Rudolf Carnap Et La Mise À Mort de La Métaphysique Dans Le Monde
Rudolf Carnap Et La Mise À Mort de La Métaphysique Dans Le Monde
Rudolf Carnap Et La Mise À Mort de La Métaphysique Dans Le Monde
Résumé : L’abandon de la métaphysique est la conclusion définitive des critiques respectives de Gottlob
Frege, Bertrand Russell et Ludwig Wittgenstein sur cette discipline qu’ils jugent inapte à la construction du
monde, du fait de la confusion et d’interminables controverses suscitées par ses propositions qui sont totalement
déconnectées des faits empiriques, alors même que l’implémentation de la méthode logico-mathématique, déjà
en vigueur dans les activités scientifiques du Cercle de Vienne, l’aurait, soutient-on, aidé à surmonter ce
manquement. Influencé par ce verdict qui qualifie la métaphysique de savoir obsolète et insensé, Rudolf
Carnap, armé méthodiquement d’une analyse logico-mathématique du langage, passe directement de l’abandon
de la métaphysique à sa mise à mort, conformément au diktat d’un scientisme déclamatoire qui constitue
paradoxalement la religion et l’oxygène du Cercle viennois. Mais l’expertise attentive de la démarche et des
arguments de Carnap met en évidence leurs faiblesses, et établit l’immortalité et le rôle spécifique et nécessaire
de la métaphysique dans tout projet de construction du monde par l’homme et pour l’Homme.
Mots-clés-Analyse logico-mathématique, Critique, Langage, Métaphysique, Mort, Science .
Abstract : The abandonment of metaphysicsis the definitive conclusion of the respective criticisms of Gottlob
Frege, Bertrand Russell and Ludwig Wittgenstein on this discipline whichtheyconsiderunfit for the construction
of the world, because of the confusion and endlesscontroversiesaroused by itsproposalsthat are
totallydisconnectedfromempiricalfacts, even as the implementation of the logical and mathematicalmethod,
already in force in the scientificactivities of the Vienna Circle, Would have helpedit to overcomethisfailure.
Influenced by this verdict, whichdescribesmetaphysics as obsolete and senselessknowledge, Rudolf Carnap,
methodicallyarmedwith a logical and mathematicalanalysis of language, goesdirectlyfrom the abandonment of
metaphysics to itsdeath, in accordance with the diktat of a declamatoryscientismthatparadoxicallyconstitutes the
religion and oxygen of the VienneseCircle. But the careful expertise of Carnap'sapproach and arguments
highlightstheirweaknesses, and establishes the immortality and the specific and necessaryrole of metaphysics in
anyproject of the construction of the world by man and for Man.
I. INTRODUCTION
Sous la houlette de Moritz Schlick, la naissance du Cercle de Vienne en 1923 constitue un véritable coup
de massue pour la métaphysique qui, malgré la cohorte des flèches orientées vers elle par des empiristes et des
positivistes instruits par les prouesses scientifiques, a résisté comme un roc dans la tempête. Avec le Cercle de
Vienne, il ne s‟agit plus d‟une simple critique positiviste de cette philosophie spéculative qui, d‟après ses
pourfendeurs, a pris congé du réel pour se confiner dans la méditation rationnelle des choses abstraites ou
divines qui échappent totalement au contrôle du néo-positivisme scientifique qui se veut beaucoup plus incisif
que son prédécesseur doctrinal à savoir le positivisme d‟obédience comtienne. Il ne s‟agit non plus d‟un tribunal
au cours duquel le juge comtien accordera le droit de survie à la métaphysique, à condition qu‟elle accepte
d‟évoluer à la remorque de la science qui délimitera son domaine de réflexion et lui imposera la direction à
suivre. Il est question, pour les fondateurs et animateurs du Cercle de Vienne, d‟un procès sans appel dont le
dessein est de signer définitivement l‟acte de décès d‟une philosophie dont l‟incapacité à apporter des solutions
concrètes aux problèmes de l‟humanité ne fait plus l‟objet d‟aucun doute dans leur esprit. Dans cette optique,
chaque membre ou sympathisant du Cercle a le devoir scientifique de contribuer, que ce soit dans ses propres
V. CONCLUSION
La mise à mort de la métaphysique n‟est pas une génération spontanée chez Carnap. Ce crime
philosophique a été longtemps nourri par la fougue des critiques dirigées par Frege, Russell et Wittgenstein
contre la métaphysique. Pour ces détonateurs immédiats du cynique projet de Carnap, le dépassement de la
métaphysique s‟imposait à un moment où la construction du monde avait marre d‟une philosophie spéculative
dont les énoncés sont confus, insensés et controversés parce qu‟ils ne sont pas empiriquement vérifiables. La
métaphysique procédait encore, selon eux, d‟une logique traditionnelle beaucoup plus soucieuse de la cohérence
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