sont
incapables de trouver les mots exacts, d’où l’inflation d’épanorthoses.

La crise familiale, symbole d’une cure psychanalytique ?

Cette réunion familiale peut également se voir comme une cure psychanalytique.

Selon Freud, trois instances sont présentes chez l’homme : le moi qui assure la stabilité et le
contact avec la réalité extérieure, le ça, lieu de pulsions qui ne supporte pas la contradiction
et le surmoi, instance morale qui rappelle les interdits.

Les personnages de Lagarce semblent symboliser ces trois éléments : la Mère serait une
sorte de surmoi (l’instance morale), Antoine le ça (les pulsions) et Louis l’inconscient qui
ne parvient pas à émerger et à dire la mort. La crise familiale symbolise alors la crise
personnelle.

Pour approfondir le parcours :

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regretteras pas cette série ! On se penche sur le parcours « crise personnelle, crise
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♬ son original – Amélie Vioux | Bac de français

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♦ Oh les beaux jours, Beckett : fiche de lecture
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♦ Roméo et Juliette, Shakespeare : résumé
♦ Le malade imaginaire, Molière [Fiche de lecture]
♦ Les Fausses confidences, Marivaux [Fiche de lecture]
♦ Le Cid, Corneille [fiche de lecture]

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